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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2287/2015

ATA/790/2015 du 31.07.2015 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2287/2015-FPUBL ATA/790/2015

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 31 juillet 2015

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me François Membrez, avocat

contre

COMMUNE DE B______
représentée par Me François Bellanger, avocat



Attendu en fait que :

1) Monsieur A______, né le ______ 1961, a été engagé par la commune de B______ (ci-après : la commune), en qualité de concierge, à un taux de 100% à partir du 1er aout 1993.

2) Par courrier du 5 octobre 2005, le maire de la commune a donné un premier avertissement à M. A______ en lui rappelant qu'il était tenu de respecter les horaires figurant sur son cahier des charges.

3) En 2007, M. A______ s'est rendu compte que le nombre de ses anuités n'avait pas évolué depuis l'année 2000.

4) Par pli du 9 février 2007, la commune a informé l'intéressé qu'elle avait réactualisé les montants des contributions à la caisse d'assurance du personnel. Le décompte de rattrapage pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2006, faisait mention d'un salaire brut de CHF 50'773.10 à verser à M. A______.

5) Par pli du 12 mars 2007, un nouvel avertissement a été adressé à l'intéressé en raison de son comportement inacceptable envers le maire de la commune.

M. A______ avait reproché au maire de ne pas avoir respecté les directives et l'échelle des traitements 2008 de la Ville de Genève.

6) Par courrier du 7 janvier 2009, la commune a adressé à M. A______ le rapport du procès-verbal de la séance du 16 décembre 2008, relative à son évaluation pour l'année 2008.

Nonobstant l'établissement d'un nouveau cahier des charges pour l'année 2008, l'intéressé ne donnait toujours pas satisfaction dans l'accomplissement de son travail, de nombreux manquements lui étaient reprochés, des courriers provenant d'associations faisaient état d'une insatisfaction relative à la propreté des locaux. Il lui avait été donc demandé de changer radicalement son comportement et de faire preuve d'efficacité au travail, cas échéant, des sanctions seraient prononcées à son encontre.

7) Le 9 février 2011, M. A______ a eu un entretien d'évaluation pour l'année 2011 avec son responsable hiérarchique Monsieur C______.

Les prestations de l'intéressé étaient à nouveau peu satisfaisantes voire insuffisantes. Après une année de collaboration, M. C______ avait constaté que M. A______ « exécutait son travail sans intérêt et sans conviction, ce dernier n'appréciait pas les contrariétés et les changements dans ses habitudes ».

8) Par courrier du 24 février 2011, le maire a rappelé une fois de plus à M. A______ l'insatisfaction donnée par son travail.

9) Le 21 septembre 2011, M. A______ a eu un entretien avec le maire de la commune Madame D______ et Monsieur C______.

Bien que l'intéressé soit apprécié des élèves et du corps enseignant pour sa responsabilité de concierge, et, que des améliorations avaient été constatées notamment au niveau de l'entretien du bâtiment de la mairie et de la salle communale, le maire a fait part de son inquiétude quant au manque de motivation générale de l'intéressé.

Le contenu de l'entretien a été repris dans un courrier du 5 octobre 2011 adressé à M. A______.

10) Le 22 avril 2013, dans une note à l'attention de l'exécutif communal, M. C______, s'est plaint de l'attitude négative de M. A______.

Malgré les efforts et nombreuses tentatives afin de trouver une solution qui convienne à l'intéressé, aucune amélioration n'a été constatée. Bien qu'agréable en tant que personne, M. A______ « n'a aucune compétence pour être concierge ».

11) Le 24 avril 2013, M. A______ a eu un entretien avec les membres de l'exécutif communal et M. C______ suite à la plainte du 22 avril 2013.

12) Par courrier du 2 mai 2013, le contenu de l'entretien du 24 avril 2013 a été adressé à M. A______.

Les règles de travail avaient été réexpliquées à l'intéressé, une dernière proposition d'horaires de la part du collaborateur serait attendue jusqu'au 8 mai 2013. Toutefois, si cette proposition ne convenait pas à la commune, elle serait dans l'obligation de prendre une décision quant à la continuation des rapports de service.

13) Lors de l'entretien du 3 juillet 2013 le maire a fait part des doléances de la directrice d'école, respectivement, des responsables du E______ Basket.

Les relations entre M. A______ et le corps enseignant s'étaient fortement dégradées et les contacts étaient rompus, la directrice d'école déplorait également le manque de propreté des locaux. Le même constat concernant l'état des locaux avait été fait par les responsables de club sportif.

14) Par pli du 8 juillet 2013, rappelant la teneur de l'entretien du 3 juillet 2013, le maire de la commune a expressément demandé à M. A______ de changer d'attitude et lui a signifié que ce courrier devait être considéré comme un avertissement formel.

 

15) Lors de sa séance du 16 mars 2015, le conseil municipal de la commune a adopté un nouveau statut et un règlement du personnel (ci-après : le statut, respectivement le règlement) dont l'entrée en vigueur était prévue au 1er avril 2015.

16) En date du 1er avril 2015, un nouveau contrat a été proposé par la commune à M. A______, contrat qui annulerait et remplacerait celui du 29 avril 1993.

17) Deux entretiens ont eu lieu les 25 mars et 15 avril 2015, au cours desquels, l'intéressé a posé un certain nombre de questions à son employeur concernant les nouveaux statuts.

18) Par pli du 29 avril 2015, l'exécutif communal a répondu aux interrogations de M. A______. Une copie de son dossier administratif lui avait été remise. Le même jour, l’intéressé s'est entretenu avec l'exécutif communal et Monsieur F______, le nouveau responsable hiérarchique.

19) Par courrier du 13 mai 2015, le maire de la commune a adressé à M. A______, un rapport de l'entretien du 29 avril 2015. Le nouveau responsable hiérarchique s'étonnait du manque d'organisation de l'intéressé après vingt années d'expérience professionnelle au sein de la commune.

20) Le 20 mai 2015, M. A______ a signé son nouveau contrat de travail.

21) Le 2 juin 2015, M. A______ a reçu une note de service qui mentionnait sous la rubrique « objet » un entretien avec l'exécutif le mercredi 3 juin à 09h45.

22) Par décision du 3 juin 2015, déclarée exécutoire nonobstant recours, la commune a résilié les rapports de service de M. A______ avec effet au 30 septembre 2015 et décidé de le libérer avec effet immédiat de son obligation de travailler. À l'issue de l'entretien, une copie de cette décision a été remise à l'intéressé qui a refusé de la signer.

L'insuffisance des prestations de M. A______ a été relevée à d'innombrables reprises au cours de ses années de services. De nombreuses plaintes ont été adressées par les enseignants de l'école de B______, par des associations ou institutions louant des locaux dont l'entretien et le nettoyage incombaient à l'intéressé. La commune lui reprochait notamment son comportement inadéquat envers son employeur, ses collègues, ou encore les enseignants et la directrice de l'école, son incapacité à organiser ses tâches en fonction du degré de priorités, son manque de ponctualité, sa nonchalance et le non-respect des horaires fixés. Malgré plusieurs avertissements en 2005, 2007, 2008 et 2013 ainsi que les nombreuses tentatives afin de tenter d'aider le collaborateur à repartir sur de meilleures bases, les problèmes constatés étaient toujours présents en 2015 et s'étaient accentués avec le temps de sorte que la continuation des rapports de service n'était plus envisageable.

 

23) Par acte du 2 juillet 2015, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 3 juin 2015. Il a conclu, préalablement, à la restitution de l'effet suspensif, à l'ouverture d'une instruction complète et à la comparution personnelle des parties. Principalement, la chambre administrative devait annuler, sous suite de frais et dépens, la décision de licenciement et dire que M. A______ était toujours employé communal de B______ pour la période postérieure au 30 septembre 2015. Subsidiairement, la commune devait être condamnée à payer à M. A______ une indemnité correspondant à vingt-quatre mois de son dernier traitement brut avec intérêts à 5% l'an dès le 1er octobre 2015.

La restitution de l'effet suspensif s'imposait pour sauvegarder les intérêts du recourant qui sans cela perdrait son droit au salaire dès le 30 septembre 2015. M. A______ n'avait nullement été prévenu qu'une résiliation des rapports de travail était envisagée lorsqu'il s'était présenté à l'entretien de service au cours duquel la fin des rapports de travail lui avait été annoncée. L'intimée avait gravement violé son droit d'être entendu dans la procédure de licenciement. Au vu de ces éléments qui entraînaient la nullité de la décision de licenciement, l'effet suspensif devait être restitué au présent recours.

24) Par observations du 15 juillet 2015, la commune a conclu au rejet de la requête en restitution de l'effet suspensif. Principalement, le recours formé le 2 juillet 2015 par M. A______ devait être rejeté et la décision de licenciement du 3 juin 2015 confirmée, le tout sous suite de frais et dépens.

La demande de restitution de l'effet suspensif était infondée. Si la décision de licenciement était si gravement viciée à la forme de sorte à rendre le congé nul, le contrat perdurerait et la « restitution, ou non, de l'effet suspensif serait sans effet sur la fin des rapports de service ». Dès lors qu'une réintégration était exclue par l'intimée, l'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration et à surseoir au retour éventuel du recourant sur son lieu de travail l'emportait sur celui privé de l'intéressé. Les arguments de l'intimée seront repris en tant que besoin dans la partie en droit.

25) Par correspondance du 20 juillet 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

Considérant, en droit, que :

1) La compétence pour ordonner la restitution de l’effet suspensif au recours appartient au président de la chambre administrative (art. 7 du règlement interne de la chambre administrative du 21 décembre 2010, entré en vigueur le 1er janvier 2011).

2) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif (art. 66 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

L’autorité décisionnaire peut toutefois ordonner l’exécution immédiate de sa propre décision, nonobstant recours, tandis que l’autorité judiciaire saisie d’un recours peut, d’office ou sur requête, restituer l’effet suspensif à ce dernier (art. 66 al. 2 LPA).

3) Selon la jurisprudence constante, les mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/248/2011 du 13 avril 2011 consid. 4 ; ATA/197/2011 du 28 mars 2011 ; ATA/248/2009 du 19 mai 2009 consid. 3 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 consid. 2). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HAENER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungs-verfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, 265).

4) Le recourant est soumis au statut du personnel de la commune de B______ et à son règlement adoptés le 16 mars 2015 et en vigueur depuis le 1er avril 2015.

Selon l'art. 39 du statut, l'exécutif communal peut résilier les rapports de service pour un motif fondé et dûment motivé (al. 1). Le collaborateur a la faculté de se déterminer sur cette résiliation soit lors d'un entretien précédent la remise de la décision de résiliation, soit par écrit moyennant le respect d'un délai de trente jours minimum (al. 2). La résiliation est notifiée sous la forme d'une décision administrative, exécutoire nonobstant recours et mentionnant la possibilité d'un recours auprès de la chambre administrative (al. 3). En cas de recours contre la décision de licenciement, l’annulation de la décision de licenciement par la chambre administrative n'entraîne jamais la réintégration de l'employé. En cas d'admission du recours par la chambre administrative, le recourant ne pourra prétendre qu'à une indemnité qui correspondra au plus à huit moins de salaire net (al. 4).

Ni le statut ni le code des obligations (loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220) auquel il renvoie à titre de droit public supplétif (art. 3 al. 3 statut) ne permettent à la chambre administrative d’imposer la réintégration d’un agent public dont les rapports de service ont été résiliés.

5) Dans sa détermination, l’autorité intimée a clairement indiqué qu’elle n’entendait pas poursuivre les relations de travail avec le recourant.

6) S’il était fait droit à la demande de restitution de l’effet suspensif du recourant, la chambre de céans rendrait une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond, de sorte qu’il n’y a pas lieu de procéder en l’espèce à une pesée des intérêts en présence (ATA/739/2014 du 17 septembre 2014 ; ATA/561/2014 du 22 juillet 2014 ; ATA/525/2014 du 4 juillet 2014 ; ATA/111/2014 du 21 février 2014 ; ATA/263/2013 du 26 avril 2013 ; ATA/107/2012 du 22 février 2012 ; ATA/92/2012 du 17 février 2012).

7) Partant, la demande de restitution de l'effet suspensif doit être rejetée. Le sort des frais sera réservé jusqu’à droit jugé au fond.

vu l’art. 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ;

vu l’art. 7 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 21 décembre 2010 ;


LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande de restitution de l’effet suspensif au recours interjeté le 2 juillet 2015 par Monsieur A______ contre une décision de licenciement de la commune de B______ du 3 juin 2015 ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me François Membrez, avocat du recourant ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de la commune de B______.

 

 

 


Le président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :