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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4004/2014

ATA/373/2015 du 21.04.2015 ( LOGMT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : BAIL À LOYER ; BASE DE CALCUL ; LOCATAIRE ; LOGEMENT ; LOGEMENT SOCIAL ; VIOLATION DE L'OBLIGATION D'ANNONCER ; REVENU DÉTERMINANT ; RÉTROACTIVITÉ
Normes : LGL.16.al1.letb ; LGL.30ss ; RGL.9 ; aLRD.4 ; aLRD.5 ; aLRD.6 ; aLRD.7 ; aLRD.8 ; aLRD.15 ; aRRD.4B
Résumé : Décision de surtaxe HLM avec effet rétroactif en raison de l'augmentation, dès l'année 2010, des revenus des recourants. Le locataire qui ne renseigne pas en temps utile l'OCLPF s'expose au paiement d'une surtaxe rétroactive basée sur les revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes. A compter du 1er avril 2013, le revenu déterminant pour calculer une éventuelle surtaxe due est constitué par celui du titulaire du bail, additionné à ceux des autres personnes occupant le logement diminués des déductions forfaitaires légales exhaustivement prévues par l'art. 5 LRDU. Une décision de l'OCLPF qui se fonde sur l'application automatique du coefficient unique de 0.91 % du revenu brut n'a pas de base légale et doit être annulée.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4004/2014-LOGMT ATA/373/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 avril 2015

1ère section

 

dans la cause

 


Madame A______ et Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE



EN FAIT

1) Selon contrat de bail du 15 mai 2009, Monsieur A______ et Madame A______ (ci-après : les époux A______) sont locataires, depuis le 1er juillet 2009, d'un logement de six pièces au rez-de-chaussée de l'immeuble sis chemin B______ à Versoix. Cet immeuble est soumis au régime des habitations à loyer modéré (ci-après: HLM) et le loyer annuel de l'appartement est de CHF 18'528.-, charges non comprises.

Ledit objet est occupé par les époux A______et leurs quatre enfants, C______, née en 1993, D______, née en 2005, E______, née en 2007 et F______, né en 2010.

2) À compter du 1er juillet 2010, le revenu brut de l'ensemble des personnes occupant le logement est passé de CHF 99'244.- à CHF 126'096.-.

3) Par décision du 3 novembre 2010, l’office du logement, devenu depuis lors l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : l’office ou l’OCLPF) a supprimé, à compter du 1er août 2010, l'allocation de logement dont bénéficiaient les époux A______, eu égard à la nouvelle situation financière de la famille.

Les intéressés n'ont pas réagi à cette décision.

4) En date du 30 août 2011, l'OCLPF a notifié aux époux A______ un avis de situation pour l'année 2011. Le revenu annuel brut des personnes habitant dans le logement était de CHF 126'096.- et, compte tenu des déductions forfaitaires de CHF 37'500.-, le revenu déterminant s'élevait à CHF 88'596.-. Le barème d'entrée de l'appartement en question s'élevait à CHF 115'800.- et celui de sortie à CHF 202'650.-. Le taux d'effort réglementaire était de 16 %. L'attention des locataires était expressément attirée sur leur devoir d’aviser l’OCLPF si les données les concernant étaient inexactes ou incomplètes, notamment quant à leurs revenus actuels. Ils étaient également tenus de signaler, en tout temps, toute modification de situation, tant dans la composition du groupe de personnes occupant le logement que dans leurs revenus. À défaut, ils risquaient de devoir restituer des prestations indûment touchées et/ou de devoir verser des surtaxes pour des périodes antérieures.

Cet avis est resté sans suite.

5) Les 24 août 2012, 17 septembre 2013 et 27 août 2014, l'OCLPF a notifié aux époux A______ des avis de situation identiques pour les années 2012, 2013 et 2014, soit basés sur un revenu annuel brut des personnes habitant le logement de CHF 126'096.-. À nouveau, les intéressés ont été rendus attentifs à leur obligation de signaler, en tout temps, toute modification de situation, tant dans la composition du groupe de personnes occupant le logement que dans leurs revenus.

Ces avis sont tous restés sans suite.

6) Par décision du 7 novembre 2014, l'OCLPF a astreint les époux A______ à une surtaxe rétroactive de CHF 15'713.90 pour la période du 1er février 2011 au 31 janvier 2014. Les époux A______ avaient manqué à leur devoir de communiquer en temps utile les modifications de leur situation intervenues en 2011, 2012 et 2013. L'OCLPF s'est donc basé sur les avis de taxation ICC émis par l'administration fiscale cantonale pour les années 2011, 2012 et 2013, concernant toutes les personnes occupant le logement.

Selon lesdits avis de taxation ICC, le revenu annuel brut des personnes occupant le logement s'est élevé :

-          en 2011, à CHF 164'888.-, soit :

-          CHF 152'357.- pour les époux A______ (soit CHF 154'054.- sous déduction des allocations de logement de CHF 1'697.-) ;

-          CHF 12'531.- pour leur fille majeure ;

-          en 2012, à CHF 198'452.-, soit :

-          CHF 165'591.- pour les époux A______ ;

-          CHF 32'681.- pour leur fille majeure ;

-          en 2013, à CHF 194'822.-, soit :

-          CHF 171'804.- pour les époux A______ ;

-          CHF 23'018.- pour leur fille majeure.

7) Les surtaxes dues étaient les suivantes:

-          CHF 154.50 par mois pour la période du 1er février 2011 au 31 janvier 2012 ;

-          CHF 602.05 par mois pour la période du 1er février 2012 au 31 janvier 2013 ;

-          CHF 553.65 par mois pour la période du 1er février au 31 mars 2013 ;

-          CHF 552.80 par mois pour la période du 1er avril 2013 au 31 janvier 2014.

8) Le 7 novembre 2014, l'OCLPF a notifié aux époux A______ une deuxième décision, les astreignant au paiement d'une surtaxe mensuelle de CHF 552.80 pour la période d'application du 1er avril 2014 au 31 mars 2015, et portant effet au 1er décembre 2014.

9) En date du 13 novembre 2014, les époux A______ ont formé réclamation à l'encontre des décisions du 7 novembre 2014.

Mme A______et leur fille avaient effectivement travaillé, mais pas durant les dates mentionnées. Ils joignaient à leur réclamation divers documents attestant de la situation professionnelle et des revenus de Mme A______et de leur fille entre 2011 et 2014. Ils ne contestaient pas les revenus retenus par l'administration fiscale cantonale dans les avis de taxation relatifs aux années 2011 à 2013.

10) Par décision sur réclamation du 28 novembre 2014, l'OCLPF a rejeté la réclamation des époux A______.

Les locataires n’avaient pas respecté leur devoir d’information. L'OCLPF était dans ces circonstances autorisé à tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes. La première décision du 7 novembre 2014 devait donc être confirmée.

S'agissant de la surtaxe mensuelle applicable à compter du 1er décembre 2014, le courrier des époux A______ du 13 novembre 2014 et les pièces annexes avaient été transmises au service locataires à des fins de mise à jour de leur dossier.

11) Par acte du 23 décembre 2014, les époux A______ ont formé recours à l'encontre de la décision sur réclamation de l’OCLPF auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Ils avaient dérogé à leur obligation d'informer le service compétent de toute modification de revenus pour l'ensemble des personnes habitant le logement. Les calculs effectués à compter du 1er février 2013 ne prenaient pas en considération les fluctuations de salaire ayant eu lieu en 2013 et 2014 pour Mme A______ et pour leur fille majeure. Leur dossier devait être revu depuis 2013.

12) Dans sa détermination du 4 février 2015, l'OCLPF a conclu au rejet du recours. La surtaxe réclamée avait été calculée conformément à la législation applicable. Quant à la surtaxe applicable du 1er décembre 2014 au 31 mars 2015, elle faisait actuellement l'objet d'un réexamen par le service compétent, qui avait requis des intéressés des pièces supplémentaires en vue de statuer.

13) Le 6 février 2015, le juge délégué a transmis aux recourants la détermination de l’OCLPF et a accordé aux parties un délai au 6 mars 2015 pour exercer leur droit à la réplique.

14) Par courrier du 12 février 2015, les recourants ont transmis à la chambre administrative des certificats de salaire pour 2014, en vue de compléter le dossier.

15) En date du 16 février 2015, la chambre administrative a informé les parties que la cause avait été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 14 al. 2 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 - RGL - I 4 05.01).

2. Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant.

Le fait que les conclusions ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas, en soi, un motif d’irrecevabilité, pourvu que l’autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/427/2014 du 12 juin 2014 ; ATA/350/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/818/2013 du 18 décembre 2013 ; ATA/844/2012 du 18 décembre 2012 ; ATA/681/2010 du 5 octobre 2010). Une requête en annulation d’une décision doit, par exemple, être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/827/2014 du 28 octobre 2014 ; ATA/488/2014 du 24 juin 2014 ; ATA/427/2014 précité ; ATA/350/2014 précité ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 624 n. 5.3.1.2).

En l’espèce, les recourants, qui ne sont pas assistés d'un avocat, demandent à la chambre administrative de « revoir leur dossier » depuis 2013. Leur désaccord avec la décision sur réclamation de l’OCLPF ressort de leur acte de recours qui dénonce des calculs prétendument erronés à partir du 1er février 2013. Ils souhaitent dès lors que la décision attaquée ne déploie aucun effet à compter de cette date. Le recours remplit par conséquent les conditions de forme de l’art. 65 al. 1 LPA et doit être déclaré également recevable de ce point de vue.

3. Conformément à l’art. 69 al. 1 LPA, la chambre de céans est liée par les conclusions des parties. Elle n’est en revanche pas liée par les motifs que celles-ci invoquent.

4. Le litige porte sur la surtaxe rétroactive due pour la période du 1er février 2013 au 31 janvier 2014. Les recourants ne contestent pas les montants retenus pour les périodes antérieures, et s'agissant de la période allant du 1er décembre 2014 au 31 mars 2015, elle fait l'objet d'un réexamen par le service compétent.

5. a. Les logements appartenant à une catégorie subventionnée par l'État, tel un logement HLM (art. 16 al. 1 let. b de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 - LGL - I 4 05), sont destinés aux personnes dont les revenus n'excèdent pas les montants fixés dans les barèmes d'entrée, respectivement de sortie, définis par la LGL (art. 30 al. 1 LGL).

Le barème d'entrée s'obtient en divisant le loyer effectif du logement par le taux d'effort du locataire (art. 30 al. 2 LGL). Le taux d'effort varie en fonction du nombre d'occupants du logement (art. 30 al. 3 LGL). Jusqu'au 31 mars 2013, le taux d'effort était de 16 % pour une occupation supérieure à une pièce de plus que le nombre de personnes (art. 30 al. 3 let. b aLGL). À compter du 1er avril 2013, il est de 18 % pour une occupation supérieure à une pièce de plus que le nombre de personnes (art. 30 al. 3 let. b LGL). Le barème de sortie correspond au barème d'entrée multiplié par 1,75 (art. 30 al. 5 LGL).

b. Dès que le revenu du locataire dépasse le barème d'entrée, ce dernier est astreint au paiement d'une surtaxe (art. 31 al. 1 LGL). Celle-ci correspond à la différence entre le loyer théorique et le loyer effectif du logement et la surtaxe, ajoutée au loyer, ne peut en aucun cas entraîner des taux d'effort supérieurs à ceux visés par l'art. 30 LGL (art. 31 al. 2 LGL).

La surtaxe a été définie comme la restitution partielle d’un avantage concédé par l’État de la part des bénéficiaires qui n’y ont plus entièrement droit ou, à la limite, comme une pénalité envers ceux qui habitent un logement subventionné alors qu’ils ne devraient pas en bénéficier (Mémorial des séances du Grand Conseil 1974, p. 2115). Elle se distingue de l’impôt dans la mesure où celui-ci se définit, au sens strict du terme, comme une contribution unilatérale qui n’est pas liée spécialement à une contrepartie et qui représente une contribution aux tâches générales incombant à l’Etat dans l’intérêt de la collectivité (ATF 95 I 506 ; RDAF 1979 p. 204-205).

La surtaxe est une contribution causale, indépendante des coûts, dans la mesure où elle n’est pas fixée en fonction d’une dépense particulière et que son montant dépend de l’estimation de l’avantage économique du bénéficiaire (ATA/829/2010 du 23 novembre 2010 ; ATA/265/2010 du 20 avril 2010 ; ATA/408/2006 du 26 juillet 2006 ; ATA/24/2005 du 18 janvier 2005).

6. a. L'art. 31C al. 1 let. a LGL définit la notion de revenu. Cette disposition a été modifiée à compter du 1er avril 2013.

Dans sa teneur jusqu'au 31 mars 2013, l'art. 31C al. 1 let. a aLGL définit le revenu comme l'ensemble des ressources au sens des art. 17 et ss de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), du titulaire du bail, additionnées à celles des autres personnes occupant le logement dont à déduire une somme de CHF 10'000.- pour la première personne, de CHF 7'500.- pour la deuxième personne et de CHF 5'000.- par personne, dès la troisième personne occupant le logement.

À compter du 1er avril 2013, le revenu se définit comme le revenu déterminant résultant de la loi sur le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales du 19 mai 2005 (LRD - J 4 06 – dénommée loi sur le revenu déterminant unifié - LRDU - à compter du 6 septembre 2014) du titulaire du bail, additionné à celui des autres personnes occupant le logement, dont à déduire une somme de CHF 10'000.- pour la première personne, de CHF 7'500.- pour la deuxième personne et de CHF 5'000.- par personne dès la troisième personne occupant le logement (art. 31C al. 1 let. a LGL).

b. L'art. 8 LRD, dans sa teneur jusqu'au 5 septembre 2014, précise que le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales est égal au revenu calculé en application des art. 4 LRD (revenus pris en compte), 5 LRD (déductions sur le revenu prises en compte), augmenté d'1/15ème de la fortune calculée en application des art. 6 LRD (fortune prise en compte) et 7 LRD (déductions sur la fortune prises en compte). Le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales comprend l'ensemble des revenus dont le produit de l'activité lucrative dépendante au sens de l'art. 18 LIPP (art. 4 let. a LRD). Pour les locataires, le revenu brut actuel est en principe pris en considération (art. 9 al. 1 RGL).

Les déductions admises sont énumérées exhaustivement à l’art. 5 LRD. Dans sa teneur jusqu'au 5 septembre 2014, ces déductions sont les suivantes: les cotisations versées aux caisses de compensation en vertu de la législation fédérale sur les assurances vieillesse et survivants, invalidité, perte de gain, aux caisses d'assurances contre le chômage, et celles versées en vertu de la législation cantonale en matière de maternité au sens de l'article 31, lettre a, LIPP (let. a); les cotisations pour l'assurance-accidents non professionnels (let. b); les cotisations, à l'exception de tout autre versement, versées en vue d'acquérir des droits dans une institution de prévoyance professionnelle au sens de l'article 31, lettre b, LIPP (let. c) ; les frais professionnels au sens de l'article 29 LIPP, pour les personnes exerçant une activité dépendante (let. d) ; les frais de garde des enfants au sens de l'article 35 LIPP (let. e); la pension alimentaire et les contributions d'entretien pour les enfants versées au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d'entretien versées au partenaire ou ex-partenaire enregistré en cas de suspension de la vie commune ou de dissolution du partenariat enregistré, au sens des articles 8, alinéa 2, et 33 LIPP (let. f) ; et les frais médicaux à charge lorsque leur montant est exceptionnellement et/ou particulièrement élevé (let. g).

c. Faisant usage de la clause de délégation figurant à l’art. 15 LRD, le conseil d’État a édicté le règlement d'exécution de la loi sur le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales du 6 décembre 2006 (aRRD remplacé dès le 6 septembre 2014 par le règlement d’exécution de la loi sur le revenu déterminant unifié du 27 août 2014 - RRDU - J 4 06.01), dont l’art. 4B al. 2, entré en vigueur le 1er avril 2013, prévoyait que le revenu déterminant des personnes soumises à l’impôt au barème ordinaire ainsi que celui des personnes imposées à la source était établi sur la base du revenu calculé en application de l'alinéa 1 (soit établi sur la base du revenu brut actuel), multiplié par le coefficient 0.91.

Dans une jurisprudence récente et confirmée, la chambre de céans a jugé que le Grand Conseil avait édicté à l’art. 5 LRD des règles précises indiquant que l’ensemble des revenus de la personne concernée devaient être pris en compte et énumérant exhaustivement les déductions à faire pour fixer le revenu déterminant. L’art. 4B al. 2 aRRD, en prévoyant pour les prestations aux locataires l’application d’un coefficient unique de 0.91 sur le revenu brut, coefficient qui engloberait l’ensemble des déductions à prendre en compte selon l’art. 5 LRD, était manifestement contraire à la lettre et à l’esprit de cette loi. Il entraînait des inégalités de traitement. La chambre de céans avait tranché qu’une décision fondée sur l’art. 4B al. 2 aRRD était basée sur un texte réglementaire dépassant manifestement le cadre de la délégation législative, et donc dépourvu de base légale (ATA/607/2014 du 29 juillet 2014 et ATA/540/2014 du 17 juillet 2014).

7. Selon l'art. 9 al. 2 RGL, il appartient au locataire d’annoncer sans délai auprès du service compétent toute modification significative de revenu survenant en cours de bail.

À défaut, le service compétent peut tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes (art. 9 al. 3 RGL). Le locataire qui ne renseigne pas en temps utile l'OCLPF s’expose au paiement d’une surtaxe rétroactive dont le principe a été maintes fois confirmé par la jurisprudence constante de la chambre administrative (ATA/49/2006 du 31 janvier 2006 ; ATA/85/2002 du 5 février 2002 et les références citées).

La pratique de l'OCLPF en matière de surtaxe consiste à obtenir par le biais de l'AFC, au début de chaque année, une bande informatique contenant les indications des revenus déclarés l'année précédente. C'est donc sur la base de ces revenus, décalés de deux ans, que l'OCLPF décide de poursuivre, de modifier ou de supprimer les surtaxes antérieures.

8. En l'espèce, les recourants reconnaissent avoir manqué à leur obligation d'informer le service compétent de l'augmentation de revenus du groupe de personnes occupant le logement. Ils ne contestent pas les calculs effectués par l'autorité intimée, mais uniquement le fait qu'ils ne prennent pas en compte les fluctuations de salaires de certaines personnes du ménage.

a. Conformément à l'art. 9 al. 3 RGL, en l'absence d'information reçue des locataires, l'autorité intimée était légitimée à se fonder sur les avis de taxation pertinents, au demeurant incontestés, afin d'établir les revenus de l'ensemble des personnes occupant le logement. L'argument des recourants relatif à la fluctuation de leurs revenus en 2013 ne résiste donc pas à l'examen.

b. Pour la période du 1er février au 31 mars 2013, l'autorité intimée s'est basée, conformément aux art. 31C al. 1 aLGL et 9 al. 1 RGL, sur les revenus annuels bruts retenus par l'administration fiscale cantonale pour l'année 2013, soit CHF 194'822.-. Ces avis de taxation ne sont pas contestés par les recourants. Il convient de déduire de cette somme un montant de CHF 37'500.- (art. 31C al. 1 LGL) afin de définir le revenu déterminant LGL, qui s'élève dès lors à CHF 157'322.-.

Le taux d'effort applicable aux recourants étant de 16 % (art. 30 al. 3 let. b aLGL), le loyer théorique est de CHF 25'171.50. La surtaxe annuelle, correspondant à la différence entre le loyer théorique et le loyer effectif du logement, est donc bien de CHF 6'643.50 (25'171.50 – 18'528).

c. Pour la période du 1er avril 2013 au 31 janvier 2014, l'autorité intimée s'est également basée sur les revenus annuels bruts retenus par l'administration fiscale cantonale pour l'année 2013, soit CHF 194'822.-, dont elle a déduit le montant de CHF 17'534.- par l'application du coefficient de 0.91 prévu par l'art. 4B al. 2 aRRD. Or, cette disposition a été jugée comme étant dépourvue de base légale en tant qu'elle dépassait manifestement le cadre de la délégation législative.

L'autorité intimée soutient que la retenue des montants afférents aux cotisations sociales et aux cotisations de prévoyance professionnelle des époux A______ et de leur fille ne modifierait pas le bienfondé de la décision litigieuse mais augmenterait le montant de la surtaxe due pour la période du 1er avril 2013 au 31 janvier 2014.

À première vue, cette affirmation n’est pas correcte. En l’espèce, la prise en compte du revenu déterminant (conformément aux art. 4 à 8 LRD) pour calculer le montant de la surtaxe due par les recourants, à compter du 1er avril 2013, diminue au contraire le montant de ladite surtaxe.

d. Ce qui précède conduit à l’admission partielle du recours en tant qu'il concerne le calcul du revenu déterminant à l’aide du coefficient de 0.91 pour la période postérieure au 1er avril 2013. La décision litigieuse sera partiellement annulée. La cause sera en conséquence renvoyée à l'OCLPF afin qu'il procède à un nouveau calcul et rende une nouvelle décision conforme à la loi.

9. La procédure étant gratuite en matière de surtaxe HLM, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité ne sera allouée aux recourants qui n’y ont pas conclu et qui n’agissent pas par l’intermédiaire d’un avocat (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 décembre 2014 par Madame et Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l'office cantonal du logement et de la planification foncière du 28 novembre 2014 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision sur réclamation de l'office du logement et de la planification foncière du 28 novembre 2014, en tant qu'elle fixe la surtaxe mensuelle due pour la période du 1er avril 2013 au 31 janvier 2014 à CHF 552.80.- ;

renvoie le dossier à l’office cantonal du logement et de la planification foncière afin que celui-ci procède à de nouveaux calculs et rende une nouvelle décision dans le sens des considérants ;

confirme la décision sur réclamation de l'office du logement et de la planification foncière pour le surplus ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame et Monsieur A______, ainsi qu'à l'office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Thélin, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :