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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3294/2013

ATA/488/2014 du 24.06.2014 ( AIDSO ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS ; DÉCISION ; BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS D'ASSISTANCE ; ASSISTANCE PUBLIQUE
Normes : LIASI.11 ; LIASI.13 ; LIASI.21 ; LIASI.26 ; RIASI.10 ; RIASI.11
Résumé : Annulation de la décision du service des prestations complémentaires concernant la demande de restitution du subside à l'assurance-maladie d'une personne percevant l'AI. La restitution avait été demandée suite à l'acquisition par la mère et le beau-père du recourant d'un bien immobilier à Genève. Renvoi du dossier pour coordination avec la pratique de l'Hospice Général et précision sur les éléments retenus dans le calcul. Définition de la communauté des majeurs dans le cadre de la LIASI.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3294/2013-AIDSO ATA/488/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 juin 2014

1ère section

 

dans la cause

 

M. A______

agissant par sa mère Mme B______ et son beau-père M. C______
représentés par Me Nils De Dardel, avocat

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES



EN FAIT

1) M. A______ est originaire du Brésil et est arrivé en Suisse le 13 avril 2006 pour vivre avec sa mère, Mme B______, dans le cadre des dispositions sur le regroupement familial.

Il est né le ______ 1991. Bien qu'il soit actuellement majeur, l'autorité parentale a été restituée à sa mère par ordonnance du Tribunal tutélaire du 25 mai 2009.

M. C______ est l'époux de Mme B______. Il n'est pas le père de M. A______. Néanmoins, il vit avec lui.

Tous les trois vivent sous le même toit avec un enfant mineur, fils de Mme B______.

2) M. A______ souffre d'un handicap mental et est au bénéfice d'une rente de l'assurance invalidité (ci-après : rente AI). Suite à une décision de la commission cantonale d'indication, qui fait partie du département de l'emploi, des affaires sociales et de la santé (ci-après : le département), il a été admis dans un centre de jour géré par le service des résidences et des ateliers de développement personnel pour personnes handicapées mentales, à compter du 15 mars 2010.

3) Le 7 avril 2010, Mme B______ a fait une demande de prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : PCF), de prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : PCC) et d'assistance, pour son fils sous son autorité parentale.

4) Suite à divers échanges avec le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC), une décision d'octroi, dès le 1er avril 2010, de subside pour l'assurance-maladie a été rendue le 7 septembre 2010.

5) Le 18 juillet 2012, Mme B______ et M. C______ ont acheté un appartement, part de copropriété de trente-neuf millièmes (39/1000ème) d'un immeuble soumis au régime de la propriété par étage (ci-après : PPE) à Thônex. Chacun en est propriétaire par moitié.

6) Par courriel du 20 juin 2013, le SPC a requis du service de l'assurance-maladie la suppression, dès le 1er août 2012, du droit au subside pour
M. A______ au motif de « la perte du droit économique ».

7) Par décision du 21 juin 2013, le SPC a signifié à Mme B______ que la modification de la situation avait abouti à une suppression du droit au subside de l'assurance-maladie dès le 1er juillet 2013. Le plan de calcul était le suivant : dépenses reconnues moins le revenu déterminant (CHF 8'196.- (besoins/forfait) – CHF 18'720.- (rente AI) = - CHF 10'524.-).

8) À la même date, le SPC, au nom et pour le compte du service de l'assurance-maladie, a enjoint, par décision, Mme B______, dans un délai de 30 jours, de rembourser CHF 4'456,30 (soit un montant de CHF 1'967,50 pour l'année 2012 [du 1er août 2012 au 31 décembre 2012] et CHF 2'488,80 pour l'année 2013 [du 1er janvier 2013 au 30 juin 2013]) au motif que les subsides d'assurance-maladie avaient été versés indûment.

9) Par acte du 28 juin 2013, Mme B______ et M. C______ ont formé opposition contre « la décision de remboursement de subsides d'assurance-maladie ».

Ils ne comprenaient pas la décision de l'autorité. La situation de M. A______ n'avait pas changé, la leur non plus. Aussi, ils demandaient des explications au SPC.

10) Le 22 juillet 2013, le SPC a répondu à Mme B______ et à M. C______.

La décision en restitution des subsides était rétroactive à partir de la date de l'achat de leur bien immobilier, soit dès le 1er août 2012. Le calcul des prestations prenait en compte la part du loyer dans les dépenses du bénéficiaire. Jusqu'alors, ledit loyer correspondait au bail de l'appartement sis à Thônex. Ce bail n'étant plus en vigueur, les prestations devaient être réexaminées sans tenir compte du loyer mais de la valeur locative du logement. Pour ce faire, le SPC leur a imparti un délai afin de lui transmettre la copie de la déclaration fiscale immobilière ainsi que le justificatif de la résiliation du bail.

11) Dans les délais, les intéressés ont fourni une copie de la réponse de la régie concernant la résiliation du bail, acceptée pour le 31 août 2012, ainsi que le document fiscal demandé indiquant comme valeur locative brute du bien immobilier le montant de CHF 18'517.-.

12) Par décision sur opposition du 17 septembre 2013, le SPC a rejeté l'opposition formée par les intéressés le 28 juin 2013.

Les décisions d'octroi de prestations pouvaient être modifiées avec un effet rétroactif lorsque les conditions de la révocation étaient réalisées. L'obligation de restituer les prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n'étaient pas subordonnées à une violation de l'obligation de renseigner. Il s'agissait uniquement de rétablir l'ordre légal après la découverte d'un fait nouveau.

Après nouvel examen du dossier, il avait été tenu compte d'un montant de CHF 5'049,25 à titre de loyer, sur la base de la formule mathématique fournie par l'Office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) : (Valeur locative brute de l'immeuble + Forfait pour frais accessoires) x Nombre de personnes incluses dans le calcul des prestations d'aide sociale / Nombre de personnes vivant dans le bien immobilier ; soit (CHF 18'517.- + CHF 1'680.-) x ¼ = CHF 5'049,25.

L'excédent des dépenses pour 2012 s'élevait à CHF 5'319.-/an (revenus - dépenses) alors que la prime moyenne cantonale d'assurance-maladie pour jeune adulte était de CHF 5'088.-/an. L'excédent des dépenses pour 2013 s'élevait à 5'475.-/an (revenus - dépenses) alors que la prime moyenne cantonale d'assurance-maladie pour jeune adulte était de CHF 5'232.-/an.

Il en résultait que M. A______ n'avait plus le droit aux subsides de l'assurance-maladie à partir du 1er août 2012, l'excédent de ses dépenses étant supérieur à la prime moyenne cantonale d'assurance-maladie pour jeune adulte. Le montant réclamé devait être remboursé.

13) Par acte daté du 13 octobre 2013 et expédié le 15 octobre 2013,
Mme B______ et M. C______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition du SPC, déclarant y faire opposition. Ils dénonçaient une injustice et demandaient à ce que la chambre de céans tienne compte des éléments suivants.

M. A______ était adulte mais vivait avec un handicap mental, ce qui avait conduit à la prolongation de l'autorité parentale de sa mère par décision judiciaire.

Il n'était pas compréhensible que la détérioration financière due à l'achat d'une propriété conduisît à une suppression du subside de l'assurance-maladie.

Par ailleurs, la prise en compte de leur fils mineur dans le calcul du SPC était remise en cause.

14) Dans sa réponse du 23 octobre 2013, le SPC a conclu au rejet du recours et a indiqué persister dans les arguments de la décision querellée, sans formuler d'observations complémentaires.

15) Le 15 novembre 2013, le jugé délégué a imparti un délai au 16 décembre 2013 aux recourants afin de lui transmettre d’éventuelles observations supplémentaires. Passé ce délai, la cause serait gardée à juger.

16) Le 21 novembre 2013, sous la plume de leur avocat nouvellement constitué, les recourants ont sollicité et – obtenu - un délai complémentaire afin de pouvoir répliquer aux observations du SPC.

D'ores et déjà, le calcul du SPC concernant le forfait d'entretien ainsi que le montant du loyer était erroné. Le fils mineur ne devait en effet pas être pris en considération dans lesdits calculs, la loi faisant état de « communautés de majeurs », la leur était donc constituée de trois personnes uniquement.

La charge financière effective du logement était beaucoup plus élevée que le montant retenu. L'appartement avait été acheté pour un montant de CHF 1'145'000.- et financé par une hypothèque de CHF 738'000.- dont les intérêts étaient de 2,71%, soit CHF 20'000.- par an, auxquels s'ajoutaient des frais d'entretien ainsi qu'un amortissement annuel de la dette hypothécaire de CHF 23'985.-.

Le loyer devait être recalculé. La formule mathématique utilisée par le SPC n'avait pas de relation avec les dispositions de droit cantonal et n'était pas justifiée par un document officiel accessible au public.

17) Dans leur réplique du 16 décembre 2013, les recourants ont conclu à l'annulation de la décision litigieuse, à l'octroi de prestations annuelles de CHF 5'463.- et à la prise en charge des cotisations à l'assurance-maladie dès le
1er janvier 2013.

Le calcul du loyer devait se faire selon les règles légales de l'art. 269 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), notamment celles sur le rendement. Ainsi, devaient être pris en compte le rendement des fonds propres par CHF 13'064.-, les intérêts hypothécaires par CHF 19'999.-, les charges de la copropriété par CHF 4'236.- et les frais de chauffage et d'eau chaude par CHF 2'000.-.

18) Le 8 janvier 2014, le juge délégué a indiqué aux parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable en ces points (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. À teneur de l’art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/186/2014 du 25 mars 2014 ; ATA/199/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/343/2012 du 5 juin 2012).

Cette notion de l’intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l’art. 103 let. a de l'ancienne loi fédérale d’organisation judiciaire du 16 décembre 1943 et qui était, jusqu’à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l’art. 98a de la même loi (ATA/186/2014 précité ; ATA/399/2009 du 25 août 2009 ; ATA/207/2009 du 28 avril 2009 et les arrêts cités). Elle correspond aux critères exposés à l’art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, (LTF - RS 173.110), en vigueur depuis le 1er janvier 2007, que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d’unité de la procédure qui figure à l’art. 111 al. 1 LTF (Arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; 1C_76/2007 du 20 juin 2007 consid. 3 ; 1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.2 ; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de l’organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 pp. 4’126 ss et 4’146 ss).

L’intérêt digne de protection représente tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l’annulation de la décision attaquée. Cet intérêt consiste donc dans l’utilité pratique que l’admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Cet intérêt doit être direct et concret ; en particulier, le recourant doit se trouver, avec la décision entreprise, dans un rapport suffisamment étroit, spécial et digne d’être pris en considération. Il doit être touché dans une mesure et avec une intensité plus grande que l’ensemble des administrés (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2).

Le recours d’un particulier formé dans l’intérêt général ou dans l’intérêt d’un tiers est exclu (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; ATF 133 V 239 consid. 6.3 ; ATA/586/2013 du 3 septembre 2013 et les arrêts cités; François BELLANGER, La qualité de partie à la procédure administrative, in : Thierry TANQUEREL/ François BELLANGER, Les tiers dans la procédure administrative, 2004,
p. 43 ss). Les tiers ne sont en effet pas touchés par une décision de la même manière que son destinataire formel et matériel, dans la mesure où elle ne leur octroie pas directement des droits ni ne leur impose des obligations (François BELLANGER, La qualité de partie à la procédure administrative, in : Thierry TANQUEREL/François BELLANGER, op. cit., p. 43 ss). D’une manière générale, la jurisprudence et la doctrine n’admettent que de manière relativement stricte la présence d’un intérêt propre et direct lorsqu’un tiers désire recourir contre une décision dont il n’est pas le destinataire (ATF 133 V 239 consid. 6.3).

b. Dans le cas d'espèce la décision litigieuse concerne uniquement M. A______. Il est le seul bénéficiaire des prestations en cause. En vertu de la loi, la qualité de partie à recourir appartient à lui seul.

Par conséquent, ni sa mère, ni son beau-père, ne peuvent se prévaloir de la qualité de partie dans la présente procédure. Toutefois, conformément à l'art. 9 LPA, les parties peuvent se faire représenter par un ascendant majeur. Mme B______, étant la mère du bénéficiaire, peut prendre part à la présente procédure uniquement en tant que représentante.

M. C______ n'est quant à lui pas le père de M. A______. Il ne peut pas non plus se prévaloir de la qualité de partie dans la présente procédure, mais il peut représenter son beau-fils avec le représentant légal de celui-ci, soit la mère du recourant, vu notamment l'art. 299 CC qui précise que chaque époux est tenu d'assister son conjoint de façon appropriée dans l'exercice de l'autorité parentale à l'égard des enfants de l'autre et de le représenter lorsque les circonstances l'exigent.

3) a. Aux termes de l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas, en soi, un motif d’irrecevabilité, pourvu que l’autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/818/2013 du 18 décembre 2013 ; ATA/844/2012 du 18 décembre 2012 ; ATA/681/2010 du 5 octobre 2010). Une requête en annulation d’une décision doit, par exemple, être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/818/2013 précité ; ATA/844/2012 précité ; ATA/670/2010 du 28 septembre 2010 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, Vol. II, 2011, 3ème éd., p. 624 n. 5.3.1.2).

Selon la jurisprudence constante, les conclusions doivent être complétées dans le cadre du délai de recours. Au-delà de celui-ci, elles sont irrecevables (ATA/96/2014 du 18 février 2014 ; ATA/34/2014 du 21 janvier 2014 ; ATA/757/2012 du 6 novembre 2012 ; ATA/99/2012 du 21 février 2012 ; ATA/12/2012 du 10 janvier 2012).

b. En l'espèce, le recours, interjeté par devant la chambre de céans le
13 octobre 2013, ne peut porter que sur le remboursement des subsides de l'assurance-maladie considérés par l'intimé comme indûment versés entre le
1er août 2012 et le 30 juin 2013. Le recours ne peut en effet porter que sur l'objet de la décision querellée (ATA/18/2013 du 8 juin 2013 consid. 10), à savoir uniquement la restitution des subsides de l'assurance-maladie qui auraient été versés indûment au bénéficiaire.

Dans le complément d'observations du 16 décembre 2013 sous la plume de son mandataire, le recourant a conclu à l'annulation de la décision litigieuse, à l'octroi de prestations annuelles de CHF 5'463.- et à la prise en charge de ses cotisations d'assurance-maladie dès le 1er janvier 2013.

Ces nouvelles conclusions sont doublement irrecevables ; intervenant après le délai de recours d'une part et ne portant pas sur l'objet de la décision querellée d'autre part, qui règle uniquement le remboursement des subsides de l'assurance-maladie versés entre le 1er août 2012 et le 30 juin 2013.

Dès lors, seules les conclusions en annulation de la décision querellée sont recevables à l'exclusion de celles concernant l'octroi de prestations annuelles et la prise en charge de l'assurance-maladie dès le 1er janvier 2013.

4) Le litige porte sur le point de savoir si M. A______ avait le droit, suite à l'acquisition par sa mère et son beau-père d'un bien immobilier, aux subsides d'assurance-maladie, soit entre le 1er août 2012 et le 30 juin 2013, et à défaut s'il doit restituer les montants perçus.

5) Selon l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. Ce droit fondamental à des conditions minimales d'existence ne garantit toutefois pas un revenu minimum, mais uniquement la couverture des besoins élémentaires pour survivre d'une manière conforme aux exigences de la dignité humaine, tels que la nourriture, le logement, l'habillement et les soins médicaux de base (Arrêt du Tribunal fédéral 8C_56/2012 du 11 décembre 2012 consid. 1.1 ; ATF 135 I 119 consid. 5.3).

L’aide sociale a pour but d’éviter les situations de nécessité, respectivement d’y remédier. Il en découle que l’un des principes qui prévaut en matière d’assistance est que les causes de l’indigence ne sont pas déterminantes (ATF 121 I 367/ JdT 1997 I 285, 287 et 288 consid. 3b et 3d). Ainsi, l’aide sociale doit être accordée immédiatement pour satisfaire les besoins vitaux, indépendamment des causes de la situation d’indigence (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.115/2001 du
11 septembre 2001 consid. 2c). Le refus de l’aide ne peut se justifier qu’en cas de comportement abusif de la personne concernée (ATF 121 I 367 / JdT 1997 I 285 consid. 3 ; ATA/108/2013 du 19 février 2013 consid. 3b ; ATA/452/2012 du
30 juillet 2012).

Le droit fondamental garanti par l’art. 12 Cst. ne vise pas la personne qui peut, de façon actuelle, effectivement et légalement, se procurer les moyens nécessaires à son existence (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.147/2002 du 4 mars 2003 consid. 3.3 ; ATA/108/2013 susvisé consid. 3c ; ATA/452/2012 susvisé).

L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, lequel est rappelé par l’art. 12 Cst. La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/452/2012 du 30 juillet 2012 ; F. WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, Berne 1995, p. 77).

6) Dans le canton de Genève, le principe constitutionnel de l'art. 12 Cst. a trouvé une concrétisation dans la loi sur l'insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04).

La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel
(art. 1 al. 1 LIASI). Les prestations de l'aide sociale individuelle comprennent l'accompagnement social, des prestations financières et une insertion professionnelle (art. 2 LIASI). L'aide financière est accordée à la personne majeure qui n'est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont elle a la charge (art. 8 al. 1 LIASI).

À teneur de l'art. 11 al. l LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière prévues par cette loi les personnes qui :

a) ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève ;

b) ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et

c) répondent aux autres conditions de la LIASI.

7) L’Hospice général (ci-après : hospice) est l’organe d’exécution de la LIASI sous la surveillance du département (art. 3 al. 1 LIASI). Aux termes de l’art. 3 al. 2 LIASI, le SPC gère et verse, pour le compte de l’hospice, les prestations d’aide sociale pour les personnes ayant atteint l’âge de l’AVS ou au bénéfice d’une rente AI.

Le SPC reçoit et instruit les demandes de prestations visées par l’art. 3 al. 2 LIASI, procède aux calculs, rend les décisions et verse les prestations. Le versement de ces dernières émarge de son propre budget (art. 22 al. 1 Règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle - RIASI -
J 4 04.01).

8) L'art. 13 LIASI définit l'unité économique de référence. Les prestations d'aide financière sont accordées au demandeur et au groupe familial dont il fait partie (al.1) ; le groupe familial est composé du demandeur, de son conjoint, concubin ou partenaire enregistré vivant en ménage commun avec lui, et de leurs enfants à charge (al. 2), soit notamment les enfants mineurs (al. 3).

9) a. Selon l’art. 21 al. 1 LIASI, ont droit aux prestations d’aide financière, les personnes dont le revenu mensuel déterminant n’atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par le RIASI.

b. En vertu de l'art. 21 al. 2 LIASI font partie des besoins de base :

a) le forfait pour l'entretien fixé par règlement du Conseil d'Etat ;

b) le loyer ainsi que les charges ou, si le demandeur est propriétaire de sa demeure permanente, les intérêts hypothécaires, dans les limites fixées par règlement du Conseil d'Etat ;

c) la prime d'assurance-maladie obligatoire des soins, mais au maximum le montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur, sous réserve des exceptions temporaires prévues par règlement du Conseil d'Etat pour les nouvelles personnes présentant une demande d'aide sociale et dont la prime d'assurance-maladie obligatoire dépasse la prime moyenne cantonale;

d) les prestations circonstancielles destinées à prendre en charge d'autres frais, définies par règlement du Conseil d'Etat.

10) a. L'art. 26 al.1 LIASI précise que la prestation due à une personne qui vit en ménage commun avec un ascendant ou un descendant est calculée selon les dispositions sur la communauté des majeurs prévue par le RIASI.

b. A teneur de l'art. 10 RIASI, la communauté des majeurs est composée du bénéficiaire et de son groupe familial, du parent en ligne directe ascendante ou descendante, ainsi que, le cas échéant, du propre groupe familial de ces derniers.

c. La chambre de céans, dans un arrêt récent a précisé qu'il y a lieu de différencier et de traiter de manière distincte les situations de la communauté des majeurs et la cohabitation. Il ressort du texte de l'art. 26 al. 1 LIASI qu'une communauté de majeurs est formée par le bénéficiaire de prestations financières et ses ascendants ou descendants, l'arrière-plan de cette notion étant, selon les travaux préparatoires, la notion de famille et l'obligation alimentaire découlant du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (RS 210- CCS). Or, en prévoyant de manière générale à l’art. 10 al. 1 RIASI que, le cas échéant, le groupe familial de l'ascendant du demandeur de prestations est inclus dans la communauté de majeurs à laquelle appartient ce dernier, le Conseil d'Etat ne s'est pas limité à fixer des modalités de calcul de prestations mais a étendu la notion de communauté de majeurs à des tiers n'ayant pas d'obligation alimentaire envers ce demandeur. La teneur de l'art. 26 al. 1 LIASI n'autorise pas une telle extension. L’art. 10 al. 1 RIASI est donc dépourvu de base légale sur ce point (ATA/455/2013 du 30 juillet 2013 consid. 9).

Ainsi, la communauté des majeurs est formée du père, de la mère du demandeur et des enfants majeurs de ce dernier. A contrario, l'enfant mineur est exclu de la communauté des majeurs.

d. Dans l'arrêt ATA/455/2013, la chambre de céans a conclu que le régime de la cohabitation (art. 26 al. 2 LIASI ; art. 11 RIASI) s'appliquait au beau-père de la recourante, ce dernier n'ayant aucun lien de parenté ni d'obligation alimentaire envers elle.

Cela étant, selon l'art. 159 CC, les époux s'obligent mutuellement à assurer la prospérité de l'union conjugale d'un commun accord et à pourvoir ensemble à l'entretien et à l'éducation des enfants (al. 2 CC) et ils se doivent l'un à l'autre fidélité et assistance (al. 3). L'art. 163 al. 1 CC précise que mari et femme, contribuent, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de la famille. L'article précité ne traite pas uniquement de l'entretien de l'union conjugale, mais vise l'entretien de la famille. La famille à entretenir englobe ainsi les époux et les enfants en commun ; elle s'étend toutefois aussi aux personnes légalement à charge de l'un ou des deux époux compte tenu des situations spécifiques (Pascal PICHONNAZ, Commentaire romand (éd. 2010), Code civil I, n. 7 ad , art. 163 CC).

11) Le recourant est majeur et domicilié à Genève. Il souffre d'un handicap mental et est au bénéfice d'une rente. De par cette situation personnelle, l'autorité parentale de sa mère a été prolongée lorsqu'il est devenu majeur (art. 385 al. 3 aCC). Ainsi, le recourant est, pour ses besoins non couverts par les assurances sociales, à la charge de celle-ci, sur la base à tout le moins de
l'art. 328 CC.

Suite à l'acquisition d'un bien immobilier, par sa mère et son beau-père, le droit au subside pour l'assurance-maladie du recourant a pris fin, l'excédent de ses dépenses étant supérieur à la prime moyenne cantonale d'assurance-maladie pour jeune adulte.

Il est fait, en substance, grief à l'autorité intimée de s'être basée sur une formule mathématique abstraite concernant le calcul du loyer et le forfait pour l'entretien, ainsi que d'avoir compté dans ledit calcul le frère mineur.

12) M. A______ vit avec sa mère, son beau-père ainsi qu'avec son frère mineur, dans le logement que sa mère et son beau-père ont acquis en juillet 2012.

Comme vu plus haut, l'enfant mineur ne devra pas être compté dans la communauté des majeurs.

Le recourant est légalement à la charge de sa mère, parallèlement à une décision judiciaire de restitution de l'autorité parentale. Ainsi, le beau-père du recourant a une obligation indirecte envers lui découlant de ses devoirs d'époux à l'égard de la mère. Le beau-père fait dès lors partie de la communauté des majeurs, ce qui n'est du reste pas contesté.

Partant, dans le cadre du calcul du forfait pour l'entretien et du loyer, le SPC devra se baser sur une communauté de majeurs de trois personnes, à savoir le recourant, sa mère et son beau-père en lieu et place de la communauté de quatre personnes retenue par la décision querellée.

Ce grief sera donc admis.

13) Le recourant constate également que le calcul utilisé par l'autorité pour obtenir le montant du loyer n'est pas accessible au public.

Ce grief tombe à faux car le SPC se base sur l'art. 16a de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI – RS 831.301), qui peut être trouvée sur le site internet de la Confédération.

14) Enfin le recourant conteste le calcul même du loyer et propose d'appliquer l'art. 296 CO. Toutefois, sa proposition ne trouve aucun fondement légal et ne peut être retenue.

En l'occurrence, la formule utilisée par le SPC est :

-         (Valeur locative brute de l'immeuble + Forfait pour frais accessoires) x Nombre de personnes incluses dans le calcul des prestations d'aide sociale / Nombre de personnes vivant dans le bien immobilier.

Or, l'intimé n'expose pas pour quel motif les intérêts hypothécaires ne sont pas pris en compte à l'exclusion d'autres éléments, l'art. 21 al. 2 let. b LIASI ne mentionnant que cette charge. Il est rappelé que les notions et calculs de la LIASI doivent être distingués de ceux des prestations complémentaires.

La cause sera renvoyée sur ce point pour motivation.

La solution devra tenir compte de la pratique de l'hospice général dans des cas similaires et être coordonnée avec celle-ci.

15) La décision indiquera en outre de manière précise les éléments et modalités de calcul du loyer et du forfait d'entretien, le montant de CHF 8'196.- figurant dans la décision d'opposition n'étant nullement expliqué.

16) Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. La décision du SPC sera annulée. Le dossier lui sera renvoyé pour une nouvelle décision tenant compte du fait que le fils mineur ne forme pas une communauté des majeurs avec le recourant et se prononçant sur les éléments à prendre en compte en tant que besoins de base dans le calcul du droit aux prestations.

17) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourant n'y ayant pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 octobre 2013 par M. A______, agissant par sa mère Mme B______ et son beau-père M. C______, contre la décision du service des prestations complémentaires du 17 septembre 2013 ;

au fond :

l'admet partiellement;

annule la décision du service des prestations complémentaires du 17 septembre 2013;

renvoie la cause au service des prestations complémentaires pour une nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nils De Dardel, avocat du recourant ainsi qu'au service des prestations complémentaires.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :