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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2254/2023

JTAPI/568/2024 du 11.06.2024 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;ÉTAT DE SANTÉ;RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);ENFANT;SOINS MÉDICAUX;AUDITION OU INTERROGATOIRE;DEVOIR DE COLLABORER;FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : LEI.1.alb; OASA.31.al1; LEI.29; LEI.24; CDE.3; CDE.27; LEI.64; LEI.83; LEI.90
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2254/2023

JTAPI/568/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 11 juin 2024

 

dans la cause

 

Madame A______ agissant en son nom et celui de ses enfants mineurs B______, C______ et D______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1985, est ressortissante du Rwanda.

2.             L’intéressée est mère de trois enfants, soit B______, né le ______ 2018, C______, née le ______ 2019 et D______, né le ______ 2021, dont le père est Monsieur E______. Tous sont également ressortissants du Rwanda.

3.             Selon ses déclarations, elle serait arrivée en Suisse le 18 novembre 2018 pour une série de réunions de travail dans le cadre de ses fonctions et de sa formation en tant que Junior Professionnel Officer auprès de S______ (S______). Le même jour, elle avait dû se rendre aux urgences de la maternité. Elle avait dû y être opérée afin de donner naissance à son fils à 27 semaines de grossesse.

4.             Le 4 mars 2019, Mme A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour pour elle et son fils B______. A l’appui de sa requête, elle a expliqué que son enfant était né grand prématuré et qu’il devait rester hospitalisé en néonatologie pendant une durée indéterminée.

5.             Le 24 octobre 2019, Mme A______ a fait parvenir à l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) un formulaire médical rempli par le pédiatre de son fils duquel il ressort qu'B______ devait avoir un suivi psychomoteur, respiratoire et du développement pondéral pour une durée indéterminée. Le pronostic était bon pour autant que des contrôles par des spécialistes soient effectués afin de prévenir et de prendre en charge des troubles psycho-développementaux qui pouvaient se développer chez des grands prématurés. Elle expliquait pour le surplus que son mari les prenait en charge financièrement car elle avait dû abandonner son emploi en Guinée à F______.

6.             Le 20 août 2021, faisant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, Mme A______ lui a transmis un nouveau rapport médical du 15 juillet 2021, établi par la Dre G______ et le Dr H______, de la Fondation I______, lequel indiquait notamment qu’B______ était atteint d'un trouble du spectre autistique (TSA) et qu'un traitement de prise en charge précoce était recommandé (un accompagnement psychothérapeutique au sein du centre de consultation spécialisé en autisme [CCSA] suivant le modèle ESDM
[Early Start Denver Model]). Cet accompagnement psychothérapeutique, complémenté d’un traitement de logopédie et d’un traitement de psychomotricité, était envisagé jusqu'en août 2023. Sur le plan somatique, il était mentionné qu’B______ était actuellement en bonne santé habituelle. Depuis 2020, elle était aidée financièrement par l’Hospice général car son mari avait perdu son travail et elle avait dû renoncer au sien en Guinée pour s’occuper de son fils. Faute de permis, elle n’était pas en mesure de postuler pour un travail en Suisse bien qu’elle était très motivée. Elle ne pouvait renoncer aux soins de qualité dont son fils ne pourrait bénéficier dans son pays d’origine, faute d’institutions et de médecins spécialisés.

7.             Le 25 février 2022, faisant suite à une nouvelle demande de renseignements de l’OCPM, Mme A______ a expliqué que son époux se trouvait au Rwanda et qu'il ne pouvait pas la prendre en charge, ainsi que ses enfants, car il avait perdu son travail en raison de la situation sanitaire, sans compter les crises politiques incessantes et les enlèvements de fonctionnaires en Haïti où il était basé pour son emploi. Elle ne pouvait pas fournir de preuves de recherches d'emploi car elle ne pouvait pas postuler sur différentes plateformes, en raison du fait qu'elle n'avait pas de titre de séjour. Elle devait en outre trouver un travail flexible pour pouvoir continuer à s’occuper de son fils.

8.             Il ressort d’une attestation de l’Hospice général du 9 juin 2022, que Mme A______ et ses enfants sont aidés financièrement depuis 2000.

9.             Le 29 août 2022, la représentation diplomatique suisse à Nairobi a transmis à l’OCPM les réponses reçues de l’association J______, concernant la prise en charge des enfants autistes dans ce pays. A teneur de ces dernières, une prise en charge existait dans leur centre et dans certaines écoles privées ou internationales toutefois pas accessibles à la majorité des familles. Le modèle ESDM n’était pas utilisé dans leur centre mais ils utilisaient les méthodes ABA, PECS, Imitation et TEACCH. Il y avait également des centres accueillant des enfants avec différents handicaps. L’Etat ne participait pas au coût. Le prix de l’écolage à J______ était de 30’0000 (recte : 300’000) FRW par trimestre plus le transport scolaire (50'000 FRW) et la restauration (50'000 FRW), soit un total d’environ CHF 375.-/mois.

10.         Par courrier du 9 septembre 2022, l'OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser d'accéder à sa demande d’autorisation. Un délai de trente jours lui était octroyé pour faire part, par écrit, de ses observations et objections éventuelles.

11.         Dans le délai prolongé pour ses observations, Mme A______ a expliqué qu'il n'existait pas de traitement pour l'autisme mais différentes thérapies qui aidaient à améliorer la vie des personnes autistes et à les rendre plus autonomes. Au Rwanda, « la connaissance, l'expertise et la recherche ne sont pas existantes ». Il y avait certes l’association J______, mais elle n’accueillait que des enfants (26) qui n'avaient aucun autre antécédent médical contrairement à son fils, car elle n'avait pas de personnels formés dans la santé. Cela lui avait été confirmé par l’association. A sa demande, le CCSA avait également cherché des informations sur les possibilités de prise en charge au Rwanda mais il n'avait rien trouvé. C’était uniquement en raison des problèmes de santé de son fils qu'elle était restée en Suisse, rappelant qu'elle avait un bon salaire (USD 8'000.-) en tant qu'employée des Nations Unies et qu’elle avait fait dix ans d'études supérieures. Son mari commencerait un nouveau travail international et elle souhaitait pouvoir faire ses preuves au niveau professionnel grâce à un permis de séjour.

12.         Par ordonnance pénale du 21 mars 2023, Mme A______ a été reconnue coupable de tentative d’escroquerie et de faux dans les titres, pour avoir intentionnellement créé puis transmis à la Fondation K______ une fausse lettre de soutien à l’entête de l’Hospice général et sous le nom d’une assistante sociale, dans le but de se voir accorder une aide financière de la fondation précitée et de se procurer un avantage illicite, puis d’avoir tenté intentionnellement de tromper astucieusement la fondation laquelle avait accepté de lui accorder une aide financière de CHF 9'600.-, argent qui ne lui avait finalement pas été transféré.

13.         Par décision du 5 juin 2023, l’OCPM a refusé d'octroyer une autorisation de séjour à Mme A______ et à ses enfants et prononcé leur renvoi, le dossier ne faisant pas apparaître que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou pas raisonnablement exigible au sens de l'art. 83 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Un délai au 5 octobre 2023 leur était imparti pour ce faire.

Les conditions d'octroi d'une autorisation de séjour au sens des art. 29 et 30 LEI n’étaient pas satisfaites en l’espèce. Le séjour en Suisse de la recourante était de courte durée (4 ans) et elle n'avait pas démontré être particulièrement intégrée. Elle percevait des prestations de l'aide sociale depuis 2020 et faisait l'objet de poursuites. Son mari vivait actuellement au Rwanda et des traitements pour l'autisme de son fils B______ étaient disponibles là-bas selon les informations que l'association J______ avait fournies à la représentation suisse à Nairobi. L’affirmation qu’B______ ne pourrait être pris en charge par cette association n'était démontrée par aucun document. Elle ne pouvait prétendre à un titre de séjour pour traitement médical, ne disposant pas de moyens financiers pour prendre en charge le traitement de son fils et leurs frais courants. Enfin, compte tenu de sa position professionnelle avant sa venue en Suisse, elle ne rencontrerait probablement pas de problème pour se réinsérer professionnellement au Rwanda et y serait à même de financer le traitement d'B______ conjointement avec son époux.

S'agissant de la prise en compte de l'intérêt supérieur des enfants conformément à l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107), il convenait de retenir qu’B______, C______ et D______ étaient âgés de 4 ans, 3 ans et 19 mois, qu'ils n’étaient pas encore scolarisés, de sorte que leur intégration en Suisse n'était pas encore déterminante, que les cadets étaient en bonne santé et que le trouble dont souffrait l’ainé pouvait être soigné au Rwanda. Dans ces conditions, leur réintégration dans leur pays d'origine ne devrait pas leur poser des problèmes insurmontables.

14.         Par acte du 4 juillet 2023, Mme A______, agissant pour elle-même et ses enfants, a recouru auprès du tribunal contre cette décision.

Son fils ainé B______, âgé de 4 et demi, était atteint d’un TSA. Il était né à Genève à 6 mois et avait connu des problèmes de santé très importants qui l’avaient contrainte à rester à Genève pour le soigner jusqu'à ses 2 ans et demi. Dès que son TSA avait été diagnostiqué, il avait commencé des thérapies afin d'améliorer sa vie et pouvoir, peut-être, vivre « normalement ». Elle contestait l’existence de traitements des TSA au Rwanda. Le TSA n’était pas une maladie mais une condition/un handicap à vie. Seules existaient des thérapies ainsi que des écoles spécialisées qui aidaient à améliorer la vie des personnes autistes et leur permettaient de mener une vie plus au moins autonome. Au Rwanda, la connaissance, l'expertise et la recherche étaient inexistantes. Elle renvoyait aux informations fournies par l’OMS sur le TSA. Elle avait fourni toutes les informations utiles concernant B______, lesquelles provenaient notamment des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) et du I______ qui suivaient B______ depuis sa naissance.

Elle avait contacté l'association J______ en vue de l’accueil d’B______. Celle-ci lui avait répondu ne pas avoir de compétences pour son cas. En réalité, les TSA n’étaient pas connus au Rwanda. À ce jour, il n'existait ni médecins ni enseignants spécialisés dans ce domaine. Il n'y avait aucun plan stratégique santé et encore moins d’accompagnement éducatif. Les enfants avec des particularités n’étaient pas scolarisés. Elle a repris les explications fournies le 25 février 2022, en les détaillant, s’agissant de sa situation personnelle. En juin 2023, son mari avait retrouvé du travail et il pourrait prendre en charge sa famille. Ils ne seraient dès lors plus à l’Hospice général à compter de fin de juillet 2023. Elle était également en train de rembourser ses dettes.

Elle contestait ne pas avoir les moyens financiers pour prendre en charge le traitement de son fils. Grâce au travail de son mari, toute la famille disposait d’une assurance internationale onusienne. B______, qui entrait dans la catégorie « handicapé », était ainsi pris en charge à 100 %.

Alors qu’elle était en mesure de s'intégrer professionnellement (vu son parcours académique et professionnel en Europe et ses connaissances linguistiques), de prendre soins de sa famille et de contribuer au développement de la Suisse, l'OCPM avait refusé de lui donner cette opportunité

S'agissant enfin de la prise en compte de l'intérêt supérieur d’B______, ce dernier devait pouvoir être pris en charge par des professionnels compétents, intégrer une école spécialisée fin août 2023 et peut-être, après quelques années, il serait en mesure de suivre une scolarité normale. Alors, ils rentreraient avec plaisir au Rwanda.

Elle a joint une décision du service de pédagogie spécialisée rattaché au département de l’instruction publique de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) du 31 mai 2023 octroyant à B______ la prestation en enseignement spécialisé du 1er août 2023 au 31 juillet 2024, une attestation de l’association J______ du 14 octobre 2022 expliquant ne pas être en mesure d’accueillir B______ dès lors qu’il avait également besoin des suivis réguliers de pneumologie, cardiologie, psychomotricité et unité de développement donnés aux grands prématurés, une copie du contrat de travail du 4 juillet 2023 de M. E______ auprès de l’L______, en Syrie, du 15 juin 2023 au 14 juin 2025, une carte d’assurance concernant ce dernier ainsi qu’un article de 2014 intitulé « Devenir et prise en charge des enfants grands prématurés ».

15.         Dans ses observations du 6 septembre 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours, s’en rapportant aux motifs de sa décision du 5 juin 2023.

Les conditions de l’art. 29 LEI n’étaient manifestement pas réalisées, la recourante et ses enfants résidant en Suisse depuis plus de deux ans et percevant des prestations de l'aide sociale depuis 2020. La sortie de Suisse n'était en outre pas garantie, la recourante expliquant dans son recours qu'un retour au Rwanda n'était pas envisageable avant plusieurs années. Enfin, il n'avait pas été attesté que l'enfant B______ devait suivre un traitement médical particulier au-delà du mois d'août 2023. Dans ce contexte, même une éventuelle prise en charge financière de la famille par le mari de la recourante, récemment engagé par le L______ en Syrie, ne suffirait pas pour la délivrance d'une autorisation de séjour fondée sur cette disposition, les autres conditions cumulatives n'étant pas remplies.

Sous l’angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l’ ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007
(OASA - RS 142.201), la recourante, arrivée en Suisse en 2019, ne pouvait pas se prévaloir d'un long séjour et son intégration n’était pas bonne, percevant des prestations de l’Hospice général et ayant notamment été condamnée le 21 mars 2023 par le Ministère public pour tentative d'escroquerie et faux dans les titres à une peine de 90 jours-amende. L'état de santé d’B______ ne pouvait enfin justifier l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur mais serait examiné sous l'angle de l'exigibilité du renvoi. A cet égard, selon les deux derniers rapports médicaux transmis, des 15 juillet 2021 et 4 novembre 2022, B______, atteint d'un TSA, nécessitait jusqu'en août 2023 un accompagnement psychothérapeutique suivant le modèle du ESDM, complété par un suivi en logopédie et en psychomotricité. A ce jour, la recourante n’avait pas produit de certificat médical mais alléguait, en substance, que son fils ne pourrait pas être pris en charge dans son pays d’origine car il n'existait aucun médecin, ni enseignant spécialisé pour les enfants atteints d'un TSA au Rwanda, ce qui était contredit par les explications communiquées par l'Ambassade de Suisse à Nairobi le 29 août 2022. Aussi, en l'absence de preuves contraires, il considérait que le renvoi de la recourante et ses enfants était raisonnablement exigible.

16.         La recourante a répliqué le 3 octobre 2023.

Les centres à Muhanga, Karongi etc accueillaient des personnes sourdes ou malentendantes, des muets et d'autres personnes avec des malformations congénitales, abandonnées par leurs familles pour des raisons socio culturelles. Cela n’avait rien à voir avec le TSA de son fils. L’association J______ n’avait pas les compétences pour le prendre en charge et sa responsable, qui n'était ni médecin ni psychologue, l’avait confirmé lors d’un entretien téléphonique avec la Fondation I______ Genève. Elle avait écrit au Ministre de la santé du Rwanda avec copie à l'ambassadeur du Rwanda en Suisse, afin de confirmer l’absence de services spécialisés en autisme dans le pays et était dans l’attente d’une réponse. Elle persistait dans ses conclusions, concluant, subsidiairement, à ce qu’un délai d’un an au minimum lui soit octroyé afin de lui permettre de chercher hors de Suisse un autre hôpital avec un centre spécialisé en autisme et une école spécialisé compétente qui puissent prendre en charge B______ et priait le tribunal de bien vouloir faire suspendre le signalement dans le Système d'information Schengen (SIS).

Elle a joint un rapport médical du 27 janvier 2023, suite à un examen du 20 juillet 2022, ainsi qu’un courrier du 2 octobre 2023 du CCSA. A teneur dudit rapport, B______ était toujours suivi aux HUG pour les problèmes de santé liés à sa grande prématurité. Au niveau de la symptomatologie du TSA, de beaux progrès avait été relevés dans les domaines de la communication, des interactions sociales et au niveau développemental. Les diagnostics de TSA et autisme infantile étaient posés. Concernant le traitement, il était nécessaire qu’B______ poursuive ses thérapies en logopédie, psychomotricité et psychothérapie, probablement jusqu’en août 2024 et qu’un suivi ponctuel par un psychologue ou un médecin soit assuré. Le pronostic sans traitement ou en cas d’interruption serait un arrêt de l’évolution positive constatée, une difficulté à maintenir les acquis, voire une régression des compétences. Concernant enfin les possibilités de traitement dans le pays d’origine, selon les informations à disposition, le diagnostic de TSA n’était pas reconnu au Rwanda et il n’y avait pas de prises en charge spécialisées des jeunes enfants
(12 à 60 mois) selon les lignes directrices internationales pour la prise en charge de TSA. L’auteure du rapport invitait dès lors à considérer favorablement la demande de titre de séjour pour B______ et sa famille.

Il ressort du courrier du 2 octobre 2023, qu’B______ était suivi par le CCSA depuis avril 2021. Il bénéficiait d'un suivi en psychothérapie en individuel et d’un coaching parental avec sa mère. Depuis août 2023, il était scolarisé dans une école spécialisée M______ où il était accompagné par un psychologue de la Fondation I______ à un taux de 50 % (1P et 2P). Ce dispositif était accessible uniquement aux enfants sortant des centres d'intervention précoce en autisme (CIPA), à l'âge de 4 ans puisque B______ avait été suivi par la Fondation dès ses deux ans et demi. Un bilan était prévu en décembre 2023, afin de savoir si B______ serait orienté vers les Ecoles de Pédagogie Spécialisée
(ECPS, anciennement CMP). Par ailleurs, B______ bénéficiait d'un suivi en psychomotricité et en logopédie au sein de l’école. Les auteurs du rapport précisaient ne pas être en mesure de prévoir l’état évolutif d’B______ dans les années à venir. Le suivi rapproché de personnes souffrant d’un TSA avait cependant permis d’améliorer très nettement leur situation. Elles étaient autonomes et pouvaient mener une vie plutôt socialement satisfaisante. B______ présentait quelques symptômes négatifs sur le point de vie psychologique et physique notamment l'auto agressivité, les troubles du sommeil très importants etc. Il était toutefois encore jeune et ils ne pouvaient se permettre de poser des diagnostiques très lourds avant ses sept ans et soutenaient la poursuite des thérapies pour son TSA en Suisse. En collaboration avec les HUG et la Fondation I______, ils n'avaient pas pu trouver un confrère qui pourrait le suivre au Rwanda.

17.         Par duplique du 12 octobre 2023, l’OCPM a rappelé que, s’agissant de la prise en charge d’B______, sa décision se fondait sur les informations communiquées par l’Ambassade de Suisse le 29 août 2022. Il n’avait pas d’observations complémentaires à formuler.

18.         Le 22 janvier 2024, le tribunal a convoqué les parties à une audience du 8 février 2024. Dans ce cadre, étaient également convoqués le Dre H______, signataire du courrier du 2 octobre 2023 de la Fondation I______, et le Dr N______, pédiatre d’B______, afin qu’ils soient entendus en qualité de témoins.

19.         Par courrier non daté réceptionné le 26 janvier 2024, la Fondation I______ a informé le tribunal que Mme O______ était l’actuelle répondante thérapeutique du mineur B______. Le Pr. P______ était le médecin cadre référent. La dernière intervention du Dr H______ auprès de la famille datait du 15 juillet 2021 et il ne serait pas en mesure de lui donner une réponse actuelle au traitement du dossier.

20.         Par courrier du 29 janvier 2024, le Dr N______ a informé le tribunal ne plus être le pédiatre du mineur B______ depuis le 10 décembre 2021. Comme sa maman ne payait pas ses factures, elle avait préféré changer de pédiatre et il avait transmis le dossier à la Dre Q______.

21.         Le 29 janvier 2024, le tribunal a convoqué Mme O______ et la Dre Q______, en qualité de témoins, à l’audience du 6 février 2024, ce dont il a informé les parties.

22.         Par courrier du 1er février 2024, Mme A______ a requis le report de l’audience du 8 février 2024 pour raisons de santé, relevant que sa santé mentale l’empêchait de comparaitre devant le tribunal ce jour-là. Un certificat médical attestant de son incapacité d’assister à l’audience serait envoyé au tribunal le lundi 5 février 2023 (sic) après le rendez-vous avec son médecin. Elle s’engageait à informer le tribunal dès que sa santé lui permettrait d’assister à une audience et à coopérer pleinement.

23.         Par courrier du 6 février 2024, le tribunal a annulé l’audience du 8 février 2024 et invité Mme A______ à lui communiquer d’ici au 12 février 2024 un certificat médical circonstancié attestant de son incapacité à comparaitre et précisant la durée prévisible de celle-ci. A toutes fins utiles, il lui était rappelé son devoir de collaborer à la constatation des faits.

24.         Aucune suite n’ayant été donnée à ce courrier, le tribunal a réitéré sa demande, par courrier du 29 février 2024, rappelant à Mme A______ la teneur des art. 22 à 24 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) et l’informant qu’il pourrait constater qu’elle se désintéressait de la cause qu’elle avait elle-même introduite et prononcer l’irrecevabilité de son recours.

25.         Le 12 mars 2024, Mme A______ a adressé au tribunal un certificat médical du Dr R______ indiquant : « Du fait de son état de santé Madame A______ est actuellement dans l’incapacité de ses présenter à des audiences. Ce certificat est valable jusqu’au 12 avril 2024 ».

26.         Par courrier du 18 avril 2024, revenant sur le certificat médical précité, le tribunal a informé Mme A______ qu’il entendait poursuivre l'instruction du dossier et envisageait la tenue d'une nouvelle audience de comparution personnelle et d'enquêtes durant la deuxième quinzaine de mai. Cela étant, si son incapacité de se présenter à des audiences devait se poursuivre jusqu’à cette période, ce qu’il lui appartiendrait d'attester par la production d'un certificat médical circonstancié attestant de son incapacité à comparaitre et précisant la durée prévisible de celle-ci, il l’invitait à bien vouloir délier de leurs secrets professionnels les Dr R______ et Q______ ainsi que Mme O______, afin que l'instruction puisse se poursuivre par écrit.

Un délai au 6 mai 2024 lui était imparti pour confirmer au tribunal sa participation à l'audience qui serait agendée durant la deuxième quinzaine de mai ou lui fournir le certificat médical requis ainsi que les pièces attestant de la levée des secrets professionnels des Dr R______ et Q______ et de Mme O______.

A défaut et lui rappelant la teneur des art. 22, 23 et 24 LPA, il ne pourrait que constater qu’elle se désintéressait de la cause qu’elle avait elle-même introduite et prononcer l'irrecevabilité de ses conclusions.

27.         Le 29 avril 2024, Mme A______ a adressé au tribunal un certificat médical du Dr R______ indiquant : « Du fait de son état de santé Madame A______ est actuellement dans l’incapacité de se présenter à des audiences. Ce certificat est valable jusqu’au 31 mai 2024 ». Il était précisé que l’intéressée était en traitement régulier auprès de lui depuis le 11 mars 2024 et que le certificat médical lui avait été remis en main propre.

28.         Aucune suite n’a été donnée au courrier du 18 avril 2024 du tribunal, depuis lors.

29.         Le 17 mai 2024, l’OCPM a transmis au tribunal un rapport de l’office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières du 23 avril 2024 faisant état du franchissement de la frontière intérieure de Mme A______ avec son fils B______ le lundi 22 avril 2024 à 11h00. Appréhendée lors de son entrée en Suisse, l’intéressée, identifiée au moyen de son passeport, leur avait indiqué qu’elle était en procédure au tribunal et qu’elle avait le droit de rester en Suisse avec ses enfants. Elle était allée en France avec son fils pour voir de la famille.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

4.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ;
140  I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

5.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

7.             L’art. 24 LPA énonce que l’autorité peut inviter les parties à la renseigner, notamment en produisant les pièces en leur possession ou à se prononcer sur les faits constatés ou allégués et leur fixer un délai à cet effet. L’autorité apprécie librement l’attitude d’une partie qui refuse de produire une pièce ou d’indiquer où celle-ci se trouve. Elle peut ainsi le cas échéant déclarer irrecevables les conclusions des parties qui refusent de produire les pièces et autres renseignements indispensables pour que l'autorité puisse prendre sa décision.

En cas d'absence de production des documents nécessaires, le risque de se voir reprocher son défaut de collaboration dans une procédure régie par la maxime inquisitoire existe (ATF 130 II 425 consid. 6.6 ; 125 V 193 consid. 2 et références citées).

8.             La recourante conteste le refus de l’OCPM de lui délivrer, ainsi qu’à ses enfants, une autorisation de séjour.

9.             La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Rwanda.

10.         Les conditions d’entrée d’un étranger en Suisse sont régies par les art. 5 ss LEI.

11.         Selon l’art. 29 LEI, un étranger peut être admis en vue d’un traitement médical si le financement et le départ de Suisse sont garantis.

12.         Même lorsque les conditions posées à cet article sont cumulativement remplies, l’étranger ne dispose pas d’un droit à la délivrance d’une autorisation de séjour pour suivre un traitement médical en Suisse, l’art. 29 LEI étant rédigé en la forme potestative (« Kann-Vorschrift »), sauf à pouvoir se prévaloir d’une disposition particulière du droit fédéral ou d’un traité lui conférant un tel droit (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.1), ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Ainsi, même si toutes les conditions de l’art. 29 LEI sont remplies, l’étranger qui sollicite une telle autorisation ne bénéficie pas d’un droit à l’obtenir et les conditions posées à l’article précité ont pour seul effet d’exclure l’octroi d’un permis de séjour à celui qui n’y satisfait pas.

13.         L’autorisation de séjour pour traitement médical est une autorisation de courte durée. Elle peut ainsi être octroyée pour une durée limitée d’une année au plus (art. 32 al. 1 LEI). Une prolongation jusqu’à une durée totale de deux ans est toutefois envisageable (art. 32 al. 3 LEI). Les conditions d’un tel séjour d’une durée inférieure ou égale à nonante jours sur une période de cent-quatre-vingts jours sont quant à elles réglées par les dispositions relatives au visa Schengen (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.3 et références citées).

14.         La notion de traitement médical au sens de l’art. 29 LEI doit être interprétée de manière large. Sont ainsi également assimilés à un traitement médical, un séjour de réhabilitation faisant suite à une maladie et une cure. Selon la doctrine, la nécessité d’un traitement médical en Suisse n’est plus une condition d’application de
l’art. 29 LEI. Un simple souhait suffit (arrêt du Tribunal administratif fédéral
F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.4 et références citées).

15.         Par ailleurs, il ressort de la doctrine et de la jurisprudence que le séjour pour traitement médical au sens de l’art. 29 LEI est de nature temporaire et que l’étranger requérant l’application de cette disposition légale doit apporter la garantie qu’il quittera la Suisse à l’issue du traitement suivi (art. 5 al. 2 LEI). À ce titre, l’autorité administrative doit analyser si le retour du requérant dans son pays d’origine apparaît comme certain compte tenu, d’une part, de sa situation personnelle, familiale et professionnelle, et, d’autre part, de la situation politique, économique et sociale du pays de provenance. Ainsi par exemple, le départ de Suisse n’est pas assuré lorsque l’intéressé doit suivre un traitement médical sur une longue période (cinq à dix ans) et que la fin de son séjour envisagé en Suisse n’est pas clairement définie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.6 et les références citées).

16.         Séjournant en Suisse depuis novembre 2018, soit depuis plus de cinq ans, la recourante ne remplit à l’évidence pas les conditions de durée de l’art. 32 al. 1 et 3 LEI. En outre, ses déclarations ont varié s’agissant de son retour dans son pays d’origine. Dans la mesure où elle souhaite désormais obtenir un permis de séjour pour demeurer et travailler en Suisse, il convient de retenir que son retour au Rwanda n’est manifestement pas garanti.

Compte tenu de ce qui précède, la recourante ne peut bénéficier d’une autorisation de séjour pour traitement médical de son fils.

17.         Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b). En vertu de l’art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l’OASA.

18.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

19.         À teneur de l’art. 58a al. 1 LEI, pour évaluer l’intégration, l’autorité compétente tient compte des critères suivants ; le respect de la sécurité et de l’ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (let. d).

20.         Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3).

21.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées).

22.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid.4.6 et les références citées ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

23.         S’agissant de la condition de la durée totale du séjour, elle constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. Il s’agit d’un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4145/2017 du 10 octobre 2018 consid. 5.1 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017).

24.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ;
F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3).

L’intégration socio-culturelle n’est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ;
C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral
C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

25.         Lorsqu’il y a lieu d’examiner la situation d’une famille sous l’angle de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément mais en relation avec le contexte familial global. Le sort de la famille formera en général un tout. Il serait en effet difficile d’admettre le cas d’extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants.

Ainsi le problème des enfants est un aspect, certes important, de l’examen de la situation de la famille, mais ce n’est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d’ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille. Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu’il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d’origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socio-culturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour au pays d’origine constitue un déracinement complet (ATAF 2007/16 du 1er juin 2007 et les références citées ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 2d). Avec la scolarisation, l’intégration au milieu suisse s’accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l’âge de l’enfant lors de son arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencées en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l’école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L’adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 2d). Le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, telle qu’elle est prescrite par l’art. 3 par. 1 CDE (arrêt du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3).

26.         Selon l’art. 3 CDE, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs (al. 1). Par ailleurs, les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées (al. 2).

27.         L’art. 27 par. 1 CDE précise encore que les États parties reconnaissent le droit de tout enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social.

Les dispositions de la CDE ne posent que des principes dont les autorités législatives, exécutives et judiciaires des États parties doivent s’inspirer. Ces dispositions ne font d’ailleurs pas de l’intérêt de l’enfant un critère exclusif, mais un élément d’appréciation dont l’autorité doit tenir compte lorsqu’il s’agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_927/2011 du 9 janvier 2013 consid. 5.2).

Hormis des cas d’extrême gravité, l’état de santé ne peut fonder un droit à une autorisation de séjour, ni sous l’aspect de l’art. 3, ni sous celui de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (arrêt du Tribunal fédéral 2C_891/2016 du 27 septembre 2016 consid. 3.3 et la référence citée).

28.         Des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur lorsque l’intéressé démontre souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/1217/2020 du 1er décembre 2020 ; ATA/1162/ 2020 du 17 novembre 2020 consid. 6c ; ATA/801/2018 du 7 août 2018 consid. 8a et les références cités).

Une grave maladie (à supposer qu’elle ne puisse pas être soignée dans le pays d’origine) ne saurait cependant justifier à elle seule la reconnaissance d’un cas de rigueur, l’aspect médical ne constituant que l’un des éléments, parmi d’autres à prendre en considération (ATF 128 II 200 consid. 5.1 à 5.4 ; 123 II 125 consid. 5b/dd et les références citées ; arrêts du Tribunal administratif fédéral
C-6545/ 2010 du 25 octobre 2011 consid. 6.4 ; C-7939/2007 du 29 mars 2010 consid. 7.2 et 7.2.2). Ainsi, en l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, le facteur médical ne saurait constituer un élément suffisant pour justifier la reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité.

Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 83 al. 4 LEI et un individu ne pouvant se prévaloir que d’arguments d’ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d’origine et souffrant de la même maladie (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; F-7044/2014 du 19 juillet 2016 consid. 5.5.1 ; C-5710/2011 du 13 décembre 2013 consid. 5.1 ; ATA/895/2019 du 14 mai 2019 consid. 6f).

29.         Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d’un droit à l’autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l’inverse aurait pour effet de déduire de l’art. 96 LEI un droit à l’obtention ou au renouvellement de l’autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

30.         En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal parvient à la conclusion que l’autorité intimée n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que la recourante et ses enfants ne satisfont pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA pour la reconnaissance d’un cas de rigueur.

S’agissant tout d’abord de la durée du séjour sur le sol helvétique, la recourante y séjourne depuis novembre 2018 et ses enfants y sont nés en ______ 2018, ______ 2019 et ______ 2021. Leur séjour ne peut être considéré comme de longue durée au sens des critères susmentionnés. En tout état, la durée de ce dernier doit être fortement relativisée dès lors qu’il a été effectué de manière illégale jusqu’au dépôt de la demande d’autorisation, en mars 2019, puis à la faveur d’une simple tolérance. Or, la recourante ne peut déduire des droits résultant d’un état de fait créé en violation de la loi. La durée du séjour n’est par ailleurs qu’un élément parmi d’autres à prendre en compte, ne permettant pas à elle seule la reconnaissance d'un cas de rigueur, indépendamment des autres critères d'intégration.

Le tribunal doit pour le surplus constater que l’intégration de la recourante n’est pas bonne. Elle émarge à l’aide sociale depuis 2020, fait l’objet de poursuites et a été reconnue coupable, par ordonnance pénale du 21 mars 2023, de tentative d’escroquerie et de faux dans les titres, comportement qui dénote un certain mépris pour l'ordre juridique suisse et ses valeurs. Il n’apparaît en outre pas qu’elle se soit particulièrement investie dans la vie associative ou culturelle genevoise durant son séjour. S’il peut être retenu, sur la base de ses écritures, qu’elle maîtrise le français, elle n’a fourni aucune pièce afin de démontrer son intégration sociale. Par ailleurs, elle ne peut se prévaloir d’avoir acquis en Suisse des connaissances ou des qualifications si spécifiques qu'elle ne pourrait les utiliser dans son pays. En revanche, hautement qualifiée et au bénéficie de plusieurs années d’expérience professionnelle, notamment en Guinée, elle devrait facilement pouvoir retrouver un emploi dans son pays d’origine et ainsi recouvrer une indépendance financière. L’on rappellera encore que la recourante est née au Rwanda où elle a passé son enfance, son adolescence et les premières années de sa vie d’adulte. Elle en maîtrise dès lors la langue et la culture et y a certainement conservé des attaches. L’on relèvera à cet égard que le père de ses enfants est également ressortissant de ce pays. Actuellement sous contrat de travail auprès de l’L______, en Syrie, jusqu’au 14 juin 2025, il devrait pouvoir soutenir financièrement sa famille lors de sa réinstallation. Un retour au Rwanda ne devrait ainsi pas constituer un véritable déracinement pour la recourante ni une mesure disproportionnée.

La famille formant un tout, il convient encore d’examiner si ses enfants seraient dans un cas d’extrême gravité. Ceux-ci sont âgés respectivement de 5, 4 et 2 ans, de sorte que leur intégration en Suisse ne parait pas si profonde et qu’une réintégration dans leur pays d’origine n’apparait pas compromise. Encore très jeunes et tout juste scolarisés pour les deux ainés, ils restent rattachés dans une large mesure, par le biais de leur mère, au pays d’origine de cette dernière.

S’agissant spécifiquement d’B______, celui-ci est né grand prématuré et est atteint d'un TSA. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, sur le plan somatique, il est en bonne santé habituelle et, si dans son rapport du 27 janvier 2023, le CCSA indique qu’B______ est toujours suivi aux HUG, aucun document ne vient attester d’un suivi spécifique, à l’heure actuelle, en lien avec sa prématurité. Invitée par le tribunal à lever le pédiatre d’B______ de son secret médical afin qu’il puisse lui fournir des renseignements actualisés sur ses éventuels besoins et son suivi, la recourante n’a pas donné suite. Elle n’a pas non plus fourni de documents postérieurs à mars 2019 à ce sujet ni encore transmis au tribunal de certificat circonstancié expliquant pour quels motifs elle n’était pas en mesure d’assister à des audiences devant le tribunal en février et en mai 2024, afin notamment de renseigner le tribunal sur la situation d’B______. Contrairement à l’engagement pris le 1er février 2024, elle n’a pas non plus informé le tribunal de sa capacité future à assister à une audience, ce alors même que le dernier certificat médical transmis indique une incapacité à assister à des audiences jusqu’au 31 mai 2024 uniquement. En l’absence de coopération de la recourante, le tribunal ne peut dès lors que statuer en l’état du dossier et retiendra par conséquent, faute de preuves contraires, qu’aucun suivi spécifique n’est actuellement mis en place, respectivement nécessaire, sur le plan somatique, pour B______.

En lien avec son TSA, il ressort des pièces au dossier qu'un traitement de prise en charge précoce était recommandé (un accompagnement psychothérapeutique au sein du CCSA suivant le modèle ESDM). A teneur du rapport médical du 27 janvier 2023 du CCSA, au niveau de la symptomatologie du TSA, de beaux progrès ont été relevés dans les domaines de la communication, des interactions sociales et au niveau développemental. Concernant son traitement, il est nécessaire qu’B______ poursuive ses thérapies en logopédie, psychomotricité et psychothérapie, probablement jusqu’en août 2024 et qu’un suivi ponctuel par un psychologue ou un médecin soit assuré. Le pronostic sans traitement ou en cas d’interruption serait un arrêt de l’évolution positive constatée, une difficulté à maintenir les acquis, voire une régression des compétences. S’agissant enfin des possibilités de traitement dans le pays d’origine, l’auteure du rapport indique que selon les informations à disposition, le diagnostic de TSA n’est pas reconnu au Rwanda et qu’il n’y a pas de prises en charge spécialisées des jeunes enfants (12 à 60 mois) selon les lignes directrices internationales pour la prise en charge de TSA, invitant dès lors à considérer favorablement la demande de titre de séjour pour B______ et sa famille. Il ressort enfin du courrier du 2 octobre 2023 du CCSA, qu’à cette date, il était suivi au sein dudit centre depuis avril 2021 et bénéficiait d'un suivi en psychothérapie en individuel et d’un coaching parental avec sa mère. Depuis août 2023, il est scolarisé dans une école spécialisée M______ où il est accompagné par un psychologue de la Fondation I______ à un taux de 50 % (1P et 2P). Un bilan était prévu en décembre 2023, afin de savoir si B______ serait orienté vers les ECPS. Par ailleurs, il bénéficie d'un suivi en psychomotricité et en logopédie au sein de l’école. Les auteurs du courrier relèvent encore que des « diagnostiques très lourds » ne peuvent être posés avant ses sept ans, qu’ils soutiennent la poursuite des thérapies pour son TSA en Suisse et, qu’en collaboration avec les HUG et la Fondation I______, ils n'ont pas pu trouver un confrère qui pourrait le suivre au Rwanda. Invitée par le tribunal à lever la répondante thérapeutique et le médecin cadre référent d’B______ de leur secret médical afin qu’ils puissent lui fournir des renseignements actualisés sur ses éventuels besoins et son suivi en lien avec son TSA, la recourante n’a pas donné suite.

Cela étant, il ressort des réponses de l’association J______ concernant la prise en charge des enfants autistes dans ce pays, transmises le 29 août 2022 par la représentation diplomatique suisse à Nairobi, qu’une prise en charge existe dans leur centre et dans certaines écoles privées ou internationales toutefois pas accessibles à la majorité des familles. Les méthodes ABA, PECS, Imitation et TEACCH sont utilisées. Il y a également des centres qui accueillent des enfants avec différents handicaps. L’Etat ne participe pas au coût. Le prix de l’écolage à J______ est d’environ CHF 375.- par mois, transport et restauration scolaires compris. S’agissant de l’absence de compétences alléguée de cette association pour la prise en charge d’B______, elle ne saurait être retenue à ce stade, la réponse de cette association se fondant sur le préalable non démontré que cet enfant nécessiterait aujourd’hui encore des suivis réguliers de pneumologie, cardiologie, psychomotricité et unité de développement. En tout état, ces suivis n’auraient pas à être réalisés par l’association J______ mais pourraient avoir lieu dans l’un des nombreux hôpitaux et/ou centres hospitaliers présents dans ce pays. Le tribunal a également pu constater en naviguant sur le site de l’association, que cette dernière, composée notamment de psychologues, disposait d’une expérience de plus de 9 ans dans la prise en charge d’enfants de 2 à 15 ans souffrant d’un TSA (https://______.org/ consulté ce jour).

Partant, il doit être constaté que la problématique médicale d’B______, sur la base des informations dont dispose le tribunal, ne saurait, à elle seule, justifier l’octroi d’un titre de séjour pour cas de rigueur. De plus, il faut rappeler que, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas pour justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers. Au vu de ce constat, il appartiendra dès lors à la recourante, avec l’aide du réseau mis en place à Genève, de prendre les mesures utiles pour B______ en vue d’assurer sa prise en charge adéquate au Rwanda. La famille disposant d’une assurance internationale onusienne, cette prise en charge tant sur le plan médical strict qu’au sein de l’association J______ ne devrait enfin pas poser de problèmes financiers.

Il découle de ce qui précède que l’OCPM n’a violé ni l’art. 3 CDE ni la LEI, ni abusé de son pouvoir d’appréciation en rejetant la demande d’autorisation de séjour de la recourante et de ses enfants. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit respecter la latitude de jugement conférée à l’autorité intimée, ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

31.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, l’autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée.

Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5268/2008 du 1er juin 2011 consid. 10 ;
C-406/2006 du 2 septembre 2008 consid. 8 et la référence citée ; ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 6b).

32.         En l’occurrence, dès lors qu’il a refusé de délivrer une autorisation de séjour aux recourants, l’OCPM devait en soi ordonner leur renvoi de Suisse en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI.

33.         La recourante estime que le renvoi de la famille n’est pas possible ni exigible en raison de la situation médicale d’B______, concluant à son admission au sens de l’art. 83 al. 4 LEI.

34.         Selon l’art. 83 al. 1 LEI, le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) décide d’admettre provisoirement l’étranger si l’exécution du renvoi ou de l’expulsion n’est pas possible, n’est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée. Ces trois conditions susceptibles d’empêcher l’exécution du renvoi sont de nature alternative : il suffit que l’une d’elles soit réalisée pour que le renvoi soit inexécutable (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-5624/2017 du 11 août 2020 consid. 6.2).

35.         L’exécution du renvoi n’est pas possible lorsque l’intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l’un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n’est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

36.         S’agissant de la question de la nécessité médicale, selon la jurisprudence en lien l’accès à des soins essentiels, celui-ci est assuré dans le pays de destination s’il existe des soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui - tout en correspondant aux standards du pays d’origine - sont adéquats à l’état de santé de l’intéressé, fussent-ils d’un niveau de qualité, d’une efficacité de terrain (ou clinique) et d’une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse. En particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d’une génération plus ancienne et moins efficaces, peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats. Hormis le critère qualitatif des soins, ceux-ci doivent de plus être accessibles géographiquement ainsi qu’économiquement et sans discrimination dans l’État de destination. Quoiqu’il en soit, lorsque l’état de santé de la personne concernée n’est pas suffisamment grave pour s’opposer, en tant que tel, au renvoi sous l’angle de l’inexigibilité, il demeure toutefois un élément à prendre en considération dans l’appréciation globale des obstacles à l’exécution du renvoi (Gregor T. CHATTON/Jérôme SIEBER, Le droit à la santé et à la couverture des soins des étrangers en Suisse, Annuaire du droit de la migration 2019/2020, p. 155 et les références citées).

37.         En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-838/ 2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3).

38.         L’art. 83 al. 4 LEI ne confère donc pas un droit général d’accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l’infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d’origine de l’intéressé n’atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d’origine ou de provenance de l’étranger concerné, l’exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l’absence de possibilités de traitement adéquat, si l’état de santé de l’intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017 consid. 10d).

39.         Enfin, selon la jurisprudence de la CourEDH, le retour forcé d’une personne touchée dans sa santé n’est susceptible de constituer une violation de l’art. 3 CEDH que si celle-là se trouve à un stade avancé et terminal de sa maladie, au point que sa mort apparaît comme une perspective proche (cf. CourEDH, arrêts A.S. c. Suisse du 30 juin 2015, requête n° 39350/13, par. 31 ss ; S.J. c. Belgique du 27 février 2014, n° 70055/10, par. 119-120 ; N. c. Royaume Uni du 27 mai 2008, requête n° 26565/05, par. 42 ss ; décisions E.O. c. Italie du 10 mai 2012, n° 34724/10, par. 38 ss ; Ndangoya c. Suède du 22 juin 2004, requête n° 17868/03 ; ATAF 2011/9 consid. 7.1). Il s’agit de cas très exceptionnels, en ce sens que la personne concernée doit connaître un état de santé à ce point altéré que l’hypothèse de son rapide décès après le retour confine à la certitude. La CourEDH a toutefois précisé qu’un cas très exceptionnel au sens précité devait être reconnu également lorsqu’il existe des motifs sérieux de croire que la personne gravement malade ferait face, en raison de l’absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d’accès à ceux-ci, à un risque réel d’être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou une réduction significative de son espérance de vie (cf. arrêt Paposhvili c. Belgique du 13 décembre 2016, requête n° 41738/10 par. 183 ; dans ce sens aussi, arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 16 février 2017 en l’affaire C-578/16).

40.         En l’espèce et pour rappel, B______ est né grand prématuré et souffre d’un TSA. À teneur du dossier, ses besoins actuels se situent sur le plan des apprentissages et la poursuite de ses thérapies en logopédie, psychomotricité et psychothérapie est préconisée par les professionnels qui le suivent, probablement jusqu’en août 2024. Partant, et sans minimiser aucunement les problèmes de santé affectant B______, il doit être retenu que ces derniers n’apparaissent pas graves au point de devoir considérer que l’exécution de son renvoi mettrait de manière imminente sa vie ou son intégrité psychique concrètement en danger. Comme déjà exposé, il n’apparaît pas non plus que sa prise en charge ne pourrait pas être assurée de manière adéquate au Rwanda, qui dispose d’une infrastructure médicale et de spécialistes à même de prendre en charge B______ tant sur le plan somatique que concernant son TSA. Dans ces conditions, ni la problématique médicale d’B______ ni l’accompagnement dont il bénéficie aujourd’hui en Suisse avec sa mère ne sauraient s’opposer à leur renvoi, étant rappelé que l’excellence des soins offerts par la Suisse, lesquels sont difficiles à égaler à l’étranger, ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers (arrêt du Tribunal fédéral 2C-193/2020 du 18 août 2020 consid. 4.2 et les références citées).

Cela étant, afin de préserver au mieux le développement et l’intégration d’B______ et de sa famille dans leur nouvel environnement, il appartiendra à la recourante ainsi qu’au réseau mis en place autour d’eux de prendre, dans les meilleurs délais, les mesures utiles afin d’assurer une prise en charge adéquate au Rwanda. Un suivi anticipé pourrait d’ores et déjà être envisagé. Dans ces conditions, l’exécution du renvoi d’B______ et de sa famille apparaît possible, licite et raisonnablement exigible, de sorte qu’il n’y avait pas lieu que l’autorité intimée propose leur admission provisoire au SEM. L’OCPM sera toutefois invité à tenir compte des démarches précitées lorsqu’elle leur impartira un nouveau délai de départ pour quitter la Suisse.

La décision de l’autorité intimée est ainsi conforme au droit et le recours contre cette dernière, entièrement mal fondé, sera rejeté.

41.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

42.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 5 juillet 2023 par Madame A______, agissant en son nom et celui de ses enfants mineurs B______, C______ et D______, contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 5 juin 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier