Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3984/2013

ATA/607/2014 du 29.07.2014 ( LOGMT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : LOGEMENT ; LOGEMENT SOCIAL ; LOCATAIRE ; BAIL À LOYER ; OBLIGATION DE RENSEIGNER ; ONU ; MODIFICATION(EN GÉNÉRAL) ; RÉTROACTIVITÉ ; REVENU DÉTERMINANT ; DÉLÉGATION LÉGISLATIVE ; BASE DE CALCUL
Normes : LGL.16; LGL.30ss; RGL.9; RGL.11ss; LRD.4; LRD.5; LRD.6; LRD.7; LRD.8; LRD.15; RRD.4B
Résumé : Admission partielle du recours contre une décision de surtaxe HBM avec effet rétroactif en raison de l'augmentation, dès l'année 2010, des revenus de la recourante. Cette dernière conteste les montants qui lui sont réclamés et les éléments pris en compte dans le calcul de son revenu déterminant. Pour la période antérieure au 1er avril 2013, les frais allégués par la recourante, relatifs aux montants des primes de mobilité, d'assurance accident et de contribution à la caisse de pension, ainsi que les indemnités de poste, ne peuvent être considérés comme des frais directement liés à l'acquisition de son revenu et ne sont, par conséquent, pas déductibles. S'agissant de la période postérieure au 1er avril 2013, l'art. 5 LRD prévoit de manière exhaustive les déductions à prendre en compte pour fixer le revenu déterminant des personnes demandant des prestations sociales. En prévoyant un coefficient unique de 0,91 % du revenu pour déterminer le droit à ces prestations, le nouvel article 4B RRD dépasse le cadre de la délégation législative. La cause est retournée à l'office.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3984/2013-LOGMT ATA/607/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 juillet 2014

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Karin Etter, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE



EN FAIT

1) Madame A______, est locataire depuis le 1er juin 2008 d'un appartement subventionné, en régime HBM, de trois pièces au 5ème étage de l'immeuble sis Boulevard B______ 1______, à Genève, pour un loyer mensuel de CHF 736.-, auquel s'ajoutent CHF 120.- de charges.

2) Le 24 août 2010, l'office du logement, devenu depuis lors l'office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : l'office), a adressé à l'intéressée un avis de situation pour l'année 2010, faisant état d'un revenu annuel brut de CHF 18'450.-. Mme A______ était tenue d'aviser l'office si les données inscrites s'avéraient inexactes ou incomplètes. Elle n'y a pas donné suite.

3) Le 23 février 2011, l'office a demandé à Mme A______ de lui transmettre différents documents attestant la totalité du revenu brut réalisé en 2009. La réception des justificatifs requis a été confirmée par courrier de l'office du 29 avril 2011.

4) Le 30 août 2011, l'office a notifié à Mme A______ un avis de situation pour l'année 2011, sur lequel figurait un revenu annuel brut de CHF 12'849.-, la priant de signaler au service compétent toute modification de situation. Cet avis est également resté sans suite.

5) Le 7 février 2012, l'office a demandé à l'intéressée de lui faire parvenir les pièces attestant la totalité de son revenu brut réalisé en 2010.

6) Le 31 mars 2012, après plusieurs échanges de courriers, Mme A______ a adressé à l'office tous les documents requis. Elle a précisé qu'en qualité de fonctionnaires salariée d'une agence des Nations Unies, elle n'était désormais plus assujettie à l'impôt cantonal.

7) Le 24 août 2012, l'office a adressé à Mme A______ un avis de situation pour l'année 2012, se fondant sur un revenu annuel brut de CHF 12'849.-, soit le même montant que pour l'année 2011.

8) Le 15 janvier 2013, faisant suite à une demande de l'office du 30 octobre 2012, l'intéressée lui a envoyé les pièces justifiant ses revenus pour les années 2010 et 2011.

9) Par décision du 22 août 2013, l'office se fondant sur un revenu annuel brut de CHF 139'099.- pour l'année 2010, CHF 136'668.- pour 2011 et CHF 156'364.- pour 2012, a réclamé à Mme A______ un montant total de CHF 86'998.-, équivalent à des surtaxes pour la période du 1er octobre 2010 au 31 mars 2014. Les avis de notification de surtaxe idoines étaient joints à cette décision.

10) Le 27 septembre 2013, Mme A______ a formé réclamation contre cette décision, par l'intermédiaire de son conseil.

11) Par décision sur réclamation du 6 novembre 2013, l'office a adressé à Mme A______ de nouveaux avis de notification de surtaxe, annulant et remplaçant ceux du 22 août 2013, ainsi qu'un nouveau bulletin de versement pour un montant de CHF 19'470.80, représentant la différence entre la surtaxe rectifiée pour la période du 1er octobre 2010 au 30 novembre 2013 et le paiement par l'intéressée d'un acompte de CHF 21'000.- le 19 septembre 2013.

Le montant total de la surtaxe se décomposait comme suit :

 

Période

Montant mensuel surtaxe CHF

Motif

Du 01.10.2010 au 31.01.2011

1'415.65

revenus 2010

Du 01.02.2011 au 31.03.2011

1'375.15

revenus 2011

Du 01.04.2011 au 30.09.2011

1'375.15

nouvelle période

Du 01.10.2011 au 31.01.2012

2'008.40

fin PA/L/025.05

Du 01.02.2012 au 31.03.2012

2'628.90

revenus 2012

Du 01.04.2012 au 31.07.2012

2'628.90

nouvelle période

 

Dès lors que tous les documents nécessaires à une prise de décision étaient en possession de l'office en date du 6 juin 2012 et conformément à sa pratique administrative (PA/L/037.03), une remise était accordée à l'administrée en raison d'un retard dans le traitement des dossiers. L'office consentait ainsi à annuler les surtaxes dues pour les périodes comprises entre le 1er août 2012 et le 30 novembre 2013.

Néanmoins, Mme A______ n'avait pas observé son devoir d'information à l'égard de l'office en ne donnant pas suite aux avis de situation des 24 août 2010 et 30 août 2011. Il ne pouvait être admis qu'une différence de revenu de plus de CHF 125'000.- ne l'avait pas incité à se manifester, raison pour laquelle une surtaxe rétroactive lui avait été notifiée.

Seuls les revenus retenus pour les périodes comprises entre le 1er octobre 2010 et le 31 juillet 2012 restaient litigieux. En l'occurrence, aucuns frais effectifs ne pouvaient être déduits des revenus bruts de Mme A______, arrêtés à CHF 139'099.- pour l'année 2010, CHF 136'668.- pour 2011 et revus à CHF 165'306.- pour 2012.

Enfin, en dépit du retard de l'office dans le traitement des dossiers, l'intéressée aurait pu chercher un appartement non subventionné plus rapidement si elle avait donné suite à l'avis de situation du 24 août 2010.

12) Le 7 novembre 2013, l'office a adressé à Mme A______ une décision de notification de surtaxe portant sur la période du 1er avril 2013 au 31 mars 2014, pour un montant mensuel de CHF 1'707.80, compte tenu d'un revenu déterminant de CHF 104'734.-.

13) Par acte du 11 décembre 2013, Mme A______ a, sous la plume de son conseil, interjeté recours contre la décision sur réclamation du 6 novembre 2013 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation. Elle concluait également à ce que la chambre de céans reprenne les calculs et fixe le montant des surtaxes à CHF 6'521.80 pour l'année 2010, CHF 7'520.27 pour l'année 2011 et CHF 10'836.27 pour l'année 2012. Elle demandait en outre qu'il soit constaté que seules les surtaxes du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2012 étaient dues, qu'elle ne devait aucune autre surtaxe dès le 1er août 2012 jusqu'à son déménagement effectif, que le montant total dû au titre de rétroactifs de surtaxe s'élevait à CHF 15'471.92 (CHF 1'630.50 du 1er octobre 2010 au 31 décembre 2010 ; CHF 7'520.28 pour 2011 ; CHF 60'321.14 (sic) du 1er janvier au 31 juillet 2012), que les surtaxes mensuelles s'élevaient à CHF 630.65 dès le 1er décembre 2013, et qu'un montant de CHF 5'528.08 plus intérêts devait lui être remboursé compte tenu du paiement qu'elle avait effectué le 19 septembre 2013.

Elle avait bénéficié de revenus plus importants dès l'année 2010, devenant employée du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (ci-après : HCR). Dans ce cadre, elle s'était trouvée durant les années 2010 et 2011 pratiquement en permanence en mission à l'étranger.

La décision de l'office d'annuler les surtaxes pour la période du 1er août 2012 au 30 novembre 2013 en raison de son retard devait être maintenue. Le recours portait ainsi uniquement sur les périodes du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2012 et du 1er décembre 2013 jusqu'à son départ de l'appartement. Le montant des revenus pris en considération pour le calcul de la surtaxe était erroné, dès lors que l'office s'était basé sur le revenu brut comprenant des indemnités de poste. Il n'avait par ailleurs pas déduit les montants des primes d'assurance-accident, ni les contributions à la caisse de pension.

Les indemnités de poste constituaient des suppléments payés aux employés du HCR pour tenir compte des frais supplémentaires inhérents à leur stationnement à l'étranger, calculés chaque année pour chaque lieu de stationnement. Si leur paiement était forfaitaire, leur montant correspondait néanmoins à des charges effectives, raison pour laquelle les indemnités de poste ne devaient pas entrer dans le calcul de la surtaxe. De plus, conformément à la législation en la matière, les montants correspondant aux primes de mobilité, à la contribution à la caisse de pension, ainsi qu'à une partie des primes d'assurance-maladie et accidents devaient être déduits des revenus bruts, pour parvenir au revenu déterminant sur lequel était fondé le calcul de la surtaxe, ce que n'avait pas fait l'office.

Ainsi, selon les calculs de la recourante, son revenu déterminant s'élevait à CHF 86'768.98 pour l'année 2010, CHF 91'761.38 pour 2011, CHF 85'647.23 pour 2012 et, après annualisation, à CHF 75'352.52 pour 2013. La surtaxe pour les années 2010 à 2013 devait être calculée sur la base de ces chiffres.

14) L'office a fait part de ses observations le 16 janvier 2014, concluant au rejet du recours.

La décision attaquée s'avérait conforme à la législation en vigueur et la recourante ne contestait ni le principe de la surtaxe, ni son caractère rétroactif. Compte tenu d'une modification législative, il convenait de distinguer les périodes antérieures au 1er avril 2013 de celles postérieures à cette date. Ainsi, les frais auxquels faisait référence Mme A______, soit les indemnités de poste, la prime de mobilité, les montants des primes de l'assurance-accident et les contributions à la caisse de pension ne pouvaient être déduits de son revenu annuel brut, qu'elle ne contestait pas non plus, aucune base légale ou réglementaire à ce sujet n'étant applicable avant le 1er avril 2013. S'agissant du revenu après cette date, les déductions mentionnées par la recourante étaient déjà prises en compte dans son revenu déterminant et ne pouvaient l'être une seconde fois.

15) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 14 al. 2 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 - RGL - I 4 05.01).

2) L'office réclame à la recourante le paiement d'une surtaxe HBM avec effet rétroactif pour la période du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2012 et dès le 1er décembre 2013, en raison de l’augmentation de ses revenus depuis son engagement par le HCR en 2010.

3) a. Les logements appartenant à une catégorie subventionnée par l'État, tel un logement HBM (art. 16 al. 1 let. a de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 - LGL - I 4 05), sont destinés aux personnes dont les revenus n'excèdent pas les montants fixés dans les barèmes d'entrée, respectivement de sortie, définis par la LGL (art. 30 al. 1 LGL).

b. Le barème d'entrée s'obtient en divisant le loyer effectif du logement par le taux d'effort du locataire (art. 30 al. 2 LGL). Le taux d’effort est le pourcentage minimum du revenu déterminant à consacrer au loyer (art. 31C al. 1 let. d LGL). Il varie en fonction du nombre d'occupants du logement et se situe entre 16 % et 26 % (art. 30 al. 3 aLGL dans sa teneur jusqu'au 1er avril 2013) : il est de 20 % lorsqu'une personne occupe un logement de trois pièces (art. 8 al. 1 aRGL dans sa teneur jusqu'au 1er avril 2013). Depuis le 1er avril 2013, il est de 22 % lorsqu'une personne occupe un logement de trois pièces (art. 8 al. 1 RGL).

4) a. Dès que le revenu du locataire dépasse le barème d'entrée, ce dernier est astreint au paiement d'une surtaxe (art. 31 al. 1 LGL). La surtaxe correspond à la différence entre le loyer théorique et le loyer effectif du logement ; la surtaxe, ajoutée au loyer, ne peut en aucun cas entraîner des taux d'effort supérieurs à ceux visés par l'art. 30 al. 3 LGL (art. 31 al. 2 LGL).

b. La période d'application de la surtaxe s'étend du 1er avril de chaque année au 31 mars de l'année suivante (art. 11 al. 1 RGL). En cas de modification de revenu, le service compétent examine la nouvelle situation du locataire dans un délai de trente jours et fixe le nouveau montant de la surtaxe (art. 11 al. 3 RGL). Lorsqu'un locataire, astreint au paiement d'une surtaxe, quitte son logement, la surtaxe n'est due que pour la période où il a occupé les locaux (art. 12 al. 3 RGL).

c. La surtaxe a été définie comme la restitution partielle d’un avantage concédé par l’État de la part des bénéficiaires qui n’y ont plus entièrement droit ou, à la limite, comme une pénalité envers ceux qui habitent un logement subventionné alors qu’ils ne devraient pas en bénéficier (Mémorial des séances du Grand Conseil 1974, p. 2115). Elle se distingue de l’impôt dans la mesure où celui-ci se définit, au sens strict du terme, comme une contribution unilatérale qui n’est pas liée spécialement à une contrepartie et qui représente une contribution aux tâches générales incombant à l’État dans l’intérêt de la collectivité (ATF 95 I 506 ; ATA/299/2014 du 29 avril 2014 ; ATA/211/2014 du 1er avril 2014 ; ATA/395/2013 du 25 juin 2013 ; RDAF 1979 p. 204-205).

d. La surtaxe est une contribution causale, indépendante des coûts, dans la mesure où elle n’est pas fixée en fonction d’une dépense particulière et que son montant dépend de l’estimation de l’avantage économique du bénéficiaire (ATA/299/2014 précité et les références citées).

e. Dès que le revenu du locataire dépasse le barème de sortie, le taux d'effort est porté à 26 % et le propriétaire de l'immeuble peut être requis par l'office de résilier le bail (art. 31 al. 4 aLGL dans sa teneur jusqu'au 1er avril 2013). Depuis le 1er avril 2013, le taux d'effort a été porté à 28 % (art. 31 al. 4 LGL). Le locataire dont le revenu dépasse le barème de sortie est avisé par le service compétent de ce dépassement et des conséquences qui en découlent (art. 31 al. 6 LGL).

5) a. Il appartient au locataire d’annoncer sans délai auprès du service compétent toute modification significative de revenu survenant en cours de bail (art. 9 al. 2 RGL). À défaut, le service compétent peut tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes (art. 9 al. 3 RGL). Le bénéficiaire de l’allocation doit informer, sans délai, le service compétent de toute modification significative de sa situation ou de celle de l’un des membres du groupe de personnes occupant le logement, propre à changer le montant de l’allocation ou à la supprimer, notamment en cas de début ou cessation d’activité ou de changement dans la composition du groupe de personnes occupant le logement (art. 29 al. 1 RGL).

b. De même, selon l'art. 4B al. 1 2ème phr. du règlement d'exécution de la loi sur le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales du 6 décembre 2006 (RRD - J 4 06.01) en vigueur depuis le 1er avril 2013, il appartient au locataire de justifier sans délai au service compétent toute modification significative de revenu ainsi que tout changement dans la composition du groupe de personnes occupant le logement, survenant en cours de bail. En cours de bail, à défaut d'annonce de modification de situation par le locataire, le service compétent peut tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes.

c. En l'espèce, la recourante est devenue employée du HCR au cours de l'année 2010 et a bénéficié, dans ce contexte, d'une augmentation significative de son revenu annuel, excédant les barèmes applicables en matière de logements HBM, ce dont elle n'a pas informé sans délai, ni spontanément, l'intimé. En effet, elle n'a pas donné suite aux avis de situation qui lui ont été notifiés en août 2010 et 2011. Le fait qu'elle se serait trouvée à l'étranger quasiment en permanence durant ces deux années ne permet pas de justifier ce manquement. Ce n'est qu'au premier trimestre 2012 qu'elle communiqué les pièces attestant sa situation financière, sur demande de l'office.

6) La recourante conteste les montants qui lui sont réclamés, qu'elle estime erronés, compte tenu du fait que l'intimé a pris en considération dans ses calculs le revenu brut, contenant des indemnités de poste, sans déduire les montants des primes de mobilité et d'assurance-accident, ni les contributions à la caisse de pension.

7) a. Par revenu au sens de l'art. 30 al. 1 LGL, il faut entendre le revenu déterminant, c'est-à-dire l'ensemble des ressources, au sens des art. 17 ss de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), du titulaire du bail, additionnées à celles des autres personnes occupant le logement, dont à déduire une somme de CHF 10'000.- pour la première personne, de CHF 7'500.- pour la deuxième personne et de CHF 5'000.- par personne dès la troisième personne occupant le logement (art. 31C al. 1 let. a aLGL dans sa teneur jusqu'au 1er avril 2013, date de sa modification).

Depuis le 1er avril 2013, on entend le revenu déterminant du titulaire du bail comme celui résultant de la loi sur le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales du 19 mai 2005 (LRD - J 4 06), additionné à celui des autres personnes occupant le logement, dont à déduire une somme de CHF 10'000.- pour la première personne, de CHF 7'500.- pour la deuxième personne et de CHF 5'000.- par personne dès la troisième personne occupant le logement (art. 31C al. 1 let. a LGL).

L'art. 31C al. 1 let. a aLGL et l'art. 31C al. 1 let. a LGL sont complétés par l'art. 9 al. 1 RGL, qui n'a pas subi de modification et qui dispose que le revenu brut actuel est en principe pris en considération pour le calcul du revenu déterminant.

b. Selon l'art. 17 LIPP, l'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus, prestations et avantages du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques, en espèces ou en nature et quelle qu'en soit l'origine, avant déductions. Sont imposables tous les revenus provenant d'une activité exercée dans le cadre d'un rapport de travail, qu'elle soit régie par le droit privé ou par le droit public, y compris les revenus accessoires, tels que les indemnités pour prestations spéciales, les commissions, les allocations, les primes pour ancienneté de service, les gratifications, les pourboires, les tantièmes et les autres avantages appréciables en argent (art. 18 al. 1 LIPP). L'art. 28 LIPP définit le revenu net, lequel se calcule en défalquant du total des revenus imposables les déductions générales et les frais mentionnés aux art. 29 à 37 LIPP.

c. Cela étant, la LGL dans sa teneur antérieure au 1er avril 2013 ne prévoit pour sa part aucune déduction au revenu déterminant. La jurisprudence du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative, a assoupli cette rigueur en admettant que les frais directement liés à l’acquisition du revenu, tels que les intérêts hypothécaires, pouvaient être déduits à concurrence du revenu en cause, car ils étaient étroitement et directement liés à l’acquisition de ce revenu d’une manière telle qu’ils constituaient une dépense indispensable à son obtention (ATA/425/2007 du 28 août 2007 ; ATA S. du 22 juin 1993 in RDAF 1993 p. 338 et ss). Ultérieurement, le Tribunal administratif a précisé qu’afin de s’en tenir le plus possible à la volonté du législateur, la notion de frais liés à l’acquisition du revenu devait s’interpréter dans le cadre de la LGL de manière très restrictive. Ainsi, s’agissant notamment de frais de représentation et de déplacement, ils contribuaient à créer de meilleures conditions pour l’acquisition du revenu, mais n’en étaient pas une condition sine qua non (ATA Q. du 15 février 1994). Cette jurisprudence a par la suite été confirmée à plusieurs reprises (cf. notamment ATA/299/2014 précité ; ATA/367/2001 du 29 mai 2001 et les jurisprudences citées).

d. En l'espèce, les frais allégués par la recourante, relatifs aux montants des primes de mobilité, d'assurance-accident et de contributions à la caisse de pensions ne peuvent être qualifiés de directement liés à l'acquisition du revenu ; ils ne sont ainsi pas déductibles du revenu déterminant au sens de l'art. 31C al. 1 let. a aLGL.

S'agissant des indemnités de postes que perçoit la recourante en sus de son revenu, celles-ci sont définies comme un complément au traitement de base par un ajustement variant en fonction du coût de la vie dans le lieu d'affectation et du taux de change du dollar des États-Unis. L'ajustement de poste, fixé par l'ONU sous forme de pourcentage du traitement de base, garantit que tous les fonctionnaires au même niveau de traitement ont un pouvoir d'achat analogue dans tous les lieux d'affectation en compensant les différences en matière de coût de la vie, tout en tenant compte des fluctuations monétaires (https://careers.un.org/lbw/home.aspx?viewtype=sal&lang=fr-FR, consulté le 08.07.2014).

Par conséquent, conformément à la loi et la jurisprudence précitées, ces indemnités de postes font partie intégrante du revenu et ne peuvent être considérées comme des frais directement liés à l'acquisition de celui-ci susceptibles d'être déduits du revenu déterminant sur lequel se fonde le calcul de la surtaxe.

Dès lors, c'est à juste titre que l'office n'a pas pris en compte les différentes charges alléguées par la recourante pour chiffrer son revenu déterminant et fixer la surtaxe due pour la période antérieure au 1er avril 2013.

8) a. Pour la période postérieure au 1er avril 2013, l'art. 8 LRD précise que le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales est égal au revenu calculé en application des art. 4 LRD (revenus pris en compte), 5 LRD (déductions sur le revenu prises en compte), augmenté d'1/15ème de la fortune calculée en application des art. 6 LRD (fortune prise en compte) et 7 LRD (déductions sur la fortune prises en compte).

b. Le revenu déterminant le droit aux prestations sociales cantonales comprend l'ensemble des revenus dont le produit de l'activité lucrative dépendante au sens de l'art. 18 LIPP (art. 4 let. a LRD). Pour les locataires, le revenu brut actuel est en principe pris en considération (art. 9 al. 1 RGL). Les déductions admises sont énumérées exhaustivement à l’art. 5 LRD.

c. Faisant usage de la clause de délégation figurant à l’art. 15 LRD, le conseil d’État a édicté le RRD, dont l’art. 4B, entré en vigueur le 1er avril 2013 et intitulé « période de référence et calcul du revenu déterminant pour les prestations aux locataires », a la teneur suivante :

« 1. Pour les prestations aux locataires, notamment celles octroyées en application de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, le revenu déterminant est établi sur la base du revenu brut actuel, qui est en principe pris en considération, en dérogation à l'art. 2. Il appartient au locataire de justifier sans délai au service compétent toute modification significative de revenu ainsi que tout changement dans la composition du groupe de personnes occupant le logement, survenant en cours de bail. En cours de bail, à défaut d'annonce de modification de situation par le locataire, le service compétent peut tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes.

2. Le revenu déterminant des personnes soumises à l’impôt au barème ordinaire ainsi que celui des personnes imposées à la source est établi sur la base du revenu calculé en application de l'alinéa 1, multiplié par le coefficient 0,91. »

9) a. La Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (aCst-GE - A 2 00) consacre le principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif incombe au Grand Conseil (art. 70 Cst-GE). Le Conseil d’État genevois, en tant qu’autorité exécutive, est chargé de l’exécution des lois et prend à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 101 Cst-GE). Il ne peut donc disposer praeter legem. A moins d’une délégation expresse, il ne peut pas poser des règles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations non prévues par la loi (ATF 114 Ia 288 ; ATA/540/2014 du 17 juillet 2014 ; ATA/63/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/587/2000 du 26 septembre 2000 ; Bernard KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle 1991, n. 322, 353 ; Pierre MOOR, Droit administratif, Berne 1991, n. 3.3.3.1-3). Seule la clause générale de police peut justifier une entorse à ce principe, mais il faut que l’ordre public soit menacé de manière grave, directe, imminente, sans qu’aucune autre mesure légale ne puisse être prise ou aucune norme adoptée en temps utile (Pierre MOOR, op cit. n. 4.2.2.9, p. 337). Les principes précités découlent également de la nouvelle Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00), entrée en vigueur le 1er juin 2013 (art. 2 al. 2, 80 et 101 Cst-GE).

b. Les ordonnances administratives ne peuvent contenir que des normes mineures, d’ordre procédural, administratif ou technique (Pierre MOOR, op cit. n. 3.3.5.2). Elles ne sont contraignantes que pour les membres de l’administration, qui, en raison de leurs rapports de service, sont soumis à une relation de puissance spéciale avec les organes hiérarchiques supérieurs (Pierre-Louis MANFRINI, Nature et effets juridiques des ordonnances administratives, Genève 1978, p. 43). N’ayant pas force de loi, elles ne peuvent créer de règles de droit ou contraindre les particuliers à adopter un certain comportement (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/ Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Vol. 2, 2ème éd., Berne 2006, p. 563 n. 1601 ss). La notion de règle de droit est définie à l’art. 22 al. 4 de la loi sur l’Assemblée Fédérale du 13 décembre 2002 (loi sur le Parlement - LParl – RS 171.10). Sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d’application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences (22 al. 4 LParl).

c. Les ordonnances législatives d’exécution sont le complément d’une loi au sens formel. Elles sont des règles obligatoires, unilatérales, générales et abstraites permettant d’exécuter une loi formelle qui n’est pas directement applicable. Elles ne peuvent énoncer que des règles secondaires (ATF 104 Ib 209). En matière d’administration de prestations, il appartient au législateur de définir les lignes fondamentales des prestations publiques à fournir (ATF 128 I 113 consid. 3b p. 121 ; ATA/540/2014 du 17 juillet 2014 ; ATA/452/2012 du 30 juillet 2012).

10) En l’espèce, le Grand conseil a édicté, dans la LRD, des règles précises indiquant que l’ensemble des revenus de la personne concernée devaient être pris en compte et énumérant exhaustivement les déductions à faire pour fixer le revenu déterminant. L’art. 4B RRD, en prévoyant pour les prestations aux locataires l’application d’un coefficient unique sur le revenu brut, coefficient qui engloberait l’ensemble des déductions à prendre en compte selon l’art. 5 LRD, est manifestement contraire à la lettre et à l’esprit de cette loi. Il est susceptible d'entraîner des inégalités de traitement crasses, notamment dans le cas de la recourante qui allègue des frais relatifs aux montants des primes de mobilité, d'assurance-accident, de contributions à la caisse de pensions et d'indemnités de poste (ATA/540/2014 du 17 juillet 2014).

Ainsi, force est de constater que la décision litigieuse est en partie fondée sur un texte réglementaire dépassant manifestement le cadre de la délégation législative, et donc dépourvu de base légale.

11) Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis en tant qu'il concerne les calculs relatifs aux revenus de la recourante destinés à fixer la surtaxe due pour la période postérieure au 1er avril 2013, en particulier s'agissant des éventuelles déductions à prendre en compte au sens de l'art. 5 LRD. La cause sera en conséquence renvoyée à l'office afin qu'il procède à de nouveaux calculs et rende une nouvelle décision au sens des présents considérants.

12) L'art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) prévoit que la procédure est gratuite en matière de surtaxe HLM mais est muet s'agissant d'une surtaxe HBM.

Les appartements HLM étant destinés à des personnes à revenu modeste et les appartements HBM à des personnes à revenu très modeste, il serait contraire à la ratio legis de l'article précité de mettre à la charge des recourants locataires d'appartements HBM un émolument pour une contestation de surtaxe, ce d'autant plus que dans une jurisprudence de la chambre de céans (ATA/606/2011 du 27 septembre 2011 consid. 4), aucun émolument n'avait été mis à la charge de recourants locataires d'un appartement HBM qui avaient contesté une décision de surtaxe (ATA/299/2014 du 29 avril 2014 consid. 9).

La recourante ne sera dès lors pas astreinte au paiement d'un émolument. Aucune indemnité ne lui sera allouée, dans la mesure où elle n'y a pas conclu (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 décembre 2013 par Madame A______ contre la décision sur réclamation de l'office du logement du 6 novembre 2013 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

retourne la cause à l'office du logement et de la planification foncière afin que celui-ci procède à de nouveaux calculs et rende une nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Karin Etter, avocate de la recourante ainsi qu'à l'office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :