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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/129/2007

ATA/124/2008 du 18.03.2008 ( DI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/129/2007-DI ATA/124/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 18 mars 2008

dans la cause

 

Monsieur W______

contre

DÉPARTEMENT DES INSTITUTIONS


 


EN FAIT

1. Monsieur W______ a fondé en 1996 une entreprise spécialisée dans le domaine du stationnement, sous la raison de commerce individuelle « X______ Contrôle de stationnement sur domaine privé, W______ », devenue en 1998 « X______ Centre de services sur domaine privé, W______ ».

2. Le but de l’entreprise a été modifié en 1999, pour devenir : « gestion de parkings privés et contrôle du stationnement, réfection de marquage et serrurerie, parkings, service de sécurité, surveillance, enquêtes et filatures, protection de biens et de pensions, interventions diverses, transport de fonds, systèmes d’alarme ».

Le détenteur de l’autorisation d’exploiter cette entreprise de sécurité était Monsieur D______, M. W______ étant quant à lui engagé en qualité d’agent de sécurité employé, sur la base d’une autorisation d’engagement délivrée par le département de justice et police, devenu depuis lors le département des institutions (ci-après : le département). Dite autorisation a été renouvelée le 8 décembre 2000, suite à l’entrée en vigueur du concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996 (CES-I 2 14).

3. Les actifs et passifs de l’entreprise susmentionnée ont été repris au printemps 2001 par la société à responsabilité limitée « X______ Centre de service sur domaine privé Sàrl » (ci-après : X______ Sàrl), dont M. W______ était associé gérant, avec signature collective à deux, et directeur. Le second associé gérant était Monsieur L______, auquel le département avait délivré l’autorisation d’exploiter la société, à la suite du départ de M. D______.

4. Le 4 février 2005, le département a refusé de procéder au renouvellement de l’autorisation d’engagement délivrée le 8 décembre 2000 en faveur de M. W______, en raison de plaintes pénales déposées contre ce dernier. Cette décision a été confirmée par le Tribunal administratif le 28 juin 2005 (ATA/469/2005).

5. Le 6 juin 2005, suite à la démission de M. L______, le département a délivré à Monsieur T______ l’autorisation d’exploiter l’entreprise de sécurité X______ Sàrl. Le précité n’a jamais été inscrit au registre du commerce en quelque qualité que ce soit.

6. Par courrier du 26 décembre 2005, agissant en qualité de directeur de X______ Sàrl, dont il était toujours associé gérant avec signature collective à deux, M. W______ a informé le service compétent que M. L______ avait vendu sa part dans la société à Monsieur F______. Ce dernier étant titulaire de l’autorisation d’exploiter l’entreprise de sécurité Y______ F______ S.A., il remplacerait M.T______ dès le 1er février 2006 en qualité d’exploitant de X______ Sàrl.

7. Le 11 janvier 2005, M. W______ a informé le service compétent que le remplacement de M. T______ par M. F______ était reporté, sans autre précision quant à une date.

8. M. W______ a par ailleurs adressé au département, les 9 janvier et 26 mai 2006, des courriers à teneur desquels il se plaignait, en tant que directeur de X______ Sàrl, de retard dans la délivrance des cartes de légitimation de ses employés.

9. Le 13 juillet 2006, le département a demandé à la police de procéder à une enquête approfondie aux fins de déterminer si M. T______ exploitait bien personnellement et effectivement l’entreprise de sécurité X______ Sàrl, ou bien s’il servait de prête-nom à M. W______.

10. Le 15 septembre 2006, la police a rendu son rapport, dont il ressort les éléments suivants :

a. M. F______, entendu le 21 août 2006, a déclaré qu’il n’était pas sur la même longueur d’onde que M. W______ concernant la gestion d’une entreprise et avait assez vite décidé de revendre ses parts dans X______ Sàrl, ce qui avait été fait le 30 juin 2006. Sa principale activité avait toujours été chez Y______ F______ et il n’était allé qu’à trois ou quatre reprises dans les locaux de X______ Sàrl. C’était M. W______ qui gérait et dirigeait cette dernière, en particulier recevait les dossiers de candidatures, faisait passer les entretiens et signait les formulaires de demande d’autorisation d’engagement d’agents de sécurité. On lui avait indiqué que M. T______ s’occupait de la formation de ceux-ci.

b. Le 8 septembre 2006, M. T______ a indiqué qu’il avait été engagé à temps partiel, soit 40 %, comme chef d’agence pour un salaire net de CHF 2'550.- par mois. Il avait résilié son contrat au 31 août 2006. La gestion et la direction de X______ Sàrl étaient assurées par M. W______ et son bras droit, Monsieur V______. Au début de son engagement, M. T______ se chargeait de choisir les candidats agents de sécurité et de signer les formulaires de demande d’autorisation d’engagement. Il était assisté par M. V______. Par la suite, ce dernier s’est occupé seul de ces tâches, de même que de la planification des horaires et des instructions relatives aux missions. M. T______ était chargé de la formation de base et continue des agents engagés. M. W______, quant à lui, exerçait la fonction de directeur. Il s’occupait des relations avec les clients et des contrats de travail.

c. Entendu le 15 septembre 2006, M. W______ a déclaré que M. T______ avait été engagé comme exploitant d’agence à 40 % ou 50 %. Il s’occupait du recrutement et de la formation du personnel. Lui-même était directeur de X______ Sàrl et responsable des relations avec la clientèle, de la vente et de la bonne marche du service général des agents. Son salaire mensuel brut était de CHF 12'000.-.

11. Par courrier recommandé du 20 octobre 2006, le département, se fondant sur les interventions épistolaires de M. W______ ci-dessus mentionnées ainsi que sur le rapport de police du 15 septembre 2006, a reproché à celui-ci d’avoir dirigé et exploité l’entreprise de sécurité X______ Sàrl pendant plus d’une année, sous le couvert d’un prête-nom, sans être au bénéfice d’une autorisation d’exploiter, ni titulaire d’une carte de légitimation. Il était envisagé de donner l’ordre à X______ Sàrl de cesser toute activité si un nouvel exploitant, répondant à toutes les conditions requises, n’était pas désigné au plus tard le 3 novembre 2006 et, en outre, d’infliger à M. W______, solidairement avec X______ Sàrl, une amende administrative. Un délai au 3 novembre 2006 était imparti à l’intéressé pour s’expliquer et répondre par écrit aux griefs qui lui étaient adressés.

12. Le 23 octobre 2006, M. W______ s’est déterminé sur les reproches du département, dans un courrier signé en qualité d’administrateur de la société anonyme X______ S.A. (ci-après X______ S.A.), co-signé par un autre administrateur et le président du conseil d’administration de la nouvelle société, issue de la transformation de la Sàrl et dont l’inscription au RC devait intervenir le 26 octobre 2006.

L’intéressé contestait les reproches formulés. Le CES n’interdisait pas de travailler dans une entreprise de sécurité en qualité de cadre administratif et commercial, sans être agent de sécurité. M. T______ avait été engagé en qualité d’exploitant, à temps partiel, dans le but de gérer tous les aspects relatifs aux agents de sécurité : rapport avec les autorités, formation continue et recrutement, en collaboration avec M. V______, chargé notamment de la planification et de l’encadrement des missions. M. W______, en sa qualité de directeur, n’avait fait que superviser l’ensemble de la marche du service. Il n’avait assuré aucune fonction liée directement à la sécurité proprement dite.

13. Par décision du 12 décembre 2006, le département a infligé à M. W______, conjointement et solidairement avec X______ S.A., une amende administrative de CHF 5'000.-, pour avoir dirigé et exploité sans autorisation pendant plus d’un an l’entreprise de sécurité, dont il était associé et directeur, sous le couvert d’un prête-nom.

Le département reprenait l’ensemble des éléments exposés dans son courrier du 20 octobre 2006, écartant les arguments développés par M. W______ dans sa réponse susmentionnée. Pour fixer le montant de l’amende, l’autorité avait tenu compte de la différence entre sa rémunération et celle de M. T______ et du fait que l’intéressé ne pouvait manifestement pas ignorer l’illégalité de la situation, suite au départ de M. L______, à l’arrêt du Tribunal administratif du 28 juin 2005 et à la désignation d’un exploitant dépourvu de pouvoir.

14. Le 11 janvier 2007, M. W______ agissant à titre personnel, a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision susmentionnée, niant avoir géré X______ Sàrl sous couvert d’un prête-nom. Il contestait les déclarations de M. F______ et soutenait que M. T______ avait réellement rempli ses obligations d’exploitant d’une entreprise de sécurité. La décision querellée reposait sur des incohérences et devait être réexaminée.

15. Le 17 janvier 2007, le juge délégué a demandé à M. W______ de compléter l’acte de recours en formulant ses conclusions, conformément à l’article 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

16. Le 22 janvier 2007, M. W______ a formellement conclu à l’annulation de l’amende administrative. Il a indiqué en outre que la décision attaquée avait été reçue le 12 décembre 2006.

17. Le 16 février 2007, le département s’est opposé au recours. M. W______ n’étant plus autorisé à exercer la profession d’agent de sécurité que ce soit en qualité d’employé ou d’exploitant d’une entreprise, suite à l’arrêt du Tribunal administratif du 28 juin 2005, il ne pouvait par conséquent, pas accomplir les principales tâches de gestion et de direction relevant normalement du chef d’agence autorisé. Le montant de l’amende tenait compte de la gravité des infractions délibérément commises par l’intéressé, mais aussi du dessein de lucre.

18. Le 15 mars 2007, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle.

a. M. W______ a persisté dans son recours. Il détenait 30 % du capital-actions de X______ S.A. et disposait de la signature collective à deux. Il n’avait actuellement pas de cahier des charges formel, car une restructuration était en cours. Son activité consistait à faire en sorte que l’ensemble des services de la société fonctionne correctement et, par ailleurs, à avoir des contacts avec la clientèle. Environ 80 % de son travail consistait à assurer un lien direct entre chefs de mission et agents sur le terrain, d’une part, et les clients, d’autre part.

Par rapport aux faits qui lui étaient reprochés, c’était M. T______ qui engageait les agents de sécurité, seul au début, puis avec préavis de M. W______ par la suite, en raison de problèmes survenus avec plusieurs candidats recrutés. Il arrivait, par ailleurs, qu’il participe de cas en cas aux cours de formation, pour vérifier que tout se déroulait bien. Il avait en effet vingt années d’expérience dans le métier alors que M. T______ n’en avait qu’une lors de son engagement. Le retrait de son autorisation avait eu comme conséquence qu’il avait cessé d’aller sur le terrain, mais il avait continué à travailler aux niveaux administratif et commercial.

b. Le département a maintenu sa décision. La frontière entre les activités commerciales soumises au CES et celles qui ne l’étaient pas pouvait être parfois ténue. Ce qui était reproché à M. W______ était d’avoir exercé dans les faits l’activité de chef d’agence au sens du CES, c’est-à-dire d’avoir assumé la direction effective, notamment les aspects concernant l’engagement des agents, leur instruction, et les directives qui leur étaient adressées, cela alors même qu’il n’était plus autorisé à le faire. Seules les activités strictement commerciales, comme la recherche de clients, n’entraient pas dans le cadre des activités soumises à autorisation.

Dans le cadre du CES, il ne pouvait y avoir qu’un seul chef d’agence pour une entreprise, quelle que soit la forme juridique choisie par celle-ci.

L’amende n’avait pas été payée par X______ S.A.

19. Le 28 mars 2007, le juge délégué a demandé à M. W______ de produire les documents suivants :

- ses contrats de travail successifs avec X______ ;

- le ou les contrats de travail de M. T______ avec X______ ;

- le ou les contrats de travail de M. V______ avec X______ ;

- les cahiers des charges correspondant aux contrats de travail susmentionnés ;

- la liste de toutes les candidatures à l’engagement en qualité d’agent de sécurité présentées à X______ entre le 28 juin 2005 et le 12 décembre 2006 ;

- ses agendas professionnels 2005 et 2006 ;

- les agendas professionnels 2005 et 2006 de M. T______ ;

- les agendas professionnels 2005 et 2006 de M. V______.

20. Le 25 avril 2007, M. W______ a produit une partie des pièces requises. Ses propres agendas avaient été détruits lors d’un déménagement fin 2007 et ceux de M. T______ étaient introuvables.

21. a. Il ressort des documents remis les éléments suivants : selon son dernier contrat de travail, du 28 avril 2003, M. W______ avait comme activité la gestion d’exploitation de la société. Pour l’employeur, le contrat avait été signé par M. L______.

b. Selon son contrat de travail du 1er juin 2005, M. V______ était engagé en qualité d’adjoint à la direction d’exploitation. Pour l’employeur, le contrat avait été signé par M. W______.

c. Selon son contrat de travail du 30 mai 2005, M. T______ était engagé en qualité de chef d’agence « titulaire des patentes d’exploitant d’agence de sécurité et représentant la société auprès des autorités compétentes ». Il était également chargé de démarchage commercial des clients et de la formation globale du personnel. Pour l’employeur, le contrat avait été signé par M. W______.

d. Les vingt-deux formules de demande d’autorisation concordataire produites avaient été signées, dans la mesure où la signature était identifiable, par M. T______.

22. Par courrier du 3 septembre 2007, M. W______ a informé le tribunal de céans qu’il avait été licencié par ses associés le 4 juin 2007 et qu’il n’avait pas encore pu toucher de prestations de chômage, car son ex-employeur tardait à remplir ses obligations administratives.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’article 65 alinéa 1 LPA, l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

  Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitudes les fins du recourant (ATA/1/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/118/2006 du 7 mars 2006 ; ATA/775/2005 du 15 novembre 2005 et la jurisprudence citée). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (P. MOOR, Droit administratif, Vol. II, Berne 2002, 2ème éd., p. 674 n. 5.7.1.4).

  Quant à l’exigence de motivation de l’article 65 alinéa 2 LPA, elle a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre (ATA/1/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/775/2005 du 15 novembre 2005 ; ATA/172/2001 du 13 mars 2001 ; ATA Société T. du 13 avril 1988 ; P. MOOR, op. cit., pp. 672-674 n. 5.7.1.3). Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/23/2006 du 17 janvier 2006 ; cf. ég. ATF 130 I 312 rendu à propos de l’ancien art. 108 al. 2 OJ).

  En l’espèce, les développements du recourant qui agit en personne, apparaissent suffisamment explicites pour que l’on puisse comprendre qu’il entend obtenir l’annulation de la décision querellée, parce qu’elle se fonde sur des déclarations contestées.

3. Seul le recourant a contesté l’amende administrative qui lui a été infligée solidairement avec X______ S.A., laquelle n’a pas recouru, de sorte que la décision du département est en force en ce qui concerne cette dernière. L’amende n’a toutefois pas été réglée de sorte que le recours conserve un intérêt actuel.

4. Selon l’article 7 alinéa 1 lettre a CES, une autorisation est nécessaire pour exploiter une entreprise de sécurité ou une succursale de celle-ci, et engager du personnel à cet effet. L’entreprise constituée en personne morale doit désigner un responsable auquel elle confère les pouvoirs de la représenter et l’engager auprès des tiers. Celui-ci doit être en situation de pouvoir exercer ses responsabilités (art. 7 al. 3 CES).

Les conditions qui doivent être remplies pour obtenir l’autorisation d’exploiter et l’autorisation d’engager du personnel sont énumérées respectivement aux articles 8 et 9 CES.

En l’espèce, il ressort de l’instruction de la cause que M. T______ a été engagé en qualité de responsable d’exploitation autorisé de X______ Sàrl dès juin 2005 - soit alors que le recourant était encore au bénéfice de sa propre autorisation - et qu’il était en charge du recrutement et de la formation des agents de sécurité. Ses écrits et ses déclarations, comme celles de M. W______, et les documents administratifs produits permettent de retenir qu’il a effectivement accompli ces tâches. Peu importe à cet égard qu’il ait exercé son activité à temps partiel, les conditions d’obtention de l’autorisation d’exploiter et d’engager du personnel n’incluant pas d’exigence en matière de durée minimum de travail.

En revanche, M. T______ avait au sein de l’entreprise un statut d’employé subordonné, en particulier à MM. W______ - directeur - et V______ - adjoint au directeur, qui l’un et l’autre sont intervenus dans sa sphère d’activité. Ainsi M. V______ participait-il au recrutement des agents de sécurité, à la planification de leurs horaires et aux instructions relatives aux missions tandis que M. W______ préavisait les engagements, supervisait parfois les cours de formation et assurait la liaison lors des missions entre les collaborateurs de X______ Sàrl, les clients voire la gendarmerie. Ces interventions ne résultaient pas de décisions organisationnelles prises par M. T______ et MM. W______ et V______ n’agissaient ni sur délégation ou instruction de sa part, ni sous son contrôle. M. T______ n’était pas inscrit au RC en quelque qualité que ce soit. Force est ainsi de constater que M. T______ n’était pas en mesure d’exercer les responsabilités qui lui incombaient en tant qu’exploitant autorisé d’une entreprise de sécurité (art. 7 al. 3, 8 et 9 CES). C’est M. W______, copropriétaire de X______ Sàrl, puis actionnaire de X______ S.A., et unique directeur, qui a mis en place cette organisation et en a assuré la supervision, agissant ainsi en tant que responsable effectif dans le domaine de la sécurité, alors qu’il n’était plus au bénéfice d’une autorisation d’exploitation ou d’engagement du personnel. Ce faisant, il a violé les articles 7, 8 et 9 CES.

5. Selon l’article 4 alinéa 1 lettre a de la loi concernant le concordat sur les entreprises de sécurité du 2 décembre 1999 (LCES - I 2 14.0), le département peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- à celui qui pratique l’une des activités soumises à autorisation pour le CES.

  a. Les amendes administratives sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/601/2006 du 14 novembre 2006 ; ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/813/2001 du 4 décembre 2001 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139s).

b. Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (HÄFELIN/MÜLLER/UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5ème éd., Zürich-Bâle-Genève 2006, p. 252, n. 1179). Selon des principes qui n’ont pas été remis en cause, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/543/2006 du 10 octobre 2006 ; ATA/451/2006 du 31 août 2006 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, vol. 2, Neuchâtel, 1984, pp.646-648) et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/415/2006 du 26 juillet 2006 et arrêts précités). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès (ATA/281/2006 du 23 mai 2006). Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; ATA/234/2006 du 2 mai 2006).

En l’espèce, le recourant travaille depuis plus de vingt ans dans la branche économique de la sécurité privée. Il en connaît la réglementation. Il ne pouvait donc ignorer qu’en engageant M. T______ en qualité de chef d’agence sans lui permettre d’en exercer les responsabilités et en assurant lui-même celles-ci, il contrevenait aux dispositions concordataires. Sa faute est ainsi grave. Dans ces circonstances, le tribunal de céans estime qu’en lui infligeant une amende administrative de CHF 5'000.- le département a fait un usage correct du pouvoir d’appréciation dont il dispose. Le recourant a fait état de difficultés financières intervenues en cours de procédure. Toutefois, il n’a fourni aucune pièce justificative et n’allègue pas qu’il serait dans l’impossibilité durable de faire face à ses obligations, de sorte qu’il n’y a pas lieu de diminuer le montant susmentionné.

6. Mal fondé, le recours sera rejeté dans la mesure où il est recevable. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant qui succombe.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 janvier 2007 par Monsieur W______ contre la décision du département des institutions du 12 décembre 2006 ;

 

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1'000.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur W______ ainsi qu’au département des institutions.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :