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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3090/2006

ATA/601/2006 du 14.11.2006 ( DES ) , REJETE

Descripteurs : ; HÔTELLERIE ET RESTAURATION ; AMENDE ; BRUIT ; PROPORTIONNALITÉ
Normes : LRDBH.22.al3; LRDBH.21.al2; LRDBH.21.al3; LRDBH.74.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3090/2006-DES ATA/601/2006

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 14 novembre 2006

dans la cause

 

Monsieur C______

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE LA SANTÉ


 


1. Par arrêté du 2 août 2005 du département de l'économie et de la santé (ci-après : le département ; anciennement le département de justice, police et sécurité), service des autorisations et patentes (ci-après : le SAP), Monsieur C______ a été autorisé à exploiter le café-restaurant à l'enseigne "Y______", sis rue X______ à Genève.

2. Selon le rapport de dénonciation du 20 avril 2006 à la loi sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement du 17 décembre 1987 (LRDBH - I 2 21), les gendarmes avaient été informés d'une bagarre dans cet établissement public. A leur arrivée, une femme était venue vers eux pour leur indiquer qu’elle les avait appelés.

Peu après, Monsieur M______, répondant présent sur place, avait déclaré aux gendarmes qu'il avait effectivement eu des soucis avec des clients, mais que ces derniers étaient partis.

3. Par décision du 25 juillet 2006, le SAP a infligé à M. C______ une amende administrative de CHF 3'200.- conformément à l'article 74 alinéa 1 LRDBH aux motifs qu'il n'avait pas appelé la police suite à la bagarre survenue dans son établissement et du fait de la réitération des infractions.

4. Par courrier du 29 août 2006, M. C______ a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée.

Il contestait l'amende que lui avait infligé le SAP en relevant que la police était arrivée 20 minutes après la bagarre.

A l'appui de son recours, il produisait un article de presse relatif à la rixe qui s'était déroulée dans les environs immédiats de l'établissement "Y______".

5. Dans sa réponse du 3 novembre 2006, le département a conclu à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet.

L'acte de recours ne contenait ni la désignation de la décision attaquée, ni les conclusions du recourant, ce qui constituait un motif d'irrecevabilité.

M. M______ n'appelant pas la police, M. C______ était responsable, en tant qu'exploitant du café-restaurant, de l'omission de son remplaçant sous l'angle des articles 21 et 22 LRDBH.

Enfin, l'amende n'était pas disproportionnée, vu la réitération de la même infraction les 8 et 25 novembre 2005 ainsi que le 9 février 2006. Le montant de la première amende s'élevait à CHF 400.-, la deuxième à CHF 600.- et enfin la troisième à CHF 1'600.-.

6. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sur ce point (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10)

2. a. Selon l’article 65 alinéa 1 LPA, l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de ces dispositions, il convient en particulier de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est d’ailleurs pas, en soi, un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/323/2006 du 14 juin 2006 ; ATA/172/2001 du 13 mars 2001).

c. Par ailleurs, l’absence de conclusions au sens de ce qui précède ne peut être réparée que dans le délai de recours. Hors ce délai, le fait d’être autorisé à compléter une écriture de recours (art. 65 al. 3 LPA) ne permet pas de suppléer au défaut de conclusions (SJ 1997 p. 42).

En l’espèce, mêmes si les conclusions du recourant ne sont pas explicites, il ressort de ses écritures que celui-ci entend contester l'amende qui lui a été infligée, suite à la bagarre survenue à l'extérieur de son établissement. En d'autres termes, le tribunal de céans ainsi que le département ont la possibilité de comprendre les intentions du recourant. De plus, ce dernier verse a l'appui de son recours un article de presse en soulignant divers passages dans le texte, expliquant le déroulement de la bagarre.

Par conséquent, le recours est recevable à la forme.

3. A défaut de conclusions claires et explicites, il est difficile de savoir si le recourant conteste l'infliction d'une amende ou seulement son montant. Pour cette raison, le tribunal de céans examinera ces deux point litigieux.

Le recourant conteste l'amende qui lui a été infligée.

a. Selon l'article 22 alinéa 3 LRDBH, si l'ordre est sérieusement troublé ou menace de l'être, que ce soit à l'intérieur de l'établissement ou dans ses environs immédiats, il [l'exploitant] doit faire appel à la police.

b. Selon l'article 21 alinéa 2 LRDBH, en cas d'absence de l'établissement, il doit désigner un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs, qui assume la responsabilité de l'exploitation. Il répond du comportement adopté par les personnes participant à l'exploitation et à l'animation de l'établissement dans l'accomplissement de leur travail (art. 21 al. 3 LRDBH).

c. Alors que le projet de loi précisait simplement que si l'ordre était sérieusement troublé ou menacé de l'être, l'exploitant devait faire appel à la police (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1985 III p. 4209), la commission ad hoc du Grand Conseil a ajouté les termes "que ce soit à l'intérieur de l'établissement ou dans ses environs immédiats", pour bien préciser que la responsabilité de l'exploitant allait au-delà des strictes limites de son établissement ou de sa terrasse (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1987 V p. 6426).

En l'espèce, le recourant répond de l'inaction de M. M______ qui n'a pas appelé la police quand il a constaté un trouble dans l'ordre public. En outre, il ne conteste ni l'existence d'une bagarre ayant eu lieu à la fermeture de l'établissement, ni l'omission de son remplaçant.

Par conséquent, l'amende a été valablement infligée au recourant.

4. Reste encore à examiner la quotité de l'amende infligée au recourant.

a. Selon l'article 74 alinéa 1 LRDBH, le département peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.-.

b. Pour fixer le montant de la sanction, l'administration jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATA/163/2005 du 22 mars 2005 et les références citées). La juridiction de céans ne la censure qu'en cas d'excès. Le département prend en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de la proportionnalité (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1985 III p. 4275).

c. Les amendes administratives sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la peine administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/453/2006 du 31 août 2006 ; P. MOOR, Droit administratif: les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139s ; P. NOLL et S. TRECHSEL, Schweizerisches Strafrecht : allgemeine Voraussetzungen der Strafbarkeit, AT I, 6ème édition, Zurich 2000, p. 37). En vertu de l'article 1 alinéa 2 de la loi pénale genevoise du 20 septembre 1941 (LPG - E 4 05), il y a lieu de faire application des dispositions générales contenues dans le code pénal du 21 décembre 1937 (RS - 311.0), sous réserve des exceptions prévues par le législateur cantonal à l'article 24 LPG.

En l'espèce, le recourant a déjà fait l'objet de trois sanctions administratives pour une violation de l'article 22 LRDBH.

Le SAP n'a donc pas violé le principe de la proportionnalité en infligeant une amende de CHF 3'200.- au recourant qui commettait une quatrième infraction.

Par conséquent, le montant de l'amende est justifié.

5. Entièrement mal fondé, le recours sera donc rejeté ; un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 août 2006 par Monsieur C______ contre la décision du département de l'économie et de la santé du 25 juillet 2006 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1'000.- ;

communique le présent arrêt à Monsieur C______ ainsi qu'au département de l'économie et de la santé.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Paychère, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, juges.

 

 

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :