Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3629/2007

ATA/129/2008 du 18.03.2008 ( DES ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ; PROCÉDURE ADMINISTRATIVE ; HÔTELLERIE ET RESTAURATION ; HORAIRE D'EXPLOITATION ; AMENDE
Normes : LPA.65 ; LRDBH.18A ; LRDBH.21 ; LRDBH.22 ; LRDBH.23 ; LRDBH.74
Résumé : Amende administrative de CHF 600.-, infligée pour fermeture tardive d'un café-restaurant, confirmée dans son principe. Montant toutefois réduit à CHF 300.-, au motif que l'établissement en cause n'a jamais fait l'objet d'une sanction autre que celle en l'espèce litigieuse.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3629/2007-DES ATA/129/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 18 mars 2008

dans la cause

 

Madame B______

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE LA SANTÉ


 


EN FAIT

1. Par arrêté du 26 juin 2003, le service d’autorisation et patentes (ci-après : le SAP), actuellement rattaché au département de l’économie et de la santé
(ci-après : le département), a autorisé Madame B______ à exploiter le café-restaurant à l’enseigne « Le R______ », sis rue S______ à Genève.

2. L’horaire d’exploitation de l’établissement précité a été fixé de 04h00 à 24h00. Le 27 novembre 2007, le SAP a délivré pour l’année 2007 l’autorisation de prolonger l’horaire d’exploitation jusqu’à 02h00, quel que soit le jour de la semaine.

3. Il ressort du rapport de dénonciation de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 17 décembre 1987 (LRDBH - I 2 21) dressé par le poste de gendarmerie des Pâquis le 7 juin 2007, qu’en date du 3 juin 2007 à 02h15, « Le R______ » n’était pas fermé. Trois clients venaient de se faire servir un dernier verre par Monsieur L______, répondant présent sur place. Dans la mesure où lesdits clients avaient immédiatement quitté l’établissement, les gendarmes s’étaient limités à donner un simple avertissement oral à M. L______.

Au retour des représentants des forces de l’ordre, à 02h53, un des clients était revenu dans ledit établissement, ne respectant pas leur remarque.

4. Le 6 août 2007, le SAP a informé Mme B______ que suite aux événements mentionnés dans le rapport de dénonciation du 7 juin 2007, il envisageait de lui infliger une sanction et/ou une mesure administrative. Elle était invitée à s’expliquer par écrit jusqu’au 20 août 2007.

5. Le 17 août 2007, Mme B______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés. Son remplaçant avait fermé l’établissement à 02h00, puis, avait effectué les rangements nécessaires à l’ouverture du matin.

6. Par décision du 30 août 2007, le SAP a infligé à l’intéressée une amende de CHF 600.-, pour avoir violé, le 3 juin 2007, les articles 18A et 23 LRDBH. Ledit établissement était encore ouvert à 02h53, soit 53 minutes après l’horaire autorisé. Les arguments développés par Mme B______ dans son courrier du 17 août 2007 n’étaient pas pertinents.

7. Par lettre signature du 25 septembre 2007, Mme B______ a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée. Elle conclut à l’annulation de l’amende que le SAP lui a infligée.

La porte de son établissement n’était certes pas fermée à clé, mais les enseignes et les lumières étaient éteintes. Aucun client n’était présent au moment du contrôle effectué par les gendarmes à 02h53. Les deux seules personnes qui se trouvaient à cette heure dans le bar étaient son remplaçant ainsi qu’un de ses amis, lequel ne consommait rien.

8. Dans sa réponse du 25 octobre 2007, le département conclut à l’irrecevabilité du recours et, sur le fond, à son rejet.

L’acte de recours ne contenait pas la désignation de la décision attaquée, ce qui constituait un motif d’irrecevabilité.

Les explications de Mme B______ n’étaient pas suffisantes au regard du contenu du rapport de dénonciation établi par des agents de police assermentés. Les allégations de l’intéressée ne reposaient par ailleurs sur aucune preuve.

Enfin, l’amende n’était pas disproportionnée.

9. Le 30 octobre 2007, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. a. Selon l’article 65 alinéa 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant.

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient en particulier de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est d’ailleurs pas, en soi, un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/242/2007 du 15 mai 2007 et les références citées). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (P. MOOR, Droit administratif, Vol. II, Berne 2002, 2ème éd., p. 674 n. 5.7.1.4).

En l’espèce, Mme B______, qui agit en personne, a joint à son recours la décision querellée ainsi que la facture de l’amende y relative. Il ressort en outre clairement de son écriture du 25 septembre 2007 que celle-ci entend contester l'amende qui lui a été infligée. En d'autres termes, le tribunal de céans ainsi que le département ont la possibilité de comprendre les intentions de la recourante.

Le recours a par ailleurs été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a LPA).

Par conséquent, le recours est recevable.

2. Le présent litige porte sur ladite amende ainsi que son montant.

3. a. Selon la LRDBH, aucun établissement qui lui est soumis ne doit perturber l'ordre public, en particulier la tranquillité, du fait de son propriétaire ou de son exploitant, ainsi qu'en raison de sa construction, de son aménagement, de son implantation (art. 2 al. 1 LRDBH).

b. L’exploitant doit gérer l’établissement de façon personnelle et effective. Même absent, il n'en demeure pas moins responsable du comportement adopté par son remplaçant participant à son exploitation et à son animation (art. 21 LRDBH et 32 al. 1 du règlement d'exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement du 31 août 1988 - RLRDBH - I 2 21.01).

4. a. A teneur de l’article 18A LRDBH, les cafés-restaurants peuvent être ouverts de 04h00 à 24h00. Sur demande de l’exploitant, le département ou, sur délégation, les autorités de police peuvent prolonger l’horaire d’exploitation jusqu’à 02h00 dans les nuits du vendredi au samedi et du samedi au dimanche, et jusqu’à 01h00 dans les autres nuits, voire jusqu’à 2h00 n’importe quel jour de la semaine, pour autant que l’établissement assure un service de restauration chaude.

b. L’exploitant doit veiller au maintien de l’ordre dans son établissement et prendre toutes les mesures utiles pour ne pas engendrer d’inconvénients graves pour le voisinage (art. 22 al. 1 à 3 LRDBH). Il est en outre tenu de respecter les heures de fermeture propre à la catégorie à laquelle appartient son établissement (art. 23 al. 1 LRDBH).

En l’espèce, l’horaire d’exploitation du café-restaurant « Le R______ », initialement fixé de 04h00 à 24h00, a été prolongé pour l’année 2007, sur requête de la recourante, jusqu’à 02h00 du matin tous les jours de la semaine.

Il ressort du rapport de dénonciation du 7 juin 2007 que peu de temps après l’heure limite, trois clients étaient encore présents dans l’établissement. Un simple avertissement a alors été donné par les gendarmes au remplaçant de Mme B______ afin que ce dernier les fasse partir.

A 02h53, soit 53 minutes après l’heure de fermeture autorisée, les représentants de l’ordre ont constaté qu’un des clients était revenu sur les lieux. A ce sujet, la recourante conteste le rapport précité, affirmant, d’une part, qu’il s’agissait d’un ami de son remplaçant, et, d’autre part, que les lumières ainsi que les enseignes étaient éteintes. Elle n’a toutefois apporté aucun élément susceptible de mettre en cause la constatation des gendarmes.

Au vu des pièces versées à la procédure, le tribunal de céans tiendra pour établi que le 3 juin 2007 les portes de l’établissement n’étaient pas fermées à clé et que, partant, celui-ci était encore ouvert à 02h53. Mme B______, répondant du comportement adopté par son remplaçant, a par conséquent violé les articles 18A et 23 alinéa 1 LRDBH. Une sanction administrative est donc justifiée dans son principe.

5. Reste encore à examiner la quotité de l’amende infligée à la recourante.

a. Les amendes administratives sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/601/2006 du 14 novembre 2006 ; ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/813/2001 du 4 décembre 2001 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139 ss).

b. En vertu des articles 103 et 104 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et de l’article 1 lettre a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), il y a lieu de faire application des dispositions générales contenues dans le CP.

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (HÄFELIN/MÜLLER/UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5ème éd., Zürich-Bâle-Genève 2006, p. 252, n. 1179). Selon des principes qui n’ont pas été remis en cause, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/451/2006 du 31 août 2006 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, vol. 2, Neuchâtel, 1984, pp.646-648) et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/415/2006 du 26 juillet 2006 et arrêts précités). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès (ATA/281/2006 du 23 mai 2006). Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; ATA/234/2006 du 2 mai 2006).

En l’espèce, la recourante n’a jamais fait l’objet d’une sanction autre que celle aujourd’hui litigieuse. Le montant de l’amende ne tient ainsi pas suffisamment compte de l’absence d’antécédents. En conséquence, le montant de l’amende sera réduit à CHF 300.-, ce qui est plus conforme à la pratique administrative adoptée par le département dans des affaires similaires (ATA/405/2007 du 28 août 2007 ; ATA/99/2005 du 1er mars 2005).

6. Le recours sera partiellement admis.

Au vu des motifs ayant conduit à l’admission partielle du recours, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée car elle comparaît en personne, n’allègue pas avoir encouru de frais particuliers pour sa défense et ne la requiert pas.

Un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge du département (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 septembre 2007 par Madame B______ contre la décision du département de l'économie et de la santé du 30 août 2007 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 200.- ;

met à la charge du département de l'économie et de la santé un émolument de
CHF 200.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame B______ ainsi qu'au département de l'économie et de la santé.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :