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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3480/2005

ATA/832/2005 du 06.12.2005 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION; PERMIS DE CONSTRUIRE; ZONE AGRICOLE; PROPORTIONNALITE
Normes : LALAT.20 al.1; LALAT.27; LAT.24; LCI.1
Résumé : Recours rejeté contre l'ordre de démolition d'une cabane, d'une clôture métallique et d'un terrain de pétanque construits sans autorisation sur une parcelle sise en zone agricole. Les constructions ne pouvant bénéficier d'une dérogation.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3480/2005-TPE ATA/832/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 6 décembre 2005

dans la cause

 

Madame P _________
représentée par Me Enrico Monfrini, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION


 


1. Madame P _________ est propriétaire de la parcelle __________, feuille 56, de la commune de Plan-les-Ouates, d’une superficie de 19’139 m2, à l’adresse __________. Cette parcelle est située en zone agricole au sens de l’article 20 alinéa 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30) .

2. Lors d’un contrôle effectué le 7 juin 2005, un inspecteur de la police des constructions du département de l’aménagement, de l’équipement et du logement, devenu depuis lors département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : le DCTI), a constaté qu’une cabane d’environ 10 m2 sur plots, une clôture métallique isolant environ 2'000 m2 du reste de la parcelle et un terrain de pétanque, avaient été érigées, respectivement aménagé sur ce terrain, sans autorisation.

3. Par courrier du 16 juin 2005, le DCTI a invité Mme P _________ à lui faire part de ses observations quant aux faits susmentionnés. Il lui a également ordonné d’interrompre immédiatement la mise en place de toute autre installation en construction sur sa parcelle.

4. Le 3 juillet 2005, Mme P _________ a répondu qu’elle avait hérité de cette parcelle qui continuait d’être exploitée par son frère. Elle avait eu envie d’utiliser une partie de celle-ci pour y installer un jardin familial pour ses enfants et petits-enfants. Sur cette partie, du gazon avait été semé à l’automne 2004 et des arbres fruitiers ainsi qu’une haie avaient été plantés. La clôture avait dû être mise en place peu après en raison de vols de plusieurs arbres. Le chalet avait été monté en avril 2005 afin d’entreposer le matériel de jardin et d’agrément nécessaire. Il reposait sur des parties métalliques à même le sol. Quant au terrain de pétanque, il était composé seulement de gravier terreux du Salève et les poutres qui l’entouraient étaient posées à même le sol.

5. Par décision du 31 août 2005, le DCTI a ordonné à Mme P _________ de supprimer, dans un délai de 60 jours, la cabane de jardin, la clôture et le terrain de pétanque, leur maintien ne pouvant être envisagé, compte tenu des normes régissant la zone agricole.

6. Par acte du 3 octobre 2005, agissant par avocat, Mme P _________ a recouru contre cette décision, auprès du Tribunal administratif. Elle a conclu à son annulation. Le DCTI devait être invité à accorder un délai de deux ans pour supprimer la clôture, et à accorder une dérogation pour la cabane de jardin. Le Tribunal de céans devait dire que l’installation d’un terrain de pétanque n’était pas soumise à autorisation. Le DCTI avait excédé son pouvoir d’appréciation en ne procédant à aucune distinction entre les trois installations litigieuses et en affirmant sans autres explications que le maintien de celles-ci sans autorisation ne pouvait être envisagé. Le terrain de pétanque n’avait nécessité aucune construction. La clôture était nécessaire pour empêcher les vols et la recourante était disposée à l’enlever dès que la haie aurait suffisamment poussé. Elle avait ainsi un caractère provisoire et la sanction prise par le DCTI était disproportionnée. Quant à la cabane, la décision querellée était excessive. Elle avait coûté CHF 5'000.- et il s’agissait d’un investissement important. Elle apparaissait modeste en regard de l’ensemble du terrain dont elle n’affectait pas l’exploitation agricole.

7. Dans sa détermination du 10 novembre 2005, le DCTI s’est opposé au recours. Tous les éléments visés étaient soumis à autorisation et en ne la requérant et en ne l’obtenant pas, la recourante avait contrevenu à la loi. Une telle autorisation ne pouvait être délivrée en regard de la réglementation applicable à la zone agricole.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Selon l’article 1 alinéa 1 lettre a de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), nul ne peut, sur tout le territoire du canton, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment une clôture (ATA/832/2004 du 26 octobre 2004).

b. Par constructions ou installations, on entend toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires (art. 1 al. 1 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RALCI - L 5 05 01). Sont en particulier considérés comme tels les entrepôts et dépôts de tous genre, en particulier de matériaux inertes (art. 1 let. c in fine RALCI ; ATA/543/2005 du 16 août 2005). Le fait que la construction ou l’installation soit amovible ne suffit pas pour les dispenser de l’assujettissement au régime de l’autorisation (ATA/640/2004 du 24 août 2004).

c. En zone à bâtir, l’édification de constructions de très peu d’importance n’est pas soumise à autorisation (art. 1 al. 3 et 4 LCI). Toutefois, la parcelle de la recourante sur laquelle sont édifiées les constructions litigieuses est sise en zone agricole, de sorte que le régime dérogatoire précité ne leur est, en tout état, pas applicable (ATA/912/2004 du 23 novembre 2004).

Ainsi le Tribunal administratif retiendra-t-il que la clôture, le terrain de pétanque et la cabane de jardin sont des constructions soumises à autorisation.

3. L’article 20 alinéa 1 lettres a, b et c LaLAT prévoit que ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées à cette activité et aux personnes l’exerçant à titre principal, respectant la nature et la paysage ainsi que les conditions fixées par les articles 34 et suivants de l’ordonnance fédérale (OAT – RS 700.1). Cette dernière précise notamment que les constructions et installations qui servent à l’agriculture pratiquée en tant que loisir ne sont pas réputées conforme à l’affectation de la zone agricole.

Tant la situation personnelle de la recourante – qui n’exerce pas d’activité agricole à titre principal – que l’utilisation des constructions litigieuses excluent la conformité de ces dernières à une affectation agricole.

4. Selon l’article 24 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700), des autorisations peuvent être délivrées hors des zones à bâtir pour de nouvelles constructions ou installations ou pour tout changement d’affectation si l’implantation de ces constructions ou installations est imposée par leur destination et qu’aucun intérêt prépondérant ne s’y oppose. La teneur de l’article 27 LaLAT est identique.

Ni la clôture, ni le terrain de pétanque, ni la cabane de jardin ne sont des constructions dont l’emplacement est imposé en zone agricole par leur destination. Pour ce motif, elle ne pouvaient bénéficier d’une dérogation fondée sur l’article 27 LaLAT.

5. Lorsqu’une construction ou une installation n’est pas conforme aux prescriptions de la LCI et de ses dispositions d’application, le département peut notamment ordonner sa suppression ou sa démolition (art. 129 litt. e et 130 LCI).

Les constructions litigieuses, soumises au régime ordinaire de l’autorisation, ont été édifiées en violation de l’article 1 alinéa 1 RALCI et ne sont pas autorisables.

Le département était donc en droit d’ordonner leur démolition.

6. La recourante soutient que cette décision serait disproportionnée.

Le principe de la proportionnalité comporte traditionnellement trois aspects : d'abord, le moyen choisi doit être propre à atteindre le but fixé (règle d'aptitude; deuxièmement, entre plusieurs moyens adaptés, on doit choisir celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés (règle de nécessité); enfin, l'on doit mettre en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré avec le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (proportionnalité au sens étroit du terme ; cf. ATF 123 I 112 consid. 4e p. 121 et les arrêts cités).

Il ne fait aucun doute que la suppression des constructions illicites soit apte à atteindre le but visé, soit le rétablissement d’une situation conforme au droit. Les constructions litigieuses n’étant pas autorisables, leur démolition apparaît être le seul moyen de rétablir une situation conforme au droit.

Le fait que la recourante soit disposée à enlever la clôture litigieuse lorsque la haie aura poussé, ou le coût d’installation de la cabane, ne relève que de la convenance personnelle, la recourante ayant choisi d’aménager en jardin familial une partie de son terrain sans se préoccuper de la réglementation en vigueur, mettant ainsi l’autorité devant le fait accompli. Son intérêt privé ne peut ainsi prévaloir sur l’intérêt public au respect de la législation en matière d’aménagement du territoire et de constructions.

Le grief doit ainsi être écarté.

7. En tout point mal fondé, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 octobre 2005 par Madame P _________ contre la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 31 août 2005 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 1'000.- ;

dit que, conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14 ; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Enrico Monfrini, avocat de la recourante, au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, ainsi qu’à l’office fédéral du développement territorial .

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :