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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/15714/2018

AARP/228/2021 du 28.07.2021 sur JTCO/134/2020 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : TRAITE D'ÊTRES HUMAINS;ENCOURAGEMENT À LA PROSTITUTION;BLANCHIMENT D'ARGENT
Normes : CP.182; CP.195.letC; CP.305BIS

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

P/15714/2018 AARP/228/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 28 juillet 2021

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

A______, actuellement détenue à la Prison de B______, comparant par Me C______, avocate, ______, Genève,

appelants principaux

contre le jugement JTCO/134/2020 rendu le 2 octobre 2020 par le Tribunal correctionnel

et

D______, actuellement en exécution anticipée de peine à l'Etablissement fermé E______, chemin ______, ______[GE], comparant par Me F______, avocate, ______, Genève,

G______, actuellement en exécution anticipée de peine à l'Etablissement fermé E______, chemin ______, ______[GE], comparant par Me H______, avocat, ______, Genève,

I______, partie plaignante, comparant par Me J______, avocat, ______, Genève

appelants joints

 

K______, comparant par Me L______, avocate, ______, Genève,

M______, comparant par Me N______, avocate______, Genève, Déclare A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Acquitte A______ de contrainte (art. 181 CP; B.3.V.12), de complicité d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ et de P______ (art. 25 cum 195 al. 1 let. c CP; ch. B.3.II.7 et 8), de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.3.VI.14), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI; B.3.VII.15) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI; B.3.IX.18).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 5 ans et 6 mois, sous déduction de 362 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. e et g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

*****

Déclare G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Acquitte G______ de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.2.VI.9) et de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI; ch.B.2.VIII.11).

Condamne G______ à une peine privative de liberté de 4 ans et 6 mois, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne G______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit G______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne G______ à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 2 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de G______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de G______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Déclare D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR).

Acquitte D______ de traite d'êtres humains par métier au préjudice de O______ (art. 182 al. 1 et 2 CP; ch. B.1.I.2), d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ (art. 195 al. 1 let. c CP; ch.B.1.II.4) et de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.1.VI.10).

Condamne D______ à une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit D______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne D______ à une amende de CHF 600.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 6 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de D______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de D______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ EUR 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 11 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 11'760.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 4'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 20'000.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 3'500.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles de l'HOSPICE GENERAL dans leur principe (art. 124 al. 3 CPP).

Renvoie l'HOSPICE GENERAL à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Déboute O______ de ses conclusions civiles.

*****

Condamne A______, G______, D______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun (art. 426 al. 1 CPP).

*****

Ordonne la confiscation et la destruction des objets et de la drogue figurant sous chiffres 1, 2, 6, 9, 10, 15, 18, 23 et 25 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 19932920190226 du 25 février 2019, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 16304820180924 du 24 septembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à D______ du véhicule Q______ immatriculé BN56 NUP (GB) et des objets figurant sous chiffres 3, 4, 7, 8, 11, 21 et 22, à A______ de ceux figurant sous chiffres 13, 14, 17 (la carte MAESTRO R______ au nom de A______ A______) et 19, à G______ du portemonnaie noir, de la carte S______ au nom de G______ G______ et de la carte T______ au nom de G______ G______ figurant sous chiffre 17, à son ayant droit de l'ordinateur figurant sous chiffre 16, à U______ de la carte V______ audit nom figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018 et à l'OCPM du livret pour étranger B au nom de P______ ROGRIGUEZ PALACIOS figurant sous chiffre 1 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne le versement à la procédure de l'enveloppe contenant le courrier de l'OCPM au nom de P______ P______ figurant sous chiffre 2 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018.

Ordonne la confiscation des valeurs patrimoniales (CHF 8.20 et EUR 660.-) figurant sous chiffres 5 et 24 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous déduction de la somme de CHF 150.- versée à G______ CIOBAU à titre humanitaire (art. 70 CP).

Alloue à M______ les valeurs patrimoniales confisquées et les amendes payées par A______ et G______, M______ ayant cédé à l'Etat, à concurrence de tout montant effectivement recouvré, sa créance en dommages-intérêts contre A______ et G______ (art. 73 al. 2 CP).

P______ , comparant par Me W______, avocate, ______, Genève,

 

intimées.

 

 

Déclare A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Acquitte A______ de contrainte (art. 181 CP; B.3.V.12), de complicité d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ et de P______ (art. 25 cum 195 al. 1 let. c CP; ch. B.3.II.7 et 8), de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.3.VI.14), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI; B.3.VII.15) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI; B.3.IX.18).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 5 ans et 6 mois, sous déduction de 362 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. e et g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

*****

Déclare G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Acquitte G______ de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.2.VI.9) et de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI; ch.B.2.VIII.11).

Condamne G______ à une peine privative de liberté de 4 ans et 6 mois, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne G______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit G______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne G______ à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 2 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de G______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de G______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Déclare D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR).

Acquitte D______ de traite d'êtres humains par métier au préjudice de O______ (art. 182 al. 1 et 2 CP; ch. B.1.I.2), d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ (art. 195 al. 1 let. c CP; ch.B.1.II.4) et de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.1.VI.10).

Condamne D______ à une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit D______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne D______ à une amende de CHF 600.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 6 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de D______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de D______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ EUR 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 11 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 11'760.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 4'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 20'000.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 3'500.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles de l'HOSPICE GENERAL dans leur principe (art. 124 al. 3 CPP).

Renvoie l'HOSPICE GENERAL à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Déboute O______ de ses conclusions civiles.

*****

Condamne A______, G______, D______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun (art. 426 al. 1 CPP).

*****

Ordonne la confiscation et la destruction des objets et de la drogue figurant sous chiffres 1, 2, 6, 9, 10, 15, 18, 23 et 25 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 19932920190226 du 25 février 2019, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 16304820180924 du 24 septembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à D______ du véhicule Q______ immatriculé BN56 NUP (GB) et des objets figurant sous chiffres 3, 4, 7, 8, 11, 21 et 22, à A______ de ceux figurant sous chiffres 13, 14, 17 (la carte MAESTRO R______ au nom de A______ A______) et 19, à G______ du portemonnaie noir, de la carte S______ au nom de G______ G______ et de la carte T______ au nom de G______ G______ figurant sous chiffre 17, à son ayant droit de l'ordinateur figurant sous chiffre 16, à U______ de la carte V______ audit nom figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018 et à l'OCPM du livret pour étranger B au nom de P______ ROGRIGUEZ PALACIOS figurant sous chiffre 1 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne le versement à la procédure de l'enveloppe contenant le courrier de l'OCPM au nom de P______ P______ figurant sous chiffre 2 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018.

Ordonne la confiscation des valeurs patrimoniales (CHF 8.20 et EUR 660.-) figurant sous chiffres 5 et 24 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous déduction de la somme de CHF 150.- versée à G______ CIOBAU à titre humanitaire (art. 70 CP).

Alloue à M______ les valeurs patrimoniales confisquées et les amendes payées par A______ et G______, M______ ayant cédé à l'Etat, à concurrence de tout montant effectivement recouvré, sa créance en dommages-intérêts contre A______ et G______ (art. 73 al. 2 CP).

Déclare A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Acquitte A______ de contrainte (art. 181 CP; B.3.V.12), de complicité d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ et de P______ (art. 25 cum 195 al. 1 let. c CP; ch. B.3.II.7 et 8), de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.3.VI.14), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI; B.3.VII.15) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI; B.3.IX.18).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 5 ans et 6 mois, sous déduction de 362 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. e et g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

*****

Déclare G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Acquitte G______ de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.2.VI.9) et de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI; ch.B.2.VIII.11).

Condamne G______ à une peine privative de liberté de 4 ans et 6 mois, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne G______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit G______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne G______ à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 2 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de G______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de G______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Déclare D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR).

Acquitte D______ de traite d'êtres humains par métier au préjudice de O______ (art. 182 al. 1 et 2 CP; ch. B.1.I.2), d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ (art. 195 al. 1 let. c CP; ch.B.1.II.4) et de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.1.VI.10).

Condamne D______ à une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit D______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne D______ à une amende de CHF 600.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 6 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de D______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de D______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ EUR 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 11 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 11'760.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 4'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 20'000.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 3'500.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles de l'HOSPICE GENERAL dans leur principe (art. 124 al. 3 CPP).

Renvoie l'HOSPICE GENERAL à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Déboute O______ de ses conclusions civiles.

*****

Condamne A______, G______, D______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun (art. 426 al. 1 CPP).

*****

Ordonne la confiscation et la destruction des objets et de la drogue figurant sous chiffres 1, 2, 6, 9, 10, 15, 18, 23 et 25 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 19932920190226 du 25 février 2019, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 16304820180924 du 24 septembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à D______ du véhicule Q______ immatriculé BN56 NUP (GB) et des objets figurant sous chiffres 3, 4, 7, 8, 11, 21 et 22, à A______ de ceux figurant sous chiffres 13, 14, 17 (la carte MAESTRO R______ au nom de A______ A______) et 19, à G______ du portemonnaie noir, de la carte S______ au nom de G______ G______ et de la carte T______ au nom de G______ G______ figurant sous chiffre 17, à son ayant droit de l'ordinateur figurant sous chiffre 16, à U______ de la carte V______ audit nom figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018 et à l'OCPM du livret pour étranger B au nom de P______ ROGRIGUEZ PALACIOS figurant sous chiffre 1 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne le versement à la procédure de l'enveloppe contenant le courrier de l'OCPM au nom de P______ P______ figurant sous chiffre 2 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018.

Ordonne la confiscation des valeurs patrimoniales (CHF 8.20 et EUR 660.-) figurant sous chiffres 5 et 24 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous déduction de la somme de CHF 150.- versée à G______ CIOBAU à titre humanitaire (art. 70 CP).

Alloue à M______ les valeurs patrimoniales confisquées et les amendes payées par A______ et G______, M______ ayant cédé à l'Etat, à concurrence de tout montant effectivement recouvré, sa créance en dommages-intérêts contre A______ et G______ (art. 73 al. 2 CP).

Déclare A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Acquitte A______ de contrainte (art. 181 CP; B.3.V.12), de complicité d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ et de P______ (art. 25 cum 195 al. 1 let. c CP; ch. B.3.II.7 et 8), de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.3.VI.14), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI; B.3.VII.15) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI; B.3.IX.18).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 5 ans et 6 mois, sous déduction de 362 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. e et g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

*****

Déclare G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Acquitte G______ de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.2.VI.9) et de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI; ch.B.2.VIII.11).

Condamne G______ à une peine privative de liberté de 4 ans et 6 mois, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne G______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit G______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne G______ à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 2 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de G______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de G______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Déclare D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR).

Acquitte D______ de traite d'êtres humains par métier au préjudice de O______ (art. 182 al. 1 et 2 CP; ch. B.1.I.2), d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ (art. 195 al. 1 let. c CP; ch.B.1.II.4) et de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP; ch. B.1.VI.10).

Condamne D______ à une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit D______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne D______ à une amende de CHF 600.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 6 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de D______ pour une durée de 10 ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de D______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ EUR 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 11 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 11'760.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 4'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 20'000.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à P______ P______ CHF 3'500.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018 à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles de l'HOSPICE GENERAL dans leur principe (art. 124 al. 3 CPP).

Renvoie l'HOSPICE GENERAL à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Déboute O______ de ses conclusions civiles.

*****

Condamne A______, G______, D______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun (art. 426 al. 1 CPP).

*****

Ordonne la confiscation et la destruction des objets et de la drogue figurant sous chiffres 1, 2, 6, 9, 10, 15, 18, 23 et 25 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 19932920190226 du 25 février 2019, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 16304820180924 du 24 septembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à D______ du véhicule Q______ immatriculé BN56 NUP (GB) et des objets figurant sous chiffres 3, 4, 7, 8, 11, 21 et 22, à A______ de ceux figurant sous chiffres 13, 14, 17 (la carte MAESTRO R______ au nom de A______ A______) et 19, à G______ du portemonnaie noir, de la carte S______ au nom de G______ G______ et de la carte T______ au nom de G______ G______ figurant sous chiffre 17, à son ayant droit de l'ordinateur figurant sous chiffre 16, à U______ de la carte V______ audit nom figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018 et à l'OCPM du livret pour étranger B au nom de P______ ROGRIGUEZ PALACIOS figurant sous chiffre 1 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne le versement à la procédure de l'enveloppe contenant le courrier de l'OCPM au nom de P______ P______ figurant sous chiffre 2 de l'inventaire 15482820180903 du 3 septembre 2018.

Ordonne la confiscation des valeurs patrimoniales (CHF 8.20 et EUR 660.-) figurant sous chiffres 5 et 24 de l'inventaire n° 16322820180924 du 24 septembre 2018, sous déduction de la somme de CHF 150.- versée à G______ CIOBAU à titre humanitaire (art. 70 CP).

Alloue à M______ les valeurs patrimoniales confisquées et les amendes payées par A______ et G______, M______ ayant cédé à l'Etat, à concurrence de tout montant effectivement recouvré, sa créance en dommages-intérêts contre A______ et G______ (art. 73 al. 2 CP).

 


Table des matières

EN FAIT : 4

A. Saisine de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) 4

1) Appel du Ministère public. 4

2) Appel de A______. 6

3) Appel joint de G______. 6

4) Appel joint de D______. 6

5) Appel joint de I______. 6

6) L'acte d'accusation. 7

B. Faits résultant du dossier de première instance. 12

1) Enquête policière. 12

2) O______. 25

3) K______ et M______. 29

4) I______. 34

5) P______. 37

C. Procédure d'appel 38

1) Le Ministère public. 38

2. A______. 41

3. D______. 44

4. G______. 47

5) I______. 50

6) Les autres parties plaignantes. 51

D. Situation personnelle des prévenus et antécédents. 51

E. Assistance judiciaire. 53

EN DROIT : 54

1) Recevabilité. 54

2) Etablissement des faits. 54

3) Culpabilité. 64

i) D______. 71

ii) G______. 73

iii) A______. 75

4) Peine. 76

i) D______. 79

ii) G______. 80

iii) A______. 80

5) Détention pour les motifs de sûretés. 81

6) Expulsion. 81

7) Conclusions civiles. 82

8) Inventaires. 84

9) Frais. 86

10) Assistance judiciaire. 87

PAR CES MOTIFS, LA COUR : 90

 

EN FAIT :

A.    Saisine de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR)

1)   Appel du Ministère public

a.a. En temps utile, le Ministère public (MP) appelle du jugement du 2 octobre 2020, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) :

-     a reconnu D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 Code pénal suisse [CP]), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR), mais l'a acquitté de traite d'êtres humains par métier au préjudice de O______ (art. 182 al. 1 et 2 CP), d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______  (art. 195 al. 1 let. c CP) et de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP). Le TCO a condamné D______ à une peine privative de liberté de quatre ans, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 20.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve de trois ans) et à une amende de CHF 600.- (peine privative de liberté de substitution de 6 jours) ;

-     a reconnu G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), mais l'a acquitté de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI). Le TCO a condamné G______ à une peine privative de liberté de quatre ans et six mois, sous déduction de 740 jours de détention avant jugement, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, à CHF 20.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve de trois ans) et à une amende de CHF 200.- (peine privative de liberté de substitution de deux jours).

-     a reconnu A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI), mais l'a acquittée de contrainte (art. 181 CP), de complicité d'encouragement à la prostitution au préjudice de O______ et de P______ (art. 25 cum 195 al. 1 let. c CP), de blanchiment d'argent s'agissant de O______ (art. 305bis ch. 1 CP), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI). Le TCO a condamné A______ à une peine privative de liberté de cinq ans et six mois, sous déduction de 362 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 20.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve de 3 ans).

Le TCO a condamné les prévenus à payer aux parties plaignantes M______, K______, P______ et I______ divers montants au titre de leurs conclusions civiles. A______ et G______ ont en particulier été condamnés, conjointement et solidairement, à payer à I______ la somme de CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Enfin, le TCO a ordonné l'expulsion des trois prévenus de Suisse pour une durée de dix ans et les a condamnés aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, à raison d'un tiers chacun.

a.b. Le MP entreprend partiellement ce jugement et conclut à ce que :

-          D______ soit également reconnu coupable de traite d'êtres humains par métier, d'encouragement à la prostitution et de blanchiment d'argent s'agissant de O______, d'encouragement à la prostitution s'agissant de K______, et qu'il soit condamné à une peine privative de liberté de sept ans ;

-          G______ soit également reconnu coupable d'encouragement à la prostitution s'agissant de I______ et M______, de blanchiment d'argent s'agissant de O______ et qu'il soit condamné à une peine privative de liberté de sept ans ;

-          A______ soit également reconnue coupable de complicité d'encouragement à la prostitution et de blanchiment d'argent s'agissant de O______, d'encouragement à la prostitution s'agissant de M______ et de K______ et qu'elle soit condamnée à une peine privative de liberté de sept ans ;

-          le jugement querellé soit confirmé pour le surplus.

2)        Appel de A______

A______ appelle en temps utile contre le jugement susmentionné concluant à son acquittement des chefs de traite d'êtres humains par métier et de blanchiment d'argent. Elle conclut à ce que les parties plaignantes M______, I______, K______ et P______ soient déboutées de leurs conclusions civiles, à ce que la peine prononcée à son encontre ne dépasse pas la détention subie jusqu'aux débats d'appel et à ce que sa prise en charge des frais de procédure de première instance soit réduite au 1/10ème. Enfin, elle conclut à ce que la durée de l'expulsion ordonnée à son encontre soit arrêtée à cinq ans.

3)        Appel joint de G______

G______ conclut à son acquittement des chefs de traite d'êtres humains, de blanchiment d'argent et d'instigation de la justice en erreur. Il conclut à ce que la peine prononcée à son encontre ne dépasse pas la détention subie jusqu'aux débats d'appel, à ce que les plaignantes M______ et I______ soient déboutées de leurs conclusions civiles et à ce qu'il soit condamné uniquement au 1/10ème des frais de procédure de première instance.

4)        Appel joint de D______

D______ conclut à son acquittement des chefs de traite d'êtres humains et de blanchiment d'argent. Il conclut à ce que la peine prononcée à son encontre ne dépasse pas la détention subie jusqu'aux débats d'appel, à ce que la plaignante K______ soit déboutée de ses conclusions civiles, à ce que la durée de l'expulsion ordonnée à son encontre soit arrêtée à cinq ans et à ce qu'il soit condamné uniquement au 1/10ème des frais de procédure de première instance.

5)        Appel joint de I______

I______ conclut à ce que A______ et G______ soient reconnus coupables, en concours avec l'infraction de traite d'êtres humains, d'encouragement à la prostitution et à ce que ceux-ci soient condamnés, conjointement et solidairement, au paiement de CHF 7'000.-, avec intérêt à 5% dès le 1er septembre 2017, à titre de réparation de son tort moral.

6)        L'acte d'accusation

e.a.a. Selon l'acte d'accusation du 28 mai 2020, il est encore reproché à D______ les faits suivants :

-     il a, en août 2018, après avoir rencontré K______, dont il savait qu'elle avait été exploitée par un individu qui l'obligeait à se prostituer pour lui et à lui remettre la totalité de ses gains, hébergé celle-ci de concert avec sa sœur A______, dès le mois d'août 2018 et jusqu'au 24 septembre 2018, dans le but de l'amener à se prostituer pour lui et à lui remettre la totalité de ses gains, soit un revenu journalier moyen de CHF 300.- environ, en ayant conscience du fait que K______ présentait un retard mental et une vulnérabilité psychique et affective, en lui faisant croire qu'il était amoureux d'elle et voulait fonder une famille avec elle et construire une maison en Roumanie pour eux, alors que tel n'était pas le cas, en déterminant ses conditions de travail et ses pratiques, en la poussant à gagner le plus d'argent possible, en la surveillant, en recourant à la violence physique, en la menaçant de la quitter, en la rabaissant et en l'humiliant (ch. B.1.I.1 et B.1.II.3 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité du chef de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP) et à l’acquittement du chef d'encouragement à la prostitution (art. 195 al. 1 let. c CP) ;

-     après avoir rejoint O______ en Espagne, en février ou mars 2018, où celle-ci s'était prostituée librement durant plusieurs mois, amené celle-ci à Genève, entre mi-mai et début juin 2018, où il l'a hébergée jusqu'à mi-juillet 2018 environ, au domicile de sa sœur A______, pour l'amener à se prostituer pour son compte et à lui remettre la quasi-totalité de ses gains, qui se montaient à CHF 500.- par jour au moins, en profitant de ce que O______ voulait être en couple avec lui et était jalouse du fait qu'il fréquentait d'autres femmes, en prétendant utiliser l'argent en question pour construire une maison pour eux en Roumanie, alors qu'il l'utilisait en réalité pour financer son train de vie et celui de sa sœur, en surveillant l'activité de prostituée de O______,  en déterminant ses horaires et ses lieux de travail, en ayant recours à la violence physique, en l'intimidant par la voix, en l'incitant à prendre de la cocaïne pour continuer son activité malgré des douleurs gynécologiques (ch. B.1.I.2 et B.1.II.4 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict d’acquittement des chefs de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP) et d'encouragement à la prostitution (art. 195 al. 1 let. c CP) ;

-     alors qu'il agissait comme décrit ci-dessus, utilisé, de concert avec A______ et G______, l'argent provenant de l'activité de prostituée de K______ de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.1.VI.10 de l'acte d'accusation),

-     alors qu'il connaisait la manière dont G______ agissait avec M______ et I______ (cf. ci-dessous e.b et ch. B.2.II.1 et 2 de l'acte d'accusation), utilisé, de concert avec A______ et G______, l'argent provenant de l'activité de prostituées de celles-là, de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.1.VI.11 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité de blanchiment d’argent (art. 305bis al. 1 CP), commis à réitérées reprises ;

-     alors qu'il agissait comme décrit ci-dessus, utilisé, de concert avec A______ et G______, l'argent provenant de l'activité de prostituée de O______, de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.1.VI.10 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict d’acquittement de blanchiment d’argent (art. 305bis al. 1 CP).

e.a.b. Il était également reproché à D______ d'avoir, entre le mois de mai et le 23 septembre 2018, presque quotidiennement conduit un véhicule automobile sans être porteur de son permis de conduire, qu'il avait égaré, faits ayant conduit au verdict de culpabilité, non contesté, de conduite sans être porteur du permis de conduire (art. 99 al. 1 let. b LCR).

e.b. Selon le même acte d'accusation, il est encore reproché à G______ ce qui suit :

-     en août 2018, alors qu'il était en Roumanie, il a proposé son aide à M______, qui cherchait à s'enfuir de Zurich, où elle avait été vendue à une famille, organisé le transfert de celle-ci et son hébergement dans l'appartement de sa sœur, A______, du 29 août au 24 septembre 2018, dans le but de l'amener à se prostituer pour lui et à lui remettre la totalité de ses gains, soit un total de l'ordre de EUR 3'500.-, en lui faisant croire qu'il était amoureux d'elle, voulait fonder une famille avec elle et construire une maison en Roumanie pour eux, alors que tel n'était pas le cas, en la convainquant d'entreprendre des démarches administratives pour pouvoir se prostituer légalement en Suisse, en déterminant ses conditions de travail, en surveillant son activité, en ayant recours à la violence physique, en la menaçant, en la rabaissant et en l'humiliant (ch. B.2.I.1 et B.2.II.3 de l'acte d'accusation) ;

-     après que X______ a emmené I______ de Roumanie à Genève, au domicile de A______, dans le but de se prostituer, en lui faisant subir des maltraitances psychiques et physiques et après le départ de celui-ci, continué à héberger l'intéressée, de concert avec A______, dans le but de l'amener à se prostituer et à lui remettre la totalité de ses gains, alors qu'il savait ce qu'elle avait subi de la part de X______ et connaissait son parcours de vie et sa vulnérabilité physique et psychique, en la rassurant en lui promettant de bien se comporter avec elle, en lui faisant croire qu'il était amoureux d'elle et voulait fonder une famille avec elle, en l'aidant à entreprendre les démarches administratives nécessaires à l'exercice légal de la prostitution, en conservant ses documents d'identité, en déterminant ses conditions de travail, en l'incitant à gagner un maximum d'argent, en la surveillant, en lui interdisant de sortir seule quand elle ne travaillait pas, en ayant recours à la violence physique et en la menaçant (ch. B.2.I.2 et B.2.II.4 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité du chef de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP) et à l’acquittement du chef d'encouragement à la prostitution (art. 195 al. 1 let. c CP) ;

-     alors qu'il agissait comme décrit ci-dessus, utilisé, de concert avec A______ et D______, l'argent gagné par M______ et I______ au moyen de la prostitution, de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.2.VI.8 de l'acte d'accusation) ;

-     alors qu'il connaissait la manière dont D______ agissait avec K______ (cf. B.1.II.1 B.1.II.2 de l'acte d'accusation), utilisé, de concert avec A______ et D______, l'argent gagné par celle-ci de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.2.VI.9 de l'acte d'accusation) ;

faits qualifiés de blanchiment d'argent (art. 305bis al. 1 CP), commis à réitérées reprises ;

-     alors qu'il savait la manière dont D______ agissait avec O______ (cf. B.1.II.1 B.1.II.2 de l'acte d'accusation), utilisé, de concert avec A______ et D______, l'argent gagné par celle-ci de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation (ch. B.2.VI.9 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit à l’acquittement du chef de blanchiment d’argent (art. 305bis al. 1 CP) ;

-     en septembre 2018, convaincu M______, ressortissante roumaine, de déposer plainte pénale pour dénoncer le vol de son sac, contenant ses documents d'identité, infraction qu'il savait pertinemment n'avoir pas été commise (ch. B.2.VII.10 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité du chef d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 CP cum art. 304 ch. 1 al. 1 CP).

e.c. Selon le même acte d'accusation, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

-     elle a, du mois d'août au 24 septembre 2018, de concert avec D______, hébergé K______, dans le but de saisir les gains qu'elle percevait en se prostituant pour le compte de D______ (ch. B.1.I.1 de l'acte d'accusation), alors qu'elle connaissait la manière dont celui-ci se comportait envers K______, et surveillé et poussé celle-ci à travailler un maximum et à obéir à D______, afin qu'elle rapporte le plus d'argent possible (ch. B.3.I.1 et B.3.II. 5 de l'acte d'accusation) ;

-     de concert avec G______, organisé le transfert de M______ de Zurich à Genève, le 28 août 2018 et hébergé l'intéressée à son domicile, jusqu'au 24 septembre 2018, dans le but de saisir les gains qu'elle percevait en se prostituant pour le compte de G______ (ch. B.2.I.1 de l'acte d'accusation), alors qu'elle connaissait le parcours de vie de M______ et la manière dont G______ se comportait envers celle-ci, et surveillé et encouragé celle-ci à travailler un maximum et à obéir à ce dernier, afin qu'elle rapporte le plus d'argent possible (ch. B.3.I.2 et B.3.II.6 de l'acte d'accusation) ;

-     de février à juin 2018, alors qu'elle savait que P______ s'était prostituée pour le compte de Y______, auquel elle remettait tous ses gains, qu'elle l'avait encouragée à dénoncer pénalement ces faits et qu'elle affichait de l'empathie envers elle, hébergé P______ à son domicile et, alors qu'elle savait qu'elle voulait cesser de se prostituer, à tout le moins durant un certain temps, convaincue de poursuivre cette activité lucrative dans le but de se faire remettre la quasi-totalité de ses gains, soit une somme totale de CHF 20'000.-, en lui faisant croire qu'elles étaient amies et qu'elle était comme une mère pour elle, en lui disant, d'une part, qu'elle mettait une partie de son argent en sécurité et, d'autre part, qu'elle avait besoin d'argent pour subvenir à ses besoins impérieux, ou à ceux de ses proches (ch. B.3.I.3 de l'acte d'accusation) ;

-     de début juin 2017 au 2 janvier 2018, de concert avec G______, hébergé I______ dans le but de saisir les gains qu'elle percevrait en se prostituant pour le compte de G______ (ch. B.2.I.2 de l'acte d'accusation), alors qu'elle avait vu les violences physiques et psychiques que X______ lui avait fait subir, qu'elle connaissait sa vulnérabilité physique, psychique et affective, qu'elle savait qu'elle était mère de deux enfants restés en Roumanie et, alors qu'elle connaissait la manière dont G______ agissait avec elle, encouragé I______ à gagner un maximum d'argent, lui expliquant pour ce faire comment racoler les clients, quelles pratiques sexuelles accepter, quels tarifs pratiquer et la dénonçant à G______ lorsqu'elle gardait de l'argent pour elle (ch. B.3.I.4 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité du chef de traite d'êtres humains, avec la circonstance aggravante du métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), et à l’acquittement d'encouragement à la prostitution (art. 195 al. 1 let. c CP) ;

-     entre mi-mai et mi-juillet 2018, alors qu'elle travaillait elle-même comme prostituée et se trouvait régulièrement à proximité de O______ et alors qu'elle savait la manière dont D______ se comportait avec elle (cf. acte d'accusation ch. B1. II. 2), aidé ce dernier à surveiller l'activité de prostituée de O______ (ch. B.3.II.7 de l'acte d'accusation) ;

faits ayant conduit à l’acquittement de complicité d'encouragement à la prostitution (art. 25 al. 1 CP cum art. 195 al. 1 let. c CP) ;

-     alors qu'elle agissait comme décrit ci-dessus et qu'elle percevait une aide financière indue de la part de l'Hospice général, qu'elle saisissait et conservait en liquide les gains provenant de l'activité de prostituées de M______, de K______, de I______ et de P______, A______ a intentionnellement utilisé cet argent, de concert avec D______ et G______, de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation ;

faits ayant conduit au verdict de culpabilité de blanchiment d'argent (art. 305bis al. 1 CP), commis à réitérées reprises.

-     alors qu'elle connaissait la manière dont D______ agissait avec O______ (cf. B.1.II.2 de l'acte d'accusation), intentionnellement utilisé l'argent gagné par cette dernière, de concert avec G______ et D______, de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation ;

faits ayant conduit à l’acquittement de blanchiment d'argent (art. 305bis al. 1 CP).

 

B.     Faits résultant du dossier de première instance

1)   Enquête policière

a.a. D'après les rapports de renseignements figurant au dossier, O______, une jeune femme d'origine roumaine exerçant la prostitution, s'est rendue à la police se plaignant en substance d'avoir été exploitée et maltraitée par son compagnon, D______, qui la conduisait au 8______[GE] et surveillait constamment son activité depuis le pont à proximité ou par téléphone. Il agissait désormais de la sorte avec d'autres jeunes femmes d'origine roumaine. La sœur de ce dernier, A______, qui s'adonnait également à la prostitution tout en préférant faire travailler d'autres jeunes femmes pour elle, surveillait également son activité. Leur frère G______ amenait des femmes en voiture de Roumanie pour D______.

a.b. La police a effectivement constaté que ce dernier se trouvait régulièrement à proximité du 8______, au volant d'un véhicule de marque Q______. Des moyens techniques ont été placés pour sonoriser ledit véhicule à partir du
27 août 2018 et les raccordements utilisés par A______ (1______) et D______ (2______) placés sur écoute.

Les mesures susmentionnées ont permis de corroborer en grande partie les déclarations de la jeune femme et de constater l'existence, à Genève, d'un réseau roumain de prostitution dans lequel étaient impliqués D______, G______ et A______. Ceux-ci logeaient, en compagnie de diverses prostituées, notamment K______ et M______, toutes deux d'origine roumaine, dans un petit appartement de deux pièces sis à AU______[GE], duquel A______ était sous-locataire depuis le 1er juillet 2017 et dont le loyer s'élevait à CHF 1'850.-. Celle-ci était titulaire d'un permis B et percevait une aide sociale de l'Hospice générale à hauteur de CHF 2'600.- environ par mois.

Z______, laquelle se prostituait également, et AB_____, un cousin de la fratrie G______/A______, logeaient également à l'appartement de AU______[GE].

a.c. Le 24 septembre 2018 à 6h, la police a perquisitionné le logement de AU______[GE], saisi divers documents et téléphones et interpellé puis auditionné les personnes susmentionnées. Le véhicule Q______ a également été saisi. Il sied de préciser qu'au jour des débats d'appel, les frais de fourrière se montaient à
tout le moins à CHF 6'800.-.

b.a. Selon les rapports de police, les divers moyens d'enquête mis en œuvre ont permis d'établir que K______, âgée de 22 ans, était officiellement "la fille" de D______ et M______, âgée de 21 ans, celle de G______. D______ et G______ agissaient avec les jeunes femmes à la manière des "Loverboy", soit en leur faisant croire qu'ils les aimaient et qu'ils souhaitaient fonder une famille avec elles. Ils profitaient de leur vulnérabilité, mêlaient des phases d'affection à des phases de menaces, de violence, de surveillance et de pression constante pour inciter ces dernières à gagner plus d'argent et s'emparer de l'entier de leurs gains. Les jeunes femmes, de leur côté, ne réalisaient pas être exploitées, en raison de la banalisation de ce phénomène au sein de leur communauté. Les discussions suivantes ont notamment été mises en évidence :

b.b.a. D______ :

-       il définit le lieu de prostitution de K______ et de M______, leur indiquant leur place précise respective (enregistrement n° 357 du 2 septembre 2018 à 17h18 ; n° 873 du 13 septembre 2018 à 19h55). Il explique sa stratégie de placement à G______ (enregistrement n° 579 du 8 septembre 2018 à 12h01) ;

-       il véhicule K______ sur son lieu de travail au 8______ et lui indique qu'il attend d'elle qu'elle gagne CHF 1'000.- (4 août 2018 à 15h52) ;

-       il l'encourage à être "au taquet" sur le 8______, car ils n'ont plus d'argent (30 août 2018 à 22h15) et qu'il en a besoin notamment pour s'acheter de la cocaïne (15 septembre 2018 à 23h05). Il l'encourage à travailler plus tard car c'est à ces heures-ci que "leurs bites se lèvent car ils étaient à la discothèque" (16 septembre 2018 à 02h57) ;

-       il lui demande régulièrement combien elle a gagné (14 septembre 2018 à 14h49 et 18h06, 16 septembre 2018 à 00h54, 18 septembre 2018, 19h14) et lui demande de ne pas rester longtemps avec les clients et d'envoyer un message après une passe (messages du 3 septembre 2018) ;

-       il la félicite quand elle gagne bien, lui dit qu'il l'aime, qu'elle est maligne, mais lui rappelle de ne pas parler au téléphone (17 septembre 2018 à 23h32) ;

-       le 22 septembre 2018 à 00h06, il veut qu'elle garde la communication pour qu'il entende la discussion avec un client. Il veut savoir ce que celui-ci a comme voiture afin de décider si elle doit accepter la passe. Elle finit par refuser car le client ne propose que 50.- ;

-       le 8 septembre 2018 à 01h05, D______ s'énerve lorsque K______ lui dit avoir refusé une proposition de sexe anal "pour 500", mais il finit par passer à autre chose, précisant qu'il ne veut pas qu'elle parle trop fort au téléphone ;

-       il s'énerve quand elle lui dit qu'elle aimerait rentrer en raison de douleurs menstruelles et lui dit de faire autre chose pour contenter les clients, qu'elle n'a pas besoin de se frotter à eux. Il lui suggère également de mettre des préservatifs dans le vagin pour éviter les écoulements. Alors qu'elle lui indique que ce n'est pas une bonne idée, D______ s'énerve et lui rappelle que tout le monde les entend et lui demande si ce qu'elle souhaite c'est rentrer à la maison. Elle explique à plusieurs reprises que ce n'est pas ce qu'elle veut mais qu'elle a trop mal. Il lui demande alors de s'arrêter "car on dirait un appareil" et l'informe qu'il l'appellera plus tard (31 août 2018 à 23h56) ;

-       il récupère K______ en voiture et elle lui remet immédiatement l'argent gagné en lui demandant si c'est bien (enregistrement n° 393 du 4 septembre 2018 à 01h32). Elle ne dispose pas librement de son argent et demande à D______ la permission de faire un achat (enregistrement n° 1111 du 17 septembre 2018 à 02h19) ;

-       K______ admet ne pas avoir gagné de gros montants mais indique avoir travaillé jusqu'à 03h30. D______ lui reproche d'avoir refusé un client qui lui aurait permis de gagner plus. Elle se justifie par le fait que l'intéressé voulait une relation anale (enregistrement n° 571 du 8 septembre 2018 à 03h36) ;

-       D______ explique à K______ qu'il l'aime, qu'il souhaite fonder une famille avec elle, avoir un enfant, qu'il agit dans leur intérêt et qu'il ne s'agit aucunement de proxénétisme. Elle doit apprendre à être une vraie femme et se donner de la peine pour sa famille. Il n'aimerait surtout pas devenir méchant et la quitter si elle le décevait (enregistrement n° 205 du 30 août 2018 à 21h15) ;

-       il la pousse à travailler plus pour gagner d'avantage, lui dit qu'elle ne rentrera plus à la maison si sa belle-sœur la dépasse et l'insulte, la traitant de "pute" et affirmant qu'il "baise les morts de ta mère" (16 septembre 2018 à 18h44), "j'introduis ma bite dans tes parents, dans ta sœur et dans vos enfants" (enregistrement n°1340 du 18 septembre 2018 à 20h47) ;

-       K______ lui répond "tu ne fais que hurler, crier, mettre ta bite dans la bouche de ma mère, de ma sœur, de mon père, moi je n'ai jamais parlé de cette façon des tiens" (conversation du 18 septembre 2018 à 23h02) ;

-       D______ pousse K______ à travailler plus en la comparant à AA_____. Avant il gagnait beaucoup d'argent avec une autre fille. Il lui reproche de n'aller travailler en France que si A______ y va aussi et d'avoir cassé les prix en Suisse, si bien qu'il n'a même plus d'argent pour payer le loyer car il a été un peu fou. Elle était trop puérile (enregistrements n° 364 du 2 septembre 2018 à 17h55; n° 387 du 3 septembre 2018 à 21h17) ;

-       K______ est motivée à tout faire pour gagner de l'argent pour D______ (enregistrement n° 379 du 3 septembre 2018 à 01h58). Ce dernier ajoute que c'est lui qui la "saute" et que donc c'est lui qui commande (n° 395 du 4 septembre 2018 à 01h38). Elle est déterminée à surpasser AA_____, la "salope", aux gains et acceptera n'importe quel tarif. Elle était "raide dingue" de lui et ne pouvait pas vivre sans lui (n° 695 du 11 septembre 2018 à 01h42; n° 827 du 12 septembre 2018 à 21h55). Elle s'imagine qu'ils mettront de l'argent de côté pour acheter une "maison plus grande" (n° 696 du 11 septembre 2018 à 02h03) ;

-       K______ exprime à D______ son amour et son désir pour lui. Tout ce qu'elle faisait était motivé par ses pensées pour lui. De son côté, D______ la rejette (enregistrement n° 475 du 5 septembre 2018 à 21h16) ;

-       D______ explique à K______ qu'il ne la regardait pas comme une pute mais comme son épouse, avec qui il voulait construire un avenir, mais il fallait qu'il puisse avoir confiance. Elle devait se considérer comme privilégiée qu'elle soit la seule "qu'il saute". Suite à ce discours, elle lui indique qu'elle va se rendre en France et au 8______. D______ conclut la discussion en lui assénant qu'une femme, lorsqu'elle veut avoir une famille, se donne la peine pour faire du blé (enregistrement n°849 du 13 septembre 2018 à 01h42) ;

-       le 10 septembre 2018, à 17h20, il lui reproche de ne pas avoir nettoyé la maison ;

-       le 18 septembre 2018 dans la soirée (21h51, 22h15 et 23h02), D______ et K______ se disputent car elle a contacté sa mère en lui racontant qu'il lui prenait tout son argent. D______ lui dit qu'elle doit quitter la maison et K______ veut rentrer auprès de sa famille. Le 22 septembre à 00h06, les deux se sont réconciliés et K______ veut à nouveau "faire du fric" pour eux et ils s'échangent des mots doux ;

-       D______ explique à une tierce personne qu'il se "fout de [l]a gueule" de K______ (enregistrement n° 872 du 13 septembre 2018), qu'il la frappe tout en l'amadouant pour qu'elle aille travailler :"J'ai la Roumaine-là, mais elle, si je ne lui parle pas gentiment, elle ne sort pas bosser. Je te jure! Elle ne sort pas bosser! Je dois l'amadouer, je dois lui sourire [ ]" (enregistrement n° 193 du 30 août 2018 à 15h) ; "Regarde ma folle! Si tu savais ce que je fais avec elle! Elle se donne de la peine pour me faire 300 par jour, ici en France, [ ] puis à Genève, je la passe à tabac! Et l'affaire marche, mon cousin!! Elle gagne du fric! [ ]" (enregistrement n° 872 du 13 septembre 2018) ;

-       il explique chercher des prétextes pour ne pas entretenir de relations sexuelles avec K______, tout en lui promettant de le faire quand ils auront une maison, de l'espace (enregistrement n° 886 du 14 septembre 2018) et qu'il a hâte de se débarrasser d'elle (enregistrement n° 294 du 1er septembre 2018) ;

-       il "la laisse [le] sucer une fois par semaine" ; "elle est folle de moi, je te jure!" (enregistrement n° 872 du 13 septembre 2018 à 19h25) ;

-       il explique à une tierce personne être énervé contre K______ qui ne ramène pas assez d'argent et indique qu'il va "sortir [s]a bite, lui pisser dessus et lui mettre le feu" (enregistrement n° 1340 du 18 septembre 2018 à 20h47) ;

-       G______ et AB_____ parlent de la tactique de D______ de traiter K______ tantôt bien, tantôt mal (enregistrement n° 1221 du 17 septembre 2018 à 13h39) ;

-       plusieurs enregistrements (n° 1102 du 17 septembre 2018 à 01h50 ; n° 1388 du 20 septembre 2018 à 11h15) font référence au fait que D______ a frappé K______.

b.b.b. D'après les rapports de police, même si M______ était officiellement "la fille" de G______, il ressortait des enregistrements que D______ avait joué un rôle actif dans la soumission et la gestion de M______. Il lui expliquait, d'une part, qu'elle avait de la chance d'avoir rencontré son frère qui cherchait réellement quelqu'un (enregistrement n°139 du 29 août 2018 à 16h17) et d'autre part, il l'amadouait en lui faisant lui-même des avances (enregistrement n° 141 du 29 août 2018 ; enregistrement n° 673 du 10 septembre 2018). En discutant avec une tierce personne, il évoquait ses plans au sujet de M______, qu'il appelait "la moche", ne sachant pas si cette dernière devrait commencer à travailler en France ou à Genève, dès lors qu'elle ne disposait pas de ses documents d'identité (enregistrement n° 144 du 29 août 2018 ; enregistrement n° 193 du 30 août 2018 à 15h).

b.b.c. G______ :

-       G______ explique à une tierce personne qu'ayant été auparavant battue, tailladée, maltraitée, affamée et sans documents d'identité, M______ est facilement manipulable (enregistrement n° 603 du 8 septembre 2018 à 21h07) ;

-       il discute de ses plans au sujet de "sa fille" et considère qu'il faudrait investir pour son image car il la trouve moche, celle-ci ayant "des grands muscles et des poils sur le dos". Il aimerait bien qu'elle gagne de l'argent, 200, 300 ou 400, pour qu'il soit tranquille (enregistrement n° 579 du 8 septembre 2018) ;

-       il indique à son interlocuteur qu' "M______ doit aller apprendre le métier avec les autres filles" (enregistrement n° 1347 du 18 septembre 2018) ;

-       il répond au téléphone et encourage une femme pour qu'elle dépasse une autre et qu'elle fasse attention. Il échange avec D______ sur les montants qu'ils vont gagner ce soir-là (enregistrement n° 711 du 11 septembre 2018 à 17h38) ;

-       M______ exprime à G______ sa détermination à travailler et rapporter de l'argent (conversation du 19 septembre 2018 à 16h19 et 16h30) ;

-       alors que M______ est en pleurs et dit à G______ que depuis son arrivée, il a fait de sa vie un enfer, celui-ci n'arrête pas de lui dire qu'il va la tuer : "femme si tu n'es pas bonne, je te tue!! Je te réduis à zéro! [ ] je te tue! Maintenant je te tue! Je te mets la bite dans la bouche puis je te tue! [ ] je te baise" ou "je baise les morts de ta mère" et la traite de "bonne à rien". Avec lui, elle devait "être forte dans la chatte, ( ) être maligne, ( ) être comme il faut" (enregistrement du 18 septembre 2018 n° 1347 à 22h49) ;

-       après que AB_____ a suggéré à G______ d'offrir des fleurs à M______, celui-ci répond qu'il le fera quand elle sera "sous terre" (enregistrement n° 1364 du 19 septembre 2018 à 12h37) ;

-       il indique qu'il ne supporte plus M______. Il avait voulu la chasser de la maison, mais elle était gâtée, comme celle de son frère. Il l'avait "passée à tabac comme il faut" et il pourrait la frapper jusqu'à la mort (enregistrement n° 1345 du 18 septembre 2018 à 21h12) ;

-       lorsque M______ lui demande s'il regrette de l'avoir maltraitée en lui serrant la mâchoire et en lui assénant un coup sur la tête, il lui répond que "la femme qui n'est pas frappée et insultée ne se sent pas femme [ ] et puis elle doit manger de la bite, c'est son devoir".

c. Selon les rapports de police, A______ jouait, quant à elle, un rôle important dans l'organisation de la fratrie : le 29 août 2018, elle avait pris contact avec M______ qui se trouvait alors à Zurich et avait organisé sa fuite et sa venue à Genève, avec l'aide de D______. Les 31 août et 7 septembre 2018, elle avait organisé des rendez-vous avec deux clients qui étaient venus chercher M______ à domicile. Elle se présentait comme confidente pour inciter les filles à se soumettre à ses frères et se prostituait à leurs côtés dans la rue, afin de les surveiller et les pousser à gagner un maximum d'argent. Les conversations suivantes ressortaient notamment de l'enquête :

-       le 27 août 2018, elle informe D______ que K______ a gagné CHF 130.- car elle-même avait attrapé deux clients et l'avait prise avec. Elle ajoute : "Mon Dieu le fric qu'on fait ici! J'ai mis l'accélérateur sur elle [ndlr : K______]! Elle ne sait rien faire!" ;

-       le même soir, elle explique à son compagnon, AC_____, se donner de la peine avec "la cinglée" (ndlr : K______) et explique qu'elle l'a emmenée "de force!" avec elle et lui a montré comment "on faisait le fric" car cette dernière ne gagnait rien si elle n'était pas là. Elle explique également que la jeune femme lui a remis tout l'argent qu'elle avait gagné avant qu'elle-même ne rentre ;

-       D______ et A______ discutent des tarifs minimaux, qui ne devraient pas être inférieurs à CHF 50.- voire CHF 40.-. K______ réplique que A______ l'a encouragée à "aller pour 30" (enregistrement n° 1102 du 17 septembre 2018 à 01h50) ;

-       dans une conversation du 11 septembre 2018, A______ félicite K______ lorsque celle-ci lui dit qu'elle aura "fait 300", alors qu'elle-même n'a "fait que 80". K______ charrie alors A______ en lui disant qu'elle ne drague pas et lui explique comment faire. L'intéressée lui écrit qu'elle "fai[t] chier avec ses sms" ;

-       le 23 septembre 2018, A______ se renseigne auprès de G______ pour savoir si K______ est rentrée de France et ce qu'elle a fait. G______ lui répond qu'elle n'a rien fait et qu'elle est "au 8______". Il l'informera si K______ a fait quelque chose ;

-       le 22 septembre 2018, A______ se plaint auprès de G______ qu'elle ne supporte plus Z______ ni AB_____, car ils ont fait du pognon, mais "ils font chier pour le loyer qu'ils doivent lui payer" ;

-       ce même jour, M______ appelle A______ pour lui dire qu'elle a fait de l'argent. Cette dernière lui demande si les autres filles sont aussi au travail et lui dit qu'elles ne devraient pas tarder, dans la mesure où K______ lui avait dit qu'elle n'avait gagné que CHF 150.- ;

-       A______ conseille à K______ de laisser D______ tranquille quand il est nerveux, de ne plus se moquer de lui et "d'accepter sagement" ce qu'il lui disait (enregistrement n° 1123 du 17 septembre 2018 à 02h35) ;

-       le 19 septembre 2018, K______ se plaint à A______ que D______ l'a de nouveau battue parce qu'elle avait parlé à sa mère. K______ lui dit qu'elle aimerait partir. A______ la réconforte en lui disant que son frère serait triste si elle partait mais qu'il ne voulait pas le montrer ;

-       K______ appelle A______ pour lui expliquer que finalement elle va rester car D______ lui a promis d'arrêter la drogue et de voir AA_____, et qu'elle-même a bloqué les contacts avec sa mère, ce à quoi A______ répond que c'est très bien (21 septembre 2018 à 16h04) ;

-       le 22 septembre 2018, elle dit à K______ que l'important pour elle est d'avoir sa propre famille et de se battre pour elle-même. Cela passait avant ses parents ;

-       le 19 septembre et le 21 septembre 2018, A______ rassure la mère de K______ en lui affirmant que celle-ci va bien et qu'elle peut partir quand elle veut. Son frère l'avait sauvée des gitans. Juste après leur dernier échange, A______ écrit à son compagnon : "Attends il y a la maman de K______ qui me fait chier" ;

-       dans une conversation du 20 septembre 2018, M______ explique à A______ que G______ s'est fâché suite à la forte dispute entre K______ et D______ et avait demandé à K______ et à elle-même de faire leurs bagages et de partir en Roumanie. Toutefois, celui-ci parlait beaucoup mais faisait peu. A______ rigole quand M______ l'informe que D______ a également frappé G______ lors de la dispute ;

-       ce même-jour, M______ discute avec A______ du fait qu'elle cache à G______ accepter des relations sans préservatif, car elle a failli se faire gifler par ce dernier pour cette raison. A______ lui dit d'accepter de telles relations pour CHF 50.-. Lorsque M______ dit qu'elle ne peut pas cacher un seul sou à G______, A______ lui répond que ce ne serait pas bien de faire cela ;

-       elle la rassure sur le fait qu'elles se font toutes battre et que "là où il te frappe, il t'embrasse", "il te bat, il te baise!" (conversation du 21 septembre 2018) ;

-       le 23 septembre à 22h53, K______ se plaint d'avoir travaillé toute la nuit. Elle se donnait de la peine pour accomplir quelque chose, fonder une famille et avoir une maison, alors que, de son côté, D______, qui lui disait l'aimer, ne faisait que lui dire d'aller travailler, sans penser à elle, alors que lui s'amusait. A______ la rassure en lui disant que si elle souhaitait partir, elle pouvait le faire. Elle lui conseille d'aller se coucher ;

-       le même jour, A______ indique à M______ ne pas supporter K______ et espère la voir partir au plus vite ;

-       D______ explique à AB_____ que la présence de A______ sur place avec les filles permet de garantir que ces dernières "fassent du fric" (enregistrement n° 875 du 13 septembre 2018 à 21h29) ;

-       D______ indique à K______ qu'elle doit se soumettre également à A______, même si c'est en fait lui qui commande parce que c'est un homme. Il mentionne à plusieurs reprises son respect indéfectible pour sa sœur qui est sa "cheffe" et qui s'est débrouillée seule à Genève (enregistrement n° 1007 du 15 septembre 2018 à 22h14) ;

-       D______ et K______ évoquent l'idée de faire tomber un client âgé amoureux d'elle pour en tirer beaucoup d'argent. Elle ne devait parler de ce plan à personne d'autre, sauf à A______ (enregistrement n° 1287 et 1288 du 18 septembre 2018 à 00h06 et 00h14).

d. D'après les rapports de police, il ressortait également de l'enquête que D______ et G______ agissaient ou avaient agi de la sorte avec plusieurs autres filles et étaient conscients de l'illégalité de leurs agissements. Les éléments suivants ont mis en évidence :

-       D______ explique à AB_____ "avoir deux filles" à son service. Il compte avoir plusieurs femmes qui travaillent pour lui, mais jamais pour longtemps. Il convient en effet de se débarrasser des filles assez vite en simulant une soi-disant fin de relation, en les renvoyant chez elles tout en leur disant qu'il leur a fait un grand bien (enregistrement n° 200 du 30 août 2018 à 16h26) ;

-       D______ et AB_____ aimeraient dix femmes qui bossent pour eux en France et à Genève, soit cinq chacun, et s'imaginent ce que cela pourrait rapporter en un mois, voire en deux semaines (enregistrement n° 1009 du 15 septembre 2018 à 23h11) ;

-       D______ explique que "la Roumaine" fait tout quand il lui en donne la permission. Lorsque son interlocuteur lui fait remarquer que, si elle fait une passe sans protection, elle ne pourra plus aller avec un autre, D______ répond qu'il "ne les garde pas longtemps" (enregistrement n° 875 du 13 septembre à 21h29) ;

-       il explique à A______ qu'il va faire un tour au bord du lac avec "I______" et qu'ensuite il l'envoie travailler (conversation du 27 août 2018, 22h02) ;

-       il raconte à AB_____ avoir "amené O______ en Suisse" et qu'ils avaient "bossé les deux". Il s'était senti trahi lorsqu'elle l'avait quitté et avait emmené l'argent avec elle, le laissant comme un chien (enregistrement n° 1013 du 16 septembre 2018 à 00h12) ;

-       il évoque ses débuts dans les affaires de ce genre lorsqu'il n'avait qu'une seule fille à prostituer et indique qu'il a maintenant "cinq bons morceaux" (enregistrement n° 989 du 14 septembre 2018) ;

-       il réfléchit sur la façon d'amener d'autres femmes à travailler pour lui (enregistrement n° 634 du 9 septembre 2018 ; n° 1013 du 16 septembre 2018) ; il faut selon lui "toujours gérer la femme par les paroles" (enregistrement n° 872 du 13 septembre 2018) ;

-       dans une conversation du 29 août 2018 à 17h10, AA_____ dit à D______ qu'elle s'est bien occupée de lui et qu'elle lui a apporté des femmes et que maintenant il doit s'occuper de ses affaires ;

-       D______ évoque son "activité" qui comprend un "gros risque avec la police" (enregistrement n° 952 du 15 septembre 2018 ; n° 1345 du 18 septembre 2018 ; n°1340 du 18 septembre 2018 à 20h47 ; n° 1251 du 17 septembre 2018) ;

-       G______ explique à AB_____ qu'il a acheté une "bombe" roumaine pour CHF 600.- pour son frère, qui lui avait demandé de lui trouver une fille, mais celle-ci s'était enfuie. Ils s'accordent à dire qu'il faut leur donner de l'attention et les "sauter" ainsi que leur "raconter des histoires, [ ] parfois leur en mettre une, l'insulter [ ]" (enregistrement n° 920 du 14 septembre 2018 à 17h59) ;

-       G______ évoque sa crainte de ne plus pouvoir rester en Suisse un jour et précise qu'eux aussi vont "au boulot comme des macros" (enregistrement n° 1298 du 18 septembre 2018) ;

-       avant, il "avait I______" et il l'accompagnait au travail en bus car il voulait éviter d'attirer l'attention avec des voitures extravagantes (enregistrement n° 1298 du 18 septembre 2018 à 08h31) ;

-       G______ et D______ se disputent suite à l'arrestation de ce dernier au volant d'une voiture. G______ lui reproche son comportement qui risque d'attirer l'attention de la police sur eux. Ils avaient parlé de "faire quelque chose avec ces femmes en Suisse et non pas dépenser comme des fous pour boire et faire n'importe quoi juste pour attirer la police". Plus tard, il ajoute que, s'ils en sont arrivés à penser aux "putes" avec leur cœur, cela veut dire qu'ils sont "complètement finis" (enregistrements n° 1452 du 21 septembre 2018 à 04h00 ; n° 579 du 8 septembre 2018) ;

-       G______ précise avoir fait la manche lorsqu'il n'avait "plus de femmes" (enregistrement n° 1226 du 17 septembre 2018 à 15h15) ;

-       G______ regrette d'être intervenu lors de la dispute entre K______ et D______. Il s'était interposé pour éviter que ce dernier n'ait des ennuis avec la police mais il aurait dû encourager à "aller dans la bite" et à "tout lui enlever", ainsi ce dernier l'aurait tuée, serait allé en prison et il l'aurait bien mérité. G______ craint que K______ parte suite à cet épisode, ce qui était dommage car elle ramenait beaucoup d'argent (enregistrement n° 1388 du 20 septembre 2018 à 11h15) ;

-       G______ précise dans la même conversation avoir été chassé injustement de la maison par son frère, celui-ci lui reprochant de ne pas ramener d'argent à la maison, alors qu'il n'en ramenait pas lui-même. G______ s'en était sorti en amenant des femmes qui avaient travaillé pour lui ;

-       D______ et G______ écoutent fréquemment des chansons en roumain de AE_____, dont D______ affirme que des femmes travaillent effectivement pour le précité en Suisse (enregistrement n° 1004 du 15 septembre 2018 à 21h02). Le titre "BE______" parle de gagner de l'argent en faisant se prostituer des femmes en Suisse tout en leur faisant croire à l'amour :"tu aimerais ______ ou une ______[marques automobiles], amène-là bosser à l'étranger et mens à la folle que tu lui organiseras une grande fête de mariage. Tu verras son envie de travailler à fond " (enregistrement n° 681 du 10 septembre 2018 à 23h25) ; "monsieur le procureur, je suis innocent il l'aime il ne pense même pas à se conduire en maquereau je n'ai pas fait de trafic de personnes, ni de blanchiment d'argent le fric que je possède, cela provient uniquement de la musique" (enregistrement n° 874 du 13 septembre 2018 à 20h25).

d.a. Selon les constatations policières, l'argent issu de la prostitution de femmes en Suisse était notamment destiné à financer le train de vie de la fratrie et la rénovation de leur maison en Roumanie. Les éléments suivants ont été relevés :

-       G______ parle de la construction de la maison et insiste sur la manière dont l'argent doit être gagné, soit avec des femmes (enregistrements n° 603 du 8 septembre 2018 à 21h07 ; n° 1452 du 21 septembre 2018 à 4h) ;

-       D______ estime avoir besoin de CHF 200.- à CHF 300.- par jour pour ses besoins, soit sa drogue et ses "clopes". En outre, il venait de prendre quinze boîtes de matériel de construction, ce qui portait le total à trente-deux boîtes. Il voulait construire une maison sur trois niveaux, destinée à tous, afin que personne ne dise plus qu'ils étaient pauvres. Personne ne connaissait son projet, hormis ses frères. Il veut encore envoyer 5'000.- la semaine suivante (13 septembre à 21h29). Le 14 septembre 2018, à 00h22, évoquant où était parti "l'argent des putes", il dit que, "des EUR 30'000.-, [il] a bouffé EUR 15'000.- ( ) et le fric pour la maison" et qu'il aimerait s'acheter une ______ ou une ______ [marques automobiles] ;

-       il explique son souhait de s'acheter une voiture avec l'argent de K______ : "si ma folle commence à bosser je vais changer de voiture" (enregistrements n° 998 du 15 septembre 2028 à 18h54 ; n° 1010 du 15 septembre 2018 à 23h41) ;

-       D______ parle avec un certain BF______ de la maison qu'il veut faire construire, qui comportera onze ou douze chambres. G______ avait envoyé des factures à A______ à ce sujet (enregistrement n° 193 du 30 août 2018 à 15h) ;

-       D______ et G______ discutent de montants importants à envoyer au pays pour avancer dans la construction. G______ propose de payer le maître du chantier en décembre et de gérer le projet là-bas, en gagnant l'argent grâce aux femmes. Ils sont d'accord sur le fait que leur projet doit rester secret (enregistrement n° 603 du 8 septembre 2018) ;

-       D______ indique à AB_____ éprouver des sentiments pour AA_____, avec qui il dépense beaucoup d'argent et qui dispose de CHF 30'000.- environ qu'elle a confiés à sa tante. Celle-ci lui avait déjà donné CHF 16'000.- en trois fois. Il espère lui prendre encore 10'000.- ou 15'000.- pour avancer la construction de la maison (enregistrement n° 200 du 30 août 2018) ;

-       Dans une conversation du 27 août 2018 A______ explique à AC_____ qu'elle est fâchée de se donner de la peine et du fait que K______ ne gagne pas d'argent si elle ne la surveille pas, alors que D______ est amoureux de AA_____. Cela ne la regardait toutefois pas, ce qui l'intéressait c'était de terminer la maison. Elle est contente d'avoir démarré les travaux ;

-       Le même jour, elle indique à AF_____ qu'elle n'est pas d'accord de toucher aux économies pour la maison afin de récupérer la voiture si bien qu'elle était allée travailler avec K______ ;

-       Elle explique à AC_____ qu'avec l'argent qu'ils font, ils vont pouvoir commencer la construction de la maison (conversation du 22 septembre 2018).

d.b. L'examen du téléphone de A______ a permis la découverte d'une photographie d'une quittance du 12 septembre 2018 émise par la société AG_____ au nom de G______ pour du matériel de construction à AX______, pour la somme de RON 4'000.-, soit environ CHF 1'000.-.

En outre, une facture de la société AG_____, à AX______, au nom de G______, pour un montant de LEI 7'999.-, soit environ CHF 2'000.-, a été retrouvée dans l'appartement de AU______[GE].

e. Il ressort encore de l'enquête que G______ a accompagné M______ à la police pour obtenir un document attestant la perte de sa carte d'identité. Il avait eu l'idée de déclarer le faux vol de la carte d'identité pour obtenir une attestation dans ce sens (enregistrement n°1389 du 20 septembre 2018 à 11h45) et lui avait fait répéter ce qu'elle devrait dire à la police (enregistrements n° 1346 du 18 septembre 2018 à 22h27 et n° 1347 à 22h49).

f.a. Grâce aux informations fournies par les principaux organismes de transfert d'argent, il a pu être établi que A______, G______ et D______ ont effectué de nombreux transferts d'argent entre janvier 2017 et septembre 2018 :

-     A______ a réalisé quarante-quatre transactions, pour un montant total équivalent à CHF 13'114.95. L'essentiel de ce montant a été transmis durant la période pénale à son compagnon AC_____ (CHF 4'731.65) et à D______ (CHF 3'713.40). Six transactions ont également été exécutées en faveur de G______ (CHF 595.-) ;

-     G______ a effectué neuf envois d'argent pour un montant total de CHF 2'898.45. Le bénéficiaire principal a été un oncle de la famille en Roumanie, AH_____. D______ (CHF 316.-), I______ (CHF 209.-) et AI_____ (CHF 110.-) ont également été reçus de G______. Celui-ci a été bénéficiaire d'onze envois d'argent, pour un montant total de CHF 2'973.45, principalement de AH_____
(CHF 1'969.-) ;

-     D______ a été bénéficiaire de vingt transactions pour un montant total de CHF 6'085.30, provenant essentiellement de A______
(CHF 3'713.40), entre les mois de décembre 2017 et d'août 2018. Il n'a envoyé que CHF 942.-, d'une part à AJ_____, le père de O______  (CHF 627.-), et d'autre part à AC_____ (CHF 315.-).

f.b. O______ a notamment effectué des versements en avril 2018 puis de nouveau en octobre 2018. Aucun versement n'est effectué sous son nom entre les mois de mai et d'octobre 2018.

f.c. Aucun versement n'est effectué sous les noms de K______, M______, I______ ou P______.

2)        O______

a. Devant la police et le MP, d'abord seule puis confrontée aux prévenus, O______ a expliqué s'être mariée avec D______ en 2008 en Roumanie, puis avoir vécu une relation faite de hauts et de bas durant près de dix ans, soit jusqu'en juillet 2018. Deux filles étaient issues de cette union, lesquelles vivaient avec sa mère en Espagne. Des rumeurs existaient depuis toujours sur le fait que D______ faisait travailler des filles dans la prostitution. Elle n'y avait toutefois jamais vraiment cru.

En 2017, alors qu'elle était séparée de D______ et qu'elle était en couple avec un nouveau compagnon, elle avait commencé à se prostituer en Espagne pour gagner plus d'argent, ce dont elle avait informé D______. Il lui avait répondu qu'il disposait lui-même de plusieurs filles qui faisaient tout pour lui et qu'elle devrait faire pareil.

Réconciliés à la fin de l’année 2017, il l'avait rejointe en Espagne, où elle avait fini par lui remettre tout l'argent issu de son activité de prostituée. A un moment donné, une dénommée P______ avait déposé plainte contre son frère Y______ à Genève. D______ et elle-même avaient alors pris la décision de s'y rendre pour qu'elle y exerce la prostitution et puisse payer les frais d'avocat de son frère. Elle a par la suite précisé qu'elle avait en réalité pris cette décision dans le but de reconquérir D______, qu'il se concentre sur elle et dans l'espoir qu'ils puissent bâtir une maison ensemble pour leurs enfants, ce qu'il lui avait affirmé.

Entre mi-mai et mi-juillet 2018, ils avaient vécu à l'appartement de AU______[GE]. Durant cette période, elle s'était adonnée à la prostitution, la journée en France, à BD______, et le soir à Genève, au 8______[GE], selon les horaires fixés par D______ et sous la surveillance de ce dernier. Quand elle travaillait au 8______, il la surveillait depuis un pont juste au-dessus et il était constamment en contact téléphonique avec elle, jusqu'à ce qu'elle ait un client. Elle devait le rappeler dès la fin de la "passe". Il l'amenait et venait la chercher en voiture où il récupérait directement tout son argent. Il ne lui disait pas combien elle devait ramener d'argent, mais à l'issue d'une journée de travail, il prenait son sac et comptait les préservatifs pour savoir combien de clients et d'argent elle avait fait. Il récupérait tous ses gains qu'il plaçait ensuite dans un portefeuille, rangé dans une armoire à l'appartement, auquel elle n'avait pas accès. Il le dépensait pour financer sa consommation de drogue, l'achat de voitures ou avec des femmes. Il n'envoyait rien à leurs enfants malgré ses promesses en ce sens. Elle-même ne pouvait s'acheter que le strict minimum. Elle n'avait pu utiliser l'argent qu'elle avait gagné pour les frais d'avocat de son frère qu'à une reprise. C'était la copine de son frère, AK_____, qui se prostituait également, qui s'en était chargé. O______ avait aussi envoyé de l'argent à ses enfants à une occasion, ce qui lui avait valu une ruade de coups de la part de D______. Il la frappait et l'insultait régulièrement quand il estimait qu'elle ne ramenait pas assez d'argent. D______ l'obligeait à aller travailler même lorsqu'elle se plaignait de douleurs gynécologiques, dus à l'avortement qu'elle avait subi peu de temps avant son arrivée à Genève. Il l’incitait également à prendre de la cocaïne pour la motiver à travailler davantage.

Lors de leur dernière dispute, D______ l'avait frappée très fort. Elle s'était enfuie de l'appartement et il l'avait rattrapée dans la rue en la menaçant de mort. Elle avait alors fini par le quitter car elle ne pouvait plus supporter ce traitement. Elle a varié dans ses explications s'agissant des dates exactes auxquelles elle l'avait quitté, rencontré son nouveau compagnon et cessé de se prostituer. Elle a également donné des explications confuses sur les raisons pour lesquelles, à une occasion, elle s'était rendue à l'appartement de AU______[GE] avec la somme de
EUR 10'000.- que lui avait donnée son nouveau compagnon et pour lesquelles elle avait affirmé qu'elle pouvait encore en obtenir davantage, déclarant d'une part qu'elle avait seulement prétexté cela pour éviter que D______ ne s'empare de cette somme, et d'autre part qu'elle avait apporté ce montant car elle ne faisait pas confiance en AK_____, chez qui elle était allée vivre.

Après que les enquêteurs lui ont expliqué le mode opératoire des "Loverboy", elle a confirmé que D______ avait agi de la sorte avec elle. Elle avait été bête car elle l'avait aimé mais lui non.

A______ était du côté de D______ et ne l'avait jamais défendue. Celle-ci ne lui procurait pas de client mais elle la surveillait dans le sens qu'elle était toujours à ses côtés, regardait ce qu'elle faisait et la conseillait sur la façon d'être avec les clients. A______ utilisait la belle apparence de D______ pour attirer des jeunes femmes roumaines afin qu'elles se prostituent pour elle. Ce dernier leur vendait du rêve, comme il avait agi avec elle. D______ faisait tout ce que sa sœur voulait. A______ avait "fini comme ça" à cause de ses frères. Celle-ci avait peur d'eux et était malade.

Elle ne connaissait pas K______ ni M______.

b. AL_____, frère de O______, entendu comme témoin par le MP de BC______ en Roumanie, a en substance confirmé les propos de sa sœur. Il a expliqué que D______ avait pris la décision de faire prostituer sa sœur à Genève car il ne gagnait plus d'argent avec les autres filles. Sa sœur envoyait en Roumanie au maximum EUR 500.- tous les deux ou trois mois.

c. AA_____, initialement entendue en qualité de prévenue, a expliqué que D______ avait toujours été gentil avec elle. Elle ne travaillait pas pour lui et ne lui avait jamais donné d'argent, à l'exclusion d'une somme de CHF 500.- qu'elle avait prêtée à A______ et que D______ lui avait remboursé avec l'argent gagné par K______. D______ avait fait venir beaucoup de filles pour que celles-ci se prostituent pour son compte, soit O______ , K______, M______ et Z______ qui travaillait pour AB_____. Lorsqu'elle avait demandé à A______ pourquoi elle continuait à se prostituer vu son état de santé, cette dernière lui avait répondu qu'elle devait y aller pour surveiller K______, M______ et Z______. D______ lui avait également répondu qu'elle n'avait pas le choix car, si elle ne les surveillait pas, les filles ne faisaient rien. Elle a expliqué que tous les roumains se comportaient comme des "Loverboy", en séduisant les filles et en leur promettant de construire une maison et de vivre plein de beaux rêves. Mais ensuite ils n'accomplissaient rien et les femmes se sentaient obligées de travailler pour faire vivre le couple. Elle-même avait vécu cela avec son ancien compagnon, AM_____, et remettait tout son argent dans un grand porte-monnaie. C'était pour cette raison qu'elle ne souhaitait plus se mettre en couple avec un roumain. Elle s'était faite frapper à une reprise par un homme qui faisait venir trop de femmes dans la rue et qui cassait les prix si bien qu'elle avait désormais peur de parler.

d. Devant la police et le MP, D______ a confirmé que O______ avait logé à l'appartement de AU______[GE] et s'était prostituée durant la période pénale reprochée mais a expliqué que celle-ci avait librement pris cette décision pour payer les frais d'avocat de son frère. Elle avait utilisé ses gains à cette fin. Elle lui avait effectivement donné de l'argent provenant de la prostitution, avec lequel il avait pu acheter de la drogue et payer les besoins courants de la famille. Il consommait régulièrement de la drogue, notamment avec "sa copine" AA_____. Il avait eu cinq ou six voitures bon marché depuis qu'il se trouvait en Suisse, soit pendant cinq mois sur l'année écoulée. Il vivait grâce à l'aide de sa sœur et de petits travaux au noir. Il avait acheté la voiture Q______ saisie et figurant à l'inventaire deux mois avant son interpellation, pour CHF 1'500.-.

Il montrait à O______ les endroits où elle devait se prostituer et fixait ses horaires. Il lui avait amené un client ou deux à la maison. Elle connaissait elle-même les tarifs. Il lui était arrivé de la frapper "comme chaque homme qui frappe sa femme", suite à ses paroles ou à cause de la jalousie, mais pas parce qu'elle ne gagnait pas assez d'argent. Il avait pu la frapper lorsqu'elle avait eu des relations sans préservatif. Suite à l'affirmation de O______ selon laquelle, quand elle s'était prostituée à AW______[ESP], c'était déjà dans le but de le garder, il a affirmé qu'ils étaient alors séparés et qu'elle avait un autre copain. Il a admis que O______ souffrait de douleurs gynécologiques mais sa famille ne l’avait pas dissuadée de se prostituer en Espagne. Elle consommait déjà de la cocaïne avant de venir en Suisse.

A l'audience de jugement, D______ est revenu sur ses dires affirmant qu'il n'avait pas profité des gains de O______, lesquels représentaient entre CHF 200.- et CHF 300.- par jour. Il vivait uniquement grâce à l'argent de sa sœur. L'argent issu de la prostitution de O______ était remis dans un "pot commun" destiné à payer les besoins courants et le loyer. Comme elle vivait dans l'appartement de A______, il était normal qu'elle participe au paiement d'une partie du loyer et aux frais généraux.

Les propos tenus par O______ était mus par la vengeance car elle pensait qu'il avait encouragé P______ à déposer plainte contre son frère.

Il a contesté avoir effectué des transferts d'argent à des tierces personnes. Il ne se souvenait pas de la raison pour laquelle il en avait fait un en faveur de AK_____ par T______ et a contesté les explications de son frère selon lesquelles ce versement était pour "l'achat de la maison en Espagne".

e. A______ a expliqué que O______ se prostituait car elle aimait ça. Après l'arrestation de Y______, D______ lui avait demandé d'accueillir la famille de O______ chez elle. O______ s'était alors prostituée pour donner de l'argent à sa mère.

f. G______ a confirmé les propos de sa sœur et a précisé que la famille O______ était la mafia, pas eux. Pour sa part, il n'avait amené aucune femme en Suisse ni acheté une femme roumaine pour son frère pour la somme de CHF 600.- malgré les enregistrements en ce sens.

3)        K______ et M______

a. Interpellées le 24 septembre à 6h du matin et entendues séparément le même jour par la police et le MP, K______ et M______ ont toutes deux confirmé les éléments mis en évidence par l'enquête, soit qu'elles s'adonnaient à la prostitution et remettaient l'entier de leur revenu à leurs "hommes", soit respectivement D______ et G______. Elles ont également confirmé avoir été régulièrement insultées, menacées et battues par leur compagnon respectif. Elles ont déposé plainte pénale et civile. Elles n'ont pas été confrontées aux prévenus.

b. K______ a précisé qu'alors qu'elle était forcée à se prostituer pour le compte de AN_____, elle avait fait la connaissance de "I______", soit AA_____, qui lui avait lavé le cerveau pour qu'elle déménage chez D______, en lui assurant qu'elle ne souffrirait plus car celui-ci ne battait pas les femmes. Il avait même dit à sa mère qu'il ne laisserait plus personne l'amener à se prostituer. Elle avait alors commencé à travailler pour lui, la journée en France, puis le soir au 8______, gagnant entre CHF 300.- et CHF 700.- par jour. Elle devait remettre son argent à D______ en rentrant. Elle devait aussi accomplir les tâches ménagères à l'appartement et payer une partie du loyer. Pour payer le dernier loyer, elle avait dû mettre son téléphone en gage. Au début, tout s'était bien passé. D______ lui avait affirmé qu'ils allaient vivre ensemble, construire une très grande maison avec l'argent qu'elle gagnait et fonder une famille. Quand elle avait compris que D______ et AA_____ formaient un couple, celui-là avait commencé à la battre sans raison ainsi qu'à la menacer de temps en temps. D______ lui mettait la pression pour qu'elle gagne plus que "la moche", soit M______. Elle était libre de refuser certaines pratiques ou les clients de couleur. Elle ne pouvait toutefois pas refuser pour d'autres motifs, par exemple si elle était fatiguée. Elle devait en revanche accepter des relations non protégées, lorsqu'elles étaient payées plus chères. D______ l'insultait fréquemment de manière très violente, il "baisait sa mère". A une occasion, il l'avait frappée à coups de poing sur la nuque, car elle refusait de se rendre au travail, et une seconde fois avec une canne dans le dos et le bas du dos. Celui-ci l'aurait probablement tuée si les autres n'étaient pas intervenus. Elle s'était échappée de l'appartement à ce moment-là mais était finalement revenue car les autres l'avaient convaincue de rester. Elle avait alors cru D______ lorsqu'il lui avait affirmé qu'il allait quitter "I______" et lui avait promis de changer. Elle avait beaucoup pris sur elle car elle aimait D______, alors que tout ce qui l'intéressait était son argent. Il lui disait des mots doux uniquement quand elle avait gagné de l'argent. Elle n'avait pas fui car il gardait tout son argent et qu'elle avait peur de ses menaces. D______ lui avait souvent proposé de prendre de la drogue, expliquant que cela lui permettrait de gagner plus d'argent, mais elle avait toujours refusé. Lui-même se droguait grâce à son argent à elle.

A______ l'avait bien traitée. Celle-ci lui avait appris à se taire lorsque D______ haussait la voix ou la frappait. A______ accompagnait les filles en France, les observait et les contrôlait, sans elle-même travailler la plupart du temps. Elle récoltait l'argent gagné pour qu'il ne soit pas saisi sur les filles. Elle les poussait à travailler mieux, pour gagner plus d'argent. Elle leur expliquait ce qu'il fallait faire ou ne pas faire avec les clients et combien demander pour chaque client. Cela allait de CHF 20.- à CHF 50.- maximum.

G______ frappait et insultait constamment M______. Celle-ci avait très peur de lui. Il lui mettait beaucoup de pression pour qu'elle ramène de l'argent qu'il conservait totalement par devers lui.

c. M______ a expliqué qu'elle avait été vendue pour CHF 600.- par son ancien compagnon à une famille roumaine résidant à Zurich. Privée de ses papiers d'identité et en ayant marre de ne pas gagner d'argent, elle avait écrit un message demandant de l'aide à ses contacts FACEBOOK dont faisait partie G______. Celui-ci lui avait répondu, avait été gentil et lui avait proposé de rejoindre sa famille, à Genève, ce qu'elle avait accepté. Le 29 août 2018, elle avait pris le train jusqu'à Berne puis D______ et A______ étaient venus la chercher en voiture. Elle avait alors commencé à se prostituer pour G______. Lorsqu'elle revenait du travail, elle déposait l'argent sur la table, sans savoir qui le prenait. A une reprise, A______ lui avait organisé un rendez-vous avec un de ses clients. Elle avait gagné CHF 50.- à cette occasion et remis cette somme à G______. Elle était sa femme, et il lui avait dit qu'ils allaient fonder une famille et construire une maison ensemble, si bien qu'il était normal qu'elle lui remette son argent. G______ lui avait juré qu'il n'allait pas la quitter si elle ne le trompait pas et qu'elle était "bonne". Depuis son arrivée, elle avait gagné entre EUR 3'000.- et EUR 3'500.-, que G______ avait envoyés en Roumanie. Auparavant, il jouait de la guitare pour gagner de l'argent, mais il ne le faisait plus et restait à la maison. Il vivait grâce à l'argent qu'elle et K______ gagnaient. Elle avait finalement compris qu'il ne s'intéressait qu'à l'argent et la poussait toujours à faire plus. Il l'avait encouragée à entretenir des relations non protégées. Avec K______, elles avaient envisagé la possibilité de fuir en Roumanie, lasses de travailler sans pouvoir jamais profiter de leur argent. Elle ne disposait toutefois pas de ses papiers d'identité. Elle avait compris que si elle partait, elle ne reverrait pas son argent. G______ avait cherché à l'isoler, en bloquant un message de son père. Lorsqu'elle avait voulu envoyer de l'argent à sa famille, il lui avait dit que celle-ci était morte. Il insultait son enfant et la tapait régulièrement. Il l'avait également menacée de la jeter d'un pont. Elle n'avait toutefois pas vraiment peur de lui. Il se comportait en général bien avec elle, sauf quand elle ne ramenait pas assez d'argent.

Elle considérait A______ comme sa sœur. Celle-ci se prostituait avec elle en France, mais ne travaillait pas beaucoup car les clients ne la choisissaient pas. Le prix des passes était décidé après discussion entre les filles.

D______ avait frappé K______ à une reprise en sa présence. Il lui avait asséné des coups de poing dans les côtes et dans le dos et l'avait projetée contre une table. K______ était une victime, car elle éprouvait des sentiments pour D______ et lui donnait tout son argent en pensant qu'elle avait un avenir avec lui. En réalité, ce dernier dépensait tout l'argent de K______ avec sa copine "I______". Il lui faisait d'ailleurs croire que c'était sa sœur. Elle-même en revanche n'était pas une victime.

A une occasion, G______ avait eu l'idée qu'elle dépose une fausse plainte pour vol à la tire dans le but de justifier le fait qu'elle ne disposait plus de ses papiers d'identité.

d. Devant le MP de BC______, Roumanie, AP_____, mère de M______, a expliqué qu'elle ne connaissait pas les frères D/G______. En septembre 2018, sa fille l'avait appelée. Celle-ci venait de s'enfuir, avec une autre fille, de l'appartement de deux frères qui les forçaient à se prostituer. Elle ne l'avait pas crue, car sa fille avait l'habitude de mentir, mais l'autre fille avait confirmé ses propos. Les deux femmes semblaient avoir été battues. Le visage de la femme qu'elle ne connaissait pas présentait des ecchymoses. Sur planche photographique, elle a possiblement reconnu K______. Elle avait bloqué sa fille sur les réseaux sociaux car elle se portait mieux ainsi. Elle avait refusé de parler à d'autres personnes qui étaient entrées en contact avec elle au sujet de M______.

e. Egalement interpellée à l'appartement de AU______[GE] le 24 septembre 2018, Z______ a expliqué à la police que G______ et D______ ne gagnaient pas d'argent et que c'étaient leurs femmes qui faisaient. Elle n'avait rien à dire de particulier sur ces derniers et ne s'occupait que de ses propres affaires. Elle a confirmé ses déclarations devant le MP le même jour.

f. Après avoir contesté l'essentiel des faits reprochés, D______ a reconnu devant le MP, que depuis qu'il était à Genève, trois femmes avaient successivement travaillé "pour lui" en se prostituant, dont K______. Il conduisait les filles sur leur lieu de travail et les surveillait, notamment depuis un pont au-dessus du 8______. Il ne les avait toutefois pas exploitées. Elles avaient été ses petites amies, l'une après l'autre, et l'argent gagné était pour les deux. Il appelait régulièrement les filles par téléphone pour vérifier qu'elles ne se fassent pas agresser par "d'autres garçons". Peut-être qu'il comptait les préservatifs à la fin d'une journée de travail, mais pas pour vérifier l'argent remis. Il a nié avoir eu cinq filles qui travaillaient pour lui malgré les enregistrements figurant au dossier ; il ne s'agissait que de vantardise. Son frère et sa sœur n'avaient rien à voir avec son activité.

Il a également admis avoir profité des sentiments, non réciproques, de K______ à son égard pour lui donner envie de se prostituer et gagner de l'argent. Il lui demandait de gagner plus pour payer le loyer. Tous les gains de K______ étaient toutefois placés dans un porte-monnaie dans l'appartement, auquel tout le monde avait accès. Il ne lui avait jamais rien interdit et elle pouvait utiliser l'argent qu'elle gagnait pour ses besoins personnels, soit pour aller chez le coiffeur ou se faire les ongles. Elle travaillait tous les jours, sauf lorsqu'elle avait ses règles par exemple ; il a ensuite admis lui avoir demandé de s'introduire un préservatif dans son orifice vaginal, pour qu'elle puisse travailler pendant ses règles. Il a contesté avoir encouragé K______ à accepter des relations non protégées.

Il avait bien frappé K______ car elle ne lui obéissait pas et lui avait répondu.

M______ était exploitée par son frère qui était un "proxénète" comme lui. Il lui avait appris comment il devait se comporter avec la jeune fille. Elle n'avait pas commencé à travailler avant l'arrivée de son frère à Genève. Elle avait effectivement reçu un client de A______ dans l'appartement et déposé sur la table l'argent que sa sœur avait pris pour acheter des cigarettes et des effets pour tout le monde. Il n'avait lui-même jamais profité de l'argent gagné par M______. Il a ensuite contesté avoir employé le terme de "proxénète" pour parler de son frère, il l'avait utilisé pour lui-même.

Il a nié construire une maison à AX______ avant de reconnaître l'existence d'un tel projet mais c'était surtout sa sœur qui y avait contribué, lui-même dépensant l'argent que K______ gagnait pour sa consommation de stupéfiants. Grâce à l'argent gagné par K______, M______ et sa sœur, il avait payé un entrepôt à AX______ pour stocker du matériel de construction.

Il avait de la peine pour sa sœur et se sentait mal de lui avoir demandé de l'informer de l'activité de K______. A______ ne s'était jamais montrée violente envers les filles.

g. G______ a initialement contesté l'ensemble des faits reprochés. Lui-même vivait de la mendicité, pouvant gagner emtre CHF 50.- et CHF 60.- par jour et ne savait rien des activités des autres personnes vivant sous le même toit que lui.

Confronté aux éléments du dossier, il a admis que M______ se prostituait mais que c'était elle qui avait décidé librement de mettre à profit de leur couple le produit issu de la prostitution. Il n'avait pas profité des sentiments de M______ à son égard dans la mesure où il n'était pas possible de tomber amoureux de quelqu'un en dix jours. Il éprouvait de réels sentiments envers M______ malgré les enregistrements et conversations figurant au dossier, et l'avait sauvée de la famille qui l'exploitait à Zurich. Il l'avait "à peine prise" si bien qu'il ne comprenait pas pourquoi il finissait en prison.

Il l'avait effectivement giflée à une reprise car elle avait dit préférer renoncer à lui plutôt que d'arrêter la prostitution. Malgré les enregistrements figurant à la procédure, il ne l'avait pas "passée à tabac" ; il ne s'agissait que de vantardise et cela ne correspondait pas à la réalité. Il a précisé que chez les gitans, il fallait frapper et insulter la femme, autrement elle ne se sentait pas valorisée. Il a finalement admis lui avoir asséné un coup de poing au niveau de la tête et l'avoir menacée de l'abandonner dans la rue sans un sou.

M______ et K______ étaient au courant de leur projet de maison en Roumanie, lequel n'était nullement secret. Il a admis que l'argent gagné par M______ était placé dans un "pot commun". Il avait envoyé la somme de CHF 2'000.- en Roumanie pour acheter du matériel de construction et déposé CHF 4'000.- dans l'entrepôt de AX______ mais il s'agissait de l'argent gagné par A______ et de celui qu'il avait récolté de la mendicité, étant précisé qu'il gagnait entre CHF 70.- et CHF 100.- par jour.

M______ et lui s'étaient mis d'accord pour annoncer aux autorités qu'elle avait perdu ses documents d'identité. Confronté à la conversation n° 1389 du 20 septembre 2018, à 11h45, où il se vante d'avoir eu cette idée, il a affirmé : "vous avez toutes les preuves, je reconnais tout". Il est ensuite revenu sur ses dires, déclarant qu'il avait été d'accord de déclarer le vol des papiers d'identité de M______ à la police, mais il s'agissait de son idée à elle. Elle avait déjà perdu ses papiers en Italie et était plus au fait des procédures que lui.

h. A______ a dans un premier temps contesté l'ensemble des faits reprochés avant de reconnaître, au vu des éléments de l'enquête, que l'entier de l'argent de K______ et de M______ allait dans la poche de ses frères. Elle les avait effectivement surveillées et incitées à gagner plus d'argent mais elle avait été manipulée par ses frères qui la frappaient et dont elle avait peur. D______ l'avait battue à plusieurs reprises. Il l'obligeait à surveiller K______ et à lui rapporter l'activité de cette dernière.

Elle est ensuite revenue sur ses déclarations et a indiqué qu'en réalité elle ne surveillait pas les filles ni les encourageait à gagner plus d'argent. Elle avait simplement dit à ses frères ainsi qu'à son compagnon ce que ces derniers voulaient entendre. Parfois, elle disait des choses parce qu'elle était énervée mais les enregistrements ne correspondaient pas à la réalité. D______ lui avait de temps en temps asséné une gifle parce qu'elle n'était pas d'accord avec "ce qu'il faisait".

Ses frères n'avaient mis que CHF 500.- ou CHF 600.- pour la maison à AX______. Elle avait payé la majorité des matériaux. Elle avait envoyé CHF 3'000.- en tout grâce à l'argent de l'aide sociale et de ses activités de prostituée. Elle n'avait jamais touché à l'argent des filles car elle n'en avait pas besoin : elle payait le loyer grâce à sa subvention et, avec les CHF 600.- qui restaient, elle payait la nourriture. Elle a ensuite expliqué qu'elle-même se prostituait car elle avait besoin d'argent pour acheter la nourriture. Elle ne gagnait toutefois pas beaucoup car elle avait des problèmes de santé, d'une part, et il y avait des filles plus jeunes et plus jolies qu'elle, d'autre part.

4)            I______

a. Au mois de juin 2017, I______ a été amenée à l'appartement de A______, maltraitée et exploitée sexuellement par X______, un cousin de la fratrie. Malgré le départ de ce dernier quelques semaines plus tard, I______ a continué à loger à l'appartement de AU______[GE] et, du mois de juillet 2017 au 2 janvier 2018, s'est prostituée en remettant ses gains à G______.

b. Devant le MP de BC______[Roumanie], I______ a répondu aux questions de la procureure en charge du dossier et à celles écrites des avocats des prévenus. Elle a indiqué que dès le premier soir où elle s'était trouvée en Suisse, A______, qui passait pour une sorte de cheffe, lui avait organisé une rencontre avec un de ses bons clients et montré la couleur du billet qu'elle devrait recevoir. Lorsqu'elle avait dit ne jamais s'être prostituée de sa vie, X______ l'avait frappée et elle n'avait pas eu d'autre choix que d'accepter. Elle avait entretenu des relations sexuelles avec ce client et déposé sur la table les CHF 50.- reçus, lesquels avaient été pris par X______ ou A______. Celle-ci lui avait conseillé d'obéir si elle ne voulait pas souffrir comme d'autres filles avant elle. Par la suite, A______ voulait que X______ parte car son comportement impulsif pouvait leur causer des problèmes avec la police. Elle l'avait alors cachée chez la maman de AF_____ et lui avait demandé d'appeler X______ pour lui dire de la laisser tranquille. En échange, A______ allait l'aider à contacter ses enfants. Dès que X______ était rentré en Roumanie, A______ avait organisé un voyage en car pour G______, qui était arrivé à Genève deux jours plus tard. Au début, ce dernier l'avait bien traitée et lui avait parlé d'amener sa fille chez eux et d'avoir un enfant avec elle. Elle avait régularisé son droit de prostitution avec l'aide de A______ qui parlait le français et qui l'avait accompagnée au guichet. Elle avait alors exercé la prostitution selon un horaire de 21h à 6h durant trois mois. Durant cette période, elle pouvait gagner entre CHF 500.- et CHF 800.- par jour. G______ la conduisait sur son lieu de travail, soit au 8______[GE] et la surveillait à son insu. A______ l'accompagnait et la surveillait également. Tous deux lui avaient indiqué la façon dont elle devait se tenir. A______ lui avait demandé d'accepter les clients à n'importe quel tarif ainsi que les relations non protégées. Pendant les quatre mois suivants, G______ la faisait sortir tous les soirs sur le 8______, mais uniquement pour une heure ou deux. Elle a ensuite précisé que c'était uniquement le week-end. Comme elle gagnait moins, G______ avait commencé à la frapper. Elle avait perdu deux dents suite à des coups de G______ et de X______. Elle a également indiqué que A______ la battait quand elle ne gagnait pas d'argent avant de préciser que tel n'était pas le cas mais qu'elle incitait G______ à le faire. En tout, elle avait dû gagner CHF 20'000.-. Dès le début, G______ lui avait demandé de lui remettre l'argent qu'elle avait gagné, pour qu'ils économisent et achètent une maison à BB______. Il envoyait ainsi l'argent à son oncle en Roumanie en expliquant qu'il pouvait lui faire confiance. Sur ses gains, elle n'avait pu envoyer que l'équivalent de CHF 1'000.- pour ses enfants. Le reste avait été utilisé par la fratrie, pour le loyer, la nourriture, les téléphones ou les voitures. D______ qui ne faisait rien, à part dormir et sortir, finançait également sa consommation de stupéfiants grâce à ses gains. Elle n'avait pas le droit d'aller seule dans un magasin et devait demander à G______ lorsqu'elle avait besoin de quelque chose. A______ les avait mis à la porte au Nouvel-An 2018 car elle ne rapportait plus d'argent, et ils étaient partis en Roumanie. Elle a confirmé que A______ les avait également soupçonnés d'avoir volé de l'argent de la boîte où étaient remis les gains issus de la prostitution. Une fois en Roumanie, elle avait profité d'une visite à sa tante et sa fille, pour monter dans un taxi, sa tante criant pour éviter que G______ ne l'en sorte. Elle n'avait alors plus eu de contacts avec lui. Elle n'avait rien récupéré des sommes qu'elle avait gagnées en Suisse. Elle a varié dans ses explications s'agissant de sa pièce d'identité, indiquant qu'elle l'avait toujours à disposition puis que G______ la conservait dans son porte-monnaie. Elle a déposé plainte pénale et civile.

c. Devant le MP roumain, I______ a raconté le vécu de sa nièce. Celle-ci lui avait semblé contrôlée par G______. Avant son arrivée en Roumanie, sa nièce lui avait envoyé un message vocal par le biais d'une de ses cousines vivant en Italie, lui demandant de crier quand elle la verrait et ne plus la laisser partir, ce qu'elle avait fait.

d. Entendue comme témoin par la police, AF_____, amie de A______, a contesté qu'elle ou sa mère ait hébergé I______.

e. A______ a contesté les faits reprochés. Elle avait uniquement hébergé I______ et X______ à la demande de D______, qui l'avait giflée et obligée à accepter. Elle a concédé que I______, qui était arrivée chez elle en très mauvais état pesant entre 30 et 35 kg, avait commencé à se prostituer, un mois après sa venue. Celle-ci avait fait ce choix pour ses enfants, sa famille et G______ avec qui elle était en couple. Elle-même n'avait rien à y voir et n'avait pas profité de son argent. Elle et G______ avaient au contraire aidé la jeune femme en l'amenant chez le médecin et en lui donnant du Dafalgan. Elle a confirmé avoir mis G______ et I______ à la porte après l'épisode du Nouvel-An, car elle les soupçonnait d'avoir volé l'argent du "pot commun" destiné à payer le loyer. Après avoir été rendue attentive au fait qu'il était question à plusieurs reprises dans la procédure d'achats de matériaux de construction, elle a indiqué qu'ils n'avaient pas été achetés avec l'argent de I______.

f. D______ a confirmé les propos de sa sœur quant au fait qu'il l'avait obligée à accepter la venue de X______ et I______ chez elle. Il a également admis avoir été violent à l'encontre de sa soeur. X______ s'était très mal comporté envers I______, qui n'avait plus voulu continuer cette relation. Constatant son triste état de santé et son aspect cadavérique, lui-même et A______ avaient eu pitié d'elle. Il s'était disputé avec X______ à ce sujet. Celui-ci était parti après trois semaines. I______ avait voulu rester. Il n'avait pas profité de l'argent ramené par I______. Il avait bien perçu des virements T______[service de transfert d'argent] de la part de sa sœur entre décembre 2017 et le 10 octobre 2018. Il savait que son frère était alors en couple avec I______ et qu'il en était très amoureux.

g. G______ a expliqué être venu en Suisse pour la première fois en 2017. Il faisait alors des allers-retours entre la Suisse et la Roumanie en raison de ses rendez-vous médicaux. Il y était ensuite resté au moment de "l'épisode avec les filles".

Il reconnaissait tout s'agissant de I______. Il était malade et voulait en finir avec cette procédure et savoir le plus vite possible à quoi il allait être condamné. Il avait rencontré I______, alors que celle-ci logeait chez sa sœur, avec X______. Le jour du départ de ce dernier, ils avaient caché I______ dans la voiture de D______ car elle avait peur, ou elle était droguée. Il avait ensuite vécu une "soi-disant histoire d'amour" avec la jeune femme. Elle était droguée et très faible, il s'en était occupé et l'avait "engraissée". Il l'avait aidée à régulariser sa situation pour qu'elle puisse se prostituer légalement. Ils avaient décidé ensemble qu'elle se prostituerait pour sa famille et pour lui, ce qu'elle avait fait dès le mois de juillet 2017. Il a varié dans ses déclarations au sujet des horaires pratiqués par I______ et des gains réalisés par celle-ci pour finalement indiquer qu'il l'emmenait se prostituer pendant cinq ou six heures par jour à partir de 22h00, et même si le chiffre de CHF 20'000.- de gains avancé par la jeune femme lui faisait mal à la tête, il s'en rapportait aux déclarations de celle-ci. Avec cet argent, il s'était occupé de I______ et avait envoyé à plusieurs reprises de l'argent à la tante de celle-ci, y compris des colis transportés en car. Quand elle ne se prostituait pas, ils se promenaient et faisaient du shopping. Il n'avait pas décidé de la façon dont I______ exerçait la prostitution, ne lui avait pas interdit de sortir seule, n'avait pas recouru à la violence à son encontre, ne l'avait pas menacée, ne la contrôlait pas, ni ne lui avait fait croire à la construction d'une maison familiale où ils vivraient tous les deux. Il n'avait jamais été confronté à I______, qui avait pu prétendre n'importe quoi. Il a ensuite reconnu l'avoir peut-être frappée à une reprise mais ne lui avait pas cassé les dents ; elles étaient "pourries" à cause de la drogue.

Elle avait finalement profité de leur voyage en Roumanie pour le quitter, en se jetant dans un taxi avec sa tante à qui ils étaient allés rendre visite. Il ne comprenait pas pourquoi elle avait attendu trois ans et son arrestation pour déposer plainte. A______ n'avait rien à voir avec tout cela. Ils n'avaient pas peur les uns des autres dans la fratrie. Peut-être A______ avait-elle eu peur quand D______ était drogué, au regard de son absence de raisonnement.

Interrogé sur les versements effectués durant la période pénale à AH_____, G______ a confirmé qu'il s'agissait de son oncle. Concernant ceux effectués à un certain AI_____, il a expliqué qu'il s'agissait d'un voisin à AX______ qui payait l'électricité de leur maison.

5)        P______

a. A la fin de l'année 2017, P______ a été amenée dans l'appartement de A______ par Y______ qui la maltraitait et l'exploitait sexuellement. Après quelques semaines, celui-ci est parti en Espagne et, encouragée par A______, P______ a déposé plainte à son encontre le 27 mars 2018. La jeune femme a continué à se prostituer et à vivre dans l'appartement de A______ durant plusieurs semaines avant de rencontrer son compagnon et d'emménager chez lui.

b. Entendue seule devant la police et le MP, puis confrontée à A______, P______ a expliqué qu'après le départ de Y______, elle avait continué à se prostituer et à remettre ses gains à ce dernier par l'intermédiaire de A______ jusqu'au dépôt de plainte. Par la suite, elle avait continué à remettre son argent à cette dernière, laquelle lui avait expliqué être une mère pour elle et l'avait encouragée à continuer à se prostituer pour elles deux, car elle était malade et que l'argent manquait pour payer le loyer. La précitée lui avait également affirmé qu'elle garderait son argent en sécurité pour éviter qu'elle ne se le fasse voler et qu'elle allait envoyer des colis à sa fille et économiser pour la faire venir à Genève, mais cela ne s'était jamais concrétisé. Elle laissait ses gains sur une petite table à l'entrée du domicile. A______ déposait ensuite l'argent dans une boîte rouge. A la suite de l'épisode du Nouvel-An 2018, elle-même et A______ avaient travaillé pour compenser le vol d'argent de ladite boîte. Celle-ci lui avait également trouvé deux ou trois clients et avait alors fixé les prix. Elle ne lui avait pas imposé de pratiques à risque mais lui avait conseillé d'aller avec des clients à prix cassé. Elle ne savait pas si A______ la surveillait. Elle pouvait sortir pour s'acheter certaines choses, mais pas tous les jours et toujours accompagnée de AR_____, le fils de A______. Au mois de juin 2018, elle était partie pour aller vivre chez un client, qui le lui avait proposé. A______ s'était fâchée et ne lui avait jamais restitué l'argent qu'elle avait gagné entre le mois de février et le mois de juin 2018, soit un peu plus de
CHF 20'000.- (après déduction de ce qu'elle avait pu envoyer en Espagne et les quelques habits bon marché qu'elle s'était achetés). P______ a déposé plainte pénale et civile pour ces faits.

c. A______ a expliqué que tout le monde savait que P______  était très mal traitée par Y______. Elle l'avait encouragée à appeler la police et à déposer plainte. Après quoi, l'argent que toutes les deux gagnaient était mis dans la même boîte. Elle a admis que la boîte en question contenait tout l'argent du loyer et que suite à l'épisode du vol d'argent de ladite boîte au Nouvel-An 2018, elles avaient toutes les deux travaillé pour compenser ce vol. P______ pouvait utiliser librement son argent pour sortir ou se payer des choses. Elle ne se rappelait pas combien la jeune femme avait gagné mais le montant de CHF 20'000.- ne correspondait pas à la réalité.

C.       Procédure d'appel

1)      Le Ministère public

Aux débats d'appel, le MP persiste dans ses conclusions. Il fallait aller un cran plus haut que le jugement de première instance. Le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) du Conseil de l’Europe avait rendu un nouveau rapport en 2019 qui recommandait aux autorités suisses de prendre rapidement de nouvelles mesures pour améliorer l’identification et la protection des victimes ainsi que la poursuite des auteurs de traite. Le MP avait par ailleurs acquis la conviction sincère et intime que chacune des plaignantes avait été victime de traite, y compris O______. La thèse de la vengeance de la part de cette dernière n'était pas plausible. Elle n'avait pas pu tout inventer, étant relevé qu'elle avait été la première à dénoncer les faits, que K______ et M______ avaient été réveillées par la police et entendues dans la foulée, qu'elles ne connaissaient pas les autres plaignantes et que celles-ci racontaient toutes la même histoire. Elles étaient des jeunes femmes vulnérables, prêtes à s'accrocher à la première marque d'affection. Se prostituant déjà, elles représentaient par ailleurs une aubaine pour les prévenus. Toutes s'étaient laissées convaincre par les prévenus car elles entrevoyaient un avenir. O______, malgré le fait qu'elle était l'épouse légitime de D______, n'avait pas été mieux traitée. Elle était également vulnérable car elle rêvait de voir sa famille réunie, ce que D______ savait. Quand celui-ci avait appris qu'elle se prostituait en Espagne, il y avait vu une nouvelle source de revenus. Il était alors facile pour lui de jouer la corde sensible de la famille et de profiter des sentiments qu'elle éprouvait pour lui. Il avait ainsi organisé sa venue à Genève au mois de mai 2018, en lui chantant l'amour alors qu'il était amoureux de AA_____ et en lui faisant croire qu'il économiserait pour leur famille et maison, étant précisé qu'elle avait été la première à en parler et ce que toutes les autres avaient ensuite confirmé. Comme les autres femmes, il la frappait, l'insultait, la menaçait et la surveillait, avec l'aide de A______, dans le but de la garder docile et qu'elle rapporte un maximum d'argent. Même après sa rupture avec D______, elle lui avait montré qu'elle avait gagné CHF 10'000.- et fait miroiter que son client allait lui en donner encore plus, avant d'enfin réussir à couper les liens avec lui lorsqu'elle s'était mise en couple avec son nouveau compagnon. Toutes les jeunes femmes étaient restées mesurées dans leurs propos, ce qui les rendaient d'autant plus crédibles. Si O______ avait parfois peiné à répondre aux questions en cours de procédure, il fallait relever qu'elle avait été mise à rude épreuve pendant les audiences, bafouée, insultée et menacée par les prévenus. Il existait dès lors un faisceau d'indices permettant de conclure à la véracité des allégations de l'ensemble des jeunes femmes. Il était par ailleurs compréhensible que celles-ci ne se soient pas présentées à l'audience de jugement ou aux débats d'appel, craignant les représailles. Elles savaient que même depuis la prison ils pouvaient les atteindre, étant relevé que AC_____ et AR_____ étaient libres.

Tant D______ que G______ étaient dénués de toute parcelle d'humanité. Ils flairaient les bonnes affaires et réduisaient leurs victimes au statut de "machine à fric". Les enregistrements permettaient de constater que tous deux s'étaient comportés de façon exécrable avec K______ et M______. Si D______ avait indiqué en cours de procédure avoir montré à son frère comment faire pour exploiter M______, il ressortait du dossier que ce dernier avait sévi auparavant avec I______. Si D______ avait également confirmé les déclarations de sa sœur selon lesquelles il l'aurait terrorisée, ce n'était pas non plus ce qui ressortait du dossier. Il apparaissait que D______ avait été désigné comme étant le responsable par ses frère et sœur mais que ceux-ci n'étaient pas plus humanistes que lui. A______ avait élevé D______. Elle était maligne et connaissait le fonctionnement des autorités suisses. Elle avait une canne qu'elle sortait pour les grandes occasions. Elle avait trouvé un mari pour obtenir un permis et disposait d'un logement officiel. Elle avait ainsi fourni la logistique, en hébergeant ses frères et les jeunes femmes. Elle était gentille avec ces dernières, entretenant ainsi le mythe de la famille, se présentant comme une mère ou une sœur, cela dans l'unique but de s'enrichir, pour la fameuse maison de AX______[Roumanie]. Toutes les déclarations des jeunes femmes étaient concordantes sur ce point : leurs gains étaient remis dans une boîte et servaient à financer le train de vie de la fratrie et à payer le loyer. S'agissant plus particulièrement de I______ et P______, c'était A______ elle-même qui avait chassé respectivement X______ et Y______ pour s'en prendre directement à ses proies. C'était la cheffe.

Les frères D/G______ avaient ainsi agi à la façon des "Loverboy, qui constituait l'un des modes opératoires des auteurs de traite selon le site Internet de FEDPOL, et s'étaient partant rendus coupables de traite d'êtres humains en coactivité, y compris A______ qui était le "chien de troupeau" de l'organisation.

Le fait que les jeunes femmes disposaient de leurs documents d'identité n'était pas pertinent, puisque fuir ne représentait pas un choix acceptable, étant isolées, sans ressource financière, régulièrement battues et menacées. Si de l'argent avait de temps en temps été envoyé à la famille des victimes, cela faisait partie du processus pour les amadouer et les maintenir dans un climat de soumission. Le fait que les jeunes femmes s'étaient parfois acheté quelques vêtements bon marché, rendues à la manucure ou chez le coiffeur ne signifiait pas qu'elles pouvaient disposer de leur argent. Il s'agissait d'un investissement car elles devaient être rentables.

L'argent issu de la traite des victimes avait été utilisé pour acheter des matériaux de construction et des transferts, étant relevé que les prévenus n'avaient pas d'autres sources de revenus à part l'aide sociale de A______, laquelle était juste suffisante pour payer son loyer et subvenir à ses propres besoins. Il ressortait également du dossier que les revenus de la prostitution de cette dernière n'étaient pas élevés. Les prévenus s'étaient dès lors également rendus coupables de blanchiment d'argent.

Enfin, en amenant les jeunes femmes sur leur lieu de travail, qui était défini par les prévenus, en les surveillant constamment par téléphone ou depuis un pont, en les encourageant à accepter toutes sortes de pratiques et à rester travailler tard alors que celles-ci souhaitaient rentrer et en leur organisant des rendez-vous avec des clients à domicile, ils s'étaient rendus coupables d'encouragement à la prostitution (art. 195 let. c CP) en concours réel parfait avec la traite d'êtres humains, étant relevé qu'un bon "Loverboy" pouvait amener sa victime à se prostituer et à lui remettre ses gains sans avoir besoin de la surveiller.

S'agissant de la peine, la faute des prévenus était extrêmement lourde. Ils avaient traité les victimes comme des "machines à fric" et ne leur avaient rien épargné. Ils leur avaient tout enlevé, à part la vie. Ils avaient eu plusieurs victimes successives et organisé les rôles de façon à ponctionner au mieux leurs gains. Leur prise de conscience était nulle. La Suisse n'entendait pas tolérer que des femmes soient traitées de la sorte sur son territoire et il fallait envoyer un signal fort, en prononçant des sanctions dissuasives et proportionnées.

Enfin, la voiture Q______ de D______ était le "véhicule de l'horreur". Il avait été utilisé pour commettre les infractions par l'ensemble des prévenus, leur ayant permis de surveiller les victimes. Or, les instruments internationaux prévoyaient la confiscation de l'instrument destiné à la commission d'infractions, dont la traite. Il fallait ainsi le confisquer en vertu de l'art. 69 CP.

2.        A______

a. Aux débats d'appel, A______ a expliqué que la seule chose qu'elle se reprochait était d'avoir hébergé l'ensemble des jeunes femmes, lesquelles s'adonnaient à la prostitution. Elle ne les avait nullement surveillées ni ne leur avait appris quoi que ce soit, dès lors qu'elles se prostituaient depuis longtemps.

Elle avait accepté d'héberger K______ et M______, car il s'agissait des copines respectives de ses frères et elle ne voulait pas passer pour une méchante en refusant. Il lui était arrivé de rapporter à D______ ce qu'avait gagné K______, à la demande de ce dernier, mais il ne s'agissait pas de surveillance. Les Roumaines qui se prostituaient devaient dire à leur homme ce qu'elles avaient gagné, cela était tout à fait normal. Elle n'avait en revanche jamais cautionné ce que D______ avait fait avec M______.

Elle avait du mal à avoir les idées claires mais a concédé, sur question, que M______ s'était peut-être prostituée avec BA______, un de ses anciens clients. Elle ne les avait toutefois pas présentés. Ceux-ci s'étaient vus au 8______.

Elle avait également hébergé P______ car celle-ci était la petite amie de Y______. Elle a expliqué de façon confuse que ceux-ci n'avaient en fait pas logé chez elle, mais en France, et qu'elle s'était mise d'accord avec la jeune femme qu'après le départ de celui-là, elle viendrait vivre dans son appartement à AU______[GE]. Elle s'est également contredite en expliquant que P______  n'avait pas continué son activité de prostituée une fois hébergée chez elle puis que, malgré le souhait de la jeune femme d'arrêter la prostitution, elle avait tout de même continué. Elle ne l'avait toutefois aucunement encouragée.

I______ avait également logé chez elle à la demande de son frère G______. Il l'avait présentée comme sa femme, à savoir son épouse. Il l'avait vraiment aimée et l'avait aidée. Ni elle, ni G______ n'avaient joué de rôle en lien avec l'activité de prostituée de la jeune femme. A une occasion, elle lui avait effectivement organisé un rendez-vous avec un client, mais cela s'était produit bien après son arrivée chez elle. Elle ne les avait pas présentés, ils s'étaient rencontrés au 8______ au préalable.

Enfin, elle avait aussi hébergé O______ durant trois semaines ou un mois. Celle-ci se prostituait déjà en Espagne et c'était sa propre famille qui l'avait amenée à Genève pour qu'elle continue à se prostituer. Elle-même ne s'était pas prostituée aux côtés de O______, ne l'avait pas surveillée, ni n'avait rapporté à son frère comment se passait l'activité de cette dernière.

Elle n'avait nullement utilisé l'argent issu de l'activité des jeunes femmes. Les transferts d'argent qu'elle avait effectués, notamment pour la rénovation de la maison à AX______, provenaient de sa propre activité. Si G______ avait également effectué des transferts d'argent pour la maison, il fallait savoir que celui-ci mendiait. Quant à D______, il avait dépensé l'argent de K______ pour sa consommation de stupéfiants et pour leurs besoins personnels de couple.

A l'appartement, tout le monde vivait une vie normale. Les différents couples sortaient, s'amusaient ensemble et faisaient toute sorte d'activités. Il n'y avait eu ni coup ni insulte. En fait, il y avait eu des insultes mais pas des coups. C'était difficile de vivre aussi nombreux dans un si petit appartement, raison pour laquelle elle souhaitait se débarrasser de ses frères et de leurs conjointes, et vivre tranquillement avec son enfant.

b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions étant précisé qu'elle ne s'était pas rendue coupable de traite d'êtres humains mais éventuellement de complicité d'encouragement à la prostitution au sens de l'art. 195 let. b CP pour avoir mis à disposition son appartement, s'agissant des faits en lien avec les plaignantes K______, M______ et I______, et en qualité d'auteur s'agissant des faits en lien avec P______.

A______ avait en effet mis son appartement à disposition mais n'était pas une mère maquerelle. Elle n'était pas un élément essentiel dans la machination supposée mise en place par la fratrie. Avant l'obtention de son appartement au mois de juillet 2017, rien ne se passait. Tout le monde avait ensuite défilé chez elle, sans qu'elle ne puisse refuser. Elle avait certes renvoyé G______ en décembre 2017, mais il était revenu. Elle-même se prostituait par ailleurs et son frère D______ surveillait son activité. Il était en outre tout à fait normal pour elle que les jeunes femmes remettent leurs gains à leurs hommes. La limite c'était les coups et elle avait encouragé P______ à déposer plainte contre Y______.

Il y avait trop de zones d'ombre dans le dossier en raison de la problématique de la retranscription et de la traduction des écoutes au dossier pour retenir la traite d'êtres humains. Une défense efficace aurait nécessité d'écouter et de traduire toutes les conversations car certaines discussions à décharge avaient pu échapper aux enquêteurs. Sur cinq plaignantes, trois avaient en outre été entendues en huis-clos par la procureure. Il était difficile de s'imaginer ce qui se passait réellement dans l'appartement de AU______[GE] où les différents protagonistes interagissaient dans un monde d'hommes où les femmes étaient des servantes et se prostituaient pour les besoins de ceux-ci.

La traite d'êtres humains était vraisemblablement réalisée dans le cas de Y______ à l'égard de P______ mais ce n'était pas A______ qui devait être sanctionnée de ce chef. Avant le dépôt de plainte pénale le 27 mars 2018, P______ travaillait pour Y______, et A______ n'avait plus vu la jeune femme se prostituer après cette date, si bien que la période pénale retenue par les premiers juges à l'encontre de A______ posait par ailleurs problème.

I______ avait également été traitée comme un objet par X______. Elle avait en revanche livré des versions contradictoires s'agissant du comportement de A______ à son égard, déclarant que celle-ci lui avait immédiatement organisé un rendez-vous avec un client puis que c'était X______ qui le lui avait amené, ou encore que A______ la battait puis qu'en réalité tel n'était pas le cas mais qu'elle incitait G______ à le faire. Or aucune partie plaignante n'avait prétendu que A______ l'avait frappée. Tout n'était pas horreur. G______ et I______ se promenaient et pratiquaient toute sorte d'activités ensemble. Celle-ci était tout de même restée huit mois.

K______ avait été maltraitée par AN_____, un sinistre et monstrueux personnage, tandis que M______ se prostituait depuis l'âge de 13 ans, avait été vendue par son ancien compagnon et était exploitée par une famille à Zurich. Il était par ailleurs incompréhensible que la dénommée "I______" ne se trouvât pas sur le banc des accusés, puisqu'elle avait admis avoir surveillé K______. Les frères D/G______ n'avaient pas agi à la façon des "Loverboy" ni n'avaient pu mettre en place une machination en seulement trois semaines. Ils auraient d'ailleurs peut-être fini par tomber amoureux et construire quelque chose avec ces jeunes femmes.

O______ était bien une victime mais de D______, un pervers narcissique. On comprenait la colère de la jeune femme car il dépensait tout l'argent issu de la prostitution pour lui. Il était dès lors sain qu'elle ait déposé plainte. Cela dit, on ne disposait pas de tous les éléments. Autour d'eux gravitaient des amants et des maîtresses et O______ avait évoqué la fameuse "I______" dont D______ était amoureux. La théorie de la vengeance pouvait faire sens. O______ était en outre venue frimer au domicile des G______ avec EUR 10'000.- après avoir déposé plainte, ce qui était difficilement compréhensible. La situation était compliquée.

Aucun élément au dossier ne démontrait que A______ avait profité de l'argent des jeunes femmes dont elle n'avait pas besoin car elle se prostituait elle-même, si bien qu'elle devait également être acquittée du chef de blanchiment d'argent – infraction que A______ ne connaissait ni ne comprenait d'ailleurs. N'ayant en outre pas conscience d'avoir commis une infraction préalable, la prostitution étant pour elle légale, elle ne pouvait en tout état pas s'être rendue coupable de cette infraction.

La peine de cinq ans et demi prononcée en première instance était extrêmement lourde pour un rôle de complicité d'encouragement à la prostitution. A______ n'était pas la cheffe ni la manipulatrice que l'accusation dépeignait. Ainsi la circonstance aggravante du métier ou de la bande organisée était totalement farfelue. Il n'y avait pas de palace en Roumanie, mais seulement une maison délabrée. Les prévenus avaient peut-être envoyé CHF 2'000.- ou CHF 3'000.- pour financer des matériaux de construction mais on attendait mieux d'un réseau extrêmement bien organisé, comme le soutenait l'accusation. Du "pot commun" on ne savait pas quelles sommes A______ avait prélevées. La construction juridique retenue par les premiers juges, avec pour conséquence que A______ se voyait imposer une sanction plus lourde que ses frères, ne tenait pas. Elle avait quand même un cœur et une certaine morale, même si elle s'était montré malhonnête vis-à-vis de son frère en lui disant qu'elle avait besoin d'argent alors que son loyer était payé par l'Hospice général. Il fallait également prendre en compte ses problèmes de santé.

3.        D______

a. D______ a confirmé avoir pris la décision d'héberger K______ chez sa sœur. Il regrettait avoir trompé celle-ci sur ses sentiments à son égard et avoir profité de son argent durant les deux ou trois semaines qu'avait duré leur relation. Durant ce laps de temps, son intention était bien qu'elle gagne un maximum d'argent pour financer sa consommation de drogue, pour s'amuser et pour ses besoins. Il n'avait toutefois pas de glorieux projets d'enrichissement. Il ne lui avait pas mis la pression même s'il l'avait effectivement giflée à deux reprises lorsqu'elle n'avait pas ramené assez d'argent. Il a ensuite précisé qu'il l'avait giflée dans le cadre de disputes qui n'étaient pas liées à l'argent mais notamment à sa façon de lui répondre. Il ne l'avait pas forcée à se prostituer mais lui avait uniquement proposé de le faire. Il ne l'avait pas non plus hébergée dans cet unique but. Ils s'étaient plus réciproquement et avaient décidé de se mettre ensemble. Finalement cela n'avait pas marché et ils s'étaient séparés. Il était d'ailleurs prévu que K______ reparte en Italie. Tout le monde était au courant qu'il souhaitait rénover la maison familiale en Roumanie. Il reconnaissait toutefois avoir menti à K______. A______ n'avait joué aucun rôle dans l'activité de prostituée de la jeune femme. Il lui était arrivé de lui demander des renseignements à propos de sa journée de travail mais ni elle ni son frère n'avait profité de l'argent gagné par K______. Il l'avait lui-même dépensé en Suisse. Il ne voyait pas quel proxénète il aurait pu être en trois semaines, ni quelle grande richesse il aurait pu en tirer.

Il avait également pris la décision d'héberger O______ chez sa sœur, ayant l'habitude de prendre les décisions. C'était en revanche la famille de O______ qui avait décidé qu'elle se prostituerait à Genève. Il n'avait joué aucun rôle dans son activité de prostituée et ne l'avait jamais cautionné. Il ne lui avait pas fourni de clients à domicile. Elle avait remis tout l'argent issu de son activité de prostituée à sa mère et, après le départ de celle-ci, il avait utilisé l'argent de O______ pour acheter de la nourriture durant une petite semaine environ. Ils avaient également transféré de l'argent en Espagne pour leurs filles. Il n'avait jamais abordé le sujet de la maison en Roumanie avec O______. A______ et lui-même avaient décidé de la rénover quelques mois avant leur interpellation. C'était particulièrement sa sœur qui était concernée par le sort de la maison. Celle-ci n'avait joué aucun rôle dans l'activité de prostitution de O______. Il ne voyait pas comment il pouvait être un proxénète en trois semaines.

b. Par la voix de son conseil, D______ persiste dans ses conclusions étant précisé qu'il s'en rapporte à justice s'agissant d'une éventuelle condamnation pour encouragement à la prostitution en lien avec K______ et qu'il renonce à toute indemnisation au sens de l'art. 429 CPP en lien avec sa détention.

O______ n'était pas crédible et son absence aux débats le démontrait. Elle avait décidé de se prostituer en Suisse pour payer les frais d'avocat de son frère, ce qu'elle avait d'ailleurs fait. Elle avait toujours été libre et avait continué à se prostituer après sa rupture avec D______ comme en témoignait l'épisode des EUR 10'000.-. Elle avait déposé plainte par vengeance.

Les déclarations de K______ n'étaient pas plus vraisemblables, celle-ci ayant en particulier affirmé, en contradiction avec les éléments du dossier, ne pas avoir su qu'elle allait se prostituer en allant chez les G______. Elle souhaitait en réalité tout simplement un autre lieu pour continuer son activité. Elle n'était pas non plus crédible lorsqu'elle affirmait avoir voulu partir mais qu'elle ne le pouvait pas dès lors qu'il ressortait du dossier qu'après une dispute, D______ avait donné instruction à sa famille de la laisser partir et que A______ avait exprimé le fait qu'elle serait contente si elle partait. C'était elle-même qui avait ensuite décidé de rester. D______ ne l'avait pas retenue. Il ressortait en outre du dossier qu'elle avait économisé à hauteur de CHF 500.- et qu'elle disposait de ses documents d'identité. Elle avait ainsi la possibilité physique et financière de partir. Elle n'alléguait par ailleurs pas être restée par amour.

D______ ne s'était ainsi nullement rendu coupable de traite. Il n'avait pas agi à la façon d'un "Loverboy" n'ayant pas imposé peu à peu à sa victime la prostitution en la rendant d'abord dépendante sentimentalement. Il ne pouvait pas non plus être retenu qu'il avait réussi à faire croire à K______ à un avenir et une maison en Roumanie, en quelques semaines. Il ressortait du dossier qu'il ne lui avait mentionné la maison que très rarement. La jeune femme n'avait d'ailleurs pas allégué avoir cru qu'il mettait l'argent dans la maison. Au contraire, elle se plaignait qu'il dépensait tout pour sa consommation de stupéfiants, pour les femmes ou les voitures. Elle n'était par ailleurs pas une jeune femme vulnérable. Elle avait un fort caractère et le retard mental allégué n'était nullement confirmé au dossier. Ainsi, s'il lui avait fait croire à des sentiments, ce n'était pas de nature à porter atteinte à son autodétermination. Les deux épisodes de violence physique n'avaient pas non plus eu pour effet de la soumettre à se prostituer. Les disputes en question n'étaient pas en lien avec son activité de prostituée mais en raison de son comportement téméraire. La circonstance aggravante du métier ne pouvait nullement être retenue, dès lors qu'il souhaitait qu'elle parte et que rien au dossier ne permettait d'établir qu'il souhaitait la remplacer. L'ampleur des gains issus de la prostitution de K______ était inconnue. La courte période pénale permettait en outre d'exclure la circonstance aggravante du métier.

Il s'était en revanche bien rendu coupable d'encouragement à la prostitution dans la mesure où il avait surveillé l'activité de K______. La jurisprudence à ce propos faisait état d'une fourchette allant de six mois à quatre ans et demi de peine privative de liberté suivant la gravité des faits. L'on ne se trouvait toutefois ici nullement dans un cas d'hyper subordination où régnait un climat de terreur et de menaces. La jeune femme pouvait refuser des clients et certaines pratiques, comme les relations non protégées qu'il lui arrivait d'accepter selon le tarif offert par le client. D______ lui faisait certaines suggestions mais K______ avait la liberté d'accepter ou non et elle rentrait quand elle le souhaitait.

La faute de D______ était ainsi de peu de gravité. Il était par ailleurs à l'époque en dépression et sous l'influence de la drogue. Son attitude durant la procédure avait toujours été bonne, il avait bien collaboré et présentait un comportement exemplaire en prison. Enfin, il avait exprimé des remords, souhaitait tourner la page et travailler dans la restauration.

4.        G______

G______ a expliqué qu'il ne comprenait pas pourquoi il avait été condamné pour traite d'êtres humains dès lors qu'il n'avait amené personne en Suisse. Il aurait souhaité que les plaignantes soient présentes afin de pouvoir être confrontées à elles.

Il était arrivé en Suisse en juillet ou en août 2017. Il avait rencontré I______ alors qu'elle était logée chez sa sœur. Il n'avait pas eu de contacts préalables avec elle. I______ et lui-même avaient décidé ensemble qu'elle continuerait à être hébergée chez sa sœur après le départ de X______, car il la trouvait belle et qu'un lien s'était tissé entre eux alors qu'elle l'accompagnait dans son activité de mendiant. Après trois semaines ou un mois, ils avaient entamé une relation de couple et décidé d'un commun accord qu'elle se prostituerait pour subvenir à leurs besoins ainsi qu'à ceux de sa tante et ses enfants. Il ne l'avait pas obligée à le faire. Il était vraiment amoureux d'elle si bien qu'il ne lui avait pas menti sur ses sentiments. Il ne l'avait pas incitée à gagner un maximum d'argent ; ils avaient décidé de cela d'un commun accord. Ensemble, ils faisaient toutes sortes d'activités, comme jouer au foot ou au basket, se promener, manger des glaces, aller sur la grande roue. Il l'amenait chez le coiffeur, la manucure et dans le magasins deux fois par semaine. Puisqu'elle allait travailler, elle devait se faire belle, mais cela lui faisait également plaisir. Elle avait ses documents d'identité sur elle dès lors qu'elle se faisait régulièrement contrôler par la police. Elle avait tout loisir de se plaindre d'un éventuel mauvais traitement ou de rentrer en Roumanie, ce qu'elle n'avait jamais fait. Il avait été son maquereau mais ne savait pas ce que cela voulait dire et n'était pas en mesure de donner plus de détails à ce sujet.

Il avait été le sauveur de M______. Il comptait réellement fonder une famille avec elle même s'il ne voyait pas quel sentiment il aurait pu avoir envers elle en seulement dix jours ni comment il aurait pu lui faire croire qu'il en avait puisqu'elle se prostituait depuis l'âge de 13 ans. A la question de savoir s'il lui avait menti au sujet de la maison en Roumanie, il a demandé à quelle maison il était fait référence. Il avait compris de la procédure que l'on parlait d'une somme de CHF 4'000.- qui avait été transférée en Roumanie pour la rénovation de la maison, mais avec cette somme on pouvait à peine construire un WC. Il avait effectivement utilisé l'argent de M______, tout comme celle-ci avait utilisé son argent de la mendicité. Il ne l'avait pas menacée de la quitter ou de la laisser sans le sou si elle ne ramenait pas assez d'argent, malgré ses déclarations devant le TCO. Il l'avait giflée à une reprise lorsqu'elle avait refusé de cesser son activité de prostituée. Comme cela ressortait des enregistrements au dossier, il refusait qu'elle travaille sans préservatifs et lui en mettait toujours à disposition. Il n'avait pas été son maquereau, c'était plutôt elle qui avait été le sien, dès lors qu'elle connaissait mieux ce domaine que lui. Il se reprochait uniquement de l'avoir amenée à Genève. Il aurait dû la laisser à Zurich, elle s'y serait peut-être faite assassiner et il n'aurait pas été arrêté.

Il reconnaissait les faits d'instigation d'induction de la justice en erreur.

Sa sœur n'avait joué aucun rôle s'agissant de l'activité de prostituée de I______ ou de M______.

b. Par la voix de son conseil, G______ persiste dans ses conclusions et s'en rapporte à justice au sujet de l'infraction d'encouragement à la prostitution concernant les plaignantes M______ et I______. Il admet les conclusions civiles de M______ à hauteur de EUR 2'500.- pour la réparation du dommage matériel. Il acquiesce au versement, en la faveur de cette dernière, de CHF 500.- à titre de tort moral. Il admet les conclusions civiles de I______ à hauteur de CHF 5'000.- à titre de réparation du dommage matériel et s'oppose à toute indemnisation pour tort moral. Il renonce à toute indemnisation au sens de l'art. 429 CPP en lien avec sa détention.

Les parties plaignantes n'étaient pas des "oies blanches". Elles se prostituaient déjà avant de rejoindre la fratrie G______, savaient ce qu'elles faisaient et avaient choisi leur mode de vie, pour lequel les prévenus n'étaient pas responsables. Il était en effet plus facile de se prostituer que de travailler durant 12 heures de suite dans un magasin. Il ressortait par ailleurs des écoutes que les jeunes femmes s'organisaient entre elles sur leur emplacement dans la rue, s'informaient parmi des gains réalisés, donnaient elles-mêmes des conseils à A______ pour faire plus d'argent, rentraient quand elles le décidaient, remettaient l'argent dans le "pot commun" de leur plein gré et avaient des contacts avec leur famille, à qui un peu d'argent avait effectivement été envoyé. Il en ressortait également que les jeunes femmes, tout comme les prévenus, adoptaient un langage ordurier, inculte et analphabète. Les mots perdaient de leur valeur. Les frères D/G______ se vantaient d'être des vrais machos qui battaient leur femme. En réalité, G______ "parl[ait] beaucoup mais fai[sait] peu". Seules quelques gifles et coups avaient été portés vers la fin lorsque les rapports s'étaient tendus. Du reste, G______ avait défendu K______ lorsque son frère l'avait frappée.

Il n'était pas possible de retenir que les plaintes étaient objectivées par les écoutes traduites et résumées. Par ailleurs, les conversations domestiques, qualifiées de "banalités" dans les rapports de police, n'avaient pas été retranscrites. Or ces discussions étaient importantes car elles montraient la vie de couple et les bons moments. Il n'y avait pas eu de contraintes et menaces en permanence. Tant M______ que I______ avaient admis avoir entretenu des relations consentantes avec G______. Ils avaient ainsi véritablement formé des couples. La maison en Roumanie existait réellement et il était prévu que G______ contribue à sa rénovation avec sa copine du moment.

En outre, les déclarations des parties plaignantes résultaient de questions dirigées des enquêteurs. Il avait alors été plus facile pour elles de prétendre avoir été forcées à se prostituer plutôt que d'admettre l'avoir fait par choix. Elles n'avaient ensuite pas été confrontées aux prévenus. La peur des représailles n'avait été alléguée que par les avocats. En réalité, elles se connaissaient toutes et s'étaient liguées contre les G______. Il ressortait en outre du témoignage de la mère de M______ que celle-ci avait l'habitude de mentir. Les déclarations de I______ étaient truffées d'incohérences. Contrairement à ce qu'elle avait indiqué, il ressortait du témoignage de AL_____ que celle-ci se prostituait déjà avant d'arriver à Genève. Elle avait également varié dans ses explications s'agissant de ses horaires, indiquant d'abord qu'elle travaillait quelques heures tous les soirs puis uniquement le week-end. Ses indications de dates auxquelles elle s'était remise avec le père de ses enfants après sa rupture avec G______ et partie en Allemagne ne coïncidaient pas non plus. Elle avait encore prétendu avoir été contrainte par X______ durant deux semaines avant de soutenir que c'était durant un mois et demi. Il n'était pas clair non plus si c'était elle ou sa tante qui avait menacé G______ de rentrer en Roumanie, ou encore si elle disposait de sa carte d'identité ou si elle était gardée dans la poche de G______. Enfin, elle avait prétendu avoir été régulièrement frappée par ce dernier alors qu'il ne l'avait fait que trois ou quatre fois en sept mois.

Au final, l'entreprise de la fratrie ne rapportait rien. Tout était consommé au fur et à mesure. Les hommes se vantaient de faire des grandes affaires, mais ce n'était que du vent. Ils n'avaient aucun plan finement rôdé, n'avaient pas un sou et logeaient dans un petit appartement. On ne voyait pas comment ils auraient pu faire rêver des jeunes femmes dans ces conditions.

Il n'était ainsi pas possible de condamner les prévenus pour traite d'êtres humains uniquement pour avoir fait ménage commun avec des jeunes femmes qui se prostituaient déjà. Ils n'avaient effectué ni pris part à aucune transaction, soit un acte d'achat, de vente ou d'intermédiation. G______ n'avait ainsi recruté ni transporté aucune femme vers la Suisse.

G______ s'était éventuellement rendu coupable d'encouragement à la prostitution pour avoir indirectement surveillé les jeunes femmes dans leur activité. Une peine de 18 mois au maximum paraissait adéquate. G______ n'avait pas commis de blanchiment d'argent car il n'avait pas conscience que l'argent était issu d'une infraction et il n'était pas établi qu'il avait profité de l'argent de ses copines. Même si c'était le cas, il ne s'agissait que de petits montants, si bien que seule une peine d'un mois maximum pouvait être prononcée. Si l'infraction d'induction de la justice en erreur devait être retenue, il devait être exempté de peine, voire condamné à une peine d'un mois au maximum, dès lors que son intention était de retourner en Roumanie avec M______. Il devait être acquitté de l'infraction de séjour illégal, voire être condamné à une peine d'un mois. Ainsi, une peine de 21 à 27 mois au total paraissait proportionnée.

5)            I______

Par la voix de son Conseil, I______ persiste dans ses conclusions. Elle n'avait pas souhaité venir aux débats d'appel car elle avait peur.

Son récit correspondait dans les grandes lignes à ce que les autres filles avaient vécu. La "recette magique" de la fratrie consistait à proposer du rêve à la victime, à promettre de l'amour ou de l'affection, à proposer une famille, tout en y ajoutant de la peur et ainsi créer un lien de dépendance. Pour cela, il fallait plusieurs personnes, soit quelqu'un qui faisait peur et quelqu'un qui dispensait de l'amour. La peur c'était G______ et l'amour c'était A______. Les femmes arrivaient toujours chez A______ dans un état de vulnérabilité. Ensuite, il suffisait de les "dispatcher", étant précisé que A______ avait accepté I______ chez elle alors que celle-ci n'était pas la copine de l'un de ses frères. Malgré cela, dès la première nuit, A______ avait amené celle-ci à se prostituer avec un de ses clients. Elle profitait de l'argent gagné par la jeune femme puisqu'il était mis dans le "pot commun" et servait à payer le loyer. A______ jouait ainsi un rôle essentiel, offrant des possibilités sur le marché, ayant les contacts, se débrouillant en français et ayant la connaissance des institutions suisses pour faire les démarches administratives nécessaires.

Le verdict de culpabilité de traite d'êtres humains devait être confirmé.

La traite d'êtres humains était un délit formel en ce sens que l'infraction était consommée dès que le comportement visé était adopté. Or, la surveillance n'était pas un élément constitutif de la traite, si bien que le concours avec l'encouragement à la prostitution devait être retenu. Les jurisprudences cantonale et fédérale allaient d'ailleurs dans ce sens.

Le montant de CHF 7'000.- en lieu et place des CHF 5'000.- octroyés par les premiers juges à titre de tort moral constituait une vraie différence pour I______, qui n'avait pas les moyens de payer les frais médicaux nécessaires pour réparer les dents qu'elle avait perdues suite aux coups reçus notamment de G______.

6)      Les autres parties plaignantes

Aux débats d'appel, les conseils des plaignantes M______, K______ et P______ ont plaidé et conclu à la confirmation des montants alloués à titre de réparation de leurs dommage matériel et tort moral par les premiers juges. Les éléments du dossier étaient parlants s'agissant du rôle de chacun des prévenus. Les frères D/G______ trouvaient les proies et A______ était la coordinatrice. Elle avait en outre organisé la venue de M______ qui n'était pas encore la copine de G______ et profité de l'éloignement géographique de Y______ pour écarter ce dernier et gagner la confiance de P______. Il n'y avait aucune raison de douter des déclarations des plaignantes qui s'étaient toutes exprimées avec retenue par peur des représailles.

Par courrier du 4 mai 2021 à la CPAR, la plaignante P______ a en outre conclu à ce que les montants effectivement payés par A______ à titre de peine pécuniaire ou d'amende lui soient alloués en paiement de tout ou partie de ses dommage et tort moral en application de l'art. 73 CP.

Par pli du même jour, M______ a également conclu au maintien du séquestre prononcé sur l'ordinateur portable figurant sous chiffre n° 16 de l'inventaire du 24 décembre 2018, à ce que la Cour ordonne sa confiscation, sa vente aux enchères et l'allocation en sa faveur de son prix de vente en application de l'art. 73 CP.

D.                     Situation personnelle des prévenus et antécédents

a. D______ surnommé AZ______, est né le ______ 1988. Il a deux filles, âgées de 9 et 13 ans, qui vivent chez les parents de O______ et dont il n'a plus de nouvelles depuis son incarcération. Hormis sa sœur, il n'a pas de famille en Suisse. Il a indiqué avoir une nouvelle petite amie, qui venait le trouver en prison et vivait en Suisse. Il n'avait pas terminé de formation. Il avait exercé quelques petites activités professionnelles, notamment dans l'agriculture, mais pas depuis 2016. En prison, il travaille en cuisine mais n'y suit pas de formation. Il a économisé un certain montant sur son pécule pour rénover la maison familiale en Roumanie. Il ne s'oppose pas à son expulsion de Suisse et demande même à être expulsé. Il espère pouvoir trouver du travail dans la restauration à sa sortie de prison. Il s'estime guéri de sa dépendance aux stupéfiants, si bien qu'il ne répèterait pas ses erreurs. Il a compris depuis son arrestation qu'il ne fallait pas dénigrer les femmes, qui avaient des droits égaux aux hommes et qu'il fallait les traiter correctement. Il souffre beaucoup car c'est très dur d'être en prison.

Selon l'extrait de ses casiers judiciaires suisse et roumain, D______ n'a jamais été condamné dans ces pays.

b. G______ surnommé AY______ ou AM_____, est né le ______ 1980. Il est marié et séparé de AS______. Il a une fille de 15 ans, qui vit en Roumanie avec sa grand-mère maternelle. Il n'a pas de famille en Suisse. Après une courte scolarité, il a travaillé dans l'agriculture. Selon ses dires, avant son arrestation, il pratiquait la mendicité et jouait de la guitare. A la prison, il a travaillé un temps au service des repas mais ne le peut plus en raison de ses problèmes respiratoires. Il s'est fait enlever un poumon et vit sans le moindre air depuis trois ans. S'agissant de son expulsion, il s'inquiète pour sa santé, ses médecins se trouvant en Suisse. Il est néanmoins d'accord car il souhaite être libéré le plus rapidement possible. Ses conditions de détention sont très difficiles au vu de son état de santé. Il souhaite retrouver sa fille qu'il n'avait pas vue depuis trois ans. Il a appris beaucoup de choses pendant la procédure, notamment à considérer l'humanité, ce qui lui servirait à l'avenir.

Selon l'extrait de ses casiers judiciaires suisse et roumain, G______ n'a jamais été condamné dans ces pays.

Il ressort des informations requises auprès du Service des contraventions qu'entre 2017 et 2019, G______ a été amendé à de très nombreuses reprises pour mendicité entre le 17 mars et le 13 avril 2017, puis du 12 février au 29 mars 2018. Il a encore été amendé à deux reprises au mois de juillet 2018 et une dernière fois le 10 août 2018.

c. A______, née ______ [nom de jeune fille], le ______ 1979 en Roumanie, est mariée mais séparée de AT_____. Son fils AR_____, 21 ans, vit en Roumanie. Elle dit souffrir de sclérose en plaque et de diabète, et essayer de se passer de ses béquilles car elle veut rester autonome, mais les utiliser quand elle est trop fatiguée et que sa jambe est trop douloureuse. Elle se sent moins déprimée, mais elle vit très difficilement sa période de détention. Elle s'en remet à justice quant au prononcé d'une expulsion. Elle a une vision positive de son futur. Elle veut trouver un travail, fonder une famille avec son ami, rencontré huit mois avant l'audience de jugement, et vivre avec lui et son fils, avec lequel elle est restée en contact par téléphone.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, la prévenue a été condamnée :

-          le 1er avril 2014 par le MP, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.-, avec sursis lequel a été révoqué le 4 décembre 2014, pour vol ;

-          le 4 décembre 2014 par le MP, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.- et à une amende de CHF 200.-, pour vol et vol d'importance mineure.

Selon l'extrait de son casier judiciaire roumain, elle n'a jamais été condamnée dans ce pays.

E.       Assistance judiciaire

Me C______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 61 heures et 20 minutes d'activité de cheffe d'Etude, hors débats d'appel, lesquels ont duré 17 heures.

Me F______, défenseure d'office de D______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 48 heures d'activité de stagiaire, hors débats d'appel, et CHF 100.- à titre de débours correspondant aux frais d'interprète.

Me H______, défenseur d'office de G______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 30 heures et 20 minutes d'activité de chef d'Etude et 2 heures et 30 minutes de stagiaire, hors débats d'appel, et CHF 300.- à titre de débours correspondant aux frais d'interprète.

Me J______, conseil juridique gratuit de I______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 4 heures et 35 minutes d'activité de chef d'étude, hors débats d'appel.

Me L______, conseil juridique gratuit de K______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant 9 heures et 20 minutes d'activité de collaborateur pour la lecture du jugement motivé et des déclarations d'appels, et 7 heures et 10 minutes d'activité de stagiaire pour la préparation de l'audience d'appel et la plaidoirie, hors débats d'appel.

Me N______, conseil juridique gratuit d'M______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, 21 heures d'activité au tarif de cheffe d'Etude, hors débats d'appel, soit 20 heures pour l'étude du dossier et la rédaction de la plaidoirie et 1 heure pour la rédaction des conclusions civiles.

Me W______, conseil juridique gratuit de P______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant 25 heures et 20 minutes d'activité au tarif de cheffe d'Etude, hors débats d'appel, soit 4 heures et 15 minutes de conférence avec la cliente, 15 heures et 15 minutes d'étude du dossier, de lecture du jugement motivé, des déclarations d'appels/déterminations des parties et de rédaction d'actes de procédure, enfin 5 heures et 50 minutes de préparation à l'audience.


 

EN DROIT :

1)      Recevabilité

1. Les appels et appels joints sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398, 399 et 401 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2)        Etablissement des faits

2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3 et 138 V 74 consid. 7).

L'autorité de jugement dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40), en application duquel, selon l'art. 10 al. 2 CPP, le juge donne aux moyens de preuve produits tout au long de la procédure la valeur qu'il estime devoir leur attacher pour se forger une intime conviction sur la réalité d'un fait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_348/2012 du 24 octobre 2012 consid. 1.3).

2.2. La CPAR retient les faits suivants :

2.2.1. D______, G______ et A______ avaient le projet commun d'amener des jeunes femmes vulnérables, car facilement manipulables, à se prostituer pour leur compte, en leur faisant croire à une soi-disant histoire d'amour ou à ce qu'elles faisaient partie de leur famille, tout en mêlant ces phases d'affection à des phases d'insultes, de menaces et de violences afin de les maintenir sous leur coupe, et cela dans le but de financer leurs besoins personnels ainsi que la rénovation de la maison familiale à AX______[Roumanie].

2.2.2. Le projet de la fratrie ressort sans équivoque des enregistrements et des extractions téléphoniques :

-        les frères D/G______ discutent à plusieurs reprises de la façon d'amener plusieurs filles à travailler pour eux en expliquant expressément qu'il faut "les sauter de temps en temps", leur "raconter des histoires", mais aussi "parfois leur en mettre une, [les] insulter", et finalement se débarrasser d'elles assez vite en simulant une fin de relation, en les renvoyant chez elles tout en leur rappelant leur rôle de sauveur ;

-        D______ explique qu'il a "cinq beaux morceaux" qui travaillent actuellement pour lui et précise qu'un temps il avait "bossé" avec O______, qu'il avait amenée à Genève ;

-        G______ explique qu'il avait été décidé "de faire quelque chose avec les femmes en Suisse", qu'auparavant il "avait I______" et qu'eux aussi allaient au travail "comme des macros". Il se réjouit d'avoir dorénavant M______ qui est facilement manipulable du fait qu'elle a été maltraitée par le passé ;

-        D______ répète à plusieurs reprises son respect indéfectible pour sa sœur, qui était "sa cheffe" et qui s'était "débrouillée seule en Suisse". Il précise également à la plaignante K______ qu'elle doit se soumettre à sa sœur également, même si dans leur culture, c’est l’homme qui commande. Il l'encourage à essayer de soutirer un maximum d'argent à un client et de n'en parler à personne sauf à A______. Il explique encore à son cousin que la présence de A______ aux côtés des filles permet que celles-ci « fassent plus de fric » ;

-        Les trois prévenus se réfèrent par ailleurs à de nombreuses reprises et de façon expresse au projet de construction de leur maison, tout en insistant sur la manière dont il devait être financé, soit grâce aux gains issus de la prostitution, et sur le fait que ce projet devait rester secret. Le 22 septembre 2018, soit deux jours avant l'interpellation des prévenus, A______ évoque expressément les économies pour la maison, dont les travaux allaient pouvoir commencer. Elle s'énerve contre son frère qui s'amuse avec I______, mais que cela importait au final peu tant qu'elle commençait à bâtir la maison. Dans une autre conversation, elle explique qu'elle ne souhaite pas toucher aux économies pour la maison, si bien qu'elle était allée travailler avec K______ pour payer les frais de la voiture.

Les éléments qui précèdent permettent déjà de conclure, au-delà de tout doute, que le but commun de la fratrie, y compris de A______, était bien d'amener des jeunes femmes à se prostituer pour leur compte et d'utiliser leurs gains de sorte à leur permettre de débuter la construction de leur maison en Roumanie, ce qu’ils s'apprêtaient à faire juste avant leur arrestation. S'y ajoutent encore les éléments suivants :

2.2.3. Il ressort de l'enquête et des aveux mêmes des prévenus, que ceux-ci ont effectivement procédé à de nombreux transferts d'argent, dont des envois d'argent en Roumanie pour l'achat de matériaux de construction et le stockage de ceux-ci, et cela durant la période pénale concernant l'ensemble des plaignantes. Ils ont également admis que ces dépenses avaient été effectuées grâce au "pot commun" dans lequel étaient mis en liquide l'argent des jeunes femmes. Les affirmations des prévenus selon lesquelles les sommes envoyées en Roumanie provenaient toutefois essentiellement des revenus de l’aide sociale et de l’activité de prostituée de A______ ne revêtent aucune crédibilité. Il ressort en effet du dossier, et notamment des explications mêmes de A______ que l'argent de l'aide sociale (CHF 2'600.- environ) était utilisé pour payer le loyer (CHF 1850.-) et la nourriture pour tout le monde. Elle a également indiqué qu'elle ne travaillait pas beaucoup en tant que prostituée en raison de sa maladie, d’une part, et du fait qu’il y avait des filles plus jeunes et plus jolies qu’elle, d’autre part. Les allégations de G______ selon lesquelles l'argent envoyé en Roumanie provenait de la mendicité, ne convainquent pas d'avantage. Il ressort en effet des écoutes que G______ s'adonnait à la mendicité uniquement lorsqu'il n'avait "plus de femmes", et des renseignements de police qu'il n'a pas été amendé pour mendicité lorsque M______ ou I______ étaient présentes. En tout état, les montants que ce dernier allègue avoir gagnés de la mendicité paraissent peu probables. Enfin, les allégations confuses et contradictoires de D______ selon lesquelles il vivait de petits travaux au noir, sont tout aussi peu probables, étant relevé qu'il a admis à plusieurs reprises en cours de procédure vivre des gains tirés de la prostitution. L'on ne voit dès lors pas grâce à quel argent, sinon les gains précités des jeunes femmes qu'ils hébergeaient, les prévenus ont pu payer l'entier de leurs charges et frais courants, effectuer des économies pour la maison, acheter du matériel de construction et procéder aux nombreux transferts recensés supra.

2.2.4. A______ a organisé la fuite et la venue chez elle de M______ avant que celle-ci ne devienne la copine de son frère G______. De la même façon, elle a continué d'héberger I______ après le départ de X______ et avant la venue de son frère. Dès l'arrivée des jeunes femmes dans son appartement, elle leur a organisé des rendez-vous avec des clients à domicile, a indiqué le prix de la passe et en a récupéré directement les gains, ce qu'a d'ailleurs confirmé D______ s'agissant de M______.

Il ressort par ailleurs des enregistrements que D______, qui s'est également rendu à Berne pour aller chercher M______, discute immédiatement de ses propres plans au sujet de cette dernière, ne sachant pas s'il voulait l'emmener se prostituer en France ou au 8______[GE].

Ces éléments démontrent que si les prévenus étaient organisés de sorte à ce que chacune des jeunes femmes soit officiellement "attribuée" à l'un des membres de la fratrie, ils étaient tous impliqués dans leur gestion dans l'intérêt de l'entreprise commune.

2.2.5. Les déclarations mesurées de AA_____, dont il est établi qu'elle avait entretenu une relation avec D______, corroborent également ce qui précède, puisqu'elle a expliqué que ce dernier avait fait venir plusieurs filles, soit O______, K______ et M______, en France et au 8______[GE] pour que celles-ci se prostituent pour son compte. Elle a également confirmé le rôle joué par A______, qui lui faisait de la peine car elle devait se rendre dans la rue aux côtés des jeunes femmes car sinon celles-ci "ne faisaient pas de fric".

2.2.6. Diverses déclarations des prévenus permettent également de confirmer ce qui précède. G______ a notamment indiqué être resté en Suisse dès l'été 2017, lorsque "l'épisode avec les filles" avait débuté, ce qui correspond au moment où A______ a obtenu son appartement à AU______[GE]. Cette dernière a par ailleurs expliqué qu'avant cela, il n'y "avait rien", qu'ensuite tout le monde avait défilé chez elle, et que les gains issus de la prostitution des plaignantes qu'elle avait hébergées étaient mis dans le "pot commun" destiné au paiement du loyer. D______ a, quant à lui, déclaré que c'était surtout sa sœur qui était préoccupée par le sort de la maison en Roumanie. L'ensemble de ces éléments permet de conclure qu'il y avait bien un plan commun : celui d'héberger des jeunes femmes dans le but de les exploiter sexuellement et, notamment, de rénover la maison familiale.

2.2.7. Enfin, l'établissement des faits repose sur les déclarations de l’ensemble des parties plaignantes, qui, outre le fait qu’elles sont concordantes entre elles, confirment en tous points ce qui précède.

Elles ont toutes été mesurées dans leur propos, n'accablant aucunement les prévenus au-delà de ce qui avait pu être déjà constaté par les enquêteurs. L'absence des plaignantes aux débats n'entachent nullement leur crédibilité, la peur des représailles des victimes de traite étant notoire.

Même si les plaignantes K______, M______ et I______ n’ont pas pu être confrontées aux prévenus, leurs déclarations sont parfaitement exploitables dès lors qu'il ne s'agit pas d’une situation de « parole contre parole ». Les prévenus ont au demeurant délibérément choisi de ne pas formuler de questions préjudicielles à ce propos.

2.2.8. Il sera donc retenu que toutes les jeunes femmes, y compris O______, d'ailleurs la première à dénoncer les faits corroborés ensuite par l'enquête, ont été désignées par la fratrie comme étant des proies faciles au vu de leur vulnérabilité, et ont toutes fait partie de son plan. Ainsi trompées sur les réelles intentions des membres de la famille D/G______, elles ont toutes accepté de se prostituer pour le compte de la fratrie, pensant à tort qu'elles profiteraient un jour de leurs gains avec leur nouvelle famille. Les montants avancés par les plaignantes, crédibles, seront tenus pour établis. Contrairement aux allégations des prévenus, il sera retenu que les plaignantes n'avaient nullement la possibilité de piocher dans le "pot commun", au vu notamment de l'épisode du Nouvel-An 2018 lors duquel A______ a mis à la porte G______ et I______ car elle les avait soupçonnés d'y avoir volé l'argent destiné au loyer. Le fait qu'aucun versement d'argent n'a été enregistré auprès des différents organismes de transferts interrogés comme ayant été effectué par les plaignantes durant les périodes où elles logeaient au domicile des prévenus démontre également que celles-ci ne disposaient nullement de leurs gains. Elles n'avaient aucunement le temps de s'adonner à des loisirs. Au contraire, il apparaît qu'elles travaillaient tous les jours, la journée à BD______[France] et le soir au 8______, et qu'elles devaient en outre s'occuper des tâches ménagères. Les seules dépenses que pouvaient effectuer les plaignantes étaient celles relatives à leur manucure et coiffure, soit des dépenses destinées à les rendre plus attractives auprès des clients et vraisemblablement imposées par les prévenus, étant relevé que G______ explique, sur écoute, qu'il souhaite investir dans l'image de M______ qu'il trouve moche. En appel, il a également expliqué qu’il "amenait" I______ une à deux fois par semaine chez le coiffeur ou la manucure, car elle devait se faire belle pour travailler. Le fait que de petites sommes issues de leur activité de prostituées ont été envoyées à leur famille par les prévenus n'y change rien. Cela permettait au contraire de continuer à motiver les jeunes femmes à ramener toujours plus d'argent.

2.2.9. Il sera également retenu que les parties plaignantes O______, K______, M______ et I______ étaient régulièrement injuriées, menacées d’être abandonnées et battues par les frères D/G______ notamment s’ils étaient insatisfaits de leurs gains, ce qui a eu pour effet de les maintenir sous leur coupe. Les plaignantes précitées ont toutes déclaré n’avoir pas fui car elles étaient sans ressources et avaient peur des prévenus. Se présentant comme une sœur ou une mère, A______ jouait, quant à elle, un rôle de confidente en particulier envers les plaignantes K______, M______ et I______ et leur conseillait d'obéir sagement à ses frères, à se laisser frapper car cela était une marque d'amour. Elle permettait ainsi d’entretenir le mythe de la nouvelle famille pour maintenir la soumission des victimes.

2.2.10. Enfin, il sera retenu que les prévenus n’ont pas seulement amené, par l'abus de vulnérabilité, la tromperie et les violences, les plaignantes de se prostituer pour leur compte mais ont également constamment contrôlé leur activité. Ils ont en effet défini leurs lieux de prostitution, où ils les accompagnaient quotidiennement. Ceux-ci étaient en contact téléphonique constant avec elles et les surveillaient depuis un pont à proximité du 8______ pour les inciter à gagner toujours plus d'argent. Ils s’informaient régulièrement de leurs gains et comptaient le nombre de préservatifs à l’issue d’une journée de travail pour être sûrs qu’elles ne cachaient pas leurs gains. Si elles avaient une légère liberté s'agissant de certaines pratiques qu'elles pouvaient refuser, elles étaient vivement encouragées à les accepter, notamment la sodomie, les relations non-protégées, même si elles ne le souhaitaient pas, à aller travailler lorsqu'elles avaient leurs règles en insérant un préservatif dans le vagin pour stopper le flux, ou encore à rester plus longtemps dans la rue et ramener le plus d'argent possible.

A______ se rendait également dans la rue aux côtés des jeunes femmes, sans elle-même se prostituer la plupart du temps, assurant un contrôle constant sur celles-ci. Elle les encourageait à accepter un maximum de clients, même à prix cassés, et rapportait à ses frères les gains réalisés par ces dernières, avec pour effet de mettre les jeunes femmes dans une situation de pression permanente pour gagner le plus d'argent possible.

Les explications de A______, qui a d’abord nié les faits malgré les enregistrements au dossier puis a admis avoir surveillé les jeunes femmes sous la contrainte de ses frères, lesquels la frappait et dont elle avait peur, n'emportent aucunement conviction dans la mesure où elle est elle-même revenue sur ses dires en audience de jugement, prétendant avoir uniquement reçu une "gifle" de D______ à l'occasion d'une dispute. En outre, l'épisode du Nouvel-An 2018 démontre encore qu'elle n'était pas la victime de ses frères comme elle le prétend.

2.3. Les éléments suivants seront encore précisés :

i. Faits en lien avec O______

2.3.1. D______ a confirmé avoir vécu une relation sur une durée de dix ans faite de hauts et de bas avec O______ et que lorsqu'ils s'étaient rendus en Suisse en mai 2018 pour que celle-là s'y adonne à la prostitution, ils étaient à nouveau en couple. Il a également admis qu'une fois en Suisse, il a fixé les horaires et les lieux de travail de O______, surveillé son activité et frappé cette dernière à plusieurs reprises.

2.3.2. D______ a également reconnu que O______ lui donnait de l'argent issu de son activité de prostituée, ce qui lui avait permis de payer les besoins courants de la "famille" et sa consommation de stupéfiants avec sa copine "I______". Le fait que D______ ait pu acquérir cinq ou six voitures, dont la Q______, depuis sa venue en Suisse avec son ex-épouse, permet de conclure qu'il récupérait si ce n'est l'entier, en tous les cas une grande partie des gains de cette dernière, dès lors qu'il n'exerçait lui-même aucune activité rémunérée.

2.3.3. Au vu de ce qui précède, la version de la plaignante O______ selon laquelle elle avait accepté de venir en Suisse et se prostituer aux conditions susmentionnées car elle espérait, comme ce dernier lui avait affirmé, qu'il allait économiser l'argent pour la famille et leurs filles, est tout à fait crédible. Le fait qu'elle se soit rendue au domicile de D______ après leur séparation pour lui montrer qu'elle avait gagné EUR 10'000.- d'un client, devenu par la suite son compagnon, et qu'elle pouvait encore en gagner d'avantage, n'y change rien et atteste au contraire plutôt l'influence qu'il continuait d'exercer sur elle et son besoin de lui prouver de quoi elle était capable, avant qu'elle ne réussisse à s'en affranchir.

Il apparaît donc bien que D______, qui a admis qu'il fréquentait à cette époque la dénommée "I______" et éprouvait des sentiments pour elle, a agi avec O______ selon le modus operandi décrit plus haut, soit en lui faisant croire qu'il allait utiliser l'argent issu de son activité pour se bâtir un avenir avec elle, l'amenant ainsi à se rendre en Suisse, s'y prostituer et lui remettre tous ses gains pour financer son train de vie et son, voire ses projets de maison secrets - et cela quand bien même il s'agissait de son ex-épouse et que celle-ci se prostituait déjà auparavant en Espagne. D______ a profité de cette aubaine et exploité le lien affectif qui les unissait pour parvenir à ses fins.

2.3.4. Les explications des prévenus selon lesquelles O______ avait librement décidé de se prostituer en Suisse pour payer les frais d'avocats de son frère n'emportent aucunement conviction, étant précisé que D______, dont il est établi qu'il récupérait la majeure partie des gains de son ex-épouse, n'allègue nullement avoir utilisé cet argent à cette fin.

Enfin, les raisons ayant poussé O______ à dénoncer les faits, importent peu dans la mesure où elles ne changent rien à la réalité de leur survenance. Il sera toutefois noté que tant la plaignante O______ que la plaignante K______ ont manifesté le souhait de quitter D______ après avoir été violemment frappée par ce dernier, ce qui conforte les déclarations de de la plaignante O______ sur ses motivations à déposer plainte.

ii. Faits en lien avec K______ et M______

2.3.5. Il est constant que les jeunes femmes ont été exploitées et maltraitées par de tierces personnes avant d'être hébergées par la fratrie G______.

Il ressort également du dossier que D______ venait de se faire quitter par O______ et G______ par I______ quelques mois auparavant. Ils étaient dès lors vraisemblablement tous deux à la recherche d’une nouvelle source de revenus, comme en témoignent les enregistrements au dossier.

Dans ces conditions, le récit de la plaignante K______ sur les raisons l'ayant poussée à s'installer chez les G______ et à se prostituer pour leur compte est tout à fait crédible. Ainsi donc, D______ a, avec l'aide de "I______", repéré sa nouvelle proie, la sachant fragile et l'a convaincue de déménager chez lui et de travailler pour son compte en lui affirmant qu'il la traiterait bien et qu'il la sauverait du calvaire qu'elle vivait avec le dénommé AN_____, qu'ils allaient fonder une famille et construire une maison en Roumanie. Il ressort d'ailleurs des enregistrements que "I______" a bien procuré des filles à D______, ce qui corrobore les déclarations de la plaignante K______. Si celle-ci a légèrement varié lors de son audition par la police s'agissant de ce dont elle avait vraiment conscience en lien avec les détails de son activité chez les G______, elle a toujours expliqué qu'elle avait décidé de déménager et de "travailler" désormais pour D______ sur la base de la tromperie susmentionnée, si bien que sa crédibilité ne s'en trouve nullement entachée.

G______ lui-même se définit comme le sauveur de M______, ce qui appuie les propos de cette dernière sur les raisons l'ayant poussée à fuir Zurich et à s'installer chez lui à Genève.

Il ressort par ailleurs clairement des enregistrements au dossier que les jeunes femmes croyaient vraiment à un avenir meilleur avec les prévenus, tel que promis par eux, et que les mots d'amour des frères D/G______ et de réconfort de A______ fonctionnaient car les déterminaient à se soumettre et travailler davantage pour le bien de ce qu'elles pensaient être leur famille.

2.3.6. Les explications confuses de D______ selon lesquelles il n'avait pas hébergé K______ uniquement dans le but qu'elle se prostitue et lui remette l'argent ainsi gagné mais qu'il souhaitait également fonder une famille avec elle, n'emportent nullement conviction au vu des enregistrements contraires et des aveux mêmes de ce dernier en cours de procédure desquels il ressort qu'il avait effectivement entretenu à la même période une relation intime avec "I______" et profité des sentiments non réciproques de K______ à son égard dans le but que celle-ci gagne un maximum d’argent. G______ a, quant à lui, concédé qu'il n'était pas possible de tomber amoureux en si peu de temps, si bien que ses explications selon lesquelles il éprouvait de réels sentiments pour M______ et qu'il souhaitait véritablement partir en Roumanie pour fonder une famille avec elle, ne convainquent pas davantage.

2.3.7. D______ argue encore vainement qu'il n'avait pas de glorieux projets d'enrichissement et qu'il s'était séparé de K______ d'un commun accord après trois semaines environ de relation si bien qu'il ne pouvait être retenu qu'il l'avait exploitée. Ainsi qu'indiqué supra, il ressort des écoutes que D______ avait précisément comme projet de faire travailler des femmes pour lui successivement, en feignant une histoire d'amour, sans les garder trop longtemps. Ainsi, le fait qu'il se soit séparé ou non de K______ à un certain point est sans importance. Il souhaitait bien exploiter la plaignante au maximum durant un laps de temps. Il ressort du reste du dossier que la dispute dont fait état D______ a bien existé, mais qu'il avait ensuite convaincue la plaignante de rester, lui promettant notamment qu'il quitterait "I______". La plaignante avait, quant à elle, promis de ne plus parler avec ses parents, ce qui témoigne de la volonté du prévenu de la maintenir, encore un temps, sous sa coupe.

2.3.8. Il n'est pas non plus soutenable, au vu de la situation extrêmement précaire des plaignantes K______ et M______ que les prévenus connaissaient, de prétendre que celles-ci s'étaient prostituées par choix car cela était plus facile que de travailler dans un magasin durant 12 heures d'affilée et qu'elles "aimaient ça", ni que les plaintes qu'elles émettaient parfois, avec un langage éventuellement familier, étaient le signe de ce qu'elles savaient s'imposer et n'étaient nullement soumises aux prévenus. Les enregistrements démontrent au contraire que celles-ci essayaient de manifester leur désarroi et que si les prévenus lâchaient parfois du lest et leur permettaient de rentrer ou de refuser un client après de longues supplications c’était uniquement parce qu’ils craignaient que les jeunes femmes parlent trop fort au téléphone et qu’elles n’attirent l’attention. Elles ont par ailleurs déclaré en cours de procédure avoir songé à fuir à une occasion mais qu'elles y avaient renoncé car elles étaient sans ressources, avaient peur des menaces et que M______ ne disposait pas de documents d'identité. La mère de M______, qui a indiqué qu'elle se portait mieux quand elle n'avait pas de nouvelles de sa fille, et dont il n'y a dès lors pas lieu de douter du témoignage, a confirmé que celle-ci avait tenté de fuir avec K______. Cet élément démontre bien que les jeunes femmes ne se sentaient pas libres dans leur relation avec les prévenus.

2.3.9. Les éléments qui précèdent suffisent à retenir que les prévenus ont, de concert, trompé les plaignantes K______ et M______ sur leurs réelles intentions aux fins de les exploiter sexuellement, et qu’ils les ont soumises à une pression constante pour qu’elles rapportent un maximum d’argent. Les "échanges de banalités" non traduits et non retranscrits dans les rapports de police n'y changent rien.

 

 

iii. Faits en lien avec I______

2.3.10. Il est constant que la plaignante I______, auparavant maltraitée et exploitée par un cousin de la fratrie D/G______, X______, a été hébergée à l'appartement de A______ et s'est prostituée en remettant ses gains à la fratrie.

2.3.11. Comme déjà indiqué, A______ n'est pas crédible lorsqu'elle prétend avoir uniquement hébergé X______ et la plaignante I______ car D______ l'y avait forcée. Il ressort au contraire du dossier que le but de la manœuvre était de profiter des gains de la jeune femme notamment pour payer le loyer et ainsi pouvoir économiser pour la maison de AX______[Roumanie]. Elle n'est pas davantage convaincante lorsqu'elle indique avoir ensuite continué d'héberger la plaignante I______ car celle-ci était la copine de son frère G______ puisque tel n'était pas encore le cas. C'est au contraire A______ qui, ayant constaté la détresse de la jeune femme, a écarté X______ et fait venir son frère G______, le présentant comme l'homme providentiel qui la sauvait d'une situation précaire. G______ a par ailleurs admis qu'ils avaient bien caché la plaignante I______ de X______, ce qui corrobore les explications de cette dernière. Ayant cru aux promesses d'un meilleur avenir de G______ et A______, la jeune femme a ainsi accepté de se prostituer et de leur remettre ses gains.

2.3.12. Les explications de G______ selon lesquelles il n'avait nullement exploité la plaignante I______, dans la mesure où il était en relation avec la jeune femme, et que la décision que celle-ci se prostitue pour le couple avait été prise communément, ne convainquent guère. Le fait que la jeune femme ait organisé sa fuite en Roumanie, ce qui est confirmé par le témoignage de sa tante et ce que G______ a reconnu, démontre qu'elle ne se sentait pas libre dans sa relation avec ce dernier.

2.3.13. Les contradictions alléguées et mises en évidence par les prévenus dans les déclarations de la plaignante I______ sont accessoires. Il importe par exemple peu de savoir si elle disposait ou non en tout temps de ses documents d'identité puisque, sans ressources et sans famille à Genève, elle n'avait dans sa perception de toute façon pas la possibilité de fuir. Il est également non pertinent que la plaignante a précisé seulement lors de sa seconde déclaration que durant les derniers mois de présence à Genève, G______ la faisait travailler quelques heures mais uniquement durant le week-end. Seules ces heures ont au demeurant été comptabilisées par la plaignante à titre de réparation de son dommage matériel (cf. infra). Si la plaignante a en effet dans un premier temps soutenu que A______ l'avait frappée, elle s'est ensuite ravisée, démontrant qu'elle ne cherchait nullement à accabler cette dernière. En tout état, le récit de la plaignante I______ est constant et cohérent sur l'ensemble des éléments essentiels, soit sur le fait que G______ et A______ lui ont fait croire à un avenir meilleur afin de s'emparer de la majeure partie de ses gains et sur la surveillance dont elle faisait l'objet dans son activité de prostituée – version qui ressemble en tous points à celles des autres parties plaignantes.

iv. Faits en lien avec P______

2.3.14. Il est établi, malgré les explications confuses et contradictoires de A______,  en particulier en appel, que celle-ci a bien hébergé la plaignante P______ en compagnie de Y______ dès le mois de janvier 2018, lequel maltraitait et exploitait la précitée, et que suite au départ de ce dernier, la prévenue a continué d'héberger et de profiter des gains issus de la prostitution de la jeune femme qui étaient mis dans le "pot commun".

2.3.15. La version de la plaignante P______ selon laquelle c'était A______ qui l'avait convaincue de se prostituer malgré son souhait d'arrêter cette activité est tout à fait crédible et renforcée par le fait que la prévenue avait mis en œuvre ce même procédé peu de temps auparavant avec la plaignante I______. Ainsi, témoin du calvaire de la jeune femme, qu'elle a su exploiter, la poussant à déposer plainte contre Y______, écartant par là-même ce dernier, A______ a pu prendre le contrôle sur celle-ci, la convaincre de poursuivre son activité de prostitution et de lui remettre l'essentiel de ses gains, soi-disant pour les mettre en sécurité, en affirmant qu'elles formaient une famille et qu'elle l'aiderait notamment à faire venir sa fille à Genève.

2.3.16. P______ s'est affranchie de la coupe de la famille G______ lorsqu'elle a rencontré son compagnon, soit selon ses déclarations dont il n'y a pas lieu de douter en juin 2018, quand une possibilité s'est offerte à elle, et n'a jamais récupéré les gains issus de son activité de prostituée depuis le dépôt de plainte contre Y______. La période pénale s'agissant de la plaignante P______ s'étend donc du 27 mars 2018 au mois de juin 2018.

3)      Culpabilité

Traite d'êtres humains

3.1.1. Selon l'art. 182 CP, celui qui, en qualité d'offreur, d'intermédiaire ou d'acquéreur, se livre à la traite d'un être humain à des fins d'exploitation sexuelle, d'exploitation de son travail ou en vue du prélèvement d'un organe, est puni d'une peine privative de liberté ou d'une peine pécuniaire. Le fait de recruter une personne à ces fins est assimilé à la traite (al. 1). Si la victime est mineure ou si l'auteur fait métier de la traite d'êtres humains, la peine est une peine privative de liberté d'un an au moins (al. 2). Dans tous les cas, l'auteur est aussi puni d'une peine pécuniaire (al. 3). Est également punissable celui qui commet l'infraction à l'étranger (al. 4).

La traite est définie comme le fait de "disposer d’autres êtres humains comme s’il s’agissait d’objets [...] ou de marchandise vivante" (arrêt du Tribunal fédéral 1B_450/2017 du 29 mars 2017 consid. 4.3.1) et s'opère notamment par le fait d'acquérir et de recruter des personnes à des fins d'exploitation (Bertrand PERRIN, La répression de la traite d'êtres humains en droit suisse, 2020, p. 296 ; Nadia MERIBOUTE, La traite d'êtres humains à des fins d'exploitation du travail, Genève - Zurich - Bâle 2020, p. 189) – étant précisé qu'il n'est pas nécessaire qu'une transaction commerciale stricto sensu soit réalisée entre le trafiquant et le tiers exploitant. Ainsi le recrutement pour sa propre entreprise est assimilé à la traite (ATF 128 IV 117 consid. 6/d/cc p. 131 ; ATF 126 IV 225 consid. 1 p. 227). Le recrutement au sens de l'art. 182 al. 1 in fine CP doit ainsi être conçu comme le processus global qui amène une victime à se soumettre à l'autorité ou à la volonté d'autrui, alors que le recruteur la destine subjectivement dès le début de l'entreprise à l'exploitation, sexuelle notamment, ou encore, en d'autres termes, comme toute activité tendant à obliger ou engager une personne en vue de son exploitation. Le recruteur, qui est simultanément "acquéreur", agit pour son propre bénéfice et doit avoir en vue, subjectivement, l'exploitation de la victime (arrêt du TF 6B_4/2020 du 17 décembre 2020 consid. 4.1).

Le "recruteur" est dès lors celui qui cherche activement à obtenir un pouvoir de disposition sur la victime, pour l’exploiter, dans son travail ou sexuellement, ou lui prélever un organe. Plus précisément, il peut obtenir cette maîtrise sur la victime pour l’exploiter lui-même ou pour la remettre à autrui (B. PERRIN, op.cit., p. 303 ; N. MERIBOUTE, op. cit. p. 209).

Le terme "acquérir" une victime signifie obtenir la mainmise sur celle-ci, c’est-à-dire la maîtrise sur elle. L’auteur la reçoit comme une marchandise, avec le pouvoir d’en disposer. Il est le "destinataire", comme le terme "destinatario" utilisé dans la version italienne de l’art. 182 CP l’indique. Le destinataire final se trouve en fin de processus, avant que ne commence l’exploitation ou le prélèvement d’organe. Le Protocole de Palerme et la Convention de Varsovie utilisent le terme d’"accueil", qui traduit toutefois moins bien la prise de maîtrise (B. PERRIN, op.cit., p. 303).

La traite se concrétise également par le fait "d’offrir, de procurer, de fournir, de vendre, de recevoir des personnes mais également par l’acheminement, le transport ou la livraison [...]" (Message du Conseil fédéral du 26 octobre 2005 concernant l’approbation de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, FF 2005 6269 p. 6324 ; Message du Conseil fédéral du 11 mars 2005 portant approbation du Protocole facultatif relatif aux droits de l’enfant, FF 2005 2639 p. 2665 ; arrêt de l'Obergericht de Zurich SB110601 du 19 juillet 2012 consid. 4.2.1).

3.2. La plupart des sources s’accordent pour affirmer que l'élément central est l'atteinte au droit à l’autodétermination de la victime (ATF 126 IV 225 consid. 1, p. 227 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_81/2010 du 29 avril 2010 cons. 4.1 ; 6B_469/2014 du 4 décembre 2014 consid. 3.3 et 6B_128/2013 du 7 novembre 2013 consid. 1.1 ; Message FF 2005 6269, p. 6324 ; Message FF 2005 2639 p. 2665 ;
B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, 3ème éd. 2010, n° 4 ad art. 182 ;
V. DELNON / B. RÜDY, Basler Kommentar, Strafrecht II, 3e éd. 2013, n° 6 ad art. 182 ; G. STOUDMANN, Commentaire romand, Code pénal II, Bâle 2017, n° 15 ad art. 182 ; S. TRECHSEL / M. PIETH [éds], Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 3ème éd., Zurich 2018, n. 2 ad art. 182 ; A. DONATSCH, Strafrecht III, 9ème édition, Zurich/Bâle/Genève 2008, p. 468 ; B. PERRIN, op.cit.,
p. 296).

Une victime est privée de sa liberté d'autodétermination lorsqu'elle est contrainte par la force, par la menace, par toute forme de pression, par un enlèvement, une fraude, une tromperie, un abus d'autorité ou en achetant la personne ayant autorité sur la victime ; il suffit que cette dernière soit dans une situation particulière de vulnérabilité, par exemple en étant isolée ou sans ressources dans un pays qui lui est étranger (arrêt du TF 1B_450/2017 du 29 mars 2018 consid. 4.3.1).

Dans les cas de traite d'êtres humains à des fins d'exploitation sexuelle, les éléments constitutifs de la traite sont en général réalisés lorsque des jeunes femmes venant de l'étranger sont engagées en Suisse pour exercer la prostitution par des personnes exploitant une position de vulnérabilité. Une telle situation peut être donnée lorsque l'auteur profite des conditions économiques ou sociales précaires de la victime ou d'un lien de dépendance. Dans ces situations, l'accord de la victime est nul et sans effet. La personne concernée est en effet privée de son droit à l'autodétermination (ATF 129 IV 81 consid. 3.1; ATF 128 IV 117 consid. 4; ATF 126 IV 225 consid. 1d, JdT 2002 IV 113; arrêt 6B_1006/2009 du 26 mars 2010 consid. 4.2.2).

Cette interprétation est conforme aux textes internationaux en matière de traite d'êtres humains, en particulier l'art. 3 du Protocole de Palerme (ratifié par la Suisse et entré en vigueur le 26 novembre 2006) qui fait référence "au recrutement, au transport, au transfert, à l’hébergement ou à l’accueil d’une personne par le biais de la menace de recours ou le recours à la force, d’autres formes de contrainte, de l’enlèvement, de la fraude, de la tromperie, de l’abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, de l’offre ou de l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre, dans le but d'exploitation, celle-ci devant comprendre au moins celle de la prostitution ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes" (arrêt de l'Obergericht de Zurich SB110601 du 19 juillet 2012 consid. 4.2.1).

3.3. Afin d'établir si le droit à l'autodétermination a été lésé, il n'est pas nécessaire que les auteurs aient contraint les femmes en leur retirant leurs papiers d'identité ou par la force physique (ATF 126 IV 225 consid. 1d). Il importe également peu que la victime ait déjà travaillé comme prostituée, car le consentement doit être valablement donné par rapport à la situation spécifique de chaque cas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1006/2009 du 26 mars 2010 consid. 4).

3.4. Le site Internet FEDPOL illustre des cas de traite d'êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle et précise notamment "les cas d'exploitation sexuelle frappent surtout des jeunes femmes à qui l'on fait croire qu'elles pourraient gagner suffisamment d'argent en travaillant comme aides ménagères, nounous ou coiffeuses et ainsi soutenir leur famille restée au pays. Une autre approche bien connue est la méthode dite du "Loverboy", dans laquelle des hommes généralement jeunes simulent à de jeunes femmes une relation d'amour, les plaçant ainsi dans une situation de dépendance émotionnelle leur permettant ensuite de les manipuler et de les exploiter sexuellement. Les Loverboy accompagnent les femmes depuis leur pays jusqu'en Suisse, où ils se révèlent alors être des proxénètes, jusqu'à ce qu'ils finissent par revendre leurs victimes à un moment où à un autre. Le Loverboy peut aussi trouver sa victime en Suisse".

3.5. Dans tous les cas, l'exploitation ne constitue que la finalité de l'infraction. L'état de fait délictueux est déjà entièrement réalisé par la commission d'un acte de traite en vue de l'exploitation, même si cette exploitation n'a finalement pas eu lieu. En ce sens, l'art. 182 CP est un délit formel (délit de comportement) dès lors qu'un résultat allant au-delà de la traite n'est pas une condition préalable et que l'activité criminelle prend fin lorsque l'acte de traite prend fin (arrêt du Tribunal fédéral 6B_469/2014 du 4 décembre 2014 consid. 3.1. ; arrêt de l’Obergericht de Zurich SB130481 du 23 janvier 2015, consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_4/2020 du 17 décembre 2020 consid. 4.1).

3.6. Pour que l'infraction soit réalisée, un seul acte suffit et peut ne concerner qu'une seule personne. L’art. 182 CP ne vise ainsi pas uniquement la criminalité internationale organisée, mais aussi des acteurs locaux isolés et/ou qui n’agissent pas de manière particulièrement structurée (A. DONATSCH, op.cit, p. 468 ; DUPUIS et al., Petit commentaire, Code pénal, 2012, n° 14 ad art. 182 ; B. CORBOZ, op. cit., n° 12 ad art. 182 ; le Message, FF 2005 2639 p. 2666). Le Tribunal fédéral a retenu que la traite d'êtres humains pouvait se produire lorsque des prostituées étaient transférées, sans leur consentement ou au moyen d'un consentement vicié, de façon interne à la Suisse, d'un établissement à un autre (ATF 129 IV 81 consid. 3.1. ; 126 IV 225 consid. 1d) et également lors de la "reprise" d'une prostituée sans son consentement par un proxénète – qui s'en estimait toujours "propriétaire" – auprès d'un autre "ayant-droit". L'acte de "reprise" pouvait alors être englobé sous la notion d'"acquisition" mentionnée dans la disposition légale (arrêt de l'Obergericht de Zurich SB110601 du 19 juillet 2012 consid. 4.2.4.2).

3.7. La définition usuelle du métier est applicable en cas de traite d'êtres humains. L'auteur agit de manière professionnelle, lorsqu'en raison du temps et des moyens consacrés à son activité délictueuse, ainsi que de la fréquence des actes pendant une période donnée et des revenus espérés ou obtenus, il ressort qu'il exerce son activité à la manière d'une profession, et en retire effectivement des revenus relativement réguliers contribuant de façon non négligeable à la satisfaction de ses besoins (Stoudmann, in CR CP II, n° 34 ad art. 182).

3.8. L'infraction est intentionnelle, mais le dol éventuel suffit. L'auteur est punissable dès le moment où il s'accommode du but de la traite (Dupuis et al., op.cit., n° 24 ad art. 182).

Exploitation de l'activité sexuelle/ Encouragement à la prostitution

3.9. L'art. 195 CP réprime, au titre de l'exploitation de l'activité sexuelle et de l'encouragement à la prostitution, le comportement de celui qui pousse un mineur à la prostitution ou favorise la prostitution de celui-ci dans le but d'en tirer un avantage patrimonial (let. a) ; pousse autrui à se prostituer en profitant d'un rapport de dépendance ou dans le but d'en tirer un avantage patrimonial (let. b) ; porte atteinte à la liberté d'action d'une personne qui se prostitue en la surveillant dans ses activités ou en lui imposant l'endroit, l'heure, la fréquence ou d'autres conditions (let. c) ; maintient une personne dans la prostitution (let. d).

Dans le cas de l'art. 195 let. b CP, "seule une personne qui ne s'adonne pas à la prostitution peut être poussée à l'exercer" (FF 1985 II 1099) et le comportement typique consiste à porter atteinte notablement à la volonté de la victime pour qu'elle s'adonne effectivement à la prostitution.

Dans l'hypothèse de l'art. 195 let. c CP, la victime est nécessairement une personne s'adonnant à la prostitution et le comportement typique consiste à porter atteinte à la liberté d'action de celle-ci (Dupuis et al., op. cit., n° 23-24 ad art. 195).

Se rend coupable de surveillance d'une personne prostituée celui qui contrôle si, comment et dans quelle mesure une prostituée se livre à ses activités, ou même celui qui exige déjà régulièrement qu'elle lui rende compte de son activité. Il s'agit des cas dans lesquels la personne prostituée, compte tenu de la surveillance, est limitée dans sa liberté d'action et ne peut plus exercer son activité selon sa propre volonté (Dupuis et al., op. cit., n° 25 ad art. 195).

Tombe également sous le coup de cette disposition l'auteur qui a une position dominante par rapport à la prostituée et qui lui impose la manière dont elle devra exercer son activité : fixation du montant que le client doit payer, détermination de la part qui revient à l'auteur, genre de pratiques sexuelles offertes, choix du client, lieu de l'activité, revenu journalier à réaliser, etc. (Dupuis et al., op. cit., n° 26 ad art. 195).

L'art. 195 al. 1 let. c CP suppose qu'une certaine pression soit exercée sur la victime, pression à laquelle elle ne peut sans autre se soustraire, de sorte qu'elle n'est plus entièrement libre de décider si et comment elle veut s'adonner à la prostitution. La pression exercée sur la victime implique parfois une certaine dépendance vis-à-vis de l'auteur, mais il ne sera pas nécessaire de prouver cette dépendance (Dupuis et al., op. cit., n° 27 ad art. 195). Il y a atteinte à la liberté de la prostituée lorsque l'auteur fait pression sur elle pour qu'elle continue cette activité alors qu'elle souhaiterait provisoirement l'interrompre ou la limiter, ne pas rechercher ou servir de nouveaux clients ou encore lorsqu'il exige qu'elle se livre à des actes d'ordre sexuel qu'elle réprouve (B. Corboz, op. cit., n. 48 ad art. 195).

Concours

3.10. Le Tribunal fédéral, qui considère que la traite d'êtres humains au sens de
l'art. 182 CP est un délit de comportement (cf. supra 3.1.5), a confirmé à plusieurs reprises une condamnation pour traite d'êtres humains en plus de l'encouragement à la prostitution (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_1006/200 du 26 mars 2010 consid. 4 ; 6B_277/2007 du 7 janvier 2008 consid. 5 ; ATF 129 IV 81 consid. 1 et 3), réprimant ainsi d'une part le fait d'acquérir ou de recruter des victimes, sans le consentement de ces dernières ou au moyen d'un consentement vicié, dans le but de les exploiter sexuellement, et d'autre part, le comportement visant à exploiter effectivement les victimes en leur imposant une pression dans l'exercice de la prostitution, entravant ainsi leur liberté d'action.

L'Obergericht de Zurich a aussi retenu à plusieurs reprises un concours réel entre les deux infractions, en rappelant la jurisprudence fédérale précitée et en se référant à l'avis doctrinal de DONATSCH qui considère que si l'auteur de traite a pour objectif que sa victime se trouve dans une situation où sa liberté, dans l'exercice de la prostitution, soit entravée, l'achèvement de la traite correspond au début de l'exploitation – laquelle est alors sanctionnée par l'art. 195 let. c CP – dont le titre en marge est bien "exploitation de l'activité sexuelle/encouragement à la prostitution". Si l'auteur accomplit ces deux actes distincts, il ne peut s'agir que d'un concours réel (arrêts de l'Obergericht de Zurich SB130481 du 19 juillet 2012 consid 4.2.1 ; SB130481 du 23 janvier 2015 consid. 1.1 ; A. DONATSCH, Strafrecht I, 9ème éd., Zurich 2013, § 9 n° 3).

Cet avis coïncide avec celui de CORBOZ qui considère que "la traite [ ] n'englobe pas nécessairement une pression sur la victime pour qu'elle se livre effectivement à des actes d'ordre sexuel". Le concours est possible pour autant que l'on parvienne à distinguer suffisamment le comportement qui tombe sous le coup de chacune des dispositions pénales (B. CORBOZ, op. cit., n° 22 ad art. 182) et celui du Conseil fédéral qui considère qu'un concours est possible entre les infractions de traite et les infractions contre l'intégrité sexuelle, de manière générale, y compris l'art. 195 CP (Message, FF 2005 2639 p. 2667).

Blanchiment d'argent

3.11. Selon l'art. 305bis ch. 1 CP, se rend coupable de blanchiment d'argent celui qui aura commis un acte propre à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales dont il savait ou devait présumer qu'elles provenaient d'un crime.

Le blanchiment d'argent est une infraction de mise en danger abstraite et non pas de résultat (ATF 128 IV 117 consid. 7a ; ATF 127 IV 20 consid. 3a). Le comportement délictueux consiste à entraver l'accès de l'autorité pénale au butin d'un crime, en rendant plus difficile l'établissement du lien de provenance entre la valeur patrimoniale et le crime. Il peut être réalisé par n'importe quel acte propre à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de la valeur patrimoniale provenant d'un crime mais il n'est pas nécessaire qu'il l'ait effectivement entravé (ATF 122 IV 211 consid. 2 ; ATF 199 IV 242 consid. 1a; ATF 128 IV 117 consid. 7a ; ATF 127 IV 20 consid. 3a). Selon le Tribunal fédéral, l'utilisation ou la destruction d'une valeur ou le fait de dépenser de l'argent sont des actes de blanchiment (SJ 2012 I 255 consid. 6.4).

Par crime, il faut comprendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans, conformément à l'art. 10 al. 2 CP (ATF 126 IV 255 consid. 3b.aa). Le crime préalable ne doit en outre pas être encore prescrit (ATF 129 IV 338 consid. 3.3 ; 126 IV 255 consid. 3b.bb).

L'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant (ATF 133 III 323 consid. 5.2). L'auteur doit vouloir ou accepter que le comportement qu'il choisit d'adopter soit propre à provoquer l'entrave prohibée. Au moment d'agir, il doit s'accommoder d'une réalisation possible des éléments constitutifs de l'infraction (ATF 122 IV 217 consid. 2 ; ATF 119 IV 247 consid. 2b).

Induction de la justice en erreur

3.12. Selon l'art. 304 ch. 1 al. 1 CP, celui qui aura dénoncé à l'autorité une infraction qu'il savait n'avoir pas été commise sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Cette disposition réprime ainsi la dénonciation d'une infraction fictive (Dupuis et. al., op. cit., n° 8 ad art. 304).

i) D______

3.2.1. En recrutant K______, laquelle se prostituait pour le compte d'un autre proxénète qui la maltraitait, et en l'accueillant chez lui, en lui faisant croire qu'elle serait mieux traitée avec lui, qu'elle se prostituerait dans de meilleures conditions et pour le bien de la famille qu'ils allaient fonder ensemble, que grâce aux gains issus de la prostitution, il allait économiser pour la construction d'une maison en Roumanie pour eux, mais également en la frappant et en la menaçant de l'abandonner sans un sous dans le but de maintenir son asservissement, D______ a porté atteinte à sa liberté d'autodétermination, dans le but qu'elle se prostitue pour son compte, soit à des fins d'exploitation sexuelle.

3.2.2. Il en a fait de même à l'encontre de O______, en l'amenant à Genève, alors que celle-ci vivait à AW______[Espagne] où elle se prostituait déjà, en l'hébergeant dans l'appartement de AU______[GE], en profitant du lien affectif qui les unissait, en lui faisant croire qu'elle se prostituerait désormais pour le bien de la famille, que grâce aux gains issus de la prostitution, il allait envoyer de l'argent à leurs enfants et économiser pour construire une maison en Roumanie pour eux, mais également en la frappant et en la menaçant, dans le but de maintenir son asservissement.

3.2.3. En agissant de la sorte, soit en mêlant phases d'affection et d'amour, alors qu'il éprouvait lui-même des sentiments pour AA_____, à des phases d'insultes, de menaces et de violences, afin de les maintenir sous sa coupe, D______ a réduit les plaignantes précitées au rang d'objets et de sources interchangeables de revenus, bafouant ainsi leur dignité humaine.

3.2.4. Il s'est ainsi rendu coupable de traite d'êtres humains (art. 182 CP) envers K______ et O______.

Le prévenu D______ a agi à l'encontre de deux victimes, et à réitérées reprises, maintenant la docilité de ses victimes, et profitant quotidiennement des gains de celles-ci, à la manière d'un revenu. Rien ne démontre qu'il n'aurait pas continué à agir de la sorte, à la manière d'un professionnel, si son interpellation n'avait pas mis fin à son activité. Au contraire, il ressort du dossier qu'à peine deux jours avant son interpellation, celui-ci avait réussi à convaincre la plaignante K______ de rester auprès de lui après leur forte dispute en lui promettant notamment de ne plus voir "I______" et d'arrêter la drogue. Partant, la circonstance aggravante du métier sera retenue à son encontre.

3.2.5. Le fait qu'il ne se soit pas "glorieusement enrichi" et que l'ampleur des gains obtenus en seulement quelques semaines, grâce à l'activité de prostitution des plaignantes K______ et O______, soit ou non établie est sans pertinence à ce stade, dès lors que l'exploitation n'est qu'une finalité et non un élément constitutif de la traite en tant que telle.

3.2.6. Le fait que les deux jeunes femmes se prostituaient déjà n'y change rien. En effet, le consentement de celles-ci de commencer à se prostituer pour le compte de D______, a été obtenu sur la base de la tromperie susmentionnée, et a donc été vicié. Le prévenu y percevait du reste des proies plus faciles.

3.2.7. Il importe également peu que la technique dite du "Loverboy" selon le site Internet FEDPOL implique en principe un mécanisme en deux temps, soit d'abord de rendre la victime dépendante émotionnellement, puis seulement de l'amener à se prostituer, ce qui n'était pas le cas ici puisque les jeunes femmes s'étaient immédiatement prostituées en arrivant chez les G______. En effet, le prévenu a bien, indépendamment de son éventuelle qualification de "Loverboy", réalisé les éléments constitutifs de la traite, étant précisé que cette méthode ne constitue qu'une des facettes de la traite.

3.2.8. Il sera encore précisé qu'il ne se justifie nullement de requalifier juridiquement les faits sous l'angle de l'encouragement à la prostitution selon l'art. 195 let. b CP, dès lors que les éléments de la traite sont réalisés en l'espèce. En tout état, l'art. 195 let. b CP ne protège que les victimes qui ne s'adonnent pas déjà à la prostitution et les faits ne sont nullement poursuivis sous cet angle à teneur de l'acte d'accusation.

3.2.9. Il a été retenu supra que les prévenus ne s'étaient pas contentés de recruter ou d'accueillir les victimes dans le but qu'elles se prostituent pour leur compte. Ils ont effectivement exploité sexuellement les jeunes femmes, en leur mettant une pression constante pour que celles-ci rapportent un maximum d'argent, avec pour effet qu'elles ne se sentaient nullement libres d'exercer leur activité comme elles le souhaitaient. Ainsi, en déterminant les lieux de prostitution des plaignantes K______ et O______, en surveillant leur activité par contacts téléphoniques constants ou grâce à la présence de A______ sur le terrain, en discutant sans cesse des tarifs ainsi que des pratiques à accepter, en les poussant à aller se prostituer même quand elles ne le souhaitaient pas en raison de la fatigue, de leurs règles ou de douleurs gynécologiques, et cela dans le but qu'elles gagnent un maximum d'argent, D______ a porté atteinte à la liberté d'exercer la prostitution des plaignantes précitées.

3.2.10. Il a par-là adopté un comportement distinct de celui réprimé par la traite et lésé un bien juridique différent. Il s'est dès lors également rendu coupable d'exploitation de l'activité sexuelle/d'encouragement à la prostitution au sens de l'art. 195 let. c CP, en concours réel parfait, à l'encontre de K______ et de O______.

3.2.11. Les gains issus de la traite des plaignantes K______, O______, M______ et I______ ont été, de concert entre les prévenus, conservés en liquide, mis dans le "pot commun" pour financer le loyer des prévenus, leurs besoins personnels, mais aussi transférés en Roumanie, notamment à un oncle de la famille en qui ils pouvaient avoir confiance, et cela afin de débuter la rénovation de leur maison. Il apparaît ainsi que les prévenus – dont il ressort du dossier qu'ils étaient parfaitement conscients de l'illégalité de leurs activités, ayant à plusieurs reprises émis, dans les enregistrements, la volonté de ne pas attirer l'attention de la police – souhaitaient bien dissimuler les économies effectuées grâce aux gains des jeunes-femmes. Les trois prévenus ayant profité des gains des plaignantes précitées, ils ont en co-activité, intentionnellement utilisé cet argent de manière à empêcher sa découverte, l'identification de son origine et sa confiscation. D______ s'est ainsi bien rendu coupable de blanchiment d'argent au sens de l'art. 305bis CP s'agissant des plaignantes précitées.

3.2.12. L'appel du MP sera admis s'agissant des faits en lien avec O______ et le jugement réformé en ce sens. L'appel joint de G______ sera rejeté et les verdicts de culpabilité prononcés par les premiers juges confirmés.

ii) G______

3.3.1. En recrutant M______, soit en effectuant les démarches nécessaires pour obtenir la maîtrise sur elle, en organisant grâce à l'aide de ses frère et sœur, la fuite de Zurich et la venue de la jeune femme à l'appartement de AU______[GE], en lui faisant croire qu'elle serait mieux traitée avec lui, qu'elle se prostituerait dans de bonnes conditions et pour le bien de la famille qu'ils allaient fonder ensemble, que grâce aux gains issus de la prostitution, il allait économiser pour la construction d'une maison en Roumanie pour eux, mais également en la menaçant de l'abandonner sans un sous et en la frappant dans le but de maintenir son asservissement, G______ a porté atteinte à sa liberté d'autodétermination, dans le but qu'elle se prostitue pour son compte, soit à des fins d'exploitation sexuelle.

3.3.2. En accourant au chevet de I______, une fois X______ parti, se faisant passer pour le bienfaiteur, la convainquant ainsi de rester au logement de AU______[GE] et de continuer à se prostituer pour le bien de la famille qu'ils allaient fonder ensemble, que grâce aux gains issus de la prostitution, il allait économiser pour la construction d'une maison en Roumanie pour eux, mais également en la frappant dans le but de maintenir son asservissement, G______ a vicié son consentement et a porté atteinte à sa liberté d'autodétermination, dans le but qu'elle se prostitue pour son compte, à des fins d'exploitation sexuelle.

3.3.3. En les déterminant par la tromperie à se prostituer pour son compte et en les maintenant ensuite sous sa coupe par la peur et les violences, G______ a considéré les jeunes femmes comme de simples objets de travail, bafouant leur dignité humaine.

3.3.4. G______ s'est donc bien rendu coupable de traite d'êtres humains (art. 182 CP) s'agissant des plaignantes M______ et I______.

Il importe peu qu'une transaction commerciale stricto sensu n'ait pas été réalisée, soit que G______ n'ait pas payé ou négocié avec les exploitants précédents la venue des jeunes femmes auprès de lui, cet élément n'étant pas une condition de réalisation de la traite d'êtres humains.

La période pénale retenue dans le jugement de première instance s'agissant de la plaignante I______ sera confirmée, le prévenu G______ ne s'y étant pas opposé au-delà de l'acquittement plaidé et celui-ci ayant par ailleurs admis être arrivé en Suisse lorsque l'affaire avec les filles avaient commencé.

Pour les motifs déjà évoqués ci-dessus, l'aggravante du métier sera retenue.

3.3.5. G______ s'est également rendu coupable d'encouragement à la prostitution au sens de l'art. 195 let. c CP, en concours réel parfait, à l'encontre de de M______ et de I______.

3.3.6. Il s'est aussi rendu coupable de blanchiment d'argent au sens de l'art. 305bis CP à l'encontre des précitées ainsi que de O______ et K______.

3.3.7. Selon les écoutes téléphoniques et les enregistrements, le prévenu G______ a eu l'idée d'annoncer un prétendu vol dans le but d'obtenir des documents d'identité qui auraient permis à la partie plaignante M______ de s'annoncer en vue de se prostituer. Le prévenu G______ a joué un rôle déterminant dans la prise de décision de la partie plaignante et a au demeurant admis les faits.

Le verdict de culpabilité d'instigation à induction de la justice en erreur sera donc confirmé.

3.3.8. L'appel du MP sera admis s'agissant du verdict de culpabilité de G______ du chef d'encouragement à la prostitution, en concours réel parfait avec l'infraction de traite, s'agissant des plaignantes M______ et I______ et également du chef de blanchiment d'argent en lien avec O______. L'appel joint de G______ sera rejeté et les verdicts de culpabilité prononcés par les premiers juges seront confirmés.


 

iii) A______

3.4.1. En accueillant et en hébergeant K______ et M______, et en organisant par ailleurs activement la venue de cette dernière à son domicile à Genève, en leur faisant croire que ses frères avaient des sentiments pour elles, alors qu'elle savait que ce n'était pas le cas, en jouant le rôle de confidente, de sœur ou de mère, en les incitant à se soumettre à ses frères et à se laisser battre par ceux-ci, A______ a porté atteinte à leur liberté d'autodétermination, afin qu'elles se prostituent pour le compte de la famille et de s'emparer de l'essentiel de leurs gains, soit dans un but d'exploitation sexuelle.

3.4.2. En accueillant et en hébergeant I______ à son domicile, en jouant le rôle de confidente, de sœur ou de mère, en écartant X______ et en organisant la venue de son frère G______ pour prendre le contrôle sur la jeune femme dont elle connaissait la vulnérabilité, afin de la pousser à continuer de se prostituer, cette fois-ci pour le compte de la fratrie, et s'emparer de l'essentiel de ses gains, soit dans un but d'exploitation sexuelle, A______ a porté atteinte à sa liberté d'autodétermination.

3.4.3. De la même façon, elle a, en agissant entièrement seule cette fois-ci, accueilli et hébergé P______ chez elle, a joué le rôle de confidente, de sœur ou de mère et a réussi à écarter Y______ en la poussant à déposer plainte contre lui, acquérant ainsi la maîtrise totale sur la jeune femme. Elle a profité de la vulnérabilité de la plaignante pour la tromper, en lui faisant croire qu'elle faisait partie de la famille, afin de la maintenir dans la prostitution et lui ponctionner tous ses gains, portant ainsi atteinte à sa liberté d'autodétermination.

3.4.4. Profitant de la vulnérabilité de chacune des jeunes-femmes, elle les a ainsi réduites à l'état des machines à produire de l'argent.

3.4.5. A______ s'est ainsi rendue coupable de traite d'êtres humains selon l'art. 182 CP envers les quatre jeunes femmes précitées, en coactivité avec G______ s'agissant de la plaignante K______, et en coactivité avec G______ s'agissant des plaignantes M______ et I______.

Pour les motifs déjà évoqués ci-dessus, l'aggravante du métier (art. 182 al. 2 CP ; cf. supra 3.2.4) sera retenue et l'éventuelle application de l'art 195 let. b CP écartée (cf. supra 3.2.8).

3.4.6. En surveillant quotidiennement l'activité de P______, de K______, de M______ et de I______, en organisant des rendez-vous à domicile et en fixant les tarifs, en les encourageant à accepter des relations non protégées ou des clients à des prix cassés pour les inciter à gagner un maximum d'argent, A______ a porté atteinte à leur liberté d'exercer la prostitution et partant, s'est également rendue coupable d'encouragement à la prostitution selon l'art. 195 let. c CP en concours réel parfait avec l'infraction de traite d'êtres humains.

3.4.7. En surveillant l'activité de O______, en l'encourageant à accepter des relations non protégées ou à des prix cassés, en la conseillant sur la façon de se comporter avec les clients, dans le but que celle-ci rapporte un maximum d'argent, A______ a porté atteinte à la liberté d'exercer la prostitution de la plaignante et s'est ainsi rendue coupable d'encouragement à la prostitution selon l'art. 195 let. c CP, en co-activité avec D______.

3.4.8. Pour les motifs exposés supra (cf. 3.2.11), elle s'est également rendue coupable, en co-activité avec ses frères, de blanchiment d'argent (art. 305bis CP) s'agissant des faits en lien avec les plaignantes O______, K______, M______ et I______.

Pour les mêmes motifs, elle s'est rendue coupable de blanchiment d'argent au sens de l'art. 305bis CP s'agissant de la plaignante P______.

3.4.9. Compte tenu de ce qui précède, l'appel du MP sera admis s'agissant des verdicts d'encouragement à la prostitution en concours réel parfait avec l'infraction de traite s'agissant des plaignantes K______, M______, I______ et P______. Il sera également admis s'agissant du verdict de culpabilité d'encouragement à la prostitution et celui de blanchiment d'argent en lien avec la plaignante O______. L'appel de A______ sera rejeté et les verdicts de culpabilité prononcés par les premiers juges confirmés.

4)      Peine

4.1.1. Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior).

4.1.2. En cas de concours réel d’infractions, la peine d’ensemble est fixée selon le droit en vigueur au moment du jugement (R. ROTH / L. MOREILLON [éds], Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, Bâle 2009, n. 19 ad art. 2 ; dans le même sens, M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 3e éd., Bâle 2013, n. 10 ad art. 2).

4.1.3. En l'espèce, les infractions reprochées à l'appelante sont à la fois antérieures et postérieures à l'entrée en vigueur du nouveau droit des sanctions le 1er janvier 2018. Comme l'application de l'ancienne ou de la nouvelle teneur du droit des sanctions ne conduit en l'espèce pas à un résultat différent, et, dans la mesure où les principes de fixation de la peine impliquent le prononcé d’une peine d’ensemble pour les infractions en concours, il sera fait application du nouveau droit.

4.2.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier, ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.2.3. Conformément à l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

Lorsqu'il s'avère que les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 127 IV 101 consid. 2b p. 104 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_688/2014 du 22 décembre 2017 consid. 27.2.1 ; 6B_1175/2017 du 11 avril 2018 consid. 2.1).

Le juge a l'obligation d'aggraver la peine en cas de concours d'infractions (ATF 103 IV 225 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1216/2017 du 11 juin 2018 consid. 1.1.1)

4.2.4. En l'espèce, la faute des prévenus est très lourde. Ils ont commis de multiples infractions et porté atteinte à de nombreux biens juridiques protégés notamment : la liberté d'autodétermination, la liberté sexuelle, l'intégrité physique, l'honneur, le patrimoine et l'administration de la justice. La multitude de biens lésés montre qu'ils ont pour habitude de s'affranchir des règles.

Sous l'angle de la traite et de l'encouragement à la prostitution en particulier, la période pénale est longue pour G______ et A______ (début juillet 2017 à fin septembre 2018) et plus courte s'agissant de D______. La volonté criminelle est marquée, étant précisé que seule l'interpellation des prévenus a mis fin à leurs agissements. Ils ont agi à l'encontre de multiples victimes, qu'ils considéraient comme étant interchangeables.

Le système de recrutement et la manipulation des victimes était pensé, rôdé, efficace. Par la tromperie, l'abus de vulnérabilité, les menaces et les violences, les prévenus D______ et G______ ont amené des jeunes femmes vulnérables et démunies à œuvrer pour eux, dans des conditions difficiles, serviles, pour leur seul profit. La prévenue A______ a pleinement participé à ce stratagème. Elle a gagné la confiance des jeunes femmes. Elle les a surveillées. Elle a géré la logistique du système mis en place. Elle a en outre agi à l'encontre de la plaignante P______ de façon similaire, faisant porter à quatre le nombre de ses victimes. Cela étant, dès lors que chacun des prévenus a agi dans l'intérêt du projet commun de la fratrie et qu'il est établi qu'ils ont tous, d'une façon ou d'une autre, profité des gains des parties plaignantes, la CPAR considère comme globalement équivalente la faute des trois prévenus, indépendamment du nombre de victimes officiellement attribuées à chaque prévenu. Il sera néanmoins tenu compte du fait que A______ n'a pas fait usage de violence physique, de menaces et d'insultes à l'encontre des jeunes femmes.

Les prévenus ont porté atteinte à la dignité humaine et aux libertés fondamentales de leurs victimes.

Ils ont agi par métier, circonstance aggravante.

Les mobiles des prévenus sont égoïstes. Ils tendent au seul appât du gain.

Ils s'obstinent à contester l’essentiel des faits. Ils ne concèdent rien – ou si peu. Leur collaboration a été très mauvaise. Ils ne se sont pas remis en question, n'ont pas présenté d'excuses, ni exprimé de regrets, à l’exclusion de celui de s’être fait interpeller et mettre en prison. Ils ont fait preuve de froideur voire encore d'absence totale d'humanité à l'égard de leurs victimes, G______ étant même allé jusqu'à déclarer aux débats d'appel qu'il aurait dû laisser M______ à Zurich car elle s'y serait faite assassiner et il n'aurait par conséquent pas été arrêté. Ils n'ont pas acquiescé aux actions civiles ou dans une très faible mesure et n’en ont pas reconnu le bien-fondé. A aucun moment les prévenus n’ont exprimé le souhait de dédommager leurs victimes, au contraire, aux débats d’appel, D______ évoque la volonté de consacrer les économies de son travail en prison à la rénovation de la fameuse maison en Roumanie.

La situation personnelle des prévenus n’explique pas leurs agissements. Le prévenu D______ a préféré l'oisiveté alors qu'il aurait eu des possibilités de travailler. La prise de drogue ne saurait justifier ses agissements. Les difficultés de santé du prévenu G______ ne lui permettaient aucunement d'agir de la sorte ; il aurait pu solliciter des autorisations pour jouer de son instrument en toute légalité. A______, au bénéfice d’un permis B, d’un logement, et de l’aide sociale, aurait pu s'abstenir, facilement, de sombrer dans la criminalité. Sous cet angle, ses actes apparaissent hautement répréhensibles.

Seule la prévenue A______ a des antécédents partiellement spécifiques. Les prévenus G______ et D______ n'ont pas d'antécédent au casier judiciaire suisse, ce qui a un effet neutre sur la peine.

Aucune circonstance atténuante n'est réalisée.

La responsabilité pénale des prévenus est entière.

L'état de santé du prévenu G______ est mauvais, ce qui le rend sans doute plus vulnérable que tout un chacun face à la peine.

Il y a concours d'infractions, facteur aggravant.

i) D______

Les infractions de traite d'êtres humains par métier, d'encouragement à la prostitution (commis à réitérées reprises), de blanchiment d'argent (commis à réitérées reprises), de recel, de lésions corporelles et de séjour illégal entrent en concours. Seule une peine privative de liberté entre en considération, la traite par métier imposant le prononcé d'une peine privative de liberté d'un an au moins (art. 182 al. 2 CP) et la situation financière des prévenus ne permettant pas le prononcé d'une peine pécuniaire. A cet égard, il convient tout d'abord de fixer une peine pour l'infraction la plus grave, soit la traite d'êtres humains qualifiée.

Au vu de l'ensemble des circonstances, la Cour arrêtera la peine à 36 mois s'agissant de la traite. Cette peine de base sera ensuite augmentée, dans une juste proportion, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour l'encouragement à la prostitution, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour le blanchiment d'argent, de trois mois pour le recel, de deux mois pour les lésions corporelles et d'un mois pour le séjour illégal. C'est donc une peine d'ensemble de quatre ans et demi qui sera prononcée.

Tant l'appel joint de D______ que l'appel du MP seront rejetés s'agissant de la peine privative de liberté. Le jugement entrepris sera néanmoins réformé dans le sens qui précède.

ii) G______

Les infractions de traite d'êtres humains par métier, d'encouragement à la prostitution (commis à réitérées reprises), de blanchiment d'argent (commis à réitérées reprises), d'instigation à induction de la justice en erreur et de séjour illégal entrent en concours.

La peine sera arrêtée à 38 mois s'agissant de la traite, étant précisé qu'il a agi sur une période plus longue que son frère. Cette peine de base sera ensuite augmentée, dans une juste proportion, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour l'encouragement à la prostitution, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour le blanchiment d'argent, de trois mois pour l'instigation à induction de la justice en erreur et d'un mois pour le séjour illégal. C'est donc une peine d'ensemble de quatre ans et demi qui sera prononcée.

Tant l'appel joint de G______ que l'appel du MP seront rejetés et le jugement entrepris confirmé s'agissant de la peine privative de liberté prononcée.

iii) A______

Les infractions de traite d'êtres humains par métier, d'encouragement à la prostitution (commis à réitérées reprises), de blanchiment d'argent, d'escroquerie, de délit manqué d'escroquerie, de faux dans les certificats et de facilitation de séjour illégal entrent en concours.

Au vu de ce qui précède, notamment du fait qu'il a été retenu que le projet de faire prostituer des femmes en Suisse en profitant de leur vulnérabilité et de s'emparer de leurs gains était un plan commun de la fratrie, que A______ n'a elle-même pas frappé les jeunes femmes, que celle-ci devait également se prostituer dans la rue aux côtés des jeunes-femmes, tandis que les frères D/G______ se contentaient de surveiller leur activité depuis le véhicule de D______ ou par téléphone, il apparaît que la peine fixée par le TCO au regard de la traite est excessive. La peine sera donc arrêtée à 30 mois à cet égard. Cette peine de base sera ensuite augmentée, dans une juste proportion, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour l'encouragement à la prostitution, de six mois (peine hypothétique de 12 mois) pour le blanchiment, de sept mois pour l'escroquerie, de deux mois chacun pour la tentative d'escroquerie et le faux dans les titres et d'un mois pour la facilitation de séjour illégal. C'est donc une peine d'ensemble de quatre ans et demi qui sera prononcée.

L'appel du MP sera rejeté s'agissant de la peine privative de liberté requise et l'appel de A______ partiellement admis au vu de la réduction de peine opérée.

Le sursis est exclu pour les trois prévenus au vu des peines prononcées (art. 42 et 43 CP).

Les autres éléments prononcés par le TCO en lien avec la peine, notamment les peines pécuniaires infligées en application de l'art. 182 al. 3 CP), non contestés et adéquats, seront confirmés.

Seront déduits des peines privatives de liberté infligées aux prévenus, les jours de détention subis.

Il sied en outre de déduire, pour A______, 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution, tels que correctement calculés par les premiers juges et non contestés par l'appelante.

5)      Détention pour les motifs de sûretés

Les motifs ayant conduit les premiers juges à prononcer, par ordonnance séparée du 2 octobre 2020, le maintien de A______, en détention pour des motifs de sûreté sont toujours d'actualité, ce que celle-ci ne conteste au demeurant pas, de sorte que la mesure sera reconduite mutatis mutandis (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

6)      Expulsion

6.1. D'après l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné notamment pour traite d'êtres humains (let. g) et encouragement à la prostitution (let. h), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans. Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. A cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse (art. 66a al. 2 CP).

6.2. En l'espèce, s'agissant d'un multiple cas d'expulsion obligatoire, celle-ci sera, confirmée. Les prévenus, sans attache en Suisse, ne remplissent pas les conditions de la clause de rigueur – ils ne le soutiennent pas. Les prévenus n'ont aucun lien avec la Suisse. Ils ont choisi de s'installer en Suisse et d'y commettre leurs méfaits par pur appât du gain. Il est rappelé qu'ils s'en sont pris notamment à la dignité humaine et aux libertés fondamentales de leurs victimes et qu'ils n'ont nullement pris conscience de leurs agissements compte tenu de leurs dénégations, si bien qu'il ne s'impose pas de réduire à cinq ans la durée de ladite mesure. Proportionnée, elle sera confirmée pour une durée de dix ans à l'égard des trois prévenus.

6.3. Il n'y a pas lieu d'étendre la mesure d'expulsion à l'ensemble de l'espace Schengen, les prévenus étant ressortissants d'un État membre.

6.4. La peine privative de liberté devra être exécutée avant l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

7)      Conclusions civiles

7.1. A teneur de l'art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale.

Les conclusions civiles consistent principalement en des prétentions en dommages-intérêts (art. 41 ss de la loi fédérale complétant le code civil suisse [CO]) et en réparation du tort moral (art. 47 et 49 CO) dirigées contre le prévenu. La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

L'indemnité allouée pour tort moral doit être équitable (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 p. 342). Le juge en adaptera le montant à la gravité de l'atteinte subie et évitera que la somme accordée n'apparaisse dérisoire à la victime (ATF 141 III 97 consid. 11.2 p. 98 ; ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 704 s. ; ATF 129 IV 22 consid. 7.2 p. 36). La fixation du tort moral procède d'une appréciation des circonstances et l'autorité compétente bénéficie d'un large pouvoir d'appréciation en la matière (arrêts du Tribunal fédéral 6B_118/2016 du 20 mars 2017 consid. 6.1 ; ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 705).

Toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (ATF 138 III 337 consid. 6.3.3 p. 345 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_118/2016 du 20 mars 2017 consid. 6.1).

La jurisprudence en la matière n'est pas nombreuse, mais ont notamment été accordées des indemnités de :

- CHF 5'000.- pour des ouvriers victime de traite d'êtres humains, exploités sur un chantier (JTCO/43/2020 du 9 avril 2020) ;

- de CHF 5'000.- à 12'000.- pour des femmes victimes d'encouragement à la prostitution dans des salons de massage, sur des durées de 6 jours à 4 mois (arrêt du Tribunal fédéral 6B_628/2012 du 18 juillet 2013 consid. 2.4.4) ;

- CHF 15'000.- pour une femme victime de traite et d'encouragement à la prostitution (JTCO/50/2021 du 19 mai 2021).

7.2. En l'espèce, les prévenus ne remettent pas en question, dans leur principe, les allocations d'indemnités pour tort moral et en réparation des dommages matériels, ni ne soulèvent de grief particulier s'agissant des montants alloués en première instance, au-delà des acquittements plaidés.

Bien que les souffrances des parties plaignantes ne soient pas étayées au dossier, elles sont incontestables au regard de la nature des crimes subis. L'octroi d'une indemnité en tort moral doit être admis.

Il en va de même de l'indemnité en réparation des dommages matériels, même si les gains réalisés ne sont pas établis par pièces, au vu de la nature de l'activité réalisée par les plaignantes et le fait que les prévenus s'emparaient de la quasi totalité de leurs revenus.

Ainsi donc, les montants octroyés par les premiers juges aux plaignantes K______, M______ et P______, adéquats, et les condamnations des prévenus à cet égard, seront confirmés.

Le rejet des conclusions civiles de la plaignante O______ sera confirmé dans la mesure où celle-ci n'a pas formulé d'appel.

S'agissant de l'appelante jointe I______, le montant de CHF 7'000.- requis à titre de tort moral en lieu et place des CHF 5'000.- alloués en première instance, paraît équitable, étant rappelé que les prévenus A______ et G______ ont été reconnus coupables en appel non seulement de traite d'êtres humains mais également d'encouragement à la prostitution et que les souffrances subies se sont étalées sur une période allant à tout le moins de début juillet 2017 à fin décembre 2017. Le montant de CHF 20'000.- à titre de réparation des dommages matériels sera quant à lui confirmé, étant précisé que le calcul a été effectué a minima par la plaignante et que G______ a par ailleurs déclaré en cours de procédure s'en remettre aux déclarations de la plaignante à ce propos.

Les dates médianes retenues par les premiers juges, non contestées en appel, s'agissant du départ du taux d'intérêt de 5% pour chacune des indemnités octroyées, seront confirmées.

L'appel joint de la plaignante I______ sera par conséquent admis et le jugement réformé en ce qui la concerne. Il sera confirmé pour le surplus.

8)      Inventaires

8.1.1. A teneur de l'art. 69 CP, alors même qu'aucune personne déterminée n'est punissable, le juge prononce la confiscation des objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d'une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (al. 1). Le juge peut ordonner que les objets confisqués soient mis hors d'usage ou détruits (al. 2).

La question de l'adéquation de confisquer des objets qu'il est en tout temps possible de se procurer sans difficulté particulière s'examine au cas par cas. La confiscation du véhicule appartenant à l'auteur d'infractions chroniques au code de la route permet à tout le moins de retarder ou d'entraver la commission de nouvelles infractions (ATF 137 IV 249 consid. 4.5.2).

Si l'objet ne présente un danger que dans les mains de l'auteur de l'infraction, le principe de proportionnalité veut que l'objet soit éliminé et que le produit de la vente soit restitué à l'ayant droit (ATF 135 I 209, consid. 3.3.2). Toutefois, le produit de réalisation présumé ne doit pas sembler d'emblée manifestement disproportionné par rapport aux frais de garde et de réalisation. Ce n'est que dans ce cas que l'ayant droit a un intérêt digne de protection (en termes de valeur) sous l'angle de l'art. 26 de la Constitution fédérale (Cst.) à ce que les objets qui lui ont été saisis et qui ne lui ont pas été restitués soient préalablement réalisés en sa faveur. Si aucun produit de réalisation pertinent n'est attendu, aucune mesure ne prime constitutionnellement la confiscation, la destruction ou la mise hors d'usage sans indemnisation. La réalisation au profit de l'Etat ne se justifie toutefois pas dès lors que ce procédé ne poursuivrait plus le but sécuritaire de l'art. 69 CP et constituerait une sanction patrimoniale supplémentaire injustifiée (ATF 135 I 209 consid. 4).

8.1.2. Les développements internationaux en matière de lutte contre la traite d'êtres humains prévoient qu'il convient d’utiliser pleinement les instruments existants en matière de saisie et de confiscation des produits du crime, telle que la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, et d’encourager l’utilisation des instruments et produits de la traite qui ont été saisis ou confisqués aux fins de financer l’assistance aux victimes et la protection de celles-ci (cf. notamment § 13 de la Directive 2011/36/UE du Parlement et du Conseil européen du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes).

L'art. 12 al. 1 let. b de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, entrée en vigueur pour la Suisse le 26 novembre 2006 prévoit que les États parties adoptent, dans toute la mesure possible dans le cadre de leurs systèmes juridiques nationaux, les mesures nécessaires pour permettre la confiscation des biens, des matériels et autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour les infractions de criminalité transnationale organisée.

8.1.3. Selon l'art. 267 al. 1 et 3 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le ministère public ou le tribunal lève la mesure et restitue les objets et valeurs patrimoniales à l'ayant droit (al. 1). La restitution à l'ayant droit des objets et des valeurs patrimoniales séquestrés qui n'ont pas été libérés auparavant, leur utilisation pour couvrir les frais ou leur confiscation sont statuées dans la décision finale (al. 3).

8.2.1. Il est non seulement constant que D______ a conduit à de multiples reprises le véhicule Q______ saisi alors qu'il était démuni de permis de conduire mais également qu'il véhiculait les plaignantes O______, K______ et M______ sur leurs lieux de travail et qu'il surveillait leur activité à l'aide dudit véhicule. Au vu de la jurisprudence applicable et à la lumière des développements internationaux en matière de traite, la confiscation du véhicule en cause, poursuivant le but de retarder la commission de nouvelles infractions, se justifie.

Le principe de proportionnalité ne s'oppose au demeurant pas à la confiscation du véhicule et à sa destruction, sans qu'il ne soit nécessaire de le réaliser et d'indemniser le prévenu D______. En effet il n'apparaît pas que sa vente permettrait de couvrir les frais de garde et de réalisation, mais encore d'indemniser le prévenu dès lors que celui-ci a expliqué avoir acquis ledit véhicule pour la somme de CHF 1'500.-, qu'il ne prétend pas que sa valeur vénale serait supérieure et que les frais de fourrière dépassent déjà largement ce montant.

Le véhicule Q______ immatriculée 6______ (GB) saisi et figurant à l'inventaire sera dès lors confisqué et détruit.

L'appel du MP sera admis sur ce point et le jugement entrepris réformé dans le sens de ce qui précède.

8.2.2. Le jugement querellé sera confirmé s'agissant des autres points adéquats et non litigieux des inventaires, étant précisé que les conclusions des plaignantes P______ et M______ formulées à cet égard dans leurs déterminations du 4 mai 2021 sont irrecevables, celles-ci n'ayant pas formé d'appel ou d'appel joint (cf. art. 398 et 404 CPP).

9)      Frais

9.1. Aux termes de l'art. 428 al. 1 CPP, les frais de procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé.

9.2.1. En l'espèce, l'appelante A______ succombe en grande partie, voyant sa culpabilité non seulement confirmée pour l'ensemble des chefs d'infractions retenus par le TCO mais également alourdie en appel du chef d'encouragement à la prostitution pour l'ensemble des parties plaignantes et de blanchiment d'argent s'agissant de O______. Elle obtient cependant partiellement gain de cause au vu de la réduction de peine opérée.

G______ succombe entièrement dans ses conclusions, voyant sa culpabilité non seulement confirmée pour l'ensemble des chefs d'infractions retenus par le TCO mais également alourdie en appel du chef d'encouragement à la prostitution s'agissant des plaignantes M______ et I______ mais également du chef de blanchiment d'argent en lien avec O______, et sa peine entièrement confirmée.

D______ succombe également entièrement dans ses conclusions, voyant sa culpabilité non seulement confirmée pour l'ensemble des chefs d'infractions retenus par le TCO mais également alourdie en appel du chef de traite d'êtres humains, encouragement à la prostitution et blanchiment d'argent concernant O______, d'une part, et du chef d'encouragement à la prostitution s'agissant de la plaignante K______, d'autre part, et sa peine augmentée en conséquence.

9.2.2. Les frais de procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 8'000.- (art. 428 CPP et 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]), seront répartis entre les trois prévenus à hauteur de 1/3 chacun.

La prévenue A______ supportera les 80% de sa part, le solde étant laissé à la charge de l'Etat.

9.3. La mise à leur charge des frais de procédure de première instance et leur proportion seront confirmées (art. 426 CPP).


 

10)  Assistance judiciaire

10.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. A Genève, le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus s'applique : avocat stagiaire CHF 110.- (art. 16 let. a du règlement sur l'assistance juridique [RAJ]) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c).

En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du 16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.

10.2. Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu. On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. REISER / B. CHAPPUIS (éds), Commentaire romand, Loi fédérale sur la libre circulation des avocats, Bâle 2010, n. 257 ad art. 12). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

10.3. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

10.4. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- / CHF 75.- / CHF 100.- pour les stagiaires / collaborateurs / chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

10.5. En l'occurrence, les états de frais produits par Me F______, Me H______ et Me C______, défenseurs d'office respectifs de D______, G______ et A______, satisfont les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. La durée des débats d'appels sera ajoutée et le pourcentage de 10% pour le forfait pour activités diverses sera retenu au vu de l'activité déployée depuis le début de la procédure, vacations et TVA en sus.

Il en va de même de l'état de frais produit par Me J______, conseil juridique gratuit de l'appelante jointe I______ et de Me L______, conseil juridique gratuit de la plaignante K______.

10.5.1. La rémunération de Me F______ sera arrêtée à CHF 8'689.10 correspondant à 65 heures d'activité au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 7'150.-) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 715.-), deux vacations au tarif de CHF 55.- (CHF 110.-), l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 614.10, et CHF 100.- à titre de débours.

10.5.2. La rémunération de Me H______ sera arrêtée à CHF 11'925.25 correspondant à 47 heures et 20 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 9'466.-), 1 heure et 30 minutes au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 165.-), plus la majoration forfaitaire de 10 % (CHF 963.10), deux vacations au tarif de CHF 100.- (CHF 200.-), l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 831.15, et CHF 300.- à titre de débours.

10.5.3. La rémunération de Me C______ sera arrêtée à CHF 18'618.55 correspondant à 77 heures et 40 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 15'534.-) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 1'553.40), deux vacations au tarif de CHF 100.- (CHF 200.-), et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 1'331.15.

10.5.4. La rémunération de Me J______ sera arrêtée à CHF 5'328.60 correspondant à 21 heures et 35 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 4'316.-), plus la majoration forfaitaire de 10 % (CHF 431.60), deux vacations au tarif de CHF 100.- (CHF 200.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 381.-.

10.5.5. La rémunération de Me L______ sera arrêtée à CHF 4'926.20 correspondant à 9 heures et 20 minutes d'activité au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 1'399.50), et 7 heures et 10 minutes d'activité au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 788.70), plus les 17 heures de débats d'appel au tarif de stagiaire (CHF 1'870) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 405.80), deux vacations au tarif de CHF 55.- (CHF 110.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 352.20.

10.5.6. De l'état de frais de Me N______, conseil juridique gratuit de M______, il est considéré que 16 heures d'activité était globalement suffisante pour l'étude du dossier, la rédaction des plaidoiries et des conclusions civiles, étant relevé que la plaignante M______ n'a pas formulé d'appel ni d'appel joint et que le dossier est supposé connu de l'avocate qui l'a plaidé il y a peu en première instance, durée des débats d'appels, forfait de 10 %, vacations et TVA en sus.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 8'034.40 correspondant à
33 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 6'600.-), plus la majoration forfaitaire de 10 % (CHF 660.-), deux vacations au tarif de CHF 100.- (CHF 200.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 574.40.

10.5.7. De l'état de frais de Me W______, conseil juridique gratuit de P______, seront retenues 16 heures au tarif de cheffe d'Etude pour les mêmes raisons que susmentionnées, durée des débats d'appels, forfait de 10 %, vacations et TVA en sus.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 8'034.40 correspondant à
33 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 6'600.-), plus la majoration forfaitaire de 10 % (CHF 660.-), deux vacations au tarif de CHF 100.- (CHF 200.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 574.40.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit les appels formés par le Ministère public et A______, ainsi que les appels joints formés par G______, D______ et I______ contre le jugement JTCO/134/2020 rendu le 2 octobre 2020 dans la procédure P/15714/2018.

Admet partiellement les appels du Ministère public et de A______.

Admet l'appel joint de I______ et rejette ceux de G______ et D______ et

Modifie le jugement entrepris comme suit :

Déclare A______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), d'encouragement à la prostitution (art. 195 let. c CP), de délit manqué d'escroquerie (art. 22 al. 1 cum 146 al. 1 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 al. 1 et 2 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et de facilitation du séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Acquitte A______ de contrainte (art. 181 CP), de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de quatre ans et six mois, sous déduction de 723 jours de détention avant jugement et de 38 jours à titre d'imputation des mesures de substitution.

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de dix ans (art. 66a al. 1 let. e et g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion.

Ordonne le maintien en détention pour des motifs de sûreté de A______ (art. 231 al. 1 CPP).

*****

Déclare G______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), d'encouragement à la prostitution (art. 195 let. c CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), d'instigation à induction de la justice en erreur (art. 24 al. 1 cum 304 ch. 1 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Acquitte G______ de facilitation de séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a LEI).

Condamne G______ à une peine privative de liberté de quatre ans et six mois, sous déduction de 1039 jours de détention avant jugement (dont 50 jours en exécution anticipée de peine).

Condamne G______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit G______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Condamne G______ à une amende de CHF 200.-.

Prononce une peine privative de liberté de substitution de deux jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de G______ pour une durée de dix ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion.

*****

Déclare D______ coupable de traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 1 et 2 CP), d'encouragement à la prostitution (art. 195 let. c CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), d'injure (art. 177 al. 1 CP), de tentative de menaces (art. 22 al. 1 cum 180 al. 1 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) et d'infraction à la loi fédérale sur la circulation routière (art. 99 al. 1 let. b LCR).

Condamne D______ à une peine privative de liberté de quatre ans et six mois, sous déduction de 1039 jours de détention avant jugement dont 219 jours en exécution anticipée de peine).

Condamne D______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Assortit la peine pécuniaire du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit D______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Condamne D______ à une amende de CHF 600.-.

Prononce une peine privative de liberté de substitution de six jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de D______ pour une durée de dix ans (art. 66a al. 1 let. g CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion.

*****

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ EUR 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel.

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à M______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 11 septembre 2018 à titre de réparation du tort moral.

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du dommage matériel.

Condamne A______ et G______, conjointement et solidairement, à payer à I______ CHF 7'000.-, avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2018, à titre de réparation du tort moral.

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 11'760.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du dommage matériel.

Condamne A______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à K______ CHF 4'000.-, avec intérêts à 5% dès le 24 septembre 2018, à titre de réparation du tort moral.

Condamne A______ à payer à P______ CHF 20'000.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018, à titre de réparation du dommage matériel.

Condamne A______ à payer à P______ CHF 3'500.- avec intérêts à 5% dès le 15 avril 2018 à titre de réparation du tort moral.

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles de l'HOSPICE GENERAL dans leur principe.

Renvoie l'HOSPICE GENERAL à agir par la voie civile.

Déboute O______ de ses conclusions civiles.

*****

Ordonne la confiscation et la destruction des objets et de la drogue figurant sous chiffres 1, 2, 6, 9, 10, 15, 18, 23 et 25 de l'inventaire n° 3______ du 24 septembre 2018, sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 4______ du 25 février 2019, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 5______ du 24 septembre 2018, ainsi que du véhicule Q______ immatriculé 6______ (GB).

Ordonne la restitution à D______ des objets figurant sous chiffres 3, 4, 7, 8, 11, 21 et 22, à A______ de ceux figurant sous chiffres 13, 14, 17 (la carte AD______ [de la banque] R______ au nom de A______) et 19, à G______ du portemonnaie noir, de la carte S______ au nom de G______ et de la carte T______ au nom de G______ figurant sous chiffre 17, à son ayant droit de l'ordinateur figurant sous chiffre 16, à U______ de la carte V______ audit nom figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n° 3______ du 24 septembre 2018 et à l'OCPM du livret pour étranger B au nom de P______ figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 7______ du 3 septembre 2018.

Ordonne le versement à la procédure de l'enveloppe contenant le courrier de l'OCPM au nom de P______ figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 7______ du 3 septembre 2018.

Ordonne la confiscation des valeurs patrimoniales (CHF 8.20 et EUR 660.-) figurant sous chiffres 5 et 24 de l'inventaire n° 3______ du 24 septembre 2018, sous déduction de la somme de CHF 150.- versée à G______ à titre humanitaire.

Alloue à M______ les valeurs patrimoniales confisquées et les amendes payées par A______ et G______, M______ ayant cédé à l'Etat, à concurrence de tout montant effectivement recouvré, sa créance en dommages-intérêts contre A______ et G______.

*****

Condamne A______, G______, D______ aux frais de la procédure de première instance, qui s'élèvent à CHF 80'010.60, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun.

Condamne A______, G______ et D______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 10'485.- , qui comprennent un émolument de CHF 8'000.- à raison d'un tiers chacun.

Met les 80% de la part de A______ à sa charge, le solde étant laissé à la charge de l'Etat.

*****

Prend acte des rémunérations fixées aux défenseurs et conseils juridiques des parties pour la procédure de première instance.

*****

Arrête à CHF 18'618.55 la rémunération de Me C______, défenseure d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 8'689.10, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me F______, défenseure d'office de D______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 11'925.25 la rémunération de Me H______, défenseur d'office de G______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 5'328.60 la rémunération de Me J______, conseil juridique gratuit de I______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 4'926.20 la rémunération de Me L______, conseil juridique gratuit de K______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 8'034.40 la rémunération de Me N______, conseil juridique gratuit de M______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 8'034.40 la rémunération de Me W______, conseil juridique gratuit de P______ , pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, à l'Etablissement fermé E______, à la Prison de B______, au Secrétariat d'Etat aux migrations, à l'Office fédéral de la police, l'Office cantonal de la population et des migrations, à la Fourrière des véhicules, au Service cantonal des véhicules, au Service de l'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Dagmara MORARJEE

 

Le président :

Gregory ORCI

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

 

 

 

 

 

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

80'010.60

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Frais de fourrière

CHF

1'500.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

560.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

350.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

8'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

10'485.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

90'495.60