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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1152/2020

ATA/725/2020 du 04.08.2020 ( PROC ) , REJETE

Descripteurs : RÉVISION(DÉCISION);VENTE;LOGEMENT;MARCHÉ LOCATIF;AUTORISATION OU APPROBATION(EN GÉNÉRAL)
Normes : LPA.80.leta; LPA.80.letb; LPA.81; LDTR.39.al4
Résumé : Rejet d’une demande en révision, en tant qu’elle est recevable, d’un arrêt entré en force en janvier 2014 et confirmant deux autorisations d’aliéner délivrées par le département en mai 2012 sur la base de l’art. 39 al. 4 LDTR. Ces autorisations portaient sur la vente de deux appartements se trouvant dans un immeuble qui n’avait pas été soumis, dès sa construction, à une forme analogue à la propriété par étage (SIAL), contrairement à ce qu’indiquait un acte notarié de 2009 concernant la promesse de vente desdits appartements et sur lequel s’était fondée une précédente autorisation d’aliéner ceux-ci, octroyée en novembre 2009. Bien que l’arrêt et les autorisations de 2012, entrés en force, soient matériellement viciés (aucune des hypothèses de l’art. 39 al. 4 LDTR n’étant en fait réalisées) et qu’une procédure pénale soit pendante, l’intérêt à la sécurité du droit l’emporte, en l’espèce, sur l’intérêt à une correcte application du droit objectif.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1152/2020-PROC ATA/725/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 août 2020

3ème section

 

dans la cause

 

ASSOCIATION GENEVOISE DES LOCATAIRES (ASLOCA)
représentée par Me Romolo Molo, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE – OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE

et

A________
représentée par Me G______, avocate

et

COUR DE JUSTICE – CHAMBRE ADMINISTRATIVE



EN FAIT

1) Par arrêt du 10 décembre 2013 (ATA/6______), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté les recours de l’Association genevoise des locataires (ci-après : ASLOCA) contre les jugements du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) confirmant deux arrêtés du 14 mai 2012 (VA 3______ et VA 4______) rendus par l’ancien département des constructions et des technologies devenu le département du territoire (ci-après : le département).

a. Par ces arrêtés, le département avait autorisé l’aliénation de deux appartements de 4,5 pièces (5ème et 7ème étage), situés dans l’immeuble sis au B________, dans la commune du Grand-Saconnex, en faveur d’une société anonyme, respectivement d’une personne physique au prix de CHF 1'000'000.- et de CHF 970'000.-. Ces appartements avaient été loués jusqu’au 31 juillet 2010 pour le premier et jusqu’au 31 mai 2011 pour le second. Ils appartenaient alors à la société A________ (ci-après : A________). L’immeuble avait été construit entre 1961 et 1970.

A________ avait acquis ces deux appartements, au prix de CHF 500'000.- chacun, par un acte de vente avec trois particuliers, signé les 10 et 17 décembre 2009 par-devant Me J______, notaire, et précédé d’une promesse de vente signée devant le même notaire le 14 octobre 2009. L’acte notarié du 14 octobre 2009 relatif à cette promesse spécifiait entre autres que ledit immeuble avait été, « dès sa construction soumis au régime de la propriété par étage
[ci-après : PPE], plus précisément à une forme analogue (SIAL) ».

Par arrêté du 6 novembre 2009 (VA 5______), le département avait autorisé l’aliénation de huit appartements de l’immeuble précité – dont les deux susmentionnés – en faveur de A________ pour un prix de vente total de CHF 3'500'000.-, au motif que l’immeuble était soumis au régime de la PPE depuis mars 1985, mais précédemment exploité, depuis sa construction, par une société immobilière d’actionnaires-locataires (ci-après : SIAL).

Les trois personnes physiques, parties à ladite vente, avaient acquis les deux appartements en cause de la part de deux autres particuliers, à savoir feu Monsieur C________ et Monsieur D________. Ces deux derniers et l’un des trois co-contractants précités, à savoir Monsieur E________, avaient bénéficié, fin 1999, en leur qualité d’actionnaires de la société immobilière F________ (ci-après : la SI F______), de la cession de tous les actifs et passifs de cette société, dans le cadre de sa liquidation, en proportion de leurs droits. Ils étaient ainsi devenus, chacun pour un tiers, copropriétaires des deux appartements précités. La SI F______ avait été inscrite au registre du commerce du canton de Genève (ci-après : RC) le 30 juin 1967.

b. Considérant que la SI F______ avait pour but la « location à ses propres actionnaires ou à des tiers des appartements sis au Grand-Saconnex, dans l’immeuble chemin de B________, dont elle [était] propriétaire ; constitution en propriété par étage et possession, pour le compte de ses actionnaires, de l’ensemble des parts de copropriété par étages dudit immeuble » et le fait – résultant tant de l’acte notarié susévoqué du 14 octobre 2009 que de l’arrêté précité du 6 novembre 2009 – que l’immeuble sis au B________ avait été, dès sa construction, soumis au régime de la SIAL, ce qui correspondait à une forme analogue à la PPE, la chambre administrative avait jugé que la condition prévue à l’art. 39 al. 4 let. a de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) était remplie et que partant le département était tenu de délivrer les autorisations sollicitées d’aliéner les deux appartements en cause.

Par ailleurs, malgré son caractère « imprécis et source possible de confusion » relevé par l’ATA/6______, l’arrêté n° VA 5______ du 6 novembre 2009, entré en force, avait autorisé l’aliénation de ces deux appartements. Ainsi, la chambre administrative avait estimé que la condition prévue à l’art. 39 al. 4
let. d LDTR était également remplie. Deux des conditions alternatives de l’art. 39 al. 4 LDTR étant réalisées dans ladite affaire, la chambre de céans avait rejeté les recours de l’ASLOCA contre les deux arrêtés du département du 14 mai 2012. L’arrêt de la chambre administrative n’a pas été contesté et est entré en force en janvier 2014.

2) Le 14 avril 2020, l’ASLOCA a demandé à la chambre de céans la révision de son ATA/6______ précité, en concluant principalement à son annulation, à la constatation de la nullité de l’arrêté du 6 novembre 2009 (VA 5______), à l’annulation des arrêtés du 14 mai 2012 (VA 4______ et VA 3______) ainsi qu’au remboursement à son égard de plusieurs frais mis à sa charge dans la procédure administrative ayant abouti à l’ATA/6______ précité.

À titre subsidiaire, elle a conclu à l’apport de la procédure civile et de la procédure pénale sous-évoquées, ainsi qu’à la suspension de l’instruction de la présente procédure jusqu’à droit connu au pénal. Plus subsidiairement, elle a sollicité la suspension de la présente cause jusqu’à droit connu dans la procédure administrative n° A/1536/2019 5 LDTR.

a. Ledit ATA était, à tort, fondé sur le fait que l’immeuble susmentionné avait été, dès sa construction, soumis au régime de la SIAL. L’argument, selon lequel les appartements en cause avaient déjà fait l’objet d’une autorisation de vente précédente, se basait aussi sur le même fait erroné. Elle avait découvert cette erreur en rédigeant son mémoire-réponse à l’action en dommages-intérêts de plus de CHF 500'000.- formée en 2018 par A________ à son encontre devant la juridiction civile, en raison des recours qu’elle avait interjetés devant la juridiction administrative contre les autorisations d’aliéner. Par acte notarié des 14 octobre et 9 novembre 2009 (ci-après : l’acte notarié du 14 octobre 2009) – portant sur la promesse de vente de huit appartements dans l’immeuble précité, dont les deux appartements en cause, en faveur de A________ et accompagnant la réquisition au registre foncier (ci-après : RF) du 10 novembre 2009 –, Me J______ avait certifié, à tort, que l’immeuble sis au B________ avait « été dès sa construction soumis au régime de la [PPE], plus précisément à une forme analogue (SIAL) ». Elle soutenait que « l’acte notarié du 9 novembre 2009 attestait le faux » et qu’il ressortait de ladite réquisition que l’immeuble en cause avait été soumis au régime de la PPE le 4 mars 1985.

b. Elle produisait entre autres l’acte notarié précité avec la réquisition au RF, ainsi que deux pièces concernant des inscriptions de la SI F______ sollicitées, auprès du RC, le 30 juin 1967 (pièce 2) et le 1er mars 1985 (pièce 3). Ces pièces avaient été certifiées, le 21 janvier 2019, par le RC comme étant des copies conformes aux pièces déposées à l’appui desdites inscriptions.

Ladite pièce 2 concernait les statuts de la SI F______ établis lors de sa constitution en juin 1967 (ci-après : statuts SI F______ 1967). L’art. 3 desdits statuts mentionnait que : « La société [SI F______] a[vait] pour but l’achat, la vente, la construction, la location, la transformation et la mise en valeur de biens immobiliers. Elle pourra[it] faire soit pour son propre compte, soit pour le compte de tiers, toutes opérations commerciales, mobilières, immobilières et financières, en relation directe ou indirecte avec les objets ci-dessus, sous quelque forme que ce soit, notamment sous forme de participations. La société se propos[ait] d’acquérir [d’une personne physique, pour un prix indiqué] un immeuble sis en la Commune du Grand-Saconnex [précisé par des informations cadastrales et désignant l’immeuble sis au B________] ». Ladite société était une société anonyme régie par ces statuts, dont le capital social était divisé en 50 actions au porteur, d’une valeur de CHF 1'000.- chacune (art. 1, 5 et 6 des statuts SI F______ 1967).

La pièce 3 précitée visait le procès-verbal de l’assemble générale
(ci-après : AG) extraordinaire des actionnaires de la SI F______ du 11 février 1985 ainsi que les statuts de cette société établis à cette même date
(ci-après : statuts SI F______ 1985). Ladite AG avait pris plusieurs décisions, en particulier la transformation des actions au porteur de la société en actions nominatives, la modification du but social, l’adoption de nouveaux statuts ainsi que l’approbation du tableau statutaire des locaux et de la répartition des certificats d’actions numérotés correspondant.

Selon l’art. 1 des statuts SI F______ 1985, il existait, entre les propriétaires des actions ci-après créées, sous la raison sociale de SI F______, une société anonyme régie par lesdits statuts. L’art. 3 de ceux-ci disposait entre autres que : « La société a[vait] pour but : 1. la location à ses propres actionnaires ou à des tiers des appartements, sis dans l’immeuble B________, au
Grand-Saconnex (canton de Genève) dont elle [était] propriétaire ; 2. la mise en propriété par étages dudit immeuble ; 3. de posséder pour le compte de ses actionnaires, l’ensemble des parts de copropriété qui résulter[aient] de l’acte de mise en propriété par étages [dudit immeuble] sur la base du cahier de répartition des locaux établi par [un bureau de géomètre officiel] ( ) ». Le capital social de la société était divisé en mille actions d’une valeur de CHF 100.- chacune ; les actions étaient nominatives, inscrites sur un registre et numérotées ; elles étaient représentées par des certificats indiquant le nombre des actions ; la société ne reconnaissait qu’un titulaire pour chaque certificat (art. 5 des statuts SI F______ 1985). L’actionnaire concluait avec la société un bail (art. 8 des statuts
SI F______ 1985). Un tableau de répartition des actions établissait, pour chaque certificat, les correspondances entre les numéros d’actions et l’objet immobilier, étant précisé que celui-ci était identifié par le numéro du feuillet cadastral, le numéro de PPE, l’étage, les millièmes et le nombre d’actions.

c. Malgré la découverte de l’erreur susmentionnée dont elle avait informé A________, cette société avait persisté dans sa demande civile à son encontre (procédure civile C/1______/2018 – 3). Après lui avoir transmis cette information le 6 février 2019, elle avait demandé au département, par courrier du 14 février 2019, la reconsidération de l’autorisation délivrée dans l’arrêté du 6 novembre 2009 (VA 5______), au motif qu’elle avait été accordée sur la base « d’un acte notarié certifiant le faux ». Le département avait refusé cette demande par décision du 13 mars 2019, contre laquelle elle avait formé recours auprès du TAPI ; cette procédure administrative était pendante (cause A/1536/2019).

Le 5 février 2019, elle avait aussi déposé une plainte pénale fondée sur les art. 317 et 253 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), qui était en cours d’instruction (procédure pénale P/2______/2019).

Dans le cadre de la procédure civile susmentionnée, Maître G______, conseil de A________, qui l’avait aussi été lors de la procédure administrative ayant conduit à l’ATA/6______ précité, avait été entendue le 20 janvier 2020 en tant que témoin. Interrogée sur les statuts de la SI F______ du 28 juin 1967, Me G______ avait déclaré que : « il ne s’agi[ssait] pas des statuts d’une SIAL. Le but n’[était] pas de mettre à disposition des actionnaires des appartements spécifiques ( ) [elle était] consciente qu’il y avait quelque chose de contradictoire dans l’acte notarié de Me J______ ».

3) A________ a conclu à l’irrecevabilité de la demande en révision et produit la demande en dommages-intérêts qu’elle avait déposée à l’encontre de l’ASLOCA, le 26 février 2018, devant le Tribunal de première instance pour une valeur litigieuse (en capital) de CHF 446'637.20 (ci-après : la demande en paiement). D’après cette demande, la société anonyme, à laquelle elle avait prévu de vendre un des deux appartements litigieux, s’était désistée début 2013 ; elle avait trouvé un nouvel acquéreur, pour cet appartement, le 20 octobre 2017 pour un prix de CHF 830'000.-.

4) Le département, soit pour lui l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), s’en est rapporté à justice quant à la recevabilité de la demande en révision et a conclu à son rejet.

5) L’ASLOCA a persisté dans ses conclusions et demandé, à titre subsidiaire, l’audition de Messieurs H________ et I________, anciens fonctionnaires du département, s’agissant du contenu de sa pièce 12 portant sur un article de presse de novembre 2014 intitulé « Un seul fonctionnaire pour faire appliquer la LDTR », dont une subdivision portait l’intitulé « Ne surtout pas rechercher les infractions ». D’après l’article de cette subdivision, qui décrivait l’évolution des effectifs dédiés à l’application de la LDTR, M. H________, ancien collaborateur du service LDTR, expliquait que « les fonctionnaires avaient reçu comme consigne, à l’époque, "de ne surtout pas rechercher des infractions". Dès lors, "le contrôle réel du département s’[était] résumé aux recours de l’Asloca" ( ) ».

6) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) La compétence de la chambre administrative est acquise, dès lors que la procédure vise à la révision de l’un de ses arrêts. Sous cet angle, la demande de révision est recevable (art. 81 al. 1 in fine de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l’art. 80 LPA, il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît : qu’un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d’une autre manière, a influencé la décision (let. a) ; que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (let. b), les autres hypothèses n’étant in casu pas concernées.

a. La demande de révision doit être adressée par écrit à la juridiction qui a rendu la décision dans les trois mois dès la découverte du motif de révision (art. 81 al. 1 LPA). En vertu de l’art. 81 al. 2 LPA, la demande de révision doit être toutefois présentée au plus tard dans les dix ans à compter de la notification de la décision. Le cas de révision de l’article 80, lettre a, est réservé. Dans ce cas, la révision peut avoir lieu d’office, notamment sur communication du Ministère public.

b. L'art. 80 let. b LPA vise uniquement les faits et moyens de preuve qui existaient au moment de la première procédure, mais n'avaient alors pas été soumis au juge (faits nouveaux « anciens » ; ATA/627/2020 du 30 juin 2020 consid. 1b et 1c ; ATA/362/2018 du 17 avril 2018 consid. 1c ; ATA/294/2015 du 24 mars 2015 consid. 3c). Sont « nouveaux », au sens de cette disposition, les faits qui, survenus à un moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure principale, n'étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; ATA/362/2018 précité consid. 1c ; ATA/316/2015 du 31 mars 2015 consid. 5e). Ces faits nouveaux doivent en outre être importants, c'est-à-dire de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; 118 II 199 consid. 5).

Les preuves doivent servir à prouver soit des faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'il faut admettre qu'elle aurait conduit l'autorité administrative ou judiciaire à statuer autrement, si elle en avait eu connaissance, dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c'est que le moyen de preuve ne serve pas à l'appréciation des faits seulement, mais à l'établissement de ces derniers (ATF 134 IV 48 consid. 1.2 ; ATA/362/2018 précité consid. 1c ; ATA/821/2015 du 11 août 2015 consid. 5 et les références citées). La révision ne permet pas de supprimer une erreur de droit, de bénéficier d'une nouvelle interprétation, d'une nouvelle pratique, d'obtenir une nouvelle appréciation de faits connus lors de la décision dont la révision est demandée ou de faire valoir des faits ou des moyens de preuve qui auraient pu ou dû être invoqués dans la procédure ordinaire (ATA/362/2018 précité consid. 1d ; ATA/294/2015 précité consid. 3d et les références citées).

Lorsque aucune condition de l'art. 80 LPA n'est remplie, la demande est déclarée irrecevable (ATA/1748/2019 du 3 décembre 2019; ATA/1149/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2 ; ATA/418/2019 du 9 avril 2019).

c. Le cas de figure prévu à l’art. 80 let. a LPA trouve son pendant à l’art. 66 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968
(PA - RS 172.021), selon lequel l’autorité de recours procède, d’office ou à la demande d’une partie, à la révision de sa décision lorsqu’un crime ou un délit l’a influencée. Quant à la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF - RS 173.110), elle prévoit également cette hypothèse à l’art. 123 al. 1 LTF en ces termes : la révision peut être demandée lorsqu’une procédure pénale établit que l’arrêt a été influencé au préjudice du requérant par un crime ou un délit, même si aucune condamnation n’est intervenue. Si l’action pénale n’est pas possible, la preuve peut être administrée d’une autre manière.

Le Tribunal fédéral a déjà reconnu qu’en l’absence d’un jugement pénal, le tribunal des assurances sociales pouvait lui-même, à titre de question préjudicielle, déterminer si la restitution de la prestation en cause découlait d’une infraction pénale. Comme il l’a déjà reconnu s’agissant de l’art. 123 al. 1
phr. 2 LTF et qu’il n’y a pas de raison de traiter différemment ce cas de celui prévu à l’art. 66 al. 1 PA, le Tribunal fédéral estime que la révision d’une décision au sens de ces dispositions exige l’existence d’une procédure pénale, mais admet, uniquement lorsque cela n’est pas possible, que la preuve peut être apportée d’une autre manière (arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2017 du 28 février 2018 consid. 8.3.2 et les références citées). De plus, la révision d’une décision au sens de l’art. 123 al. 1 LTF présuppose qu’il s’agisse d’un crime ou d’un délit au sens de l’art. 10 CP. Ceux-ci doivent en outre avoir une influence directe ou indirecte sur la décision sujette à révision. L’existence d’un crime ou d’un délit, qui remplit les éléments constitutifs objectifs, doit être établie, une condamnation pénale n’étant pas nécessaire puisqu’un comportement coupable n’est pas requis. Si une procédure pénale ou un jugement pénal n’est pas possible (notamment en raison d’une irresponsabilité, de la mort du prévenu ou de la prescription de l’action pénale), la preuve d’un crime ou d’un délit peut aussi être apportée autrement. Dans ce cas, le tribunal saisi de la demande de révision, statue librement sur l’existence d’un crime ou d’un délit (arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2017 précité consid. 8.3.3).

d. Selon l’art. 317 CP relatif au faux dans les titres commis dans l’exercice de fonctions publiques, les fonctionnaires et les officiers publics qui auront intentionnellement créé un titre faux, falsifié un titre, ou abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d’autrui pour fabriquer un titre supposé, les fonctionnaires et les officiers publics qui auront intentionnellement constaté faussement dans un titre un fait ayant une portée juridique, notamment en certifiant faussement l’authenticité d’une signature ou d’une marque à la main ou l’exactitude d’une copie, seront punis d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire (ch. 1). La peine sera l’amende si le délinquant a agi par négligence (ch. 2). L’exemple récurrent de l’officier public au sens de cette disposition est celui du notaire (Mario POSTIZZI in Alain MACALUSO/Laurent MOREILLON/Nicolas QUELOZ [éd.], Commentaire romand – Code pénal II, art. 111-392 CP, 2017, n. 17 ad art. 317/317bis). Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait (art. 110 al. 4 phr. 1 CP).

À teneur de l’art. 253 CP régissant l’obtention frauduleuse d’une constatation fausse, celui qui, en induisant en erreur un fonctionnaire ou un officier public, l’aura amené à constater faussement dans un titre authentique un fait ayant une portée juridique, notamment à certifier faussement l’authenticité d’une signature ou l’exactitude d’une copie, celui qui aura fait usage d’un titre ainsi obtenu pour tromper autrui sur le fait qui y est constaté, sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Conformément à l’art. 110 al. 5 CP, sont des titres authentiques tous les titres émanant des membres d’une autorité, de fonctionnaires ou d’officiers publics agissant dans l’exercice de leurs fonctions. Sont exceptés les titres émanant de l’administration des entreprises économiques et des monopoles de l’État ou d’autres corporations ou établissements de droit public qui ont trait à des affaires de droit civil.

Sont des crimes les infractions passibles d’une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 10 al. 2 CP). Sont des délits les infractions passibles d’une peine privative de liberté n’excédant pas trois ans ou d’une peine pécuniaire (art. 10 al. 3 CP). Sont des contraventions les infractions passibles d’une amende (art. 103 CP). En ce qui concerne les crimes et les délits, l’art. 97 al. 1 CP dispose que l’action pénale se prescrit par quinze ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus trois ans (let. b), par dix ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de trois ans (let. c) et par sept ans si la peine maximale encourue est une autre peine (let. d). La prescription court dès le jour où l’auteur a exercé son activité coupable (let. a) ou dès le jour du dernier acte si cette activité s’est exercée à plusieurs reprises (let. b, art. 98 al. 1 CP). Quant aux contraventions, l’action pénale et la peine se prescrivent par trois ans (art. 109 CP), le point de départ de leur prescription étant réglé de la même manière que pour les crimes et les délits (art. 104 CP).

e. L’aliénation, sous quelque forme que ce soit (notamment cession de droits de copropriété d’étages ou de parties d’étages, d’actions, de parts sociales), d’un appartement à usage d’habitation, jusqu’alors offert en location, est soumise à autorisation dans la mesure où l’appartement entre, à raison de son loyer ou de son type, dans une catégorie de logements où sévit la pénurie (art. 39 al. 1 LDTR).

Selon l’art. 39 al. 4 LDTR, le département autorise l’aliénation d’un appartement si celui-ci : a)  a été dès sa construction soumis au régime de la propriété par étages ou à une forme de propriété analogue, sous réserve du régime applicable à l’aliénation d’appartements destinés à la vente régi par l’article 8A de la loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957 b)  était,
le 30 mars 1985, soumis au régime de la propriété par étages ou à une forme de propriété analogue et qu’il avait déjà été cédé de manière individualisée ; c)  n’a jamais été loué ; d)  a fait une fois au moins l’objet d’une autorisation d’aliéner en vertu de la présente loi. L’autorisation ne porte que sur un appartement à la fois. Une autorisation de vente en bloc peut toutefois être accordée en cas de mise en vente simultanée, pour des motifs d’assainissement financier, de plusieurs appartements à usage d’habitation ayant été mis en propriété par étages et jusqu’alors offerts en location, avec pour condition que l’acquéreur ne peut les revendre que sous la même forme, sous réserve de l’obtention d’une autorisation individualisée au sens du présent alinéa.

f. Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, en cas de réalisation de l'une des hypothèses de l'art. 39 al. 4 LDTR, le département est tenu de délivrer l'autorisation d'aliéner. Il n'y a donc, le cas échéant, pas de place pour une pesée des intérêts au sens de l'art. 39 al. 2 LDTR. Les conditions posées à l'art. 39 al. 4 LDTR sont alternatives (ATA/577/2017 du 23 mai 2017 consid. 8a ; ATA/490/2012 du 31 juillet 2012 consid. 5). À l’inverse, au vu de la marge d'appréciation dont elle dispose, lorsqu'aucun des motifs d'autorisation expressément prévus par l'art. 39 al. 4 LDTR n'est réalisé, l'autorité doit rechercher si l'intérêt public l'emporte sur l'intérêt privé du recourant à aliéner l'appartement dont il est propriétaire (arrêts du Tribunal fédéral 1C_137/2011 ; 1C_139/2011 ; 1C_141/2011 ; 1C_143/2011 du 14 juillet 2011 ; ATA/577/2017 précité consid. 8b ; ATA/490/2012 précité consid. 5).

Dans le cadre de l'examen de la requête en autorisation, le département procède à la pesée des intérêts publics et privés en présence (art. 13 al. 1 du règlement d’application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 29 avril 1996 - RDTR - L 5 20.01). En vertu de l’art. 13 al. 3 RDTR, l'intérêt privé est présumé l'emporter sur l'intérêt public lorsque le propriétaire doit vendre l'appartement pour l’un des motifs suivants : par nécessité de liquider un régime matrimonial ou une succession (let. a), par nécessité de satisfaire aux exigences d'un plan de désendettement (let. b), ou du fait de la prise d'un nouveau domicile en dehors du canton (let. c). Le département refuse l'autorisation lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose. L'intérêt public et l'intérêt général résident dans le maintien, en période de pénurie de logements, de l'affectation locative des appartements loués (art. 39 al. 2 LDTR).

La politique prévue par la LDTR procède d'un intérêt public important (arrêt du Tribunal fédéral 1C_143/2011 précité consid. 2.2). Le refus de l'autorisation de vendre un appartement loué lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose n'est pas contraire au principe de la proportionnalité, dès lors qu'il est consécutif, de la part de l'autorité administrative, à une pesée des intérêts en présence et à une évaluation de l'importance du motif de refus envisagé au regard des intérêts privés en jeu (ATF 113 Ia 126 consid. 7b/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.19/2003 du 8 avril 2003 consid. 2.1 ; ATA/577/2017 précité consid. 8b ; ATA/593/2016 du 12 juillet 2016).

g. Lorsque les conditions dans lesquelles une décision entrée en force peut être modifiée ne sont pas fixées par la loi, alors la jurisprudence admet qu’en règle générale des décisions entrées en force, mais matériellement irrégulières, peuvent, dans certaines conditions, être révoquées (ATF 143 II 1 consid. 4.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 940, 944 ss et 968).

Au moment de rendre sa décision, l'autorité détermine la situation de fait et y applique les dispositions légales en vigueur. Lorsque, par la suite, cette décision, qui est entrée en force, se révèle affectée d'une irrégularité initiale ou subséquente à son prononcé, que cette irrégularité soit de fait ou de droit, l'autorité a la possibilité de révoquer sa décision, dans la mesure où l'intérêt à une correcte application du droit objectif l'emporte sur l'intérêt de la sécurité du droit, respectivement à la protection de la confiance. Dans le cas contraire, il n'est en principe pas possible de révoquer la décision en cause. Cela est par exemple le cas lorsque la décision administrative fonde un droit subjectif, que la procédure qui a mené à son prononcé a déjà mis en balance les intérêts précités ou que le justiciable a déjà fait usage du droit que lui a conféré la décision. Cette règle n'est toutefois pas absolue et une révocation est également possible dans ces cas, lorsqu'un intérêt public particulièrement important l'impose (ATF 143 II 1 consid. 5.1 et les références citées).

h. Selon la jurisprudence, la nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou particulièrement reconnaissables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit (ATF 138 II 501 consid. 3.1 ; 137 I 273 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_353/2019 du 18 mars 2020 consid. 2.1). Ces conditions sont cumulatives et ont pour conséquence que la nullité n’est que très rarement admise (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 910). Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1).

3) En l’espèce, il convient d’abord d’examiner la recevabilité de la demande en révision de l’ATA/6______, entré en force en janvier 2014 faute de recours à son encontre, en particulier s’agissant du délai de trois mois dès la découverte du motif de révision (art. 81 al. 1 LPA). Ce délai s’applique au motif de révision prévu à l’art. 80 let. b LPA, tandis que la révision fondée sur l’art. 80 let. a LPA peut intervenir d’office, notamment sur communication du Ministère public (art. 81 al. 2 LPA).

a. S’agissant de l’hypothèse de l’art. 80 let. b LPA, l’ASLOCA invoque principalement le témoignage de Me G______, conseil de A________, déposé devant la juridiction civile le 20 janvier 2020. Interrogée sur les statuts de la SI F______ 1967, l’avocate a déclaré que ce n’étaient pas ceux d’une SIAL car le but n’était pas de mettre à disposition des actionnaires des appartements spécifiques. Elle a ajouté qu’elle était « consciente qu’il y avait quelque chose de contradictoire dans l’acte notarié de Me J______ ». Ce témoignage révèle ainsi la seule appréciation de Me G______ sur lesdits statuts ainsi que sur l’acte notarié du 14 octobre 2009 de Me J______, mais n’établit pas en soi le régime de propriété des deux appartements, objets des deux arrêtés litigieux du 14 mai 2012 confirmés par l’ATA/6______.

Cette donnée est certes déterminante pour la solution de cet arrêt, que ce soit sous l’angle de la let. a ou de la let. d de l’art. 39 al. 4 LDTR, dans la mesure où la réalisation de ces deux conditions alternatives dépend in casu du régime de propriété des deux appartements litigieux. Contrairement aux éléments contenus dans le dossier lors du prononcé dudit arrêt, en particulier l’acte notarié du 14 octobre 2009, il découle des pièces 2 et 3 susmentionnées produites par l’ASLOCA que l’immeuble sis au B________ – dans lequel se trouvent les deux appartements litigieux – n’a pas été soumis, dès sa construction, à une forme de propriété analogue à une PPE. En effet, cet immeuble était à l’origine détenu par une société immobilière, et non par une SIAL comme le démontrent les statuts de la SI F______ produits sous les pièces 2 et 3 précitées de l’ASLOCA. Ce n’est qu’en février 1985 que ladite société a modifié ses statuts pour devenir une SIAL, dont l’inscription a été requise auprès du RC le 1er mars 1985.

De plus, il n’est, à juste titre, pas contesté que les autorisations d’aliéner litigieuses, sollicitées en 2012 par A________, ne réalisaient aucune des deux autres hypothèses de l’art. 39 al. 4 LDTR. Les deux appartements en cause avaient été loués de sorte que la let. c de ladite disposition n’était pas applicable. Quant à la let. b de cette norme, elle comportait deux conditions cumulatives, dont l’une d’elles n’était pas réalisée car les appartements en cause n’avaient pas été cédés de manière individualisée avant le 30 mars 1985. En effet, comme cela ressort de l’art. 3 des statuts de la SI F______ 1985, cette société, devenue alors une SIAL, avait notamment pour but de posséder, pour le compte de ses actionnaires, l’ensemble des parts de copropriété. Ce n’est que lors de sa liquidation fin 1999 que les actionnaires de cette société sont devenus copropriétaires des deux appartements en cause, proportionnellement à leurs droits. Dès lors, la découverte du but initial de la SI F______ et de la modification de son but social décidée en février 1985 est un élément de fait déterminant pour l’issue de la procédure ayant abouti à l’ATA/6______, en ce sens qu’il aurait conduit à une autre solution juridique : les hypothèses des let. a et d de l’art. 39 al. 4 LDTR n’auraient alors pas pu être réalisées et le département n’aurait ainsi pas été tenu de délivrer les autorisations sollicitées par A________, mais aurait dû procéder à la pesée des intérêts conformément à l’art. 39 al. 2 LDTR. Il n’est pas certain, sans toutefois être exclu non plus, que le résultat de cette pesée des intérêts eût confirmé les deux autorisations d’aliéner octroyées par arrêtés du 14 mai 2012.

Cela étant et indépendamment de la question de savoir si l’ASLOCA a fait preuve de toute la diligence requise pour produire les pièces 2 et 3 précitées dans le cadre de la procédure ordinaire, il ne peut ici qu’être constaté qu’elle avait connaissance de la date de constitution de la SI F______ en SIAL, en tout cas dès le 21 janvier 2019, date à laquelle le RC a certifié que lesdites pièces étaient conformes aux pièces déposées à l’appui des inscriptions sollicitées par la
SI F______ auprès du RC les 30 juin 1967 et 1er mars 1985. En ne demandant la révision de l’ATA/6______ que le 20 avril 2020, l’ASLOCA n’a pas agi dans le délai de trois mois dès la découverte d’un motif de révision susceptible d’être, le cas échéant, admis sur la base de l’art. 80 let. b LPA. Par conséquent, tardive, la demande en révision de l’ASLOCA doit être, sous cet angle, déclarée irrecevable.

b. Quant au cas de figure prévu à l’art. 80 let. a LPA, s’il peut être examiné d’office, il est soumis à la preuve de la commission d’un crime ou d’un délit ayant eu une influence sur l’ATA/6______. Comme exposé ci-dessus, l’information erronée quant au régime de propriété de l’immeuble sis B________ lors de sa construction, contenue dans l’acte notarié du 14 octobre 2009 ainsi que dans l’arrêté du département du 6 novembre 2009 (VA 5______), a une influence déterminante sur cet arrêt. Toutefois, la procédure pénale initiée par la plainte déposée par l’ASLOCA en février 2019 est toujours pendante. L’existence d’un motif de révision au sens de cette disposition ne peut dès lors, à ce stade, pas encore être établie.

Certes, l’art. 14 LPA permet à la chambre administrative de suspendre la présente procédure jusqu’à droit connu dans la procédure pénale P/2______/2019. Selon l’art. 14 al. 1 LPA, lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu'à droit connu sur ces questions. Toutefois, il découle de la jurisprudence susévoquée relative aux conditions de révocation des décisions en force mais matériellement irrégulières, que la modification, au fond, de l’ATA/6______ suppose que l’intérêt à une correcte application du droit objectif l’emporte sur l’intérêt de la sécurité du droit, respectivement à la protection de la confiance. Dans le cas contraire, il n’est en principe, et sous réserve d’un intérêt public particulièrement important, pas possible de révoquer la décision en cause. À titre d’exemples de ce type de situation-ci, la jurisprudence cite le cas où la décision administrative fonde un droit subjectif et celui où le justiciable a déjà fait usage du droit que lui a conféré la décision. Ainsi, quelle que soit l’issue de la procédure pénale susmentionnée, la demande de révision au sens de l’art. 80 let. a LPA est soumise à cette pesée des intérêts, étant précisé qu’il n’est, en général, pas possible de révoquer une décision octroyant un droit à un justiciable qui en a déjà fait usage.

Dès lors et en application du principe d’économie de procédure, la chambre de céans ne suspendra pas la présente procédure dans l’attente de l’issue de la procédure pénale susmentionnée. En effet, la présente affaire porte sur les autorisations d’aliéner les deux appartements litigieux, octroyées à A________ par le département en mai 2012 et confirmées par la chambre de céans dans l’ATA/6______ en décembre 2013. Il n’est pas contesté que cet arrêt a été suivi de la vente desdits appartements en faveur de tiers, en particulier s’agissant de l’appartement dont la vente était destinée à une personne physique déterminée. Quant à celui que A________ prévoyait de vendre à une société anonyme, il ressort de sa demande en paiement que cette dernière s’est désistée au début de l’année 2013, mais qu’elle a trouvé un nouvel acquéreur pour cet appartement le 20 octobre 2017 pour un prix s’élevant à CHF 830'000.-. Dans la mesure où une annulation de l’ATA/6______ aurait pour effet d’affecter, après l’écoulement d’une durée relativement longue, les actes de vente desdits appartements passés avec des personnes tierces au litige opposant l’ASLOCA à A________ et au département, et ainsi de porter préjudice aux acheteurs de ces appartements, qui sont susceptibles d’avoir entre-temps eux-mêmes conclu d’autres actes juridiques avec des tiers en raison de leur qualité de propriétaires desdits appartements, l’intérêt à la correcte application de l’art. 39 al. 4 LDTR ne saurait primer celui à la sécurité du droit et à la protection de la confiance accordée par les tiers aux décisions susévoquées du département ainsi qu’à l’arrêt litigieux, entrés en force depuis janvier 2014.

Par conséquent, même à considérer qu’un motif de révision au sens de l’art. 80 let. a LPA soit donné dans le présent cas, la chambre de céans ne peut pas, sur le fond et pour les motifs susévoqués, modifier l’ATA/6______ en l’annulant, ni annuler les arrêtés précités du département du 14 mai 2012. La chambre de céans ne pourra pas non plus, pour les mêmes raisons et au vu de la jurisprudence susmentionnée relative à la nullité des décisions, donner suite à la demande de l’ASLOCA en constatation de nullité de l’arrêté du 6 novembre 2009 (VA 5______) autorisant notamment l’aliénation des deux appartements en cause en faveur de A________.

4) Au vu de ce qui précède, la demande en révision de l’ASLOCA doit donc être rejetée en tant qu’elle est recevable. Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur ses autres demandes, ni de donner suite aux actes d’instruction qu’elle a sollicités dans la mesure où ils ne sont pas de nature à modifier l’issue du présent litige.

5) Vu l’issue de celui-ci, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de l’ASLOCA (art. 87 al. 1 LPA).

Cependant, aucune indemnité de procédure ne sera allouée à A________ dans la mesure où elle a contribué à l’existence du présent litige (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande en révision formée le 14 avril 2020 par l’association genevoise des locataires (ASLOCA) contre l’arrêt ATA/6______ du 10 décembre 2013, en tant qu’elle est recevable ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’association genevoise des locataires (ASLOCA) ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romolo Molo, avocat de l'association genevoise des locataires (ASLOCA), à Me G______, avocate de A________ SA, ainsi qu'au département du territoire - office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :