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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3517/2022

ATA/318/2023 du 28.03.2023 sur JTAPI/1311/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3517/2022-PE ATA/318/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 mars 2023

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Me Pierre Ochsner, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 novembre 2022 (JTAPI/1311/2022)


EN FAIT

A. a. Monsieur A______, né le ______ 1975, est ressortissant de Tunisie.

b. Arrivé en Suisse le 29 mars 2002, il a épousé Madame B______, ressortissante helvétique, le 27 mai 2002. Suite à son mariage, M. A______ a été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour, renouvelée en dernier lieu jusqu’au 26 mai 2012.

c. Le couple a eu un fils, C______, né le ______ 2002.

d. Le 28 août 2004, les époux ont pris un domicile séparé.

e. Par jugement du 15 mai 2008, le Tribunal de première instance a prononcé le divorce du couple. Les droits parentaux ont été attribués à la mère et un droit de visite usuel a été attribué au père qui a été condamné à verser mensuellement au titre de contribution à l’entretien de son fils CHF 600.- jusqu’à ses 10 ans, CHF 700.- jusqu’à ses 15 ans, puis CHF 800.- jusqu’à sa majorité, voire jusqu’à ses 25 ans au plus en cas de formation professionnelle ou d’études régulières et sérieuses.

Par arrêt de la Cour de justice du 16 janvier 2009, ces montants ont été ramenés, dès le 23 février 2009, à CHF 450.- (du 23 février 2009 au 3 juin 2012), à CHF 500.- (du 4 juin 2012 au 3 juin 2017) et à CHF 550.- (du 4 juin 2017 au 3 juin 2020).

f. Par courrier du 10 octobre 2018, Mme B______ a indiqué à l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) qu’elle ne percevait plus de pension alimentaire depuis novembre 2012 et que celle-ci était versée par le service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires (SCARPA). En 2012, M. A______ s’était remarié en Tunisie où vivaient sa nouvelle épouse et leurs deux filles en bas âge. C______ avait choisi de voir son père deux fois par mois, mais sans passer la nuit chez lui. Dans la mesure où ce dernier se rendait plusieurs fois par année en Tunisie, pour des périodes de plus en plus longues, il ne le voyait pas beaucoup. Durant l’été 2018, C______ avait rejoint son père en Tunisie pour un séjour de deux semaines et demie, alors que ce dernier y séjournait de mai à septembre. Cela faisait six ans qu’il n’avait pas revu sa famille paternelle. Enfin, Mme B______ avait appris que M. A______, qui se trouvait en Tunisie, devait être incarcéré à Fribourg durant dix mois, dès novembre 2018.

g. M. A______ souffre d’une pathologie cardiaque récidivante. Il a été mis au bénéfice d’un rente d’invalidité entière à compter du 1er juin 2013.

B. a. Le 27 décembre 2012, M. A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon pour agression.

b. Par arrêt du 9 août 2016 (P/1______2012), communiqué à l’OCPM le 4 avril 2018, et confirmé par arrêt du Tribunal fédéral entré en force le 4 avril 2018, la chambre pénale d’appel et de révision (ci-après : la chambre pénale d’appel) a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de trois ans pour lésions corporelles graves, étant précisé que la partie de la peine à exécuter était de
dix-huit mois et l’a mis au bénéfice du sursis partiel pour le surplus. Il ressort notamment de cet arrêt que M. A______ s’en était violemment pris à l’intégrité corporelle d’un inconnu le 23 décembre 2012, lui causant des séquelles irréversibles.

Selon le certificat médical produit dans le cadre de cette procédure, la victime présentait de lourdes séquelles sur les plans neurologique, neuropsychologique et psychiatrique, dont des troubles mnésiques sévères, conduisant à une incapacité de travail de 100 % à vie, une importante dépendance pour les activités de la vie quotidienne, nécessitant un encadrement infirmier et soignant à domicile, une perte totale de ses facultés et capacités civiques, civiles et administratives, une perte et une modification complète de son comportement, de son humeur, de ses émotions et de ses sentiments, ainsi que des modifications physiques négatives, notamment au niveau de son crâne et de son visage, de sa mobilité et de sa motricité, occasionnant en particulier une sensation de peur et de rejet de la part d’autrui.

c. Il ressort de la fiche de renseignements de police du 21 juin 2018 que M. A______ a des antécédents en qualité d’auteur dans le cadre d’une affaire de scandale et de violation des règles de la circulation, le 1er février 2005, et de voies de fait le 3 mai 2008. Il a également été prévenu : pour lésions corporelles simples le 27 février 2011 et le 14 mai 2011, pour voies de fait le 26 juin 2011, pour une affaire de circulation le 4 juin 2012 et le 21 mars 2014, pour menaces et lésions corporelles simples le 20 juin 2013 et pour une agression et des lésions corporelles graves le 9 octobre 2014.

d. Du 19 novembre 2018 au 13 septembre 2019, M. A______ a été incarcéré à la prison de Bellechasse (Fribourg), afin d’exécuter la peine à la laquelle il avait été condamné dans le cadre de la procédure pénale P/1______2012.

C. a. Le 23 avril 2012, M. A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.

b. Par décision du 26 août 2019, déclarée exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé de renouveler l’autorisation de séjour de M. A______ et a prononcé son renvoi, tout en lui impartissant un délai au 30 octobre 2019 pour quitter la Suisse.

c. Le recours formé par l’intéressé contre cette décision a été rejeté par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) par jugement du 29 décembre 2020.

M. A______ ne pouvait pas se prévaloir de son lien avec son fils, désormais majeur, pour demeurer en Suisse. Aucun rapport de dépendance entre eux, tel que défini par la jurisprudence, n'avait été démontré.

Il était né en Tunisie où il avait passé son enfance et son adolescence, soit les années primordiales pour l'intégration socio-culturelle, ainsi que les dix premières années de sa vie d’adulte. Il était régulièrement retourné en Tunisie pour des périodes d’un à trois mois en vacances ou pour des raisons familiales. Il avait surtout conservé de fortes attaches dans son pays d'origine où, hormis les membres de sa famille précités, vivaient son épouse et ses deux filles en bas âge, tel que cela ressortait du courrier de son ex-épouse du 10 octobre 2018, ce qui n’avait pas été contesté.

L'exécution de son renvoi respectait le principe de la proportionnalité, eu égard à ses antécédents pénaux et à sa situation personnelle.

S'agissant de ses problèmes de santé, le médecin traitant du recourant avait établi une attestation le 31 août 2020, dont il ressortait qu’il avait souffert de problèmes cardiaques qui avaient nécessité une intervention le 20 avril 2020, compliquée par un infarctus du myocarde. Il n’avait toutefois gardé aucune séquelle et n’avait plus de symptômes cardiologiques. Il devait prendre des médicaments quotidiennement et un suivi régulier était nécessaire. Même à admettre, tel que cela ressortait du certificat médical établi le 24 juillet 2020 par l’Hôpital régional du Kef, que le recourant ne puisse bénéficier d'un suivi adéquat dans sa ville natale (imagerie médicale coronarographie, médecin cardiologue), il n’avait ni démontré ni même allégué qu'il serait indisponible dans toute la Tunisie. Il ressortait au contraire de ce même document qu’une structure spécialisée se trouvait à environ 170 km du Kef. De plus, selon les recherches menées par le TAPI sur Internet, de nombreux cardiologues pratiquaient en Tunisie et le pays disposait de toutes les infrastructures nécessaires pour soigner les affections cardiaques et effectuer des examens cardiologiques tels que notamment les électrocardiogrammes, les coronarographies, les échographies cardiaques, etc. Le recourant pouvait se renseigner à cet égard auprès de la société tunisienne de cardiologie et de chirurgie cardiovasculaire et s’installer, cas échéant, dans une région disposant d’un centre spécialisé lui permettant d’effectuer son suivi médical. Il lui appartiendrait en outre de conclure les assurances nécessaires.

S’agissant de son suivi psychiatrique, il n’avait pas non plus allégué ni a fortiori démontré qu’il serait indisponible en Tunisie. Il pourrait d’ailleurs, avec l’aide du Dr D______, psychiatre, préparer son départ afin de limiter d'éventuels risques de décompensation et, si besoin, organiser depuis la Suisse sa prise en charge immédiate, par un psychiatre en Tunisie.

d. Par arrêt du 29 juin 2021 (ATA/671/2021), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours formé par M. A______ à l'encontre de ce jugement.

Cet arrêt a été confirmé par le Tribunal fédéral le 20 décembre 2021 (2C_668/2021).

D. a. Par courrier du 29 avril 2022 adressé à l'OCPM, M. A______ a demandé à l'OCPM de réexaminer sa décision du 26 août 2019.

b. Par décision du 23 septembre 2022, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur sa demande de reconsidération.

Aucun fait nouveau et important au sens de l'art. 80 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) n'avait été allégué et la situation de l'intéressé ne s'était pas modifiée de manière notable depuis la décision du 26 août 2019 et son entrée en force. En effet, les arguments allégués avaient déjà été pris en compte et examinés de façon complète lors des précédentes procédures auprès de l'autorité intimée, du TAPI, de la chambre administrative et du Tribunal fédéral.

c. Le recours formé par l’intéressé a été rejeté par le TAPI par jugement du 1er décembre 2022.

E. a. Par acte du 17 janvier 2023, M. A______ a formé recours devant la chambre administrative contre ce jugement, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour. Préalablement, il a requis la restitution de l’effet suspensif. Il a également sollicité une audience de comparution personnelle, ainsi que l’audition de son fils C______ et de Monsieur E______, un employé de F______ (ci-après : F______).

Un changement notable de circonstances avait eu lieu, sa situation médicale s’étant détériorée au point où un retour en Tunisie serait l’équivalent de « signer son arrêt de mort ». Le lien entre père et fils constituait un fait nouveau puisqu’il n’avait pas été établi par le passé.

b. Le 30 janvier 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le recourant a renoncé à formuler des observations complémentaires.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, compte tenu de la suspension des délais du 18 décembre au 2 janvier inclusivement, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c LPA).

2.             Le recourant conclut à sa comparution personnelle ainsi qu’aux auditions de son fils C______ et de M. E______.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, le recourant a eu l’occasion de s’exprimer devant l’OCPM, le TAPI et la chambre de céans, et de produire toute pièce utile. Il n’expose pas quels éléments supplémentaires son audition apporterait à l’instruction de la cause. Il n’expose pas davantage ce que l’employé de F______ aurait à ajouter oralement aux pièces déjà produites au dossier s’agissant de sa situation financière. Quant à l’audition de son fils, les tribunaux ayant examiné sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour ont déjà retenu que le recourant entretenait avec lui des liens étroits. Ils ont également jugé qu’il n’existait aucun lien de dépendance entre le recourant et son fils âgé de 22 ans, et cela nonobstant l’attestation du Dr D______ du 28 septembre 2020. La chambre de céans ne voit dès lors pas en quoi son audition apporterait des éléments supplémentaires, ce d'autant plus que l'objet du litige est circonscrit à l'existence de circonstances permettant le cas échéant une reconsidération de son cas. La chambre de céans dispose dès lors d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause. Il ne sera donc pas donné suite aux demandes d'audition.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l’OCPM d’entrer en matière sur la demande de reconsidération.

3.1 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'elle ou il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible
(ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1301/2020 du 15 décembre 2020 consid. 2b). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si une recourante ou un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, elle ou il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/1301/2020 précité consid. 2b).

Ainsi, l'autorité de recours n'examine pas les prétentions et les griefs qui n'ont pas fait l'objet du prononcé de l'instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d'enfreindre le principe de l'épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d'un degré de juridiction (ATA/1390/2021 du 21 décembre 2021 consid. 2a et les références citées).

3.2 La conclusion du recourant tendant à l’octroi d’une autorisation de séjour est exorbitante au présent litige. Celui-ci concerne en effet uniquement la question de l'entrée en matière sur la demande de reconsidération de la décision du 26 août 2019. Pour ces mêmes motifs, l'argumentaire basé sur la violation des art. 42, 50 et 62 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) est exorbitant au litige puisque sortant du cadre de la question de l'entrée en matière sur la demande de reconsidération.

4.             Reste à déterminer si c’est à juste titre que l’OCPM n’est pas entré en matière sur la demande de réexamen du recourant.

4.1 Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr – F 2 10, a contrario ; ATA/12/2020 du 7 janvier 2020 consid. 3).

4.2 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1
let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux » ou novae véritables, c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/830/2016 du 4 octobre 2016 consid. 2a).

Bien que l'écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socioprofessionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/755/2022 du 26 juillet 2022 consid. 4a ; ATA/539/2020 précité consid. 4b).

4.3 Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 1417). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211 consid. 2).

4.4 Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a). Si lesdites conditions sont réalisées, ou si l'autorité entre en matière volontairement sans y être tenue, et rend une nouvelle décision identique à la première sans avoir réexaminé le fond de l'affaire, le recours ne pourra en principe pas porter sur ce dernier aspect. Si la décision rejette la demande de reconsidération après instruction, il s'agira alors d'une nouvelle décision sur le fond, susceptible de recours. Dans cette hypothèse, le litige a pour objet la décision sur réexamen et non la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3 ; 2C_406/2013 du 23 septembre 2013 consid. 4.1).

4.5 En principe, même si une autorisation de séjour a été refusée ou révoquée, l'octroi d'une nouvelle autorisation peut à tout moment être requis, à condition qu'au moment du prononcé, l'étranger qui en fait la requête remplisse les conditions posées à un tel octroi. Indépendamment du fait que cette demande s'intitule reconsidération ou nouvelle demande, elle ne saurait avoir pour conséquence de remettre continuellement en question des décisions entrées en force (arrêt du Tribunal fédéral 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.3).

L'autorité administrative n'est ainsi tenue d'entrer en matière sur une nouvelle demande que lorsque les circonstances ont subi des modifications notables ou lorsqu'il existe un cas de révision, c'est-à-dire lorsque l'étranger se prévaut de faits importants ou de preuves dont il n'avait pas connaissance dans la procédure précédente, qu'il lui aurait été impossible d'invoquer dans cette procédure pour des motifs juridiques ou pratiques ou encore qu'il n'avait alors pas de raison d'alléguer (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 ; 2C_198/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.3 et les références citées).

4.6 En l’occurrence, le recourant ne se prévaut d’aucune circonstance nouvelle ou importante qui serait intervenue depuis la décision du 26 août 2019. S’agissant de sa situation médicale, il se limite à alléguer que celle-ci se serait détériorée, mais ne l’étaye pas. Or, l’ensemble de son dossier médical a déjà été pris en compte dans le cadre de la procédure ayant mené à l’arrêt du Tribunal fédéral du 20 décembre 2021, devenu définitif et exécutoire.

S’agissant ensuite de la relation avec son fils, les tribunaux ayant examiné la question du renouvellement de son autorisation de séjour ont déjà retenu que père et fils entretenaient des liens étroits. Ils ont toutefois relevé que, C______ étant majeur, le recourant ne remplissait pas les conditions strictes d’un rapport de dépendance, tel que défini par la jurisprudence en lien avec l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). L’attestation du Dr D______ du 28 septembre 2020, selon laquelle C______ serait un vecteur de sa réparation psychique, ne suffisait pas à cet égard. Dans la présente procédure, le recourant n’apporte aucun élément nouveau par rapport à la procédure précédente, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’y revenir.

Quant à l’exigibilité de son renvoi, l’attestation du 23 février 2021 de Monsieur G______, directeur de l’hôpital régional du Kef (Tunisie), selon laquelle l’hôpital ne disposait pas d’une salle de cathétérisme cardiaque (coronarographie) pour diagnostiquer et traiter les affections des artères coronaires, figurait déjà au dossier de procédure relative au renouvellement de son autorisation de séjour. La chambre de céans a notamment relevé que ni la loi ni la jurisprudence n’imposaient de limiter l’analyse des infrastructures disponibles dans le pays à la seule région du domicile actuel de sa famille. Il pouvait dès lors être exigé du recourant qu’il envisage de se rapprocher d’une ville mieux équipée en infrastructures médicales en lien avec son affection. Ainsi, le besoin d’un suivi régulier et de la prise quotidienne de médicaments était compatible avec le renvoi du recourant, lequel n’indiquait pas que les médicaments concernés ne seraient pas disponibles en Tunisie ou que ce pays ne bénéficierait pas de cardiologues à même d’assurer un suivi médical. La chambre de céans a relevé en outre que la situation de son frère n’était pas comparable avec la sienne, les pathologies n’étant pas identiques (ATA/671/2021 du 29 juin 2021 consid. 9d).

Pour le reste, et en tant que le recourant se prévaut de la durée de son séjour en Suisse et de son casier judiciaire, à nouveau vierge, il perd de vue que, conformément à la jurisprudence précitée, l’écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socioprofessionnelle ne peuvent être qualifiés d'éléments notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 précité consid. 5b).

C’est partant à juste titre que tant l'autorité intimée, qui n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation, que le TAPI ont retenu que les conditions d'entrée en matière sur la demande de reconsidération n'étaient pas réalisées. C’est le lieu de rappeler que, selon la jurisprudence constante, le réexamen de décisions administratives ne saurait servir à remettre sans cesse en cause des décisions définitives et exécutoires.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Le présent arrêt rend sans objet la demande de mesures provisionnelles.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 550.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité ne sera alloué (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 janvier 2023 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er décembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 550.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre Ochsner, avocat du recourant, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population et des migrations, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

S. Husler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.