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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/500/2007

ATA/635/2009 du 01.12.2009 ( DCTI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/500/2007-DCTI ATA/635/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 1er décembre 2009

en section

dans la cause

 

Madame H______
représentée par Me Jean-Pierre Carera, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE

_________



EN FAIT

1. Madame H______ et Madame D______ sont propriétaires de la parcelle no______, feuille ______ du cadastre de la commune de Bardonnex, sise chemin Y______. Ladite parcelle, d’une surface de 1148 m2 est située en zone agricole.

2. En date du 10 mai 1964, Monsieur A______, père des prénommées et propriétaire de la parcelle précitée à l'époque, avait déposé auprès du département des travaux publics une demande d'autorisation de construire pour l'édification d'une remise à outils pour jardin. Le département avait inscrit la mention "non soumise à un permis" dans le rectangle réservé à l'autorisation et y avait apposé le timbre "autorisé", ainsi que la date du 29 mai 1964. Le document portait le timbre du département avec la mention "centrale des autorisations" ainsi que la signature du préposé.

3. Mme H______ a procédé au remplacement de la remise dans le courant de l’année 2006. Elle a parallèlement déposé auprès du département des constructions et des technologies de l’information (ci-après  : le DCTI ou le département), en date du 16 mai 2006, une requête en autorisation de construire visant la régularisation de cette construction.

4. En date du 31 mai 2006, le DCTI a rendu une décision de refus d’entrer en matière, estimant inutile d’enregistrer le dossier et de solliciter les préavis des autorités et organes compétents, compte tenu de l’incompatibilité du cabanon avec l’affectation de la zone agricole.

5. Par courrier du 9 novembre 2006, la commune de Bardonnex a informé le département de l’existence de constructions pour lesquelles elle n’avait jamais délivré de préavis dans le cadre d’un dossier de requête en autorisation de construire.

6. Suite à cette dénonciation, le DCTI a procédé, le 7 décembre 2006 à une visite de la parcelle no ______. A cette occasion, il a constaté qu’une baraque en matériaux synthétiques de 15 m2 avait été construite et ce, sans autorisation.

7. Par décision distincte mais identique du 10 janvier 2007, le DCTI a ordonné à Mmes D______ et H______ de démolir la construction litigieuse dans un délai de 90 jours, en application des art. 129 et ss de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

8. Par acte du 1er février 2007, Mme H______ a déposé un recours auprès du Tribunal administratif à l’encontre de la décision précitée, invoquant l’autorisation délivrée par le département compétent en 1964. Cette procédure a été enregistrée sous le n° de cause A/500/2007.

9. Après avoir pris connaissance dudit recours, le DCTI a invité Mme H______, par courrier du 15 mars 2007, à déposer une requête en autorisation de construire ayant pour objet le bâtiment litigieux, toute en précisant que sa décision demeurait strictement réservée.

10. Par pli du même jour, le département a sollicité la suspension de la procédure devant le tribunal de céans.

11. Conformément à la demande du DCTI, la recourante a déposé une demande en autorisation de construire par pli du 8 mai 2007, portant sur la construction du cabanon litigieux. Elle rappelait l’existence de l’autorisation de construire de 1964. Le dossier a été enregistré sous le n° APA 28277-4.

12. Dans un courrier du 11 mai 2007, la recourante a donné son accord à la suspension de la procédure.

13. Par décision du 15 mai 2007, le tribunal de céans a prononcé la suspension de la procédure. La suspension a été renouvelée par décision du 20 mai 2008.

14. Dans le cadre de l’instruction de la requête, la commune de Bardonnex a rendu le 15 juin 2007, un préavis favorable sous réserve. Le chalet devait garder les mêmes dimensions. Il devait être construit en bois indigène ou respectueux de la forêt et aucune clôture ne devait fermer la parcelle.

Le 27 juin 2007, la direction de l’aménagement du territoire a rendu un préavis défavorable au motif que la construction n’était pas conforme à la destination de la zone.

15. Par décision du 11 décembre 2007, le DCTI a refusé la demande sollicitée car elle n’était pas conforme aux art. 16a, 22 et 24 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700) ainsi qu’à l’art. 34 de l’ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1.) et aux art. 20 et 27 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30).

16. Par décision du même jour, le DCTI a persisté dans son ordre de démolition du 10 janvier 2007. Il a également infligé une amende de CHF 1'000.- à Mme H______.

17. En date du 16 janvier 2008, Mme H______ a interjeté un recours auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions, devenue depuis le 1er janvier 2009, la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après  : la CCRA), contre la décision de refus d’autorisation de construire.

18. Le même jour, la recourante a interjeté un autre recours contre l’amende administrative de CHF 1'000.- auprès du Tribunal administratif, enregistré sous le n° de cause A/132/2008.

19. Par décision du 5 février 2008, le tribunal de céans a prononcé la suspension de cette dernière procédure.

20. Lors de la comparution personnelle des parties du 18 avril 2008 par devant la CCRA, le DCTI a indiqué qu’il ferait des recherches concernant l’autorisation de construire délivrée en mai 1964.

La recourante avait démoli l’ancienne construction en 2006. Celle-ci n'étant plus étanche, elle était devenue inutilisable. Dans l'ancienne construction il y avait l'eau à l'extérieur. La nouvelle construction disposait de l'eau courante à l'intérieur.

21. Par courrier du 13 mai 2008, le DCTI a informé la CCRA qu’aucune autorisation de construire n’avait été délivrée antérieurement sur la parcelle litigieuse. Deux requêtes en autorisation de construire avaient fait l’objet d’un refus  :

- No DP 4826  : chalet et deux poulaillers. Requête refusée le 26 juin 1954  ;

- No 47454  : baraque de jardin. Requête refusée le 24 novembre 1964.

22. Par décision du 28 août 2008, la CCRA a rejeté le recours. Aucune autorisation de construire n’avait été délivrée antérieurement à la construction litigieuse, de sorte que la garantie de la situation acquise réservée aux constructions érigées de manière conforme au droit matériel en vigueur au 1er juillet 1972 ne pouvait être prise en considération.

Par ailleurs, l’activité de la recourante était sans relation avec l’affectation de la zone, de sorte que la nouvelle construction ne remplissait pas les conditions prévues par l’art. 24c al. 2 LAT.

Enfin, selon les recherches effectuées par le DCTI aucune autorisation de construire n’avait été délivrée pour une baraque de jardin ainsi que pour un poulailler sur des parcelles voisines (sic). Dès lors, il n’existait aucune inégalité de traitement.

23. Par acte du 13 octobre 2008, Mme H______ a interjeté un recours auprès du tribunal de céans contre la décision précitée rendue par la CCRA, enregistré sous le n° de cause A/3688/2008.

La décision querellée était fondée sur l’allégation du département selon laquelle aucune autorisation de construire n’avait été délivrée en 1964. Il résultait de la pièce produite par la recourante, datée du 29 mai 1964, qu'à cette époque, la construction d'un cabanon en bois, servant à entreposer des outils, n’était pas soumise à autorisation. Par conséquent, le cabanon en bois construit en 1964 était conforme aux dispositions légales et à la pratique en vigueur à l’époque. En cours de procédure, le DCTI n’avait pas contesté la validité de la pièce produite par la recourante. Il s’était borné à constater qu’aucune autorisation de construire n’avait été délivrée antérieurement sans toutefois contester ou même discuter l’authenticité du document délivré en 1964. Il avait en revanche informé la CCRA que deux autorisations de construire avaient été refusées sur des parcelles voisines, ce qui n’était d’aucune pertinence dans le cas d’espèce.

En vertu de l’art. 24c al. 2 LAT de telles constructions pouvaient faire l’objet de transformations partielles voire d’un agrandissement mesuré lorsque les bâtiments avaient été érigés légalement. De taille identique et de même nature, le cabanon érigé en 2006 ne consacrait aucune atteinte à la zone agricole et était tout à fait conforme à l’art. 24c al. 2 LAT.

La recourante concluait à la jonction des trois causes pendantes devant le Tribunal administratif ainsi qu’à l’annulation des trois décisions entreprises.

24. Par décision du 16 décembre 2008, le Tribunal administratif a ordonné la jonction des trois causes pendantes par-devers lui, le complexe de faits étant le même.

25. Le DCTI s’est déterminé par acte du 19 janvier 2009. Une cabane de jardin n’étant pas destinée à une activité agricole, elle ne pouvait pas être conforme à la zone agricole. Dès lors, elle ne pouvait être autorisée de manière ordinaire. Il ne s'agissait pas non plus d'une construction dont l’emplacement était imposé par sa destination. Elle ne pouvait donc pas bénéficier de la dérogation prévue par l’art. 24 LAT.

L’art. 24c LAT ne visait que les bâtiments qui avaient été construits légalement avant le 1er juillet 1972, date d’entrée en vigueur de la première loi fédérale sur la protection des eaux, qui avait introduit pour la première fois une séparation stricte des territoires constructibles de ceux qui ne l'étaient pas. Cette disposition n’était pas applicable en l’espèce, puisqu’aucune autre cabane n’avait jamais été autorisée par le département. De plus, la reconstruction d’un bâtiment détruit ou démoli comme c’était le cas en l’espèce, n'entrait en considération que si celui-ci était encore utilisable, conformément à son affectation et que son utilisation répondait toujours à un besoin.

En conséquence, c’était à juste titre que la CCRA avait confirmé la décision du DCTI et que celui-ci avait ordonné la démolition de la cabane construite sans autorisation. La recourante ayant contrevenu à la loi et aux ordres donnés par le département, l’amende était fondée dans son principe. Pour le surplus le montant de CHF 1'000.- était proportionné à l’ensemble des circonstances du cas d’espèce.

26. Un transport sur place a eu lieu le 20 février 2009. Selon la recourante, l’ancien cabanon avait été autorisé par décision portant le no 46717 qu'elle a produite. La recourante a versé au dossier une photo de l'ancien cabanon qui comportait un toit à un pan et qui ne présentait pas de fenêtres. Le juge délégué a constaté que la cabane actuelle, bâtie avec un matériau synthétique ressemblant au bois, comportait deux parties : une remise à outils de 1 mètre de largeur sur trois mètres environ, le reste de la cabane étant occupé par un local équipé d’une cuisine avec un w-c attenant. Le cabanon n'était pas équipé en électricité. La surface totale des deux pièces était de 20 m2 , conformément aux plans déposés au département dans le cadre de la demande d’autorisation de construire. Le toit de la cabane de la recourante était équipé d’un velux, il n'y avait pas d'avant-toit attenant à la cabane. Devant la porte d'entrée avait été construite une petite terrasse d'environ 5 m2 en dallage. La parcelle n’était pas utilisée à des fins agricoles. Une roulotte avec un coin barbecue était installée sur la parcelle voisine. Sur la parcelle située au sud de celle de la recourante une maisonnette avait été érigée.

A l’issue du transport sur place, le juge a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours, joints par décision du 16 décembre 2008, sous le numéro de cause A/500/2007, sont recevables (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige devant le tribunal de céans porte sur le refus de délivrer l'APA 28'277-4 ayant trait à la construction d'un cabanon de jardin en remplacement d'un cabanon préexistant datant de 1964, sur l'ordre de démolition de la nouvelle construction non autorisée ainsi que sur le prononcé d'une amende d'un montant de CHF 1'000.-.

A. Refus de l'autorisation de construire (APA 28'277-4)

3. a. L'aménagement du territoire est réglé par la LAT et ses dispositions cantonales d'application, notamment la LaLAT.

b. La zone agricole est régie par les art. 16 et suivants et 24 et suivants LAT ainsi que par les art. 20 et suivants LaLAT. Ces dispositions définissent notamment les constructions qui sont conformes à la zone, soit qu'elles sont nécessaires à l'exploitation agricole soit qu'elles servent au développement interne d'une activité conforme.

Tant la situation personnelle de la recourante – qui n’exerce pas d’activité agricole à titre principal – que l’utilisation de la construction litigieuse exclut la conformité de cette dernière à une affectation agricole. Pour le surplus, une cabane de jardin n'est pas une construction dont l’emplacement en zone agricole est imposé par sa destination (ATA/832/2005 du 6 décembre 2005).

4. Hors de la zone à bâtir, les constructions et installations qui peuvent être utilisées conformément à leur destination mais qui ne sont plus conformes à l’affectation de la zone bénéficient en principe de la garantie de la situation acquise (art. 24c al. 1 LAT).

Aux termes de l’art. 41 OAT, l’art. 24c LAT est applicable aux constructions et installations qui ont été érigées ou transformées conformément au droit matériel en vigueur à l’époque, mais qui sont devenues contraires à l’affectation de la zone à la suite d’une modification de la législation ou des plans d’aménagement.

Seuls sont visés les bâtiments qui ont été construits légalement avant le 1er juillet 1972, date d’entrée en vigueur de la loi fédérale sur la protection des eaux contre la pollution du 8 octobre 1971 (Leaux – RS 814.20) qui a introduit pour la première fois une séparation stricte des territoires constructibles de ceux qui ne le sont pas (ATF 129 II 396 consid. 4.2.1. p. 398).

Les parties divergent sur la question de savoir si le cabanon avait été autorisé en 1964 et peut par conséquent bénéficier de la garantie de la situation acquise.

La recourante a produit une pièce dont il résulte qu'en 1964 une demande d'autorisation concernant la construction d'une remise à outils avait été déposée auprès du département des travaux publics. En date du 29 mai 1964, le département compétent a complété ledit formulaire en mentionnant qu'une telle construction n'était pas soumise à un permis. Il a apposé dans l'espace approprié le timbre "autorisé" ainsi que celui du département, suivi de la signature du préposé.

Dans son courrier du 13 mai 2008, le DCTI a indiqué qu'aucune autorisation de construire n'avait été délivrée pour la parcelle dont la recourante était propriétaire. Il ne s'est en revanche pas prononcé sur le document produit par la recourante, ne fournissant en particulier aucune explication sur sa signification ni sur la manière dont il fallait le comprendre.

Au vu de ce qui précède, il faut admettre qu'en 1964 aucune autorisation n'était nécessaire à la construction d'une cabane à outils et qu'en apposant la mention "autorisé", le département compétent signifiait à l'administré qu'il pouvait procéder à l'édification de la construction requise. Qu'aucune autorisation de construire ne figure dans les archives paraît normal dans la mesure où il ne s'agissait pas de l'octroi d'une autorisation de construire stricto sensu, le type de construction envisagé n'en nécessitant pas.

Il s'ensuit que l'art. 24c LAT est applicable au présent litige. Reste à examiner si la reconstruction de la cabane à outils est conforme à l'art. 24c al.2 LAT.

5. a. A teneur de l’art. 24c al. 2 LAT, l’autorité compétente peut autoriser la rénovation de telles constructions et installations, leur transformation partielle, leur agrandissement mesuré ou leur reconstruction, pour autant que les bâtiments aient été érigés ou transformés légalement. Dans tous les cas, les exigences majeures de l’aménagement du territoire doivent être satisfaites.

b. Selon l’art. 42 OAT, les constructions et installations pour lesquelles l’art. 24c LAT est applicable peuvent faire l’objet de modifications si l’identité de la construction ou de l’installation et de ses abords est respectée pour l’essentiel. Sont admises les améliorations de nature esthétique (al. 1). Le moment déterminant pour l’appréciation du respect de l’identité est l’état de la construction ou de l’installation au moment de la modification de la législation ou des plans d’aménagement (al. 2). La question de savoir si l’identité de la construction ou de l’installation est respectée pour l’essentiel est à examiner en fonction de l’ensemble des circonstances. Les règles suivantes doivent en tout cas être respectées (al. 3) :

a) à l’intérieur du volume bâti existant, la surface brute de plancher imputable ne peut pas être agrandie de plus de 60 % ; 

b) lorsqu’un agrandissement n’est pas possible ou ne peut pas être exigé à l’intérieur du volume bâti existant, il peut être réalisé à l’extérieur ; l’agrandissement total ne peut alors excéder ni 30 % de la surface utilisée pour un usage non conforme à l’affectation de la zone ni 100 m2 ; les agrandissements effectués à l’intérieur du volume bâti existant ne comptent que pour moitié.

Ne peut être reconstruite que la construction ou l’installation qui pouvait être utilisée conformément à sa destination au moment de sa destruction ou de sa démolition et dont l’utilisation répond toujours à un besoin. Le volume bâti ne peut être reconstruit que dans la mesure correspondant à la surface admissible au sens de l’al. 3. L’al. 3 let. a n’est pas applicable. Si des raisons objectives l’exigent, l’implantation de la construction ou de l’installation de remplacement peut légèrement différer de celle de la construction ou de l’installation antérieure (al. 4).

c. Pour que l'identité de la construction soit respectée, il faut que son volume, son aspect extérieur et sa destination restent largement identiques, et que ne soit généré aucun nouvel impact important sur l'affectation du sol, l'équipement et l'environnement. Il n'est donc pas exigé que l'ancien et le nouveau soient tout à fait semblables, l'identité se référant - comme le précise l'art. 42 al. 2 OAT - aux traits essentiels de la construction, c'est-à-dire à celles de ses caractéristiques qui revêtent une certaine importance pour l'aménagement du territoire. De cela découle également la deuxième phrase de l'art. 42 al. 1 OAT, selon laquelle sont admises les améliorations de nature esthétique. De telles améliorations devraient donc en principe embellir la construction, mais pas en faire quelque chose d'autre. Pour déterminer si l'identité ainsi définie est respectée, il convient de considérer l'ensemble des circonstances et, partant, la conjonction de tous les aspects d'une quelconque importance pour l'aménagement du territoire. Cet examen global devra notamment prendre en compte l'aspect extérieur de la construction, la nature et l'ampleur de son utilisation, le nombre de logements qu'elle comporte, son équipement, sa vocation économique, les incidences de la transformation sur l'organisation du territoire et l'environnement, ainsi que le coût des travaux, qui reflète en effet souvent l'ampleur de l'intervention (R. MUGGLI, Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Genève 2009, art. 24c N° 22).

Il résulte des photographies produites ainsi que des déclarations de la recourante lors du transport sur place que l'ancien cabanon était en bois avec un toit à un pan. Dépourvu de fenêtre, il avait bien l'aspect d'un cabanon à outils pour le jardin. Il n'était pas équipé d'eau courante à l'intérieur, celle-ci n'étant disponible qu'à l'extérieur, pour l'arrosage. La nouvelle construction, en revanche, édifiée en matériaux synthétiques, pourvue de plusieurs fenêtres et d'un toit à deux pans a l'apparence d'un petit chalet. Il résulte tant des plans joints à la demande d'autorisation que des constatations faites par le juge délégué que l'espace dévolu au rangement des outils de jardin occupe une part mineure du volume de la construction, le reste étant consacré à un local équipé d'une cuisine avec un WC attenant.

Au vu de ce qui précède, le nouvel édifice n'a à l'évidence pas respecté l'identité de la construction précédente. En conséquence, il ne saurait bénéficier du régime dérogatoire instauré par l'art. 24c LAT. C'est ainsi à juste titre que le DCTI a refusé l'autorisation de construire et le recours contre la décision de la commission du 28 août 2008 sera ainsi rejeté.

B. Ordre de remise en état :

6. a. Selon l’art. 1 LCI, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation ou modifier la configuration du terrain.

b. Par constructions ou installations, on entend toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires (art. 1 al. 1 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RALCI - L 5 05 01).

Tel est le cas du cabanon de jardin édifié sur la parcelle de la recourante.

7. Lorsqu’une construction ou une installation n’est pas conforme aux prescriptions de la LCI et de ses dispositions d’application, le département peut notamment ordonner la remise en l’état, la suppression ou la démolition (art. 129 lit. e et 130 LCI).

8. Pour être valable, un ordre de mise en conformité, qui comporte celui de supprimer les installations litigieuses, doit en outre respecter les conditions suivantes, en application des principes de la proportionnalité et de la bonne foi (ATF 111 Ib 221 consid. 6 et jurisprudence citée ; ATA/107/2009 du 3 mars 2009 et les références citées) :

a. L’ordre doit être dirigé contre le perturbateur (ATF 114 Ib 47-48 ; 107 Ia 23).

b. Les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation (ATF 104 Ib 304 ; ATA/83/2009 du 17 février 2009 et les références citées).

c. Un délai de plus de trente ans ne doit pas s’être écoulé depuis l’exécution des travaux litigieux (ATF 107 Ia 121 = JdT 1983 I 299).

d. L’autorité ne doit pas avoir créé chez l’administré concerné – par des promesses, des informations, des assurances ou un comportement – des expectatives, dans des conditions telles qu’elle serait liée par le principe de la bonne foi (ATF 117 Ia 287 consid. 2b et jurisprudence citée ; ATA/83/2009 précité ; B. KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd. 1991, n° 509, p. 108 ).

En particulier, les installations litigieuses ne doivent pas avoir été tolérées par l’autorité d’une façon qui serait constitutive d’une autorisation tacite ou d’une renonciation à faire respecter les dispositions transgressées (RDAF 1982 p. 450 ; ATA L. du 23 février 1993 précité).

e. L'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/887/2004 du 16.11.2004 et jurisprudence citée).

Le 7 décembre 2006, un inspecteur de la police des constructions a constaté qu'une baraque avait été érigée sans autorisation sur la parcelle litigieuse. La recourante est ainsi perturbateur par comportement. Elle s'est prévalue de l'autorisation de 1964 et a invoqué le bénéfice de la situation acquise de l'art. 24c LAT. Comme exposé ci-dessus, cet argument tombe à faux. L'ordre de démolition lui ayant été notifié par pli du 10 janvier 2007, il n'est pas critiquable à cet égard.

9. Reste à examiner si le rétablissement de l'état antérieur ne porterait pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété de la recourante.

a. Selon la jurisprudence, l'ordre de démolir une construction ou un ouvrage édifié sans permis et pour lequel une autorisation ne pouvait être accordée n'est en principe pas contraire au principe de la proportionnalité. Celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour le constructeur (ATF 108 la 216 consid. 4b p. 218). L'autorité doit renoncer à une telle mesure si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle (ATF 123 II 248 consid. 4a p. 255 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_117/2008 du 12 août 2008 et les références citées ; ATA/83/2009 précité).

b. Les constructions réalisées hors zone à bâtir et non conformes à l'affectation de la zone violent fondamentalement le droit fédéral de l'aménagement du territoire et doivent être démolies (P. ZEN-RUFFINEN/C. GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction et expropriation, Berne 2001, p. 426 ss). La séparation entre zone à bâtir et zones inconstructibles est un principe essentiel d'aménagement qui, en dehors des exceptions prévues par la loi, doit demeurer d'application stricte (ATF 111 Ib 213 consid. 6b p. 225).

En l'espèce, l'intérêt public à prendre en compte est principalement celui lié au respect de la législation relative à l’aménagement du territoire. Le Tribunal fédéral a déjà souligné l'importance du maintien de la zone agricole dans le canton de Genève, « s'agissant de constructions édifiées dans la zone agricole dans un canton déjà fortement urbanisé où les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire revêtent une importance particulière, l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit l'emporte sur celui, privé, du recourant à l'exploitation de son entreprise sur le site litigieux ». Les règles relatives à la délimitation de la zone à bâtir, respectivement à la prohibition de construire hors des zones à bâtir, répondent à une préoccupation centrale de l'aménagement du territoire ; l'intérêt public sur lequel elles sont fondées ne peut qu'être qualifié d'important (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.251/2005 du 25 octobre 2005 consid. 4.2 ; ATA/107/2009 du 3 mars 2009 ; ATA/43/2008 du 5 février 2008 et les références citées).

L'intérêt privé de la recourante, atteinte par l’ordre de remise en état, est essentiellement constitué par des besoins de convenance personnelle lesquels ne sauraient justifier le maintien de la construction litigieuse. Il suffirait sinon de mettre l’autorité devant le fait accompli pour être mis au bénéfice d’une situation contraire au droit.

Partant, la décision du 10 janvier 2007, en tant qu'elle vise la mise en conformité de la parcelle de la recourante avec le refus d'autorisation, est fondée dans son principe et ne peut être que confirmée.

Enfin, la mesure envisagée est apte à atteindre le but visé et l’on ne voit pas quelle autre mesure moins incisive s’imposerait qui respecterait mieux les intérêts privés de la recourante et permettrait néanmoins de rétablir une situation conforme au droit.

C. Amende administrative :

10. La recourante estime enfin que l’amende de CHF 1'000.- qui lui a été infligée est injustifiée.

a. Est passible d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- tout contrevenant à la LCI. Le montant maximum de l’amende est de CHF 20'000.- lorsqu’une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation, mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (art. 137 al. 2 LCI). Il est tenu compte dans la fixation du montant de l’amende du degré de gravité de l’infraction, la récidive étant considérée comme une circonstance aggravante (art. 137 al. 3 LCI).

b. Les amendes administratives sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/601/2006 du 14 novembre 2006 ; ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/813/2001 du 4 décembre 2001 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139 ss).

c. En vertu des art. 103 et 104 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et 1er let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), il y a lieu de faire application des dispositions générales contenues dans le Code pénal du 21 décembre 1937 (RS - 311.0).

d. Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (HÄFELIN/MÜLLER/UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5ème éd., Zürich-Bâle-Genève 2006, p. 252, n. 1179). Selon des principes qui n’ont pas été remis en cause, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/451/2006 du 31 août 2006 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, vol. 2, Neuchâtel, 1984, pp.646-648) et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/415/2006 du 26 juillet 2006 et arrêts précités). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès (ATA/281/2006 du 23 mai 2006). Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; ATA/234/2006 du 2 mai 2006).

En l’espèce, la faute de la recourante est avérée, de sorte que le principe de l’amende est justifié. Quant à la gravité de celle-là, elle est incontestable, la recourante ayant entrepris des travaux sans autorisation, quand bien même elle ne pouvait ignorer qu'une telle autorisation était nécessaire. Preuve en soit qu'en mai 2006, simultanément à l'édification du cabanon elle a déposé une requête en autorisation de construire. Dans ce contexte, le montant de l’amende de CHF 1'000.-, qui se situe dans le bas de la fourchette, respecte le principe de la proportionnalité (ATA/107/2009 du 3 mars 2009). Pour le surplus, la recourante ne fait pas état de difficultés pécuniaires particulières l'empêchant de s’acquitter d’un tel montant, au demeurant modeste par rapport à la fourchette possible rappelée ci-dessus pour des travaux non autorisables.

11. Au vu de ce qui précède, les recours seront rejetés.

Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2007 par Madame H______ contre la décision du département des constructions et des technologies de l'information du 10 janvier 2007 ;

déclare recevable le recours interjeté le 16 janvier 2008 par Madame H______ contre la décision du département des constructions et des technologies de l'information du 11 décembre 2007 ;

déclare recevable le recours interjeté le 13 octobre 2008 par Madame H______ contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 28 août 2008 ;

 

au fond :

les rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 2000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Pierre Carera, avocat de la recourante, au département des constructions et des technologies de l'information, à la commission cantonale de recours en matière administrative ainsi qu'à l'office fédéral du développement territorial.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin et M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. a. i. :

 

 

F. Rossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :