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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/927/2021

ATAS/437/2022 du 17.05.2022 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/927/2021 ATAS/437/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 mai 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o Résidence B______, à Confignon, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Philippe JUVET

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A.            a. Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé), né en 1963, invalide séjournant dans un centre spécialisé dans l'accueil des personnes cérébro-lésées adultes, perçoit des prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité depuis le 1er avril 2019.

b. Par décision du 7 août 2020, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a réclamé à l'intéressé la restitution de CHF 15'827.-, correspondant aux prestations versées en trop du 1er avril 2019 au 31 août 2020.

B.            Saisi d'une opposition, par décision du 25 février 2021, le SPC l'a admise, en ce sens qu'il a annulé la demande de remboursement et informé l'intéressé que des arriérés de prestations complémentaires lui seraient versés à hauteur de CHF 262.- pour la période précitée.

C.           a. Par acte du 11 mars 2021, l'intéressé, représenté par son curateur, a recouru contre cette décision sur opposition auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS), en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à l'intimé pour nouvelle décision. Il faisait valoir que l'autorité ne pouvait pas tenir compte d'une fortune mobilière sise à l'étranger, dans la mesure où malgré ses relances, la banque portugaise refusait de lui communiquer toute information au sujet du solde de ses avoirs, lesquels n'avaient pas pu être transférés sur son compte bancaire suisse.

b. Dans sa réponse du 7 avril 2021, l'intimé a conclu à la reformatio in peius de la décision entreprise, en indiquant avoir omis de prendre en considération les biens immobiliers sis au Portugal dont le recourant était propriétaire ainsi que le produit hypothétique de location, et en ajoutant que les avoirs bancaires à l'étranger avaient été à juste titre inclus dans les calculs.

c. Les 21 avril et 11 mai 2021, les parties ont maintenu leur position.

d. Dans son écriture spontanée du 27 mai 2021, le recourant s'est déterminé sur la duplique de l'intimé.

e. À la demande de la CJCAS, le 17 mars 2022, le recourant a produit en particulier:

      l'ordre de paiement international du 26 juin 2017 par lequel le montant de EUR 37'159.95 devait être viré du compte bancaire portugais dont la sœur du recourant était co-titulaire sur le compte de celui-ci auprès de la Banque Cantonale de Genève (ci-après : BCGE);

      les relevés attestant d'un solde nul du compte bancaire portugais au 8 juillet 2017, 31 décembre 2018 et 5 décembre 2019;

      un courriel de la banque portugaise indiquant notamment que les relevés précités étaient ceux existant avant la clôture du compte litigieux.

f. Dans ses observations du 4 avril 2022, l'intimé a persisté dans ses conclusions, en exposant que, après suppression des avoirs du compte bancaire portugais des calculs, la prise en compte de la fortune immobilière et du produit hypothétique de location conduisait néanmoins à réformer la décision attaquée au détriment du recourant.

g. Dans sa détermination du 22 avril 2022, le recourant a maintenu ses conclusions.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

3.1 Sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références). En ce qui concerne en revanche la procédure, et à défaut de règles transitoires contraires, le nouveau droit s'applique sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b; ATF 112 V 360 consid. 4a; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b).

3.2 Déposé après le 1er janvier 2021, le recours sera donc traité sous l'angle du nouveau droit de la LPGA (cf. ATAS/360/2021 du 15 avril 2021 consid. 3).

4.             Dans la mesure où la décision litigieuse porte sur les prestations complémentaires pour la période du 1er avril 2019 au 31 août 2020, soit sur une période antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, des modifications des 22 mars, 20 décembre 2019 et 14 octobre 2020, le présent litige est soumis à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U.18/07 du 7 février 2008 consid. 1.2). Les dispositions légales de la LPC seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

5.             Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC).

6.             L'objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui - dans le cadre de l'objet de la contestation déterminé par la décision - constitue, d'après les conclusions du recours, l'objet de la décision effectivement attaquée. D'après cette définition, l'objet de la contestation et l'objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l'objet de la contestation, mais non pas dans l'objet du litige (ATF 125 V 414 consid. 1b et 2 et les références citées).

En l'espèce, le litige porte sur le montant des prestations complémentaires pour la période du 1er avril 2019 au 31 août 2020, en particulier sur l'intégration dans les calculs des avoirs qui seraient détenus par le recourant sur un compte en banque au Portugal.

7.             Sur le plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-invalidité, conformément à l'art. 4 al. 1 let. c LPC.

8.             Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

8.1 Selon l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment: le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b); un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 37'500.- pour les personnes seules; si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire d'un immeuble qui sert d'habitation à l'une de ces personnes au moins, seule la valeur de l'immeuble supérieure à CHF 112'500.- entre en considération au titre de la fortune (let. c); les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (let. g);

Pour les personnes vivant dans un home ou dans un hôpital (comme en l'espèce), les cantons peuvent fixer le montant de la fortune qui sera pris en compte en dérogeant à l’al. 1 let. c. Les cantons sont autorisés à augmenter, jusqu’à concurrence d’un cinquième, ce montant (al. 2).

Le canton de Genève a fait usage de cette possibilité. Selon l'art. 2 al. 2 LPFC, pour les personnes vivant dans un home ou dans un établissement médico-social, en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de un huitième, respectivement de un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, après déduction des franchises prévues par cette disposition.

8.1.1 La fortune, au sens de l'art. 11 al. 1 let. b et c LPC, comprend toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l'assuré et qui peuvent être transformés en espèces (par le biais d'une vente ou d'un nantissement par exemple) pour être utilisés (Urs MÜLLER, Bundesgesetz über Ergäzungsleistungen zur Alters-, Hinterlassenen- und Invalidenversicherung, 2006 n. 35, Ralph JÖHL/Patricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Band XIV, Soziale Sicherheit, 2016, p. 1844 s n. 163). Ainsi, font notamment partie de la fortune : les gains à la loterie, la valeur de rachat d'une assurance-vie, l'épargne, les actions, les obligations, les successions, les versements en capital d'assurances, l'argent liquide (MÜLLER, op. cit., n. 35).

Cette notion englobe tous les revenus de la fortune mobilière et immobilière, y compris le produit transférable en Suisse d’une fortune qui se trouve à l’étranger (ch. 3431.01 des directives de l'office fédéral des assurances sociales (ci-après: OFAS) concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, dans son état au 1er janvier 2021 [DPC]).

8.1.2 En vertu de l'art. 17 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI – RS 831.301) dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020 , la fortune prise en compte est évaluée selon les règles de la législation sur l'impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque l'immeuble ne sert pas à l'habitation du requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, il est pris en compte à sa valeur vénale (al. 4), soit la valeur du marché (DPC, ch. 3444.02). Dans ses commentaires concernant la modification de l'OPC-AVS/AI entrée en vigueur le 1er janvier 1992, l'OFAS a relevé à propos de l'art. 17 al. 4 OPC-AVS/AI que la valeur vénale, soit la valeur qu'atteindrait un immeuble au cours de transactions normales, est en règle générale nettement plus élevée que la valeur fiscale; il ne se justifie pas d'effectuer une réévaluation jusqu'à concurrence de la valeur vénale tant que le bénéficiaire de prestations complémentaires ou toute autre personne comprise dans le calcul de ladite prestation vit dans sa propre maison; cela dit, il n'en va pas de même si l'immeuble ne sert pas d'habitation aux intéressés, et force est de penser qu'il convient alors de prendre en compte la valeur que l'immeuble représente véritablement sur le marché; il ne serait pas équitable de garder un immeuble pour les héritiers, à la charge de la collectivité publique qui octroie des prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P.13/01 du 25 février 2002 consid 5c/aa; RCC 1991 p. 424).

Si la valeur actuelle (valeur du marché) d'un immeuble n'est pas connue, on peut se fonder sur la valeur moyenne entre la valeur selon la législation sur l'impôt cantonal direct et la valeur d'assurance immobilière, pour autant que la valeur ainsi obtenue ne soit pas manifestement erronée. Quant aux immeubles sis à l'étranger, on peut se fonder sur une estimation établie à l'étranger s'il n'est pas raisonnablement possible de procéder à une autre estimation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_540/2009 du 17 septembre 2009 consid. 5.2; DPC, ch. 3444.03).

En ce qui concerne plus spécifiquement le produit de la fortune immobilière, il y a dessaisissement au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC lorsque les possibilités d'obtenir un revenu d'un immeuble ne sont pas exploitées ou ne le sont qu'insuffisamment. On doit admettre qu'il y a renonciation au revenu d'un immeuble lorsqu'il serait exigible de l'ayant droit - propriétaire, usufruitier ou locataire - et objectivement possible de mettre le bien immobilier à disposition d'un tiers moyennant finance. Une telle mise à disposition est objectivement possible lorsque la nature du droit d'utilisation le permet, lorsque le bien immobilier se prête à une exploitation à titre onéreux (Ralph JÖHL, Patricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in SBVR, 3ème éd. 2016 p. 1838 s. n. 157; pour un cas d'application : cf. notamment l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances P.33/05 du 8 novembre 2005 consid. 3; cf. également l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances P.37/03 du 15 octobre 2003).

Le revenu déterminant tiré d’un immeuble est celui qui pourrait effectivement être réalisé en cas de location, c’est-à-dire le loyer conforme au marché (cf. SVR 1997, EL n° 38 consid. 6). Il y a lieu de retenir un loyer conforme à l’usage local ou un revenu moyen reflétant le rendement pendant la durée de vie des bâtiments situés sur le terrain lorsque le bénéficiaire de prestations complémentaires n’habite pas le bien immobilier et que celui-ci n’est pas loué. La chambre de céans a confirmé que lorsqu’un immeuble n’est pas situé dans le canton de Genève, le recours à un taux forfaitaire de 4.5% de la valeur vénale retenu à titre de valeur locative (au sens large) ou de rendement de l’immeuble n’est pas excessif, et ce, dans la mesure où les conditions locales ne peuvent pas être déterminées aisément, contrairement aux immeubles situés dans le canton (cf. ATAS/306/2020 du 27 avril 2020 consid. 6 et les nombreux arrêts cités).

En ce qui concerne le taux de conversion applicable pour le calcul de la fortune immobilière et de la valeur locative y relative, il y a lieu d’appliquer les DPC. Bien que ces directives concernent les rentes servies, elles sont applicables par analogie aux autres éléments composant les revenus déterminants tels que la fortune immobilière (cf. notamment ATAS/951/2021 du 16 septembre 2021 consd. 14; ATAS/1146/2019 du 9 décembre 2019 consid. 8).

Selon le chiffre 3452.01 des DPC, pour les rentes et pensions qui sont versées en devises d’États parties à l’accord sur la libre circulation des personnes CH-UE ou à la Convention AELE, le cours de conversion applicable est le cours du jour publié par la Banque centrale européenne. Est déterminant le premier cours du jour disponible du mois qui précède immédiatement le début du droit à la prestation.

8.2 Quant aux dépenses, l'art. 10 LPC énumère - de manière exhaustive - les dépenses reconnues. Ce montant inclut notamment les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels de consommation d'énergie (électricité, gaz, etc.), de communication, de transport ou de loisirs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 5.1 et les références).

Selon l'art. 10 al. 2 LPC, pour les personnes qui vivent en permanence ou pour une longue période dans un home ou dans un hôpital, les dépenses reconnues comprennent : la taxe journalière; les cantons peuvent fixer la limite maximale des frais à prendre en considération en raison du séjour dans un home ou dans un hôpital; les cantons veillent à ce que le séjour dans un établissement médico-social reconnu ne mène pas, en règle générale, à une dépendance de l'aide sociale (let. a); un montant, arrêté par les cantons, pour les dépenses personnelles (let. b).

Sont en outre reconnus comme dépenses, pour toutes les personnes : les frais d’entretien des bâtiments et les intérêts hypothécaires, jusqu’à concurrence du rendement brut de l’immeuble (art. 10 al. 3 let. b LPC).

Selon l'art. 16 al. 1 OPC-AVS/AI, une déduction forfaitaire prévue pour l'impôt cantonal direct dans le canton de domicile s'applique aux frais d'entretien des bâtiments. À Genève, l'art. 20 al. 2 du règlement d'application de la loi sur l'imposition des personnes physiques dans sa teneur en vigueur dès le 11 novembre 2010 (RIPP - D 3 08.01) prévoit que la déduction forfaitaire, calculée sur la valeur locative selon l'art. 24 al. 2 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), est de 10%, si l'âge du bâtiment au début de la période fiscale est inférieur ou égal à 10 ans (let. a); 20%, si l'âge du bâtiment au début de la période fiscale est supérieur à 10 ans (let. b). Cette déduction s'applique même si la personne n'habite pas le bien immobilier dont elle est propriétaire (ATAS/1122/2013 du 19 novembre 2013 consid. 16a et les références citées). Il n'est pas possible de se fonder sur les frais effectifs d'entretien des immeubles. La déduction forfaitaire des frais d'entretien s'applique même si l'immeuble n'est pas situé dans le canton (ATAS/1122/2013 du 19 novembre 2013 consid. 16b).

9.             Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l'art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Selon l'art. 2A LPCC, en application de l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale sur les institutions destinées à promouvoir l'intégration des personnes invalides, du 6 octobre 2006 (LIPPI - RS 831.26), une personne invalide vivant dans un home peut toucher des prestations complémentaires cantonales si : elle est domiciliée dans le canton de Genève (let. a); et à défaut de pouvoir toucher des prestations complémentaires, elle doit faire appel à l'aide sociale (let. b). Les prestations des personnes vivant dans un home, accordées en vertu de l'al. 1, sont calculées selon les règles prévues pour les prestations complémentaires fédérales (al. 2).

Le montant annuel de la prestation complémentaire correspondant correspond à la part des dépenses reconnues qui excède le revenu annuel déterminant de l'intéressé (art. 15 al. 1 LPCC).

Selon l'art. 5 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC et ses dispositions d'exécution, moyennant les adaptations suivantes : les prestations complémentaires fédérales sont ajoutées au revenu déterminant (let. a); et, en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de un huitième, respectivement de un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction (let. c): des franchises prévues par cette disposition (ch. 1); du montant des indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice corporel, y compris l'indemnisation éventuelle du tort moral (ch. 2).

Les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 3 (art. 6 LPCC).

Selon l'art. 7 LPCC, la fortune comprend la fortune mobilière et immobilière définie par la LPC et ses dispositions d'exécution (al. 1). La fortune est évaluée selon les règles de la LIPP, à l'exception notamment des règles concernant les déductions sociales sur la fortune, prévues aux art. 50 let. e et 58 de ladite loi, qui ne sont pas applicables. Les règles d'évaluation prévues par la LPC et ses dispositions d'exécution sont réservées (al. 2).

10.         Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (art. 23 al. 1 OPC-AVS/AI). Pour les assurés dont la fortune et les revenus déterminants à prendre en compte au sens de la LPC peuvent être établis à l'aide d'une taxation fiscale, les organes cantonaux d'exécution sont autorisés à retenir, comme période de calcul, celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification de la situation économique de l'assuré n'est intervenue entre-temps (al. 2). La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 3).

Pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes, les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l'année civile en cours (art. 9 let. a LPCC), la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée (let. b). En cas de modification importante des ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle (al. 3).

11.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

12.         En l'espèce, ainsi que l'admet finalement l'intimé dans son écriture du 4 avril 2022, il y a effectivement lieu de faire abstraction de la fortune comptabilisée au titre des avoirs bancaires au Portugal dans le calcul des prestations complémentaires (soit CHF 92'243.24 pour la période du 1er avril au 31 décembre 2019 et CHF 89'178.60 pour la période du 1er janvier au 31 août 2020). Il ressort en effet des pièces produites par le recourant le 17 mars 2022 que ses fonds à l'étranger avaient été transférés sur son compte auprès de la BCGE en juin 2017 avant le début du droit aux prestations le 1er avril 2019 , dont le solde a déjà été pris en compte dans les calculs, et que, depuis lors, le compte portugais a été clôturé.

13.         Reste à déterminer, si comme le voudrait l'intimé, la chambre de céans peut réformer la décision litigieuse du 25 février 2021 au détriment du recourant, au motif qu'il conviendrait d'inclure dans les calculs la fortune immobilière sise au Portugal, que l'intimé a omis de prendre en considération, alors que le recourant la lui avait signalée par courrier du 3 janvier 2020 auquel était jointe une attestation fiscale du 30 juillet 2019 , dans lequel il alléguait que la valeur fiscale de ses biens s'élevaient à EUR 108'225.06.

13.1 Il sera au préalable relevé que, à défaut d'une décision formelle à cet égard, il ne s'agit là que d'une simple proposition de l'administration au juge (ATAS/185/2017 du 8 mars 2017).

13.2 Cela étant dit, il y a lieu de rappeler qu'il appartient en premier lieu à l'intimé de procéder à des instructions complémentaires pour établir d'office l'ensemble des faits déterminants et, le cas échéant, d'administrer les preuves nécessaires avant de rendre sa décision (art. 43 al. 1 LPGA; arrêt du Tribunal fédéral 8C_580/2021 du 20 avril 2022 consid. 6). Faute d'investigations par l'intimé, la chambre de céans ignore la valeur vénale des biens immobiliers sis au Portugal (et non fiscale dont on ne connaît pas les éléments sur lesquels le fisc portugais s'est basé pour l'établir), la valeur locative, de même que la déduction forfaitaire pour les frais d'entretien des bâtiments qui est calculée sur la valeur locative.

Quoi qu'il en soit, si l'on prend à tout le moins en compte la valeur fiscale de EUR 108'225.06, elle correspond à CHF 121'958.80 pour le calcul des prestations complémentaires dues dès le 1er avril 2019, respectivement à CHF 117'467.48 s'agissant de celles dues dès le 1er janvier 2020 (le taux de conversion publié par la Banque centrale européenne était au 31 décembre 2018 date déterminante pour calculer les prestations dues en 2019 de CHF 1.1269 pour EUR 1.- (https://sdw.ecb.europa.eu/quickview.do;jsessionid=77DB76E0D84EE1D81E61CBF196757E4B?SERIES_KEY=120.EXR.D.CHF.EUR.SP00.A&start=31-12-2018&end=31-12-2018&submitOptions.x=0&submitOptions.y=0&trans=N; et au 31 décembre 2019 date déterminante pour calculer les prestations dues en 2020 de CHF 1.0854 pour EUR 1.-; ATAS/72/2022 du 31 janvier 2022 consid. 12.2). À ces montants, qui sont supérieurs à ceux comptabilisés à tort par l'intimé au titre de la fortune mobilière étrangère, il y a lieu d'ajouter le produit de la fortune immobilière (valeur locative). Cela a pour conséquence que le revenu déterminant du recourant sera manifestement supérieur à celui arrêté par l'intimé. Dans ce cas, quand bien même la déduction forfaitaire pour les frais d'entretien des bâtiments doit encore être incluse (tout au plus uniquement 20% de la valeur locative) au titre des dépenses reconnues, les prestations annuelles dues seront inférieures à celles accordées dans la décision litigieuse.

La proposition de l'intimé implique donc l'examen de l'obligation de restituer des prestations déjà versées. Or, l'objet de la contestation est la décision du 25 février 2021 par laquelle l'intimé a mis le recourant au bénéfice de prestations complémentaires dès le 1er avril 2019. Dans cette décision, l'intimé ne s'est pas prononcé sur le principe et la quotité de la restitution des prestations complémentaires.

Dans ces circonstances, la proposition de l'intimé ne peut pas aboutir à une reformatio in peius de la décision attaquée au détriment du recourant, dès lors qu'elle a pour effet d'étendre l'objet de la contestation. Or, une reformatio in peius ne se conçoit que dans le cadre de l'objet même de la contestation. La compétence d'une autorité de recours de statuer en défaveur de la partie recourante (reformatio in peius) ne saurait conduire à une modification, dans le sens d'une extension, de l'objet de la contestation (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P.84/01 du 27 juin 2002 consid. 1b et les références).

14.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision du 25 février 2021 annulée en tant qu'elle inclut dans le calcul des prestations complémentaires des avoirs bancaires sis à l'étranger, et la cause renvoyée à l'intimé pour nouveaux calculs des prestations complémentaires, et nouvelle décision.

Le recourant, représenté par un avocat nommé curateur, obtenant gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]; ATF 116 II 399 consid. 4b), arrêtée en l'espèce à CHF 1'000.-.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 25 février 2021 en tant qu'elle inclut dans le calcul des prestations complémentaires des avoirs bancaires sis à l'étranger.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour nouveaux calculs des prestations complémentaires, et nouvelle décision.

5.        Alloue au recourant une indemnité de dépens de CHF 1'000.-, à la charge de l'intimé.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le