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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2801/2016

ATA/782/2016 du 16.09.2016 sur JTAPI/850/2016 ( MC ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.10.2016, rendu le 20.10.2016, RETIRE, 2C_932/2016
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2801/2016-MC ATA/782/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 septembre 2016

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Dina Bazarbachi, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 août 2016 (JTAPI/850/2016)


EN FAIT

1. Monsieur A______, alias B______, ressortissant algérien né le ______1993, est entré en Suisse en 2011 et a déposé une demande d'asile le 9 mai 2011.

2. Le 12 mars 2012, l'office fédéral des migrations (ci-après : ODM), devenu entretemps le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), a refusé d'entrer en matière sur la demande d'asile précitée, et a prononcé le renvoi de Suisse de M. A______, ordonnant l'exécution de cette mesure un jour après son entrée en force.

3. Cette décision est devenue définitive et exécutoire après le rejet, le 4 mai 2012, du recours de l'intéressé par le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF), puis de la demande de révision dudit arrêt par le TAF le 31 mai 2014 et, enfin, de l'échec de la demande de reconsidération de la susdite décision présentée le 22 juin 2012, tant devant le SEM le 26 juillet 2012 que devant le TAF le 3 septembre 2012.

4. Le canton de Genève ayant été chargé de l'exécution du renvoi, l'intéressé a été entendu par un collaborateur de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) en date du 25 mai 2012. Il a été informé de son obligation de collaborer pour organiser son départ et des conséquences d'une absence de collaboration. À cette occasion, il a déclaré « je resterai ici comme tout le monde, avec votre papier, les gens restent 5, 10 ans et je travaillerai au noir, comme tous les autres ».

5. Le 27 février 2014, le SEM a demandé au consulat général de la République algérienne démocratique et populaire en Suisse (ci-après : le consulat), sis dans le canton de Genève, de confirmer l'identité de l'intéressé et, cas échant, de délivrer un laissez-passer valable pour une durée d'un mois afin de procéder à son rapatriement.

6. Le 19 juin 2014, le SEM a informé l'OCPM que M. A______ avait été reconnu par les autorités algériennes et qu'un laissez-passer pouvait être obtenu auprès du consulat.

7. Lors d'un nouvel entretien, le 28 juillet 2014, avec un collaborateur de l'OCPM, M. A______ a déclaré qu'il n'avait pas commencé à organiser son retour en Algérie, attendant que sa famille lui téléphone « pour lui dire que son problème était réglé ».

8. Le 23 septembre 2014, l'OCPM a informé le SEM que M. A______ avait disparu depuis le 28 août 2014.

9. Le 14 janvier 2015, l'OCPM a informé le SEM de la reprise du séjour de M. A______. Ce dernier avait indiqué avoir voyagé à Bâle où il était resté deux mois et demi pour aider des amis syriens, puis il était parti à Berne un mois, séjournant chez des amis ou dans une auberge de jeunesse et, enfin, avait passé quelques jours à Bienne, dormant également dans une auberge de jeunesse. Il était revenu à Genève le 6 janvier 2015.

10. Le 20 janvier 2015, l'OCPM a demandé à la police genevoise d'exécuter le renvoi de M. A______, en prévoyant de le mettre en détention administrative, le laissez-passer devant être obtenu via le SEM.

11. Le 21 janvier 2015, l'intéressé a été inscrit par le SEM pour la réservation d'une place sur un vol de ligne à destination d'Alger.

12. Le 22 janvier 2015, un billet d'avion a été réservé auprès d’Air Algérie en faveur de M. A______ pour un vol direct à destination d'Alger le 20 août 2015.

13. Le 19 juillet 2015, M. A______ a été interpellé par la police et déféré au Ministère public qui l'a condamné par ordonnance pénale du 20 juillet 2015 à une peine pécuniaire de soixante jours-amende à CHF 30.- le jour-amende pour infraction à l'art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20).

14. Le 20 juillet 2015, l'officier de police a ordonné la mise en détention administrative de l'intéressé pour une durée de quatre mois afin de pouvoir exécuter son renvoi en Algérie, des indices concrets faisant craindre qu'il s'y soustraie, dès lors qu'il avait dissimulé sa véritable identité, n'avait jamais entrepris la moindre démarche afin d'organiser son retour et affirmé son refus de retourner dans son pays.

Lors de son audition, l'intéressé a indiqué qu'il n'était pas en bonne santé, souffrant de maux de tête et de maux de ventre, et était en traitement médical. Il n'était pas d'accord de retourner en Algérie.

15. Le dossier de M. A______ a été transmis le même jour au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) pour examen d'office de la légalité et de l'adéquation de l'ordre de mise en détention en application des dispositions de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10).

16. Le 22 juillet 2015, le TAPI a demandé à l'officier de police si, comme dans un cas précédent, une nouvelle audition de M. A______ par une délégation algérienne était nécessaire afin d'obtenir un laissez-passer en vue du vol du 20 août 2015 et, cas échant, fournir toutes les indications utiles sur les démarches en cours afin qu'il puisse prendre son vol.

17. L'officier de police a immédiatement répondu que le vol précité avait été annulé, qu'un nouveau vol serait réservé et que les autorités algériennes seraient « indisponibles jusqu'à leur visite qui devrait intervenir à la mi-août ».

18. Le 23 juillet 2015, le TAPI a entendu les parties.

M. A______ a confirmé qu'il ne souhaitait pas retourner en Algérie car il était très malade. Il souffrait de migraines et avait un problème au bras gauche. Depuis son arrivée en Suisse, il avait toujours logé dans des foyers. Il était aidé par l'Hospice général. Courant 2014, il avait quitté le canton de Genève durant plusieurs mois pour aller déposer une demande d'asile dans le canton de Bâle, sans prévenir les autorités genevoises. Il recevait son courrier au foyer où il logeait. Courant juillet 2015, il n'avait reçu aucune convocation en vue d'une audition par les autorités algériennes. S'il était remis en liberté, il continuerait à se rendre à ses rendez-vous médicaux comme aux entretiens auxquels il serait convoqué en vue de l'exécution de son renvoi, y compris à l'aéroport, mais ne monterait pas dans l'avion devant le ramener en Algérie. Il a conclu à l'annulation de l'ordre de mise en détention administrative.

Le représentant de l'officier de police a déclaré que l'Algérie demandait de présenter ses ressortissants au consul une nouvelle fois avant tout renvoi. Dans le cas particulier, la présentation était prévue le 15 juillet 2015, mais l'intéressé n'avait pas pu être trouvé ce jour-là. Les personnes concernées n'étaient pas convoquées préalablement pour ce type d'audition. Lorsque l'ordre de mise en détention avait été pris à l'encontre de M. A______, la police savait que celui-ci n'avait pas été entendu par la délégation algérienne et que, par conséquent, il serait difficile d'obtenir un laissez-passer pour le vol du 20 août 2015. Des démarches avaient toutefois été entreprises via le SEM auprès du consul, afin que celui-ci accepte de voir M. A______ avant le départ prévu et que le laissez-passer puisse être obtenu. Le consul avait répondu négativement et indiqué qu'il ne verrait personne avant mi-septembre 2015. Le vol avait alors été annulé et une demande de réservation pour un nouveau vol à partir de la mi-septembre avait été adressée au SEM. L'ordre de mise en détention administrative devait être confirmé, vu les démarches à entreprendre, l'intéressé pouvant mettre fin en tout temps à sa détention en décidant de partir volontairement.

19. Par jugement du 23 juillet 2015, communiqué en mains propres aux parties à l'issue de l'audience, le TAPI a confirmé l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois, jusqu'au 20 novembre 2015. Par arrêt du 12 août 2015 (ATA/834/2015), la chambre administrative a rejeté le recours de l’intéressé.

Les conditions d’application de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr étaient remplies. M. A______ faisait l'objet d'une décision de renvoi définitive et exécutoire, prononcée par le SEM le 12 mars 2012.

S'il s'était présenté aux entretiens avec les autorités suisses et algériennes auxquels il avait été convoqué et n'avait pas entravé l’établissement du laissez-passer par le consulat, il n'avait effectué aucune démarche en vue de son départ de Suisse, avait affirmé à réitérées reprises ne pas vouloir retourner en Algérie, et avait disparu entre le 25 août 2014 et le 6 janvier 2015.

Si l'on ne pouvait reprocher aux autorités un manque de célérité jusqu'au 15 juillet 2015, force était de constater que par leur hâte ultérieure, elles avaient compromis la mise en œuvre du renvoi qui devait intervenir le 20 août 2015. Dans ces circonstances, compte tenu du comportement de M. A______, cela n'était néanmoins pas de nature à remettre en cause la mise en détention, l'ordre de mise en détention administrative étant ainsi confirmé. Si les autorités compétentes ne réussissaient pas à exécuter le renvoi d’ici là, il leur appartiendrait de démontrer que des démarches diligentes avaient été entreprises sans désemparer et de les documenter, de même que les difficultés auxquelles elles se heurteraient.

20. Un nouveau vol a été réservé pour le 9 novembre 2015 puis annulé par swissREPAT en raison de l'embargo annoncé par la compagnie aérienne Swiss concernant les renvois sur l'Algérie. La réservation d'un nouveau vol restait en cours d'organisation.

Il ressortait de la note d'annulation du SEM que « (…) vu la situation actuelle et le peu de possibilité de renvoi (pour le moment seulement avec Air Algérie) le temps d’attente pourrait se monter à 6 mois. Pour le cas annexé, la prochaine date pour une réservation de vol n’est pas encore définie. Nous essayons de traiter en priorité les cas où il y a un délai de détention à respecter. Pour les vols concernant les retours volontaires en Algérie, il n’y a aucune restriction jusqu’à présent. Les réservations de vol se font en majeure partie à partir de l’aéroport de Bâle-Mulhouse avec Aigle Azur et Air Algérie ».

21. Une place sur un vol à destination de l'Algérie a été obtenue le 26 octobre 2015 pour le 21 mars 2016.

22. Par requête motivée du 10 novembre 2015, l'OCPM a sollicité auprès du TAPI la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de cinq mois.

23. Le 17 novembre 2015, devant le TAPI, M. A______ a confirmé s'appeler A______ et non pas B______. Son conseil a déposé copie d'un courrier du 21 juin 2012 du SEM auquel était joint son acte de naissance confirmant son nom. Il n'avait malheureusement pas gardé copie de cet acte de naissance. Il était toujours opposé à son renvoi en Algérie car il avait « des problèmes là-bas ». Il avait logé depuis janvier 2015 au foyer de la Gabelle, et bénéficiait d'une aide financière de l'Hospice général (notamment de repas gratuits).

La représentante de l'OCPM a confirmé que M. A______ devrait être présenté devant les autorités algériennes environ deux semaines avant la date du vol afin d'obtenir un laissez-passer. Les autorités algériennes organisaient des rencontres avec plusieurs personnes devant repartir : l’OCPM était averti environ un à deux mois à l'avance. Elle a conclu à la confirmation de la demande de prolongation de la détention administrative pour une durée de cinq mois, soit jusqu'au 20 avril 2016.

Le conseil de M. A______ a conclu à la mise en liberté immédiate de son client, la demande de prolongation violant manifestement le principe de célérité. En outre, en 2014, son client n'avait pas disparu dans la clandestinité mais s'était rendu à Vallorbe afin de déposer une deuxième demande d'asile.

24. Par jugement du 17 novembre 2015, le TAPI a accepté la demande de prolongation sollicitée jusqu'au 20 avril 2016.

25. Par acte posté le 27 novembre 2015, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, et principalement à l'annulation du jugement entrepris et à une libération immédiate.

Il n'y avait pas de motif de détention, celui invoqué ne pouvant être réalisé. En effet, en septembre 2014, il s'était rendu à Bâle pour solliciter à nouveau l'asile, et avait durant cette période séjourné à Vallorbe. Il s'était toujours tenu à disposition des autorités.

Il n'avait pas réussi à obtenir des papiers d'identité. Depuis septembre 2015, les autorités suisses devaient obtenir un laissez-passer mais n'avaient rien entrepris en ce sens. Le principe de célérité avait ainsi été violé, de même que celui de la proportionnalité, la durée de la détention n'étant ni adéquate ni nécessaire.

Il joignait à son recours une attestation de son père, domicilié à Massy en région parisienne. Ce dernier était prêt à l'accueillir et à le prendre en charge.

26. Par arrêt du 8 décembre 2015 (ATA/1302/2015), la chambre administrative a rejeté le recours.

Les conditions d’application de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr restaient remplies. Les autorités suisses avaient effectué toutes les démarches nécessaires et utiles en vue de procéder au renvoi de M. A______, ayant réservé une place sur un vol à destination d'Alger, place confirmée pour le 21 mars 2016, aucune date plus proche n'ayant pu être trouvée suite à l'embargo décrété par Swiss, ce qui ne pouvait leur être reproché. Le principe de la proportionnalité était respecté malgré la durée relativement longue jusqu’à l’exécution prévue du renvoi.

27. Le 11 janvier 2016, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal fédéral contre l'ATA/1302/2015.

28. Par arrêt du 2 février 2016 (2C_18/2016), le Tribunal fédéral a rejeté le recours de M. A______.

Les critiques du recourant reposaient sur sa propre vision de la situation, qui ne tenait pas compte des faits constatés. Tel était en particulier le cas lorsqu'il affirmait ne pas pouvoir obtenir de laissez-passer de la part des autorités algériennes. Elles confinaient même à la témérité lorsqu'il osait affirmer qu'l s'était toujours montré collaborant et disponible.

Par ailleurs, bien que le délai d'attente jusqu'au prochain vol fût long, le principe de la proportionnalité était respecté, compte tenu de la situation particulière qui obligeait de passer par Air Algérie pour permettre le renvoi des ressortissants algériens.

29. M. A______ a été présenté les 3 février et 14 mars 2016 aux autorités algériennes, qui lui ont délivré un laissez-passer le 17 mars 2016.

30. Le 21 mars 2016, M. A______ s'est opposé à son renvoi par vol de ligne à destination d'Alger, disant vouloir rejoindre ses parents en France.

31. Le 6 avril 2016, l'OCPM a sollicité auprès du TAPI la prolongation de la détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 20 juillet 2016.

32. Par jugement du 12 avril 2016, le TAPI a prolongé la détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 20 juillet 2016.

Un nouveau vol, cette fois sous escorte policière, était en préparation, et prévu pour juillet ou août 2016. Les autorités suisses avaient effectué toutes les démarches nécessaires en temps utile. La durée de la détention n'était pas disproportionnée, eu égard notamment au refus persistant de l'intéressé de se soumettre à son renvoi – refus qui ne pouvait constituer un motif de levée de la détention.

33. Le 20 avril 2016, M. A______ a formé auprès du TAPI une demande de mise en liberté.

34. Par acte posté le 25 avril 2016, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI du 12 avril 2016, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, et principalement à sa mise en liberté immédiate.

Il était détenu administrativement depuis neuf mois. Il s'était engagé à quitter la Suisse immédiatement pour rejoindre son père en France. Selon ce dernier, son fils pourrait aisément obtenir un titre de séjour en France ; il ne pouvait toutefois faire aucune démarche depuis un centre de détention.

La prolongation de la détention était totalement disproportionnée compte tenu des incertitudes quant à l'effectivité d'un renvoi en Algérie. Dès lors qu'il s'opposait à son renvoi vers l'Algérie mais qu'il était disposé à quitter immédiatement la Suisse pour la France, sa détention n'était ni adéquate ni nécessaire. La mesure le privait d'une formation qu'il suivait avec engouement et motivation.

35. Le 26 avril 2016, le centre de coopération policière et douanière (ci-après : CPD) a répondu par courriel à une demande de l'OCPM.

Le document officiel français produit par M. A______ et datant de 2014 avait bien été émis, mais avait été annulé un mois plus tard. L'intéressé avait en l'état l'obligation de quitter le territoire français, décision notifiée à Dijon le 2 avril 2014.

36. Par jugement du 26 avril 2016, le TAPI a rejeté la demande de mise en liberté et a confirmé en tant que de besoin la détention jusqu'au 20 juillet 2016.

Au vu des nouveaux éléments obtenus par l'OCPM au sujet du séjour en France de l'intéressé, il y avait lieu de douter qu'il puisse y obtenir un titre de séjour.

37. Le 28 avril 2016, l'OCPM a conclu au rejet du recours formé par l’intéressé devant la chambre administrative.

Les récentes déclarations de M. A______ concernant la possibilité d'obtenir à nouveau un titre de séjour en France n'étaient pas étayées et, partant, avaient peu de crédibilité. Il était étonnant qu'il ait déposé une demande d'asile en Suisse alors qu'il aurait eu le droit de séjourner en France, et l'on ne comprenait pas non plus pourquoi il était reparti pour la France avant que les autorités suisses ne statuent sur ladite demande d'asile. Il n'avait que très récemment évoqué avoir disposé d'un droit de séjour en France, ce qui était tout aussi surprenant. La nécessité de se trouver sur sol français pour entreprendre les formalités nécessaires à un regroupement familial était contestée.

Les démarches avaient été entreprises sans tarder afin d'organiser un vol avec escorte. Même en tenant compte de la durée de la détention autorisée par le TAPI, celle-ci restait bien inférieure au maximum légal.

38. Par arrêt du 3 mai 2016, la chambre administrative a rejeté le recours de M. A______ contre le jugement du TAPI du 12 avril 2016. Un risque de fuite au sens de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr subsistait. Aucun élément nouveau n’étant intervenu depuis le dernier arrêt de la chambre administrative. Le principe de célérité avait été respecté par les autorités helvétiques, le renvoi ne pouvant se réaliser qu’en raison de l’opposition de l’intéressé. Le maintien en détention était proportionné, car on ne pouvait retenir que des doutes quant à l’exécution effective du renvoi en fin de processus permette de considérer la détention d’un étranger comme inadéquate. Aucune mesure moins incisive ne permettrait d’atteindre le but poursuivi, notamment la possibilité d’un renvoi en France, qui, au vu des informations transmises par les autorités de ce pays, s’avérait impossible. Il n’était pas possible de s’appuyer sur un refus persistant de rentrer en Algérie pour obtenir sa mise en liberté.

39. Le 25 août 2016, M. A______ a refusé de prendre place dans l’avion qui devait l’emmener en Algérie dans le cadre d’un renvoi organisé avec escorte policière.

40. Le même jour, à 16h40, le commissaire de police a émis un nouvel ordre de mise en détention administrative à son encontre, fondé sur son insoumission, d’une durée d’un mois. Le seul élément qui empêchait le renvoi était le refus de l’intéressé de prendre place sur un vol de ligne pour l’Algérie.

41. Dans le cadre du contrôle de la légalité de ce nouvel ordre de mise en détention administrative, M. A______ a été entendu par le TAPI le 29 août 2016. Il a persisté dans son refus de retourner en Algérie. Sa seule intention était de se rendre en France chez son père. Le 25 août 2016, lorsqu’on avait essayé de le faire monter dans l’avion, il avait fait l’objet de violences de la part de la police. Il avait encore des douleurs au cou, suite à une clé pratiquée sur lui. Il envisageait de déposer une plainte contre la police. Il était atteint dans sa santé psychique, étant victime de dépression et traumatisé par son séjour en prison. Il n’entendait pas quitter la Suisse et ce, même après dix-huit mois de détention. Il ne se rendrait même pas en France. Un mois supplémentaire de détention ne modifierait en rien sa situation, sauf à prolonger son calvaire.

42. Par jugement du 29 août 2016, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention de M. A______, les conditions d’une mise en détention pour insoumission étaient réalisées. Un retour de l’intéressé dans son pays par vol spécial était inenvisageable. Seule sa coopération pourrait permettre son départ de Suisse. Ces circonstances constituaient typiquement les conditions autorisant une mise en détention pour insoumission. Le fait qu’un détenu affirme ne jamais vouloir retourner dans son pays ne justifiait pas de le libérer.

43. Par acte posté le 7 septembre 2016, M. A______ a interjeté un recours auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI du 29 août 2016, concluant à son annulation et à sa mise en liberté immédiate.

Le jugement du TAPI confirmant la mise en détention pour insoumission était contraire à l’art. 15 al. 4 de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du Conseil de l’Europe du 16 décembre 2008 (ci-après : la directive sur le retour), dont la Suisse avait repris le contenu par arrêté du Conseil fédéral du 18 juin 2010 (RO 2010 5925). En effet, il ne subsistait dans son cas aucune perspective raisonnable d’éloignement dans le délai fixé et dans le délai maximal d’une détention administrative. Il serait de toute façon libéré après dix-huit mois de détention. En outre, pour les mêmes motifs, le maintien en détention violait l’art. 5 al. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), dans la mesure où les autorités suisses étaient totalement conscientes que son maintien en détention ne mènerait pas à son départ. Dès lors, elles n’étaient pas de bonne foi car elles ne cherchaient pas par ce moyen à atteindre le but visé. C’était d’autant plus vrai qu’elles avaient été incapables de soutenir que son départ était envisageable dans le délai des dix-huit mois, faute d’arguments allant dans ce sens. Le seul but de la détention avait un objectif punitif, ainsi que le TAPI l’avait lui-même relevé en mentionnant qu’il était en détention par sa faute. La mise en détention pour insoumission violait l’art. 80 al. 4 LEtr, vu l’absence d’aptitude de la mesure. La mesure violait le principe d’égalité de traitement dès lors que « près de 20 algériens ayant commis des crimes avaient été libérés durant sa détention ».

44. Le commissaire de police a répondu au recours le 15 septembre 2015 en concluant à son rejet.

Il était faux de prétendre comme le faisait le recourant que la directive sur le retour avait été violée. En réalité, si le recourant voulait obtempérer à son départ, un vol pourrait être organisé très rapidement puisque tous les éléments étaient réunis pour cela, hormis son accord. La décision de mise en détention administrative pour insoumission respectait l’art. 5 § 1 let. f CEDH, car l’impossibilité du renvoi était exclusivement causée par l’absence de collaboration de l’étranger concerné. Il fallait lire l’art. 5 § 1 let. f CEDH en relation avec l’art. 5 § 1 let. b CEDH qui autorisait précisément une détention en vue de garantir un renvoi de l’étranger qui se refuse à obtempérer, ainsi que le Tribunal fédéral l’avait confirmé.

Quant au grief fondé sur une violation de l’art. 80 al. 4 LEtr, il consistait en réalité à invoquer une violation du principe de proportionnalité, le recourant tenant son emprisonnement pour inapproprié eu égard à sa situation personnelle, notamment de santé. Il omettait de considérer que cette mise en détention pour insoumission n’avait pour cause que son opposition au renvoi. Dans ce cadre, le fait qu’il mentionne qu’il allait persévérer dans son comportement ne pouvait avoir pour effet sa mise en liberté.

Au surplus, les troubles psychiques dont se prévalait le recourant n’étaient attestés par la production d’aucun certificat médical, notamment d’aucun document signé par un médecin, attestant d’une contre-indication absolue à voyager.

45. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté le 7 septembre 2016 contre le jugement du TAPI prononcé et notifié le 29 août 2016, le recours a été formé en temps utile devant la juridiction compétente et il est recevable (art. 132 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 ; art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu ledit recours le 9 septembre 2016 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3. La chambre administrative est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 LaLEtr). Elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 10 al. 3 LaLEtr).

4. a. Aux termes de l’art. 78 al. 1 LEtr, si l’étranger n’a pas obtempéré à l’injonction de quitter la Suisse dans le délai prescrit et que la décision exécutoire de renvoi ou l’expulsion ne peut être exécutée en raison de son comportement, il peut alors être placé en détention pour insoumission afin de garantir qu’il quittera effectivement le pays, pour autant que les conditions de sa détention en vue du renvoi ou de l’expulsion ne soient pas remplies et qu’il n’existe pas d’autre mesure moins contraignante susceptible de conduire à l’objectif visé.

b. Selon la jurisprudence, le but de la détention pour insoumission est de pousser un étranger, tenu de quitter la Suisse, à changer de comportement, lorsqu’à l’échéance du délai de départ, l’exécution de la décision de renvoi, entrée en force, ne peut être assurée sans la coopération de celui-ci malgré les efforts des autorités (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 p. 106 et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_538/2010 du 19 juillet 2010). La détention pour insoumission constitue une ultima ratio, dans la mesure où il n’existe plus d’autres mesures permettant d’aboutir à ce que l’étranger se trouvant illégalement en Suisse puisse être renvoyé dans son pays. La prise d’une telle mesure doit respecter le principe de la proportionnalité, ce qui suppose d’examiner l’ensemble des circonstances pour déterminer si elle apparaît appropriée et nécessaire. Le seul refus explicite de collaborer de la personne concernée ne constitue qu’un indice parmi d’autres éléments à prendre en considération dans cette appréciation (ATF 135 II 105 et la jurisprudence citée ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 ; 2C_538/2010 précité ; ATA/349/2013 du 4 juin 2013 ; ATA/82/2013 du 14 février 2013 ; ATA/3/2013 du 3 janvier 2013 ; ATA/512/2011 du 16 août 2011, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_624/2011 du 12 septembre 2011).

5. La détention peut être ordonnée pour une période d’un mois et prolongée de deux mois en deux mois (art. 78 al. 2 LEtr). Elle doit être levée notamment lorsqu’un départ de Suisse, volontaire et dans le délai prescrit, n’est pas possible malgré la collaboration de l’intéressé (art. 78 al. 6 let. a LEtr ; ATA/581/2011 du 7 septembre 2011).

6. Le recourant a été placé en détention pour insoumission à la suite de sa détention en vue du renvoi, ce qui est possible, pour autant que les conditions de l'art. 78 al. 1 LEtr soient remplies (art 78 al. 3 LEtr) et que la détention totale cumulée n’excède pas dix-huit mois (art. 79 al. 1 et 2 LEtr).

7. En l’occurrence, le recourant fait l’objet d’une décision de renvoi exécutoire depuis le 4 mai 2012. Le renvoi est possible, puisque les autorités de son pays d’origine ne s’opposent pas à la délivrance d’un laissez-passer, et qu’elles en ont déjà délivré à deux reprises. Les raisons de l’échec de l’exécution de la mesure résident exclusivement dans l’opposition de l’intéressé d’obtempérer à l’ordre de quitter la Suisse. Celui-ci ne peut obtempérer qu’en acceptant de retourner dans son pays d’origine, puisqu’il ne détient aucun document d’identité ou titre de séjour valable lui permettant de se rendre dans un autre pays. Durant la période où le recourant a été détenu en vue de renvoi, il a refusé à deux reprises de prendre place sur le vol de ligne à destination de l’Algérie, la seconde fois, dans le cadre d’un rapatriement organisé avec escorte. Aucun autre moyen n’étant disponible au vu des conditions de renvoi vers l’Algérie admises par les autorités ce pays, on ne voit pas quelle mesure moins contraignante que la détention pour insoumission pourrait permettre l’exécution de la décision de renvoi.

La détention pour insoumission prononcée respecte la durée admissible en vertu de l’art. 79 LEtr, et remplit par conséquent les conditions matérielles de l’art. 78 al. 1 LEtr.

8. a. Le recourant tient la décision querellée ainsi que le jugement qui la confirme pour contraires à l’art. 15 ch. 4 de la directive sur le retour, mais aussi à l’art. 5 § 1 let. f CEDH, parce que d’une part il n’existerait aucune perspective concrète de réalisation du renvoi vu son refus absolu à retourner dans son pays d’origine et parce qu’au surplus un tel renvoi serait impossible à organiser dans le délai maximum de détention, soit d’ici au 21 janvier 2017.

b. Selon l’art. 15 ch. 4 de la directive sur le retour, lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspectives raisonnables d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autre, ou que les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté.

En l’occurrence, à la date où le recourant a été placé en détention administrative pour insoumission, une perspective raisonnable d’éloignement existait, dans la mesure où un tel éloignement ne dépendait que de son accord à prendre place dans un vol de ligne pour son pays, l’autorité intimée pouvant être suivie lorsqu’elle expose que l’organisation d’une réservation pour un tel vol serait possible à brève échéance, soit dans le délai des dix-huit mois. La référence à l’arrêt MADHI de la Cour de justice de l’Union européenne du 5 juin 2014 (C-214/14) n’a dès lors aucune pertinence.

c. Le grief de violation de l’art. 5 § 1 let. f CEDH ne résiste pas non plus à l’examen. Selon cette disposition, toute personne a droit à la liberté et à la sûreté et nul ne peut être privé de sa liberté, sauf s’il s’agit de la détenir pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou de permettre une procédure d’expulsion ou d’extradition en cours. Or, ainsi que le Tribunal fédéral l’a déjà rappelé, la détention pour insoumission suppose précisément que le renvoi n’est pas possible parce que le recourant refuse d’apporter sa collaboration. Dans une telle situation, réalisée en l’espèce, on ne peut soutenir que la procédure tendant au renvoi n’est plus « en cours ». Comme le rappelle le Tribunal fédéral, « à suivre un tel raisonnement, un étranger sous le coup d’un renvoi qui refuse de collaborer et rend lui-même son renvoi impossible en raison de son propre comportement ne pourrait plus être détenu. Ce n’est à l’évidence pas le sens de l’art. 5 § 1 let. f CEDH en relation avec l’art. 5 § 1 let. b CEDH, qui autorisent précisément une détention en vue de garantir un renvoi de l’étranger qui se refuse à obtempérer » (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011 consid. 5.3 ; 2C_ 624/2011 du 12 septembre 2011 consid.4.2.3).

9. Le recourant considère que la décision querellée contrevient au principe énoncé à l’art. 80 al. 4 LEtr en ne tenant pas compte de sa situation personnelle, notamment de sa souffrance à être incarcéré et des troubles psychiques dont il affirme souffrir, alors que cette disposition commande de les prendre en considération.

Tout d’abord, le recourant ne produit aucune attestation médicale accréditant l’existence des troubles de santé dont il dit souffrir et renseignant sur leur l’étendue, s’agissant notamment de savoir si ceux-ci rendent son renvoi impossible. Pour le surplus, à lire ce qu’il expose dans son recours en référence à sa situation personnelle, en rapport avec ce grief, c’est plutôt d’une violation du principe de la proportionnalité garanti par l’art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) dont il se plaint, eu égard à la longueur de son maintien en détention.

Les griefs précités ne sont pas plus fondés que les précédents. La procédure d’exécution du renvoi a été menée à terme par les autorités suisses depuis le 21 mars 2016, puisque, dès cette date, c’est exclusivement en raison du refus du recourant que l’exécution du renvoi n’a pu être menée à chef, un laissez-passer ayant été obtenu et une place dans un avion réservée. Depuis lors, si le temps de détention se prolonge, c’est en raison uniquement de son obstination à ne pas vouloir se plier à la décision de renvoi prise par l’autorité. Celui-ci ne peut dès lors pas se plaindre de cette durée et de la prolongation d’une situation, dont on peut admettre qu’elle n’est pas sans inconvénient, mais qui découle de la mise en œuvre du seul moyen apte à atteindre le but visé, consistant à permettre l’exécution des décisions de l’autorité de police des étrangers.

10. Le recourant se plaint d’une violation du principe de l’égalité de traitement, garanti par l’art. 8 al. 1 Cst, sans se référer cependant à aucune situation précise, en rapport avec laquelle le respect de ce principe pourrait être contrôlé. La chambre administrative n’entrera donc pas en matière sur ce grief.

11. Le recours sera rejeté. La procédure étant gratuite (art. 12. al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument de procédure ne sera prélevé. De même, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 septembre 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 août 2016 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas prélevé d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Dina Bazarbachi, avocate du recourant, au commissaire de police, à l’office cantonal de la population et des migrations, au secrétariat d’État aux migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeants : M. Dumartheray, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

D. Dumartheray

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :