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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/91/2022

ATA/389/2022 du 12.04.2022 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 23.05.2022, rendu le 17.05.2023, REJETE, 8C_324/2022
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/91/2022-FPUBL ATA/389/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 avril 2022

 

dans la cause

 

Mme A______
représentée par Me Romain Jordan, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI



EN FAIT

1) Mme A______, née le ______ 1970, est titulaire d'un certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) d'employée de commerce.

2) Le 15 novembre 1995, elle a été engagée en qualité de secrétaire 1 au service B______ (ci-après : B______). Elle a été nommée fonctionnaire le 1er novembre 1998.

Elle a été promue : le 1er janvier 2001 à la fonction de commise administrative 5/assistante ressources humaines (ci-après : RH) à l'B______, en classe de traitement (ci-après : classe) 12 ; le 1er mai 2009 à la fonction d’adjointe administrative 1 au service des RH (ci-après : SRH) de l’ancien département C______, en classe 15 ; le 1er juillet 2012 à la fonction d’adjointe administrative au SRH de l’ancien département D______, en classe 17.

3) Au terme de l’entretien d’évaluation et de développement du personnel
(ci-après : EEDP) du 12 juin 2013, un plan de formation progressif associé à une évolution de carrière en tant que responsable de secteur a été établi et devait être réalisé entre le 1er janvier 2014 et le 1er janvier 2019. Dans ce cadre, Mme A______ devait passer un certificat de formation continue (ci-après : CAS) en ressources humaines. Mme A______ a indiqué pour sa part vouloir progresser dans ses tâches, avoir plus de responsabilités et suivre en parallèle une formation auprès de l’Université de Genève afin d’avoir le niveau requis pour occuper le poste convoité.

4) Au terme de l’EEDP du 12 décembre 2013, les prérequis de formation de Mme A______ n’étaient pas encore atteints pour prétendre à la fonction de cadre et un plan de formation a été mis en place entre janvier 2014 et janvier 2019. Il lui appartiendrait de réussir les objectifs fixés par la direction des RH (ci-après : DRH), d’entreprendre une formation universitaire de type CAS-RH et d’obtenir le diplôme permettant d’atteindre le niveau de formation exigé pour la fonction occupée. Mme A______ indiquait qu’aucune formation ne pourrait être mise en place en 2014 compte tenu de la charge de travail importante.

5) Le 1er janvier 2014, Mme A______ a été promue à la fonction de RRH 2 à la DRH de l’ancien département E______, en classe 23, assortie du code complémentaire 9F impliquant une diminution de traitement de deux classes pendant cinq ans.

6) Lors d’un entretien du 14 juillet 2014 entre Mmes F______, directrice RH du département, et A______, cette dernière a confirmé son intérêt de suivre une formation de type MAS-RH ou CAS-RH, à déterminer au moment opportun et prévoir une inscription pour l’année 2016, à confirmer dans le cadre de l’enveloppe budgétaire allouée en 2016 à la DRH. La formation MAS-RH serait planifiée plutôt en 2017 pour des raisons d’organisation.

7) L’EEDP du 27 octobre 2015 ne mentionnait pas de plan de formation.

8) L’EEDP du 4 octobre 2016 mentionnait qu’il était souhaitable que Mme A______ puisse entreprendre une formation de type CAS-RH, comme il était prévu depuis quelques années. Cette formation devait lui apporter une vision plus large de la fonction RH et lui permettre de développer sa capacité conceptuelle et rédactionnelle.

9) Lors de l’EEDP du 13 octobre 2017, Mme A______ a précisé qu’elle souhaitait suivre sa formation CAS en 2019. Cela faisait partie d’un plan de formation en lien avec sa promotion de 2014.

10) Le 1er juin 2018, suite à une réorganisation de l’administration cantonale, Mme A______ a été transférée au département G______ en qualité de RRH 2 et affectée à l’B______.

11) Le 5 février 2020, le Conseil d’État a ordonné l’ouverture d’une enquête et suspendu Mme A______ de ses fonctions avec effet immédiat.

12) L’enquêtrice a conclu le 31 juillet 2020 notamment que Mme A______ avait modifié à deux reprises des documents d’évaluation de ses prestations par ses supérieurs hiérarchiques à l’insu de ces derniers.

13) Le 14 octobre 2020, le Conseil d’État a révoqué Mme A______ avec effet immédiat.

Elle n’avait, entre autres, pas rempli son obligation de formation et de perfectionnement. Elle avait utilisé sa position de RRH 2 pour contourner les procédures RH et ainsi obtenir un avantage financier indu. Elle avait commis une violation grave de ses devoirs de service, qui avait définitivement rompu le lien de confiance.

14) Le 6 juillet 2021, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a partiellement admis le recours formé par Mme A______, annulé l’arrêté du Conseil d’État et renvoyé la cause à ce dernier pour nouvelle décision au sens des considérants.

Mme A______ avait considéré à tort que le seul écoulement du temps lui permettrait d’obtenir la levée du code sans satisfaire à l’exigence de formation. Elle avait obtenu un traitement supérieur à celui auquel elle aurait eu droit dès le 1er janvier 2019, date à laquelle elle aurait dû être titulaire d’une formation universitaire. Le stratagème reproché n’était toutefois pas établi. La sanction était excessive au vu de l’ensemble des circonstances.

Mme A______ devrait être réintégrée dans un poste correspondant à sa formation et aux années d’expérience acquises au 14 octobre 2020.

15) Le 23 septembre 2021, Mme A______ a indiqué au département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DEE) se tenir dans l’attente des modalités de son retour au travail.

Elle a également réclamé le règlement rétroactif du salaire dû sous dix jours.

16) Le 14 octobre 2021, le DEE a annoncé à Mme A______ qu’un entretien afin d’aborder les modalités de son retour au travail lui serait proposé.

Il l’a invitée à indiquer et documenter les revenus de substitution reçus depuis le 16 octobre 2020, ainsi que la fin de son arrêt de travail commencé le 11 novembre 2019. Le versement de son traitement serait réactivé dès le mois d’octobre 2021.

17) Lors de l’entretien du 3 novembre 2021, le DEE a exposé que des calculs en vue du paiement du rétroactif étaient en cours et que la levée du code était selon lui injustifiée depuis le 1er janvier 2019 déjà.

Les formations dont Mme A______ demandait la prise en charge avaient eu lieu à des périodes où celle-ci n’était pas engagée par l’État et n’avaient pas été validées par la hiérarchie. La demande serait toutefois réexaminée compte tenu des montants en jeu et il serait vérifié qu’elles entraient dans une logique de formation professionnelle sous l’angle du poste occupé ou à occuper à l’avenir.

Un poste de conseillère en personnel au sein de l’B______ (classe 15 annuité 5) lui était proposé. Il faisait appel à son expérience et restait dans la filière RH. Elle le connaissait bien puisqu’elle avait recruté pour le pourvoir. Il fallait tenir compte du défaut de formation encore existant et de la rupture du rapport de confiance. L’équipe serait dirigée par une cadre qu’elle ne connaissait pas. Étaient liés au poste une formation de base intercantonale AOST, un certificat RH et une formation menant à l’obtention du brevet RH, pris en charge par l’État. L’obtention du brevet entraînait l’augmentation d’une classe, la possibilité d’évoluer comme cheffe de groupe et d’évoluer dans un poste de conseillère à l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) ou à l’office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue (ci-après : OFPC). Le retour au statut d’employée, soit une sanction sans conséquences pécuniaires, serait vraisemblablement prononcé par ailleurs. Elle pouvait également postuler pour une autre fonction libre correspondant à sa formation et ses années d’expérience. Le temps lui permettrait de regagner la confiance de son employeur. Le cahier des charges et le calcul du traitement lui étaient remis.

Mme A______ a indiqué qu’elle attendait de pouvoir réintégrer le poste qu’elle occupait jusqu’à sa révocation, au DEE ou dans un autre département. Elle avait toujours répondu aux exigences et donné entière satisfaction et ses prestations étaient sans reproche excepté un courriel malheureux. Il n’y avait pas de contre-indications. Son plan d’évolution était validé et le nécessaire était prévu pour compléter son niveau de formation. Le poste proposé équivalait à une rétrogradation et constituait une seconde sanction. Elle devait être replacée dans sa fonction au jour de la décision annulée (ex tunc). La classe de son traitement devait être la même que celui qu’elle percevait alors.

18) Le 11 novembre 2021, le DEE a transmis à Mme A______ le procès-verbal de l’entretien du 3 novembre 2021.

Il était entré en matière et envisageait de refuser la prise en charge du coût des formations « CAS en violences plurielles » de la HES-SO et « CAS en leadership et GRH publics » de l’IDHEAP, car ces formations ne relevaient pas des catégories « obligatoire légale », « prioritaire prestation » ou « utile prestation » qui les rendraient utiles pour le service et la fonction occupée par le passé et celle proposée pour le futur, et n’avaient pas été préavisées par le supérieur hiérarchique et les RH du département ni par le service de formation de l’État, ce alors qu’elle savait ces conditions devoir être remplies vu ses fonctions.

Mme A______ pouvait reprendre dès le 22 novembre 2021 et à titre provisoire un poste vacant de conseillère en personnel auprès de l’B______.

19) Le 25 novembre 2021, Mme A______ a déploré l’humiliation continue qui lui était infligée. Elle était laissée sans salaire et avec des charges de famille, et sommée d’accepter un déclassement professionnel totalement inacceptable tout en sachant qu’elle n’avait plus de droit au chômage, ce qui relevait du mobbing caractérisé.

Les formations devaient être prises en charge. Elle en avait demandé la validation dès qu’elle était redevenue rétroactivement fonctionnaire. Elles entraient dans les directives de prise en charge.

Un intérêt moratoire de 5 % serait réclamé sur le rétroactif de son traitement et une poursuite adressée à l’État dans la semaine en l’absence de paiement.

L’arrêt de la chambre administrative était clair : elle devait être réintégrée dans son poste ; le renvoi de la cause ne pouvait s’entendre que dans le cadre légal ; à supposer que l’État considère avoir été trompé, il lui incombait d’invalider ses actes dans les délais, ce qu’il n’avait pas fait, ratifiant la situation.

20) Par décision du 22 décembre 2021, déclarée exécutoire nonobstant recours, le DEE a prononcé le changement d’affectation de Mme A______.

À compter du 1er janvier 2022, elle était affectée à la fonction de « conseillère en personnel H______ à 100 % - 5.09.014/9E » auprès de l’B______, en classe 16, soit, compte tenu du code 9E, en classe 15 annuité 5, pour un traitement annuel brut de CHF 92'067.-.

Il n’existait pas de droit à être maintenue en permanence au même poste. Un changement d’affectation rendu nécessaire par une impossibilité de collaborer ne constituait pas une sanction déguisée. La chambre administrative n’avait pas ordonné la réintégration dans sa fonction mais dans un poste correspondant à sa formation et aux années d’expérience acquises au 14 octobre 2020. Le défaut de formation avait été établi durant la procédure et confirmé par la chambre administrative, et le lien de confiance nécessaire ne pouvait être établi, de sorte que la réintégration au poste précédent de RRH2, qui avait par ailleurs été repourvu, n’était pas envisageable. Il avait été tenu compte de son CFC d’employée de commerce et de ses nombreuses années d’expérience dans la filière RH. La diminution du traitement était conforme à la nouvelle affectation, laquelle était conforme à l’arrêt de la chambre administrative. L’annuité initiale tenait compte de ses années d’expérience et le code 9E ne serait levé qu’à l’obtention du brevet RH, dont la formation serait prise en charge par l’État.

Il existait un intérêt manifeste à ce qu’elle puisse exercer ses nouvelles activités immédiatement, sans attendre l’issue d’un éventuel recours, afin de rendre concrète la réintégration ordonnée par l’arrêt du 6 juillet 2021, étant précisé qu’elle n’avait plus exercé d’activité pour l’État depuis le 11 novembre 2019. Elle avait elle-même exprimé le souhait de reprendre rapidement le travail.

21) Par acte déposé au greffe le 12 janvier 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à son annulation. Préalablement, l’effet suspensif devait être restitué au recours et une audience de comparution personnelle des parties ainsi que la production par l’autorité du dossier intégral de la cause devaient être ordonnées.

Elle avait préparé le brevet RH d’août 2004 à juillet 2005 mais n’avait pu présenter tous les examens pour des raisons personnelles. Sa directrice d’alors avait jugé ce diplôme non nécessaire compte tenu de son expérience. La formation n’avait pas constitué un obstacle pour sa promotion le 1er juillet 2012. La mise en œuvre du plan de formation établi avait été repoussée à plusieurs reprises. Le code 9F avait été partiellement levé le 1er janvier 2016 lors de sa confirmation dans sa fonction. Le Code 9E avait été levé le 31 janvier 2019 avec effet rétroactif au 1er janvier 2019, conformément au plan de formation.

Le DEE n’avait rien entrepris pour se conformer à l’arrêt du 6 juillet 2021 ordonnant sa réintégration, mais avait utilisé le passage du temps pour la contraindre à accepter une solution aussi injuste qu’injustifiable. Elle avait dû le mettre en demeure de lui régler le salaire rétroactif et les dépens et de la réintégrer.

Son droit au chômage avait pris fin le 31 septembre 2021. Elle avait trois enfants à charge et n’avait plus aucun revenu. Elle avait appris le 15 novembre 2021 que sa réaffiliation n’avait pas été annoncée à la caisse de prévoyance de l’État de Genève (ci-après : CPEG) et avait dû mettre le DEE en demeure d’y procéder. Elle avait reçu le 18 novembre seulement son traitement du mois d’octobre 2021, fondé de manière erronée sur une classe 22 au lieu de 23.

Le 15 décembre 2021, le Conseil d’État avait prononcé à titre de sanction le retour au statut d’employée en période probatoire pour une durée de deux ans, au motif qu’elle avait commis d’importants manquements et que le lien de confiance avait été sérieusement ébranlé.

La décision querellée lui imposait un traitement inférieur de sept classes et de cinq annuités, et une diminution du traitement mensuel brut de CHF 11'303.80 à CHF 7'082.10, laquelle mettait en cause sa solvabilité à moyen et court terme et impliquait une réorganisation incompatible avec le caractère subit du changement opéré.

La prise en charge des formations lui avait été refusée.

Profondément affectée et choquée, elle avait passé les fêtes de fin d’année 2021 auprès de sa famille en pleurs et se trouvait depuis en incapacité de travail jusqu’au 2 février 2022.

La décision violait l’art. 31 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). La réintégration avait pour effet de replacer le fonctionnaire dans la situation qui était la sienne avant son licenciement injustifié, comme si les rapports de travail n’avaient jamais cessé. La décision cassée n’avait jamais existé.

La décision violait également le principe de l’autorité de l’arrêt de renvoi et consacrait un déni de justice. L’arrêt du 6 juillet 2021 avait ordonné une sanction plus clémente, mais nullement la rétrogradation à une fonction correspondant au niveau d’expérience et de formation qu’elle avait en 2009, lorsqu’elle était adjointe administrative en classe 15.

La décision violait les principes de la légalité et de l’interdiction des sanctions déguisées. Le défaut de formation n’était qu’un pur prétexte. L’obtention d’un CAS en RH n’avait jamais été nécessaire pour occuper le poste de RRH2, raison pour laquelle elle y avait été engagée des années durant sans posséder la formation. La chambre administrative avait uniquement estimé qu’une formation était nécessaire à la levée du code 9E. Cela n’empêchait en rien qu’elle était qualifiée pour occuper le poste, au vu de ses années d’expérience, mais avec l’application d’un code pénalisant. L’autorité pouvait tout au plus arguer de la nécessité d’imposer à nouveau le code, mais la rétrogradation démontrait le caractère de sanction de la décision, confinant à l’atteinte à la personnalité. Le DEE invoquait d’ailleurs l’atteinte à la confiance pour exclure la réintégration dans un poste identique et se référait constamment à l’arrêt du 6 juillet 2021.

La décision violait le principe ne bis in idem. Elle constituait une sanction disciplinaire alors qu’une telle sanction avait été prononcée séparément le 15 décembre 2021.

La décision violait l’art. 12 LPAC. Même si elle constituait un changement d’affectation, le DEE n’établissait pas quels besoins justifieraient celle-ci. Il n’établissait pas plus ce qui justifiait une nette diminution du traitement.

La décision violait le principe de la bonne foi. Le DEE invoquait son défaut de formation et de compétences pour lui refuser une réintégration au poste de RRH2 alors même que ses compétences lui avaient valu plusieurs promotions successives qui l’avaient conduite jusqu’à ce poste.

Le DEE ne pouvait se prévaloir d’une invalidation pour cause d’erreur ou de tromperie selon les art. 23 s de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), car il connaissait le défaut de formation lorsqu’il l’avait promue à plusieurs reprises.

La décision était enfin arbitraire, en ce qu’elle heurtait de manière choquante le sentiment de justice et d’équité, compte tenu de ce qu’elle avait obtenu gain de cause.

La rétrogradation lui causait un préjudice irréparable, également en termes de réputation.

22) Le 24 janvier 2022, le DEE s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif.

Mme A______ ne fournissait aucune information sur sa situation financière, notamment ses revenus, ses charges et sa fortune. La restitution de l’effet suspensif la laisserait sans occupation, sa réintégration même provisoire au poste de RRH2 n’étant pas envisageable. Il existait un intérêt public à aligner sans attendre sa rémunération sur sa nouvelle fonction.

23) Le 7 février 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions en restitution de l’effet suspensif.

24) Le 17 février 2022, Mme A______ a communiqué une décision de l’B______ annulant son dossier compte tenu de la prolongation de son arrêt maladie au-delà de trente jours.

25) Par décision du 21 février 2022, la présidence de la chambre administrative a refusé de restituer l’effet suspensif au recours, compte tenu des chances de succès du recours, et au motif notamment que Mme A______ était sans activité ni revenus et pourrait le cas échéant réclamer la différence de salaire en cas de succès de son recours, qu’elle avait un intérêt financier à l’exécution immédiate de la décision et qu’une éventuelle atteinte à la considération pourrait être réparée par une décision finale entièrement favorable.

26) Le 24 février 2022, le DEE a conclu au rejet du recours.

Le changement d’affectation ne pouvait être considéré comme une sanction déguisée. L’arrêt du 6 juillet 2021 avait retenu des lacunes dans la formation exigée dans la fonction précédente de RRH2. Les formations suivies par la suite par Mme A______ ne pouvaient être assimilées au brevet fédéral de spécialiste en ressources humaines exigé pour le poste de RRH2. La recourante ne fournissait aucune indication sur sa situation financière.

La décision ne visait nullement à sanctionner le comportement de la recourante. Les faits établis par la chambre administrative rendaient légalement impossible sa réintégration dans sa précédente fonction, dans la mesure où le lien de confiance nécessaire au bon exercice de l’activité ne pouvait plus être établi.

Il avait à de nombreuses reprises rappelé à la recourante son obligation de formation, de sorte qu’on ne pouvait lui reprocher sa mauvaise foi. Le poste qu’elle occupait avait été repourvu.

27) Le 28 février 2022, le DEE a indiqué que Mme A______ avait été rémunérée en classe 22 depuis la notification de l’arrêt du 6 juillet 2021 jusqu’à la notification de la décision querellée. La décision concernant ce salaire faisait l’objet d’une cause parallèle A/426/2022.

Depuis le 1er janvier 2022, Mme A______ était rémunérée selon la classe de traitement correspondant à sa nouvelle affectation.

28) Le 2 mars 2022, Mme A______ a demandé la reconsidération de la décision refusant la restitution de l’effet suspensif.

Elle n’était pas sans salaire au jour du prononcé de la décision du 21 février 2022. Son préjudice financier se réalisait au quotidien. L’exécution immédiate de la décision n’avait pas pour effet de lui procurer un revenu, mais d’amputer celui perçu jusque-là d’un tiers. Elle n’avait pas d’intérêt financier à l’exécution de la décision.

29) Le 14 mars 2022, le DEE s’est opposé à la révision de la décision sur effet suspensif.

Aucune modification des circonstances n’était alléguée et Mme A______ n’avait pas rendu vraisemblable que la nouvelle rémunération l’exposerait à un préjudice difficilement réparable.

30) Le 14 mars 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions sur effet suspensif.

La CPEG l’avait avisée le 8 mars 2022 des conséquences de l’application de son nouveau traitement sur sa prévoyance. Le DEE avait admis l’inadvertance manifeste affectant la décision.

31) Le 28 mars 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions au fond.

Le DEE arguait tantôt que la décision était un changement d’affectation ordinaire, tantôt qu’il s’agissait d’une mise en œuvre de l’arrêt du 6 juillet 2021. La décision attaquée était en tout hypothèse contraire au droit.

Les nombreux rappels concernant la formation confirmaient que le DEE connaissait l’absence de formation depuis le départ. Le niveau de formation avait été pris en compte par l’apposition d’un code 9. Le DEE avait en outre admis l’application de la classe 22 jusqu’à la décision querellée.

32) Le 28 mars 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

33) Le 30 mars 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur le fond.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige a pour objet le bien-fondé de la décision du DEE du 22 décembre 2021 affectant la recourante, à compter du 1er janvier 2022, à la fonction de « conseillère en personnel H______ à 100 % - 5.09.014/9E » auprès de l’B______, en classe 16, soit, compte tenu du code 9E, en classe 15 annuité 5, pour un traitement annuel brut de CHF 92'067.-.

3) Les parties divergent sur la portée du dispositif de l’arrêt ATA/715/2021 du 6 juillet 2021.

Celui-ci admet partiellement le recours, annule l’arrêté du Conseil d’État du 14 octobre 2020 et renvoie la cause au Conseil d’État pour nouvelle décision au sens des considérants.

Selon l’arrêt, le prononcé de la révocation viole le principe de la proportionnalité. La sanction est excessive compte tenu des éléments à décharge non évoqués et non pris en compte. Plusieurs fautes demeurent cependant établies à l’encontre de la recourante, soit principalement d’avoir complété l’EEDP et l’EEDM, de ne pas avoir attiré l’attention de ses supérieurs sur ces modifications, de ne pas avoir évoqué la problématique du code 9 avec eux ou à tout le moins vérifié qu’ils en avaient connaissance, d’avoir considéré à tort que le seul écoulement du temps lui permettrait d’obtenir la levée du code sans satisfaire à l’exigence de formation et d’avoir obtenu le paiement d’un traitement supérieur à celui auquel elle aurait eu droit, à partir du 1er janvier 2019, date à laquelle elle aurait dû être titulaire d’une formation universitaire ou jugée équivalente selon le plan de formation.

L’annulation de la décision de révocation a pour conséquence, ex lege, la réintégration obligatoire de la recourante. Celle-ci « devra être réintégrée dans un poste correspondant à sa formation et aux années d’expérience acquises au 14 octobre 2020 » (ATA/715/2021 précité consid. 16).

4) La recourante soutient qu’elle ne pourrait être réaffectée qu’à son ancienne fonction ou à une fonction équivalente au plan du cahier des charges et de la rémunération.

a. À la suite de la modification de la LPAC entrée en vigueur le 19 décembre 2015, le Tribunal fédéral, saisi d’un cas de réintégration à la suite de l’annulation d’une décision de révocation jugée disproportionnée, a relevé que « l’annulation de la décision de révocation implique que cette décision ne déploie plus d'effets, de sorte que le fonctionnaire concerné reste membre de l'administration cantonale » (arrêt du Tribunal fédéral 8C_203/2020 du 25 août 2020 consid. 3.3.3). Si le principe de la réintégration, seul soumis au Tribunal fédéral, a ainsi été approuvé, la question du poste ou de la fonction dans lequel le recourant devait être réintégré n’a par contre pas été abordée. L’art. 31 al. 2 et 3 LPAC, qui prévoit la réintégration lorsque la chambre administrative juge que la résiliation des rapports de service ne repose pas sur un motif fondé ou est contraire au droit, ne précise pas plus ce qu’il faut entendre par réintégration.

Dans sa pratique, la chambre de céans a, sous l’ancien comme sous le nouveau droit cantonal de même qu’au plan communal, ordonné la réintégration sans autre précision. Elle a ainsi : ordonné de « réintégrer immédiatement » une fonctionnaire (ATA/911/2015 du 8 septembre 2015 consid. 13) ; ordonné « la réintégration de [la recourantes] au sein des Hôpitaux universitaires de Genève » (ATA/61/2019 du 22 janvier 2019) ; « ordonné la réintégration [du recourant] au sein des Hôpitaux universitaires de Genève » (ATA/345/2019 du 2 avril 2019) ; ordonné « la réintégration [du recourant] avec effet au 29 juin 2017 » (ATA/706/2021 du 6 juillet 2021) ; ordonné « la réintégration [du recourant] au sein de l’EMS » (ATA/997/2021 du 28 septembre 2021 consid. 10b).

Elle a précisé dans certains cas que la réintégration devait se faire dans le poste ou la fonction occupés au moment de la révocation (ou du licenciement). Elle a ainsi : ordonné la « réintégration [du recourant] au sein de la fonction publique de la ville, dans sa fonction de référent d'école municipale pour l'ensemble de la formation des [agents de police municipale] » (ATA/349/2019 du 2 avril 2019 consid. 8) ; dit que « l'annulation de la décision de révocation a[vait] pour conséquence, ex lege, la réintégration obligatoire du fonctionnaire [et que] le recourant devra[it] être réintégré dans sa fonction » (ATA/711/2021 du 6 juillet 2021 consid. 13).

Le plus souvent, elle a ordonné, alternativement ou à titre principal, la réintégration dans un poste ou une fonction de même type, générique ou équivalent. Ainsi, elle a : ordonné la réintégration d’une enseignante « en qualité de maître de l’enseignement secondaire » (ACOM/24/2004 du 15 mars 2004 consid. 22) ; ordonné la réintégration d’un fonctionnaire « au sein de l’administration cantonale dans sa fonction d’ingénieur ETS en génie civil » (ATA/287/2018 du 27 mars 2018 consid. 9) ; ordonné « la réintégration du recourant dans sa fonction d'huissier-chef [étant précisé qu’il] reviendra[it] à l'État de lui trouver un nouveau poste, s'il ne devait pas être réintégré dans son ancien poste de travail » (ATA/915/2019 du 21 mai 2018 consid. 8c) ; ordonné « la réintégration au sein de la fonction publique, dans sa fonction d’agente de détention sous le grade de surveillante principale adjointe », précisant qu’« il reviendra[it] à l’État de Genève de lui trouver un autre, nouveau, poste, si elle ne devait pas être réintégrée dans l’administration pénitentiaire » (ATA/1087/2018 du 16 octobre 2018 consid. 11) ; ordonné « la réintégration de la recourante dans la fonction publique », étant précisé qu’« il appartiendra[it] à l’État de Genève de lui trouver un nouveau poste équivalent, si elle ne devait pas être réintégrée à son poste au sein de [l’office des poursuites] » (ATA/1177/2018 du 6 novembre 2018 consid. 16) ; ordonné « la réintégration de la recourante dans sa fonction d'assistante sociale [étant précisé qu’il] reviendra[it] à l'État de lui trouver un nouveau poste équivalent, si elle ne devait pas être réintégrée dans son ancien poste de travail » (ATA/213/2020 du 25 février 2020 consid. 9) ; ordonné « la réintégration [du recourant] au sein de la fonction publique de la ville, dans sa fonction de responsable d’unité à la DSIC ou tout autre poste jugé équivalent » (ATA/466/2020 du 12 mai 2020 consid. 11) ; ordonné « la réintégration de la recourante au sein de l’administration cantonale, à un poste de responsable chargée du contrôle interne ou à un poste équivalent » (ATA/588/2020 du 16 juin 2020 consid. 9).

Il est aussi arrivé qu’elle ne mentionne pas l’équivalence et dise que l’annulation de la révocation avait « pour conséquence la réintégration du recourant dans sa fonction d’inspecteur du travail ou, à défaut, dans un autre poste » (ATA/137/2020 du 22 février 2020 consid. 18), l’équivalence étant toutefois implicitement exigée dans ce cas.

Il est par contre advenu que la chambre de céans envisage explicitement un autre poste, de niveau différent, ou soumette la réintégration à conditions. Ainsi lorsqu’elle a : ordonné la réintégration d’une maîtresse de discipline spéciale de l’enseignement primaire « au sein de la fonction publique », étant précisé qu’il « reviendra[it] à l’État de Genève de lui trouver un nouveau poste, si elle ne devait pas être réintégrée dans son ancien poste de travail, voire d’entreprendre les démarches nécessaires [ ] s’il devait s’avérer qu’elle ne soit pas apte à travailler » (ATA/838/2018 du 21 août 2018 consid. 22) ; ordonné « la réintégration de la recourante, étant toutefois précisé qu’au vu des considérations susmentionnées quant à la situation médicale de la recourante, une reprise d’activité par celle-ci au sein de l’université est subordonnée, dans l’attente de l’avis du médecin-conseil de la caisse de prévoyance et le cas échéant d’une nouvelle décision prise après une instruction conforme à l’art. 26 al. 3 LPAC, à l’accord exprès du médecin-conseil de l’université qui doit veiller au respect de la santé des collaborateurs » (ATA/348/2019 du 2 avril 2019 consid. 7).

Il arrive enfin que la loi se réfère aux capacités du fonctionnaire. Ainsi, l’art. 23 al. 2 LPAC prévoit que la résiliation des rapports de service ensuite de la suppression du poste ne peut intervenir que s'il se révèle impossible de confier au membre du personnel régulier « un autre poste correspondant à ses capacités ». Dans un cas d’application de cette disposition, la chambre de céans a ordonné la réintégration à un poste « correspondant aux capacités professionnelles et aux compétences du recourant » (ATA/569/2008 du 4 novembre 2008 consid. 6).

b. Il y a lieu de constater tout d’abord qu’il ressort du texte clair de l’arrêt du 6 juillet 2021 que la chambre de céans n’a pas ordonné la réintégration de la recourante dans la fonction qu’elle occupait au moment de sa révocation, soit la fonction de RRH 2 colloquée en classe 23. Si elle avait voulu un tel résultat, elle l’aurait dit de façon explicite ou se serait limitée à ordonner la réintégration. Or, la chambre de céans a ordonné la réintégration de la recourante dans un poste correspondant à sa formation et aux années d’expérience acquises au 14 octobre 2020, sans poser aucune exigence d’équivalence. Si elle a imparti à l’intimé de prendre en compte les deux critères de la formation et de l’expérience et a imposé une date pour leur application, c’est parce qu’ils sont déterminants pour établir l’adéquation du profil de la recourante au poste auquel elle doit être affectée.

Il suit de là que les parties devaient comprendre, à la lecture de l’arrêt du 16 juillet 2021, que la réintégration ne portait pas sur le poste RRH 2 qu’elle occupait ni sur un poste équivalent, mais sur un autre poste ou une autre fonction, à déterminer par l’intimé selon les critères impartis.

5) La recourante soutient que la conséquence rattachée ex lege à l’annulation de la révocation ne peut qu’être (« exclusivement ») que l’autorité intimée est tenue de lui fournir le même poste ou un poste équivalent.

Il est douteux que cet argument soit recevable dans la présente procédure. Si la recourante entendait contester que la réintégration pût porter sur un autre poste que celui qu’elle occupait, non équivalent à celui-ci, il lui appartenait de contester l’arrêt du 6 juillet 2021, dont le sens et l’effet du dispositif étaient sur cette question dépourvus d’ambigüité. Or, faute pour elle de l’avoir fait, l’arrêt est devenu définitif et cette modalité du reclassement a acquis la force de chose jugée.

6) À titre superfétatoire, il sera encore observé que l’argument, selon lequel seule l’affectation au poste précédemment occupé ou à une poste équivalent serait admissible, aurait quoi qu’il en soit dû être écarté.

a. La recourante peut certes être suivie lorsqu’elle soutient que la réintégration ne saurait poursuivre, dans ses modalités, de finalités disciplinaires, ni constituer une sanction déguisée ou encore une double peine. La réintégration est en effet la conséquence de l’annulation d’une révocation infondée ou disproportionnée. En cas de révocation infondée, soit lorsque le comportement fautif incriminé par l’État invoqué à l’appui de la sanction n’est finalement pas établi, il paraît logique que le fonctionnaire retrouve son poste ou un poste équivalent, soit le statu quo ante, aucune nouvelle sanction ne devant par ailleurs être prononcée. Lorsque la révocation est disproportionnée, soit lorsque la gravité des fautes établies ne justifie pas une sanction aussi sévère, la même solution s’impose : le fonctionnaire retrouve son poste ou un poste équivalent, et l’État prononce une autre des sanctions prévues à l’art. 16 LPAC, soit, par ordre décroissant, le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans, la réduction de traitement à l'intérieur de la classe, la suspension d'augmentation du traitement pendant une durée déterminée ou le blâme. Ainsi, la réintégration à un autre poste non équivalent ne saurait obéir à des finalités répressives.

b. L’art. 12 LPAC prévoit que l’affectation d’un membre du personnel dépend des besoins de l’administration ou de l’établissement et peut être modifiée en tout temps (al. 1) et qu’un changement d’affectation ne peut entraîner de diminution de salaire (al. 2), sous réserve des cas individuels de changements d’affectation intervenant comme alternative à la résiliation des rapports de service (al. 3).

Dans l’hypothèse où l’adéquation au poste du fonctionnaire révoqué est également problématique, imposer sa réintégration au même poste peut placer ce dernier dans la position délicate de ne pas posséder les aptitudes ou les qualifications requises. De son côté, l’administration dont la décision de révocation a été annulée doit entreprendre une procédure de licenciement et mettre en œuvre le reclassement. Afin d’éviter de telles injonctions contradictoires, la chambre de céans a déjà mitigé une injonction de réintégration par des motifs tenant à la santé (ATA/838/2018 et ATA/348/2019 précités). Dans le cadre d’un licenciement suite à une suppression de poste, la réintégration a été ordonnée à un poste « correspondant aux capacités professionnelles et aux compétences du recourant », conformément à l’art. 23 al. 2 LPAC (ATA/569/2008 précité).

c. En l’espèce, la recourante ne possédait toujours pas, au moment d’être révoquée, les titres exigés pour le poste qu’elle occupait, alors que le délai imparti pour accomplir la formation était échu, ainsi que la chambre de céans l’a constaté dans son arrêt du 6 juillet 2021. C’est cette circonstance que la chambre de céans a prise en compte en ordonnant la réintégration compte tenu de l’expérience et des titres de la recourante à une date donnée.

d. Dans un arrêt récent, la chambre de céans a ordonné la réintégration au même poste d’une conseillère sociale d’un cycle d’orientation licenciée au motif qu’elle n’avait pas rendu son travail de bachelor à la haute école de travail social (ci-après : HETS) et donc obtenu le diplôme nécessaire à la fonction, considérant que celle-ci avait été nommée, avec un code 9, alors que le département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) connaissait sa situation académique. L’échec définitif et l’exmatriculation de la HETS ne pouvaient constituer une disparition de la cause d’engagement. Le DIP ne pouvait invoquer l’égalité de traitement avec les autres fonctionnaires occupant des postes semblables et soumis aux mêmes exigences (ATA/213/2020 précité consid. 6).

Le cas de la recourante est toutefois différent. Elle avait certes été nommée fonctionnaire le 1er novembre 1998, mais sa carrière avait par la suite progressé et sa confirmation au poste d’adjointe administrative RH, a fortiori au poste de RRH 2, était clairement conditionnée à l’obtention du CAS en RH dans un délai déterminé. L’écoulement du temps ne pouvait produire d’effet guérisseur. La chambre de céans a d’ailleurs relevé dans l’arrêt du 6 juillet 2021, au nombre des fautes de la recourante, d’avoir considéré à tort que le seul écoulement du temps lui permettrait d’obtenir la levée du code 9 sans satisfaire à l’exigence de formation.

7) Le principe de la réintégration dans une autre fonction, même non équivalente, étant confirmé, il reste à examiner si celle ordonnée par l’intimé dans la décision querellée est conforme à l’arrêt du 6 juillet 2021.

La recourante se plaint de s’être vu affecter à la fonction de « conseillère en personnel H______ à 100 % - 5.09.014/9E », colloquée en classe 16, soit, compte tenu du code 9E, en classe 15 annuité 5.

L’intimé expose que le nouveau poste de la recourante correspond à sa formation et à son expérience. Elle est titulaire d’un CFC d’employée de commerce et dispose de nombreuses années d’expérience dans la filière RH. Le poste correspond à ses compétences et lui est bien connu.

Le cahier des charges produit par l’intimé indique que le poste requiert une formation de niveau secondaire supérieur et/ou au moins cinq ans d’expérience professionnelle ainsi que le brevet fédéral de spécialiste en ressources humaines. La recourante ne possède pas encore ce dernier titre, mais l’intimé s’engage à financer la formation conduisant à son obtention.

La recourante ne soutient pas qu’elle ne posséderait pas les autres compétences ni l’expérience requises. Elle ne conteste pas le calcul des annuités, qui tient compte de l’expérience acquise dès son stage à l’B______ en 1995. Elle ne désigne pas d’autres postes – que celui qu’elle occupait auparavant – qui seraient pourvus d’une classe de traitement supérieure et lui seraient accessibles compte tenu de sa formation et son expérience.

Force est de constater que le poste choisi correspond à la formation et à l’expérience de la recourante.

8) La recourante fait grief à l’intimé de lui imposer un traitement inférieur de sept classes et une diminution de CHF 4'211.70 brut de son revenu mensuel brut, faisant passer celui-ci de CHF 11'303.80 à CHF 7'082.10, ce qui serait choquant. L’affectation à un poste pour lequel elle avait recruté dans ses précédentes fonctions serait humiliant. L’argument de rupture du lien de confiance invoqué par l’intimé confirmerait la nature de sanction déguisée du reclassement.

Il a été relevé plus haut que la réintégration à la suite de l’annulation d’une révocation jugée disproportionnée ne doit avoir ni l’objectif ni la nature d’une sanction.

L’intimé a prononcé séparément, à titre de nouvelle sanction, le retour de la recourante au statut d’employée en période probatoire pour une durée de deux ans – laquelle n’est pas l’objet du présent litige.

S’agissant de la rupture du lien de confiance qu’il invoque, l’intimé n’explique pas ce qui distinguerait la confiance qu’il doit pouvoir placer dans une RRH 2 de celle qu’il doit et pense pouvoir témoigner à une conseillère en personnel H______. Cet argument est quoi qu’il en soit sans pertinence, seules la formation et l’expérience de la recourante au jour de sa révocation devant, d’après l’arrêt du 6 juillet 2021, déterminer sa réaffectation. Dépourvu de toute portée, l’argument avancé par l’intimé ne peut produire d’effet stigmatisant.

Il n’est pas douteux que la réaffectation à une fonction inférieure constitue une régression sensible dans la carrière de la recourante. Celle-ci ne doit toutefois pas perdre de vue que la position qu’elle occupait au moment de sa révocation était provisoire et avait été acquise au prix d’engagements répétés de sa part de se former, qu’elle n’a pas tenus et auxquels elle a même tenté de se soustraire, ainsi que l’a retenu la chambre de céans dans son arrêt du 6 juillet 2021.

Faute pour la recourante d’avoir accompli la formation nécessaire au poste, l’intimé était fondé à considérer qu’elle ne remplissait plus les conditions pour occuper la fonction de RRH 2. À cet égard, la recourante ne saurait se prévaloir de ce qu’elle aurait assumé sa fonction à la pleine satisfaction de son employeur, ni que ce dernier aurait implicitement accepté qu’elle l’occupe sans diplômes ou aurait ratifié de quelque autre manière la situation. L’obtention des titres constituait précisément une condition de la satisfaction de l’employeur et du maintien au poste de la fonctionnaire. L’intimé a poursuivi l’exécution de l’accord de promotion et de formation et sa bonne foi ne peut être mise en cause.

Soutenir le contraire permettrait à tout fonctionnaire n’ayant pas tenu ses engagements de formation de conserver durablement le poste, ce qui poserait des problèmes d’égalité de traitement et serait susceptible de compromettre la politique de promotion des carrières conduite par l’État. Ainsi, si difficile à assumer pour la recourante que puisse être sa réaffectation, celle-ci, fondée, ne peut avoir vocation à l’humilier et ne peut constituer une sanction déguisée.

La diminution du traitement n’est quant à elle que la conséquence de la réaffectation de la recourante, dont il a été établi qu’elle était fondée. Elle est conforme à l’art. 12 al. 3 LPAC. Pour pénible qu’elle puisse être pour la recourante, elle ne revêt pas le caractère d’une sanction. Il sera encore observé que la diminution d’un peu plus d’un tiers du traitement de la recourante pourra être atténuée par la levée du code 9 une fois obtenu le brevet RH et que des perspectives de progression dans la carrière ont en outre été mises en avant par l’intimé.

La réaffectation ne peut ainsi être vue comme une sanction déguisée, ni comme une seconde sanction pour les mêmes agissements.

Il suit de là que la réaffectation de la recourante telle que décidée le 22 décembre 2021 est conforme au droit et que les griefs de violation de l’art. 31 LPAC, de violation du principe de l’autorité de l’arrêt de renvoi et de déni de justice, de violation du principe de légalité et de l’interdiction des sanctions déguisées, de violation du principe ne bis in idem, de violation de l’art. 12 LPAC, de violation du principe de la bonne foi, de l’absence d’invalidation pour erreur ou tromperie et d’arbitraire seront écartés.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du recours, les nouvelles conclusions en restitution de l’effet suspensif deviennent sans objet.

9) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 janvier 2022 par Mme A______ contre la décision du département de l’économie et de l’emploi du 22 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de procédure de CHF 1'500.- à la charge de Mme A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de l'économie et de l'emploi.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme McGregor, M. Mascotto, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :