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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/778/2021

ATA/377/2022 du 05.04.2022 sur JTAPI/1110/2021 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/778/2021-LCI ATA/377/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 avril 2022

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Mattia Deberti, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

_________


 

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 novembre 2021 (JTAPI/1110/2021)


EN FAIT

1) M. A______ est propriétaire de la parcelle n° 2'120 de la commune de B______, située en zone agricole. L'entreprise agricole sur cette parcelle et le hangar qui y est édifié sont exploités par les deux fils de M. A______ (ci-après: les exploitants).

2) Le 17 janvier 2013, le département du territoire (ci-après : le département) a ordonné à M. A______ de retirer les matériaux de chantier situés sur sa parcelle, soit une benne remplie de déchets de bois et de tuyaux en plastique, une citerne usagée en fer, un godet broyeur, quatre bennes de différents modèles, des panneaux de coffrage et différents matériaux tels que sable ou cailloux, et ce dans un délai de soixante jours. Il lui a également infligé une amende de CHF 2'500.-.

3) Le 18 février 2013, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

4) Le 10 mai 2013, après avoir constaté en cours de procédure que M. A______ avait exécuté l'ordre de remise en état, le département a annulé l'amende.

Il saluait l'effort entrepris quant au nettoyage effectué sur la parcelle et invitait M. A______ à le poursuivre afin que celle-ci, sise en zone agricole, ne soit dorénavant utilisée qu'à des fins agricoles.

5) Le 24 mai 2013, la cause a été rayée du rôle.

6) Le 7 septembre 2020, le département a constaté que des aménagements, installations, constructions et dépôts étaient présents sur la parcelle, sans aucune autorisation de construire.

Un reportage photographique a été effectué.

7) Le 15 octobre 2020, le département a informé M. A______ des constats effectués et lui a accordé un délai de dix jours pour se déterminer.

Un plan de situation détaillant les éléments concernés était joint.

8) Le 25 octobre 2020, M. A______ a communiqué ses observations.

9) Le 29 janvier 2021, le département a ordonné le rétablissement de la situation conforme au droit par la remise en état antérieur du terrain à l'est du hangar, la démolition de la construction de type bungalow, la suppression de tout stationnement de véhicule, la suppression des divers stockages de matériaux et de produits agricoles entreposés sur la parcelle et la remise en état du terrain naturel.

Une fois les constructions et installations démolies, leurs emplacements devaient être à nouveau aptes à être exploités pour l'agriculture, le sol devant être reconstitué au niveau du terrain naturel préexistant. Les surfaces en pleine terre reconstituées devaient être aptes à répondre positivement aux critères d'aptitudes fixés pour les surfaces d'assolement.

Un délai de soixante jours pour l’exécution était imparti.

10) Le 1er mars 2021, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du TAPI.

À titre préalable, un transport sur place devait être ordonné pour constater que le car n'était plus stationné sur la parcelle. Le TAPI devait surseoir à statuer jusqu'à la décision de l'office des autorisations de construire (ci-après : OAC) au sujet de la demande définitive d'autorisation de construire visant l'édification d'un nouveau hangar qui allait être déposée. À titre principal, la décision querellée devait être déclarée sans objet concernant la suppression de tout stationnement de véhicules, ainsi que la remise en état antérieure du terrain à l’Est du hangar et la démolition du bungalow une fois la demande d'autorisation de construire le nouveau hangar entrée en force. La décision devait être annulée pour le reste des points soulevés, et une indemnité pour les frais causés par la procédure octroyée.

M. A______ et ses fils avaient autorisé le stationnement du car pour une durée limitée afin de rendre service à une entreprise de transport, mais celui-ci avait pris fin avant le prononcé de la décision litigieuse. Si le département avait procédé à un nouveau contrôle sur place, il aurait pu constater que le car n'y était plus stationné.

Les balles d'ensilage étaient destinées à nourrir le bétail agricole durant la mauvaise saison. Il s'agissait de dépôts temporaires, selon une rotation entre la période de récolte et celle de consommation. Elles étaient en quantité variable, entreposées dans des endroits différents, selon les besoins de place de l'exploitation agricole. Il ne s'agissait pas d'une construction ou installation assujettie à autorisation, ce d'autant plus qu'elles étaient de nature agricole et donc conformes à la zone.

Ce genre d'installations agricoles temporaires et amovibles faisaient d'ailleurs l'objet d'une demande d'AgriGenève auprès du département tendant à ce qu'il cesse d'engager des procédures de mise en conformité en tenant compte de la réalité de la profession d'agriculteur. S'il fallait demander une autorisation à chaque fois que de nouvelles balles étaient entreposées ou déplacées, cela serait impraticable. Au surplus, l'ordre d'enlèvement des balles dans un délai de soixante jours était disproportionné car il les plaçait dans une situation critique. Ne pouvant entreposer les balles à l'intérieur, ses fils et lui seraient contraints de trouver une solution de stockage auprès d'un tiers, source de coûts excessifs, de travaux de manutention compliqués et de transports inutilement polluants.

La modification du terrain à l'Est du hangar et l’implantation du bungalow constituaient une solution provisoire nécessaire à l’exploitation car les produits traités dans le bungalow ne pouvaient l'être à l'intérieur du hangar pour des raisons d'hygiène. Ils devaient être enlevés après la construction de nouveaux locaux, laquelle devait intervenir après une période de tests destinée à montrer que les activités de transformation et empaquetage étaient rentables et justifiaient une construction nouvelle. Ses fils et lui allaient solliciter une autorisation de construire pour un nouveau bâtiment situé en partie sur l'espace de l'actuel bungalow.

L’ordre de reconstitution des sols selon les critères applicables aux surfaces d'assolement était contesté. Avant le décapage des sols, la surface de terrain en cause n'était pas, et n'était toujours pas, à l'intérieur du périmètre des surfaces d'assolement. Ainsi, la remise en place de la terre végétale suffisait à rétablir l'état antérieur des lieux, dans la mesure où la surface n'allait pas être affectée par la construction d'un nouvel hangar.

11) Le 3 mai 2021, le département a conclu au rejet du recours.

Le car n'avait manifestement aucun lien avec l'activité agricole, ce que M. A______ avait admis. Si le stationnement avait pris fin, l’intéressé n'avait produit, avant ou après son recours, aucun reportage photographique qui le démontrait. S'il était vrai que l'ordre d'enlèvement serait devenu sans objet dans cette situation, cela avait néanmoins une incidence sur la suite de la procédure. L’invitation à procéder à un nouveau contrôle dénotait une attitude peu coopérative et contraire à la bonne foi. Une fois les irrégularités constatées, il n'appartenait plus au département de se déplacer de manière régulière sur place pour vérifier leur persistance, mais aux propriétaires de l’informer de l'évolution de la situation.

En se référant à la proposition d'AgriGenève, M. A______ reconnaissait qu'en l'état les balles d’ensilage étaient assujetties à autorisation de construire. Le fait qu'elles étaient conformes à la zone ne dispensait pas de suivre la procédure. Selon lui, la totalité d'une parcelle agricole pourrait être vouée au stockage de balles d'ensilage, ce qui était contraire à la vocation de la zone agricole. Leur entreposage sur la parcelle avait un impact sur l'exploitation de celle-ci, sur sa nature agricole et sur des aspects visuels en raison de leur nombre. L’intéressé reconnaissait d'ailleurs qu'elles devaient être entreposées dans le hangar construit à cette fin. Il ne démontrait pas que celui-ci n'offrait pas suffisamment de place et qu’il ne répondait plus au critère de nécessité des nouvelles constructions en zone agricole.

S'agissant du bungalow et de la remise en état du terrain, M. A______ reconnaissait l'avoir érigé sans autorisation et précisait que sa démolition serait entreprise dès que la nouvelle construction qu'il souhaitait réaliser serait achevée. Cela démontrait son mépris des règles et des procédures légales. Sa demande de suspension de l'ordre de remise en état devait être rejetée.

La remise en état du terrain naturel ordonnée visait à retrouver les qualités initiales (état naturel) du sol affecté par les objets litigieux et non pas à l'intégrer dans l'inventaire des surfaces d'assolement. L'absence du terrain à l'inventaire des surfaces d'assolement n'était pas pertinente. Cela était confirmé par la jurisprudence. La référence faite dans la note de bas de page aux surfaces d'assolement n'avait qu'une valeur indicative visant à illustrer les critères d'aptitudes d'un sol naturel, car une telle reconstitution nécessitait le respect de certains principes.

M. A______ ne s'était pas prononcé sur la situation des autres matériaux stockés sur sa parcelle.

12) Par courrier du 25 juin 2021, M. A______ a répliqué.

Lors du passage de l'exploitation à l'agriculture biologique, ses fils et lui avaient dû acquérir de nouvelles machines pour sarcler, désherber mécaniquement les cultures et entretenir les parcelles d'une manière durable. Ils avaient donc besoin de place supplémentaire pour mettre à l'abri ce matériel onéreux.

L'exploitation agricole comprenait un élevage de bétail et c'était par manque de place que les balles d'ensilage étaient stockées à l'extérieur, raison pour laquelle l'exploitation avait besoin d'un espace couvert supplémentaire.

Leurs revenus provenaient pour partie d'activités annexes de transformation du produit de l'exploitation et de vente directe. Actuellement, les locaux nécessaires à cette activité étaient trop exigus et dispersés. Ils souhaitaient regrouper ces espaces dans le hangar existant, ce qui impliquait de déplacer le matériel qui y était actuellement entreposé.

Un projet de hangar supplémentaire était étudié depuis plusieurs années et sa finalisation devait intervenir normalement en été 2021.

Seul un transport sur place par le TAPI permettrait d'établir que les constructions existantes ne suffisaient pas aux besoins de l'exploitation et de constater l'impact visuel des constructions et dépôts.

13) Le 3 août 2021, le département a dupliqué.

M. A______ ne prétendait pas que les éléments dont l'évacuation avait été ordonnée avaient été autorisés ou ne nécessitaient pas de l'être. Le seul moyen sur lequel il s'appuyait pour contester l'ordre litigieux consistait à se prévaloir d'une insuffisance de place de stockage qui allait être comblée par un projet de construction d'un nouvel hangar.

Ces explications ne suffisaient pas à remettre en cause le bien-fondé de la décision querellée. M. A______ ne démontrait nullement le défaut de place et de toute façon, son manque d'anticipation lui était imputable. Enfin, la construction du nouvel hangar n'apparaissait ni concrète, ni imminente.

14) Le 4 novembre 2021, le TAPI a refusé la demande de transport sur place ainsi que la demande de suspension de la procédure, et rejeté le recours.

Le projet de nouvel hangar n’était pas imminent malgré la production d’un plan du 13 octobre 2019. Aucune demande d’autorisation de construire n’avait été déposée. Une éventuelle délivrance serait sans effet sur le sort de la construction érigée sans autorisation.

En l’absence d’indication contraire de M. A______, le département pouvait conclure que le car se trouvait toujours sur la parcelle. L’intéressé ne pouvait exiger un contrôle du département sans contrevenir aux règles sur la bonne foi. Il n’avait toujours pas fourni la preuve de l’enlèvement du car. Si celui-ci avait été enlevé, le recours et non la décision serait sans objet.

L’entreposage des balles d’ensilage constituait un cas limite. L’usage régulier des espaces de stockage extérieur, le nombre et le volume important des balles d’ensilage, leur empilement atteignant la hauteur du hangar voisin, l’impact visuel et paysager, les dimensions analogues à celle d’une construction agricole soumise à autorisation constituaient autant d’éléments soumettant le dépôt à autorisation, de sorte que l’ordre de suppression n’était pas contraire au droit, et ce indépendamment du fait que le dépôt de balles d’ensilage pût être conforme à l’affectation de la zone.

L’édification du bungalow nécessitait une autorisation, indépendamment de sa compatibilité avec la zone agricole. Le fait qu’un projet de construction d’un hangar supplémentaire était à l’étude n’y changeait rien. L’ordre de remise en état était fondé.

L’ordre de remise en état du sol décapé était également fondé, étant précisé que la référence aux surfaces d’assolement n’était qu’indicative et n’imposait pas d’exigences de qualité supérieure aux caractéristiques initiales du sol.

Le délai de soixante jours pour la remise en état était suffisant et le coût financier d’une remise en état ne pouvait pas dans la règle être pris en compte.

15) Par acte remis au guichet le 8 décembre 2021, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à celle de la décision du département du 29 janvier 2021. Subsidiairement, il devait être dit que l’ordre de remise en état du terrain à l’Est du hangar et de démolition du bungalow ne prendrait effet qu’après refus définitif de la requête en autorisation de construire du nouvel hangar qu’il entendait déposer, et que l’ordre de suppression du stockage de matériaux divers et de produits agricoles ne prendrait effet qu’après le refus définitif de la requête en autorisation de construire portant sur le dépôt de balles qu’il déposerait dans les trente jours à compter de l’entrée en vigueur de l’arrêt à intervenir. Préalablement, un transport sur place devait être ordonné.

Le car avait été enlevé avant même le dépôt du recours et le point n’était plus litigieux.

Ses fils et lui n’avaient pas encore pu déposer de demande d’autorisation de construire un nouvel hangar, contrairement à ce qu’ils espéraient. L’ordre de démolition était disproportionné. Les dimensions du bungalow étaient modestes, et celui-ci n’avait aucune emprise sur les surfaces d’assolement. Son usage était conforme à la zone agricole. Ils possédaient un intérêt majeur à poursuivre l’activité complémentaire de conditionnement en vue de vente directe à laquelle il servirait jusqu’à l’achèvement du nouvel hangar.

L’impact paysager de l’entreposage de balles d’ensilage n’avait pu être constaté par le TAPI faute pour celui-ci d’avoir procédé à un transport sur place. Or, une haie séparait la parcelle du domaine public et de la parcelle voisine. Le volume du dépôt, la visibilité pour le public et le fait qu’il était lié à l’exploitation agricole et que sa vue était courante en zone agricole devaient porter à conclure que l’assujettissement à autorisation ne se justifiait pas. Aucun intérêt public majeur n’était en jeu.

L’ordre de remise en état du sol se référait à tort aux surfaces d’assolement, seule une couche de terre végétale devrait recouvrir celui-ci.

16) Le 24 janvier 2022, le département a conclu au rejet du recours.

L’absence de conditions d’hygiène dans l’entrepôt existant et de dépôt d’une demande d’autorisation de construire étaient le fait du recourant, et ne pouvaient constituer des exceptions à l’application stricte de la séparation du bâti et du non-bâti. La compatibilité d’une construction avec la zone agricole ne suffisait pas pour l’octroi d’une autorisation. La dimension modeste du bungalow était sans effet sur la proportionnalité de l’ordre de remise en état. L’ordre de démolition était conforme au principe de proportionnalité.

Le caractère imposant de l’entreposage de balles d’ensilage avait été établi. Le recourant ne remettait pas en cause les constatations du TAPI, et n’exposait pas en quoi un transport sur place pourrait les modifier. Le hangar existant avait pour vocation d’entreposer les balles d’ensilage. C’était par convenance personnelle que le recourant les avait entreposées à l’extérieur.

La remise en état du sol s’entendait dans l’état où il se trouvait avant décapage, et le TAPI avait précisé qu’il ne s’agissait pas d’imposer des exigences de qualité supérieures.

17) Le recourant n’a pas répliqué dans le délai imparti au 25 février 2022.

18) Le 9 mars 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

Il sera revenu en tant que de besoin sur leurs arguments et les pièces produites dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant fait valoir que l’autocar a été enlevé de la parcelle et ne fait plus l’objet du litige.

a. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/499/2021 du 11 mai 2021 consid. 2a).

b. En l’espèce, le recourant n’a pas documenté l’enlèvement de l’autocar, alors que l’occasion lui en a été donnée à plus d’une reprise et qu’il lui incombait d’informer le département de la remise en état. Il n’établit donc pas que l’autocar ne serait plus l’objet de la procédure.

Il est par ailleurs observé qu’il n’a pas critiqué le bien-fondé de l’ordre de retirer l’autocar de la parcelle.

3) Le recourant conclut préalablement à un transport sur place.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 138 V 125 consid. 2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2).

Le juge peut cependant renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, que la preuve résulte déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu'il parvient à la conclusion que ces preuves ne sont pas décisives pour la solution du litige, voire qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 136 I 229 consid. 5.3 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l’espèce, le recourant demande un transport sur place pour apprécier le volume et la visibilité de l’entreposage des balles d’ensilage. Or, la procédure contient vingt-sept photographies prises par le département, dont dix-sept au moins illustrent l’entreposage des balles d’ensilage, et montrent l’empilement de strates, la hauteur par rapport au hangar existant et à un talus, le volume et l’emprise au sol. Les images permettent également de voir la haie et de comprendre les angles de vision. Le recourant, à qui il était loisible de documenter la procédure avec d’autres prises de vue, n’indique pas ce qu’un transport sur place apporterait de plus à l’instruction. La procédure est complète et l’organisation d’un transport sur place ne se justifie pas. Il ne sera pas donné suite à la demande de mesure d’instruction, à laquelle le TAPI a refusé à raison de donner suite.

4) En vertu de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b) ; les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

5) Le recourant conteste le bien-fondé et la proportionnalité de l’ordre de remise en état s’agissant de la démolition du bungalow, du débarras des objets entreposés et de la remise en état du sol.

a. Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente. L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 1 et al. 2 let. a de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 ; LAT - RS 700).

Sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail, ni modifier la configuration du terrain (art. 1 al. 1 let. a et d LCI).

b. Sont réputées constructions ou installations toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires, soit notamment : les maisons destinées à l’habitation, au commerce, à l’industrie ou à l’agriculture (let. a), les murs, clôtures, portails, poulaillers, clapiers, chenils (let. b), les garages et ateliers de réparations, les entrepôts, les dépôts de tous genres (let. c), les ascenseurs et monte-charges, les installations de chauffage, de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité et les antennes électromagnétiques (let. d), les installations extérieures destinées à l’exploitation d’une industrie ou à l’extraction de matières premières (let. e) et les installations de stockage d’hydrocarbures et liquides assimilés (let. f ; art. 1 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RCI - L 5 05.01).

Selon la jurisprudence, sont considérés comme des constructions ou installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT tous les aménagements durables et fixes créés par la main de l'homme, exerçant une incidence sur l'affectation du sol, soit parce qu'ils modifient sensiblement l'espace extérieur, soit parce qu'ils chargent l'infrastructure d'équipement ou soit encore parce qu'ils sont susceptibles de porter atteinte à l'environnement (ATF 140 II 473 consid. 3.4.1 ; 123 II 256 consid. 3 ; ATF 119 Ib 222 consid. 3a). La procédure d'autorisation doit permettre à l'autorité de contrôler, avant la réalisation du projet, sa conformité aux plans d'affectation et aux diverses réglementations applicables. Pour déterminer si l'aménagement prévu est soumis à cette procédure, il faut évaluer si, en général, d'après le cours ordinaire des choses, cet aménagement entraînera des conséquences telles qu'il existe un intérêt de la collectivité ou des voisins à un contrôle préalable (ATF 139 II 134 consid. 5.2 ; 123 II 256 consid. 3 ; 119 Ib 222 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_50/2020 du 8 octobre 2020 consid. 6.1).

c. Lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux prescriptions de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), des règlements qu’elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le DT peut notamment en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI). Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le DT en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le DT notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu'il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu'il n'invoque l'urgence (art. 132 al. 1 LCI).

Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel. Il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (Message du Conseil fédéral du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la LAT, FF 2010 964 ch. 1.2.1 et 973 ch. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_176/2016 du 10 mai 2017 consid. 7.1 et 1C_109/2014 du 4 mars 2015 consid. 6.5 ; RUDOLF MUGGLI, Commentaire pratique LAT : construire hors zone à bâtir, 2017, n. 1 et 16 ad remarques préliminaires relatives aux art. 24 à 24e et 37a LAT ; Bernhard WALDMANN/Peter HÄNNI, Handkommentar RPG, 2006, n. 14 ad art. 1 LAT ; Jean-Michel BRAHIER/Pierre PERRITAZ, LAT révisée, dézonage et indemnisation des propriétaires, 2015, p. 74). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues par la loi, demeurer d'application stricte (ATF 132 II 21 consid. 6.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.301/2000 du 28 mai 2001 consid. 6c publié in ZBl 2002 p. 364). Si des constructions illégales, contraires au droit de l'aménagement du territoire, sont indéfiniment tolérées en dehors de la zone constructible, le principe de la séparation du bâti et du non-bâti est remis en question et un comportement contraire au droit s'en trouve récompensé. S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole (ATF 132 II 21 consid. 6.4 ; 111 Ib 213 consid. 6b ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.301/2000 du 28 mai 2001 consid. 6c in ZBl 2002 p. 364) ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (arrêt du Tribunal fédéral 1C_276/2016 du 2 juin 2017 consid. 3.3). C'est pourquoi, en règle générale, les constructions érigées sans droit en zone agricole doivent être supprimées, à moins que - à titre exceptionnel - l'écart constaté par rapport à ce qu'admet le droit se révèle mineur et qu'une remise en état ne soit pas dans l'intérêt public. La jurisprudence réserve encore les situations dans lesquelles le bénéficiaire de l'autorisation de construire frappée de nullité pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_508/2018 du 15 juillet 2019 consid. 2.1 ; ATF 136 II 359 consid. 6 ; 132 II 21 consid. 6).

Le fait qu'une activité agricole remplisse les conditions énoncées aux art. 16 et 16a LAT ne signifie pas encore qu'une autorisation de construire une nouvelle installation en application de l'art. 22 LAT doive nécessairement être délivrée. En effet, l'autorité compétente doit examiner en premier lieu si la nouvelle activité peut être réalisée dans les locaux existants ; si tel n'est pas le cas, elle doit en outre vérifier que la nouvelle construction n'est pas surdimensionnée par rapport à l'utilisation envisagée et les besoins de l'exploitation et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à l'implantation du nouveau bâtiment à l'endroit prévu (art. 34 al. 4 de l’ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 - OAT - RS 700.1 ; ATF 129 II 413 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 du 2 octobre 2020 consid. 2.4.5).

d. De jurisprudence constante, pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter cinq conditions cumulatives :

- l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur ;

- les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ;

- un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux, sauf en zone agricole, où la prescription ne court pas (arrêt du Tribunal fédéral 1C_469/2019 du 28 avril 2021 consid. 4 et 5 ;

- l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi ;

- l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/330/2021 du 16 mars 2021 consid. 3c et les références citées).

e. Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées).

Les critères de l'aptitude et de la subsidiarité sont particulièrement concernés lorsqu'un ordre de démolition pur et simple est envisagé. Ils impliquent en effet de déterminer si une - ou plusieurs - autre mesure administrative pourraient être préférées, le cas échéant en combinaison.

La proportionnalité au sens étroit implique une pesée des intérêts. C'est à ce titre que l'autorité renonce à ordonner la remise en conformité si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle. Le postulat selon lequel le respect du principe de la proportionnalité s'impose même envers un administré de mauvaise foi est relativisé, voire annihilé, par l'idée que le constructeur qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que cette dernière se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour le constructeur (Nicolas WISARD/Samuel BRÜCKNER/Milena PIREK, Les constructions « illicites », in Jean-Baptiste ZUFFEREY [éd.], Journées suisses du droit de la construction 2019, p. 218).

Donner de l'importance aux frais dans la pesée des intérêts impliquerait de protéger davantage les graves violations et mènerait à une forte et inadmissible relativisation du droit de la construction. C'est pourquoi il n'est habituellement pas accordé de poids particulier à l'aspect financier de la remise en état (Vincent JOBIN, Construire sans autorisation - Analyse des arrêts du Tribunal fédéral de 2010 à 2016, VLP-ASPAN, Février 1/2018, p. 16 et les références citées).

6) Le recourant fait valoir que le bungalow est de dimensions modestes, qu’il est provisoire, que son usage est conforme à la zone agricole, qu’il n’empiète pas sur un champ cultivé et qu’il sera remplacé par le second hangar. Lui et ses fils disposeraient d’un intérêt prépondérant à pouvoir poursuivre une activité annexe à l’exploitation, de sorte que l’ordre de démolition serait disproportionné.

Il ne saurait être suivi. Il ne conteste pas que le bungalow a été construit sans autorisation alors qu’il y était assujetti. Il ne soutient pas qu’il aurait déposé une demande en vue de sa régularisation ni que cette dernière pourrait être octroyée. La taille modeste du bâtiment et le fait que l’activité qui s’y déploie serait conforme à la zone agricole ne constitueraient que deux critères parmi d’autres à examiner en vue d’une éventuelle régularisation, sans qu’on puisse pour autant affirmer que celle-ci serait octroyée. Ils ne sont quoi qu’il en soit pas pertinents pour l’examen de la proportionnalité de la mesure querellée. Le caractère provisoire du bungalow peut être mis en doute par la durée de son existence, et faute pour le recourant d’avoir entamé une procédure, on ignore si la construction du second hangar destiné à la remplacer est réellement prévue et pourrait être autorisée. Le recourant n’établit pas un cas exceptionnel ni un intérêt supérieur qui prévaudrait sur l’application stricte de la loi. L’ordre de démolition apparaît ainsi fondé et proportionné.

Le grief sera écarté.

Il ne peut par ailleurs être donné suite à la conclusion subsidiaire du recourant tendant à ce que l’ordre de démolition ne prenne effet qu’après refus définitif de la demande d’autorisation de construire le nouvel hangar, car cela reviendrait à subordonner l’entrée en force d’une décision à un événement incertain, étant observé que le recourant n’a pas même déposé une demande à ce jour.

7) Le recourant fait valoir que l’entreposage des balles d’ensilage ne constituerait pas une installation sujette à autorisation.

a. Selon la jurisprudence, sont considérés comme des constructions ou installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT tous les aménagements durables et fixes créés par la main de l'homme, exerçant une incidence sur l'affectation du sol, soit parce qu'ils modifient sensiblement l'espace extérieur, soit parce qu'ils chargent l'infrastructure d'équipement ou soit encore parce qu'ils sont susceptibles de porter atteinte à l'environnement (ATF 140 II 473 consid. 3.4.1 ; 123 II 256 consid. 3 ; ATF 119 Ib 222 consid. 3a). La définition jurisprudentielle susmentionnée comporte quatre conditions cumulatives (Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p. 214-218) : (1) la création par la main de l'homme, excluant toute modification naturelle du terrain telle que des éboulis ; (2) la durabilité de l’aménagement, contrairement à une construction provisoire qui peut être enlevée sans frais excessifs et dont l'existence est limitée dans le temps de manière certaine. La condition est remplie pour l’installation d’une caravane pour une durée supérieure à deux mois, un dépôt de matériel d’excavation aménagé pour une durée supérieure à trois mois ou neuf projecteurs qui ne sont pas ancrés solidement au sol mais vissés sur des socles, des parois ou des câbles et sont rapidement démontables parce qu’ils sont destinés à éclairer la pointe du Pilate (ATF 123 II 256 consid. 3). Ont en revanche un caractère provisoire, l’édification répétée, mais pour quelques jours seulement d’un pavillon destiné à des manifestations musicales ou une installation de triage de gravats et de déchets de construction, régulièrement démontée (exemples tirés de Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, op. cit. p. 215) ; (3) la fixation au sol de la construction. Sont assimilés à des constructions tous les bâtiments en surface, y compris les abris mobiles, installés pour un temps non négligeable en un lieu fixe. L'exigence de la relation fixe avec le sol n'exclut pas la prise en compte de constructions mobilières, non ancrées de manière durable au sol et qui sont, le cas échéant, facilement démontables. Ainsi, neuf projecteurs qui ne sont pas fixés au sol mais à des socles, rattachés par des vis à des parois et des cordes et démontables rapidement, remplissent cette condition, l’installation étant aménagée afin de rester là à demeure (ATF 123 II 256 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral du 5 juillet 2011 dans la cause 1C_75/2011 consid. 2.1 ; Alexander RUCH, in Heinz AEMISEGGER/Alfred KUTTLER/Pierre MOOR/Alexander RUCH, Commentaire de la LAT, 2010, n. 24 ad art. 22 LAT). Des nattes en géotextile, utilisées pour aménager une parcelle d'une superficie de 5'773 m2, couvrant les talus en pente depuis plus de deux ans et demi sont indéniablement des éléments durablement fixés au sol (arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2011du 5 septembre 2011 consid. 3.3). Les roulottes pour forains ne remplissent pas cette condition parce qu’elles ne sont pas dépendantes d’un lieu déterminé au contraire d’un « véhicule habité » (ATF 99 Ia 115 consid. 3 = JdT 1974 I 642). Un abri mobile servant de logement pour des requérants d’asile remplit cette condition (exemple cité par Alexander RUCH, op. cit, p. 15) ; (4). l’incidence sur l’affectation du sol, laquelle peut se manifester de trois manières, alternatives ou cumulatives, à savoir l’impact sur le paysage, les effets sur l’équipement et l’atteinte à l’environnement au sens large, soit la protection des eaux, de la forêt, de la faune, de la nature et du paysage par son impact esthétique sur le paysage (Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, op. cit., p. 216). L’élément déterminant n’est pas tant l’installation en soi que l’utilisation qui en sera faite et en particulier son impact sur l’environnement au sens large (ATA/244/2013 du 16 avril 2013 ; ATA/61/2011 du 1er février 2011 ; Alexander RUCH, op. cit., ad art. 22 n. 28 ; DFJP/OFAT, Étude relative à la loi fédérale sur l’aménagement du territoire, 1981, ad art. 22 n. 5 ss).

La qualité d’installation au sens de l'art. 22 al. 1 LAT a par exemple été reconnue à un paddock, son chemin d'accès et sa barrière, un marcheur à chevaux, de même qu'un abri en bois pour ces derniers (ATA/161/2021 du 9 février 2021), à une piscine hors-sol (ATA/610/2017 du 30 mai 2017 consid. 6c), à un entreposage de voitures (ATA/1128/2020 du 23 janvier 2021 consid. 9 ; ATA/690/1999 du 23 novembre 1999 consid. 7 ; ATA D. du 7 septembre 1999) ou de matériel d’une entreprise de maçonnerie (ATA T. du 27 avril 1999). Un entreposage massif de voitures en zone villas a été considéré comme sujet à autorisation et contraire à la destination de la zone et la remise en état confirmée (ATA/208/2021 du 23 février 2021 consid.11). La jurisprudence a par ailleurs soumis à autorisation trois pyramides métalliques de couleur rouille, de 3,68 m de largeur à la base et 2,76 m de hauteur, destinées à orner un alpage et sous lesquels les cendres des défunts pouvaient être répandues celles-ci ayant été considérées comme ayant un impact esthétique sur le paysage (ATF 119 Ib 444 consid. 3b) ; quatre panneaux solaires de 4 m2 à flanc de montagne (ZBI 1988 p. 333) ; des statues de chevaux éclairées la nuit dans une allée d’une propriété privée, mais située en zone de protection (arrêt du Tribunal fédéral 1C_529/2012 du 29 janvier 2013). Pour les impacts sur l’environnement, une place d’atterrissage pour planeurs, même sommairement aménagée (ATF 119 Ib 222), des installations d’éclairage d’une montagne (ATF 123 II 256), une installation d’effraiement des oiseaux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2007 du 24 septembre 2007) sont soumis à autorisation.

b. En l’espèce, la chambre de céans tiendra tout d’abord pour acquis, sur le vu de la documentation préparée par le département et figurant à la procédure ainsi que des explications du recourant, que les balles d’ensilage occupent une part importante de la parcelle durant une longue période de l’année et ce depuis plusieurs années, qu’elles occupent une superficie non négligeable et possèdent un volume important, et que leur empilement leur fait atteindre une hauteur presque égale à celle du hangar existant et dépassant la butte avoisinante.

Par ses dimensions et son emprise, l’empilement durable et répété de balles d’ensilage correspond donc à une installation au sens de la jurisprudence et est partant sujet à autorisation.

Le fait que l’empilement soit constitué de produits de l’activité agricole est sans pertinence pour la qualification d’installation : c’est l’empilement durable et massif qui caractérise l’installation en l’espèce.

De même, le fait que les balles d’ensilage se voient fréquemment à la campagne n’est pas de nature à minimiser le caractère massif et durable de leur empilement ni de soustraire celui-ci à toute autorisation.

Pour les mêmes motifs, alors même qu’il est constitué de produits de l’agriculture, l’entreposage durable et massif a en l’espèce un impact paysager. La présence d’une haie cachant en tout ou en partie la vue de l’empilement depuis la route n’y change rien, l’impact paysager pouvant être aperçu d’autres points de vue, ainsi qu’en attestent les photos du département.

Le raisonnement qui précède s’étend a fortiori à tous les autres objets entreposés sur la parcelle, y compris l’autocar, dont le recourant ne prétend d’ailleurs pas qu’ils devraient être soustraits à l’ordre de remise en état.

Le recourant ne prétend pas pour le surplus qu’il aurait demandé la régularisation de l’entreposage, ni que celle-ci pourrait être octroyée.

Le grief sera écarté.

Il ne peut par ailleurs être donné suite à la conclusion subsidiaire du recourant tendant à ce que le dépôt soit laissé en place « jusqu’à ce qu’il soit statué définitivement sur la requête d’autorisation de construire que, cas échéant, [le recourant] sera tenu de déposer à l’issue de la présente procédure », étant observé que le constat de l’illicéité d’une installation et du bien fondé d’un ordre de remise en état ne sauraient dépendre en l’espèce de l’octroi futur, et en l’état purement hypothétique, d’une autorisation de construire une autre installation.

8) Le recourant se plaint enfin de la référence aux surfaces d’assolement s’agissant de l’ordre de remise en état du terrain de la parcelle.

La note de bas de page de la décision du département du 29 janvier 2021 précise qu’une fois démolies toutes les constructions et installations en question, « leurs emplacements devront être à nouveau aptes à être exploités pour l’agriculture, le sol devant être reconstitué au niveau du terrain naturel préexistant ».

La note, qui se poursuit par des références pour les surfaces en pleine terre, la mention d’un guide et l’indication que des délais peuvent être octroyés et des questions posées au service de géologie, sols et déchets, apparaît être une note générique. C’est à tort que le recourant croit devoir en déduire l’obligation de reconstituer un autre sol que celui concrètement préexistant. Cela n’a pas échappé au TAPI et le département a confirmé dans ses écritures qu’il ne lui était pas imposé d’exigences de qualité supérieures.

Le grief sera écarté.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

9) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2’000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 décembre 2021 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 novembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2’000.- à la charge de M. A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mattia Deberti, avocat du recourant, au département du territoire – OAC, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :