Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2950/2016

ATA/918/2016 du 01.11.2016 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 14.12.2016, rendu le 11.09.2017, REJETE, 1C_593/2016
Descripteurs : CONDITION DE RECEVABILITÉ ; COMPÉTENCE ; DROIT D'OBTENIR UNE DÉCISION ; REFUS DE STATUER ; DÉCISION ; ACTE INTERNE ; RÉPARTITION DES SIÈGES ; PARLEMENT COMMUNAL
Normes : Cst-GE.124.letb ; LOJ.130B.al1 ; LPA.4.al4 ; Cst.29.al1 ; LPA.4.al1 ; Cst-GE.140.al1 ; LAC.3 ; LAC.10.al1 ; LAC.17 ; règlement du Conseil municipal de la Ville de Genève.117.al4 ; règlement du Conseil municipal de la Ville de Genève.11.al3
Résumé : Recours pour déni de justice et contre un courriel du président du Conseil municipal de la Ville de Genève concernant le remplacement du recourant, conseiller municipal démissionnaire de son parti politique et considéré comme démissionnaire également par son groupe parlementaire, par un autre conseiller municipal du même groupe parlementaire au sein des commissions permanentes du Conseil municipal. Il n'existe pas de droit personnel des conseillers municipaux à siéger en commission. Le droit à une représentation proportionnelle du groupe parlementaire n'est pas touché. Il s'agit d'une mesure purement organisationnelle, non sujette à recours. Recours contre le courriel irrecevable. Le cas d'espèce n'étant pas susceptible de faire l'objet d'une décision, absence de déni de justice.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2950/2016-FPUBL ATA/918/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er novembre 2016

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Vincent Maitre, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE


EN FAIT

1) Le 19 avril 2015, Monsieur A______, à l’époque membre du parti B______ (ci-après : B______) et figurant sur la liste C______(ci-après : C______), a été élu au Conseil municipal (ci-après : CM) de la Ville de Genève (ci-après : la ville).

2) Lors des séances du 7 et 8 juin 2016, le CM a désigné les membres de ses différentes commissions. M. A______, en sa qualité de membre du groupe parlementaire C______, est ainsi devenu membre de la commission de l’aménagement et de l’environnement (ci-après : CAE), de la commission des naturalisations (ci-après : CN), ainsi que de la commission de la sécurité, du domaine public, de l’information et de la communication (ci-après : CSDPIC).

3) Le 14 juin 2016, l’intéressé a démissionné du B______ avec effet au 15 juin 2016.

4) Le 22 août 2016, Madame D______, en qualité de cheffe de groupe d’C______, a informé le président du CM du fait que M. A______ – qui avait démissionné du B______, composante d’C______, et adhéré au E______ (ci-après : E______), ne faisant pas partie d’C______ – était devenu indépendant et ne pouvait plus représenter C______, tant en plénière qu’en commission spécialisée, lui a demandé de prendre les mesures découlant de cette nouvelle situation et a communiqué la liste provisoire des nouveaux membres siégeant en commissions spécialisées pour C______.

5) Par courriel du 29 août 2016 au président du CM, l’intéressé a remis en cause les modifications de son profil sur le site internet du CM, qui indiquait à tort qu’il ne siégeait plus dans aucune des commissions pour lesquelles il avait été désigné par C______, et a contesté avoir démissionné d’C______. Sa situation restait inchangée.

6) Par courriel du 30 août 2016, le président du CM a expliqué à M. A______ que, du fait qu’il ne faisait plus partie de C______, il était normal qu’il ne siège plus en commission. Dès la démission d’un élu de son parti, le service du CM prenait les dispositions nécessaires pour modifier les représentants des commissions en fonction des directives du chef de groupe. Sa situation ferait l’objet d’un point, le 1er septembre 2016, lors de la prochaine séance du bureau du CM (ci-après : le bureau), lequel statuerait sur sa situation. Il devait dans l’intervalle considérer qu’il ne siégeait plus en commission.

7) Le même jour, M. A______ a persisté dans sa position et mis en demeure le président du CM de restaurer son profil internet dans sa teneur et sa forme précédentes. Il continuerait à siéger dans les commissions pour lesquelles il avait été valablement désigné.

8) Le même jour, l’intéressé s’est présenté à la séance de la CAE, a affirmé qu’une personne y siégeait illégalement à sa place, a refusé d’y participer et s’est retiré.

9) Par courrier du 31 août 2016 au président du CM, C______, représenté par Mme D______, a contesté le point de vue de l’intéressé et persisté dans sa position.

10) Le 2 septembre 2016, M. A______ a sollicité auprès du président du CM une décision sujette à recours et demandé le rétablissement d’une situation conforme au droit. La décision communiquée par courriel du 30 août 2016 était nulle, violait gravement l’exercice de ses droits politiques et se fondait sur un fait erroné, soit sa démission d’C______.

11) Le 7 septembre 2016, le bureau, incompétent pour désigner de son propre chef les membres des commissions, a convoqué l’intéressé à une audition le 12 septembre 2016, en vertu de son devoir de s’assurer du bon fonctionnement du CM.

12) Par acte du 9 septembre 2016, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le courriel du président du CM du 30 août 2016.

Sur mesures « superprovisionnelles » et provisionnelles, il a conclu à l’interdiction de le considérer hors parti et à ce qu’il soit restauré avec effet immédiat dans l’exercice plein et entier de ses droits politiques, en particulier le droit de siéger, intervenir et voter dans les commissions pour lesquelles il avait été valablement désigné. Sur mesures provisionnelles, il a demandé le rétablissement de toutes les informations publiques disponibles jusqu’alors à son sujet, notamment sur le site internet du CM. Au fond, il a conclu à la constatation de la nullité de la décision litigieuse, subsidiairement à son annulation. Il a finalement demandé la condamnation du bureau en tous les frais, débours et « dépens ».

Élu au CM sur la liste d’C______, il était membre à part entière du groupe parlementaire C______. Sa démission de ce groupe était contestée. Le bureau, à la majorité de ses membres, et non le président du CM était compétent pour trancher son cas. Ses droits politiques avaient été violés. Il n’avait été donné aucune suite à sa demande de bénéficier d’un acte attaquable. Le courriel du 30 août 2016 ne respectait pas les conditions formelles de la décision. Il ne lui avait jamais été donné l’occasion de faire valoir son droit d’être entendu.

13) Le 12 septembre 2016, l’intéressé a été entendu par le bureau.

14) a. Par réponse du 26 septembre 2016, la ville a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, avec suite de frais et « dépens ».

Le recours était irrecevable. Premièrement, le bureau n’avait pas la qualité pour ester en justice ni, partant, pour défendre, et il ne lui appartenait pas de désigner les commissaires ou de se prononcer sur leur remplacement. Deuxièmement, tout portait à croire que M. A______ ne faisait plus partie d’C______ et siégeait en tant qu’indépendant. Il ne pouvait pas prétendre représenter C______ alors que ce dernier rejetait une telle représentation. Il n’avait pas la qualité pour recourir. Troisièmement, en l’absence totale d’autonomie du bureau pour désigner un remplaçant de l’intéressé suite à la requête d’C______, il ne s’agissait pas d’une décision, mais d’une simple mesure organisationnelle. Quatrièmement, la démarche de M. A______ était abusive. S’il ne parvenait pas à régler la situation à l’interne avec C______, il ne pouvait instrumenter la justice pour prétendre être toujours représentant de ce dernier. Il avait refusé d’assister à la séance de la CAE du 30 août 2016, ce qui allait à l’encontre de sa requête. Il gardait pour lui tous les jetons de participation, sans rien verser à C______. En affirmant que le bureau n’avait pas réagi à sa mise en demeure, il avait induit la justice en erreur. Finalement, la requête était prématurée, vu l’examen initié par le bureau.

Il ne pouvait être reproché au bureau d’être resté silencieux face à la demande d’acte attaquable de l’intéressé, vu que l’acte sollicité était un acte matériel, non susceptible de recours. En quittant le B______ pour le E______, il avait délibérément pris le risque de siéger en indépendant et ne pouvait se plaindre de bonne foi de ne pas pouvoir participer aux commissions en qualité de représentant d’C______. Il pouvait continuer à défendre ses opinions lors des séances plénières.

b. À l’appui de sa réponse, la ville a notamment versé à la procédure le
procès-verbal décisionnel du caucus d’C______ du 12 septembre 2016, dans lequel ce dernier prenait acte à l’unanimité de la démission de M. A______, décision qui valait, au besoin, exclusion du groupe municipal. C______ n’avait jamais été une coalition de personnes, à titre individuel. La coalition municipale était le fruit d’un accord entre différents groupes visant à ce que ceux-ci soient représentés ensemble au CM. L’intéressé et son nouveau parti ne pouvaient décréter unilatéralement être associés à un titre ou à un autre à la coalition électorale municipale C______.

15) Par réplique du 7 octobre 2016, M. A______ a persisté dans l’intégralité de ses conclusions et demandé la restitution de l’effet suspensif, reprenant et complétant son argumentation précédente.

Le bureau s’était octroyé des compétences allant bien au-delà des compétences organisationnelles accordées par la loi et avait rendu une décision au sens matériel qui déployait ses effets. Du fait de la position du bureau, il n’avait plus pu siéger aux commissions, de sorte qu’il avait un intérêt personnel, concret et actuel à l’annulation de la décision. Il avait simplement demandé au bureau le maintien du statut quo dès lors que les affirmations de Mme D______ étaient contestées. Il était de la compétence du bureau d’enregistrer les modifications de désignation des commissaires, de sorte qu’il pouvait également refuser de donner suite aux instructions. Il n’avait jamais demandé au bureau de le nommer commissaire en lieu et place d’C______ et il n’était pas contesté que la désignation des commissaires relevait de la compétence des groupes parlementaires. Il lui avait été proposé d’assister à la séance de la CAE du 30 août 2016, sans y participer et sans voter, de sorte qu’il n’avait eu d’autre choix que de refuser. On ne voyait pas en quoi le dépôt d’une requête en mesures provisionnelles et superprovisionnelles pouvait être prématuré. En niant avoir rendu une décision administrative et en lui refusant toute décision formelle, le bureau avait violé la garantie d’accès au juge.

16) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Elle examine d’office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. Elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA (art. 132 al. 2 LOJ). Font notamment partie des autorités administratives, les autorités communales, les services et les institutions qui en dépendent (art. 5 let. f LPA).

c. Le recours auprès de la chambre administrative n’est toutefois pas recevable contre les décisions pour lesquelles le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ). À l’inverse, il peut être ouvert dans d’autres cas que contre des décisions lorsque la LOJ ou une autre loi le prévoit expressément (art. 132 al. 3 à 6 LOJ).

2) Le recourant invoquant une violation de ses droit politiques, il convient premièrement d’examiner si la compétence pour connaître de la présente cause devrait revenir à la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) et non à la chambre administrative.

a. Selon l’art. 124 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00), la Cour constitutionnelle, c'est-à-dire la chambre constitutionnelle (art. 1 let. h ch. 3 LOJ), a pour compétence notamment de traiter les litiges relatifs à l’exercice des droits politiques en matière cantonale et communale (let. b, correspondant matériellement à l’art. 130B al. 1 let. b LOJ ; ACST/18/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3a). Lors de la mise en œuvre de cette disposition constitutionnelle, par le biais de la loi 11'311 du 11 avril 2014, le législateur cantonal a, pour ces litiges, transféré à la chambre constitutionnelle (art. 180 de la loi sur l’exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 - LEDP - A 5 05) la compétence qu’avait jusqu’alors la chambre administrative de connaître des recours ouverts « contre les violations de la procédure et des opérations électorales, indépendamment de l’existence d’une décision » (art. 180 aLEDP).

b. Comme le Tribunal administratif, puis la chambre administrative et enfin la chambre constitutionnelle l’ont jugé à maintes reprises, entre dans le cadre des opérations électorales tout acte destiné aux électeurs de nature à influencer la libre formation du droit de vote, telle qu’elle est garantie par les art. 34 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 44 Cst-GE, indépendamment de l’existence d’une décision (ACST/8/2016 du 3 juin 2016 consid. 3a et les références citées).

c. La présente cause concerne un recours relatif au remplacement d’un commissaire – considéré comme démissionnaire par son groupe parlementaire – par un autre conseiller municipal élu sur la même liste électorale pour participer aux commissions pour lesquelles le premier avait été initialement désigné. Elle a donc trait à la composition des commissions d’un conseil municipal et ne se rapporte pas à une opération électorale, en relation avec laquelle la chambre constitutionnelle serait compétente. Ce résultat est confirmé par l’ATA/715/2011 du 22 novembre 2011, dans lequel la chambre administrative avait exclu, dans le cadre d’un litige relatif à la répartition des sièges des commissions d’un conseil municipal, la qualification de processus électoral au sens de l’art. 180a LEDP (consid. 6).

Le cas d’espèce ne relève par conséquent pas de la compétence de la chambre constitutionnelle.

3) Il convient dès lors d’examiner si la chambre administrative est compétente pour connaître du présent litige. À cet égard, la chambre administrative analysera la présente cause tant sous l’angle d’un recours contre le courriel du 30 août 2016, que le recourant qualifie de décision matérielle, que sous l’angle du recours pour déni de justice, le recourant reprochant également à l’autorité intimée d’avoir refusé de rendre un acte attaquable, en dépit de sa mise en demeure.

4) a. Lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

b. Une autorité qui n'applique pas ou applique d'une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu'elle ferme l'accès à la justice au particulier qui, normalement, y aurait droit, commet un déni de justice formel. Il en va de même pour l’autorité qui refuse expressément de statuer, alors qu’elle en a l’obligation. Un tel déni constitue une violation de l’art. 29 al. 1 Cst. (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 I 6 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_59/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2.1 ; 2C_409/2013 du 27 mai 2013 consid. 5.1 ; 5A_279/2010 du 24 juin 2010 consid. 3.3).

5) a. Au sens de l’art. 4 al. 1 LPA sont considérées comme des décisions les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité, dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal, et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits et des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations (let. c).

b. Pour qu’un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n’est pas la forme de l’acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/509/2016 du 14 juin 2016 consid. 4c ; ATA/15/2016 du 12 janvier 2016 consid. 2a).

c. En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 - PA - RS 172.021), ce qui est également valable pour les cas limites, ou plus exactement pour les actes dont l’adoption n’ouvre pas de voie de recours. Ainsi, de manière générale, les communications, opinions, recommandations et renseignements ne déploient aucun effet juridique et ne sont pas assimilables à des décisions, de même que les avertissements ou certaines mises en demeure (arrêts du Tribunal fédéral 8C_220/2011 du 2 mars 2012 consid. 4.1.2 ; 8C_191/2010 du 12 octobre 2010 consid. 6.1 ; ATA/209/2016 du 8 mars 2016 consid. 2b et les références citées). Ces dernières peuvent constituer des cas limites et revêtir la qualité de décisions susceptibles de recours, lorsqu'elles apparaissent comme des sanctions conditionnant ultérieurement l'adoption d'une mesure plus restrictive à l'égard du destinataire. Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement ne possède pas un tel caractère, il n'est pas sujet à recours (ATA/646/2016 du 26 juillet 2016 consid. 2b ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, n. 2.1.2.1 p. 180 ; Alfred KÖLZ/Isabelle HÄNER/Martin BERTSCHI, Verwaltungsverfahren und Verwaltungs-rechtspflege des Bundes, 3ème éd., 2013, p. 310).

De même, ne sont pas des décisions les actes internes ou d'organisation, qui visent les situations à l'intérieur de l'administration ; il peut y avoir des effets juridiques, mais ce n'en est pas l'objet. C'est pourquoi ils ne sont en règle générale pas susceptibles de recours (ATF 136 I 323 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_191/2010 du 12 octobre 2010 consid. 6.1 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., n. 2.1.2.3 p. 164). Les mesures d'organisation administrative, aussi qualifiées d'actes internes ou d'organisation de l'administration, s'adressent à leur destinataire en qualité d'organe, d'agent, d'auxiliaire ou de service chargé de gérer une tâche publique sans autonomie. Le destinataire n'est pas l'administré mais l'administration. Deux critères permettent ainsi de distinguer une décision d'un acte interne : celui-ci n'a pas pour objet de régler la situation juridique d'un sujet de droit en tant que tel et le destinataire en est l'administration elle-même dans l'exercice de ses tâches (ATF 136 I 323 consid. 4.4 ; ATA/1339/2015 du 15 décembre 2015 consid. 2 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 343). À l’inverse, la décision a pour objet de régler la situation d’administrés en tant que sujets de droit et donc, à ce titre, distincts de la personne étatique ou, en d’autres termes, extérieurs à l’administration (ATF 131 IV 32 consid. 3 et les références citées ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 799 ss p. 274 ss).

d. En particulier, la clé de répartition des sièges au sein d'une commission déterminée par l’autorité de nomination a été considérée soit comme une décision générale et abstraite si elle se rapportait à toutes les nominations futures, soit comme une pure mesure organisationnelle s’il s’agissait d’une nomination ou d’une série de nominations. Dans ce deuxième cas de figure, elle constitue une mesure d'organisation qui n'est pas attaquable par la voie du recours (Benoît BOVAY, op. cit., p. 344 ; JAAC 1999 n° 56 consid 3.2.4 et 3.2.5). Dans le cas cité par cet auteur, qui concernait la désignation des membres de la commission fédérale instituée par l’ancienne ordonnance du 12 mai 1959 sur le commerce des vins (aOCCV), les dispositions applicables prévoyaient que cette dernière se composait au plus de neuf membres et huit suppléants, désignés pour quatre ans par l’ancien département fédéral de l’économie, qui devait tenir compte des groupements intéressés, de la région, du sexe, de l’âge et de la langue (art. 7 al. 1 et 9 aOCCV). Elles ne conféraient ainsi aucun droit à qui que ce soit (ATA/715/2011 précité consid. 9).

e. Les décisions au sens juridique du terme prises par les autorités communales sont relativement peu nombreuses. Cette situation s'explique par le fait que le conseil municipal adopte peu de décisions au sens de l'art. 4 LPA ayant pour destinataire des sujets de droit (François BELLANGER, Le contentieux communal genevois, in Thierry TANQUEREL/François BELLANGER [éd.], L'avenir juridique des communes, 2007, p. 125-157, p. 140).

6) a. Le conseil municipal est l’autorité délibérative de la commune (art. 140 al. 1 Cst-GE). Il constitue l’un des deux organes de la commune, l’autre étant le conseil administratif (art. 3 de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B 6 05).

b. Le conseil municipal peut désigner dans son sein des commissions nommées pour la durée de la législature (commissions permanentes) ou pour étudier un objet déterminé (commissions ad hoc ; art. 10 al. 1 LAC). Le conseil municipal édicte un règlement, soumis à l’approbation du Conseil d’État, fixant la procédure des délibérations (art. 17 LAC).

c. Le CM désigne en son sein des commissions qui lui font rapport sur l’objet de leurs délibérations (art. 114 al. 1 du règlement du CM de la ville du 16 avril 2011 - RCM - LC 21 111). Parmi les commissions permanentes figurent la CAE, la CN et la CSDPIC (art. 115 al. 1 RCM). Le CM procède à la désignation des quinze membres de chaque commission permanente chaque année lors de la première séance ordinaire du mois de juin (art. 117 al. 1 RCM). Chaque groupe a droit à une représentation proportionnelle au nombre de suffrages obtenus lors des élections municipales (art. 117 al. 2 RCM). Chaque membre du CM a le droit de se faire remplacer occasionnellement au sein d’une commission ou d’une sous-commission par une personne de son groupe (art. 117 al. 3 RCM). En cas de vacance dans une commission, le bureau procède immédiatement à une nouvelle désignation sur proposition du groupe intéressé (art. 117 al. 4 RCM).

Les membres du CM élus sur une même liste forment un groupe parlementaire (art. 11 al. 1 RCM). En cas de démission ou d’exclusion de son groupe parlementaire, le membre du CM siège et délibère de manière indépendante. Il ne peut intégrer un autre groupe parlementaire en cours de législature. Il ne participe pas aux travaux des commissions municipales et ne peut rédiger de rapport (art. 11 al. 3 RCM).

7) Dans un arrêt concernant la répartition des sièges au sein des commissions du CM de la ville, la chambre administrative a constaté que la proposition de répartition arrêtée conjointement par le bureau et les chefs de groupes ne constituait pas une décision au sens de l’art. 4 LPA, de sorte que le recours à son encontre était irrecevable (ATA/715/2011 précité consid. 5 et 7). Elle a par contre admis la recevabilité du recours contre la désignation des membres des commissions par le CM selon la répartition préparée par le bureau et les chefs de groupe, car il existait un droit de chaque groupe municipal d’être représenté proportionnellement au nombre de suffrages obtenus lors des élections municipales selon l’art. 117 al. 2 RCM, de sorte qu’il s’agissait d’une décision susceptible de recours en vertu de l’art. 132 al. 1 LOJ (ATA/715/2011 précité consid. 9).

Dans un arrêt postérieur relatif à la même problématique mais dans une autre commune, la chambre administrative a nié la recevabilité d’un recours concernant la répartition des sièges des commissions arrêtée par le Conseil municipal, s’agissant d’une mesure purement organisationnelle et non d’une décision. Le règlement du Conseil municipal de la commune en question prévoyait en effet une répartition en équité, ne conférant pas d’autre droit que d’être représenté en commission (ATA/1339/2015 précité consid. 5 et 6).

8) Il résulte de ce qui précède que s’il existe, en vertu du RCM, un droit à une représentation proportionnelle des groupes parlementaires au sein des commissions du CM, aucune disposition ne prévoit de droit personnel des conseillers municipaux à siéger en commission, que ce soit pour leur groupe parlementaire ou indépendamment de celui-ci. Or, en l’espèce, le recourant recourt pour lui-même en invoquant uniquement sa propre volonté à siéger en commission. Il ne peut dans ce cadre se prévaloir d’un quelconque droit en ce sens. Par ailleurs, le cas d’espèce concernant le remplacement, dans des commissions, d’un conseiller municipal démissionnaire de son parti par d’autres conseillers municipaux du même groupe parlementaire que celui du conseiller municipal démissionnaire, la représentation proportionnelle des groupes parlementaires et en particulier du groupe concerné, soit en l’occurrence C______, n’est pas remise en cause. Un tel cas ne touche dès lors aucun droit ou obligation et ne constitue qu’une mesure purement organisationnelle, non sujette à recours.

Au surplus, il convient de constater que, si le bureau procède à une nouvelle désignation en cas de vacance au sein des commissions, la cessation de la participation aux commissions du CM découle directement du RCM dès la démission ou l’exclusion du Conseiller municipal de son groupe parlementaire, de sorte que le commissaire est exclu indépendamment de toute intervention du président ou du bureau, ce dernier n’intervenant que pour procéder à une nouvelle désignation sur proposition du groupe concerné.

Au vu de ce qui précède, le courriel du 30 août 2016 ne peut être qualifié de décision et n’est par conséquent pas sujet à recours. Par ailleurs, le cas d’espèce n’étant pas susceptible de faire l’objet d’une décision, l’autorité intimée ne pouvait avoir d’obligation de rendre une telle décision et il ne peut y avoir de déni de justice.

Dans ces circonstances, le recours avec requête en mesures superprovisionnelles et provisionnelles sera déclaré irrecevable.

9) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 800.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la ville, qui dispose de son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/800/2016 du 27 septembre 2016 consid. 13).

 

 


 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 9 septembre 2016 par Monsieur A______ contre le courriel du président du Conseil municipal de la Ville de Genève du 30 août 2016 ;

met un émolument de CHF 800.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Vincent Maitre, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Thélin, Mme Junod, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 


 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :