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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4493/2017

ATA/1609/2017 du 13.12.2017 ( FORMA ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4493/2017-FORMA

" ATA/1609/2017

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 13 décembre 2017

sur effet suspensif et mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

Madame A_____
représentée par Me Cyril Mizrahi, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

_________



Attendu, en fait, que :

1) Madame A_____ est titulaire d'un baccalauréat et d'une maîtrise universitaire en mathématiques, obtenus respectivement en 2011 et 2013.

Elle a également obtenu le certificat complémentaire de base en didactique de la discipline et en sciences de l'éducation (ci-après : CCDIDA) en mathématiques.

2) En juillet 2013, Mme A_____ a été admise pour la maîtrise universitaire spécialisée en enseignement secondaire (ci-après : MASE) en mathématiques, dispensée par l'institut universitaire pour la formation des enseignants (ci-après : l’IUFE).

Conformément au programme, l'intéressée a effectué un stage en responsabilité d'enseignement dans l'enseignement secondaire durant l'année académique 2013/2014.

Elle a obtenu, lors du deuxième semestre, une des deux attestations de stage requises pour le valider. Elle n'a cependant pas obtenu la deuxième attestation, raison pour laquelle elle a dû effectuer un stage de rattrapage, encadré par une chargée d'enseignement et une formatrice de terrain, l'année académique suivante.

3) Mme A_____ a été convoquée à un entretien le 5 mai 2015 par le comité de direction de l'Université de Genève (ci-après: le comité) aux fins de déterminer si la fiche prévisionnelle rendue était constitutive d’un plagiat.

4) Par décision du 25 juin 2015, le comité a confirmé le plagiat, correspondant à un échec à l'évaluation concernée. Étant donné que Mme A_____ avait déjà échoué une première fois à ladite évaluation, soit l'attestation II du stage en responsabilité, la directrice de l'IUFE a prononcé l'élimination de l'intéressée de la formation. Par ailleurs, le comité de direction a saisi le conseil de discipline, conformément à la législation en vigueur.

5) Le 8 juillet 2015, Mme A_____ a fait opposition à la décision d'élimination précitée.

6) Le 9 novembre 2015, la commission des oppositions de l'IUFE a préavisé le rejet de l'opposition, la confirmation du plagiat et l'échec en deuxième tentative à l'évaluation II du stage en responsabilité. Elle a également préavisé la confirmation de l'élimination prononcée le 25 juin 2015.

7) Par décision du 18 décembre 2015, le comité a rejeté l'opposition formée par Mme A_____ et a confirmé le plagiat, l'échec en deuxième tentative à l'évaluation du stage en responsabilité et par conséquent son élimination de la formation.

Par décision séparée du 22 décembre 2015, la directrice de l’IUFE a rejeté l’opposition et confirmé l’élimination de l’intéressée du cursus de la MASE.

Les décisions étaient exécutoires nonobstant recours.

8) Le 29 janvier 2016, Mme A_____ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre les décisions précitées, concluant à leur annulation, à la réussite du stage et du module litigieux et à l'obtention du MASE.

9) Par arrêt du 13 septembre 2016 (ATA/771/2016), la chambre administrative a partiellement admis le recours de l’intéressée, a annulé les décisions sur opposition des 18 et 22 décembre 2015 et invité l'université à réévaluer Mme A_____ selon les règles en vigueur dans les ateliers de didactique de l'IUFE.

10) Le 19 octobre 2016, Monsieur B_____, chargé d’enseignement didactique des mathématiques a précisé les modalités de la reprise de la formation concernant la pratique de l’enseignement accompagné et analysé (ci-après : le stage).

11) Le 10 mars 2017, à la suite d’un rapport de synthèse du 16 janvier 2017 concluant à un préavis négatif pour l’obtention de l’attestation II en deuxième tentative, de la réception des observations de Mme A_____, de la confirmation par le comité de direction le 9 mars 2017 de l’échec définitif au stage, une décision d’élimination a été notifiée à l’intéressée.

12) Le 12 avril 2017, Mme A_____ a formé opposition à l’encontre de cette nouvelle décision d’élimination.

13) Par décision du 9 octobre 2017, le comité a rejeté l’opposition de Mme A_____.

Dans la même décision, la directrice de l’IUFE a confirmé la décision d’élimination de l’intéressée de la MAS en mathématique du 10 mars 2017.

14) Par acte du 10 novembre 2017, Mme A_____ a interjeté recours devant la chambre administrative.

Elle a conclu préalablement à l’octroi de l’effet suspensif au recours. Principalement, les décisions sur opposition du 9 octobre 2017 devaient être annulées. L’université devait être invitée à réévaluer la recourante sur la base d’une nouvelle fiche prévisionnelle en vue d’un entretien tripartite. Les frais devaient être laissés à la charge de l’université.

La chambre administrative avait renvoyé l’affaire à l’université, précisant que la recourante serait alors autorisée à présenter une nouvelle fiche prévisionnelle, remplaçant celle litigieuse, en vue d’un entretien tripartite, et dont le nouveau thème serait choisi par l’université.

Les décisions dont était recours étaient contraires à l’égalité de traitement, entachées d’arbitraire et violaient le droit d’être entendue de la recourante. L’autorité intimée avait réduit indûment son pouvoir d’examen à l’arbitraire, y compris sur les griefs de la recourante portant sur le champ d’évaluation de sa prestation et sur la composition de la commission tripartite qui l’avait évaluée.

Par ailleurs, contrairement aux instructions de la chambre administrative, l’IUFE n’avait pas invité la recourante à présenter une nouvelle fiche prévisionnelle, mais tout un document préparatoire. Surtout, il ne l’avait pas conviée à un entretien tripartite, mais à une séance à laquelle était présent un tiers disposant d’un pouvoir hiérarchique sur les autres participants. L’IUFE avait en conséquence violé les instructions de la chambre administrative, ce qui devait entraîner l’annulation des décisions du 9 octobre 2017 et le renvoi de la cause à l’université. Par ailleurs, le processus d’évaluation ne prévoyait pas l’intervention d’un professeur ordinaire, lequel aurait par ailleurs dû se récuser. L’autorité ayant statué dans une composition non conforme à la législation en vigueur, la décision querellée devait être annulée.

Concernant la requête en restitution de l’effet suspensif, il n’y avait aucune urgence à éliminer de manière anticipée la recourante de son cursus au MASE, d’autant qu’elle en avait réussi toutes les épreuves, à l’exception de l’évaluation contestée. La recourante avait un intérêt privé prépondérant à ne pas être considérée comme ayant été éliminée, notamment dans ses recherches d’emploi, avant que la décision judiciaire ne soit rendue.

15) Par observations du 30 novembre 2017, l’IUFE a conclu au rejet de la requête en restitution de l’effet suspensif. Accorder un effet suspensif au recours reviendrait à autoriser l’intéressée à rester étudiante au sein du cursus du MASE alors qu’elle en était éliminée, ne remplissant plus les conditions académiques de réussite dudit cours. Une telle solution ferait droit, de manière provisoire, à ses conclusions au fond, ce qui était prohibé. La chambre administrative avait, de manière constante, refusé de restituer l’effet suspensif ou de prononcer des mesures provisionnelles autorisant les étudiants concernés à poursuivre leurs études desquelles ils avaient été éliminés ou à pouvoir continuer de bénéficier du statut d’étudiants alors qu’ils n’en remplissaient plus les conditions. Enfin, l’IUFE avait un intérêt à n’accueillir que des étudiants remplissant les critères académiques de sélection. Cet intérêt primait l’intérêt privé de Mme A_____ à continuer à bénéficier du statut d’étudiante.

16) Sur ce, par courrier du 4 décembre 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

 

Considérant en droit que :

1) La compétence pour ordonner la restitution de l'effet suspensif au recours appartient au président de la chambre administrative, respectivement au vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, à un juge (art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 septembre 2017).

2) Aux termes de l'art. 21 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) - loi applicable par renvoi des art. 35 et 37 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’Université de Genève du 16 mars 2009 (RIO-UNIGE) -, l’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2).

En vertu de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

3) Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités).

Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265).

4) En l’espèce, la restitution de l'effet suspensif ne se justifie pas. En effet, l'admettre aurait pour effet d’autoriser la recourante à rester étudiante de l’IUFE alors même que, dans sa situation actuelle, elle ne remplit plus les critères académiques de sélection et de faire ainsi droit, de manière provisoire, à ses conclusions sur le fond, ce qui est en principe prohibé (ATA/448/2016 du 31 mai 2016 consid. 4 ; ATA/156/2015 du 9 février 2015 consid. 3 ; ATA/893/2014 du 17 novembre 2014 consid. 4). Il n’y a en l’occurrence aucune circonstance particulière qui justifierait une exception à cette règle (dans ce sens ATA/90/2012 du 16 février 2012). L’intimée fait pour le reste valoir un intérêt public – légitime – à n’accueillir que des étudiants remplissant les critères académiques de sélection. Cet intérêt prime l’intérêt privé de la recourante à continuer de bénéficier du statut d’étudiante dans le cadre de ses recherches d’emploi.

Cette solution est conforme à la jurisprudence constante de la chambre administrative qui, lorsqu’elle en est requise dans le cadre des recours dont elle est saisie contre des décisions d’élimination, refuse de restituer l’effet suspensif ou de prononcer des mesures provisionnelles autorisant l’étudiant à poursuivre ses études (ATA/74/2015 du 20 janvier 2015 ; ATA/893/2014 du 17 novembre 2014 ; ATA/415/2013 du 4 juillet 2013 ; ATA/1/2013 du 3 janvier 2013 ; ATA/833/2012 du 14 décembre 2012 ; ATA/9072012 du 16 février 2012 et jurisprudence citée).

5) La restitution de l'effet suspensif sera donc refusée, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu'à droit jugé au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Cyril Mizrahi, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Université de Genève.

 

 

 

 

 

 

 

La vice-présidente :

 

 

 

Ch. Junod

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :