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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4684/2019

ATA/161/2021 du 09.02.2021 sur JTAPI/840/2020 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4684/2019-LCI ATA/161/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 février 2021

3ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me François Bellanger, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er octobre 2020 (JTAPI/840/2020)


EN FAIT

1) Madame A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ dans la commune de B______, d'une surface de 199'874 m2, en zone agricole, sise à l'adresse route de C______, B______.

2) La majorité de la parcelle est composée de surfaces d'assolement (ci-après : SDA), à l'exception de zones d'habitation, de bâtiments agricoles, de vignes, de bois et bosquets, de vergers traditionnels, ainsi que des zones de grandes cultures, pâturages et prés maraîchers.

3) Sur ladite parcelle se trouvent notamment deux bâtiments de production agricole de 107 m2 et 255 m2, deux garages privés de 102 m2 et 37 m2, une serre de 101 m2, différents logements de respectivement 420, 384 et 171 m2 et deux dépôts de 376 et 84 m2.

4) Par courrier du 17 octobre 2019, le département du territoire (ci-après : le département) a informé Mme A______ que l'office de l'urbanisme, lequel réalisait alors un inventaire des SDA, lui avait signalé que des équipements équestres avaient été installés dans la zone nord-ouest de sa parcelle.

Ces équipements, au sujet desquels le département n'avait été saisi d'aucune demande d'autorisation de construire, étaient susceptibles d'être soumis à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Un délai de dix jours lui était accordé pour se déterminer.

5) Le 4 novembre 2019, Mme A______ a expliqué au département qu'elle s'occupait du domaine agricole de « C______ » depuis bientôt vingt ans, lequel comprenait des champs de cultures, des vergers, de la culture maraîchère et de l'apiculture.

Elle détenait sur sa parcelle des chevaux de loisir ainsi qu'un élevage de demi-sang suisses pour son usage personnel. Le paddock était composé de sable et entouré d'une petite barrière avec une haie de charmilles. Le sable pouvait être très facilement enlevé afin de permettre rapidement l'exploitation de la surface agricole. Le terrain n'avait dès lors subi aucune modification, le paddock en place n'engendrant aucune incidence sur l'affectation du sol ou sa configuration. Il ne pouvait ainsi pas être considéré comme une construction ou installation soumise à autorisation au sens de la LCI.

6) Par décision du 14 novembre 2019, le département a ordonné la suppression, dans un délai de soixante jours, du paddock et de sa barrière, du chemin d'accès et du bâtiment au nord du paddock, du bâtiment circulaire à l'est du bâtiment au nord-est du paddock, ces constructions et installations n'ayant fait l'objet d'aucune autorisation. Un reportage photographique attestant de la remise en état devait parvenir au département dans le même délai.

Les zones affectées par lesdites constructions et installations devaient être rétablies et être prêtes à l'exploitation l'agricole, le sol devant être reconstitué au niveau préexistant et répondre aux critères des surfaces d'assolement.

Compte tenu de la situation de la parcelle en zone d'assolement, le dépôt d'une requête en autorisation de construire serait superfétatoire. Mme A______ pouvait néanmoins en déposer une dans les trente jours suivant la notification de la décision.

7) Par acte du 16 décembre 2019, Mme A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision du 14 novembre 2019, concluant à son annulation. Plusieurs pièces étaient produites à l'appui du recours.

Les installations équestres visées par l'ordre de remise en état n'étaient pas des constructions et installations au sens de la loi et ne nécessitaient dès lors pas d'autorisation de construire, si bien que la remise en état ne pouvait pas être exigée. Quoi qu'il en fût, l'ordre de remise en état était disproportionné.

Le paddock en sable et la barrière, démontable, indispensables pour l'élevage des chevaux, n'étaient pas des installations fixes. Si le sol avait été creusé sur environ 25 cm pour y encastrer le sable, il n'y avait eu aucune modification ou dégradation de la terre, de sorte que le paddock n'avait pas d'impact sur l'environnement. Le sable, une substance naturelle, pouvait être très facilement enlevé en une journée. Le sol serait ensuite immédiatement cultivable. Ces installations n'ayant aucun impact sur la SDA ou sur l'environnement, une remise en état serait disproportionnée.

Le chemin d'accès au paddock, en terre, était recouvert d'une couche de sable, ce qui n'entraînait ni modification, ni dégradation de la terre. Une fois le sable enlevé, le terrain serait immédiatement cultivable.

Le couvert en bois abritait les chevaux des intempéries. Il était parfaitement conforme à la zone agricole, étant précisé que sa composition se limitait à une structure en bois, sans béton ni ancrage au sol. Le marcheur, simple structure métallique posée à même le sol, était également indispensable pour l'élevage de chevaux. Ces deux structures étant facilement démontables, elles n'avaient aucun impact sur l'environnement.

8) Le 3 mars 2020, le département a conclu au rejet du recours.

Le terrain du paddock et le chemin d'accès avaient été modifiés durablement dans la mesure où une remise en état n'était pas prévue avant la fin de l'exploitation. Ils modifiaient l'aspect et la destination du terrain. Mme A______ reconnaissait la nécessité d'enlever le sable pour remettre le terrain dans son état d'origine. Le couvert en bois, même s'il était facilement démontable, était, à l'instar d'un couvert de garage, soumis à la LCI, l'ancrage au sol n'étant pas déterminant. Le marcheur pour les chevaux, utilisé de façon permanente, était une construction dont l'impact visuel, le changement de destination et l'impact environnemental étaient évidents. Il était paradoxal que Mme A______ soutienne que ces installations fussent facilement démontables et dans le même temps que la remise en état fût disproportionnée.

Les constructions étaient certes indispensables pour l'élevage de chevaux et de poulains, lequel ne servait toutefois pas à l'exploitation agricole ou horticole. Cet élevage n'avait dès lors pas sa place dans la zone agricole.

9) Le 13 mai 2020, la recourante a produit plusieurs pièces à l'appui de sa réplique.

Le domaine agricole de « C______ » était vaste et les installations équestres, de petite envergure, étaient distantes de plus de 500 m des voisins, de sorte qu'elles ne portaient pas atteinte à des intérêts publics ou privés, n'ayant aucun impact, que ce soit visuellement ou sur l'environnement.

10) Après duplique du département, le TAPI a, par jugement du 1er octobre 2020, rejeté le recours de Mme A______.

Le paddock, son chemin d'accès, la barrière en bois et la haie de charmilles avaient été créés de la main de l'homme et étaient amenés à durer. Creuser la terre sur une trentaine de centimètres portait atteinte à l'épaisseur du sol, mais également à la succession des couches pédologiques, puisque cela supprimait la couche supérieure (horizon A) s'étendant sur une profondeur de 5 à 30 cm. En remplaçant cette couche par du sable, Mme A______ avait également porté physiquement atteinte à la fertilité du sol, soit aux propriétés que doit offrir une SDA, d'où un impact indiscutable sur l'environnement. La barrière et la haie constituaient des constructions et installations au sens de l'art. 1 al. 1 let. b du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01) et de la jurisprudence. Le chemin d'accès au paddock avait une influence sur l'affectation du sol, initialement prévu pour l'exploitation agricole, et avait un impact visuel.

Le couvert en bois dédié aux chevaux, bien qu'il soit facilement démontable, remplissait les critères d'une construction fixe et durable puisqu'il était fixé au sol et n'avait pas une durée de vie délimitée dans le temps, à l'image d'une cabane de jardin ou d'un couvert servant de garage. Sa surface ne pouvait plus être destinée à l'agriculture et modifiait l'aspect visuel. Le marcheur pour chevaux, utilisé de façon permanente, devait être considéré comme une installation vu son caractère durable et sa fixation au sol. Le fait que cette structure soit légère, amovible et facilement démontable n'empêchait pas cette qualification. Sa présence en zone agricole modifiait l'affectation du sol, puisque l'élevage de chevaux était sans lien avec l'activité agricole.

Aucun élément du dossier ne laissait présumer que la prescription trentenaire serait acquise ou que l'autorité aurait créé, par son comportement ou des informations, des attentes protégées par le principe de la bonne foi, ce qui n'était d'ailleurs pas allégué.

Il existait un intérêt public certain au rétablissement d'une situation conforme au droit, de même qu'à la préservation des terres agricoles en application de l'art. 16 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), d'autant plus que la zone concernée était classée comme SDA, bénéficiant d'une protection accrue, spécialement dans le canton de Genève. On ne voyait pas quelle mesure moins incisive permettrait de protéger ces intérêts publics, surtout s'agissant du paddock, lequel portait atteinte à la fertilité de la terre. L'intérêt privé de Mme A______ à maintenir ces différentes installations pour élever des chevaux dans des buts personnels et de loisirs ne pouvait l'emporter sur cet intérêt public, étant précisé qu'elle avait placé l'autorité devant le fait accompli. Par ailleurs, elle ne démontrait pas que la remise en état serait impossible ou entraînerait des surcoûts disproportionnés. Partant, l'ordre de remise en état du département était justifié.

11) Mme A______ a formé recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par acte du 4 novembre 2020, concluant à son annulation, de même qu'à celle de la décision du département du 14 novembre 2019 et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Elle contestait le caractère fixe, durable et un impact sur l'environnement des installations en cause. Elles pouvaient être facilement démontées à tout moment et sans dégradation durable de la terre. Le paddock et le marcheur étaient indispensables pour l'élevage de ses poulains et de ses chevaux. La nature du terrain n'avait nullement été modifiée : une fois le sable, matière naturelle, enlevé du paddock, en une journée, le terrain serait immédiatement cultivable. La couche supérieure pédologique de 30 cm de profondeur n'avait pas été complètement supprimée, puisque moins de 25 cm avaient été décaissés. La fertilité du terrain était donc conservée. Le chemin en terre sablonneuse du Salève menant au paddock, empêchant que le passage des chevaux ne rende le terrain boueux et impraticable, était parfaitement conforme à la zone agricole. Une fois le sable enlevé, le terrain serait à nouveau immédiatement cultivable. Les chevaux et poulains devaient, conformément à l'art. 6 al. 1 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux (LPAn - RS 455), pouvoir être abrités des intempéries. Le couvert en bois était donc conforme à la zone agricole, étant relevé l'absence d'autre matériau et d'ancrage au sol. Le marcheur n'était pas fixé et pouvait facilement être enlevé, sans aucune atteinte au sol. La petite barrière du paddock était facilement démontable, ce qui démontrait qu'il ne s'agissait pas d'une structure fixe ancrée au sol de manière durable. L'ensemble de ces éléments, conforme à la zone agricole, n'avait aucun impact sur l'environnement et ne portait pas atteinte à l'intérêt public ou à celui des voisins, distants de plus de 500 m, de sorte que rien ne justifiait une autorisation de construire.

Une démolition du paddock serait totalement disproportionnée puisque Mme A______ exploitait depuis plus de vingt ans sur la parcelle concernée un vaste domaine agricole et viticole et que les installations litigieuses étaient conformes à cette destination. Pour les raisons déjà développées, aucun intérêt public prépondérant n'exigeait une remise en état, du paddock, du marcheur, de la barrière, de la haie de charmilles, du couvert en bois et du chemin en terre sablonneuse. Ces éléments, tous aisément démontables, étaient au demeurant indispensables pour la détention d'équidés et conformes à l'art 24e LAT, ce que le TAPI n'avait à tort pas pris en considération.

12) Aux termes de sa réponse du 7 décembre 2020, le département a conclu au rejet du recours.

Mme A______ se gardait d'avancer une quelconque date de l'entame de son activité en lien avec ses chevaux, respectivement de sa légalité. Elle disposait d'une formation d'architecte et était inscrite sur la liste des mandataires professionnellement qualifiés (MPQ n° 2______). À teneur des images aériennes du système d'information du territoire à Genève (ci-après : SITG), elle avait développé sur sa parcelle une activité équestre de plus en plus étendue depuis 2005. Le 27 mai 2005 avait été délivrée une autorisation de construire portant sur l'aménagement d'une cour et le 7 décembre 2006 sur l'aménagement d'un couvert à voitures. Une demande enregistrée le 12 décembre 2008 portait initialement sur la transformation d'un pressoir en écurie, projet finalement abandonné. Dans le cadre de ces trois demandes, Mme A______ apparaissait comme MPQ. Aucune des autorisations de construire délivrées ne portait sur un quelconque usage équestre de la parcelle.

Entre 2006 et 2007, l'ensemble de la parcelle avait fait l'objet de mesures de protection du patrimoine (classement et mises à l'inventaire), « comme support et cadre visuel du domaine ».

En zone agricole, l'assujettissement à autorisation de travaux de construction était une obligation systématique (art. 24a LAT). S'agissant d'un domaine classé, toute intervention était obligatoirement assujettie à autorisation de construire en raison de motifs patrimoniaux (art. 13 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 - LPMNS - L 4 05). L'ensemble des installations concernées se caractérisait par un changement d'affectation (activité équestre) ayant un impact sur la zone agricole (usage accru, respectivement atteinte au sol).

Mme A______ reconnaissait que le sable du paddock avait été apporté par la main de l'homme. Le retrait d'environ 25 cm de terre naturelle avait nécessité d'autres interventions de l'homme, ce qui était aussi le cas pour le chemin sablonneux. Le concernant, l'impact sur le sol et donc à l'affectation primaire agricole était démontré par Mme A______ qui indiquait qu'en l'absence de chemin sablonneux, le terrain serait boueux et impraticable pour les chevaux. Le compactage initial du sol était encore accentué par les allées et venues répétées sur ce chemin. S'y ajoutait la clôture. Le tout avait engendré un changement d'affectation, des cultures en pleine terre n'étant plus possibles. Même en y remettant de la terre correspondant aux caractéristiques de l'horizon A, il faudrait environ quatre années avant un retour à une exploitation agricole normale, les trois premières années se limitant à de la prairie plus ou moins extensive. Cette observation valait également pour la remise en état après disparition du couvert en bois et du marcheur. Le fait que la barrière puisse être facilement enlevée n'était pas relevant au sens de la jurisprudence. La plantation de la haie était également du fait de l'homme, avec une volonté d'engendrer une influence spatiale (délimitation) et, tout comme les autres installations, était soumise à autorisation de construire, d'autant plus vu son impact visuel en lien avec la mesure de classement.

Mme A______ ne se prévalait d'aucun permis de construire portant par exemple sur une écurie, qui serait le premier élément constructif indispensable à l'activité équestre déployée sans autorisation, étant rappelé que la conservation du pressoir avait prévalu sur la construction d'une écurie. Dans les archives du département, il n'était nullement fait état d'une détention de chevaux qui aurait déjà cours dans le domaine. Pour ces seuls motifs il y avait lieu de rejeter tout allégué justificatif via une dérogation selon l'art. 24e LAT puisque des infrastructures préexistantes pour la détention de chevaux n'apparaissaient pas exister, du moins légalement. Pour le surplus, au vu des informations lacunaires données par Mme A______ sur son activité équestre (nombre de chevaux, revenus, lieu de production du fourrage, bâtiments concernés, etc.), les conditions de cette disposition ne pouvaient pas être analysées en l'espèce puisque la majorité des installations litigieuses servait uniquement à titre de loisir avec les animaux, tandis que le couvert à bois, un abri de pâturage, était exclu par l'art. 42b al. 5 let. b de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1). Le cheminement créé n'était pas qu'une légère extension des équipements existants. L'exploitation agricole des terrains environnants s'avérait menacée. L'intérêt public prépondérant, soit la préservation des meilleures terres cultivables (SDA) devait être privilégié sur l'intérêt privé de Mme A______ à pouvoir déployer des infrastructures visant à répondre à ses loisirs équestres. Mme A______ semblait d'ailleurs en être pleinement consciente puisque, nonobstant son statut de MPQ et son implication dans des requêtes, elle avait choisi de mettre le département devant le fait accompli, démontrant implicitement qu'elle savait que toute requête s'y rapportant serait vouée à l'échec.

Faute d'avoir un statut d'agricultrice, seul le régime dérogatoire était envisageable. Les art. 16, 16a LAT et OAT n'étaient pas applicables en l'espèce.

L'ordre de remise en état était parfaitement proportionné au vu de ces éléments et de l'argumentation de Mme A______ selon laquelle les installations litigieuses étaient facilement démontables.

13) Dans une réplique du 11 janvier 2021, et qui n'ait pas déjà été exposé, Mme A______ a relevé qu'elle avait des chevaux de loisir depuis 2000 sur sa parcelle, dans l'écurie historique, d'une surface de 107 m2, apparaissant notamment déjà sur les anciennes cartes historiques du XIXème siècle, et non de 1991 à 1995 selon les données erronées du SITG, dans la poursuite de la tradition - à des fins agricoles et de loisir - y prévalant depuis 1876 au moins, sans interruption, ce dont attestaient d'anciennes photos et Monsieur D______. Il n'y avait donc aucun changement d'affectation. Le classement de la parcelle était donc sans impact concernant la détention de chevaux. En qualité d'architecte, elle s'était toujours évertuée à respecter les exigences légales en toute bonne foi, notamment en lien avec les autorisations de construire pour la cour et le couvert à voitures. Son activité d'architecte n'était qu'accessoire et elle s'occupait principalement du domaine agricole depuis vingt ans, notamment de ses chevaux. Elle détenait depuis lors six chevaux, dont un poulain par année, pour son usage personnel. Deux se trouvaient dans les écuries et les autres dans les parcs. Le fourrage était produit sur le domaine et entreposé dans la partie supérieure de l'écurie historique. Mme A______ avait finalement renoncé à la transformation, dûment autorisée, du pressoir en écurie.

Le département faisait une comparaison erronée entre la situation du paddock et du couvert en bois (où il suffirait de compléter sur environ 20 cm une partie de couche horizon A), avec celle d'une construction totale du sol, avec un bétonnage sur 10 cm et une couche de fondation de 40 cm entraînant une suppression totale des couches horizon A et B. Dans un tel cas, le temps pour réparer le sol était de trois ans et non quatre. La haie de charmilles était totalement naturelle et parfaitement conforme à la zone agricole. Les installations litigieuses n'avaient aucun impact visuel prépondérant, ni environnemental et ne constituaient nullement un changement d'affectation, puisque le domaine abritait des chevaux depuis 1876. L'activité liée aux chevaux sur ce domaine était un droit acquis. Dans la mesure où les chevaux étaient hébergés dans l'écurie historique, aucune autorisation de construire ne devait être demandée pour cet usage conforme à la destination du bâtiment en question. Le couvert à bois était conforme à la zone agricole et n'était nullement assimilable à un abri de pâturage. Il s'y ajoutait qu'il n'était pas possible de prévoir une aire de sortie près de l'écurie historique et qu'une partie des chevaux était hébergée dans les parcs, ce qui justifiait cette exception. Le paddock, la barrière, la haie de charmilles et le marcheur étaient certes des installations pour des activités à titre de loisir avec les animaux, mais elles étaient indispensables pour la détention de chevaux. Elles devaient être autorisées en application de l'art. 24d al. 3 let.c LAT.

À l'appui de sa réplique, Mme A______ a en particulier produit vingt-huit pièces en lien avec la présence d'une écurie et de chevaux sur le domaine depuis 1876, dont une attestation de M. D______ du 10 janvier 2021, et la fiche n°7, Protection du sol, du Service de géologie, sols et déchets.

14) Les parties ont été informées, le 12 janvier 2021, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) En vertu de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b) ; les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

3) La recourante soutient que les aménagements - paddock (sol, barrière et haie), chemin d'accès, couvert en bois et marcheur à chevaux - en lien avec son activité de loisir liée à la détention de plusieurs équidés sur le domaine agricole dont elle est propriétaire ne nécessiteraient pas la délivrance d'une autorisation au sens de la LCI.

4) a. Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente. L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 1 et al. 2 let. a LAT).

Sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail, ni modifier la configuration du terrain, ni aménager des voies de circulation, des places de parcage ou une issue sur la voie publique (art. 1 al. 1 let. a, d et e LCI).

Selon l'art. 1 RCI, sont réputées constructions ou installations toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol, ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires, soit notamment les murs, clôtures, portails, poulaillers, clapiers, chenils (let. b), les garages et ateliers de réparations, les entrepôts, les dépôts de tous genres (let. c).

Selon la jurisprudence, sont considérés comme des constructions ou installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT tous les aménagements durables et fixes créés par la main de l'homme, exerçant une incidence sur l'affectation du sol, soit parce qu'ils modifient sensiblement l'espace extérieur, soit parce qu'ils chargent l'infrastructure d'équipement ou soit encore parce qu'ils sont susceptibles de porter atteinte à l'environnement (ATF 140 II 473 consid. 3.4.1 ; 123 II 256 consid. 3 ; ATF 119 Ib 222 consid. 3a).

La définition jurisprudentielle susmentionnée comporte quatre conditions cumulatives (Piermarco ZEN-RUFFINEN / Christine GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p. 214-218) :

1. La création par la main de l'homme, excluant toute modification naturelle du terrain telle que des éboulis ;

2. La durabilité de l'aménagement, contrairement à une construction provisoire qui peut être enlevée sans frais excessifs et dont l'existence est limitée dans le temps de manière certaine. La condition est remplie pour l'installation d'une caravane pour une durée supérieure à deux mois, un dépôt de matériel d'excavation aménagé pour une durée supérieure à trois mois ou neuf projecteurs qui ne sont pas ancrés solidement au sol mais vissés sur des socles, des parois ou des câbles et sont rapidement démontables parce qu'ils sont destinés à éclairer la pointe du Pilate (ATF 123 II 256 consid. 3 p. 259). Ont en revanche un caractère provisoire, l'édification répétée, mais pour quelques jours seulement d'un pavillon destiné à des manifestations musicales ou une installation de triage de gravats et de déchets de construction, régulièrement démontée (exemples tirés de Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, op. cit. p. 215) ;

3. La fixation au sol de la construction. Sont assimilés à des constructions tous les bâtiments en surface, y compris les abris mobiles, installés pour un temps non négligeable en un lieu fixe. L'exigence de la relation fixe avec le sol n'exclut pas la prise en compte de constructions mobilières, non ancrées de manière durable au sol et qui sont, cas échéant, facilement démontables. Ainsi, neuf projecteurs qui ne sont pas fixés au sol mais à des socles, rattachés par des vis à des parois et des cordes et démontables rapidement, remplissent cette condition, l'installation étant aménagée afin de rester là à demeure (ATF 123 II 256 consid. 3 p. 259 ; arrêt du Tribunal fédéral du 5 juillet 2011 dans la cause 1C_75/2011 consid. 2.1 ; Alexander RUCH, in Heinz AEMISEGGER /Alfred KUTTLER/ Pierre MOOR/ Alexander RUCH, Commentaire de la LAT, 2010, n. 24 ad art. 22 LAT). Des nattes en géotextile, utilisées pour aménager une parcelle d'une superficie de 5'773 m2, couvrant les talus en pente depuis plus de deux ans et demi sont indéniablement des éléments durablement fixés au sol (arrêt du 5 septembre 2011 du Tribunal fédéral du 1C_107/2011 consid. 3.3). Un abri mobile servant de logement pour des requérants d'asile remplit cette condition (exemple cité par Alexander RUCH, op. cit, p. 15) ;

4. L'incidence sur l'affectation du sol, laquelle peut se manifester de trois manières, alternatives ou cumulatives, à savoir l'impact sur le paysage, les effets sur l'équipement et l'atteinte à l'environnement au sens large, soit la protection des eaux, de la forêt, de la faune, de la nature et du paysage, par son impact esthétique sur le paysage (Piermarco ZEN-RUFFINEN / Christine GUY-ECABERT, op. cit., p. 216).

L'élément déterminant n'est pas tant l'installation en soi que l'utilisation qui en sera faite et en particulier son impact sur l'environnement au sens large (ATA/244/2013 du 16 avril 2013 ; ATA/61/2011 du 1er février 2011 ; Alexander RUCH, op. cit., ad art. 22 n. 28 ; DFJP/OFAT, Étude relative à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 1981, ad art. 22 n. 5 ss).

Ainsi, la jurisprudence a soumis à autorisation trois pyramides métalliques de couleur rouille, de 3,68 m de largeur à la base et 2,76 m de hauteur, destinées à orner un alpage et sous lesquels les cendres des défunts pouvaient être répandues celles-ci ayant été considérées comme ayant un impact esthétique sur le paysage (ATF 119 Ib 444 consid. 3b), à l'instar de quatre panneaux solaires de 4 m2 à flanc de montagne (ZBI 1988 p. 333), des statues de chevaux éclairées la nuit dans une allée d'une propriété privée, mais située en zone de protection (arrêt du Tribunal fédéral 1C_529/2012 du 29 janvier 2013). Pour les impacts sur l'environnement, une place d'atterrissage pour planeurs, même sommairement aménagée (ATF 119 Ib 222), des installations d'éclairage d'une montagne (ATF 123 II 256), une installation d'effraiement des oiseaux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2007) sont soumis à autorisation.

5) a. La procédure d'autorisation doit permettre à l'autorité de contrôler, avant la réalisation du projet, sa conformité aux plans d'affectation et aux réglementations applicables. Pour déterminer si l'aménagement prévu est soumis à cette procédure, il faut évaluer si, en général, d'après le cours ordinaire des choses, il entraînera des conséquences telles qu'il existe un intérêt de la collectivité ou des voisins à un contrôle préalable (ATF 139 II 134 consid. 5.2 ; ATF 123 II 256 consid. 3 ; ATF 120 Ib 379 consid. 3c, ATF 119 Ib 222 consid. 3a ; arrêt 1C_107/2011 du 5 septembre 2011 consid. 3.2).

b. L'assujettissement a ainsi été admis pour une roulotte de grandes dimensions destinée à jouer le rôle d'une maison de vacances (ATF 100 Ib 482 consid. 4 p. 488), une clôture métallique de 2 m de haut hors de la zone à bâtir (ATF 118 Ib 49), une serre (arrêt 1C_32/2008 du 21 août 2008 consid. 3), un jardin d'hiver, une véranda, une cabane de jardin ou un couvert servant de garage (arrêt non publié 1A.92/1993 consid. 2a et les références). Il en va de même pour des aménagements extérieurs tels que des balustrades préfabriquées, des colonnes en pierre ou une terrasse, des inscriptions publicitaires, effectuées par sablage, singulièrement par la projection de microparticules de maïs, sur une hauteur de six mètres, appelées à s'atténuer avec le temps (arrêt du Tribunal fédéral 1C_618/2014 du 29 juillet 2015 et les références citées). Les plantes et plantations sont assimilées à des constructions et installations au sens du droit de la construction lorsqu'elles revêtent une importance particulière pour le voisinage, de par leur espèce, leur densité et leur disposition. C'est notamment le cas pour la plantation sur une terrasse en toiture d'une trentaine de thuyas en bacs, sur une longueur de 16 m et une hauteur de 2 m (CdE SZ 23.10.2012 ; EGV-SZ 2012, 136 = DC 2014, p. 92 No 90 cité in Journées suisses du droit de la construction 2015 ; Jean-Baptiste ZUFFEREY, p. 212, n. 99).

À l'inverse, l'installation d'une tente du 18 au 28 juillet 2015 pour accueillir une manifestation d'une société locale, remontée pour un festival sur la même parcelle entre le 22 et le 25 août, puis un évènement local le 30 août 2015 avant d'être démontée, accompagnée d'un cabanon pour la période du 18 juillet au 2 août 2015, abritant un bar tenu par la jeunesse locale, n'entrait pas dans la catégorie des constructions au sens de l'art. 22 LAT, s'agissant d'installations présentes durant une « petite vingtaine de jours par année ». Elle ne représentait pas un aménagement durable et fixe (arrêt du Tribunal fédéral 1C_434/2016 du 8 avril 2016). Des plantes isolées ne sont pas soumises à autorisation de construire selon le droit fédéral.

6) Selon l'art. 33 al. 2 de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01), il n'est permis de porter atteinte physiquement à un sol que dans la mesure où sa fertilité n'en est pas altérée durablement.

L'ordonnance sur les atteintes portées aux sols du 1er juillet 1998 (OSol - RS 814.12) régit notamment, afin de garantir à long terme la fertilité du sol, l'observation, la surveillance et l'évaluation des atteintes chimiques, biologiques et physiques portées aux sols ainsi que les mesures destinées à prévenir les compactions persistantes et l'érosion (art. 1 let. a et b).

On entend par atteintes physiques aux sols les atteintes à la structure, à la succession des couches pédologiques ou à l'épaisseur des sols résultant d'interventions humaines (art. 2 al. 4 OSol). Quiconque construit une installation, exploite un sol ou l'occupe d'une autre manière doit, en tenant compte des caractéristiques physiques du sol et de son état d'humidité, choisir et utiliser des véhicules, des machines et des outils de manière à prévenir les compactions et les autres modifications de la structure des sols qui pourraient menacer la fertilité du sol à long terme (6 al. 1 OSol).

7) En l'espèce, si la recourante soutient, notamment photographies à l'appui, que des chevaux auraient déjà été présents depuis 1876 sur son domaine, situé en zone agricole, elle ne prétend pas à juste titre que tel ait été le cas des installations litigieuses. Si elle prétend détenir six chevaux à titre de loisir depuis une vingtaine d'années, elle ne produit pas de pièce permettant de dater et chiffrer les aménagements litigieux. Elle ne soutient toutefois pas qu'ils aient déjà été présents au moment de l'acquisition du domaine.

S'agissant de qualifier ces aménagements de constructions ou installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT, le premier critère issu de la jurisprudence, à savoir une création de la main de l'homme et excluant toute modification naturelle du terrain ne saurait être disputé en l'espèce, pour le paddock, le chemin d'accès, la barrière, la pose d'un marcheur et d'un abri en bois. La recourante ne peut ensuite valablement soutenir que les installations en cause n'auraient pas un caractère durable dans la mesure où elle prétend se livrer à un élevage de chevaux à titre de loisirs depuis vingt ans sur cette parcelle et n'entend pas s'en priver. Le second critère jurisprudentiel est en conséquence également réalisé en l'espèce. Quand bien même le marcheur, la barrière bordant le paddock et l'abri en bois ne seraient pas fixés au sol, ils répondent sans conteste à la notion jurisprudentielle de constructions installées pour un temps non négligeable en un lieu fixe, d'où la réalisation en l'espèce du troisième critère les concernant. La « fixation au sol » du paddock et du chemin d'accès ne fait de même aucun doute, compte tenu notamment du sable qui y a été répandu et s'y trouve indéniablement « pour un temps non négligeable ». Enfin, le critère de l'incidence sur l'affectation du sol est aussi réalisé. Toutes les installations en cause ont un impact visuel sur le paysage. Peu importe à cet égard que les voisins ne se trouvent qu'à 500 m, et ont un effet sur l'environnement au sens large : le paddock et son chemin d'accès, l'emplacement du marcheur et le sol du couvert en bois ne sont plus voués à la culture. L'excavation de la surface du paddock sur 25 cm et la couverture de l'intégralité de la surface par du sable, ce qui vaut aussi pour le chemin d'accès, s'agissant du sable, et quand bien même il s'agirait là d'une matière naturelle, qui n'est toutefois plus la terre cultivable qu'il a remplacée, ont un impact sur l'environnement au même titre qu'une place d'atterrissage sommaire pour planeur, quand bien même la surface globale serait moindre.

Force est ainsi de conclure, à l'instar du département et du TAPI, que l'ensemble des aménagements litigieux sont des constructions/installations au sens de l'art. 22 al. 1 LAT et nécessitaient une autorisation au sens de cette disposition et de l'art. 1 LCI.

Le premier grief de la recourante est ainsi rejeté.

8) La recourante soutient ensuite que dans tous les cas ces installations devraient être autorisées en vertu de la dérogation prévue à l'art. 24e LAT.

a. Selon l'art. 16 LAT, les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique. Elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole (al. 1). Il importe, dans la mesure du possible, de délimiter des surfaces continues d'une certaine étendue (al. 2).

La création et la préservation des SDA est une exigence prévue par la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), selon laquelle la Confédération veille à ce que l'agriculture, par une production répondant à la fois aux exigences du développement durable et à celles du marché, contribue substantiellement à la sécurité de l'approvisionnement de la population (art. 104 al. 1 let. a Cst.).

Ce principe est repris par la LAT et l'OAT. L'art. 3 al. 2 let. a LAT prévoit qu'il convient de réserver à l'agriculture suffisamment de bonnes terres cultivables, en particulier, les SDA. Les SDA font partie du territoire qui se prête à l'agriculture ; elles se composent des terres cultivables comprenant avant tout les terres ouvertes, les prairies artificielles intercalaires et les prairies naturelles arables. Elles sont garanties par des mesures d'aménagement du territoire (art. 26 al. 1 OAT). Les SDA sont délimitées en fonction des conditions climatiques (période de végétation, précipitations), des caractéristiques du sol (possibilités de labourer, degrés de fertilité et d'humidité) ainsi que de la configuration du terrain (déclivité, possibilité d'exploitation mécanisée ; art. 26 al. 2 OAT). Une surface totale minimale d'assolement a pour but d'assurer au pays une base d'approvisionnement suffisante, comme l'exige le plan alimentaire, dans l'hypothèse où le ravitaillement serait perturbé (art. 26 al. 3 OAT). La Confédération et les cantons veillent à la détermination et au maintien de ces surfaces (art. 27 à 30 OAT).

b. Sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui sont nécessaires à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice. Cette notion de conformité peut être restreinte en vertu de l'art. 16, al. 3 (art. 16a al. 1 LAT).

c. La zone agricole est destinée à l'exploitation agricole ou horticole. Ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à cette activité et aux personnes l'exerçant à titre principal (let. a), respectent la nature et le paysage (let. b) et respectent les conditions fixées par les art. 34 ss OAT (let. c ; art. 20 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - LaLAT - L 1 30).

d. Les constructions et installations nécessaires à la détention de chevaux sont conformes à l'affectation de la zone et autorisées dans une entreprise agricole existante au sens de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural si l'entreprise dispose de pâturages et d'une base fourragère provenant majoritairement de l'exploitation. Des places à sol ferme peuvent être autorisées pour l'utilisation des chevaux détenus dans l'exploitation. Les installations directement liées à l'utilisation des chevaux telles que les selleries ou les vestiaires sont autorisées (art. 16abis LAT).

La recourante ne se prévaut à juste titre pas de cette dernière disposition dans la mesure où les chevaux qu'elle détient ne sont pas liés à une activité agricole, mais de loisir.

9) a. Selon l'art. 24e al. 1 LAT, des travaux de transformation sont autorisés dans les bâtiments et les parties de bâtiments inhabités et conservés dans leur substance s'ils permettent aux personnes qui habitent à proximité d'y détenir des animaux à titre de loisir dans des conditions respectueuses (art. 24e al. 1 LAT). Dans le cadre de l'al. 1, de nouvelles installations extérieures sont autorisées dans la mesure où la détention convenable des animaux l'exige. Afin d'assurer une détention respectueuse des animaux, ces installations peuvent excéder les dimensions minimales prévues par la loi pour autant que les exigences majeures de l'aménagement du territoire soient respectées et que l'installation en question soit construite de manière réversible (al. 2). Les installations extérieures peuvent servir à l'utilisation des animaux à titre de loisir pour autant que cela n'occasionne pas de transformations ni de nouvelles incidences sur le territoire et l'environnement (al. 3). Les clôtures qui servent au pacage et qui n'ont pas d'incidences négatives sur le paysage sont autorisées aussi dans les cas où les animaux sont détenus en zone à bâtir (al. 4). Les autorisations prévues par le présent article ne peuvent être délivrées que si les conditions prévues à l'art. 24d al. 3 sont remplies.

Selon l'art. 24d LAT, l'utilisation de bâtiments d'habitation agricoles conservés dans leur substance peut être autorisée à des fins d'habitation sans rapport avec l'agriculture (al. 1). Le changement complet d'affectation de constructions et d'installations jugées dignes d'être protégées peut être autorisé à condition que : a. celles-ci aient été placées sous protection par l'autorité compétente ; b. leur conservation à long terme ne puisse être assurée d'une autre manière (al. 2). Les autorisations prévues par le présent article ne peuvent être délivrées que si : a. la construction ou l'installation n'est plus nécessaire à son usage antérieur, qu'elle se prête à l'utilisation envisagée et qu'elle n'implique pas une construction de remplacement que n'imposerait aucune nécessité ; b.  l'aspect extérieur et la structure architecturale du bâtiment demeurent pour l'essentiel inchangés ; c. tout au plus une légère extension des équipements existants est nécessaire et que tous les coûts supplémentaires d'infrastructure occasionnés par le changement complet d'affectation de la construction ou de l'installation sont à la charge du propriétaire ; d. l'exploitation agricole des terrains environnants n'est pas menacée ; e. aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (al. 3).

b. Dans un arrêt du 25 avril 2007, le Tribunal fédéral avait tenu compte de l'impact d'un jardin potager de 750 m2 sur le paysage et sur l'utilisation agricole du fond retenant qu'il n'était pas négligeable. Pour cette raison déjà, cet aménagement devait être soumis à une autorisation de construire. Enfin, en raison de sa localisation, il était de nature à causer des désagréments aux voisins, notamment lors des travaux d'entretien effectuées par les jardiniers auxquels le recourant faisait appel pour s'en occuper et de l'installation de compostage des déchets qui lui était liée (1A.276/2006 du 25 avril 2007).

10) Comme expressément mentionné à l'art 24e al. 1 LAT, les installations extérieures envisagées pour l'utilisation des animaux à titre de loisir ne doivent occasionner ni transformations, ni de nouvelles incidences sur le territoire et l'environnement. Dans le cas d'espèce, les surfaces du paddock et de son chemin d'accès, de même que celles sur lesquelles sont installées le carrousel ou marcheur, et la cabane servant d'abri aux chevaux au pré, ne sont plus affectées à la culture, alors même que, ce qui n'est pas disputé, la parcelle se situe en zone d'assolement. En cela l'ensemble des installations a bien engendré une transformation de la parcelle, une compaction de son sol et eu une incidence certaine sur le territoire. Le paddock et le chemin ont en outre une incidence sur l'environnement, s'agissant d'une modification de la perméabilité du sol par épandage de sable, au demeurant expressément recherchée par la recourante pour l'usage prévu, après excavation de terre cultivable, pour la création du paddock, sur une profondeur non négligeable de 25 cm.

S'y ajoute qu'un intérêt prépondérant s'oppose auxdites installations (art. 24d al. 3 LAT), consistant au maintien de la culture et ce d'autant plus en zone d'assolement.

La recourante ne peut partant se prévaloir de l'art. 24e al. 1 LAT pour justifier d'une autorisation.

11) La recourante conteste enfin la décision ordonnant la suppression de toutes ces installations, la jugeant disproportionnée, dans la mesure où elles sont obligatoires pour la détention de chevaux, sans impact sur l'environnement et la fertilité de la terre, et sans conséquence visuelle pour les voisins.

a. Lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu'elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le département peut notamment en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI). Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le département en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu'il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu'il n'invoque l'urgence (art. 132 al. 1 LCI).

b. De jurisprudence constante, pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter cinq conditions cumulatives :

- l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur ;

- les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ;

- un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux ;

- l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi ;

- l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/1030/2018 du 2 octobre 2018 consid. 6c ; ATA/1411/2017 du 17 octobre 2017 consid. 4a et les références citées).

c. Selon la jurisprudence, le rétablissement d'une situation conforme au droit ne peut pas être ordonné si un délai de plus de trente ans s'est écoulé depuis l'exécution des travaux non autorisés (ATF 107 Ia 121 = JdT 1983 I 299 consid. 1). Il serait en effet choquant et contraire à la sécurité du droit que l'autorité puisse contraindre une personne, après plus de trente ans, à éliminer une situation contraire au droit. Une telle solution doit aussi être écartée pour des raisons pratiques, vu la difficulté extraordinaire pour élucider les circonstances de fait et de droit existant plus de trente ans auparavant. Une dérogation à ce principe peut être admise lorsque le rétablissement d'une situation conforme au droit s'impose pour des motifs de police au sens étroit (ATF 107 Ia 121 précité ; ATA/635/2018 du 19 juin 2018 consid. 9a).

Cette jurisprudence vise uniquement la question du rétablissement d'une situation conforme au droit. Selon le Tribunal fédéral, le fait qu'une affectation illégale perdure depuis plus de trente ans sans intervention des autorités communales et cantonales - et donc le fait que la prescription trentenaire soit acquise - n'a pas pour effet de la rendre licite, mais s'oppose tout au plus à une remise en état des lieux (arrêt du Tribunal fédéral 1A.42/2004 du 16 août 2004 consid. 3.2 confirmant l'ATA/67/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/635/2018 précité consid. 9b ; ATA/887/2004 du 16 novembre 2004 consid. 5).

d. Les critères de l'aptitude et de la subsidiarité sont particulièrement concernés lorsqu'un ordre de démolition pur et simple est envisagé. Ils impliquent en effet de déterminer si une - ou plusieurs - autre mesure administrative pourrait être préférée, cas échéant en combinaison.

La proportionnalité au sens étroit implique une pesée des intérêts. C'est à ce titre que l'autorité renonce à ordonner la remise en conformité si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle (...). Le postulat selon lequel le respect du principe de la proportionnalité s'impose même envers un administré de mauvaise foi est relativisé, voire annihilé, par l'idée que le constructeur qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que cette dernière se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour lui constructeur (Nicolas WISARD/Samuel BRÜCKNER/Milena PIREK, op. cit, p. 218).

Donner de l'importance aux frais dans la pesée des intérêts impliquerait de protéger davantage les graves violations et mènerait à une forte et inadmissible relativisation du droit de la construction. C'est pourquoi il n'est habituellement pas accordé de poids particulier à l'aspect financier de la remise en état (Vincent JOBIN, Construire sans autorisation - Analyse des arrêts du Tribunal fédéral de 2010 à 2016, VLP-ASPAN, Février 1/2018, p. 16 et les références citées).

e. En l'espèce, la recourante ne soutient pas que les installations litigieuses dateraient de plus de trente ans, mais tout au plus de bientôt vingt ans, et qu'elle n'en serait pas la propriétaire et l'utilisatrice (la perturbatrice). Le fait que des chevaux auraient vécu sur son domaine depuis 1876 est sans pertinence dans la mesure où les installations en cause ne datent pas de cette époque, l'affectation de l'écurie n'étant pas litigieuse. La recourante ne soutient ni ne démontre que les installations litigieuses auraient été autorisées au moment de leur mise en place, ayant au demeurant déjà été relevé qu'elle n'a déposé aucun document permettant de les dater, ni d'ailleurs de chiffrer leur coût. Elle ne remet à juste titre pas en cause la bonne foi de l'autorité qui a ordonné la destruction de ces installations et la remise en état du terrain. Au contraire et comme le département le relève à juste titre, elle l'a mis devant le fait accompli. Ainsi, quatre des conditions nécessaires à la validité d'un ordre de mise en conformité sont réalisées en l'espèce.

Ne reste qu'à déterminer si l'intérêt privé de la recourante à poursuivre son activité de loisir avec ses chevaux sur son domaine l'emporte sur l'intérêt public.

Comme déjà relevé, l'impact en particulier du paddock, du chemin d'accès et du marcheur sur l'environnement et la fertilité du sol ne saurait être remise en question dans la mesure déjà où, tant que lesdites installations sont en place, étant relevé que la recourante entend bien que tel soit le cas à l'avenir, la terre ne peut plus y être cultivée. De la sorte, la recourante retire des surfaces de la culture. Or, il a également été relevé que dans la zone d'assolement concernée existe un intérêt accru à la culture des terres. Elle ne peut ensuite valablement soutenir que lesdites installations ne nuiraient pas à la fertilité de la terre, puisqu'en particulier du sable a remplacé la terre présente auparavant sur une profondeur de 25 cm dans le paddock, de sorte que de la nouvelle terre ne correspondant forcément pas aux particularités de celle enlevée devra être répandue. Le sable du Salève dispersé sur le terrain pour faciliter le passage des chevaux sans que leurs jambes ne s'enfoncent dans la terre, en particulier en temps humide, a entraîné un compactage du sol, nuisible à sa culture. Enfin, dans ces circonstances, l'absence de doléances du voisinage est sans pertinence, tant l'intérêt de préserver la zone agricole est important.

Pour autant que la question du coût du démontage des installations entre dans la pesée des intérêts, de l'aveu de la recourante, dit démontage s'avèrera aisé.

C'est ainsi à juste titre et sans abuser de son pouvoir d'appréciation ni violer le principe de proportionnalité que le département a ordonné la remise en état des lieux s'agissant du démontage du paddock, de son chemin d'accès et de la barrière l'entourant.

Reste la question de l'abri en bois dans la prairie.

12) a. Selon l'art. 6 al. 1 LPAn, toute personne qui détient des animaux ou en assume la garde doit, d'une manière appropriée, les nourrir, en prendre soin, leur garantir l'activité et la liberté de mouvement nécessaires à leur bien-être et, s'il le faut, leur fournir un gîte.

b. Dans la mesure où la recourante indique disposer de deux places dans l'écurie du domaine, rien ne s'oppose à ce qu'elle y détienne deux chevaux en respectant pleinement la LPAn. Pour les quatre autres chevaux, la présence de l'abri en bois dans le champ exclut que la surface concernée ne soit dévolue à la culture. Il peut être attendu de la recourante qu'elle place ces chevaux en pension chez un tiers, étant relevé que la campagne genevoise compte plusieurs endroits, dont à proximité du domaine de la recourante (Crête, Vandoeuvre, Corsinge, la Renfile, la Pallanterie), spécialisés dans l'accueil des chevaux et leur travail, incluant des structures telles que des carrières de dressage et manèges couverts. L'intérêt privé et en particulier le bien-être des quatre autres chevaux, à pouvoir être abrités au parc, et le plaisir de la recourante de les avoir auprès d'elle, certes compréhensible, doit s'effacer devant l'intérêt public à la conservation de surfaces cultivables.

C'est ainsi également à juste titre que le département a ordonné la remise en état des lieux s'agissant du démontage de cet abri en bois.

Enfin, et ce qui vaut pour l'ensemble des installations en cause, la recourante ne peut se prévaloir de sa bonne foi et prétendre avoir cru être autorisée à aménager les installations litigieuses dans la mesure où, architecte de formation, elle a agi comme MPQ dans le cadre de trois demandes d'autorisations concernant sa parcelle.

Par ailleurs, le constructeur qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que cette dernière se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour lui.

13) La recourante succombe de sorte qu'elle sera condamnée au paiement d'un émolument de CHF 2'000.- (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 novembre 2020 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er octobre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me François Bellanger, avocat de la recourante, au département du territoire-oac, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'office fédéral du développement territorial et à l'office fédéral de l'agriculture.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :