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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4329/2022

ATA/149/2023 du 14.02.2023 ( PROC ) , REJETE

Recours TF déposé le 22.03.2023, rendu le 05.09.2023, REJETE, 8D_2/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4329/2022-PROC ATA/149/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 février 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______ réclamant
représenté par Me Romain Jordan, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE LA POPULATION ET DE LA SANTÉ

intimé

COUR DE JUSTICE - CHAMBRE ADMINISTRATIVE intimée

_________



EN FAIT

A. a. Par arrêté du 8 janvier 2021, le conseiller d’État en charge du département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : le département) a prononcé à l’encontre de Monsieur A______ une dégradation pour une durée d’un an dès le 1er février 2021, avec pour conséquence de le faire passer du grade de ______ à celui de ______.

b. Par arrêt du 19 octobre 2021 (ATA/1090/2021), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours déposé par M. A______ contre l’arrêté précité. Elle a mis à la charge de ce dernier un émolument de CHF 1'000.- et n'a pas alloué d'indemnité de procédure.

c. Par arrêt du 5 septembre 2022 (8D_7/2021), le Tribunal fédéral a admis le recours déposé par M. A______, annulé l'arrêt de la chambre administrative du 19 octobre 2021 et renvoyé la cause à la Cour de justice afin qu'elle statue à nouveau sur le sort des frais et dépens de la procédure cantonale.

B. a. Le 13 octobre 2022, le département s'en est rapporté à justice au sujet des frais et indemnités.

b. Le 14 octobre 2022, M. A______ a conclu à ce que l’avance de frais de CHF 500.- lui soit restituée avec intérêts à 5 % depuis la date du versement, et à l’octroi d’une indemnité de procédure intégrale de CHF 9'459.70 selon état de frais annexé, le risque de toute erreur commise par l’autorité publique devant être supporté par l’État lui-même.

c. Par arrêt du 29 novembre 2022 (ATA/1188/2022), la chambre administrative, sur renvoi du Tribunal fédéral, a statué à nouveau sur les frais et dépens devant elle en disant qu'il n'était pas perçu d'émolument et en allouant à M. A______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.-.

Le Tribunal fédéral avait donné entièrement gain de cause à M. A______. Il y avait donc lieu de ne mettre aucun émolument à sa charge pour la procédure cantonale et de lui allouer une indemnité de procédure. Celle-ci ne constituant qu'une participation aux honoraires d'avocat, elle devait être fixée à CHF 1'500.- pour la procédure ayant abouti à l'ATA/1090/2021, montant qui tenait compte de l’issue et du type de litige ainsi que du nombre et de l’importance des écritures.

S’agissant de la demande d’obtenir des intérêts moratoires, la chambre administrative décidait uniquement de prélever ou non un émolument, et n’avait donc pas, dans la seconde hypothèse, à déterminer si l’avance de frais devait ou non être restituée avec des intérêts moratoires, et le cas échéant à partir de quelle date.

Il n'y avait en revanche pas lieu d'indemniser le recourant pour la partie de la procédure consécutive à l'arrêt du Tribunal fédéral, laquelle n'était du reste qu'une composante de la procédure devant la chambre administrative et n'avait donné lieu qu’à un seul courrier de sa part.

C. a. Par acte posté le 20 décembre 2022, M. A______ a élevé réclamation contre l'indemnité allouée dans l'arrêt précité, avec les mêmes conclusions que celles déposées le 14 octobre 2022, « sous suite de dépens pour la présente procédure de réclamation ».

Le montant de CHF 1'500.- était manifestement insuffisant, vu la nécessité de rédiger un recours comportant dix conclusions et quatre griefs séparés, analyser la réponse de l'intimée qui était aussi longue que son recours et rédiger une réplique répondant, point par point, à tous les arguments. Le Tribunal fédéral avait alloué CHF 2'800.- à titre de dépens alors même que le recours et la réplique devant lui étaient plus brefs. La motivation de l'arrêt au sujet du refus d'indemnité pour la procédure subséquente à l'arrêt du Tribunal fédéral ne reposait sur aucun motif objectif et était arbitraire. Enfin, l'obligation de statuer sur les frais impliquait celle de statuer sur les intérêts moratoires.

b. Le 13 janvier 2023, le département s'en est rapporté à justice.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 20 janvier 2023.

EN DROIT

1.             Interjetée en temps utile devant la juridiction compétente, la réclamation est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 87 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le réclamant se plaint du montant de l'indemnité de procédure qui lui a été allouée, soit CHF 1'500.-.

2.1 La chambre de céans statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d'État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87 al. 1 et 3 LPA ; ATA/779/2022 du 9 août 2022 consid. 2a ; ATA/510/2016 du 14 juin 2016 consid. 2).

2.2 Elle peut, sur requête, allouer à la partie ayant eu entièrement ou partiellement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA). L'art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), intitulé « indemnité », prévoit que la juridiction peut allouer à une partie, pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires éventuels d'un mandataire, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.-.

2.3 La juridiction saisie dispose d'un large pouvoir d'appréciation quant à la quotité de l'indemnité allouée et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu'une participation aux honoraires d'avocat (ATA/1191/2022 du 29 novembre 2022 consid. 2b ; ATA/46/2022 du 18 janvier 2022 consid. 1; ATA/1042/2021 du 5 octobre 2021 ; ATA/1484/2017 du 14 novembre 2017), ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 RFPA, dès lors que ce dernier plafonne l'indemnité à CHF 10'000.-.

2.4 Pour déterminer le montant de l'indemnité, il convient de prendre en compte les différents actes d'instruction, le nombre d'échanges d'écritures et d'audiences. Quant au montant retenu, il doit intégrer l'importance et la pertinence des écritures produites et de manière générale la complexité de l'affaire (ATA/1042/2021 précité ; ATA/1031/2018 du 2 octobre 2018 consid. 2b.

3.             En l'espèce, le recours faisait dix-huit pages, dont douze consacrées au droit, mais seulement deux développant la question de la prescription, seule décisive selon le Tribunal fédéral. La réplique du recourant comptait cinq pages, dont à peine plus d'une était consacrée à la prescription. Aucune audience n'a été tenue. Après le renvoi par le Tribunal fédéral, il a été demandé aux parties de se déterminer sur les frais, ce qui ne nécessitait pas de longs développements ; le conseil du recourant a produit sa note de frais et un courrier tenant en une page et demandant qu'une indemnité correspondant à l'intégralité de ladite note de frais lui soit allouée, et que l'avance de frais lui soit restituée avec intérêts à 5 % depuis la date du versement.

Dans ces conditions, une indemnité de procédure de CHF 1'500.- était adéquate et conforme à la pratique de la chambre de céans, étant rappelé que l'indemnité de procédure ne constitue qu'une participation aux honoraires et non une pleine indemnisation de ceux-ci. De plus, la chambre de céans n'est pas tenue de se calquer sur les montants alloués à titre de dépens par le Tribunal fédéral, dès lors que devant celui-ci la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige, et pas seulement une participation à ceux-ci (art. 68 al. 2 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). De plus, le tarif précité fixe des plafonds en matière de dépens plus élevés que celui applicable à la chambre de céans, notamment pour les contestations pécuniaires (art. 4 et 6 du règlement sur les dépens alloués à la partie adverse et sur l’indemnité pour la représentation d’office dans les causes portées devant le Tribunal fédéral, du 31 mars 2006 – RS 173.110.210.3).

Quant à la partie de la procédure postérieure au renvoi par le Tribunal fédéral, l'arrêt contesté, indépendamment d'éventuels problèmes de références jurisprudentielles, explique pourquoi elle n'est pas indemnisée en soi, à savoir d'une part que cette phase est (contrairement à la réclamation sur indemnité, dont traitait l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_247/2022 du 16 août 2022 cité par le recourant) incluse dans la procédure devant la chambre administrative, qui forme un tout – étant rappelé une fois encore le caractère forfaitaire et partiel de l'indemnisation des honoraires d'avocat –, et d'autre part car le travail effectué dans ce cadre était minimal (consid. 4 : « la procédure consécutive à l'arrêt du Tribunal fédéral ( ) n'est qu'une composante de la procédure devant la chambre administrative et n'a donné lieu qu'à un seul courrier de la part du recourant »).

4.             À l'appui de sa réclamation, le recourant invoque également la jurisprudence de la CourEDH rappelant le principe selon lequel le risque de toute erreur commise par l'autorité publique doit être supportée par l'État lui-même (ACEDH Zustovic c. Croatie du 22 avril 2021 requête n. 27903/15).

Cette argumentation tombe à faux, la vocation de l'indemnité de procédure n'étant pas de compenser ou d'indemniser les atteintes que le recourant aurait subies, selon lui, de l'autorité publique (ATA/216/2022 du 1er mars 2022 ; ATA/306/2021 du 9 mars 2021 consid. 4).

5.             Enfin, le recourant se plaint de ce que l'arrêt attaqué n'ordonne pas la restitution de l'avance de frais de CHF 500.- avec intérêts moratoires à 5 % dès la date du versement de celle-ci.

Cela étant, le recourant ne fournit aucune base légale ou réglementaire selon laquelle des intérêts moratoires devraient être servis à une partie en cas de restitution de l'avance de frais. Dans sa pratique en matière de fixation des frais, la chambre de céans – à l'instar du Tribunal fédéral mais aussi de nombreux tribunaux administratifs et tribunaux cantonaux, en particulier ceux de Vaud, Fribourg, Neuchâtel, Berne et Zurich – indique uniquement dans le dispositif de ses arrêts si un émolument est ou non perçu, et le cas échéant quel est son montant et quelle partie s'en acquitte. En cas d'admission du recours, la restitution de l'avance de frais est implicite, et est effectuée par les services financiers du Pouvoir judiciaire. Il n'y a ainsi pas lieu, en l'absence de norme spécifique à la procédure administrative genevoise, de prévoir dans les arrêts de la chambre de céans une restitution de l'avance de frais avec intérêts moratoires. Le grief sera écarté.

Entièrement mal fondée, la réclamation sera rejetée.

6.             Conformément à la pratique courante de la chambre de céans, aucun émolument ne sera prélevé dans le cadre de la présente procédure de réclamation (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable la réclamation sur indemnité formée le 20 décembre 2022 par Monsieur A______ contre l'arrêt de la chambre administrative du 29 novembre 2022  ;

au fond :

la rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt  peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat du réclamant, ainsi qu'au département de la sécurité, de la population et de la santé.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Lauber et McGregor, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :