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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/936/2022

ATA/849/2022 du 23.08.2022 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/936/2022-AIDSO ATA/849/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 août 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Christophe De Kalbermatten, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1965, a bénéficié de prestations d’aide financière de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) du 1er décembre 2017 au 29 février 2020.

2) Il a complété et signé à plusieurs reprises, notamment le 3 novembre 2017, le formulaire de demande de prestations d’aide sociale financière, dans lequel il a déclaré disposer d’une capacité de travail complète. Il a également signé le document intitulé « mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général ».

3) Lors du premier entretien au centre d’action sociale de la Servette (ci-après : CAS), le 10 novembre 2017, il a expliqué qu’il avait démissionné de son dernier emploi en 2011 et entrepris par la suite une activité indépendante qu’il avait finalement abandonnée et dont il avait demandé la radiation du registre du commerce. En décembre 2016, il avait cédé un bien immobilier en Valais pour le prix de CHF 95'601.-. Il avait utilisé CHF 50'000.- pour solder une dette personnelle en mars 2017. Son ex-épouse l’avait soutenu financièrement, mais elle n’en avait plus les moyens.

4) Une enquête de l’hospice diligentée le 14 novembre 2017 a révélé qu’il n’avait pas déclaré détenir un compte Crédit Suisse n° 1______-11, dont les relevés attestaient notamment un crédit de CHF 265'268.10 le 5 septembre 2016 correspondant à la prestation de libre passage de sa prévoyance professionnelle (ci-après : LPP) obtenue dans la procédure de divorce ainsi que divers versements à son ex-épouse pour un total de CHF 153'007.-.

5) Le 23 janvier 2018, le CAS a informé M. A______ que l’hospice était disposé à lui accorder, à titre exceptionnel, pour la période du 1er décembre 2017 au 28 février 2018, une aide financière remboursable.

En utilisant son capital LPP et le produit de la vente de son bien immobilier à d’autres fins que son entretien, il s’était dessaisi de sa fortune au sens de l’art. 40 al. 1 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04).

Cette décision n’a pas été contestée et est entrée en force.

6) Le 4 avril 2018, M. A______ a sollicité la reprise de l’aide financière.

Il n’avait pas d’autres ressources et n’avait pas payé ses loyers des mois de mars et avril 2018.

7) Le 5 avril 2018, le CAS a indiqué à M. A______ que l’hospice était disposé à lui accorder dès le 1er avril 2018, à titre exceptionnel, une aide financière remboursable.

La décision était fondée sur les mêmes motifs que celle du 23 janvier 2018.

Elle n’a pas été contestée et est entrée en force.

8) Le 27 juin 2018, M. A______ a indiqué au CAS avoir été déclaré en faillite personnelle et souffrir de dépression depuis une année.

9) Au cours des mois suivants, M. A______ a été hospitalisé à diverses reprises, notamment à l’hôpital psychiatrique de Belle-Idée.

10) Le 28 novembre 2018, après avoir déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) avec le soutien d’une assistante sociale des Hôpitaux universitaires genevois (ci-après : HUG), M. A______ a signé deux ordres de paiement à l’attention de l’office de l’assurance invalidité (ci-après : OAI) et du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC), les invitant à verser à l’hospice, en remboursement des avances perçues de ce dernier, à concurrence de celles-ci et dans la mesure où elles couvraient les mêmes périodes, les arriérés de rentes et de prestations fédérales et cantonales qui lui seraient alloués. M. A______ s’engageait également à aviser immédiatement l’hospice s’il percevait directement l’arriéré et à le lui reverser à hauteur des avances perçues.

Le même jour, M. A______ a contresigné un courrier lui rappelant le caractère subsidiaire de l’aide sociale à toute source de revenu et qu’en cas de versement rétroactif de rentes AI et LPP ou de prestations complémentaires l’hospice lui demanderait le remboursement des prestations financières versées durant la période d’attente jusqu’à concurrence des avances perçues.

11) M. A______ a par la suite subi plusieurs hospitalisations en milieu psychiatrique et a été évacué de son logement par décision du Tribunal des baux et loyers. Il a été hébergé dans un hôtel et l’hospice a pris en charge cet hébergement.

12) Le 1er mars 2020, le droit aux prestations de M. A______ selon la LIASI a pris fin après qu’il a quitté le canton de Genève pour s’installer dans l’appartement qu’il avait trouvé à Sion, en Valais.

13) Par courrier recommandé du 2 juillet 2020, le CAS a notifié à M. A______ une demande de restitution de CHF 81'425.50, correspondant au montant des prestations financières d’aide sociale remboursables que l’hospice lui avait allouées du 1er décembre 2017 au 29 février 2020.

L’envoi est revenu en retour avec la mention « non réclamé ».

14) Le 13 octobre 2020, le service du recouvrement de l’hospice a invité M. A______ à lui verser CHF 81'425.50 dans un délai fixé au 2 novembre 2020 ou à prendre contact en cas de difficulté à régler le montant en un versement.

15) Le 6 novembre 2020, à la demande de M. A______, le service du recouvrement lui a transmis une copie de la demande de restitution du 2 juillet 2020.

16) Le 22 décembre 2020, sous la plume d’une avocate, M. A______ a formé opposition à cette décision, concluant à son annulation et subsidiairement à une remise.

Il avait été hospitalisé à l’hôpital psychiatrique de Malévoz du 26 juin au 10 août 2020 et n’avait pu recevoir la décision du 2 juillet 2020. Il n’avait pris connaissance de la copie que le 14 décembre 2020 et la restitution du délai de recours devait lui être accordée.

Les conditions d’une reconsidération étaient réunies. La facture constituait un fait nouveau. Il déposait des pièces nouvelles qu’il n’avait pas été en mesure de déposer auparavant.

La décision n’expliquait pas les raisons qui conduisaient l’hospice à revenir sur sa décision initiale de lui accorder des prestations. Elle était insuffisamment motivée et violait son droit d’être entendu.

Il avait dès le début été transparent sur le dessaisissement. Lorsque l’hospice lui avait accordé des prestations d’aide financière en précisant qu’elles seraient remboursables, il avait pensé de bonne foi y avoir droit et qu’il n’aurait aucune obligation de les restituer sur la base d’une situation précédant leur octroi. En lui présentant après coup une facture importante, l’hospice agissait contrairement aux règles de la bonne foi.

Vu sa bonne foi et sa situation précaire, l’hospice devait renoncer au remboursement total de la somme réclamée.

17) Le 9 février 2021, M. A______ a réaffirmé sa bonne foi. L’hospice avait versé les prestations en toute connaissance de cause. Atteint de graves problèmes psychologiques, il ne pouvait imaginer devoir un jour rembourser les aides sans être revenu à meilleur fortune. Il était toujours bénéficiaire de l’aide sociale. Rien n’avait changé, hormis son domicile.

18) Le 27 septembre 2021, l’OAI a alloué à M. A______ une rente simple de CHF 2'086.- du 1er septembre 2019 au 31 décembre 2020 et CHF 2'103.- dès le 1er janvier 2021. Un solde de CHF 34'650.- lui parviendrait sous peu, soit les rentes dues jusqu’à septembre 2021 pour un total de CHF 52'303.- moins une retenue en faveur de l’hospice de CHF 12'516.- et des cotisations par CHF 4'500.- et CHF 637.-.

19) L’hospice a été informé que M. A______ avait formé une demande de prestations complémentaires fédérales. Il a invité M. A______, via le service social de Sion, à signer un nouvel ordre de paiement en sa faveur.

20) En janvier 2022, le service social de Sion a confirmé que le demande de prestations complémentaires fédérales était pendante. M. A______ refusait de signer la « cession » en faveur de l’hospice.

21) Le 18 février 2022, l’hospice est entré en matière sur l’opposition et a rejeté celle-ci ainsi que la demande de remise.

Les prestations accordées alors que le bénéficiaire s’était dessaisi de ses biens étaient remboursables. M. A______ avait dépensé plus de CHF 360'000.- au cours des quatorze mois qui avaient précédé sa demande d’aide financière. Il avait notamment versé plus de CHF 150'000.- à son épouse et retiré CHF 50'000.- en mars 2017 pour rembourser une dette personnelle. La décision litigieuse ne faisait que concrétiser ces éléments, qui avaient été communiqués à M. A______ par décisions définitives et exécutoires des 23 janvier et 5 avril 2018. Le montant dont le remboursement était réclamé, non contesté, était inférieur aux sommes dessaisies et correspondait aux prestations versées durant la période d’aide financière.

M. A______ n’avait donné aucune explication ni fourni aucun document permettant de démontrer à quelles obligations juridiques il aurait satisfait en se dessaisissant de CHF 50'000.- et CHF 150'000.-.

M. A______ était parfaitement informé des conditions de l’aide financière octroyée dès décembre 2017. Il avait fait état pour la première fois en juin 2018 d’une dépression pour laquelle il était soigné depuis un an. Il n’avait jamais évoqué d’altération de sa capacité de compréhension. Son droit d’être entendu n’avait pas été violé et la demande de remboursement n’était pas contraire aux règles de la bonne foi. Lui-même ne pouvait se prévaloir de sa bonne foi. Si sa situation restait précaire, elle avait évolué avec l’obtention d’une rente d’invalidité et d’un rétroactif et pourrait encore évoluer selon le résultat de la demande de prestations complémentaires.

22) Par acte remis à la poste le 29 mars 2022, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, au constat de sa bonne foi et à l’octroi d’une remise. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l’hospice pour nouvelle décision. Plus subsidiairement, le montant à rembourser devait être limité aux rentes d’invalidité versées du 1er septembre 2019 au 29 février 2020, soit CHF 12'516.-, compte tenu de sa faillite personnelle notifiée à l’hospice dès le 27 juin 2018. Dans le corps de son recours, il propose sa comparution personnelle ainsi que l’audition de son assistante sociale au CAS, Madame
B______, de son ex-épouse, Madame A______, et d’un collaborateur du service du recouvrement de l’hospice, Monsieur C______.

Toutes les créances précédant sa faillite, soit les aides octroyées du 1er décembre 2017 au 27 juin 2018, devaient être considérées comme éteintes.

Son minimum vital était à peine couvert par la rente AI perçue, de CHF 2'103.-.

L’altération de son état de santé, que l’hospice connaissait, l’avait empêché de signaler de manière adéquate son incapacité à comprendre les enjeux de l’octroi des aides en cas de dessaisissement. L’hospice n’avait pas pris la peine d’attirer son attention sur la portée de l’art. 40 LIASI. De bonne foi, il n’avait pas envisagé qu’il pourrait devoir restituer les montants octroyés, vu notamment sa situation financière. L’assistante sociale lui avait expliqué que la décision du 2 juillet 2020 était une procédure standard et obligatoire et qu’il ne serait pas tenu de rembourser, si bien qu’il pouvait de bonne foi s’attendre à une remise.

La décision consacrait une violation du droit ainsi qu’un abus « ou au moins un excès » du pouvoir d’appréciation de l’hospice. Les faits avaient été constatés de manière inexacte ou incomplète. L’hospice avait omis d’entendre son ex-épouse et son assistante sociale, cette dernière au sujet de l’assurance qu’il ne devrait rien rembourser et n’avait pas tenu compte de cet élément.

Vu sa faillite personnelle, le caractère insaisissable des prestations d’assistance et des rentes d’invalidité et son minimum vital, les dettes réclamées par l’hospice étaient éteintes, ce qui devait être constaté.

23) Le 22 avril 2022, M. A______ a complété son recours.

Il avait subi de nombreuses hospitalisations, la dernière du 11 au 25 mars 2022, et avait été placé sous curatelle de représentation et de gestion le 8 janvier 2022. Son loyer était de CHF 1'600.- par mois et ses primes d’assurance de CHF 429.35.-, entièrement prises en charge par le canton du Valais. Sa rente ne couvrait pas son minimum vital. Confirmer le remboursement le condamnerait à être endetté à vie.

Il n’avait pas été en mesure de fournir les informations et documents requis et ne percevait encore aucune prestation complémentaire. C’était à tort que l’hospice avait considéré que sa situation pourrait évoluer selon le sort de sa demande de prestations complémentaires.

Être informé du caractère remboursable d’une prestation ne suffisait pas pour nier sa bonne foi et il y avait lieu d’entrer en matière sur sa demande de remise.

24) Le 25 mai 2022, l’hospice a conclu au rejet du recours.

M. A______ avait contresigné le 28 novembre 2018 un courrier lui rappelant le caractère remboursable des aides financières.

Sa prestation de libre passage n’avait pas été versée sur un compte joint, comme il le prétendait, mais sur le compte courant au Crédit suisse dont il était le seul titulaire, et il n’en avait pas informé l’hospice.

L’hospice n’avait pas remis en question la détérioration de son état de santé et avait d’ailleurs admis son opposition tardive pour ce motif. Tous les certificats médicaux produits avaient été établis après sa prise en charge financière par l’hospice. Aucun n’attestait qu’il disposait d’une capacité de discernement insuffisante pour comprendre que les prestations d’aide étaient remboursables. M. A______ avait déclaré lors du dépôt de sa demande d’aide être en bonne santé et capable de travailler. Il n’avait pas contesté les deux décisions l’informant du caractère remboursable des prestations et avait établi des ordres de paiement en faveur de l’hospice. Il avait parfaitement compris la portée du courrier du 13 octobre 2020, comme l’attestaient toutes les démarches qu’il avait entreprises pour défendre ses intérêts.

Il était formellement contesté que son assistante sociale lui ait indiqué qu’il ne serait pas tenu de rembourser la somme réclamée. Il n’avait toujours apporté aucune justification au sujet des dépenses effectuées. Le loyer de CHF 1'600.- était, selon les informations qu’il avait transmises, payé pour moitié par son fils.

Les conditions d’une remise n’étaient pas remplies. M. A______ savait dès le début de l’intervention de l’hospice qu’il devrait rembourser les aides perçues. Il ne pouvait se prévaloir de bonne foi de son état de santé.

25) Le 23 juin 2022, M. A______ a répliqué et persisté dans ses conclusions.

Il n’avait pas eu conscience de commettre un dessaisissement. Il n’avait pas perçu la portée des documents signés. Il vivait désormais seul et son loyer était pris en charge en partie par son ex-épouse. Il maintenait que son assistante sociale lui avait affirmé qu’il ne serait pas tenu de rembourser. Il souffrait depuis des années d’une consommation compulsive d’alcool qui tendait à empirer. Il serait à nouveau hospitalisé en juillet 2022 puis séjournerait dans un foyer de traitement de l’addiction. Le refus d’annuler le remboursement le priverait des ressources nécessaires pour ce placement et péjorerait ses perspectives de réinsertion. Il était menacé d’être expulsé de son appartement en raison des problèmes liés à son trouble.

Une personne incapable de discernement ne pouvait être de mauvaise foi. Les actes qui lui avaient été adressés étaient nuls. L’hospice savait en lui octroyant des aides puis en en exigeant le remboursement qu’il souffrait de graves troubles psychiques.

26) Le 24 juin 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Bien qu’il n’en fasse pas une conclusion formelle, le recourant offre dans l’exposé des faits de son recours d’ordonner son audition ainsi que celle de son
ex-épouse, de son ancienne assistante sociale ainsi que d’un employé du service de recouvrement de l’hospice.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l’espèce, le recourant a pu s’exprimer par écrit devant l’hospice et la chambre de céans et produire toutes pièces utiles. Il n’expose pas quelles informations supplémentaires utiles à la solution du litige son audition pourrait apporter, étant rappelé qu’il n’a pas de droit à être entendu oralement par la chambre de céans. L’hospice a formellement démenti que son ancienne assistante sociale ait pu lui affirmer qu’il ne devrait pas rembourser, et il sera vu plus loin qu’une telle affirmation aurait quoi qu’il en soit été sans effet sur l’issue du litige. Il n’est enfin pas contesté qu’il a appelé le service des recouvrements de l’hospice pour se voir remettre une copie de la décision, après quoi l’hospice a accepté d’entrer en matière sur son opposition malgré sa tardiveté.

Il ne sera en conséquence pas donné suite à sa requête.

3) La procédure porte sur la conformité au droit de la décision du 18 février 2022 par laquelle l’hospice a confirmé la décision ordonnant au recourant de rembourser CHF 81'425.50, correspondant au montant des prestations financières d’aide sociale remboursables que l’hospice lui avait allouées du 1er décembre 2017 au 29 février 2020, et refusant de lui accorder une remise.

Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas la compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exceptions prévues par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisées dans le cas d’espèce.

4) Le recourant se plaint que la décision attaquée serait contraire au droit, reposerait sur une établissement erroné ou incomplet des faits, procéderait d’un excès ou d’un abus du pouvoir d’appréciation de l’autorité et violerait le principe de la bonne foi.

a. Aux termes de l'art. 12 Cst., quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté, et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

Le droit constitutionnel fédéral ne garantit toutefois que le principe du droit à des conditions minimales d'existence ; il appartient ainsi au législateur fédéral, cantonal et communal d'adopter des règles en matière de sécurité sociale qui ne descendent pas en dessous du seuil minimum découlant de l'art. 12 Cst. mais qui peuvent aller au-delà (arrêts du Tribunal fédéral 2P.318/2004 du 18 mars 2005 consid. 3 ; 2P.115/2001 du 11 septembre 2001 consid. 2a ; ATA/790/2019 du 16 avril 2019 et les références citées). L'art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst- GE - A 2 00) reprend ce principe : « toute personne a droit à la couverture de ses besoins vitaux afin de favoriser son intégration sociale et professionnelle ».

b. En droit genevois, la LIASI et le règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) mettent en œuvre ce principe constitutionnel.

La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Ses prestations sont fournies sous forme d'accompagnement social et de prestations financières (art. 2 LIASI). Ces dernières sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI) et leurs bénéficiaires doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l'aide financière est subsidiaire (art. 9 al. 2 LIASI ; ATA/790/2019 précité et les références citées).

Ont droit à des prestations d'aide financière les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève, ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 LIASI). Les conditions financières donnant droit aux prestations d'aide financière sont déterminées aux art. 21 à 28 LIASI.

En contrepartie des prestations auxquelles il a droit, le bénéficiaire s'engage, sous forme de contrat, à participer activement à l'amélioration de sa situation (art. 14 LIASI). Il est tenu de participer activement aux mesures le concernant (art. 20 LIASI), de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI) et de se soumettre à une enquête de l'hospice lorsque celui-ci le demande (art. 32
al. 2 LIASI).

5) a. Aux termes de l'art. 38 LIASI, si les prestations d'aide financière prévues par la loi ont été accordées dans l'attente de la liquidation d'une succession, du versement d'un capital pour cause de décès par la prévoyance professionnelle ou par une assurance-vie, elles sont remboursables (al. 1). L'hospice demande au bénéficiaire le remboursement des prestations d'aide financière accordées depuis l'ouverture de la succession, dès qu'il peut disposer de sa part dans la succession ou du capital provenant de la prévoyance professionnelle ou d'une assurance-vie (al. 2). Ces dispositions s'appliquent également aux prestations accordées dans l'attente de la liquidation du régime matrimonial ou du régime des biens des partenaires enregistrés ; dans ce cas, l'hospice demande le remboursement des prestations d'aide financière accordées depuis l'ouverture de l'action en liquidation du régime, dès que le bénéficiaire peut disposer de sa part de liquidation (al. 3). L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement ; le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 4).

Selon l'art. 40 LIASI, intitulé « dessaisissement et gains extraordinaires », si des prestations d'aide financière prévues par la LIASI ont été accordées alors que le bénéficiaire s'est dessaisi de ses ressources ou de parts de fortune, elles sont remboursables (al. 1). Il en est de même lorsque le bénéficiaire est entré en possession d'une fortune importante, a reçu un don, réalisé un gain de loterie ou d'autres revenus extraordinaires ne provenant pas de son travail, ou encore lorsque l'équité l'exige pour d'autres raisons (al. 2). L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 3).

b. Les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d'aide financière se montent à CHF 4'000.- pour une personne seule majeure (art. 1
al. 1 RIASI).

c. La chambre administrative a eu l'occasion de procéder à une interprétation historique de l'art. 40 al. 2 LIASI à la lumière des travaux préparatoires de la LIASI. Elle a retenu que cette disposition ne pouvait viser le seul remboursement des prestations servies dès l'entrée en possession de la fortune, mais bien aussi des prestations servies auparavant. En l'absence de limite temporelle passée fixée par la loi, on devait retenir que le législateur avait visé l'ensemble des prestations déjà servies, sans limite de temps, mais dans les seules limites de l'équité et de la proportionnalité (ATA/815/2021 du 10 août 2021 consid. 5d ; ATA/26/2021 du 12 janvier 2021 consid. 4d ; ATA/508/2016 du 14 juin 2016 consid. 8 et la référence citée). Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral.

Une « fortune importante » a été admise dans les cas suivants : un héritage de CHF 606'000.-, dont à déduire la créance de l’hospice en CHF 26'373.- (ATA/80/2012 du 8 février 2012) ; un héritage de CHF 495'730.-, dont à déduire la créance de l’hospice en CHF 252'091.90 (ATA/508/2016 précité consid. 10) ; un héritage de CHF 275'750.-, dont à déduire une créance de l’hospice de CHF 114'813.70.- (ATA/26/2021 précité consid. 6). Il a aussi été précisé que les prestations versées en faveur du bénéficiaire à un tiers devaient être remboursées si les montants étaient prouvés, comme par exemple dans le cas des primes d’assurance-maladie (ATA/508/2016 précité consid. 8 et la référence citée).

d. Enfin, la chambre de céans a déjà considéré à plusieurs reprises qu'il n'appartenait pas à l'État et indirectement à la collectivité, de désintéresser d'éventuels créanciers. En effet, tel n'est pas le but de la loi, qui poursuit celui de soutenir les personnes rencontrant des difficultés financières, en les aidant à se réinsérer socialement et professionnellement, étant rappelé que l'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource. Il n'est ainsi pas acceptable d'être au bénéfice d'une aide sociale ordinaire et d'utiliser sa fortune personnelle et récemment acquise pour désintéresser ses créanciers (ATA/815/2021 précité consid. 5e ; ATA/26/2021 précité consid. 4f ; ATA/479/2018 du 15 mai 2018 consid. 6 et les références citées).

6) Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161
consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2015 du 28 avril 2016 consid. 3.1 ; ATA/393/2018 du 24 avril 2018 consid. 6b). Ne peut prétendre à être traité conformément aux règles de la bonne foi que celui qui n'a pas lui-même violé ce principe de manière significative. On ne saurait ainsi admettre, dans le cas d'espèce, de se prévaloir de son propre comportement déloyal et contradictoire (arrêt du Tribunal fédéral 2A.52/2003 du 23 janvier 2004 consid. 5.2, traduit in RDAF 2005 II 109 ss, spéc. 120 ; ATA/112/2018 du 6 février 2018 consid. 4 ; ATA/1004/2015 du 29 septembre 2015 consid. 6d ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 580).

Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 ; 131 II 627 consid. 6.1). Conformément au principe de la confiance, qui s'applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent recevoir le sens que l'administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 consid. 2.2.1, in RDAF 2005 I 71 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 569 s.). Le principe de la confiance est toutefois un élément à prendre en considération et non un facteur donnant en tant que tel naissance à un droit (ATA/252/2018 du 20 mars 2018 consid. 8f ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 569). La protection de la bonne foi ne s'applique pas si l'intéressé connaissait l'inexactitude de l'indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

7) En l'espèce, le recourant ne conteste pas s’être dessaisi, dans les mois ayant précédé sa première demande d’aide sociale, des liquidités acquises en septembre 2016 (avoir de libre passage de CHF 265'268.10) et décembre 2016 (prix de vente d’un immeuble de CHF 95'601.-), à hauteur notamment de CHF 50'000.- pour solder selon ses dires une dette personnelle et de CHF 153'007.- au total virés à son ex-épouse. Il ressort de la documentation versée à la procédure que le compte courant Crédit suisse n° 1______-11 est ouvert à son nom et a été débité dès le 6 septembre 2016 en faveur de son ex-épouse suivant des ordres de bonification.

Il n’a pas apporté d’explications ou de pièces justificatives sur les obligations auxquelles il aurait satisfait en débitant son compte, étant observé que le jugement de divorce du 7 juin 2016 versé à la procédure donne acte aux époux qu’ils sont séparés de biens et n’ont aucune prétention l’un envers l’autre, et étant rappelé qu’en toute hypothèse l’éventuel acquittement de dettes est sans effet sur le dessaisissement dès lors que l’aide sociale n’a pas pour but de désendetter ses bénéficiaires.

Il ne conteste pas avoir signé les engagements de collaborer, reçu les décisions des 23 janvier et 5 avril 2018 ne lui accordant que des prestations d’aide financière remboursables en raison du récent dessaisissement de sa fortune et ne pas avoir recouru contre elles, contresigné un courrier du 28 novembre 2018 lui rappelant son obligation de rembourser et signé le même jour des instructions dans ce sens à l’OAI et au SPC.

Enfin, il ne conteste pas le calcul des montants perçus au titre de l’aide financière de l’hospice entre décembre 2017 et février 2020.

Il suit de là que la demande de restitution de CHF 81'425.50 du 2 juillet 2020, confirmée sur opposition le 28 février 2022, est fondée.

8) Le recourant soutient que son état de santé l’aurait empêché de comprendre les décisions des 23 janvier et 5 avril 2018, ce que l’hospice n’aurait pu ignorer et ce qui entraînerait leur nullité.

Il ne saurait être suivi. S’il a, certes, évoqué devant l’hospice un trouble psychique, c’était pour la première fois lors de l’entretien au CAS du 27 juin 2018, et il s’agissait d’une dépression qui durait depuis un an et faisait l’objet d’un traitement médical. Dans la demande de prestations d’aide financière du 3 novembre 2017, il avait expressément indiqué disposer d’une capacité de travail totale et que son fils alors mineur vivait avec lui sous sa garde, ce qui résulte par ailleurs du jugement de divorce. Enfin, il ne ressort pas du dossier de l’hospice que celui-ci aurait suspecté une diminution de sa capacité de discernement.

Le recourant a, certes, produit un certificat médical indiquant que ses troubles psychiques rendaient difficiles voire impossibles certaines tâches administratives du quotidien. Celui-ci date toutefois du 8 février 2021 et ne mentionne pas d’incapacité de discernement, même partielle. La lettre de nomination de la curatrice du 8 février 2022 ne mentionne pas non plus d’incapacité de discernement.

Le recourant échoue ainsi à rendre vraisemblable qu’il n’aurait pas compris le 23 janvier et le 5 avril 2018 que l’aide financière qui lui était allouée devrait être remboursée. Le grief portant sur l’invalidité des décisions sera écarté.

9) Le recourant fait valoir que Mme B______, son assistante sociale au CAS, lui aurait affirmé lors d’un entretien téléphonique du 17 décembre 2020 que la décision du 2 juillet 2020 « était une sorte de procédure "standard" et "obligatoire" mais qu[’il] ne serait pas tenu de rembourser le montant réclamé de CHF 81'425.50 », ce que l’hospice dément formellement. Selon le recourant, en lui réclamant le remboursement l’hospice se montrerait de mauvaise foi.

Le recourant n’apporte aucun indice de la réalité d’une telle déclaration et ses allégations n’apparaissent pas plausibles. Cela étant, même si les propos prêtés par le recourant à Mme B______ avaient été tenus, ils n’auraient pu avoir aucune influence sur la représentation que celui-ci pouvait se faire de ses obligations les 23 janvier et 5 avril 2018 lorsqu’une aide remboursable lui avait été octroyée, ou encore le 28 novembre 2018 lorsque son obligation de rembourser lui avait été rappelée. Ils auraient été postérieurs à la première demande de remboursement chiffrée du 2 juillet 2020 et ne l’auraient en tout cas pas dissuadé de faire valoir ses droits en formant opposition le 22 décembre 2020 puis recours le 23 mars 2022.

Il suit de là que le recourant n’aurait en toute hypothèse pas adapté son comportement à d’éventuelles assurances données par l’administration et que cette dernière, qui avait déjà réclamé le remboursement, ne pourrait se voir reprocher d’agir de mauvaise foi. Il s’ensuit que l’audition de Mme B______ sur ces allégations ne se justifie pas.

Le grief sera écarté.

10) Le recourant invoque les effets de sa faillite personnelle, prononcée en mai 2018. Ses dettes en remboursement de l’aide sociale seraient selon lui éteintes.

a. Selon l’art. 36 al. 5 LIASI, l'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement ; le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait. Lorsqu'il s'agit d'une créance de droit public, la prescription s'examine d'office. La prescription est notamment interrompue lorsque le créancier fait valoir ses droits par une action devant un tribunal (art. 135 ch. 2 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO-Code des obligations-RS 220]). Les conditions d'interruption de la prescription sont plus souples en droit public que celles prévues par l'art. 135 CO. Il s'agit de tout acte propre à faire admettre la prétention en question, visant à l'avancement de la procédure et accompli dans une forme adéquate. L'administré interrompt la prescription par toute intervention auprès de l'autorité compétente tendant à faire reconnaître ses droits. Pour l'autorité, le délai est interrompu en particulier dès lors qu'elle déclare son intention d'ouvrir une procédure et par tout acte qu'elle prend pendant celle-ci. En revanche, des actes préparatoires tels que des mesures d'instruction ne suffisent pas. Le débiteur doit avoir reçu connaissance du fait interruptif (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 100 et la jurisprudence citée).

b. Selon l’art. 206 al. 1 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1), les poursuites dirigées contre le failli s’éteignent et aucune poursuite ne peut être faite durant la liquidation de la faillite pour des créances nées avant l’ouverture de la faillite ; font exception les poursuites tendant à la réalisation de gages appartenant à un tiers. Selon l’al. 2 de la même disposition, les poursuites pour des créances nées après l’ouverture de la faillite se continuent par voie de saisie ou de réalisation de gage durant la liquidation de la faillite. L’art. 208 al. 1 LP prévoit que l’ouverture de la faillite rend exigibles les dettes du failli, à l’exception toutefois de celles qui sont garanties par des gages sur ses immeubles ; le créancier peut faire valoir, outre le capital, l’intérêt courant jusqu’au jour de l’ouverture et les frais. L’art. 267 LP dispose que les créances dont les titulaires n’ont pas participé à la faillite sont soumises aux mêmes restrictions que celles pour lesquelles un acte de défaut de biens a été délivré. Selon l’art. 265 al. 2 LP, l’acte de défaut de biens permet de requérir le séquestre et il produit les effets juridiques mentionnés aux art. 149, al. 4, et 149a LP. Toutefois une nouvelle poursuite ne peut être requise sur la base de cet acte que si le débiteur revient à meilleure fortune. Sont également considérées comme meilleure fortune les valeurs dont le débiteur dispose économiquement.

c. En l’espèce, les décisions des 23 janvier et 5 avril 2018 statuaient sur le « caractère remboursable » de l’aide financière octroyée, ainsi que le mentionnait expressément l’indication des voies et délais d’opposition. Le remboursement a quant à lui formellement été réclamé et chiffré le 2 juillet 2020. Cette dernière décision constitue un acte interruptif de la prescription (ATA/1291/2021 du 28 septembre 2021 consid. 8d) et les créances en remboursement, nées de chaque versement de prestation d’aide financière, soit au plus tôt le 1er décembre 2017, ne sont pas prescrites sous l’angle de la LIASI.

Sous l’angle de la LP, les prestations d’aide sociale déclarées remboursables et servies de décembre 2017 à mai 2018, soit CHF 11'385.20 au total, ainsi que les subsides, soit CHF 1'894.70, sont devenus exigibles le 17 mai 2018 par l’effet de la loi suite au prononcé de la faillite du recourant. Il était alors loisible à l’hospice de les faire valoir dans la faillite personnelle de celui-ci (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 1175 p. 405), ce qu’il ne soutient pas avoir fait. Il restera loisible à l’hospice de chercher à en obtenir ultérieurement l’exécution forcée par la voie de la saisie aux conditions de l’art. 265 al. 2 LP. Les créances en remboursement de l’aide sociale nées après la faillite du recourant pourront faire l’objet de poursuites ordinaires selon l’art. 206 al. 2 LP.

Les considérations qui précèdent ne concernent toutefois que l’exécution forcée et sont sans portée sur le bien-fondé de la décision de l’hospice ordonnant le remboursement de CHF 81’435.50 objet de la présente procédure.

Le même raisonnement s’applique aux développements du recourant sur le caractère insaisissable de ses rentes d’invalidité ou sur son minimum vital au sens du droit de la poursuite. Ceux-ci pourront être invoqués pour faire échec à une éventuelle poursuite intentée par l’hospice mais n’affectent pas la validité de la créance chiffrée par la décision querellée.

Le grief sera écarté.

11) Le recourant invoque enfin sa bonne foi à l’appui d’une remise de sa dette.

a. Selon l’art. 42 al. 1 LIASI, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile.

De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4b ; ATA/193/2016 du 1er mars 2016 consid. 4d et les arrêts cités). Indépendamment du rapport peu clair entre l’art. 36 al. 2 et al. 3 LIASI et l’art. 42 al. 1 LIASI, déjà évoqué (ATA/167/2014 du 18 mars 2014 consid. 8), un administré qui a contrevenu à son obligation d’information ne peut se prévaloir de sa bonne foi (ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4b ; ATA/193/2016 du 1er mars 2016 consid. 4e et les arrêts cités).

b. En l’espèce, le recourant ne conteste pas avoir initialement omis de déclarer un élément de sa fortune ni le fait de s’en être dessaisi. Cet élément est toutefois sans portée pour la solution du litige dès lors que le défaut de collaboration et le dessaisissement avaient déjà été pris en compte et avaient motivé le caractère remboursable de l’aide financière à venir, dont le principe avait été arrêté début 2018 et est entré en force faute d’avoir été contesté par le recourant.

Celui-ci ne peut aujourd’hui se prévaloir de sa bonne foi, puisqu’il savait dès l’octroi des prestations en cause qu’il devrait rembourser l’aide en raison du dessaisissement. Il ne peut, en d’autres termes, soutenir qu’il ignorait de bonne foi qu’il pourrait être tenu de rembourser.

La condition cumulative de la bonne foi faisant défaut, la remise ne pouvait être accordée, ce que l’hospice a constaté à bon droit. Il s’ensuit que la question de savoir si la décision attaquée, qui ne faisait que chiffrer le total à rembourser alors que le principe du remboursement était acquis dès le début de l’année 2018, a pu placer le recourant dans une situation difficile pourra demeurer ouverte.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

12) Vu la nature et l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 mars 2022 par Monsieur A______ contre la décision de l’Hospice général du 18 février 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christophe De Kalbermatten, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :