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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/3768/2015

ACST/20/2015 du 04.11.2015 ( ELEVOT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3768/2015-ELEVOT ACST/20/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 4 novembre 2015

 

dans la cause

 

 

Monsieur A______

contre

CONSEIL D'ÉTAT

 



EN FAIT

1) a. Par arrêtés du 25 février 2015, publiés dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 27 février 2015, le Conseil d’État a fixé au 3 août 2015 à 12h l’échéance du délai pour le dépôt des listes de candidats pour l’élection au Conseil national et au Conseil des États du 18 octobre 2015.

b. Un avis de la chancellerie d’État a été publié dans la FAO du 24 avril 2015 concernant le dépôt des candidatures pour chacune de ces élections. L’échéance du 3 août 2015 à midi pour le dépôt des candidatures y était rappelée, de même que la possibilité d’obtenir les formules spéciales pour le dépôt des candidatures dès le 29 avril 2015, auprès du service des votations et élections (ci-après : SVE), avec un guide fixant les modalités et les conditions pour le dépôt d’une liste de candidatures (par ailleurs téléchargeable sur internet).

2) Le 3 août 2015 à 11h38, Monsieur A______, citoyen suisse domicilié dans le canton de Genève, a remis au SVE deux dossiers de candidature, l’un pour le Conseil national et l’autre pour le Conseil des États, sous le nom de liste B______, dont il était le seul candidat pour les deux élections considérées. Les deux dossiers ne contenaient aucune signature de soutien de liste.

3) Le SVE a aussitôt refusé ces deux dossiers, par une mention manuscrite « liste refusée » apposée en bas à gauche du formulaire, à côté du timbre humide et de la signature du chef de service du SVE. Le nombre de signatures déposées était de zéro.

4) Le 8 août 2015, M. A______ a interjeté recours contre le refus précité auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle), sans prendre de conclusions formelles.

Le 21 août 2015, M. A______ a demandé à la chambre constitutionnelle notamment de revoir à la baisse, même de supprimer le nombre de signatures requises à l’appui d’une candidature, et d’accepter sa liste.

5) Par arrêt du 8 septembre 2015 (ACST/18/2015), la chambre constitutionnelle a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours de M. A______ en tant qu’il concernait l’élection au Conseil des États et a renvoyé la cause au Conseil d’État concernant l’élection au Conseil national.

Les conclusions formulées au-delà du délai de recours étaient irrecevables. Il s’agissait donc de n’examiner que si – selon les conclusions se déduisant de l’acte de recours – le refus de la liste du recourant devait être annulé et si un délai supplémentaire devait être accordé à ce dernier pour présenter les signatures de parrainage de sa liste.

L’élection de la députation genevoise au Conseil des États avait lieu en même temps que celle du Conseil national, pour un mandat de quatre ans, selon les modalités d’élection du Conseil d’État (art. 52 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00). Les conditions pour le dépôt des listes au Conseil national s’appliquaient par analogie au dépôt des listes pour le Conseil des États (art. 25 al. 2 de la loi sur l’exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 - LEDP - A 5 05). Toute liste de candidats devait porter la signature manuscrite d’un nombre minimum d’électeurs dont le domicile politique se trouvait dans l’arrondissement, à savoir 200 dans les cantons qui, comme celui de Genève, disposaient de 11 à 20 sièges au Conseil national (art. 24 al. 1 de la loi fédérale sur les droits politiques du 17 décembre 1976 - LDP - RS 161.1). L’obligation ainsi posée de présenter un certain nombre de parrainages pour les listes de candidats n’était pas contraire à la garantie des droits politiques (art. 34 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101  ; art. 44 al. 1 Cst-GE) ; elle était proportionnée au but visé de prévenir le dépôt de listes « à la légère ou par plaisanterie » et « les abus et les excès découlant des facilités de participation aux élections ». Accompagnée d’aucune signature, la liste déposée par le recourant pour l’élection au Conseil des États avait été refusée à bon droit par le SVE.

Le recourant ne pouvait se prévaloir ni d’un cas de force majeure ni d’un empêchement non fautif de sa part de n’avoir pas déposé au SVE de liste de candidature accompagnée des signatures de parrainage requises. Une prolongation ou une restitution du délai de dépôt des candidatures ne pouvaient lui être accordées.

6) Par arrêté du 23 septembre 2015, le Conseil d’État a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours de M. A______ relatif à l’élection au Conseil national.

7) Le 8 octobre 2015, M. A______ a recouru auprès du Tribunal fédéral, par un seul et même acte, contre l’arrêt précité de la chambre constitutionnelle du 8 septembre 2015 et l’arrêté précité du Conseil d’État du 23 septembre 2015.

S’agissant de l’élection au Conseil des États, il a produit de nouvelles pièces et pris des conclusions qui n’avaient pas été soumises à la chambre constitutionnelle, et il a fait valoir que les autorités ayant autrefois fixé le seuil, selon lui déraisonnable, de 200 signatures pour pouvoir présenter une liste de candidats n’avaient pas la légitimité, du fait de la limitation de leur mandat à quatre ans écoulé depuis longtemps, de fixer un tel seuil pour des élections se déroulant en 2015, notamment alors que, dans l’intervalle, la population étrangère dans le canton avait augmenté.

8) Par arrêt du 14 octobre 2015 (cause 1C_518/2015), le Tribunal fédéral a déclaré le recours de M. A______ irrecevable, parce que tardif, en tant qu’il était dirigé contre l’arrêté précité du Conseil d’État concernant l’élection du Conseil national, et il l’a rejeté, dans la très faible mesure de sa recevabilité, en tant qu’il était dirigé contre l’arrêt précité de la chambre constitutionnelle relatif à l’élection au Conseil des États.

Les nouvelles pièces produites par le recourant devaient être écartées, dont des feuilles comportant une septantaine de signatures de soutien à sa liste. Étaient irrecevables ses conclusions, nouvelles, tendant à ce que ces signatures et sa candidature au Conseil des États soient validées et à ce que le nombre de signatures requis dans le canton de Genève pour les élections considérées soit diminué, voire à ce que cette exigence soit annulée.

Le recourant n’avait pas valablement soulevé de grief d’inconstitutionnalité à l’encontre de l’exigence d’un soutien de liste de 200 signatures. Les critiques qu’il émettait à ce sujet n’étaient manifestement pas propres à remettre en question l’appréciation convaincante que la chambre constitutionnelle avait faite à propos de l’obligation de réunir un nombre minimal de signatures à l’appui d’une liste de candidatures pour l’élection au Conseil des États. Le fait que cette exigence de 200 signatures ait été édictée avant la nouvelle constitution fédérale de 1999 était sans pertinence, et on ne voyait pas en quoi une telle exigence serait abusive du point de vue de l’importance de la population étrangère du canton de Genève. Il pouvait être renvoyé aux considérants de l’arrêt attaqué sur ce point.

Ses autres critiques ne satisfaisaient pas aux exigences de motivation posées par la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), s’agissant de ses griefs de n’avoir pas reçu de réponse, dans l’arrêt de la chambre constitutionnelle, à propos de la « légalité du manque de formulaires à disposition pour récolter les signatures », du fait qu’il aurait été mal informé et désinformé par une réceptionniste du SVE, et du fait que ni le SEV ni la chambre constitutionnelle ne lui avaient accordé « d’extension de délais » pour le dépôt de sa liste de candidatures.

9) Par deux arrêtés distincts du 20 octobre 2015, publiés dans la FAO du 23 octobre 2015, le Conseil d’État a constaté les résultats des élections du 18 octobre 2015, respectivement de 11 députés au Conseil national et du premier tour de l’élection de 2 députés au Conseil des États. Le premier était sujet à recours dans les trois jours au Conseil d’État, et le second dans les six jours à la chambre constitutionnelle.

10) a. Le 27 octobre 2015, M. A______ a déposé au guichet de la chambre constitutionnelle un recours, daté du 26 octobre 2015, contre les résultats électoraux concernant le Conseil national et le Conseil des États.

Du fait que la population et les citoyens potentiels candidats n’avaient pas tous été informés de la possibilité de se porter candidats auxdites élections, en particulier lui-même qui avait déposé sa candidature le 3 août 2015, il y avait eu « disymétrie inéquitaire » entre eux et les candidats familiers des procédures de candidature, et les arguments susceptibles de faire changer le choix des électeurs n’avaient pas pu être présentés. Il en était résulté une atteinte à l’honnêteté, l’intégrité et l’exactitude des résultats des élections. Lesdites élections devaient impérativement être réorganisées.

Le recours qu’il avait adressé le 8 octobre 2015 au Tribunal fédéral allait à nouveau être traité par le Tribunal fédéral.

L’exigence de 200 signatures à l’appui d’une liste de candidature devait être suspendue et même annulée, car elle n’avait « aucune base juridique conforme aux pouvoirs fondés et distribués par l’actuel suisse juridique fondé sur la Constitution Suisse de 1999, ces lois ayant été édictées par un exécutif antérieur au pays Suisse juridique actuel ». L’art. 24 al. 1 LDP avait été édicté avant la constitution fédérale de 1999, si bien que l’exigence de 200 signatures que prévoyait cette disposition ne pouvait s’appliquer à l’ordre constitutionnel de la Suisse après 1999. Les autorités de l’époque n’avaient pas d’autorité au-delà de leur mandat de quatre ans, et elles ne pouvaient prédire les besoins des candidats en 2015, « ni des conditions cadres des élections 23 ans à 40 ans plus tôt ». À Genève, une large partie de la population n’était pas suisse ; dans les rues, les Suisses ne représentaient que 5 à 20 % de la population. Il était déraisonnable et disproportionné d’exiger 200 signatures dans un pareil contexte. Selon l’art. 143 Cst., tout citoyen ayant le droit de vote était éligible au Conseil national.

b. En même temps que son recours, M. A______ a déposé au greffe de la chambre constitutionnelle un courrier expliquant les raisons qui l’avaient empêché de poster son recours le 26 octobre 2015.

c. Le 28 octobre 2015, M. A______ a apporté au guichet de la chambre constitutionnelle un courrier daté de la veille indiquant que, par un courrier du 23 octobre 2015, le Tribunal fédéral avait « rectifié le numéro » de l’arrêt qu’il avait rendu le 14 octobre 2015.

11) Par courrier simple et recommandé du 28 octobre 2015, le greffe de la chambre constitutionnelle a transmis au Conseil d’État, comme objet de sa compétence, le recours de M. A______ concernant uniquement la contestation des résultats électoraux du 18 octobre 2015 au Conseil national.

12) Le 29 octobre 2015, par courrier A anticipé par fax, le juge délégué a transmis au Conseil d’État, pour information, le recours de M. A______ et les pièces jointes à ce recours, en tant que celui-ci concernait le premier tour de l’élection au Conseil des États.

13) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. Toute autorité, y compris juridictionnelle, examine d’office sa compétence (art. 11 al. 2 et 76 de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Un recours adressé à une autorité incompétente est transmis d’office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti (art. 64 al. 2 LPA).

b. C’est auprès du gouvernement cantonal – donc du Conseil d’État (art. 101 Cst-GE) – que doivent être interjetés les recours contre des irrégularités affectant la préparation et l’exécution des élections au Conseil national (art. 77 al. 1 let. c LDP), comme l’intimé l’a d’ailleurs indiqué dans son arrêté du 20 octobre 2015 constatant les résultats de l’élection de 11 députés au Conseil national du 18 octobre 2015 et comme cela résultait de l’arrêt de la chambre de céans du 8 septembre 2015 opposant les mêmes parties (ACST/18/2015 consid. 2c et 4). Aussi la présente cause doit-elle être renvoyée au Conseil d’État, pour raison de compétence, en tant que le recours concerne l’élection du Conseil national (art. 64 al. 2 phr. 1 LPA), en confirmation de ce qui a déjà été fait par le greffe de la chambre de céans.

c. La chambre constitutionnelle est en revanche compétente pour connaître des litiges relatifs à l’exercice des droits politiques en matière cantonale et communale (art. 124 let. b Cst-GE ; art. 130B let. b de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 180 LEDP). L’élection de la députation genevoise au Conseil des États est une élection cantonale (art. 52 al. 1 let. e Cst-GE). Aussi la chambre de céans est-elle compétente pour connaître du présent recours en tant que celui-ci est dirigé contre l’arrêté du Conseil d’État du 20 octobre 2015 constatant les résultats du premier tour de l’élection de 2 députés au Conseil des États du 18 octobre 2015.

2) Le délai de recours à la chambre constitutionnelle est de six jours en matière de votations et d’élections (art. 62 al. 1 let. c LPA). Le présent recours a donc été interjeté en temps utile en tant qu’il concerne les résultats de l’élection au Conseil des États, puisqu’il a été déposé le 27 octobre 2015 contre l’arrêté entrepris publié dans la FAO du 23 octobre 2015.

3) Le recourant a qualité pour recourir, dès lors qu’il a le droit de vote dans l’affaire en cause en sa qualité de titulaire des droits politiques dans le canton de Genève (art. 60 al. 1 let. b LPA ; art. 89 al. 3 et 111 al. 1 LTF ; ACST/17/2015 du 2 septembre 2015 consid. 2 ; ACST/1/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3).

4) Le recourant conteste le résultat de l’élection du premier tour au Conseil des États pour le motif qu’en raison d’un manque d’information sur les conditions et modalités de dépôt de candidatures et de l’exigence, selon lui inconstitutionnelle, de 200 signatures de soutien, des candidats – dont lui-même – n’avaient pas pu se porter candidats ni, partant, présenter aux électeurs des arguments qui auraient pu influencer leur choix. Ses griefs apparaissent, du moins pour l’essentiel, les mêmes que ceux qu’il avait soulevés devant la chambre de céans par son recours du 8 août 2015, puis qu’il avait repris devant le Tribunal fédéral dans son recours du 8 octobre 2015. Cela soulève un problème au regard du principe de la force de chose jugée.

5) En effet, l’autorité de la chose jugée s’attache aux points tranchés par une juridiction dès que le jugement de cette dernière est définitif, c’est-à-dire n’est plus susceptible de faire l’objet d’un recours ordinaire. Hormis les cas de révision, ils ne peuvent plus être revus en ce qui concerne les mêmes parties, les mêmes faits et les mêmes conclusions, y compris par le biais d’un recours contre une décision subséquente (ATF 107 V 84 ; ATA/260/2014 du 15 avril 2014 consid. 3c ; ATA/753/2010 du 2 novembre 2010 consid. 5 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 829 s. ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 869 et 955). En principe, seul le dispositif du jugement est revêtu de l'autorité de chose jugée. Toutefois, lorsque le dispositif se réfère expressément aux considérants, ceux-ci acquièrent eux-mêmes la force matérielle (ATF 112 Ia 353 consid. 3c/bb p. 354 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_741/2010 du 12 mai 2011 consid. 2.1).

Au surplus, le déroulement de la procédure des opérations électorales implique que plusieurs actes doivent être pris successivement. Tout recourant doit soulever ses griefs et présenter ses conclusions en temps utile contre le premier acte attaquable exposé à ses critiques. Il est forclos pour reprendre ultérieurement ses mêmes critiques contre un autre acte attaquable s’inscrivant logiquement et matériellement dans la suite de l’acte ayant donné lieu ou pu donner lieu à une procédure contentieuse à l’occasion de laquelle lesdites questions ont été ou auraient pu être tranchées. Reste réservé le cas d’une atteinte à des droits constitutionnels dits inaliénables et imprescriptibles, invocables même contre des actes d’exécution de décisions entrées en force (ATF 105 Ia 15 consid. 3 p. 20 ; 104 Ia 172 consid. 2b p. 175 ; 100 Ia 294 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 122 s. et 377 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/ Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 2, 3ème éd., 2013, vol. 2, n. 248 ss).

6) a. L’arrêt que la chambre de céans a rendu le 8 septembre 2015 sur le précédent recours du recourant est devenu définitif du fait du rejet du recours que ce dernier a interjeté à son encontre auprès du Tribunal fédéral, et ce dès le 14 octobre 2015, jour où le Tribunal fédéral a rendu son arrêt. Les arrêts du Tribunal fédéral acquièrent en effet force de chose jugée le jour où ils sont prononcés (art. 61 LTF).

Ces deux arrêts sont donc revêtus de la force matérielle ou autorité de chose jugée. Ils lient les parties à la procédure ainsi que les autorités qui y ont pris part.

b. Eu égard à l’allégation du recourant que le Tribunal fédéral serait amené à statuer à nouveau sur son recours du 8 octobre 2015 contre l’arrêt précité de la chambre de céans du 8 septembre 2015, il sied de préciser que cette autorité de chose jugée resterait acquise même si le recourant avait déposé une demande de révision à l’encontre de l’arrêt précité du Tribunal fédéral, tant que ce dernier n’aurait pas annulé ledit arrêt.

7) a. En l’occurrence, par son arrêt du 8 septembre 2015, la chambre de céans a jugé, sur le fond, que l’obligation de présenter un certain nombre de parrainages pour les listes de candidats n’était pas contraire à la garantie des droits politiques et était proportionnée au but visé par cette exigence, et par ailleurs que le recourant n’avait pas droit à une prolongation ou restitution du délai de dépôt de sa liste de candidature ; il avait su au moins dès février 2015 que les élections fédérales auraient lieu en automne 2015 et su ou pu savoir qu’il y avait des conditions et modalités pour le dépôt des candidatures ; il n’avait pas été empêché sans faute de sa part de se porter candidat en respectant les exigences posées. Il résulte de cet arrêt que la chambre de céans a en outre déclaré irrecevable la conclusion du recourant tendant à ce que l’exigence plus précisément de 200 signatures de parrainage soit revue à la baisse (celles tendant à la suppression de cette exigence et à l’acceptation de sa liste ayant été rejetées au fond).

Quant à lui, dans son arrêt du 14 octobre 2015, le Tribunal fédéral a écarté les critiques émises par le recourant à propos de l’obligation de réunir un nombre minimal de signatures à l’appui d’une liste de candidatures pour l’élection au Conseil des États ; ces critiques – a-t-il précisé – n’étaient manifestement pas propres à remettre en question l’appréciation retenue par la chambre de céans dans son arrêt précité. Le fait que cette exigence de 200 signatures ait été édictée avant la nouvelle constitution fédérale de 1999 – a-t-il ajouté – était sans pertinence, et on ne voyait pas en quoi une telle exigence serait abusive du point de vue de l’importance de la population étrangère du canton de Genève.

b. Les questions soulevées par le recourant dans le présent recours ont donc, du moins pour l’essentiel, déjà été tranchées respectivement par la chambre constitutionnelle et le Tribunal fédéral dans les arrêts précités, entrés en force et opposables au recourant.

c. Au surplus, jamais le droit en tant que tel du recourant de se porter candidat à l’élection du 18 octobre 2015 de la députation genevoise au Conseil des États n’a été nié. Il a simplement été retenu que le recourant n’a pas rempli en temps utile les conditions légales et conformes à l’ordre constitutionnel de dépôt de sa candidature. Il n’y a pas de droit constitutionnel inaliénable et imprescriptible en jeu en l’espèce.

8) Si les griefs soulevés par le recourant n’étaient pas – ou pas tous – irrecevables au regard du principe de la force de chose jugée, ils seraient en tout état mal fondés.

9) a. En effet, la FAO a pour but la diffusion des actes et avis officiels, législatifs, administratifs et judiciaires, ainsi que l’information du public (art. 2 de la loi sur la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève du 29 novembre 2013 - LFAO - B 2 10), et « une fois qu’une loi est publiée, elle est censée être connue », comme le Tribunal fédéral l’a mentionné dans son arrêt 1C_138/2015 du 25 mars 2015 (consid. 3 p. 5) statuant sur un précédent recours de M. A______ en matière d’élections.

b. Les arrêtés du 25 février 2015 par lesquels le Conseil d’État avait fixé au 3 août 2015 à 12h l’échéance du délai de dépôt des candidatures pour les élections fédérales du 18 octobre 2015 ont été dûment publiés dans la FAO, de même que les avis de la chancellerie d’État relatifs auxdites élections. Contrairement à ce qu’il prétend, le recourant et la population genevoise en général ont été dûment informés de la tenue des élections le 18 octobre 2015 ainsi que de la fixation au 3 août 2015 à 12h de l’échéance du délai de dépôt des candidatures. L’information sur la mise à la disposition des intéressés, dès le 29 avril 2015, des dossiers officiels de candidature, contenant un guide à l’usage des partis et groupements voulant présenter des candidatures, a été suffisante, ayant été diffusée notamment par les avis de la chancellerie d’État parus dans la FAO du 24 avril 2015 avec l’indication de l’adresse internet où télécharger ledit guide. Dans son recours du 8 août 2015 à la chambre de céans, le recourant a indiqué qu’il avait consulté ledit guide en date du 21 juin 2015. Il savait donc qu’il lui fallait obtenir au moins 200 signatures de parrainage à l’appui de sa candidature, puisque cette exigence figurait dans ce guide. Au demeurant, cette exigence résultait de la loi, par le renvoi de l’art. 25 al. 2 LEDP à l’art. 24 al. 1 LDP.

c. Le recourant a donc disposé, à l’instar de la population genevoise en général, de toutes les indications nécessaires pour présenter sa candidature au Conseil des États à la fois à temps et dans le respect des exigences posées.

10) a. Il est manifestement erroné d’affirmer, comme le fait le recourant, que les autorités ayant arrêté le chiffre de 200 signatures de parrainage ne pouvaient le faire pour une durée excédant la fin de leur mandat de quatre ans et qu’au surplus, dans l’intervalle, la nouvelle constitution fédérale de 1999, entrée en vigueur le 1er janvier 2000 (RO 1999 2555; FF 1999 7145), avait rendu cette exigence caduque, notamment en prévoyant, à son art. 143, que tout citoyen ayant le droit de vote est éligible au Conseil national.

b. En effet, si les membres des autorités doivent être valablement élus pour participer aux actes de ces dernières, ceux-ci ne cessent pas de déployer leurs effets à l’échéance de leur mandat. L’entrée en vigueur de la nouvelle constitution fédérale n’a par ailleurs nullement impliqué que les législations antérieurement adoptées se trouvaient depuis lors dépourvues de validité sauf à être ré-adoptées sous l’empire de la nouvelle constitution. Au demeurant, s’agissant notamment du nombre de signatures requis pour le dépôt d’une candidature au Conseil des États, le renvoi que l’art. 25 al. 2 LEDP fait à l’art. 24 al. 2 LDP figure dans une modification que le Grand Conseil genevois a apportée à la LEDP le 21 mars 2013, entrée en vigueur le 1er juin 2013 (ROLG 2013 p. 200 ss), donc postérieurement à la constitution fédérale de 1999. En outre, en plus de viser l’élection au Conseil national et non l’élection ici pertinente au Conseil des États (comme l’a relevé le Tribunal fédéral dans son arrêt du 14 octobre 2015), l’art. 143 Cst. invoqué par le recourant n’exclut nullement la fixation d’un nombre minimal de signatures de parrainage de candidatures. Les allégations du recourant quant à la proportion de Suisses dans les rues (soit entre 5 et 20 % de la population) ne peuvent qu’être qualifiées de fantaisistes ; quoi qu’il en soit, elles ne démontrent aucunement que les candidats auxdites élections en général et le recourant en particulier n’auraient de ce fait pas été en mesure d’obtenir 200 signatures de soutien.

c. Le recourant n’ayant présenté à temps aucune signature de parrainage à l’appui de sa candidature, il n’est pas nécessaire d’examiner si le nombre de 200 signatures exigé par la loi pour l’élection de la députation genevoise au Conseil des États est critiquable ou non d’un point de vue juridique, dès l’instant que – comme l’ont retenu tant la chambre de céans dans son arrêt du 8 septembre 2015 que le Tribunal fédéral dans son arrêt du 14 octobre 2015 – l’obligation de réunir un nombre minimal de signatures à l’appui d’une liste de candidatures pour l’élection au Conseil des États est conforme au droit. La chambre de céans n’en relève pas moins que le nombre de titulaires des droits politiques sur le plan cantonal – à savoir pour l’essentiel les personnes de nationalité suisse âgées de 18 ans révolus domiciliées dans le canton de Genève (art. 48 al. 1 Cst-GE) – est de l’ordre de 268'500 personnes (Mémento statistique du canton de Genève 2015, édité en juin 2015 par l’office cantonal de la statistique, p. 1). L’exigence de 200 signatures de parrainage revient donc à celle d’un soutien infime d’à peine 0.075 % du corps électoral, que de nombreux groupements ayant obtenu de faibles scores lors d’élections ont pu rassembler. Cette exigence n’est ni déraisonnable ni disproportionnée.

11) La chambre constitutionnelle rejettera donc le présent recours en tant qu’il est recevable.

Vu l’issue donnée au recours, un émolument de CHF 800.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

déclare le recours interjeté le 27 octobre 2015 par Monsieur A______ irrecevable en tant qu’il est dirigé contre l’arrêté du Conseil d’État du 20 octobre 2015 constatant les résultats de l’élection du 18 octobre 2015 au Conseil national :

confirme le renvoi de la cause, dans cette mesure, au Conseil d’État, pour raison de compétence ;

rejette le recours, en tant qu’il est recevable et en tant qu’il est dirigé contre l’arrêté du Conseil d’État du 20 octobre 2015 constatant les résultats du premier tour de l’élection du 18 octobre 2015 au Conseil des États ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 800.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt au recourant et au Conseil d’État.

Siégeants : M. Verniory, président ; Mme Galeazzi, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Martin, juges

 

 

Au nom de la chambre constitutionnelle :

Le greffier-juriste :

 

 

 

 

I. Semuhire

 

Le président siégeant :

 

 

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :