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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/964/2012

ATA/452/2012 du 30.07.2012 ( AIDSO ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/964/2012-AIDSO ATA/452/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 juillet 2012

 

dans la cause

 

 

Madame M______ agissant pour elle-même et en qualité de représentante de son fils R______
représentés par Me Maurice Utz, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1. Madame M______, née le ______ 1964, originaire d’Espagne, a résidé à Genève entre décembre 1979 et juillet 2007, étant au bénéfice, en dernier lieu, d’un permis d’établissement. Pendant cette période, elle a donné naissance à deux enfants, A______, née le ______ 1991, et R______, né le ______ 1999.

2. Elle est retournée s’installer en Espagne en 2007 avec ses enfants.

3. Le 4 mars 2009, Mme M______ est revenue à Genève avec ces derniers et a formé une requête auprès de l’office cantonal de la population (ci-après : OCP) en restitution de son permis d’établissement ou en délivrance d’une autorisation de séjour pour elle-même et ses enfants.

4. Dès le 1er juin 2009, l’intéressée et son fils ont bénéficié de la part de l’hospice général (ci-après : HG) de prestations d’aide financière exceptionnelle réservée aux personnes sans autorisation de séjour mais ayant entrepris des démarches auprès de l’OCP dans le but d’en obtenir.

5. Le 7 avril 2011, l’OCP a rejeté la requête de Mme M______ et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 4 juin 2011 pour quitter la Suisse. Cette décision concernait également son fils R______. Sa fille A______, majeure, a fait de son côté l’objet d’une décision distincte mais également négative de la part de l’OCP.

6. Mme M______ n’a pas recouru contre la décision précitée, si bien que celle-ci est entrée en force. En revanche, sa fille A______ a recouru contre la décision qui la concernait et son recours est actuellement pendant devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

7. A la suite du refus de l’OCP du 7 avril 2011, l’HG a cessé de servir des prestations d’assistance à Mme M______ et à son fils dès le 1er juillet 2011, à l’exception des cotisations d’assurance-maladie qui ont été payées jusqu’au 31 juillet 2011. En revanche, sa fille A______ a continué à en recevoir dans l’attente de l’issue de son recours.

8. Le 17 janvier 2012, Mme M______ a requis de l’HG l’octroi d’une aide d’urgence, en application des art. 17 et 19 du règlement d’exécution de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01).

A la suite du refus de l’OCP de lui accorder un permis de séjour, elle se trouvait en situation de séjour irrégulière tant qu’elle n’avait pas trouvé une activité lucrative qui lui permettrait de solliciter une autorisation de séjour, en vertu de l’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres d’autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681). Elle partageait le même logement que ses deux enfants. Sa fille A______ bénéficiait des prestations de l’HG, une partie du loyer étant prise en charge par cette institution. Elle avait demandé à de nombreuses reprises que l’HG reprenne le versement de ses prestations d’assistance, ce qu’il avait refusé de faire, ceci de façon inacceptable. Elle le mettait en demeure de statuer dans les quarante-huit heures, faute de quoi un recours serait déposé pour déni de justice. Elle ne comprenait pas que cet organisme s’acquitte d’une part de loyer en faveur de sa fille, majeure, sans lui accorder aucune aide, ni à son fils, pour le même logement.

9. Le 2 février 2012, l’HG a refusé d’entrer en matière sur la demande de prestations d’aide financière, les conditions d’octroi décrites à l’art. 17 RIASI n’étant pas réalisées. Mme M______ n’avait plus d’attestation de résidence de la part de l’OCP depuis le 4 juin 2011. Si elle était à la recherche d’un emploi et entendait solliciter une autorisation de séjour en application de l’ALCP, elle devait fournir une attestation de résidence de l’OCP.

10. Le 5 mars 2012, Mme M______, agissant pour son compte et pour celui de son fils, a formé opposition à la décision de l’HG du 2 février 2012. Elle concluait, à titre provisionnel, à l’octroi d’un forfait d’entretien et, sur le fond, à l’annulation de la décision du 2 février 2012 ainsi qu’à l’octroi d’une aide exceptionnelle au sens de l’art. 19 RIASI, accordée à titre rétroactif depuis juin 2011.

Elle n’avait pas pu recourir contre la décision de l’OCP du 7 avril 2011 rejetant sa demande d’autorisation de séjour et prononçant son renvoi car elle n’avait pas reçu de récépissé postal lui permettant d’aller chercher le pli recommandé à la poste. Elle vivait avec son fils et sa fille dans un appartement qu’elle sous-louait dont le bail principal avait été résilié à la suite du non-paiement du loyer.

Elle se trouvait sans aucun revenu et gravement atteinte dans sa santé. Elle souffrait d’un diabète entraînant une insulinodépendance, de même que d’un état dépressif attesté par certificat médical de la Doctoresse Marina Constaninescu du 28 juin 2011. La famille ne mangeait pas à sa faim, vivant grâce aux prestations que l’HG accordait à sa fille A______, qui avait pu recourir contre la décision de refus de l’OCP la concernant, et grâce aux Colis du Cœur, qui ne leur procuraient cependant pas une aide alimentaire suffisante.

Malgré toutes les démarches qu’elle avait entreprises, l’OCP refusait de lui accorder l’attestation de résidence requise par l’HG pour reprendre son aide. Le refus de ce dernier était contraire à l’art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). Elle avait un droit fondamental à obtenir, pour son fils et pour elle, une aide sociale d’urgence, qui ne pouvait être conditionnée au respect d’obligations en matière de droit des étrangers ou à une collaboration dans le cadre du renvoi de Suisse. L’art. 11 de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) posait comme seules conditions que les requérants aient leur domicile ou leur résidence effective sur le territoire du canton et qu’ils ne soient pas à même de subvenir à leur entretien. L’art. 17 RIASI fixait des exigences allant au-delà de celles prévues par la LIASI.

11. Par décision du 16 mars 2012, l’HG a rejeté l’opposition. Son refus de reprendre l’aide sociale était fondé sur le fait que Mme M______ n’était pas à même de fournir l’attestation de résidence délivrée par l’OCP et exigée par l’art. 17 RIASI. Il n’était pas compétent pour vérifier la légalité formelle du RIASI. Au demeurant, le dispositif genevois qui prévoyait une aide financière exceptionnelle en faveur des personnes dépourvues d’une autorisation de séjour était conforme à l’art. 12 Cst., puisqu’il assurait les conditions minimales d’existence aussi longtemps que la décision de renvoi n’était pas exécutoire. Après cela, la seule possibilité d’obtenir une aide était réglée à l’art. 21 de la loi fédérale sur la compétence en matière d’assistance des personnes dans le besoin (LAS - RS 851.1), soit un soutien pour l’organisation du retour, ainsi que le précisait l’art. 17 al. 3 RIASI.

12. Par acte posté le 26 mars 2012, Mme M______, agissant pour elle et pour son fils, a recouru contre la décision précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), requérant, à titre provisionnel, le bénéfice immédiat d’un forfait d’entretien, et, sur le fond, l’annulation de la décision du 16 mars 2012, une aide exceptionnelle devant leur être fournie rétroactivement depuis juin 2011. Elle reprenait l’argumentation développée dans le cadre de son opposition. Les mesures provisionnelles requises devaient être accordées en raison des risques d’atteintes irréparables à leur santé. Le fait qu’ils ne puissent se nourrir correctement impliquait des risques pour leur santé. En outre, la situation actuelle risquait d’entraîner une dégradation rapide de son état psychique.

13. Le 16 avril 2012, l’HG a conclu au rejet de la demande de mesures provisionnelles et, sur le fond, à celui du recours. Les recourants n’avaient droit à aucune aide d’urgence. L’art. 17 RIASI ne violait ni l’art. 12 Cst. ni l’art. 11 LIASI. Le texte de l’art. 12 Cst. comportait le principe de la subsidiarité de l’aide sociale. Or, selon la décision de l’OCP du 7 avril 2011, la recourante n’avait effectué aucune recherche d’emploi depuis son retour en Suisse. Elle était ressortissante d’un pays de l’Union européenne et avait comme seul droit, du point de vue de l’ALCP, d’être soutenue par le Bureau d’aide au départ de la Croix-Rouge.

Il avait partiellement reconsidéré sa décision du 16 mars 2010 et accepté de prendre en charge, dans le cadre du dossier de A______, l’intégralité des indemnités pour occupation illicite de l’appartement, rétroactivement au 1er juillet 2011, sur présentation des décomptes des montants dus depuis cette date. Il avait versé la somme due à la régie pour régulariser la situation des occupants.

14. Par décision du 19 avril 2012 (ATA/234/2012), la présidente de la chambre administrative a refusé d’ordonner les mesures provisionnelles sollicitées. Depuis le 7 avril 2011, la recourante et son fils n’avaient plus de titres de séjour et auraient dû quitter la Suisse avant le 14 juin 2011, en vertu de la décision de renvoi exécutoire pour rejoindre leur pays d’origine ou un autre pays de la Communauté européenne, dans lequel ils auraient la possibilité de se rendre, et de l’ALCP, puisqu’ils étaient originaires de l’un d’entre eux. Il n’y avait pas lieu d’ordonner à l’HG de leur accorder immédiatement l’aide sollicitée. Prima facie, les atteintes à la santé de la recourante, à teneur du certificat médical de juin 2011, ne la contraignaient aucunement à séjourner à Genève et les problèmes immédiats de logement qu’elle rencontrait avec son fils étaient réglés. Ils devaient quitter la Suisse, à moins que la recourante n’y trouve un travail lui permettant de régulariser sa situation. Ils pouvaient obtenir l’assistance réclamée auprès du Bureau d’aide au départ de la Croix-Rouge (art. 21 LAS et 17 al. 3 in fine RIASI).

15. Le 31 mai 2012, Mme M______, agissant pour elle-même et pour son fils, a formé auprès de la chambre administrative une requête en reconsidération de la décision du 19 avril précitée. L’instance de céans avait commis une inadvertance en retenant que le Bureau d’aide au départ de la Croix-Rouge pouvait octroyer une quelconque aide à un ressortissant communautaire. Seuls des requérants d’asile déboutés ou des personnes sans permis de séjour ne provenant pas de l’Union européenne pouvaient solliciter une aide au retour. Il appartenait à l’HG de leur accorder le forfait d’entretien au sens de la LIASI leur permettant au moins de se nourrir correctement, ce qui n’empêchait pas de leur fournir la couverture des frais de logement et d’assurance-maladie.

16. Le 12 juin 2012, L’HG a conclu au rejet de la requête précitée. La décision présidentielle du 19 avril 2012 ne mentionnait pas la possibilité pour la recourante et son fils d’obtenir les prestations d’aide requises. Ce service, dans la situation de cette dernière, était compétent pour procurer une aide en l’espèce. Plus précisément celle-ci s’inscrirait dans le cadre de l’aide au retour et ne pourrait pas tendre à l’octroi de prestations destinées à un entretien régulier.

17. Par courrier du 13 juin 2012, les parties ont été avisées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Les obligations de l’Etat à l’égard des personnes démunies trouvent leur origine tant dans le droit international que dans le droit interne.

b. La Suisse est notamment liée par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966 (Pacte I – RS 0.103.1 ; ATA/21/2006 du 17 janvier 2006). L’article 11 de ce traité prévoit que les Etats parties reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un habillement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence ; il prévoit aussi que les Etats prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit (ATA/809/2005 du 29 novembre 2005 ; ATA/631/2005 du 27 septembre 2005, et les arrêts cités). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les normes contenues dans le Pacte n’ont qu’un caractère programmatique et ne fondent aucune prétention individuelle (ATF 126 I 240 consid. 2b p. 242 et 122 I 101 consid. 2a p. 147 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2P.77/2000 du 30 novembre 2000, et les arrêts cités).

c. Aux termes de l’art. 12 Cst., quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté, et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. Ce droit à des conditions minimales d’existence fonde une prétention des justiciables à des prestations positives de l’Etat, visant à la satisfaction de leurs besoins élémentaires en nourriture, habillement, logement et soins médicaux de base (ATF 131 I 166 consid. 3.1 p. 172 et 130 I 71 consid. 4.1 p. 74 ; ATA/217/2006 du 11 avril 2006, et les arrêts cités  ; G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, La réglementation des décisions de non-entrée en matière dans le domaine du droit d’asile - Aspects constitutionnels, AJP/PJA 11/2004 p. 1348-1354  ; A. AUER / G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2ème éd., 2006, vol. II, p. 680). Il n’est pas contesté que la disposition constitutionnelle précitée protège également le droit à des conditions minimales d’existence des personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière (ATF 131 I 166 précité, eodem loco ; G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, op. cit., p. 1353). Dans un arrêt rendu le 16 mai 2006 (2P.67/2006), le Tribunal fédéral a confirmé sa jurisprudence antérieure, selon laquelle l’art. 12 Cst. ne garantit que le droit à l’aide indispensable selon la dignité humaine, sans laquelle la personne serait réduite à une existence de mendiant : soit de la nourriture, de l’habillement, un toit et des soins médicaux de base.

d. Selon la recommandation n° R (2000) 3 du comité des ministres du conseil de l’Europe aux États membres sur le droit à la satisfaction des besoins élémentaires des personnes en situation d’extrême précarité, adoptée le 19 janvier 2000 (https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=334185&Site=COE  consulté le 15 juillet 2012), les besoins humains matériels élémentaires à satisfaire sont, à tout le moins, la nourriture, l’habillement, l’hébergement et les soins médicaux de base. En vertu de l’annexe à la même recommandation, le droit à la satisfaction de ces besoins élémentaires devrait être justiciable, toute personne en situation d’extrême précarité devant pouvoir l’invoquer directement devant les autorités et, le cas échéant, devant les tribunaux.

e. Selon le Tribunal fédéral, l’aide sociale a pour but d’éviter les situations de nécessité, respectivement d’y remédier. Il en découle que l’un des principes qui prévaut en matière d’assistance est que les causes de l’indigence ne sont pas déterminantes (ATF 121 I 367 = JdT 1997 I 285, 287 et 288, consid. 3b et 3d). Ainsi, l’aide sociale doit être accordée immédiatement pour satisfaire les besoins vitaux, indépendamment des causes de la situation d’indigence (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.115/2001 du 11 septembre 2001, consid. 2c). La Haute Cour admet dès lors que le refus de l’aide ne peut se justifier qu’en cas de comportement abusif de la personne concernée (ATF 121 I 367 = JdT 1997 I 285, consid. 3).

f. Le droit fondamental garanti par l’art. 12 Cst. ne vise pas la personne qui peut, de façon actuelle, effectivement et légalement, se procurer les moyens nécessaires à son existence (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.147/2002 du 4 mars 2003, consid. 3.3.).

g. L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, lequel est rappelé par l’art. 12 Cst. La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (F. WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, Berne 1995, p. 77).

h. Requérant l’aide d’urgence de la part de l’HG, la recourante ainsi que son fils disposent d’un droit justiciable, qu’ils peuvent faire valoir tant auprès de celui-là, que des tribunaux (ATA/345/2006 du 20 juin 2006).

3. La Cst., par le biais de l’art. 12 Cst. ne garantit que le principe du droit à des conditions minimales d’existence ; il appartient ainsi au législateur - fédéral, cantonal et communal - d’adopter des règles en matière de sécurité sociale qui ne descendent pas en-dessous du seuil minimum découlant de l’art. 12 Cst., mais qui peuvent aller au-delà (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.115/2001 précité, consid. 2a).

4. Par l’adoption de la LAS, le législateur fédéral a laissé aux cantons la charge et la compétence de légiférer en matière d’aide sociale, se limitant par cette loi à prévoir des règles d’organisation dans la dispense de cette aide et à rappeler certains principes que ces derniers devront respecter en vertu du principe de la force dérogatoire du droit fédéral (art. 49 Cst). Dans ce domaine, ceux-ci ne pourront pas édicter des règles de droit qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l’esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu’elles mettent en œuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementé de façon exhaustive (Arrêt du Tribunal fédéral 1P. 270/2002 du 19 juin 2002 consid. 3.2, et les références citées).

Ainsi, les étrangers non domiciliés en Suisse dans le besoin, soit les personnes séjournant dans un canton qui ne peuvent subvenir à leur entretien d’une manière suffisante ou à temps par leurs propres moyens ont droit à des prestations d’assistance (art. 1 et 2 al. 1 LAS) qui doivent être dispensées par le canton de séjour (art. 21 LAS). L’aide revêt la forme d’une aide immédiate (art. 21 al. 1 LAS) et d’une assistance au retour (art. 21 al. 2 LAS).

5. a. En droit genevois, la LIASI concrétise l’art. 12 Cst. (ATA/440/2009 du 8 septembre 2009 ; ATA/809/2005 du 29 novembre 2005, et les références citées), mais aussi la LAS à laquelle elle se réfère dans son préambule.

b. La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI), ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle a également pour objectif de garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies sous forme d’accompagnement social, de prestations financières et d’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

c. Sauf cas particuliers, l’HG est l’organe d’exécution de la LIASI sous la surveillance du département de la solidarité et de l’emploi (art. 3 al. 1 LIASI).

d. Selon l’art. 28 al. 1 LIASI, le droit aux prestations d’aide financière naît dès que les conditions de la loi sont remplies mais au plus tôt le premier jour du mois du dépôt de la demande.

e. Il appartient à la personne qui sollicite l’octroi de prestations d’assistance d’établir l’existence des conditions légales à leur délivrance.

f. Les prestations financières sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI) et leurs bénéficiaires doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l’aide est subsidiaire et doivent mettre tout en œuvre pour améliorer leur situation sociale et financière (art. 9 al. 2 LIASI ; ATA/288/2010 du 27 avril 2010 ; ATA/440/2009 du 8 septembre 2009).

6. Ont accès à l’intégralité des prestations d’aide financière prévues par la LIASI les personnes majeures (art. 8 al. 1 LIASI) ayant leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (art. 11 al. 1 let. a LIASI), qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de leur famille dont elles ont la charge (art. 11 al. 1 let. b LIASI) et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 let. c LIASI), soit aux art. 21 à 28 LIASI. Ces trois conditions sont cumulatives.

7. Contrairement à ce que soutient la recourante, la condition du domicile et de la résidence effective sur le territoire du canton de Genève figurant à l’art. 11 al. 1 let. a LIASI est, à rigueur de texte, une condition cumulative. Cela signifie que des prestations d’aide financière complète ne sont accordées qu’aux personnes autorisées à séjourner dans le canton de Genève, soit aux personnes d’origine genevoise, aux confédérés et aux étrangers bénéficiant d’un titre de séjour.

8. Cette interprétation est confortée par les dispositions contenues à l’art. 11 al. 2 à 4 LIASI qui fixent les conditions d’aide sociale dont peuvent bénéficier les autres catégories de personnes, de nationalité suisse ou étrangère. Sur ce point, la LIASI prévoit que :

a. les requérants d’asile ont droit à l’aide financière prévue par les dispositions d’application de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31), soit par la loi d’application de la loi fédérale sur l’asile du 18 décembre 1987 (LaLAsi - F 2 15 ; art. 11 al. 2 LIASI) ;

b. les personnes admises à titre provisoire au sens de l’art. 83 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) ont droit aux prestations d’aide financière prévues par la LIASI lorsqu’elles ont épuisé leurs droits aux prestations de l’assurance-chômage et qu’elles ont été domiciliées dans le canton sans interruption pendant les sept ans qui ont précédé la demande (art. 11 al. 3 LIASI) ;

c. certaines catégories de personnes peuvent bénéficier d’une aide financière exceptionnelle, qui peut être inférieure à l’aide financière ordinaire et/ou limitée dans le temps et dont les conditions sont fixées par le Conseil d’Etat (art. 11 al. 4 LIASI). Il s’agit des personnes suivantes :

- les étudiants et les personnes en formation (let. a) ;

- les jeunes adultes sans formation, âgés entre 18 et 25 ans révolus, lorsqu’ils ne suivent aucune formation (let. b);

- les personnes qui ont le droit de se rendre à Genève pour y chercher un emploi et celles qui ont le droit d’y rester après la fin d’un emploi d’une durée inférieure à une année en vertu de l’ALCP ainsi que de la convention instituant l’AELE (let. c) ;

- les personnes exerçant une activité lucrative indépendante (let. d) ;

- les personnes étrangères sans autorisation de séjour (let. e) ;

- les personnes de passage (let. f) ;

- les personnes au bénéfice d’une allocation destinée à la création d’une activité indépendante au sens de l’art. 42C al. 8 LIASI (let. g).

9. a. Le cercle des personnes étrangères sans autorisation de séjour visé à l’art. 11 al. 4 let. e LIASI pouvant bénéficier de l’aide financière exceptionnelle est précisé à l’art. 17 RIASI. Il s’agit de toute personne non titulaire d’une autorisation de séjour qui s’est annoncée à l’OCP en vue d’en obtenir une et qui a obtenu de cet office une attestation l’autorisant à séjourner pendant le temps nécessaire à l’examen de sa demande, inclus le temps allant jusqu’à ce qu’il soit statué sur un éventuel recours de celle-ci. En pratique, à teneur de la disposition réglementaire précitée, l’attestation délivrée par l’OCP sert à établir l’existence d’une procédure en cours visant à la régularisation des conditions de séjour.

b. Ne peuvent plus obtenir l’aide financière exceptionnelle :

- les personnes qui n’ont pas obtenu de l’OCP le droit de résider en Suisse jusqu’à droit jugé sur leur recours, lorsqu’il est dirigé contre une décision négative de l’OCP (art. 17 al. 2 RIASI a contrario) ;

- les personnes qui ont fait l’objet d’une décision de renvoi exécutoire (art. 17 al. 3 RIASI) ;

- les personnes dont la demande d’asile a été définitivement rejetée (art. 17 al. 4 RIASI).

10. L’étendue de l’aide exceptionnelle accordée en vertu de l’art. 17 al. 1 RIASI est définie à l’art. 19 RIASI. Elle est accordée au requérant et aux membres de sa famille (art. 19 al. 1 RIASI), et son contenu est précisé à l’art. 19 al. 2 let. a à h, 3 et 4 RIASI. Elle inclut un forfait d’entretien, de l’argent de poche, des frais de vêtements, de transport, de logement, d’assurance-maladie et d’autres prestations spécifiques précisées.

11. Pour les personnes qui ne peuvent bénéficier ni des prestations ordinaires ni des prestations exceptionnelles, le RIASI prévoit encore des prestations d’aide d’urgence. Elles sont accordées aux personnes dont la demande d’asile a fait l’objet d’une décision de non-entrée en matière passée en force, ainsi qu’aux requérants d’asile déboutés faisant l’objet d’une décision de renvoi exécutoire avec délai de départ. Les prestations d’aide d’urgence dans ce cadre sont en principe fournies en nature.

Elles sont définies de manière similaire aux art. 24 et 29 aRIASI et consistent en :

- l’hébergement dans un foyer (art. 24 al. 1 let. a RIASI) ;

- la fourniture de nourriture (art. 24 al. 1 let. b RIASI) ;

- la mise à disposition de bons pour vestiaire et articles d’hygiène de base (art. 24 al. 1 let. c RIASI) ;

- d’autres prestations de première nécessité que l’HG peut définir, notamment un titre de transport valable pour les Transports publics genevois pour les déplacements indispensables (art. 24 al. 1 let. d RIASI). En complément de ces prestations, les personnes concernées bénéficient de la couverture d’une assurance obligatoire des soins (art. 24 al. 2 RIASI). En outre, les personnes considérées comme vulnérables au sens de l’art. 25 al. 1 RIASI, telles les personnes seules ou avec enfant, ainsi que les personnes malades, peuvent être logées dans des foyers pour requérants d’asile adaptés à leur situation et, dans ce cadre, toucher des prestations d’aide financière per diem, destinées à couvrir leurs frais de nourriture selon un barème défini dans le règlement (art. 25 al. 2 RIASI).

12. a. L’art. 17 al. 3 RIASI a subi une modification entrée en vigueur le 13 juin 2012. Dans sa version antérieure (ci-après : art. 17 aRIASI), les personnes qui faisaient l’objet d’un délai de départ, soit les personnes qui n’avaient droit à aucun titre de séjour et qui faisaient l’objet d’une décision de renvoi en force, pouvaient s’adresser au Bureau d’aide au départ de la Croix-Rouge. Aucune disposition ne précisait le type de prestations servies par cet office.

b. Depuis le 13 juin 2012, l’art. 17 al. 3 RIASI règle encore la situation des étrangers renvoyés lorsqu’un délai de départ leur a été fixé, mais il a été complété par un nouvel art. 17A RIASI définissant le type d’assistance servie par le bureau précité (sous sa nouvelle dénomination, soit le service d’aide au retour de la Croix-Rouge genevoise), ainsi que les conditions d’octroi de celle-ci.

c. La personne étrangère non titulaire d’une autorisation de séjour qui se trouve en situation d’échec migratoire peut être mise au bénéfice d’une aide au retour dont les modalités sont définies à l’art. 19A RIASI. Elle doit pour ce faire remplir cinq conditions cumulatives :

- avoir résidé dans le canton de Genève depuis deux ans sans être en possession d’un titre de séjour valable (art. 17A let. a RIASI) ;

- faire des démarches volontaires et coopérantes en vue d’un retour dans le pays d’origine (art. 17A let. b RIASI) ;

- se trouver dans une situation financière difficile ne lui permettant pas de prendre en charge des frais de voyage et de réinstallation dans le pays d’origine (art. 17A let. c RIASI) ;

- ne pas avoir déjà bénéficié ou bénéficier d’une autre aide au retour (art. 17A let. d RIASI) ;

- ne pas s’être rendue coupable d’une atteinte grave à la sécurité ou à l’ordre public (art. 17A let. e RIASI). L’aide financière en question est constituée d’une prestation unique accordée au demandeur et au groupe familial dont il fait partie, comprenant la prise en charge des frais de voyage, une aide à la réinstallation, une aide individuelle supplémentaire sous forme d’un montant par personne du groupe familial ainsi que d’une aide médicale destinée à la prise en charge de médicaments pendant une durée de trois mois (art. 19A al. 1 et 2 let. a à d RIASI). A ces prestations d’assistance, s’ajoute la mise à disposition de mesures d’accompagnement fournies par le Centre cantonal de conseil en vue du retour, soit une série de prestations en vue de permettre la réinstallation de la personne à l’étranger.

Lorsque ces conditions sont remplies, l’étranger peut percevoir, sans que cela constitue un droit, une prestation unique d’aide au retour dont le contenu est fixé à l’art. 19A RIASI, qui comprend la prise en charge des frais de voyage, une aide à la réinstallation et une aide médicale dans le pays de retour, sans compter une assistance dans la préparation du retour.

13. Il s’agit de déterminer si la recourante et son fils, qui séjournent dans le canton de Genève, ont droit à tout ou partie des prestations d’assistance que l’HG leur refuse, ceci dans la situation qui est la leur, soit celle d’une mère atteinte sérieusement dans sa santé par un diabète et un enfant ayant l’âge de la scolarité obligatoire, sous le coup d’une mesure de renvoi dont l’exécution est différée pour des raisons inconnues.

Les recourants ne sont pas au bénéfice d’un titre de séjour en Suisse. Ils n’ont donc pas droit aux prestations d’assistance ordinaires prévues par l’art. 2 LIASI. Le refus de l’OCP de leur accorder un titre de séjour est définitif et ils font l’objet d’une décision de renvoi. De ce fait, ils ne peuvent plus, en vertu de l’art. 17 al. 3 RIASI, être mis au bénéfice de l’aide financière exceptionnelle prévue à l’art. 11 al. 4 LIASI. Finalement, ne faisant pas partie du cercle des demandeurs d’asile déboutés, ils n’ont pas non plus droit à l’aide d’urgence des art. 24 à 29 aRIASI. A teneur des textes détaillant le dispositif d’aide sociale, ils n’ont aucun droit à des prestations et en refusant de mettre la recourante et son fils au bénéfice de toutes prestations d’aide financière puis en les renvoyant requérir l’aide du service d’aide au retour de la Croix-Rouge genevoise, l’intimé s’est conformé aux dispositions du RIASI. Les prestations d’assistance dispensées par la Croix-rouge étant centrées sur l’aide au retour, elles ne répondent pas aux besoins immédiats et urgents de la recourante en soins, nourriture et logement. Dès lors, le refus de l’intimé de lui accorder toute aide est problématique au regard du droit à des conditions minimales d’existence garanti en vertu des art. 12 Cst. et 21 al. 1 LAS.

14. Lorsqu’elle est grave, toute restriction à un droit fondamental doit être fondée sur une base légale, de nature formelle (art. 36 al. 1 Cst.).

a. Le principe de la légalité est un principe de valeur constitutionnelle consacré à l’art. 5 al. 1 Cst. (ATF 128 I 113 consid. 3b p. 121).

b. Il se composait traditionnellement de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale (ATA/63/2004 du 20 janvier 2004). Cette distinction a été abandonnée (Cf. A. AUER / G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, op. cit., vol. I, pp. 622-633) au profit du principe de la primauté de la Cst., relativisé par les engagements internationaux de la Suisse, qui l’emportent sur les règles de droit interne, et complété par celui de l’exigence d’une base légale.

c. Selon ce principe, l’ensemble de l’activité étatique repose sur la loi. La base légale formelle doit revêtir une certaine « densité normative », c’est-à-dire qu’elle doit présenter des garanties suffisantes de clarté, de précision et de transparence. Cette exigence de précision de la norme découle de celle de la sécurité du droit et du principe de l’égalité de traitement. L’exigence de la densité normative est toutefois relative. L’on ne saurait exiger du législateur qu’il renonce totalement à avoir recours à des notions imprécises, qui comportent une part nécessaire d’interprétation. Cela tient d’abord à la nature générale et abstraite de toute règle de droit, et à la nécessité qui en découle de laisser aux organes chargés de l’appliquer une certaine marge de manœuvre lors de sa concrétisation. En outre, une clause de délégation législative en faveur de l’autorité d’exécution n’est pas interdite. Toutefois, pour apprécier si l’exigence du principe de la légalité est respectée par la réglementation d’exécution en cas de délégation législative, plusieurs critères doivent être pris en compte pour déterminer quel degré de précision l’on est en droit d’exiger de la clause de délégation, en particulier le cercle de ses destinataires et la gravité des atteintes qu’elle autorise aux droits fondamentaux. Une atteinte grave exige en principe une base légale formelle, claire et précise, alors que des atteintes plus légères peuvent, par le biais d’une délégation législative, figurer dans des actes de niveau inférieur à la loi (ATF 131 II 13 consid. 6.5.1 p. 29 ; ATA/63/20004 précité ; A. AUER / G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, op. cit., vol. I, pp. 622 ss).

d. Dans une jurisprudence constante, le Tribunal fédéral a posé trois conditions de validité des clauses légales de délégation, qui s’imposent aux cantons comme des exigences minimales :

- le droit cantonal ne doit pas exclure la délégation ;

- celle-ci doit être limitée à un objet précis ;

- la loi déléguant la compétence doit contenir les principes de la réglementation si l’atteinte à la situation juridique des administrés est grave (ATF 128 I 113 consid. 3c p. 122 et 118 Ia 245 consid. 3b p. 247-248).

Cette condition matérielle s’apprécie différemment selon les situations. Elle est appliquée strictement en matière fiscale, où la loi doit elle-même fixer le sujet, l’objet et la mesure de l’impôt, de même que pour les restrictions particulièrement graves aux libertés publiques, de manière plus générale lorsque l’ordonnance touche gravement la situation juridique des administrés. En d’autres termes, la précision de la norme de délégation doit être proportionnelle à la gravité de l’atteinte portée aux administrés (ATF 128 I 113 consid. 3c p. 122 ; P. MOOR, Droit administratif, 1994, vol. I, p. 251-253).

e. En matière d’administration de prestations, il appartient au législateur de définir les lignes fondamentales des prestations publiques à fournir (ATF 128 I 113 consid. 3b p. 121) ; dans un arrêt rendu le 15 novembre 2004 (Asyl 1/05 p. 24 et note sous arrêt de K. AMSTUTZ), le Tribunal administratif bernois a considéré que toute réduction des prestations à l’aide minimale fournie en application de l’art. 12 Cst. devait reposer sur une base légale formelle. Le respect du principe de la légalité suppose le respect de ceux de l’égalité de traitement et de l’objectivité des critères d’attribution (A. AUER / G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, op. cit., vol. I, p. 634). Selon la doctrine (eodem loco, p. 635), le juge doit exercer son contrôle avec retenue.

En d’autres termes, il convient de traiter tous les étrangers dont la situation est identique de la même manière au regard de l’art. 12 Cst. et des droits minimums qu’ils confèrent. Si le législateur entend introduire des traitements dissemblables, ceux-ci doivent respecter tant le noyau dur de ce droit individuel que le principe de l’égalité, reposer sur des différences objectives et être fondés sur une base légale formelle.

15. En l’espèce, le législateur genevois, pour respecter ses obligations en matière d’assistance découlant des art. 12 Cst. et 21 LAS, a prévu à l’art. 11 al. 4 let. f LIASI d’une manière générale que les étrangers sans autorisation de séjour avaient un droit à une aide financière exceptionnelle, dont il a chargé le Conseil d’Etat de fixer les conditions, celle-là pouvant être inférieure à l’aide financière ordinaire et/ou limitée dans le temps. Le Conseil d’Etat s’est exécuté par l’adoption du dispositif réglementaire dont le détail a été rappelé ci-dessus. S’il a respecté les principes précités en mettant les demandeurs d’asiles déboutés et renvoyés de Suisse au bénéfice de l’aide d’urgence dans l’attente de leur départ ou d’un autre règlement de leurs conditions de séjour et en donnant la possibilité aux étrangers de solliciter une aide financière exceptionnelle pendant la période où leur procédure en autorisation de séjour est en cours, il a omis de régler, sous l’angle de l’assistance de première nécessité, la situation des étrangers renvoyés de Suisse dans le laps de temps qui les sépare de leur départ. Une telle omission heurte le droit à des conditions minimales d’existence garanti par l’art. 12 Cst. ; elle contrevient aux exigences de l’art. 21 LAS en matière d’aide d’urgence immédiate violant par là le droit fédéral  ; elle ne respecte la clause de délégation contenue aux art. 11 al 1 et 4 let f LIASI qui ne permettait pas d’aller jusqu’à supprimer toute aide d’urgence pour les étrangers se trouvant dans la situation de la recourante et de son fils.

16. Ces derniers pouvant se prévaloir d’un droit à l’aide minimale d’urgence fondé sur les dispositions constitutionnelles ou légales précitées et le RIASI ne prévoyant rien concernant leur situation, il appartient à la chambre de céans, en l’absence de toute règlementation, de combler sans attendre cette lacune, considérée comme une lacune proprement dite (ATA/868/2010 du 7 décembre 2010  ; ATA/778/2002 du 10 décembre 2002).

La recourante et son fils devront quitter la Suisse suivant les injonctions de l’OCP. Toutefois, pendant la période les séparant de leur départ, s’ils n’ont pas droit à l’aide sociale au sens de l’art. 19 RIASI qu’ils réclament, ils doivent pouvoir bénéficier de prestations d’aide d’urgence d’un niveau au moins équivalent à celles accordées à un demandeur d’asile débouté qui se trouve sous le coup d’une décision de renvoi exécutoire. Il s’agit des prestations prévues à l’art. 24 RIASI, pour autant que les intéressés remplissent les principes généraux prévalant en matière d’assistance, notamment celui de la subsidiarité, ce que l’HG devra préalablement établir.

17. Le recours sera admis. La décision sur opposition de l’HG du 16 mars 2012 sera annulée, de même que celle du 2 février 2012. La cause sera retournée à l’HG pour qu’il traite la demande d’assistance présentée par les recourants au sens des considérants.

Aucun émolument ne sera perçu, ni aucune indemnité de procédure allouée, les recourants n’y ayant pas conclu (art. 87 LPA).

18. La chambre administrative ayant statué sur le fond du litige, la demande de reconsidération de la décision sur mesures provisionnelles du 19 avril 2012 n’a plus d’objet.

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 mars 2012 par Madame M______ agissant pour elle-même et en qualité de représentante de son fils R______ contre la décision sur opposition de l’hospice général du 16 mars 2012 ;

 

au fond :

l’admet ;

annule la décision sur opposition de l’hospice général du 16 mars 2012 de même que celle du 2 février 2012 ;

retourne la cause à l’hospice général pour qu’il statue sur la requête d’assistance au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maurice Utz, avocat des recourants, ainsi qu’à l’hospice général.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Hurni et Junod, MM. Dumartheray et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :