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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4342/2019

ATA/663/2021 du 29.06.2021 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 08.09.2021, rendu le 27.10.2022, REJETE, 8C_597/2021
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4342/2019-FPUBL ATA/663/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 juin 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Thomas Barth, avocat

contre

HAUTE ÉCOLE SPÉCIALISÉE DE SUISSE OCCIDENTALE DE GENÈVE (HES-SO)
représentée par Me François Bellanger, avocat



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1962, a tout d’abord occupé, dès le 6 février 2006, la fonction d’adjoint à la directrice des ressources humaines (ci-après : RH) de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (ci-après : HES-SO Genève), en classe maximum 21 de l'échelle des traitements de l'État de Genève.

Après avoir été nommé fonctionnaire le 1er février 2008, il est devenu, dès le 1er septembre 2008, le directeur RH de la HES-SO Genève. Il a été confirmé dans cette fonction, colloquée en classe 26 de l'échelle des traitements, le 1er septembre 2010.

2) Le supérieur hiérarchique direct de M. A______ était le directeur général de la HES-SO Genève, Monsieur B______ (ci-après : le directeur général).

3) a. M. A______ a été soumis à un entretien d’évaluation et de développement du manager (ci-après : EEDM) le 12 juillet 2010. Sur le formulaire prévu à cet effet, le directeur général a précisé qu’il était très satisfait du travail de M. A______, « une ressource extrêmement précieuse » dont il appréciait l’efficacité, la disponibilité et la loyauté. Il devait toutefois veiller à ne pas être trop « boulimique » en matière d’activités à réaliser, envisager une meilleure planification et déléguer plus de tâches à ses collègues.

b. M. A______ a ensuite été soumis à un EEDM le 22 mai 2013. Selon le directeur général, le bilan de la période écoulée était excellent. Il appréciait beaucoup de travailler avec M. A______, collaborateur « intègre et loyal », engagé, pragmatique, efficace, en qui il avait pleinement confiance. Ce dernier devait toutefois être attentif aux deux points suivants : « l’écoute afin de bien diagnostiquer les actions ; le périmètre de ses responsabilités dans lequel il doit rester dans le déploiement des actions ».

4) Le 15 juillet 2013, le directeur général s'est adressé au directeur général (ci-après : DG) de l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) au sujet de l'évaluation salariale du poste de M. A______, soumettant à l'OPE un formulaire de demande de réévaluation du poste en classe 27 de l'échelle des traitements, ceci en vue de la future autonomie de la HES-SO, qui impliquait, par analogie de fonctionnement avec l'université, une direction des RH et du service juridique et, par contrecoup, une revalorisation du poste de DRH.

5) Le 21 août 2013, le directeur général de l'OPE a répondu que le Conseil d'État avait décidé le 7 décembre 2010 de considérer les fonctions RH uniquement dans le cadre du projet SCORE – abandonné depuis lors –, si bien que l'OPE ne pouvait pas traiter la demande de revalorisation concernant M. A______.

6) Le 11 novembre 2013, M. A______ a demandé au directeur général de recevoir un certificat de travail intermédiaire, à la suite de quoi les deux précités ont eu une discussion le 13 novembre 2013, M. A______ renonçant alors provisoirement à sa demande.

7) Le 14 novembre 2013, M. A______ s'est derechef adressé au directeur général, par courriel, en lui proposant de surseoir à la réponse négative de l'OPE en « colloquant » son poste dans un poste de « directeur N° 002027 », les deux derniers chiffres correspondant à la nouvelle classe de traitement.

8) Interpellé à ce sujet par un courriel du directeur général, l'OPE a répondu le 15 novembre 2013 en réaffirmant la teneur de son courrier du 21 août 2013. La réévaluation de fonction pour la filière RH était bloquée depuis 2010.

9) Le 23 juin 2014, M. A______ a eu un accident domestique et a souffert d'une double fracture des membres inférieurs.

10) Le 12 juillet 2016, M. A______ a eu un EEDM. Les neuf compétences décrites étaient maîtrisées, trois d'entre elles étant à développer.

Dans le bilan général, le directeur général indiquait que « les choses [s'étaient] malheureusement dégradées à partir de 2013 », soit en particulier à partir du refus de revalorisation salariale du poste de M. A______ par l'OPE. À partir de cet instant, son attitude envers sa hiérarchie avait sensiblement changé et avait été très problématique à plusieurs égards.

11) En octobre 2016, le directeur général a mandaté une consultante externe, Madame C______, afin d'identifier et de « mettre à plat » les difficultés des membres des services communs, en lien notamment avec l’entrée en vigueur de la loi d’autonomie, et de trouver des pistes d’amélioration.

12) Le 12 janvier 2017 a eu lieu une journée « au vert » animée par Mme C______.

13) Les participants à cette journée « au vert » ayant été invités à communiquer les points qui seraient encore à discuter, M. A______ a indiqué, par courriel du 7 février 2017, qu'il n'était pas satisfait du compte rendu de Mme C______, à l'instar de certains de ses collègues. Le contenu du document ne reflétait pas vraiment les difficultés existantes.

14) Le 19 février 2017, le directeur général a adressé un courriel à Mme C______, dans lequel il indiquait que M. A______ lui semblait jouer un double jeu, et qu'il cherchait à le déstabiliser et à monter les uns et les autres contre lui.

15) Le 20 février 2017, Mme C______ lui a répondu, également par courriel, notamment que « Oui un grand déballage laisse des traces. Dans la vie un membre qui a la gangrène est coupé mais le malade est guéri. Malade = hesge ». Elle mentionnait également : « je n'aime pas la tournure que prend le conflit au sein du leadership. Ne tardez pas trop à poser des actes avec ceux qui veulent vous abattre car je pense que nous en sommes là ».

16) Le 20 juillet 2017, M. A______ a écrit au directeur général qu'il avait signé son EEDM du 12 juillet 2016. Il avait toutefois modifié l'item concernant l'objectif sur le projet Archipel de « pas atteint » en « modifié », car il avait été décidé de modifier le périmètre.

17) Le 22 février 2017, le directeur général a répondu à M. A______, en indiquant notamment qu'il trouvait la modification unilatérale du point précité « quelque peu cavalière, pour ne pas dire plus ».

18) Le 5 avril 2017, le directeur général et M. A______ ont eu un entretien sur le comportement de ce dernier. Un compte rendu en a été fait sous forme de courrier daté du 28 avril 2017.

Il était notamment reproché à M. A______ d'avoir adopté lors du collège des services communs (ci-après : CSC) une attitude en total décalage avec le climat de la journée « au vert ». Quelques jours plus tard, M. A______ avait en outre supprimé le directeur général d'une liste de diffusion d'un courriel envoyé à tous les membres du CSC le 7 février 2017, et dans lequel il « aliment[ait] la polémique sur le compte rendu de Mme C______ ».

19) Le 13 juin 2017 a eu lieu une matinée de suivi de la journée « au vert », animée par Mme C______, celle-ci en faisant le jour même un résumé écrit.

20) Le 13 août 2018, M. A______ a déposé une demande en vue d'accomplir du travail à domicile de manière régulière soit un à quatre jours par mois, ce afin de lui permettre une meilleure analyse et une meilleure concentration sur les dossiers à traiter.

21) Le 10 octobre 2018, l'assistante du directeur général, Madame D______, a fait au précité le compte rendu écrit d'une rencontre qu'elle avait eue avec M. A______ le 26 septembre 2018.

Elle s'était rendue dans le bureau de M. A______ pour lui poser une question. Celui-ci avait répondu puis avait fait glisser la conversation sur certaines de ses frustrations actuelles. Il avait évoqué une conversation récente avec le directeur général au sujet de son temps de télétravail. Il n'acceptait pas que le directeur général eût à cette occasion remis sa parole en doute, et que ce n'était pas la première fois que le directeur général avait une réalité différente de la sienne. Il se faisait beaucoup de soucis pour M. B______ : M. A______ avait été infirmier dans le domaine psychiatrique et reconnaissait les symptômes d'un trouble psychique, qui s'aggravait avec le temps dès lors que lors de sa fête d'anniversaire de 50 ans, le directeur général lui avait promis que son poste serait réévalué rapidement, promesse non tenue et que l'intéressé avait ensuite nié avoir faite.

22) Par courrier du 19 octobre 2018, M. A______ a été convoqué à un entretien de service le 7 novembre 2018. Il lui était reproché une attitude de défiance et un manque de loyauté vis-à-vis de sa hiérarchie depuis 2013, sur la base notamment des propos rapportés par Mme D______, une dégradation très sensible, et allant s'aggravant depuis 2013, du climat de confiance et de travail étant pour le surplus mise en exergue.

23) M. A______ a été en arrêt de travail à 100 % pour cause de maladie du 25 octobre 2018 au 27 novembre 2019, sur la base de certificats médicaux régulièrement renouvelés émanant d'un médecin interniste puis, dès le 9 janvier 2019, d'un psychiatre-psychothérapeute.

24) Le 6 novembre 2018, M. A______ a demandé le report de l'entretien de service prévu le lendemain.

25) Le 7 février 2019, dès lors qu’un entretien de service dans ses locaux ne pouvait pas se tenir en raison de l’absence pour cause de maladie de M. A______, la HES-SO Genève y a procédé par écrit. Le compte rendu de cet entretien a été signé par une des membres du conseil de direction et le directeur général.

a. Par loyauté envers sa hiérarchie, l’assistante de direction du directeur général avait fait part à ce dernier, dans un courrier du 10 octobre 2018, du contenu d’une discussion avec M. A______, dans le bureau de celui-ci, le 26 septembre 2018. Après avoir échangé avec elle au sujet d’un projet de directive, il aurait fait glisser la conversation vers certaines de ses frustrations professionnelles. Il aurait en outre indiqué, qu’en sa qualité d’ancien infirmier en psychiatrie, il se faisait du souci pour le directeur général chez qui il reconnaissait des symptômes d’un trouble psychiatrique qui ne faisaient que s’aggraver.

b. Cette attitude de défiance à l’égard de sa hiérarchie s’inscrivait dans le contexte d’une dégradation sensible du climat de confiance et de travail depuis 2013, en particulier à la suite du refus de l'OPE de réévaluer sa fonction en classe de traitement 27 et de le maintenir en classe 26. Malgré des entretiens informels avec le directeur général, le climat de travail n’avait cessé de se dégrader avec des effets négatifs sur la dynamique d’équipe des services communs, sur l’équilibre institutionnel ainsi que sur la qualité de ses prestations.

c. Nonobstant un travail constructif effectué avec l’aide d’une consultante externe afin de permettre l’expression des difficultés rencontrées dans les relations interpersonnelles et d’identifier des solutions d’amélioration, l’intéressé avait persisté à avoir une attitude de défiance et de manque de loyauté envers sa hiérarchie et avait adopté un comportement agressif et déstabilisant à l’égard de la consultante externe. En février 2017, il avait envoyé un courriel au contenu polémique en retirant le directeur général de la liste de diffusion. Il s’était ensuite excusé et avait expliqué vouloir créer pour l’avenir un climat de confiance avec le directeur général.

Malgré tout, il semblait qu’il avait continué à entretenir une atmosphère de défiance envers sa hiérarchie de sorte que, lors d’une séance du 20 juin 2017, le directeur général avait déclaré à toutes les personnes présentes, bien que ses propos fussent particulièrement destinés à M. A______, qu’il n’y aurait plus aucune tolérance pour les attitudes de défiance envers la hiérarchie et les comportements « toxiques » pour l’institution.

Son attitude du 26 septembre 2018 relevait à nouveau d’un comportement néfaste qui n’allait pas dans le sens de la création d’un climat de confiance Le conseil de direction envisageait la cessation des rapports de travail pour motif fondé, le comportement de M. A______ constituant un manquement grave au devoir de fonction exigeant d'entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs hiérarchiques et leurs collègues.

26) Le 11 mars 2019, M. A______ a formé auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) une demande visant à la reconnaissance de l’illicéité de l’atteinte à sa personnalité commise par son employeur, la HES-SO Genève, du fait du directeur général et à la condamnation de celle-là à lui verser une indemnité à titre de tort moral à hauteur de
CHF 82'266.-. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de cause A/956/2019.

27) À la suite de l’entretien de service écrit du 7 février 2019, M. A______ a fait usage de son droit d’être entendu le 13 mars 2019.

Il réfutait tout comportement déloyal ou de défiance envers sa hiérarchie, composée en ce qui le concernait du seul directeur général. Il avait, à de nombreuses reprises, tenté de surmonter les divergences apparues avec ce dernier, mais avait constaté, à regret, que ses efforts avaient été vains.

28) Le 18 mars 2019, la HES-SO Genève a fait parvenir à M. A______ une copie du courrier de Mme D______ du 10 octobre 2018, copie qu’il n’avait jusqu’ici pas reçue et dont il souhaitait prendre connaissance.

Dans le délai accordé par son employeur pour y répondre, M. A______ a contesté les propos contenus dans ce courrier.

29) Le 29 avril 2019, la HES-SO Genève, sous la signature du directeur général, a informé M. A______ qu’elle envisageait une résiliation des rapports de service pour motifs fondés. En conséquence, elle ouvrait une procédure de reclassement et allait dès lors rechercher un poste disponible en son sein, ainsi que dans celui de l’administration cantonale, correspondant à ses capacités. Il était invité à envoyer un curriculum vitae (ci-après : CV) actualisé dans un délai de dix jours. Il était tenu de collaborer et aurait la possibilité de faire des suggestions. Elle procéderait à des points de situation intermédiaires et dresserait un bilan définitif à la fin du processus de reclassement.

Les explications qu’il avait fournies dans ses courriers des 13 mars et
2 avril 2019 n’étaient pas de nature à modifier les éléments que la direction de la HES-SO Genève avait soulevés dans l’entretien de service écrit. Ces éléments avaient été dûment établis et étaient constitutifs d’un motif fondé de résiliation des rapports de service.

Cette décision incidente était déclarée exécutoire nonobstant recours. Elle indiquait que son destinataire pouvait recourir auprès de la chambre administrative dans un délai de dix jours dès sa réception.

30) Par acte déposé le 6 mai 2019, M. A______ a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative, concluant, préalablement, à la restitution de l’effet suspensif à son recours, principalement à l’annulation de la décision de reclassement et, subsidiairement, à la suspension de la procédure de reclassement jusqu’à droit connu dans le cadre de la procédure A/956/2019.

La procédure a été ouverte sous numéro A/1708/2019.

31) Par décision du 3 juillet 2019, la présidence de la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif au recours, la compétence de la chambre administrative paraissant de prime abord douteuse au vu de l'existence de la voie préalable de la réclamation.

32) Le 8 juillet 2019, le directeur général s'est adressé à l'OPE en joignant le CV et le certificat de travail de M. A______, en vue de trouver pour ce dernier un poste de responsable RH ou tout autre poste vacant correspondant à ses capacités.

Il en a fait de même auprès des différentes écoles composant la HES-SO, ainsi qu'auprès de l'Institution de maintien à domicile (ci-après : IMAD), de l'Aéroport international de Genève (ci-après : AIG), des Transports publics genevois (ci-après : TPG), des Services industriels de Genève (ci-après : SIG), des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) et de l'université de Genève.

33) Le 18 juillet 2019, M. A______ a demandé que le délai de fin de la procédure de reclassement soit reporté à la fin de l'année 2019. Au regard du poste très exigeant qu'il exerçait, ainsi que des compétences élevées nécessaires à l'exercice de la fonction de DRH, il y avait lieu de reconnaître que peu de places se libéraient pour des fonctions équivalentes.

34) Le 22 juillet 2019, la HES-SO a répondu sans se prononcer expressément sur le report du délai, estimant que M. A______ semblait contester d'emblée et frontalement la validité de la procédure de reclassement, adoptant ainsi une « position antagoniste et stérile ».

35) Par arrêt du 13 août 2019 (ATA/1224/2019), la chambre administrative a déclaré, dans la cause A/956/2019, la demande de M. A______ irrecevable, n'étant pas compétente pour connaître de l'indemnité pour tort moral due à un fonctionnaire de la HES-SO pour une éventuelle atteinte à sa personnalité.

36) Le 19 août 2019, la HES-SO a fait parvenir, à M. A______ à la demande de ce dernier, un certificat de travail intermédiaire qui serait considéré comme accepté en l'absence de remarques formulées avant le 23 août 2019 à 17h00.

37) Le 22 août 2019, M. A______ a retourné le projet de certificat intermédiaire avec quatre propositions d'ajouts ou de modifications.

38) Par arrêt du 27 août 2019 (ATA/1285/2019) dans la cause A/1708/2019, la chambre administrative a déclaré irrecevable le recours déposé le 6 mai 2019 par M. A______ contre l'ouverture de la procédure de reclassement, et a transmis la cause au directeur général de la HES-SO pour raison de compétence, la voie de la réclamation étant ouverte.

39) Par courrier du 28 août 2019, la HES-SO a fait savoir à M. A______ qu'elle envisageait de clore la procédure de reclassement, celle-ci n'ayant pas abouti. Un délai de 15 jours à réception du courrier lui était imparti pour faire valoir d'éventuelles observations.

40) Le 9 septembre 2019, après un échange de plusieurs correspondances au sujet du certificat de travail intermédiaire, la HES-SO a fait valoir que certaines des modifications demandées ne pouvaient être intégrées, en particulier la signature du certificat par le seul directeur général telle que demandée par M. A______. Il lui était donc envoyé un certificat « conforme à la version que [pouvait] accepter la HES-SO ».

41) Le 10 septembre 2019, M. A______ a demandé que le délai pour se prononcer sur la clôture de la procédure de reclassement soit reporté au-delà du prononcé de la décision sur réclamation dont l'instruction était encore pendante.

42) Le 13 septembre 2019, après un bref échange de correspondance, la HES-SO a maintenu le délai de quinze jours pour se déterminer.

43) Le 16 septembre 2019, M. A______ s'est déterminé. L'empressement dont la HES-SO faisait preuve pour le « mettre sur la touche » démontrait la volonté ferme de la direction générale de se séparer dans les meilleurs délais d'un employé ayant eu l'audace de se plaindre du harcèlement psychologique dont il était l'objet. L'acharnement du directeur général témoignait de la véracité et de l'actualité des reproches formulés à son encontre.

De plus, la procédure de reclassement avait été menée en utilisant un dossier de candidature caduc, dont notamment un CV vieux de plus de dix ans, dans lequel apparaissait son ancienne adresse en France, alors qu'il habitait désormais en Suisse et que, depuis 2018, l'administration cantonale était tenue de respecter la préférence cantonale. Il n'était même pas fait mention dans le CV en question de l'activité en tant que DRH assumée depuis 2008. Enfin, il n'avait pas bénéficié des mêmes avantages que plusieurs de ses collègues lors de procédures de reclassement antérieures. Il citait le nom de neuf personnes.

M. A______ demandait que son dossier soit traité avec la diligence et la bienveillance qui lui étaient dues, et que le délai pour clore la procédure de reclassement soit reporté à une date raisonnable.

44) Le 12 septembre 2019, M. A______ a déposé une requête en conciliation auprès du Tribunal civil, concluant à une réparation morale pour atteinte à la personnalité de CHF 82'266.-. Cette procédure est encore pendante.

45) Par décision du 8 octobre 2019, le directeur général a déclaré la réclamation de M. A______ contre la décision d'ouverture d'une procédure de reclassement irrecevable. Les conditions de l'art. 57 LPA n'étaient pas réunies.

Par surabondance de moyens, la décision attaquée était valable sur le fond. Tous les éléments factuels démontraient que M. A______ avait bien eu à l'égard de la HES-SO et de sa hiérarchie un comportement qui avait eu un impact très négatif sur la dynamique des services communs ainsi que sur l'équilibre institutionnel de la HES-SO. Cette dernière n'avait donc d'autre choix que d'envisager la résiliation des rapports de service.

46) Par décision du 9 octobre 2019, la HES-SO a décidé de clore la procédure de reclassement.

47) Le 1er novembre 2019, M. A______ a formé opposition contre la décision précitée, concluant à ce que la procédure de reclassement suive son cours, et à pouvoir bénéficier d'un coaching d'au moins six mois, au terme duquel serait menée une procédure de reclassement « en bonne et due forme », sur la base d'un dossier actualisé et au cours d'un processus durant lequel il serait partie prenante à chacune des étapes.

Il avait subi un harcèlement psychologique de la part du directeur général. Le courrier du 19 octobre 2018 avait été pour lui un véritable choc. Il n'avait eu aucun comportement déloyal ou inapproprié à l'égard de sa hiérarchie depuis 2013, et contestait intégralement le contenu du courrier de Mme D______ du 10 octobre 2018, celui-ci ayant manifestement été rédigé sous la dictée ou à tout le moins à la demande du directeur général. Son évaluation du 12 juillet 2016 était très bonne et ne constituait pas un recadrage, pas plus que le courrier du 5 avril 2017.

La HES-SO Genève avait transmis sa candidature dans le cadre de la procédure de reclassement à l'aide d'un CV vieux de plus de dix ans, sans l'avoir interpellé préalablement – notamment après que la chambre administrative eut refusé la restitution de l'effet suspensif – pour qu'il puisse transmettre un CV actualisé, ce qui avait gravement péjoré sa position. La HES-SO Genève n'aurait pas dû appeler téléphoniquement les entités concernées, vu le risque de dénigrement en lien avec le harcèlement psychologique dont il faisait l'objet. Il souhaitait en outre pouvoir bénéficier des mêmes avantages que d'autres cadres de l'institution avant lui.

48) Par décision du 13 novembre 2019, déclarée exécutoire nonobstant recours, le directeur général a rejeté la réclamation de M. A______ concernant la clôture de la décision de reclassement.

La HES-SO avait entrepris toutes les démarches nécessaires pour favoriser le reclassement de M. A______ au sein de la HES-SO, de l'État de Genève ou d'une autre institution étatique ou paraétatique, avec sérieux et en sollicitant l'aide du DG de l'OPE.

En revanche, aucun élément du dossier ne justifiait que M. A______ pût bénéficier d'un coaching de six mois en étant payé et en obtenant l'ouverture d'une nouvelle procédure de reclassement à l'issue de ces six mois, et à plus forte raison de lui créer un poste sur mesure. On ne pouvait dès lors que constater l'échec de la procédure de reclassement. La procédure de résiliation des rapports de service irait dès lors son cours, la décision incidente attaquée devant être confirmée.

49) Le 13 novembre 2019, la HES-SO a informé M. A______ que, à la suite de l'échec de la procédure de reclassement, elle envisageait de le licencier pour insuffisance de prestations et inaptitude à remplir les exigences du poste. Un délai de 15 jours dès réception du courrier lui était imparti pour formuler d'éventuelles observations sur l'état de fait présenté.

50) Par acte posté le 25 novembre 2019, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision de clôture de la procédure de reclassement, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, et principalement à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à la HES-SO pour poursuite de la procédure de reclassement. La cause a été enregistrée sous numéro A/4342/2019.

Sur le fond, la procédure de reclassement avait été trop courte. La HES-SO, pressée de l'entamer, avait par ailleurs transmis un dossier de candidature non actualisé à plusieurs entités publiques, étant précisé qu'il avait parfaitement collaboré à son reclassement. Il subissait enfin une inégalité de traitement, ayant demandé sans succès à bénéficier d'avantages accordés par le passé aux cadres de la HES-SO dans au moins dix précédentes procédures du même type.

51) Le 28 novembre 2019, M. A______ a indiqué qu'il n'entendait pas formuler d'observations par rapport au courrier du 13 novembre 2019 l'informant de la volonté de résilier les rapports de service.

Depuis le début de la procédure, la HES-SO se refusait à prendre en compte les éléments factuels, pourtant étayés, qu'il avait présentés. Dès lors, il n'entendait pas se livrer à un vain exercice, lequel paraissait essentiellement destiné à sauvegarder les apparences en matière de droit d'être entendu.

52) Par décision du 9 décembre 2019, déclarée exécutoire nonobstant recours, la HES-SO Genève a résilié les rapports de travail de M. A______ pour le 31 mars 2020.

Cette décision de 37 pages reprenait les faits de la cause ainsi que les reproches adressés à l'intéressé.

Les textes légaux applicables au cas d'espèce étaient notamment la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève du 29 août 2013 (LHES-SO-GE - C 1 26) et le règlement interne sur le personnel des HES-SO Genève du 6 février 2017 (ci-après : RPersHES-SO), lequel prévoyait que les rapports de travail du personnel administratif et technique (ci-après : PAT) étaient régis notamment par la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05).

Dès 2013, le comportement de M. A______ était devenu de plus en plus problématique à l'encontre du directeur général, suite au refus par l'OPE de réévaluer le poste de l'intéressé en classe de traitement 27. L'entretien d'évaluation du 12 juillet 2016 avait mis en évidence les problèmes de M. A______, notamment son absence de comportement loyal, l'absence de soutien, la défiance vis-à-vis de sa direction et la nécessité d'améliorer les relations interpersonnelles au sein de l'institution. Malgré l'organisation de séances « au vert », M. A______ avait persisté dans ce type de comportement, notamment en excluant le directeur d'une liste de distribution de courriel le 7 février 2017, son comportement inadéquat lors du CSC du 9 février 2017, ou encore la modification en sa faveur d'une partie réservée à l'évaluateur dans son entretien d'évaluation le 20 février 2017.

Des séances de médiation avaient été organisées entre M. A______ et le directeur général en mai 2017. Bien qu'une amélioration du comportement du premier à l'égard du second ait alors été constatée, l'attitude de M. A______ était devenue plus problématique avec les directions d'école. Il avait eu tendance à ralentir de manière injustifiée le traitement des dossiers, en adoptant une attitude de « petit chef » avec les RH des différentes écoles composant la HES-SO Genève. Parallèlement, les relations professionnelles entre M. A______ et son adjointe, Mme E______, s'étaient dégradées au point que cette dernière s'en était ouverte au directeur général. Ce management inadéquat se doublait de problèmes relationnels avec une autre collaboratrice de son service. Enfin, le 26 septembre 2018, lors d'un dialogue avec Mme D______, il avait tenu des propos totalement déplacés et inadéquats concernant le directeur général.

Il était dès lors indéniable que des motifs fondés de résiliation existaient, au sens des art. 21 al. 3 et 22 let. a et b LPAC. Pour le surplus, la procédure de reclassement s'était déroulée de manière correcte, étant précisé que M. A______ n'avait fait parvenir son CV actualisé que le 12 août 2019, alors qu'il savait devoir le transmettre dès le 9 mai 2019.

53) Par décision du 23 décembre 2019 (ATA/1858/2019), la présidence de la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif au recours dans la cause A/4342/2019.

54) Par décision du 17 février 2020, la HES-SO Genève a rejeté la réclamation du 8 janvier 2021 et a confirmé la décision de résiliation des rapports de service, reprenant très largement la décision initiale.

55) Par acte posté le 16 mars 2020, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision sur réclamation précitée, concluant préalablement à la jonction de la procédure A/4342/2019, principalement à l'annulation de la décision sur réclamation et à ce que sa réintégration soit ordonnée, subsidiairement à l'allocation d'une indemnité de CHF 364'776.- correspondant à vingt-quatre mois de traitement, et en tout état de cause à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Le projet « Archipel RH » avait souffert dès ses débuts de blocages systématiques de la part du directeur général, ce dernier semblant déterminé à ce que M. A______ ne puisse pas mettre en œuvre ce projet.

À la fin de l'année 2015, lors d'un conseil de direction, le directeur général lui avait déclaré, alors que lui-même s'apprêtait à prendre la parole : « Attention à ce que tu vas dire, sinon je te casse la gueule ! », propos qui avaient choqué plus d'un participant à cette séance. À la même période, Mme E______ s'était vu confier des prérogatives allant au-delà de son statut hiérarchique, diminuant ainsi le crédit accordé à M. A______, et empiétant sur ses compétences de DRH. Le directeur général avait du reste pris l'habitude de ne plus s'adresser à lui directement mais de systématiquement passer par Mme E______.

Lors de la journée « au vert » au début de l'année 2017, le directeur général avait très vite cherché à influencer le travail de Mme C______ au détriment de M. A______. Cette dernière avait ensuite fait preuve à l'égard du précité d'une prévention évidente, le traitant notamment de « chef de meute ». Le 17 février 2017, il avait retiré le directeur général de la liste de distribution concernant le suivi de ladite journée, dans la mesure où les courriels de réponse étaient collectés par l'adjointe du directeur général, Mme F______ ; il ne paraissait donc pas nécessaire que le directeur général se vît adresser tous ces échanges.

La décision attaquée et celle qu'elle confirmait lésaient son droit d'être entendu, citant différents exemples de comportements prétendument toxiques ou d'opposition sans nommer les personnes les ayant remontés à la direction générale, et donc nécessairement sans confrontation avec celles-ci. Plusieurs reproches étaient imprécis au point qu'il lui était impossible d'y répondre factuellement.

La procédure de reclassement n'avait pas été respectée, sa durée ayant été dans les faits inférieure à deux mois, et était entachée de vices graves, comme l'utilisation d'un vieux CV (la demande d'actualisation ayant été glissée dans la décision incidente d'ouverture de la procédure de reclassement). Elle n'avait en outre pas respecté le principe de l'égalité de traitement, M. A______ n'ayant pas bénéficié des mêmes mesures que plusieurs cadres de la HES-SO Genève avant lui.

La résiliation des rapports de service ne procédait d'aucun motif fondé. Quatre types de reproches étaient formulés à son encontre (démarches relatives à la réévaluation salariale de son poste, avoir laissé perdurer des conflits latents entre 2013 et 2016, tenue de propos inadéquats visant le directeur général auprès de Mme D______, et adoption d'un comportement déloyal, toxique, antagoniste et polémique vis-à-vis de la direction générale).

Les démarches relatives à la réévaluation salariale de son poste dataient de plus de sept ans, et n'avaient donné lieu à aucune sanction à l'époque ; le reproche visait surtout à jeter un doute sur sa probité.

S'agissant des conflits latents, il se devait précisément, en tant que DRH, de veiller à la bonne application des règlements et directives et au bien-être du personnel de l'institution, si bien que l'on ne saurait lui reprocher d'avoir relayé les doléances de certains cadres. Il avait, contrairement aux allégués de la HES-SO Genève, apporté un soutien sans faille au directeur général, tout particulièrement dans les dossiers mettant ce dernier en cause, et il avait œuvré sans relâche pour trouver une solution favorable à deux conflits opposant deux collaboratrices (Mesdames G______ et H______) au directeur général.

Le ton et la présentation du courrier du 10 octobre 2018 de Mme D______ laissaient indubitablement paraître que celui-ci avait été rédigé sur demande du directeur général, de manière à provoquer la tenue d'un entretien de service et à procéder à son licenciement. Les faits présentés contenaient une incohérence majeure, à savoir que l'intéressée disait être arrivée dans le bureau de M. A______ à 8h40 et l'avoir quitté à 9h20, alors qu'il avait un rendez-vous à 9h00 avec deux collaborateurs. Pour le surplus, il n'avait jamais tenu les propos qui lui étaient prêtés.

Il ressortait clairement des échanges de courriels afférents à la journée « au vert » que l'entier des cadres avait supprimé le directeur général de la liste de diffusion. Par ailleurs, les critiques de M. A______ étaient partagées par au moins trois autres membres du CSC. Enfin, le reproche concernant l'attitude de « petit chef » semblait fabriqué de toutes pièces, dès lors que ni les comptes rendus d'évaluation, ni le rapport d'entretien du 5 avril 2018 n'en faisaient mention.

S'agissant du reproche lié à la modification d'une partie du compte rendu d'évaluation du 20 février 2017, la HES-SO Genève prétendait de manière erronée que la partie en question était réservée à l'évaluateur. En effet, l'évaluation des objectifs reflétait le résultat des échanges entre l'évaluateur et l'évalué. Aussi, il avait apporté la correction afin de refléter le point de vue qu'il avait exprimé et qui n'avait pas été restitué par l'évaluateur.

Par ailleurs, toujours pour décrire son prétendu comportement « antagoniste » ou « d'opposition », la HES-SO Genève s'appuyait sur les remarques formulées par les directeurs-adjoints des six écoles relatives au projet « Archipel RH » ainsi que sur le fait que certaines assistantes des ressources humaines n'osaient plus le contacter par téléphone. Enfin, il était prétendu que certaines directions d'écoles auraient observé un décalage entre les attentes de M. A______ et la stratégie de la HES-SO.

Or près de deux ans après sa reprise par Madame E______, le projet « Archipel RH » demeurait au point mort. La HES-SO Genève ne pouvait lui reprocher les difficultés rencontrées avec un projet qui demeurait en suspens à ce jour. Au sujet du décalage qu'auraient ressenti « certaines directions d'école », ou encore des allégations relatives à « certaines assistantes », force était de constater le caractère vague et non situé dans le temps de ce reproche, rendant impossible toute réfutation.

Dès lors, aucun « motif fondé » au sens de l'article 22 LPAC n'existait.

56) Le 18 mai 2020, la jonction des causes A/4342/2019 et A/966/2020 a été ordonnée, sous le plus ancien numéro.

57) Le 10 juillet 2020, la HES-SO Genève a conclu au rejet du recours, revenant en grand détail sur les allégués du recours et la chronologie des faits.

Le droit d'être entendu avait été respecté, notamment par rapport au courrier de Mme D______, qui avait été transmis à l'intéressé avec un délai pour pouvoir se déterminer à son sujet, ce qu'il avait du reste fait à diverses reprises. Plus généralement, les reproches faits étaient précis et situés dans le temps. Les directions des six écoles de la HES-SO Genève avaient formulé des griefs à son égard, et il n'y avait nul besoin de donner les noms des directeurs et assistantes concernés. L'audition de divers témoins permettrait de plus à la chambre administrative de pouvoir apprécier les griefs en connaissance de cause.

La procédure de reclassement avait été menée conformément au règlement. Il n'y avait pas de durée minimale de ladite procédure, laquelle avait été menée de manière large et permis d'identifier au moins six postes de direction et de qualité pour lesquels M. A______ pouvait postuler. L'intéressé avait du reste manqué à ses devoirs de collaboration. L'entretien téléphonique préalable avec les différentes entités contactées avait pour but de pallier l'absence de remise d'un CV actualisé par l'intéressé, et donc de favoriser son reclassement. M. A______ avait d'ailleurs obtenu un entretien pour l'un des postes, ce qui montrait que le but n'était pas de l'évincer. Quant aux mesures prises dans les cas mis en avant par le recourant, ces derniers n'étaient pas comparables, car ils ne concernaient pas des reclassements effectués à la suite d'un entretien de service.

58) Entre le 23 octobre 2020 et le 14 janvier 2021 se sont tenues six audiences de comparution personnelle et d'enquêtes.

a. M. B______ était directeur général depuis 2006. M. A______ était déjà en place depuis quelques semaines lorsqu'il était arrivé en avril 2006. La dégradation des relations professionnelles avait commencé en 2013. C’était peu avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la HES-SO Genève, le 1er avril 2014. Avant cette date, la HES-SO Genève fonctionnait comme une direction générale du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP). La volonté politique avait été de donner une autonomie de fonctionnement, ce qui avait induit passablement de changements dans la gouvernance et le fonctionnement de l’école. Le conseil de direction était un nouvel organe doté de nombreuses prérogatives, plutôt orienté vers la mission d’enseignement et de recherche. Le rôle du directeur général tel que décrit dans la loi était double : présider le conseil de direction et diriger les services communs, dont faisaient partie les RH.

L’entrée en vigueur de cette loi avait créé des tensions, dues d'une part au changement et d’autre part au mode d’organisation matriciel caractérisant la HES-SO, celle-ci étant un organisme intercantonal regroupant sept cantons. La nouvelle loi avait beaucoup de points communs avec la loi sur l'université du 13 juin 2008 (LU - C 1 30). M. A______, au lieu de l’aider à surmonter ces tensions, les avait plutôt exacerbées en poursuivant un intérêt personnel sous-tendu par deux frustrations, à savoir le refus par l’OPE de réévaluer sa fonction et la possibilité de faire partie de manière permanente du conseil de direction (les directeurs des services communs participaient au conseil ponctuellement et avec voix consultative lorsque le sujet débattu concernait leur département). L’évaluation périodique de M. A______ en 2013 était globalement bonne. L’OPE avait toutefois refusé de procéder à la réévaluation de l'intéressé sur la base de la décision du Conseil d’État de geler les réévaluations de fonctions en attente de l’entrée en vigueur du projet SCORE. Peu après, M. A______ avait formulé – de son propre chef – diverses demandes par courriels. La première demandait que lui soit octroyé un code 7, la seconde qu’il soit rangé dans une fonction de directeur en classe 27. La première n’était matériellement pas justifiée, et les deux auraient enfreint la décision du Conseil d’État. Il n’y avait pas plusieurs fonctions-types de DRH avec des classes de traitement différentes, comme c’était le cas pour les juristes ou pour les commis administratifs. De plus, lors de l’établissement de son cahier des charges, M. A______ avait quelque peu surestimé ses responsabilités, et M. B______ avait dû couper un certain nombre de descriptifs pour que le document corresponde à la réalité.

Il n'avait jamais promis à M. A______ qu’il serait reclassé en classe 27, mais qu'il demanderait la réévaluation de son cahier des charges, comme cela avait été fait avec le responsable financier, qui était passé de la classe 24 à la classe 27.

Depuis ce refus de l’OPE, une dégradation s’était produite à plusieurs niveaux, ce dont il s'était ouvert dès 2013 tant au conseil de direction qu’à Monsieur I______, conseiller d’État de tutelle à l’époque. La première difficulté avait été une certaine déloyauté à son égard, car plutôt que de calmer les mécontentements et les frustrations des collaborateurs en lien avec le nouveau fonctionnement de la HES-SO, M. A______ les attisait. Cela s’était produit notamment avec M. J______ (domaine financier), Monsieur K______ (systèmes d’information) et avec Mme G______ (secteur juridique). M. A______ l'avait également mis sous pression devant des tiers. Il avait également appris que M. A______ organisait des rencontres entre cadres à son insu, et aussi qu’il voulait saisir le groupe de confiance. Il ne savait pas si M. A______ avait effectué cette dernière démarche.

De 2013 à l’entretien de service, ce type de comportements s’était poursuivi, avec des hauts et des bas (tantôt travail avec dévouement et engagement, tantôt tout le contraire). Ces comportements toxiques avaient également été dirigés à l’égard de l’institution, M. A______ cherchant à imposer un modèle hiérarchique, et voulant être responsable en ligne hiérarchique directe (et non de manière fonctionnelle) avec les assistants et assistantes RH des six écoles qui composaient la HES-SO Genève. Cela s’était vu aussi dans le cadre du projet « Archipel-RH ». Une partie de ce projet concernait les services communs. Il s’agissait de redéfinir des responsabilités et de revoir les processus afin d’être plus efficients et de respecter l’équité de traitement. Chaque directeur était ainsi chef de projet. M. A______, qui l’était pour les RH, avait tenté d’imposer sa manière de penser. Cela avait conduit à un courrier figurant au dossier, émanant des directeurs adjoints des six écoles, qui avaient écrit à M. A______ pour se plaindre de la manière dont le projet était mené. Ce courrier lui avait été transmis.

Suite à ce courrier la direction de projet avait dû être changée. M. A______ faisait également des chicaneries administratives sur les dossiers remontant des écoles, par exemple en ralentissant leur avancement, ou en se comportant comme un « petit chef », à tel point que certaines assistantes RH des écoles, ce qu'il avait appris après coup, avaient peur de l’appeler et ne voulaient plus avoir de contacts directs avec lui sur les dossiers. M. A______ changeait en outre constamment d’avis, et donnait une information le plus souvent orale pour asseoir son pouvoir. La baisse de qualité des prestations avait été soulignée dans l’évaluation qui avait eu lieu en juillet 2016. L’adjointe de M. A______, Mme E______, avait également fait part des difficultés qu’elle rencontrait avec son supérieur. Il lui avait proposé d'intervenir, mais elle avait tenu à résoudre seule ses problèmes.

S’agissant de l’appel fait à Mme C______, il s'était ouvert de la situation au directeur général de l’OPE. En août 2016, ce dernier lui avait conseillé de faire appel à une personne extérieure, en l’occurrence Mme C______. Le mandat de celle-ci consistait à identifier les difficultés des membres des services communs, en lien notamment avec l’entrée en vigueur de la loi d’autonomie, et de trouver des pistes d’amélioration. Le processus avait débouché sur une journée « au vert » en janvier 2017, animée par un excellent esprit, et se terminant sur de bonnes résolutions de tous, y compris M. A______. Malheureusement quelques jours après, celui-ci avait repris ses comportements toxiques, en l'ôtant d’une liste de distribution de courriel. Il s’agissait du premier élément tangible et documenté par écrit des manœuvres de M. A______. Il s'en était ouvert au conseil de direction, et il avait été décidé que compte tenu des années de service de M. A______, il serait procédé non à un entretien de service mais à un entretien de recadrage, qui avait été suivi de deux séances de médiation avec Mme C______. Cela n’avait pas suffi puisqu’en 2018 s’était produit l’événement ayant donné lieu à l’entretien de service.

b. Madame C______, consultante en organisation, entendue en qualité de témoin, a indiqué que ses relations avec la HES-SO Genève et M. A______ se limitaient au mandat professionnel qu'elle avait reçu en octobre 2016. C’est à ce moment qu'elle avait rencontré M. B______, qu'elle voyait pour la première fois.

Sa mission consistait à accompagner le directeur général et les membres des services communs, notamment dans le cadre d’une journée « au vert ». Lors du premier entretien qu'elle avait eu avec M. B______, ce dernier lui avait indiqué qu’il faisait appel à elle parce qu’il avait des difficultés avec certains directeurs des services communs. Elle avait mis en place une méthodologie consistant tout d'abord à s'entretenir avec toutes les personnes concernées, puis à organiser la journée « au vert » du 12 janvier 2017. Cette journée était prévue pour se parler, se dire les choses et amener du liant dans l’organisation. Elle avait animé elle-même cette journée. Parmi les activités de groupe, elle avait fait part des diagnostics qu'elle avait établis, puis avait laissé la parole aux participants. Les échanges relatifs aux diagnostics de management avaient été peu nourris. En revanche, la journée – fait rare pour des groupes en difficulté – s’était terminée en farandole, au sens littéral du terme, les gens avaient dansé et s'étaient « lâchés ».

Elle était satisfaite de l’ambiance qui avait régné, mais pas de l'absence de prise de parole à certains moments. Il lui était arrivé de laisser de longs moments de silence pour que les personnes présentes puissent formuler leurs doléances. Elle se souvenait avoir dit : « je ne veux pas vous sauver », entendant par là parler à la place des gens et restituer pour eux les reproches qu’ils lui avaient formulés seul à seul.

Elle se souvenait de trois séances en mai 2017, qui faisaient suite au mandat venant d'être décrit. Il y avait un profond antagonisme entre MM. B______ et A______, d’où la tenue de ces trois séances de gestion de conflits/médiation. La première et la troisième avaient réuni les deux intéressés, la deuxième s’était tenue avec M. A______ seul. L’absence de M. B______ à la deuxième séance faisait partie intégrante du processus et n’était pas due à une défection de sa part. À cette occasion, elle avait essayé de faire prendre conscience à M. A______ que sa posture professionnelle ne permettait pas d’avancer dans des relations sereines. À mi-course de ces entretiens, qui duraient deux heures, il reprenait le sourire et disait vouloir aller de l’avant avec le directeur général, mais il semblait que l’antagonisme reprenait aussitôt après.

Elle avait identifié ce problème de posture à la suite des entretiens qu'elle avait menés lors du premier mandat. Elle avait eu affaire à trois cadres qui étaient dans l’opposition, et il lui semblait que M. A______ en était le leader, étant précisé qu’il perdait certains avantages avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la HES-SO. C’était le plus vindicatif et opposé des trois. Le but était de lui faire prendre conscience que « faire contre et jamais avec » ne menait à rien. Il s’agissait d’un cas de résistance au changement, mais aussi d’opposition à son supérieur, notamment en lien avec un refus de réévaluation de son poste par l’OPE. De plus, il perdait un accès systématique au conseil de direction.

Mme C______ a confirmé avoir envoyé le 20 février 2017 à M. B______ un courriel qui contenait la phrase : « ne tardez pas trop à poser des actes avec ceux qui veulent vous abattre car je pense que nous en sommes là ». Il s’agissait de termes forts mais pesés. Elle avait eu le sentiment, certes subjectif mais dès le départ, que M. A______ se serait bien vu à la place de M. B______. Un mois après la journée au vert du 12 janvier 2017, les insatisfactions montaient en puissance. Or, à un moment donné, il fallait se remettre au travail et aller de l’avant. Elle avait en outre le sentiment que la vindicte pouvait progresser encore. Les trois personnes mécontentes s’étaient retournées contre le leader, ce qui en organisation systémique avait généralement pour fin d’éjecter celui-ci du système. Il était donc nécessaire de rassembler les forces et de travailler dans l’intérêt de l’institution. Lorsqu'elle mentionnait dans un autre courriel « MO le chef de meute », elle parlait de M. A______ en tant que leader du groupe de contestation.

Elle ne s'était pas fait influencer par le fait que M. B______ se soit ouvert à elle des difficultés qu’il avait avec M. A______. C'étaient les propos et le comportement de M. A______ dans les interactions lorsqu'elle était présente qui l'avaient amenée à se forger cette opinion.

Elle avait eu avec M. B______ des entretiens téléphoniques. Il ne s’agissait pas de séances de coaching à proprement parler, mais d'entretiens de préparation aux deux matinées des 13 et 20 juin 2017, qui incluaient les points qu’il devrait aborder pendant ces séances, soit du « calage d’intervention ». Elle avait eu un entretien individuel avec M. A______ le 6 ou le 8 décembre 2016, et les trois séances de gestion de conflits déjà évoquées les 3, 11 et 31 mai 2017.

c. Mme D______, entendue en qualité de témoin, a déclaré être l’assistante de Monsieur B______ depuis mai 2015. Elle a confirmé la teneur de son courrier du 10 octobre 2018 au directeur général, se souvenant à la fois de l'entrevue et du courrier. À l’époque il y avait des tensions palpables entre M. A______ et le conseil de direction, notamment à propos de certaines décisions prises par ce dernier.

À la sortie de cette entrevue avec M. A______, elle s'était sentie très mal à l’aise, un peu comme s’il y avait une stratégie ou une manipulation derrière. M. A______ avait notamment fait allusion à des problèmes psychiatriques qu’aurait eus le directeur général, et elle avait trouvé cela vraiment inopportun. Elle avait rapporté le contenu de l’entretien à M. B______, qui en avait été sidéré. Elle avait trouvé important de mettre cela par écrit pour que la restitution ne soit pas altérée par le passage du temps. C’était elle-même qui avait écrit cette lettre avec ses propres mots. Dans la discussion, M. A______ avait fait état de sa classe de fonction qui aurait dû être revalorisée. Il avait exprimé sa frustration par rapport à des promesses non tenues qu’aurait faites M. B______, une première promesse ayant selon lui été renouvelée lors de son anniversaire de 50 ans. C’était quant à elle la première fois qu'elle en entendait parler.

Une séance qu'elle avait dû organiser en 2016 sur le statut du personnel, avec des représentants de celui-ci, lui évoquait quelque chose. Il était possible qu'elle ait convoqué M. A______ alors qu’il était en vacances. En l’espèce, il y avait la difficulté de réunir beaucoup de gens, et il fallait réagir très vite sur le sujet traité. Le directeur général était présent à cette séance. Si M. A______ avait été convoqué pendant ses vacances, ce n’était pas une manœuvre ou un procédé volontaire visant à l’écarter. Cela étant, M. B______ n’avait qu’une consigne concernant les vacances, qui était de ne pas les prendre pendant les conseils de directions – or en cinq ans, la seule personne qu'elle avait vue ne pas respecter cette consigne était M. A______.

Elle n'avait jamais été témoin de menaces physiques ou de violences de la part de M. B______ contre M. A______, en particulier lors d’un conseil de direction, ni contre aucun collaborateur. Cette accusation n’avait pour elle aucun sens et ne correspondait pas à ce qu'elle connaissait du directeur général.

Lors de la préparation des conseils de direction, M. A______, pour les documents qui le concernaient, tenait les délais, notamment en comparaison d'autres responsables. Par contre, sur la forme, notamment l’orthographe, il y avait beaucoup à redire.

S'agissant d'éventuelles difficultés entre M. A______ et d’autres responsables et membres du personnel, il y avait des tensions avec certains membres du conseil de direction. Quant au personnel, M. A______ ne faisait pas l’unanimité. Beaucoup de gens semblaient lui en vouloir, principalement pour des événements s’étant produits avant qu'elle ne fût arrivée, si bien qu'elle n'en avait eu connaissance que par ouï-dire. Il aurait ainsi traité certaines personnes de façon assez arrogante et méprisante, sans prendre suffisamment en compte leur situation personnelle.

d. Mme E______, entendue en qualité de témoin, avait commencé à travailler à la HES-SO Genève en 2009 comme adjointe du directeur RH, soit de M. A______. Elle avait été nommée directrice adjointe en 2013, et depuis le 1er avril 2020 elle était directrice RH. Sa collaboration avec M. A______ avait été très bonne pendant les premières années ; il y avait eu ensuite des difficultés graduelles et plus importantes à partir de 2015-2016.

Elle avait eu l’impression d’avoir affaire à des directives changeantes et des critiques non fondées sur sa manière d’assumer ses responsabilités et le périmètre de ses tâches. Il y avait en outre eu des interventions à son sens inadéquates auprès de personnes qui lui étaient subordonnées. Ainsi, M. A______ avait par exemple rédigé un courriel de reproches à son encontre, avec copie à toute la direction, alors qu'ils se trouvaient chacun dans leur bureau, à trois mètres de distance, ce qui l’avait fortement contrariée et à propos de quoi ils s'étaient expliqués. M. A______ avait également fait une proposition, à quelqu’un sous la responsabilité de Mme E______ qui était en congé maternité, de changer de supérieur hiérarchique. Cette personne l’aurait alors eu comme supérieur hiérarchique direct en lieu et place d'elle-même. Cette proposition n’avait toutefois été précédée d’aucun signe avant-coureur ni projet de réorganisation. Il y avait aussi eu des pressions exercées auprès d’une autre collaboratrice avec beaucoup de questions au sujet de Mme E______ et de critiques à son encontre. M. A______ faisait aussi pression auprès de ses interlocuteurs dans les écoles, demandant fréquemment pourquoi telle personne cherchait à joindre directement son adjointe, ou encore pourquoi ladite personne avait voulu joindre cette dernière plutôt qu’un autre membre de la direction. Il s’agissait donc principalement de chicaneries.

Elle se souvenait de la journée « au vert » organisée notamment avec le concours de Mme C______. Elle n'avait alors pas d’énormes attentes, si ce n’était une amélioration générale du climat de travail au sein des services communs et de la direction générale. L’objectif fixé en début de séance était que les cadres puissent exprimer leurs griefs, notamment à propos de la direction générale ou du fonctionnement de l’institution. Cette journée avait été organisée avec l’accord des différents cadres. Or pendant la séance, très peu de gens s'étaient exprimés, et très peu de choses avaient été dites, notamment en comparaison de tout ce que l’on pouvait entendre dans un cadre plus informel. M. A______ n’avait pas pris la parole, ou alors pas de manière significative. Elle n'avait pas perçu d’amélioration ou de changement dans l’attitude de M. A______ après cette journée. Il n’y avait pas eu de sa part d’expression des problèmes, ni de solutions ou de démarches pour faire évoluer le climat de travail de manière positive. Le but était de mettre les choses à plat pour reconstruire quelque chose, or elle avait l’impression que M. A______ ne s’était pas du tout inscrit dans cette dynamique.

Lorsque le processus RH était de sa compétence, elle traitait ensuite directement de l’engagement avec M. B______, la décision finale lui revenant. Ce n’était pas pour évincer M. A______, c’était la manière normale de procéder, qui était du reste la même aujourd’hui entre elle et son équipe.

Elle pouvait confirmer que la question de son statut salarial était importante pour M. A______. Il lui avait parlé de son souhait de voir sa fonction réévaluée, notamment pour être au même niveau de traitement que le directeur financier. Il s’agissait plus pour lui d’une symbolique de positionnement ou de statut au sein de l’institution que d’une question purement pécuniaire. Elle avait pu constater que la motivation de M. A______ avait été affectée, n'étant toutefois pas certaine qu’il s’agissait exclusivement de l’évaluation de sa fonction, mais plus de questions en lien avec la nouvelle gouvernance institutionnelle. Il attendait beaucoup de celle-ci pour le positionnement de sa fonction au sein du conseil de direction, s’attendant à obtenir un surcroît de pouvoir et de statut au sein de l’institution. Or ces attentes avaient été déçues, d’où une baisse de motivation de sa part. Elle ne pouvait pas vraiment se prononcer sur la question de savoir si la baisse de sa motivation avait entraîné une baisse dans la qualité de son travail, car ce n’était pas à elle qu'il appartenait de l’évaluer. En revanche, cela avait compliqué leurs rapports en matière de délimitation de leur périmètre d’action respectif. Elle avait eu l’impression de toujours devoir se justifier envers M. A______ de ce qu'elle n'outrepassait pas ses fonctions. De son point de vue, M. A______ n’avait pas fait l’objet d’une mise à l’écart par le biais d’une diminution de ses responsabilités.

Il lui était difficile de répondre à la question de savoir si, au vu notamment du nombre d’années de service, M. A______ ne pouvait pas s’attendre à ce que des mesures telles que fixation d'objectifs ou coaching soient prises dans son cas. En effet, elle n'avait pas été associée au traitement RH du cas de M. A______. De manière générale, c'étaient des mesures de plus en plus souvent adoptées, sans que ce soit une règle absolue. Il lui semblait que, en tant que directeur RH, si M. A______ avait besoin de ces mesures il pouvait le cas échéant en faire la demande.

Elle était actuellement en classe de traitement 26. Elle savait qu’il y avait un écart d’une classe entre son traitement et celui du directeur financier qui était en classe 27. Cela lui était indifférent, car c'était le fruit d’une évaluation faite par l’OPE, quand bien même sur la base de procédures et de critères obsolètes.

e. M. J______, entendu en qualité de témoin, a dit avoir commencé à travailler à l’HEPIA en 2001. Il avait été directeur financier de la HES-SO Genève de septembre 2007 à juin 2018. Au départ, les relations entre M. A______ et M. B______ étaient excellentes. Elles s'étaient par la suite dégradées. Il y avait des séances en commun avec plusieurs directeurs aussi bien que des entretiens bilatéraux entre directeurs d’une part et le directeur général d’autre part. La dégradation des relations entre les deux précités avait commencé à se voir publiquement, c’est-à-dire dans des séances communes, et notamment à partir de 2015-2016.

L’année 2017 avait été assez difficile pour lui et avait conduit à une absence professionnelle entre fin novembre 2017 et le début de l’année 2018. Fin janvier 2018, M. B______ lui avait proposé d’ouvrir une discussion sur son avenir professionnel, et il avait accepté. Ils avaient eu plusieurs entretiens tous les deux, et en juin 2018 avait eu lieu l’annonce officielle de son départ du poste de directeur financier. Il n'avait pas eu de modification de sa classe salariale. Il avait bénéficié en 2017 de sept à dix séances de coaching prodiguées par Monsieur L______.

Au sujet de la réévaluation de la fonction de M. A______, lui-même était initialement en classe 24 comme directeur financier, et le DRH, donc M. A______ lui avait promis que son poste serait réévalué. Il l’avait effectivement été deux ans et demi plus tard, en classe 27, mais M. B______ avait fait en sorte qu’un code soit attribué à la fonction, code qui la faisait passer en classe 26. M. A______ souhaitait avoir la même classe de traitement. Il ne savait pas quelle proposition lui avait le cas échéant été faite, mais la démarche initiée dans ce sens avait été bloquée. L’idée avait alors été d’attendre l’entrée en vigueur de la nouvelle loi et l’augmentation de l’autonomie de la HES-SO pour éventuellement reprendre la démarche. M. A______ lui avait parlé plusieurs fois de la réévaluation de son poste en classe 27. Il en parlait, il le souhaitait mais ce n’était pas une obsession.

Le projet Archipel-RH s’inscrivait dans un projet plus large concernant l’ensemble des services. Il menait son projet pour son département et M. A______ menait le sien de son côté. À un moment, M. A______ et son adjointe Mme E______ avaient passé trois semaines à plein temps sur le rapport de projet. Ce dernier avait suscité une forte réaction des directeurs adjoints des écoles, qui avaient adressé un courrier à la direction générale pour se plaindre de la tournure que prenait le projet RH. Le projet Archipel était très ambitieux, lourd et difficile, et il avait été source de fortes tensions, pas seulement pour les RH mais aussi pour le département des finances.

Il se souvenait de la journée « au vert » du 12 janvier 2017. Le résultat n’était pas ce qu'il attendait. Il aurait souhaité plus d’échanges et des mesures plus concrètes. Il n'avait pas participé à la discussion non plus, cela étant la modératrice aurait pu davantage susciter l’échange. En ce qui le concernait, il avait une certaine peur que s'il parlait de ce qui n’allait pas, cela puisse lui « retomber dessus ».

Il n'avait pas vraiment le souvenir de remarques dépréciatives que M. B______ aurait formulées à l’encontre de M. A______. Dans les séances à plusieurs auxquelles participait M. J______, il y avait parfois eu de grosses disputes verbales entre les deux, mais cela concernait le fond des dossiers. En 2017, il y avait eu beaucoup de tensions dans les services, notamment en lien avec le projet Archipel. Il y avait eu des discussions entre cadres, et certains avaient relaté des épisodes auxquels il n’avait toutefois pas assisté, faisant état de beaucoup de pression dès lors que M. B______ voulait aller vite et loin en matière de mise en place de l’autonomie de la HES-SO Genève. Lors des séances à plusieurs déjà évoquées, il y avait de fortes disputes entre MM. A______ et B______. Lui-même n'avait pas avec ce dernier le même genre de disputes, car il était moins dans la confrontation que M. A______. Il côtoyait M. B______ depuis longtemps : lorsque ce dernier n’était pas d’accord, il devenait difficile d’argumenter et les choses pouvaient vite monter en puissance.

M. A______ n'avait pas cherché à monter les autres cadres contre M. B______, mais il y avait eu un groupe de cadres qui s’était constitué et qui voulait discuter avec la direction générale. Un courrier avait notamment été rédigé par ce groupe, mais il ne savait plus s’il avait été envoyé. C’était plus ou moins à ce moment que Mme C______ avait été mandatée, et ils s'étaient dit que cela pourrait générer les discussions souhaitées. M. A______ lui avait fait part d’une diminution de ses prérogatives, mais il ne pouvait pas se positionner à ce sujet, car ils avaient tous des équipes, avec des répartitions de tâches différentes.

Il n'avait pas constaté spécialement une baisse des prestations de M. A______ ces dernières années. Le contexte avait cependant rendu les choses difficiles pour tout le monde. Tous s'étaient un peu « cassé les dents » sur ce projet Archipel, et il y avait eu des difficultés dans tous les services.

f. Mme M______, entendue en qualité de témoin, a indiqué travailler à la HES-SO Genève depuis 2001, toujours à la fonction d’assistante RH. M. A______ était son supérieur hiérarchique direct pendant la plupart des années où il était là. Elle travaillait dans le même service et les mêmes bureaux que M. A______ et Mme E______.

De ce qu'elle avait vu, M. A______ avait un comportement adéquat vis-à-vis de M. B______, mais elle n'était pas présente lors de beaucoup d’échanges que les deux précités avaient en bilatéral. Elle ne participait pas non plus aux séances telles que le conseil de direction ou le CSC. Pour les assistantes RH, M. A______ était une personne de référence.

M. A______ lui avait fait part de son épuisement, qui n’avait à sa connaissance pas d’autre origine que professionnelle. Elle avait pu constater cet épuisement, en ce sens qu'elle avait une bonne relation avec lui comme supérieur hiérarchique, et qu'elle voyait qu’il n’allait pas bien. Pour elle, c’était quelqu’un d’engagé et de loyal envers l’institution. Lorsqu'elle avait vu que M. A______ n’était pas bien, elle pensait qu’il fallait éviter une spirale négative. Pour cette raison elle lui avait recommandé de consulter un médecin, de faire du télétravail ou de prendre d’autres dispositions pour ne pas mettre sa santé en danger et pour se protéger, notamment contre un burn-out.

Par rapport à ses collaborateurs, et à elle en particulier, M. A______ n'avait pas du tout un comportement de « petit chef » ; pour ses supérieurs, elle ne savait pas. M. A______ n’était pas autoritaire avec elle, et elle ne le craignait pas. Il n’avait pas cherché à monter les assistantes RH contre la direction générale.

Elle savait que M. A______ n’avait pas traité certains dossiers ; quant à savoir s’il s’agissait d’une mise à l’écart ou s’il y avait des raisons objectives, elle ne pouvait le dire. S’agissant du dossier de M. K______, ce n’était pas lui qui l’avait traité mais Mme E______ ; il lui semblait que normalement c’était un dossier du ressort de cette dernière, mais elle ne pouvait l'affirmer avec certitude. Elle n'avait pas le souvenir d’avoir eu des relations bilatérales directes avec M. B______ sur des dossiers particuliers traités par M. A______. Ce dernier avait à cœur de fixer ses vacances de l’année au début de celle-ci ; il lui semblait également qu’il prenait régulièrement deux semaines de vacances au mois de juin.

g. Madame N______, assistante RH, entendue en qualité de témoin, a dit travailler pour la HES-SO Genève depuis 2006. Elle avait été deux ans secrétaire de direction à la HEG, et depuis 2008 elle occupait son poste actuel. À l'époque, elle travaillait sous la direction de M. A______, qui était son supérieur hiérarchique direct à l’exception d’une période où cela avait été Mme E______.

Elle n'avait pas constaté directement d’attitudes inadéquates de M. A______ vis-à-vis de la direction générale, mais n'avait jamais participé à des entretiens bilatéraux entre MM. A______ et B______, pas plus qu'elle n'avait assisté à des séances du conseil de direction (sauf une ou deux fois où elle avait été amenée à prendre le procès-verbal) ou du CSC.

M. A______ était une personne engagée pour le compte de l’institution. Il soutenait M. B______ dans la gestion des litiges, sauf dans les derniers temps, pendant lesquels la relation était vraiment tendue. M. A______ n’avait pas cherché à monter les collaborateurs du service RH contre la direction générale. Il se pouvait qu’il l’eût fait pour d’autres cadres, mais il s’agissait de quelque chose qu'elle avait entendu et dont elle n'avait pas été témoin elle-même. M. A______ n’avait jamais été méprisant vis-à-vis d'elle ou des collaborateurs du service. La collaboration avec lui, en ce qui la concernait, s’était globalement bien passée. Il n’était pas autoritaire avec elle, et elle ne le craignait pas.

Elle avait pu constater que les derniers temps, M. A______ n’était plus comme avant, il paraissait fatigué. Ils en avaient à l’occasion discuté, et elle lui avait conseillé de prendre des mesures, par exemple en faisant du télétravail.

h. Monsieur O______ avait travaillé à la HES-SO Genève de septembre 2012 à la fin du mois d’août 2020, comme directeur adjoint de la Haute école de santé (ci-après : HEdS). De son expérience, M. A______ connaissait extrêmement bien le domaine couvert par la HEdS. En effet, il avait eu un parcours dans le domaine de la santé avant de venir dans celui des RH. Il connaissait bien les différents postes, ce qui facilitait la définition de ceux-ci lors des mises au concours. Il était à l’aise « tant au niveau métier qu’au niveau administratif ». M. O______ avait déjà eu l’occasion de travailler avec M. A______ avant son engagement à la HEdS, car il était responsable RH au sein du DIP, et participait aux mêmes séances que M. A______. Il avait toujours été impressionné par la clairvoyance de ce dernier et l’acuité de ses questions, qui mettaient souvent en difficulté la directrice RH du DIP, notamment lorsqu’il y avait des lacunes dans la réglementation. M. A______ n’avait pas peur de mettre des points difficiles en avant.

Dans les premières années, et jusqu’en 2018 environ, M. A______ était un homme d’une très grande loyauté vis-à-vis de l’institution, sinon forcément vis-à-vis du directeur général. Il rappelait souvent la nécessité d’appliquer le règlement et de faire des contrôles. Il incarnait la direction générale, et il n’y avait pas de différence de vision par rapport à celle du directeur général. À partir de 2018-2019, on avait senti que M. A______ était davantage en souffrance, et il s’était mis à dire, contrairement à ses habitudes, que les choses n’allaient pas si bien que ça au sein de la direction générale et qu’il en subissait les conséquences.

M. O______ avait pu constater certaines mises à l’écart de M. A______. Celle qui avait le plus frappé tout le monde était qu’il n’ait pas été en charge du projet Archipel dans le domaine des RH. Tout le monde en avait été étonné. C’était du reste la même chose pour les finances. Le fait que ces deux directeurs aient été mis à l’écart de ce projet malgré leurs nombreuses années de service était incompréhensible. Il avait pu également constater que Madame P______, directrice de la HEdS depuis avril 2019, ne voyait pas l’intérêt de passer par M. A______ pour l’ouverture ou la définition des postes. Elle s’adressait directement à M. B______, ce qui court-circuitait M. A______ et le mettait devant le fait accompli. Elle préférait s’adresser directement à la personne ayant le pouvoir de décision final. Il lui était plus difficile de se prononcer par rapport à Mme E______. Celle-ci avait eu une longue période de maladie, pendant laquelle M. A______ était sur de nombreux fronts, et à la tête d’une équipe restreinte. Il n'avait pas constaté personnellement que Mme E______ ait court-circuité M. A______ ou ait dit quelque chose de négatif à son encontre. S’agissant du projet Archipel, elle n’avait pas voulu commenter ou expliquer pourquoi ce n’était pas M. A______ qui pilotait l’aspect RH. Sur ces points, on pouvait dire que l’obscurité régnait.

Par rapport à la note interne adressée à M. A______ par les directeurs adjoints des six écoles, dont lui-même, le 11 décembre 2015, il s'était montré solidaire de ses collègues, mais pas moteur. Il s’agissait d’une réaction à un document produit par la DRH proposant un nouveau modèle d’organisation, ainsi qu’un autre volumineux document sur les risques RH. La fonction de directeur adjoint avait évolué avec la loi de 2014, mais n’avait jamais été formalisée. Or avec ce nouveau modèle, tout un pan de leur activité disparaissait, alors même que la diversité des tâches était un aspect très motivant de leur fonction. Avec le recul, on constatait que l’organisation effective prenait ce chemin qui avait été proposé sauf erreur par M. A______. Cette organisation fragilisait assurément les postes de directeur adjoint. Il en voulait pour preuve que son poste n’avait pas été repourvu, les aspects RH ayant été repris par une spécialiste RH, et les aspects financiers par une personne dont il ignorait la fonction exacte. En définitive, cette note interne n’était pas dirigée tant à l’encontre de M. A______ que d’une nouvelle organisation leur faisant craindre une réduction importante de leur cahier des charges, voire des suppressions de poste à l’avenir.

Au moment où la lettre avait été envoyée, c’était M. A______ qui était en charge du projet Archipel-RH, Mme E______ l’ayant remplacé ultérieurement. L’aspect RH du projet Archipel était un peu celui « du pauvre », d’autres projets sectoriels et notamment les finances se « taillant la part du lion » en termes de ressources et de temps consacré. Pour Archipel-RH, il n’y avait pas eu de véritable lancement, avec des objectifs définis, un but spécifique à atteindre, l’éclaircissement de tous les points devant l’être ainsi qu’un inventaire des directives existantes. Il n’y avait pas la structure et la volonté de soutien de la part du conseil de direction qu’il pouvait y avoir pour Archipel-Finances. Le contraste était assez impressionnant. Par absence de lancement, il entendait qu’il n’y avait pas eu de grande séance de départ du projet, d’attribution de mandats externes ou de pilotages par des experts comme cela avait pu être le cas pour les finances, dont on comprenait – et cela leur avait même été expressément mentionné – qu’il s’agissait de la priorité absolue. C’était pour cela que les directeurs adjoints avaient demandé dans leur courrier à bénéficier d'une expertise externe et indépendante. M. A______ n’était pas incompétent mais il était très pris, de plus il s’agissait pour eux de bénéficier des mêmes soutiens que pour le projet finances, afin d’arriver à des résultats satisfaisants.

De manière générale, M. A______ avait une attitude extrêmement correcte avec le personnel des écoles, en particulier les assistantes RH et les directeurs adjoints. Quand il passait à la HEdS, il venait saluer tant le directeur et le directeur adjoint que les assistantes RH. Au niveau humain, il était toujours très courtois et respectueux. Il était aussi facile d’accès et l’on pouvait aisément discuter avec lui après les séances. Il avait donc une attitude tout à fait normale et même bienveillante vis-à-vis de ses interlocuteurs.

i. Madame Q______ avait travaillé à la HES-SO Genève comme responsable du service des bâtiments du 1er mai 2016 au 31 août 2018.

De manière générale, le comportement de M. A______ était adéquat vis-à-vis de sa hiérarchie. M. A______ et Mme Q______ avaient des séances de cadres communes (collège des services communs). Leur bureau était contigu. Cela étant, elle s'occupait des bâtiments et lui des RH, donc ils n'avaient pas énormément d’échanges professionnels. Il était arrivé à Mme Q______ d’assister à la venue de M. B______ dans les locaux, toutefois généralement c’était plutôt M. A______ qui se rendait dans le bureau de ce dernier. L’attitude de M. A______ vis-à-vis des autres membres du personnel et d’elle-même en particulier était parfaitement correcte.

Elle se souvenait de la journée au vert du 12 janvier 2017. Elle n'avait pas trouvé ses résultats satisfaisants. L’ambiance était très tendue, et les expressions des participants n’étaient pas fluides, les gens s'étaient très peu exprimés. Mme C______ avait cherché à susciter le débat, mais chacun avait passablement de retenue. Ils avaient peut-être peur des conséquences, notamment de la part de la direction générale.

Elle avait quitté la HES-SO Genève en prenant un avocat, et la relation avec M. B______ n’avait « pas toujours été rose ». Le sentiment qu'elle en gardait était que M. B______ avait des compétences, mais avait du mal à déléguer et agissait en solitaire dans à peu près tous les domaines. Il n’était pas suffisamment à l’écoute, ou du moins n’avait pas l’écoute juste. Il s’agissait cependant de dissensions professionnelles mais pas d’actes de violence physique ou verbale.

Soutenir les cadres des services communs face aux directions d’écoles n’était pas ce que M. B______ faisait le plus. À la journée au vert justement, un organigramme montrait un lien direct entre la direction générale et les directions d’écoles, les services communs venaient en second. Il n’y avait pas d’union interne du personnel. Elle n'avait pas constaté de souffrance chez les cadres des services communs en lien avec le comportement de M. B______, mais de grandes insatisfactions. Il suffisait pour décrire celles-ci de reprendre les conclusions du rapport de Mme C______. Il lui semblait par ailleurs que le comportement de M. A______ vis-à-vis de M. B______ était loyal, en tout cas de ce qu'elle avait constaté dans les séances de cadres. Elle ne pensait pas que M. A______ ait cherché à monter les uns ou les autres contre le directeur général. Il y avait eu des discussions entre cadres sur la situation, mais le but était que tous puissent travailler ensemble. Avant son départ, elle avait eu des entretiens avec M. B______. S’il y avait eu des objectifs fixés, ce n’étaient toutefois pas ceux qu'elle attendait, et elle était partie.

j. M. Q______ avait travaillé à la HES-SO Genève de décembre 2011 à mars 2018. Il avait été directeur de la HEdS. Après avoir quitté ce poste, il n'avait pas entretenu de contacts avec M. A______, mais avait simplement appris que ce dernier avait été en congé maladie de longue durée. M. A______ l'avait contacté au cours de l'été 2020 ; c'était ainsi qu'il avait appris l'existence d'un litige entre la HES-SO Genève et M. A______.

Ce dernier lui avait demandé s'il se rappelait d'une séance du conseil de direction en particulier. Cela lui était revenu en tête, et il se rappelait aussi bien le contexte que la manière dont les choses s'étaient passées. Cette séance s'était déroulée en octobre ou novembre 2015. On y avait abordé une fois de plus l'élaboration du règlement d'application de la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève du 29 août 2013 (LHES-SO-GE - C 1 26). Il s'agissait d'articles réglementaires difficiles à élaborer, vu la multiplicité des écoles et les intérêts en jeu. L'un des points les plus délicats était la désignation ou la nomination des professeurs ordinaires ou associés, ainsi que les critères pour les choisir. Lors de cette séance, les tensions étaient palpables, avec des échanges assez vifs entre les différents participants. À un moment donné, M. A______ avait voulu prendre la parole pour proposer une solution, et M. B______ l'avait interrompu de manière assez brutale et inattendue et lui avait dit de « la fermer ». Après cela, M. A______ avait quand même pris la parole et la situation s'était quelque peu détendue. Il avait eu l'impression que cette flambée momentanée matérialisait des tensions préexistantes entre les deux hommes. M. B______ n’était pas coutumier de ce genre de façon de parler. C’était pour M. Q______ un accident de parcours, la plupart des discussions en conseil de direction était constructives et respectueuses.

Sur le point de savoir s’il y avait des problèmes également entre M. B______ et d’autres cadres des services communs, les années 2016 et 2017 avaient été relativement difficiles. Dans les écoles on savait que plusieurs cadres de la direction générale étaient en souffrance, qu’il y avait des tensions. Du reste, il y avait eu une médiation dans le courant de l’année 2017. Il y avait donc bien des difficultés significatives entre certains cadres supérieurs et le directeur général. Lorsque lui-même avait renoncé à briguer un nouveau mandat de quatre ans à la tête de la HEdS, il avait évoqué des raisons personnelles et en particulier des soucis de santé, mais il avait en fait considéré que compte tenu du climat et des relations qui s’étaient globalement détériorées avec le directeur général, un nouveau mandat de quatre ans aurait pu mettre sa santé à mal.

Les problèmes au sein des services communs et en particulier entre M. A______ d’une part et M. B______ ou Mme E______ d’autre part, avaient été abordés en conseil de direction. M. B______ avait expliqué pourquoi une médiatrice avait été engagée. Cela faisait partie du climat relativement délétère qui régnait à la direction générale. Les problèmes au sein de la direction générale concernaient aussi M. J______, Mme G______ et Mme Q______.

Lorsqu'il travaillait à la HEdS, M. Q______ était fréquemment en contact avec M. A______. Il n'avait que des liens professionnels avec lui, mais ils étaient cordiaux. En tant que DRH, il était très à l’écoute, notamment lors des processus de sélection ou dans les situations de litiges potentiels. M. A______ fournissait à la HEdS un appui remarquable. Cela étant, il avait effectivement dit en conseil de direction que M. A______ avait un comportement toxique. Courant 2016 et 2017, la HEdS avait connu des difficultés significatives pour faire passer des propositions de nomination auprès de M. B______. M. A______ s’était souvent trouvé en porte-à-faux car il était consulté de manière préalable sur la pertinence des candidatures mais M. B______ devait valider ces pré-choix. À trois reprises la HEdS s'était retrouvée avec des candidats auditionnés et présélectionnés par la commission mais non approuvés par M. B______. Au sein du conseil de direction de la HEdS, cela posait donc des problèmes de légitimité des actions de cette dernière. Dans ce cadre-là, le rôle de M. A______, qui était certes entre le marteau et l’enclume, avait été perçu comme trouble, et dans un moment de frustration M. Q______ avait exprimé que son fonctionnement devenait toxique car il n’était plus en adéquation avec celui du directeur général.

k. M. S______ travaillait pour la HES-SO Genève depuis 2009, toujours en qualité de directeur de l’HEPIA.

Les séances du conseil de direction, notamment celles qui avaient eu lieu entre 2015 et 2017, étaient des moments très complexes pour la HES-SO Genève. M. A______ en tant que DRH était un élément essentiel aux discussions. Il y avait beaucoup d’enjeux pour les différentes écoles, lesquelles faisaient chacune des propositions. Il ne se souvenait pas des propos évoqués par M. Q______ dans son courrier. À aucun moment il n'avait eu l’impression que M. B______ avait proféré des menaces à l'encontre de M. A______.

Ce dernier, en tant que DRH, était le destinataire de toutes les demandes d’engagements de l'HEPIA, en ce sens que celles-ci passaient nécessairement par lui. M. S______ s'était cependant rendu compte que ce qu’il disait pouvait varier d'un interlocuteur à l'autre, voire d’une fois à l’autre avec la même personne. C’est pourquoi il notait toujours par écrit ce que M. A______ lui disait, en le restituant par courriel pour qu’il le valide, afin d’avoir une base solide. Ces problèmes avaient fait l’objet de discussions en conseil de direction, notamment afin de savoir quelle confiance on pouvait accorder aux déclarations de chacun.

C'était lorsque l’on discutait en bilatérale avec M. B______ que l'on se rendait le plus compte que la confiance entre ce dernier et M. A______ était ébranlée. N’étant pas au sein de la direction générale, les directeurs d'école ne savaient pas s’il s’agissait de non-dits, de problèmes de communication ou d’autres difficultés, mais on sentait des tensions très fortes, et cela devenait ingérable.

Il n'avait pas l’impression que M. A______ ait été mis à l’écart. Lui-même et les autres directeurs étaient au contraire surpris que M. B______ ne réagisse pas plus fortement pour recentrer les actions et le travail de M. A______, et que celui-ci ne dépasse pas le cadre de ce travail. M. B______ avait même soutenu longtemps M. A______.

M. S______ n'avait pas rencontré de problèmes spécifiques de traitement des dossiers RH dans son école avec M. A______, sous réserve de la nécessité déjà évoquée de bien noter précisément tout ce qu’il disait pour éviter d’avoir une version différente le lendemain. M. A______ avait une grande compétence pour gérer les cas difficiles dans les écoles.

La décision de procéder au licenciement de M. A______ avait été présentée et discutée au conseil de direction, et avait été approuvée à l’unanimité.

l. Monsieur T______ avait été directeur de l’école des beaux-arts dès janvier 2004, et celle-ci avait intégré la HES-SO en 2007 (Haute école d'art et de design, ci-après : HEAD).

Il n'avait jamais constaté de dérapages verbaux ou comportementaux de M. B______ envers M. A______. La tonalité générale était plutôt un accord entre eux. Au sein du conseil de direction il y avait parfois eu des points de vue différents et des désaccords, et lui-même en avait du reste aussi eus avec M. B______, mais les choses s'étaient toujours passées de manière courtoise. S’agissant des propos que M. Q______ avait évoqués dans son courrier, lui-même ne se rappelait pas qu’ils aient été prononcés, et il avait une plutôt bonne mémoire. S’ils avaient été prononcés sur un ton réel de menace il s'en serait souvenu. Si donc ces propos avaient réellement été tenus ce ne pouvait être que sur un mode de jeu théâtral ou humoristique. Il fallait dire que M. B______ se montrait parfois taquin avec ses interlocuteurs. Si cela s’était passé lui-même et ses collègues auraient réagi, car il y avait une certaine exigence morale qui était attendue des membres du conseil de direction.

Il était arrivé qu’il y eût des échanges au sein du conseil de direction sur les problèmes rencontrés par le directeur général ou les directeurs d’école en lien avec M. A______, notamment sur la fin, soit à partir de 2018 en tout cas. Les directeurs avaient fait part de difficultés rencontrées dans leurs interactions avec M. A______, de type blocages ou complications, voire d’autres chicaneries. Personnellement, il avait souvent vécu cela comme un frein, notamment lors de recrutements. Les directeurs d'école s'en étaient ouverts plusieurs fois et cela avait été abordé en séance, y compris en présence de l’intéressé. M. Q______ était du même avis que les autres directeurs d'école, disant que le comportement de M. A______ était un empêchement permanent, et qu’il se mêlait de leurs affaires. Les choses étaient même allées plus loin, car M. Q______, qui était une personne généralement réservée, avait dit de M. A______ que c’était une personne toxique et – il l'avait même noté –, « un narcissique primaire ».

M. B______ s’était ouvert à lui de problèmes qu’il rencontrait avec M. A______, mais tardivement. Il avait plutôt jusque-là un sentiment de solidarité entre membres de la direction générale, car lorsqu'il avait commencé à évoquer à M. B______ ses problèmes avec M. A______, il n’avait pas eu une oreille très attentive, mais fin 2017 ou début 2018 il s’était ouvert de difficultés croissantes avec M. A______.

La mise en place du projet Archipel-RH s’était mal déroulée, et les directeurs d'école avaient été plusieurs fois interpellés par les directeurs adjoints. Ceux-ci étaient opposés au modèle que M. A______ voulait mettre en place, et dans lequel il voulait exercer une autorité directe sur le personnel dans les écoles. Les directeurs ne voulaient pas non plus de ce modèle, qui aurait du reste multiplié les triangulations alors que celles-ci étaient déjà problématiques. C’était à la suite du courrier des directeurs adjoints que Mme E______ avait remplacé M. A______ à la direction du projet.

En lien avec les difficultés rencontrées avec M. A______, le cas de Monsieur U______ était emblématique. Il s’agissait d’un architecte important recruté pour un poste stratégique pour la HEAD. Pour des raisons familiales, il devait résider en Allemagne, et les déplacements grevaient largement son salaire, si bien que la direction de la HEAD avait demandé pour lui une indemnité de déplacement. Cela avait fait l’objet de nombreuses complications et de longues discussions avec M. A______ avant que celui-ci n'établisse une note préavisant favorablement cette demande auprès de M. B______.

M. T______ avait bien rédigé des courriels de remerciements à M. A______, qui figuraient au dossier, mais ceux-ci étaient quelque peu ironiques. En effet, à l’époque il discutait directement avec M. B______ de solutions à ses problèmes, et soumettait ensuite cette solution à M. A______ pour qu’il la porte auprès du directeur général, en essayant de faire en sorte qu’il se l’approprie, car M. A______ avait un besoin de reconnaissance qu'il tenait pour pathologique. Ainsi, quand cette solution était validée, il remerciait profusément M. A______.

La décision de licencier M. A______ avait été discutée au sein du conseil de direction, et avait été validée en 2018. Le conseil de direction avait été informé par le directeur général de difficultés importantes dans le travail, de divergences de vues de plus en plus importantes, de comportements susceptibles de mener à une déstabilisation de la direction générale, et de problèmes interpersonnels notamment avec Mme E______, qui était du reste une personne remarquable. Cela recoupait les observations de tous les directeurs et directrices présents, et celles d’autres personnes au sein des écoles. Les relations avec M. A______ étaient assez difficiles avec tout le monde. Cela découlait, à son sens, d’une connaissance limitée des spécificités de l’enseignement tertiaire, ainsi que de sa personnalité incroyablement narcissique.

m. Lors de la comparution personnelle des parties, M. A______ a indiqué que pour sa désignation au poste de DRH, M. B______ lui avait demandé de reprendre le poste laissé vacant par Madame V______. L’annonce qui était parue mentionnait une candidature interne fortement pressentie. Il se trouvait bien dans son poste d’alors, mais avait accepté à la demande de M. B______ et pour l’institution.

Jusqu’en 2015, la situation était très agréable et facile. Il bénéficiait d’une écoute active et pouvait faire respecter les lois et règlements avec le soutien du directeur général. À partir de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, il s’était produit des écarts de plus en plus fréquents par rapport aux lois et règlements, ce dont il avait informé le directeur général. De manière concomitante, le comportement de celui-ci vis-à-vis des cadres avait changé, il avait commencé à faire preuve d’agressivité verbale, avec de la pression et des menaces, si bien qu’il s’en dégageait un sentiment de peur. Dans sa grande loyauté vis-à-vis de M. B______, il avait continué à gérer les situations difficiles, notamment en menant des négociations avec certaines personnes pour que celles-ci quittent l’institution en douceur. Il entamait ainsi sa crédibilité en tant que DRH ainsi que ses valeurs, car certains comportements étaient inadaptés de la part d’un employeur. Il avait donc, jusqu’à la fin, procédé à ce genre de négociations, et avait toujours soutenu sa hiérarchie avec une très grande loyauté.

À partir du moment où il avait informé le directeur général des souffrances des cadres, la colère de ce dernier s’était retournée contre lui, devenant « la personne à supprimer ». Il en avait parlé à plusieurs reprises à la déléguée de la HES à l’égalité, laquelle lui avait dit : « comme il ne peut pas licencier les gens, il leur met de la pression pour les faire partir ». Il lui était alors devenu très difficile de soutenir sa hiérarchie.

Il lui arrivait d’aller travailler avec « la boule au ventre », car il ne savait jamais s'il allait être félicité ou dénigré, voire « enguirlandé » comme un petit garçon. Cette situation était vécue aussi par des collègues qui s'étaient confiés à lui, notamment le directeur financier. Un courrier important pouvait être signé sans y jeter un coup d'œil, alors que d’autres fois M. B______ se montrait très pointilleux sur des courriers sans importance, modifiant certains termes comme s’il voulait souligner l'incompétence de l'auteur. Il avait aussi eu plusieurs fois des comportements contradictoires avec les directions d’écoles. Il donnait son accord sur un point, M. A______ allait voir les directions d’écoles et quand la question revenait il disait qu’il n’avait jamais dit ça. M. A______ devait alors changer les termes pourtant négociés avec la direction. Cela avait parfois été remarqué, il devait alors trouver des explications pour couvrir le directeur général et cela le mettait en première ligne. Parfois aussi le directeur général lui avait demandé d’intervenir à sa place auprès des directions d’écoles pour les réprimander, ce qui lui permettait aujourd’hui de prétendre que M. A______ jouait « le petit chef ».

Il concluait néanmoins à sa réintégration au poste de DRH pour trois raisons. Tout d’abord, il avait fait un gros travail sur lui-même. Il avait bénéficié notamment d’un soutien psychologique, et se sentait désormais assez fort pour pouvoir le cas échéant reprendre son poste. Toutefois, s'il était réintégré sa position serait différente et il y avait des valeurs auxquelles il ne renoncerait pas. Deuxièmement, le contrat de M. B______ venait à échéance en mars 2022. Il aurait 63 ans et il n’était donc pas certain que ce contrat soit renouvelé, si bien que dans un tel cas il aurait à travailler avec une hiérarchie différente. Enfin, il était très difficile de trouver du travail, à son âge, surtout lorsque l’on avait travaillé pendant vingt-cinq ans dans le secteur public. Cela lui permettrait aussi de partir en pré-retraite comme il l'avait initialement prévu.

Jusqu’en 2015, la communication avec M. B______ était très aisée. Il bénéficiait d’une écoute complète de sa part, ce qui permettait de gérer les quelques situations difficiles de manière adéquate et humaine. Ce genre de situations s'étaient multipliées à partir de 2015, et dès le moment où il lui avait dit que l’on pourrait peut-être les traiter différemment de ce que le directeur général envisageait, la communication avait été plus difficile, sauf quand il avait besoin de lui, notamment dans les situations compliquées et susceptibles de le mettre en danger, comme à l’occasion du litige avec la responsable du secteur juridique. Les revendications de celle-ci étaient justifiées et auraient pu avoir des conséquences négatives pour l’institution. Un départ à l’amiable et sans vagues avait néanmoins pu être négocié. C’était son devoir en tant que DRH de protéger son directeur général.

Le directeur général avait demandé de faire un état des lieux des risques pour le projet Archipel RH. Septante-huit d'entre eux avaient été identifiés. M. B______ avait mis beaucoup de pression pour la confection d’un tel document, mais lorsqu’il avait vu ce que cela impliquait en termes d'actions nécessaires en vue de faire baisser les risques, il s’était retourné contre lui, lui avait retiré la direction du projet, et l’avait confiée à Mme E______, qui à l’époque était davantage « téléguidée » par le directeur général. Il avait appris sa mise à l’écart – qui le forçait à demander à son adjointe des renseignements sur l’avancement de ce projet important – de manière fortuite. C’était à ce moment qu’il avait compris que le directeur général voulait le mettre à l’écart et se séparer de lui, ceci alors que les RH étaient le seul service à avoir répondu aux attentes par rapport au document sur les risques. M. B______ avait préféré ne pas soutenir la démarche qu’il avait lui-même initiée et avait préféré le sacrifier sur ce projet.

Par rapport à la « journée au vert », M. B______, à qui il avait relayé plusieurs fois de tels problèmes, avait constaté qu’il y avait réellement des plaintes émanant des cadres en lien avec son comportement, et il avait ainsi organisé cette « journée au vert ». L’attente des cadres était de pouvoir exprimer les difficultés de manière ouverte pour qu’elles puissent être aplanies. Les personnes avaient été auditionnées individuellement par Mme C______ dans un premier temps, laquelle avait expressément indiqué qu’elle « n’en croyait pas ses oreilles » au sujet de la pression exercée sur les cadres. Cela étant, elle était mandatée, payée et pilotée par M. B______. Elle avait demandé aux cadres de s'exprimer, ceci alors que les personnes auditionnées avaient mentionné leur peur de représailles ; il était donc évident qu’elles n’allaient pas parler spontanément. Son devoir comme DRH était de mettre ces éléments à plat, mais pas de manière individuelle ou agressive. Sur ce point, il avait eu le soutien de ses collègues, comme en témoignait sa réponse par courriel à l’assistante de M. B______ pour dire que le problème devrait être abordé de manière globale. M. B______ s’était probablement senti en danger. Pourtant son objectif était simplement de diminuer les pressions, l’agressivité et le sentiment de peur ressentis par les cadres. Malheureusement, même si les gens n’étaient pas satisfaits, la peur avait fait en sorte qu’ils ne s’expriment pas. Du reste M. B______ s’était ensuite séparé des personnes qui s'étaient exprimées ce jour-là. Il n’y avait pas eu de formalisation des déclarations faites lors des auditions préalables. Lorsqu'il avait voulu assumer son rôle de DRH visant à protéger les cadres, il avait reçu de la part de M. B______, au lieu d’écoute et de tentative de résoudre les choses, une grande agressivité.

Lorsqu'il travaillait à la HES, il ne lui avait jamais été reproché une attitude problématique avec les directions d’écoles. Il avait été surpris de voir un tel grief dans les écritures en lien avec la présente procédure. Jamais une école ou un directeur d’école ne lui avait fait part de problèmes particuliers. Il en allait de même pour sa prétendue non-compréhension du système académique. Sur ces deux points, son évaluation de 2016 disait au contraire qu’il s’agissait de points maîtrisés, étant précisé qu'il n'avait pas eu d’évaluation en 2018, alors que cela lui aurait permis de prendre position sur d’éventuels griefs ou encore de bénéficier d’objectifs. Ces reproches avaient été au contraire discutés « dans son dos » au conseil de direction sans qu'il puisse exposer la situation de son point de vue. Il n'avait donc pas eu l’occasion de se défendre sur ces faits qu'il ne reconnaissait pas et qui étaient à son sens construits pour justifier son licenciement.

Par expérience de DRH, on ne devait pas permettre un licenciement si cela pouvait mettre l’institution en danger. La personne devait bénéficier du droit d’être entendue, et pouvoir bénéficier de la fixation d’objectifs, en prenant en compte la durée des rapports de service au sein de l’institution. Le cas échéant, un reclassement devait être entrepris. En ce qui le concernait, un curriculum vitae vieux de dix ans avait été envoyé aux différents départements ; quant aux coups de téléphone qui avaient été passés, il soupçonnait qu’ils n’avaient pas été à son avantage, sans pouvoir bien évidemment le prouver. Le cas échéant, des mesures de réorientation devaient aussi être envisagées, comme cela avait été le cas pour M. J______, qui percevait son salaire depuis deux ans alors qu’il était en réorientation professionnelle, ou pour les directeurs adjoints de la HEdS et de la haute école de travail social (ci-après : HETS). Il considérait donc que par rapport à ces collègues, il n'avait pas été traité de manière équitable, mais de manière expéditive, et sans le respect dû à ses nombreuses années d’engagement sans faille. M. J______ avait bénéficié d’un coaching, ce qui ne lui avait pas été accordé.

Il contestait enfin que la proposition d'un code 7 soit contraire à la règlementation. En effet, un tel code existait en cas d’activité complémentaire, et il avait déjà été utilisé à plusieurs reprises au sein de la HES-SO Genève.

Il était toujours au bénéfice d’indemnités de chômage, le cas échéant remboursables en fonction de la décision que prendrait la chambre administrative, et à la recherche d’un emploi. Il ne lui avait pas été expressément indiqué par de potentiels employeurs que son âge posait problème, mais il avait déjà eu l’occasion de constater que les personnes engagées étaient plus jeunes. Cela avait aussi des conséquences sur sa prévoyance professionnelle.

n. À l'issue de la dernière audience, un délai au 26 février 2021 a été fixé aux parties pour leurs observations finales, après quoi la cause serait gardée à juger.

59) Le 5 mars 2021, la HES-SO Genève a persisté dans ses conclusions, et M. A______ en a fait de même.

EN DROIT

1) Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours du 25 novembre 2019 a pour objet la clôture de la procédure de reclassement. Il s'agit donc d'un recours contre une décision incidente. Dans la mesure où la décision finale – soit la résiliation des rapports de service – a été rendue dans l'intervalle, et fait l'objet du second recours, le premier devient sans objet (ATA/1560/2019 du 21 octobre 2019).

Quoi qu'il en soit, les différents griefs soulevés dans ledit recours ont trait à la manière dont la procédure de reclassement a été menée, et doivent ainsi être également examinés dans le cadre du second recours, lequel fait suite à une procédure de réclamation (ATA/1285/2019 du 27 août 2019), et est intégralement recevable.

3) Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu (ATF 138 I 232 consid. 5.1), le recourant invoque la violation de son droit d'être entendu, en lien avec le fait que la HES-SO Genève ne l'aurait pas confronté à Mme D______ et lui aurait interdit de la contacter, et qu'elle aurait fondé en partie sa décision de licenciement sur des faits insuffisamment précis pour pouvoir les réfuter, notamment en lui reprochant un comportement inadéquat vis-à-vis des directions et des assistantes RH des écoles composant la HES-SO Genève, sans les nommer ni donner d'indications spécifiques sur les faits incriminés.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b), ainsi que de participer à l'administration des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 1C_279/2016 du 27 février 2017 consid. 6.1). Toutefois, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; 132 V 368 consid. 3.1) et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

b. Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Il n'est toutefois pas une fin en soi ; il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_734/2016 du 18 juillet 2017 consid. 1.1 ; 6B_259/2016 du
21 mars 2017 consid. 5.1.1 ; 4A_153/2009 du 1er mai 2009 consid. 4.1).

c. Le Tribunal fédéral admet à certaines conditions la possibilité de réparer après coup une violation du droit d'être entendu, en particulier lorsque la décision entachée est couverte par une nouvelle décision qu'une autorité supérieure – jouissant d'un pouvoir d'examen au moins aussi étendu – a prononcée après avoir donné à la partie lésée la possibilité d'exercer effectivement son droit d'être entendu (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1 ; 133 I 201 consid. 2.2 ; 118 Ib 111 consid. 4b ; 116 Ia 94 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1062/2015 du 21 décembre 2015 consid. 4.1).

4) En l'espèce, la HES-SO Genève a fait parvenir au recourant, le 18 mars 2019, une copie du courrier de Mme D______ du 10 octobre 2018, copie qu’il n’avait jusqu’ici pas reçue et dont il souhaitait prendre connaissance. Elle lui a octroyé un délai pour se déterminer sur cette pièce. Dès lors, le droit d'être entendu du recourant sur ce point a été respecté, l'interdiction de contacter la personne concernée n'ayant pas de lien avec l'exercice du droit d'être entendu et la confrontation avec elle n'étant pas garantie en tant que telle. Quand bien même l'absence de confrontation durant la procédure de réclamation constituerait une violation du droit d'être entendu du recourant, celle-ci aurait été réparée devant la chambre de céans, Mme D______ ayant été entendue par la chambre de céans en qualité de témoin, en présence du recourant et de son avocat.

Quant aux reproches formulés par l'intimée à l'encontre du recourant en lien avec son comportement à l'égard des directions et des RH des différentes écoles, si certes ils sont peu circonstanciés, ils ne constituent qu'un aspect parmi d'autres de ce qui a été reproché au recourant. Le fait que les personnes n'aient pas été nommément citées n'a guère d'importance en l'espèce, dès lors qu'en tant que DRH, le recourant connaissait les noms de toutes les personnes occupant les postes visés. Enfin, quand bien même l'imprécision des griefs formulés à son encontre constituerait une violation du droit d'être entendu, celle-ci aurait été réparée devant la chambre de céans, laquelle a longuement entendu les parties en comparution personnelle et ayant procédé à l'audition contradictoire de plusieurs directeurs et anciens directeurs d'école ainsi que d'un ancien directeur adjoint.

Le grief sera écarté.

5) Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d’espèce.

6) L'objet du litige consiste à déterminer si c'est conformément au droit que l'intimée a confirmé sur réclamation la décision de licenciement du 9 décembre 2019. Il convient dès lors, après avoir déterminé le droit applicable, d'examiner l'existence de motifs fondés de licenciement.

7) La loi fédérale sur l’encouragement des hautes écoles et la coordination dans le domaine suisse des hautes écoles du 30 septembre 2011
(LEHE - RS 414.20) s’applique aux hautes écoles spécialisées (ci-après : HES ; art. 2 al. 2 let. b). Cette loi, qui pose le principe selon lequel la Confédération veille avec les cantons à la coordination, à la qualité et à la compétitivité du domaine suisse des hautes écoles ne contient aucune disposition spécifique relative à la gestion du personnel administratif et technique des hautes écoles
(art. 1 al. 1), règle les domaines suivants : la coordination de la politique des hautes écoles à l’échelle nationale, en particulier par l’institution d’organes communs ; l’assurance de la qualité et de l’accréditation ; le financement de hautes écoles et d’autres institutions du domaine des hautes écoles ; la répartition des tâches dans les domaines particulièrement onéreux ; l’octroi de contributions fédérales (art. 1 al. 2 let. a à e) – mis à part des références à la qualification appropriée du personnel et à une organisation efficace, conditions parmi d’autres nécessaires pour que les HES obtiennent une accréditation (art. 30 al. 1 let. a ch. 1 et 2 LEHE).

8) Pour sa part, la convention intercantonale sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale du 26 mai 2011 (CHES-SO - C 1 27) retient que les cantons de Berne, Fribourg, Vaud, Valais, Neuchâtel, Genève et Jura (ci-après : cantons partenaires) constituent pour une durée indéterminée la HES-SO, conformément à la législation fédérale (art. 1 al. 1 CHES-SO). Son art. 39 al. 3 prévoit que les cantons/régions partenaires organisent librement les hautes écoles, dans les limites suivantes : ils leur garantissent l’autonomie nécessaire à leur fonctionnement et leur indépendance par rapport à leur administration cantonale (let. a) ; nommées par leurs autorités cantonales sur préavis du rectorat, les directions générales des hautes écoles répondent directement devant le rectorat de la réalisation du mandat de prestations HES-SO qui les lie à ce dernier (let. b).

À teneur de l’art. 40 CHES-SO, les hautes écoles ont notamment les attributions et compétences suivantes : nommer et gérer leurs personnels en veillant à la stricte application des dispositions communes édictées par la HES-SO et associer, dans la mesure du possible, le conseil de domaine aux procédures de sélection du corps professoral (jurys ad hoc ; let. e). Il apparaît que ces dispositions communes concernent les personnels d’enseignement et de recherche, l’art. 48 al. 1 CHES-SO prévoyant que dans le but de renforcer la cohésion, d’assurer l’égalité de traitement et de favoriser le développement des compétences et la mobilité professionnelle des collaborateurs et collaboratrices des hautes écoles, la HES-SO édicte des règles communes concernant les qualifications à l’engagement, les fonctions ainsi que les missions des personnels d’enseignement et de recherche. Pour le surplus, l’art. 48 al. 2 CHES-SO précise que les personnels restent soumis à leurs employeurs conformément au droit public des cantons/régions parties prenantes à la convention.

Cela ressort également de l’exposé des motifs de la CHES-SO (la nouvelle convention HES-SO : exposé des motifs et projet de convention consultable à l’adresse https://www.hes-so.ch/data/documents/Expose-motifs-convention-FR-2494.pdf) qui confirme qu’il n’y a pas d’employeur unique, le personnel étant soumis « à leur employeur conformément au droit des cantons/régions. C’est pourquoi, le règlement sur le personnel de la HES-SO est soumis par le comité gouvernemental à chaque Conseil d’État des cantons signataires de la convention » (p. 21).

9) a. Selon l’art. 1 al. 1 à 4 de la loi sur la HES-SO Genève du 29 août 2013 (LHES-SO-GE - C 1 26), la HES-SO Genève fait partie intégrante de la HES-SO. Elle constitue une haute école au sens de la CHES-SO. Elle est un établissement autonome de droit public doté de la personnalité morale placé sous la surveillance du Conseil d’État qui l’exerce par l’intermédiaire du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse. Elle s’organise elle-même, fixe ses priorités et ses modalités d’action et est responsable de sa gestion dans le cadre des orientations, principes et règles stipulées par la LHES-SO-GE, dans le respect des dispositions pertinentes du droit fédéral, de la convention intercantonale, et du cadre normatif fixé par la HES-SO.

L’art. 6 LHES-SO-GE dispose que la HES-SO Genève organise ses procédures et son fonctionnement de manière à garantir les principes de respect de la personne, de transparence, d’équité et d’impartialité. Elle met en place des voies de médiation, de réclamation et de recours dont les modalités sont fixées par règlements internes.

Selon l’art. 16 LHES-SO-GE, la communauté de la HES-SO Genève est composée des membres du conseil de direction (let. a) ; des enseignantes et enseignants (let. b) ; des collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche (let. c) ; des étudiantes et étudiants (let. d) et des membres du personnel administratif et technique (let. e). La HES-SO Genève est l’employeur de son personnel (al. 1). Les rapports de travail sont des rapports d’emploi de droit public, à l’exception des cas prévus par l’art. 19 al. 4 (qui concerne des situations non pertinentes dans le cas d’espèce ; art.17 al. 1 et 2 LHES-SO-GE).

En l’espèce, le recourant est un membre nommé du personnel administratif et technique. Il ne fait pas partie du conseil de direction, celui-ci étant composé de la directrice générale ou du directeur général et des directrices et directeurs d’écoles qui en sont membres de droit (art. 24 al. 1 LHES-SO-GE).

b. À teneur de l’art. 19 al. 2 LHES-SO GE, le personnel administratif et technique est soumis aux dispositions de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15), et de leurs règlements d’application (al. 2). Pour ce qui a trait au personnel de la HES-SO Genève, les compétences qui appartiennent au Conseil d’État, respectivement à l’OPE, à teneur de la loi sur l’instruction publique du
17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), de la LPAC et de la LTrait, sont transférées aux organes de la HES-SO Genève selon les modalités définies par le règlement (al. 3).

L’art. 20 al. 1 LHES-SO-GE prévoit que les prescriptions nécessaires concernant le statut de l’ensemble du personnel, ainsi que la composition et la mission de l’instance participative, sont fixées dans le règlement. Le conseil de direction élabore et adopte ce règlement, après avoir consulté l’instance participative du personnel, sous réserve de l’approbation du Conseil d’État. Les dispositions (non pertinentes dans le cas d’espèce) prévues à l’art. 38 al. 4 et à l’art. 39 sont réservées. Sont également réservées les conditions et les règles communes concernant les qualifications à l’engagement, les fonctions et les missions des personnels de l’enseignement et de la recherche édictées par la
HES-SO.

c. Pour ce qui relève des attributions de la directrice générale ou du directeur général, l’art. 25 LHES-SO-GE prévoit entre autres qu’il/elle dirige la HES-SO Genève (al. 1). Sur proposition de la direction de l’école, il/elle décide de l’engagement, du renouvellement et de la fin des rapports de service du personnel administratif et technique (al. 3 let. e) ou prend toute décision sur recours, sous réserve de dispositions particulières (al. 3 let. j).

10) a. Le RPersHES-SO régit les rapports de travail entre la HES-SO Genève et son personnel (art. 1 al. 1 RPersHES-SO). Le personnel de la HES-SO Genève est notamment composé du personnel administratif et technique (art. 1 al. 2 RPersHES-SO).

b. L’art. 2 al. 2 du règlement dispose, entre autres, que conformément aux
art. 19 al. 2 et 3 et 20 al. 1 LHES-SO-GE, les rapports de travail du personnel administratif et technique sont régis : par la LPAC, la LTrait et leurs règlements d’application (let. a) ; par les art. 3 et 4 du règlement, relatifs à l’autorité compétente en matière de personnel et aux directives internes (let. b) ; par
l’art. 165 du règlement, relatif à la procédure de réclamation et de recours, sous réserve des art. 27 et suivants LPAC (let. e).

Pour sa part, l’art. 3 du règlement prévoit qu’en application de l’art. 19
al. 3 LHES-SO-GE, les compétences dévolues au Conseil d’État, respectivement à l’OPE, sont transférées au conseil de direction de la HES-SO Genève, sous réserve des attributions de la directrice générale ou du directeur général énumérées à l’art. 25 al. 3 de la loi (al. 1). Pour autant que les dispositions suivantes n’indiquent pas le contraire, toutes les compétences attribuées dans le règlement peuvent être déléguées (al. 2). La délégation de compétences et de signatures est concrétisée dans un tableau validé par le conseil de direction.

c. Après réclamation faite auprès de l'auteur de la décision conformément à l'art. 165 al. 2 et 5 RPersHES-SO, une décision de résiliation ou de non-renouvellement des rapports de travail peut faire l'objet d'un recours à la chambre administrative dans un délai de trente jours (art. 165 al. 1 RPersHES-SO). Lorsque la chambre administrative retient que la résiliation des rapports de travail ne repose pas sur un motif fondé, elle ordonne à la HES-SO Genève la réintégration de l'intéressé (art. 165 al. 2 RPersHES-SO) ; lorsqu'elle retient que la résiliation des rapports de travail est contraire au droit, elle peut proposer la réintégration (art. 165 al. 3 RPersHES-SO).

11) L’art. 2B LPAC prévoit qu’il est veillé à la protection de la personnalité des membres du personnel, notamment en matière de harcèlement psychologique et de harcèlement sexuel (al. 1). Des mesures sont prises pour prévenir, constater et faire cesser toute atteinte à la personnalité (al. 2).

Est constitutif d'un harcèlement psychologique tout enchaînement de propos ou d'agissements hostiles, répétés pendant une durée assez longue, par lesquelles une ou plusieurs personnes tendent à déstabiliser, à isoler, à marginaliser voire à exclure une ou plusieurs personnes de leur lieu de travail (art. 139 al. 2 RPersHES-SO ; art. 3 al. 2 du règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève - B 5 05.10 - RPPers).

Dans de tels cas, le RPersHES-SO prévoit la possibilité de s'adresser à des médiateurs (art. 140 et 144 RPersHES-SO), le RPPers au « groupe de confiance » que ce règlement institue (art. 4 ss et 12 RPPers).

12) Selon l'art. 21 al. 3 LPAC, l'autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour un motif fondé. Elle motive sa décision. Elle est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnelle et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond aux capacités de l'intéressé. Les modalités sont fixées par règlement.

Il y a motif fondé au sens de l'art. 22 LPAC, lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (let. a), de l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b) ou de la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c).

L'élargissement des motifs de résiliation des rapports de service, lors de la modification de la LPAC, en vigueur depuis le 31 mai 2007, n'implique plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/838/2019 du 30 avril 2019 consid. 3b ; ATA/783/2016 du 20 septembre 2016 consid. 5b). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/240/2019 précité consid. 5b et les références citées ; ATA/1190/2019 du 30 juillet 2019 consid. 5b ; Mémorial du Grand Conseil 2005-2006/XI A 10420).

Des manquements dans le comportement de l'employé ne peuvent constituer un motif de licenciement que lorsqu'ils sont reconnaissables également pour des tiers. Il faut que le comportement de l'employé perturbe le bon fonctionnement du service ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-897/2012 du 13 août 2012 consid. 6.3.2 ; Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonction publique : instruments, in Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail, 2015, p. 161-162).

Selon une jurisprudence constante, le fait de ne pas pouvoir s'intégrer à une équipe ou de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration est difficile ou impossible est de nature à fonder la résiliation des rapports de travail, quelles que soient les qualités professionnelles de l'intéressé (ATA/544/2021 du 25 mai 2021 consid. 9f ; ATA/421/2021 du 20 avril 2021 consid. 3d : ATA/1476/2019 du 8 octobre 2019 consid. 8a).

Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/915/2019 du 21 mai 2019 consid. 6c ; ATA/1177/2018 du 6 novembre 2018 consid. 6d).

Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 Cst., exige que les mesures mises en œuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 140 I 168 consid. 4.2.1 ; ATA/1087/2018 du 16 octobre 2018 consid. 4c).

13) a. S'agissant des devoirs du personnel, les membres du personnel sont tenus au respect de l’intérêt de l’État et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 du règlement d’application de la LPAC du 24 février 1999 - RPAC - B 5 05.01).

L'obligation de s'abstenir de tout acte qui pourrait porter préjudice à l'État signifie qu'aussi bien dans l'exercice de leurs tâches qu'au-dehors, le fonctionnaire doit se montrer digne de la considération et de la confiance que sa fonction officielle exige et doit avoir un comportement tel que la population puisse avoir confiance dans l'appareil administratif à qui est confiée la gestion des affaires publiques (Pierre MOOR/François BELLANGER/Thierry TANQUEREL, Droit administratif vol. III, 2018, n° 7.3.3.1).

Ainsi, l'art. 21 RPAC prévoit que les membres du personnel se doivent, par leur attitude, d’entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés, de permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), ainsi que d'établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public (let. b).

b. Quant à l'exécution du travail, ils se doivent notamment de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (art. 22 al. 1 RPAC).

Le fonctionnaire doit s'acquitter de sa tâche, dans la mesure qui correspond à ses fonctions, en respectant notamment la légalité et l'intérêt public. Il est important que le travail s'accomplisse dans une atmosphère de courtoisie réciproque, aussi bien à l'égard des collègues que des tiers. Le fonctionnaire doit par ailleurs veiller à la conformité au droit de ses actes ; il lui appartient d'informer ses supérieurs des problèmes qui pourraient poser et des éventuelles améliorations à apporter au service (Pierre MOOR/François BELLANGER/ Thierry TANQUEREL, op. cit., n° 7.3.3.1).

L'obligation de gestion, appelée aussi devoir de fonction, impose aux collaborateurs d'exécuter leur travail personnellement et avec soin. Cette obligation est définie concrètement par le cahier des charges attribué à chaque poste, les instructions et les ordres de service donnés par le pouvoir hiérarchique. L'obligation de suivre les instructions de l'employeur est un élément fondamental du devoir de fonction. Si l'employé ne respecte pas les instructions de son employeur, il viole ses obligations de service (Pierre MOOR/ François BELLANGER/Thierry TANQUEREL, op. cit., n° 7.3.2.1).

c. Sont nommés en qualité de cadres supérieurs les fonctionnaires appelés, par leurs responsabilités hiérarchiques ou fonctionnelles, à préparer, proposer ou prendre toute mesure ou décision propre à l’élaboration et à l’exécution des tâches fondamentales de pouvoir exécutif (art. 2 al. 1 du règlement sur les cadres supérieurs de l'administration cantonale du 22 décembre 1975 - RCSAC - B 5 05.03).

Selon l'art. 3 al. 1 RCSAC, les fonctions de cadre supérieur exigent de leurs titulaires, outre la préoccupation constante des intérêts de l’État et l’accomplissement des devoirs généraux liés à l’exercice de la fonction publique, le maintien d’un haut niveau de qualification et un sens élevé de la mission confiée.

14) En l'espèce, le recourant était fonctionnaire et cadre supérieur de la HES-SO Genève. Ses compétences professionnelles ne sont pas mises en cause, si ce n'est de manière marginale quant à la gestion de son service et à la relation avec son adjointe. Le reproche général qui lui est fait est d'avoir adopté, à partir de 2013, un comportement inadéquat qualifié notamment de « déloyal », « défiant », « toxique », « antagoniste » ou encore « polémique », notamment à l'égard de la direction générale. Il n'y a cependant pas lieu de reprendre ici de manière absolument systématique les différents griefs ainsi que les exemples concrets donnés dans la décision de licenciement ou dans la décision sur réclamation attaquée, l'analyse du comportement de l'intéressé devant – et pouvant, au vu des nombreuses pièces du dossier et de l'instruction poussée effectuée par la chambre de céans – être appréhendée dans une perspective globale.

a. Les démarches faites en 2013 relativement à la réévaluation salariale de son poste de DRH sont plutôt décrites comme un élément déclencheur ; l'intimée indique néanmoins que le comportement du recourant à cette occasion eût déjà pu justifier un licenciement. Dans cette mesure, on doit constater que la proposition faite le 14 novembre 2013 au directeur général de surseoir à la réponse négative de l'OPE en « rangeant » son poste dans un poste de « directeur N° 002027 » constitue une tentative illégale de contourner le blocage décrété par le Conseil d'État, d'autant plus surprenante de la part d'une personne souvent décrite (y compris par elle-même) comme étant à cheval sur le règlement. Cela étant, ces faits doivent être relativisés vu leur ancienneté ainsi que l'absence de réponse immédiate de la hiérarchie, le directeur général ayant tout de suite vu le caractère irrégulier de la proposition mais n'y ayant à l'époque pas donné une réponse disciplinaire.

Le dossier confirme néanmoins clairement l'importance que revêtait pour le recourant la question de sa revalorisation salariale. Ainsi, le 11 novembre 2013, M. A______ a demandé au directeur général de recevoir un certificat de travail intermédiaire, ce qui peut impliquer qu'à la suite du refus opposé par l'OPE, il envisageait de quitter l'institution. Mme D______ a indiqué qu'au cours de la discussion du 26 septembre 2018, M. A______ avait fait état de sa classe de fonction qui aurait dû être revalorisée, ce dont elle entendait parler pour la première fois ; il avait exprimé sa frustration par rapport à des promesses non tenues qu’aurait faites M. B______, et il se plaignait que le précité ait trahi cette promesse. Mme E______ a confirmé que la question de son statut salarial était importante pour M. A______ ; il lui avait parlé de son souhait de voir sa fonction réévaluée, notamment pour être au même niveau de traitement que le directeur financier, quand bien même il s’agissait plus pour lui d’une symbolique de positionnement ou de statut au sein de l’institution que d’une question purement pécuniaire – elle avait également pu constater que la motivation de M. A______ avait été affectée. M. J______ a indiqué que, même s'il ne s'agissait pas pour M. A______ d'une obsession, ce dernier lui avait parlé plusieurs fois de la réévaluation de son poste en classe 27. On peut donc admettre que cette question était très importante pour lui – sur le principe, dès lors que la différence de traitement entre les deux classes ne correspond pas à un montant très élevé à ce niveau de salaire –, et le fait que la décision attaquée y voie un moment charnière dans l'attitude de M. A______ vis-à-vis du directeur général voire de l'institution apparaît fondé.

b. Le recourant conteste la teneur du courrier que Mme D______ a rédigé le 10 octobre 2018 à l'intention du directeur général. Celle-ci en a néanmoins confirmé la teneur, en insistant sur le fait que c'était elle-même qui avait écrit cette lettre avec ses propres mots. Or les paroles du recourant restituées par Mme D______ dénotent une attitude excessivement critique à l'égard du directeur général, parlant de « réalité différente », de « trouble psychiatrique » et de promesses non tenues, soit des propos clairement incompatibles avec l'attitude digne et respectueuse des supérieurs prévus par l'art. 21 let. a RPAC.

c. D'une manière plus générale, l'instruction de la présente cause a confirmé l'existence de tensions allant croissant entre le recourant et le directeur général voire le conseil de direction, tensions que les propos susmentionnés matérialisent. Mme D______ a ainsi indiqué qu'en septembre 2018, il y avait des tensions palpables entre M. A______ et le conseil de direction, notamment à propos de certaines décisions prises par ce dernier. Pour M. J______, la dégradation des relations entre le recourant et le directeur général avait commencé à se voir publiquement, c’est-à-dire dans des séances communes, et notamment à partir de 2015-2016. Pour M. O______, jusqu’en 2018 environ, le recourant était un homme d’une très grande loyauté vis-à-vis de l’institution, sinon forcément vis-à-vis du directeur général. Enfin, pour M. S______, on sentait des tensions très fortes entre le recourant et le directeur général, et « cela devenait ingérable ».

L'épisode reproché au recourant de « correction » de son propre EEDM, le 20 juillet 2017, en plus de confirmer les tensions précitées, peut effectivement être imputé à faute au recourant, dans la mesure où, tout cadre RH qu'il était, il ne lui appartenait à l'évidence pas de modifier l'évaluation faite par son supérieur hiérarchique direct. On relèvera du reste que, contrairement à ce que prétend le recourant, cet EEDM comportait bien un élément de « recadrage » car même si l'évaluation « par coches » restait globalement positive, le bilan général tel que rédigé par le directeur général faisait état d'une attitude problématique.

Sur le reproche d'avoir monté certains cadres de la direction contre le directeur général, Mme C______ a déclaré avoir identifié le problème de posture de M. A______ à l'égard du directeur général à la suite des entretiens qu'elle avait menés lors du premier mandat ; elle avait eu affaire à trois cadres qui étaient dans l’opposition, et il lui semblait que M. A______ était le leader des trois. On ne saurait admettre sans autre que cette consultante externe se soit forgée une opinion radicalement erronée, et l'antagonisme décelé entre le recourant et le directeur général est confirmé par l'ensemble du dossier. Le sentiment de Mme C______ quant au fait que le recourant aurait monté plusieurs cadres contre le directeur général n'est cependant pas confirmé par des pièces au dossier ou les déclarations des différents témoins. Le seul élément en ce sens est le comportement du recourant ayant consisté, début février 2017, à ôter le directeur général d'une liste de diffusion au sujet du suivi de la journée « au vert ». Là aussi, s'il s'agit d'un comportement symptomatique des tensions précitées, on ne saurait lui accorder en lui-même une importance excessive, notamment dans la mesure où l'ensemble des messages était reçu par l'adjointe du directeur général, Mme F______. De même, le comportement antagoniste reproché à propos du CSC du 9 février 2017 n'est décrit par l'intimée que de manière extrêmement vague, et ne saurait donc être retenu comme comportement problématique per se.

d. La décision attaquée reproche également au recourant son comportement à l'égard des directions d'écoles. À ce sujet, plusieurs membres de ces directions ont confirmé l'existence de problèmes.

M. O______ a indiqué avoir constaté que la directrice de la HEdS depuis avril 2019, ne voyait pas l’intérêt de passer par M. A______ pour l’ouverture ou la définition des postes, mais s’adressait directement à M. B______ ; on ne sait toutefois pas si ce comportement avait pour origine des difficultés rencontrées avec le recourant. M. O______ a cependant souligné que de manière générale, M. A______ avait une attitude extrêmement correcte avec le personnel des écoles, en particulier les assistantes RH et les directeurs adjoints.

Les déclarations de M. Q______ sont quelque peu ambiguës, dès lors qu'il a déclaré que M. A______ fournissait à la HEdS un appui remarquable, et qu'il a relativisé ses déclarations d'alors, tout en reconnaissant avoir effectivement dit en conseil de direction que M. A______ avait un comportement « toxique », et que son rôle était alors perçu au sein de la HEdS comme « trouble », car plus du tout en adéquation avec celui du directeur général.

MM. S______ et T______ ont quant à eux émis une opinion plus tranchée. Le premier a dit s'être rendu compte que ce que le recourant disait pouvait varier d'un interlocuteur à l'autre, voire d’une fois à l’autre avec la même personne, c’est pourquoi il notait toujours par écrit ce que M. A______ lui disait, en le restituant par courriel pour qu’il le valide, afin d’avoir une base solide (reconnaissant néanmoins que M. A______ avait une grande compétence pour gérer les cas difficiles dans les écoles). Il a ajouté avoir été surpris que M. B______ ne réagisse pas plus fortement pour recentrer les actions et le travail de M. A______, et faire en sorte que celui-ci ne dépasse pas le cadre de ce travail. Selon le second, les directeurs avaient fait part – tout au moins dès 2018 – de difficultés rencontrées dans leurs interactions avec M. A______, de type blocages ou complications, voire d’autres chicaneries. Personnellement, il avait souvent vécu cela comme un frein, notamment lors de recrutements ; les directeurs d'école s'en étaient ouverts plusieurs fois et cela avait été abordé en séance, y compris en présence de l’intéressé, et M. Q______ était du même avis que les autres directeurs d'école, disant que le comportement de M. A______ était « un empêchement permanent ».

Dès lors, quand bien même on peut laisser de côté la qualification de « comportements de petit chef » utilisée par l'intimée à plusieurs reprises, on doit constater la présence de difficultés croissantes, pour les directions d'école, de passer par l'entremise de M. A______ pour formuler leurs demandes RH.

S'agissant en revanche du courrier des directeurs adjoints d'école ayant mené à ce que le recourant soit dessaisi de la direction du projet Archipel-RH, il résulte des déclarations notamment de M. O______ qu'il s'agissait plutôt d'un problème de désaccord de fond, M. A______ ayant une vision qui comportait à terme la remise en question de l'existence même des directeurs adjoints, ce qui a évidemment fait réagir ceux-ci sans que cela puisse en soi être considéré comme inadéquat. Il semble même, à cet égard, que sa vision ait finalement prévalu (ou soit en passe de prévaloir) dans les faits.

e. On doit par ailleurs retenir également comme comportement problématique l'attitude du recourant à l'égard de son adjointe d'alors, Mme E______. Celle-ci a fait état en audience, sans être contredite de manière convaincante, de directives changeantes et de critiques non fondées sur sa manière d’assumer ses responsabilités et le périmètre de ses tâches, d'interventions inadéquates auprès de personnes qui lui étaient subordonnées, de pressions exercées auprès de tiers et de questions posées au sujet de la nécessité de passer par son adjointe et non par lui-même.

f. Il résulte de ce qui précède qu'en tout cas dès 2018, il existait des tensions devenues insurmontables entre le recourant et le directeur général, des difficultés récurrentes – et ayant été abordées au conseil de direction – entre le recourant et à tout le moins certaines directions d'école, ainsi qu'un comportement problématique du recourant à l'égard de son adjointe. Pris globalement, en considérant en particulier la position du recourant comme cadre supérieur de référence en matière de RH, et son rôle de « courroie de transmission » entre les écoles et la direction générale, on doit retenir qu'il existait un motif fondé de licenciement, le bon fonctionnement de l'institution n'étant plus garanti s'il était maintenu à son poste de DRH.

Reste à examiner si le comportement de la direction générale à son égard est susceptible de mettre à mal ce constat.

15) À cet égard, le recourant se plaint d'un harcèlement psychologique à son encontre de la part de M. B______.

Force est tout d'abord de constater qu'un tel comportement n'a pas été constaté par une instance compétente pour ce faire. Le directeur général a indiqué en comparution personnelle ignorer si le recourant avait fait ou non appel au groupe de confiance de l'État de Genève. L'absence de toute pièce en ce sens versée au dossier par le recourant tend à démontrer que tel n'a pas été le cas, et il ne le soutient pas. Quant à l'action en responsabilité déposée par le recourant auprès du Tribunal civil, elle est toujours pendante.

Différents témoins ont fait état de ce que le directeur général pouvait être directif – caractéristique notoirement non inusuelle chez les personnes occupant ce type de fonction –, que « lorsqu['il] n’était pas d’accord, il devenait difficile d’argumenter et les choses pouvaient vite monter en puissance » (M. J______), ou encore qu'il « avait des compétences, mais avait du mal à déléguer et agissait en solitaire dans à peu près tous les domaines » (Mme Q______).

Cela étant, les témoins entendus ont aussi indiqué qu'ils n'avaient « jamais constaté de dérapages verbaux ou comportementaux de M. B______ envers M. A______ » (M. T______), que les difficultés avec le directeur général venaient « de dissensions professionnelles mais pas d’actes de violence physique ou verbale » ou qu'il n'y avait pas de constat « de souffrance chez les cadres des services communs en lien avec le comportement de M. B______, mais de grandes insatisfactions » (Mme Q______). Même M. Q______, qui a été le seul déposant à relater des propos du directeur général qu'il a jugés brutaux (à savoir que lors d'une séance du conseil de direction, le directeur général avait dit au recourant de « la fermer »), a estimé que « cette flambée momentanée matérialisait des tensions préexistantes entre les deux hommes » et que « M. B______ n’était pas coutumier de ce genre de façon de parler ».

Dès lors, quand bien même il n'est pas contesté que le directeur général ait fait des reproches de plus en plus nombreux au recourant, ou pu s'exprimer de manière vive à son égard, on ne peut considérer au regard du dossier, que son attitude à l'égard du recourant soit constitutive de harcèlement psychologique au sens des art. 139 al. 2 RPersHES-SO et 3 al. 2 RPPers). Il n'y a dès lors pas lieu de remettre en cause le constat d'existence d'un motif fondé au licenciement.

16) Le recourant se plaint enfin de la manière dont la procédure de reclassement a été menée dans son cas.

a. S’agissant des mesures préalables au licenciement, l’autorité est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnels propres à favoriser le reclassement et de rechercher si un autre poste au sein de l’administration cantonale correspond aux capacités de l’intéressé (art. 21 al. 3 LPAC ; art. 46A al. 2 RPAC et art. 48A al. 2 statut). L’intéressé est tenu de collaborer. Il peut faire des suggestions (art. 46A
al. 3 RPAC ; art. 48A al. 3 statut). Les modalités de cette procédure sont fixées par règlement (art. 21 al. 3 LPAC).

b. Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Il impose à l'État de s'assurer, avant qu'un licenciement ne soit prononcé, qu'aucune mesure moins préjudiciable pour l'administré ne puisse être prise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4a ; ATA/1280/2019 du 27 août 2019 consid. 8d et les arrêts cités).

L'État a l'obligation préalable d'aider l'intéressé et de tenter un reclassement, avant de prononcer la résiliation des rapports de service d'un agent public au bénéfice d'une nomination : il s'agit tout d'abord de proposer des mesures dont l'objectif est d'aider l'intéressé à retrouver ou maintenir son « employabilité », soit sa capacité à conserver ou obtenir un emploi, dans sa fonction ou dans une autre fonction, à son niveau hiérarchique ou à un autre niveau. Avant qu'une résiliation ne puisse intervenir, différentes mesures peuvent être envisagées et prendre de multiples formes. À titre d'exemples, on pense au certificat de travail intermédiaire, au bilan de compétences, à un stage d'évaluation, aux conseils en orientation, aux mesures de formation et d'évolution professionnelles, à l'accompagnement personnalisé, voire à « l'outplacement ». Il s'agit ensuite de rechercher si une solution alternative de reclassement au sein de la fonction publique cantonale peut être trouvée. En contrepartie, la garantie du niveau salarial atteint en cas de changement d'affectation a été abrogée (MGC 2005-2006/XI A 10420 ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4a ; ATA/1067/2016 du 20 décembre 2016 consid. 7).

Lorsque la loi prescrit à l'État de ne pas licencier une personne qu'il est possible de reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en œuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui (ATA/1576/2019 du 29 octobre 2019 consid. 14b et les références citées).

En outre, l'obligation de l'État de rechercher un autre emploi correspondant aux capacités du membre du personnel dont le poste est supprimé se double, corrélativement, d'une obligation de l'employé, non seulement de ne pas faire obstacle aux démarches entreprises par l'administration, mais de participer activement à son reclassement (ATA/367/2021 du 30 mars 2021 consid. 4e ; ATA/679/2017 du 20 juin 2017 consid. 7c ; ATA/298/2016 du 12 avril 2016 consid. 5b).

c. Le fait que la procédure de reclassement se déroule pour partie durant les mois de juillet et août, période de vacances, ne saurait constituer un manquement dans le déroulement de ladite procédure, et le fait que l’administration n’ait pas motivé son refus de prolonger la procédure de reclassement ne constitue pas non plus une violation du droit (ATA/783/2016 du 20 septembre 2016 consid. 6c).

d. L'office du personnel de l'État a édicté un corpus de directives, intitulé MIOPE passant en revue et explicitant l'ensemble des règles relatives aux rapports de service des collaborateurs de l'État.

Conformément à l’art. 46A al. 2 RPAC, quand un reclassement est envisagé dans un poste disponible, des mesures de développement et de réinsertion professionnelle propres à favoriser le reclassement sont proposées.

Il doit en conséquence exister un lien entre la mesure et le reclassement envisagé dans le poste à disposition. À défaut, de telles mesures ne se justifient pas (fiche MIOPE 06 01 03, ci-après : fiche MIOPE).

17) En l'occurrence, l'intimée a ouvert la procédure de reclassement le 29 avril 2019, en demandant au recourant de lui fournir un CV actualisé dans les dix jours. Alors qu'il était tenu de collaborer à la procédure, il n'a fourni ledit CV que le 12 août 2019, soit plus de trois mois après l'ouverture de la procédure de reclassement et plus d'un mois après le refus de restitution de l'effet suspensif par la chambre de céans dans la procédure engagée contre l'ouverture de la procédure de reclassement (A/1708/2019). Il ne peut dès lors se plaindre de ce que l'intimée ait utilisé le dernier CV en sa possession.

La durée de la procédure de reclassement échappe à la critique, étant rappelé qu'aucune règle n'est posée à cet égard, ceci tant à l'art. 46A RPAC que dans la fiche MIOPE ; celle d'espèce, soit cinq mois, était suffisante. Le raccourcissement, dans les faits, de ladite procédure dû à la contestation par le recourant de plusieurs étapes de celle-ci n'y change rien, et l'intimée n'avait pas l'obligation de prolonger la procédure de reclassement pour en tenir compte, étant rappelé que le traitement du fonctionnaire continue d'être versé durant la procédure.

S'agissant des autres modalités, la plupart des entités publiques genevoises ont été contactées, et le recourant a du reste obtenu au moins un entretien d'embauche pour un poste de directeur. Quant au fait que la procédure s'est déroulée en partie durant l'été 2019, cela ne saurait, conformément à la jurisprudence précitée, être tenu pour contraire au droit.

Enfin, dans la mesure où le motif de licenciement était un problème d'attitude, et non de compétences professionnelles, on ne voit pas qu'une fixation d'objectifs, des mesures de réorientation ou un coaching aient pu revêtir une quelconque utilité dans le cas du recourant, étant noté qu'une médiation avait déjà été organisée en 2017, sans succès.

Dès lors, la mise en œuvre de la procédure de reclassement ne prête pas le flanc à la critique, si bien que le grief correspondant sera également écarté.

Il résulte des considérants qui précèdent que le recours, mal fondé, sera rejeté.

18) Au vu de l'issue du litige et de l'ampleur de l'instruction menée, un émolument de CHF 2'500.- (incluant une indemnité de témoin à hauteur de CHF 400.-) sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, l'intimée possédant un service juridique (ATA/600/2021 du 8 juin 2021 consid. 11 reprenant la jurisprudence constante de la chambre de céans, l'indemnité allouée dans l'ATA/36/2017 étant isolée).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare sans objet le recours interjeté le 25 novembre 2019 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale de Genève (HES-SO Genève) du 13 novembre 2019 ;

déclare recevable le recours interjeté le 16 mars 2020 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale de Genève (HES-SO Genève) du 27 février 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 2'500.-, y compris une indemnité de CHF 400.- versée à un témoin ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure :

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Thomas Barth, avocat du recourant ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale de Genève (HES-SO Genève).

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Lauber, M. Mascotto, Mme Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :