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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3879/2023

JTAPI/409/2024 du 30.04.2024 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : RETRAIT DE PERMIS;FAUTE DE GRAVITÉ MOYENNE
Normes : LCR.16b.al1.leta; LCR.90.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3879/2023 LCR

JTAPI/409/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 2 mai 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Jacques ROULET, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Le 21 juillet 2023 à 02h20, Monsieur A______, né le ______ 2005, a été intercepté par une patrouille motorisée de la police cantonale genevoise alors qu'il circulait au guidon du motocycle immatriculé 1______, au B______, à la hauteur du 2______, en direction de la rue C______, après qu'elle l'avait observé effectuer un wheeling sur plusieurs dizaines de mètres.

M. A______ a été déclaré en contravention sur-le-champ.

2.             Par courrier du 9 août 2023, le service cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a informé M. A______ que les autorités de police lui avaient transmis leur rapport concernant l'infraction susmentionnée et qu'une mesure administrative pouvait être prise à son encontre, indépendamment de toute amende ou autre sanction pénale.

Un délai de quinze jours lui était imparti pour faire part de ses observations écrites.

Dans le même délai, au vu de ses antécédents, M. A______ était invité à suivre un cours d'éducation routière, avec une voiture uniquement, dans un délai de deux mois à compter du 9 août 2023. Un délai de quinze jours lui était en outre imparti pour faire savoir à l'OCV s'il entendait suivre ce cours.

3.             Dans le délai imparti, M. A______ n'a pas présenté d'observations.

4.             Par ordonnance pénale du 10 août 2023 du Service des contraventions, M. A______ a été condamné pour les faits précités à une amende de CHF 240.- pour infractions aux art. 31 et 90 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR – RS 741.01)

5.             Par décision du 18 octobre 2023, l'OCV a retiré le permis de conduire à l'essai toutes catégories, sous-catégories et catégorie F de M. A______ pour une durée de quatre mois en application de l'art. 16b LCR en raison des faits précités. La durée du retrait était fixée du 18 décembre 2023 au 17 avril 2024, dates incluses.

Il s'agissait d'une infraction moyennement grave aux règles de la circulation routière. M. A______ ne pouvait pas justifier d'une bonne réputation, le système d'information relatif à l'admission à la circulation (ci-après : SIAC-Mesures) faisant état d'un retrait du permis de conduire, prononcé par décision du 9 mai 2022, pour une durée de trois mois, en raison d'une infraction grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 31 janvier 2023. M. A______ n'avait pas justifié d'un besoin professionnel de conduire des véhicules. Compte tenu des circonstances, l'autorité ne s'était pas écartée du minimum légal.

6.             Par courriel du 20 octobre 2023 adressé à l'OCV, M. A______ a transmis à l'office précité copie de la confirmation de son inscription à l'auto cours éducation routière organisé par le TCS Training & Events le 30 octobre 2023 à Meyrin. A l'appui de son envoi, il a indiqué s'être entretenu avec l'un des collaborateurs de l'OCV qui lui avait expliqué qu'il devait transmettre à l'office copie de la confirmation de son inscription dans la mesure où la date qui lui avait été impartie pour suivre ce cours était dépassée. Il n'avait pas trouvé de date avant celle du 30 octobre 2023 en raison de ses horaires scolaires.

7.             Par courrier du 23 octobre 2023, l'OCV a accusé réception de ce courriel, priant M. A______ de lui faire parvenir copie de l'attestation une fois celle-ci obtenue.

8.             Par courriel du 6 novembre 2023, M. A______ a transmis à l'OCV copie de l'attestation établie par le TCS Training & Events le 30 octobre 2023.

9.             Par courrier du lendemain, l'OCV en a accusé réception.

10.         Par courrier du 8 novembre 2023 adressé à l'OCV, sous la plume de son conseil, M. A______ a sollicité la copie de son dossier en lien avec l'événement du 21 juillet 2023.

11.         Par courrier du 9 novembre 2023, l'OCV a transmis à M. A______, pour lui son conseil, copie des pièces sollicitées, ajoutant que, s'agissant des antécédents de M. A______, SIAC-Mesures faisait apparaître un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 9 mai 2022.

12.         Par acte du 17 novembre 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a formé recours à l'encontre de cette décision par-devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

Il s'était immédiatement arrêté lorsque la police l'avait interpellé. Il s'était montré collaborant. Il reconnaissait avoir commis une erreur et l'avait d'emblée admise, regrettant sa manœuvre inappropriée.

Cela étant, la route était vide de tout usager à cette heure tardive et son tracé rectiligne à cet endroit. Il était ainsi resté maître de son véhicule. Il n'y avait par ailleurs pas eu d'accident.

Il avait participé au cours d'éducation routière proposé par le TCS, à l'issue duquel une attestation lui avait été délivrée.

L'autorité ne motivait pas dans sa décision la qualification de l'infraction retenue à l'art. 16b LCR comme moyennement grave. En effet, le seul fait d'avoir effectué un wheeling constituait tout au plus une infraction légère dès lors qu'elle ne revêtait pas le niveau de mise en danger suffisant pour être qualifiée de moyennement grave, la manœuvre qu'il avait réalisée consistant uniquement à soulever la roue avant de son motocycle sur quelques mètres, sur une route totalement déserte, à une heure particulièrement tardive et à un endroit où le tracé était rectiligne. Il ne contestait pas qu'une telle manœuvre n'était pas autorisée. « Cela étant, si cette manœuvre devait être qualifiée au regard de la maîtrise de son véhicule par M. A______, elle démontrerait au contraire d'une très bonne maîtrise de son véhicule ». Un tel geste ne pouvait par ailleurs pas être considéré comme revêtant la même gravité que le fait de percuter un piéton sur un passage piéton, infraction pourtant qualifiée à plusieurs reprises de moyennement grave par le Tribunal fédéral. La plus haute instance avait par ailleurs confirmé qu'une perte de maîtrise du véhicule par un coup de volant donné sans nécessité aucune, faisant sortir le véhicule de la route et terminer sa course plus de 60 mètres plus loin, constituait une infraction qui devait être qualifiée de légère. « Aussi, le simple fait d'effectuer un wheeling sans nécessité aucune, ne saurait dès lors pas être considéré de manière abstraite, indépendamment des circonstances, comme revêtant une gravité supérieure à un tel geste de conduite ». Le Tribunal fédéral ne préconisait nullement la qualification d'un wheeling comme moyennement grave, si bien que la gravité de la faute et la mise en danger devaient faire l'objet d'un examen concret par les autorités. Or, si l'OCV avait procédé à une correcte analyse de l'infraction, elle aurait dû arriver au constat que tant la mise en danger que la faute étaient légères. Cette manœuvre n'avait été constitutive d'aucune mise en danger concrète. Même sous l'angle de la mise en danger abstraite, il ressortait des circonstances concrètes sus-décrites, que celle-ci avait été particulièrement faible, étant précisé qu'un seul mouvement lui aurait été suffisant pour lui faire reprendre une posture et une conduite adaptées. La sanction pénale prononcée, soit une amende clémente de CHF 160.-, le démontrait.

En conséquence, l'infraction commise devait être qualifiée de légère et la durée du retrait du permis, tenant compte de son antécédent, ramenée à un mois au maximum. Il concluait ainsi à l'annulation de la décision de retrait prononcée à son encontre le 18 octobre 2023 et le renvoi à l'OCV pour nouvelle décision dans le sens du développement qui précède.

13.         Le 19 janvier 2024, l'OCV a transmis son dossier et ses observations, persistant dans les termes de la décision querellée.

A teneur du rapport de police, le recourant avait effectué un wheeling (acrobatie de surcroît volontaire) sur plusieurs dizaines de mètres entravant de la sorte sa visibilité sur les potentiels dangers qui pouvaient se présenter à lui, étant relevé que cette infraction avait été commise un vendredi, en plein été, sur un boulevard situé en pleine ville, certes à une heure tardive, ce qui n'excluait cependant pas de facto la présence d'autres usagers sur la route (piétons, cycles, etc.).

Pour le surplus, l'OCV relevait que M. A______ était un jeune conducteur n'ayant pas encore acquis une grande expérience de la conduite, relevant qu'il avait obtenu le permis gros-cube quelques semaines plus tôt seulement.

La durée minimale de retrait était passée à quatre mois en application de l'art. 16b al. 2 let. b LCR vu le précédent retrait prononcé par décision du 9 mai 2022, pour une durée de trois mois, en raison d'une infraction grave, mesure ayant pris fin le 31 janvier 2023.

14.         Dans sa réplique du 13 février 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions. L'arrêt du Tribunal fédéral cité par l'OCV dans ses observations pour retenir que la faute moyennement grave était donnée lorsqu'une règle fondamentale était méconnue par une violation élémentaire des devoirs, même si elle ne durait que quelques secondes (ATF 133 II 58), ne présentait aucune similitude avec le cas d'espèce dès lors que la route était déserte lorsqu'il avait effectué sa manœuvre. Si tel n'avait pas été le cas, la police n'aurait pas manqué d'en faire état dans son rapport. L'antécédent du recourant et son profil, soit sa récente obtention du permis de conduire gros-cube, étaient des éléments qui n'avaient pas à être pris en compte dans la détermination de la gravité de l'infraction, ces éléments devant tout au plus jouer un rôle au stade de la fixation de la durée du retrait, après détermination de la question de la faute.

15.         Par courrier du 27 février 2024, l'OCV a informé le tribunal persister dans les termes de sa décision du 18 octobre 2023, concluant au rejet du recours.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).

4.             En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce. Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/366/2013 du 11 juin 2013 consid. 3a et la référence citée).

5.             Les autorités administratives appelées à prononcer un retrait du permis de conduire ne peuvent en principe pas s’écarter des constatations de fait d’une décision pénale entrée en force. La sécurité du droit commande en effet d’éviter que l’indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits (ATF 137 I 363 consid. 2.3.2 ; 109 Ib 203 consid. 1 ; 96 I 766 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_636/2013 du 7 août 2013 consid. 2.1 ; 1C_567/2011 du 12 mars 2012 consid. 3.1 ; 1C_245/2010 du 13 juillet 2010 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/172/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/363/2011 du 7 juin 2011).

6.             L’autorité administrative ne peut dès lors s’écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n’ont pas été prises en considération par celui-ci, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 136 II 447 consid. 3.1 ; 129 II 312 consid. 2.4 ; 123 II 97 consid. 3c/aa ; 119 Ib 158 consid. 3c/aa ; 105 Ib 18 consid. 1a ; 101 Ib 270 consid. 1b ; 96 I 766 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_567/2011 du 12 mars 2012 consid. 3.1 ; 1C_245/2010 du 13 juillet 2010 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/23/2015 du 6 janvier 2015 ; ATA/172/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/363/2011 du 7 juin 2011).

7.             En l'espèce, le recourant n'a pas formé opposition contre l'ordonnance pénale rendue à son encontre le 10 août 2023, celle-ci étant désormais entrée en force et exécutoire. Aussi, le tribunal de céans ne saurait revoir la constatation des faits retenue par le jugement pénal, dès lors qu'aucun indice ne laisse présumer de l'existence de faits inconnus de l'autorité de poursuite pénale ou qui n'auraient pas été pris en considération par celle-ci, de l'existence de preuves nouvelles dont l’appréciation conduirait à un autre résultat, ou que l'autorité pénale n'aurait pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation.

A cet égard, il sera relevé que le recourant ne conteste pas avoir commis une infraction, mais considère que la gravité de la faute et la mise en danger doivent être considérées comme « particulièrement faibles » eu égard notamment à la sanction « particulièrement légère » à laquelle l'autorité pénale l'a condamné.

8.             Lorsque la procédure prévue par la loi fédérale sur les amendes d’ordre du 24 juin 1970 (LAO - RS 741.03) n’est pas applicable, une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis d'élève-conducteur ou du permis de conduire ou un avertissement (art. 16 al. 2 LCR).

9.             Pour déterminer la durée et s'il y a lieu de prononcer un retrait d’admonestation, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR).

10.         Selon l'art. 16a al. 1 let. a LCR, commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité d'autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée.

11.         Commet en revanche une infraction grave, selon l'art. 16c al. 1 let. a LCR, la personne qui, en violant gravement les règles de la circulation, met sérieusement en danger la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

12.         La qualification de cas grave au sens de l’art. 16c al. 1 let. a LCR correspond à celle, retenue en matière pénale, de l’art. 90 al. 2 LCR (cf. ATF 132 II 234 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6b.264/2007 du 19 septembre 2007 consid. 3.1).

13.         Commet une infraction moyennement grave, selon l'art. 16b al. 1 let. a LCR, la personne qui, en violant les règles de la circulation, crée un danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

14.         Le législateur conçoit l'art. 16b al. 1 let. a LCR comme l'élément dit de regroupement. Cette disposition n'est ainsi pas applicable aux infractions qui tombent sous le coup des art. 16a al. 1 let. a et 16c al. 1 let. a LCR. Dès lors, l'infraction est toujours considérée comme moyennement grave lorsque tous les éléments constitutifs qui permettent de la privilégier comme légère ou au contraire de la qualifier de grave ne sont pas réunis. Tel est par exemple le cas lorsque la faute est grave et la mise en danger bénigne ou, inversement, si la faute est légère et la mise en danger grave (ATF 136 II 447 consid. 3.2 ; 135 II 138 consid. 2.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_54/2018 du 3 octobre 2018 consid. 2.1 ; 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.1). Ainsi, par rapport à une infraction légère, où tant la mise en danger que la faute doivent être légères, on parle d'infraction moyennement grave dès que la mise en danger ou la faute n'est pas légère (arrêts du Tribunal fédéral 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 3.1 ; 1C_184/2018 du 26 juillet 2018 consid. 2.2).

15.         Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue ; la réalisation d'un tel danger s'examine en fonction des circonstances spécifiques du cas d'espèce (cf. ATF 142 IV 93 consid. 3.1 ; 131 IV 133 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_23/2016 du 9 décembre 2016 consid. 3.2 ; 6B_665/2015 du 15 septembre 2016 consid. 2.1.1 ; 1C_478/2014 du 14 juillet 2015 consid. 2.2). Il y a mise en danger abstraite accrue lorsqu'une ou des personnes indéterminées auraient pu se trouver potentiellement exposées à un danger pour leur intégrité physique. Lorsque l'on peut objectivement exclure des circonstances la présence de tout tiers, y compris, le cas échéant, du passager du conducteur en infraction, l'imminence du danger peut être niée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_23/2016 du 9 décembre 2016 consid. 3.2 ; 6B_117/2015 du 11 février 2016 consid. 13.2).

16.         Selon l'art. 31 al. 1 LCR, le conducteur doit rester constamment maître de son véhicule, de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de prudence. Cela signifie qu'il doit être à tout moment en mesure de réagir utilement aux circonstances. En présence d'un danger, et dans toutes les situations exigeant une décision rapide, il devra réagir avec sang-froid et sans excéder le temps de réaction compatible avec les circonstances.

17.         L'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11) précise que le conducteur vouera son attention à la route et à la circulation ; il évitera toute occupation qui rendrait plus difficile la conduite du véhicule ; il veillera en outre à ce que son attention ne soit distraite, notamment, ni par un appareil reproducteur de son ni par un quelconque système d'information ou de communication. Le degré de l'attention requise par l'art. 3 al. 1 OCR s'apprécie au regard des circonstances d'espèce, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l'heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 137 IV 290 consid. 3.6 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_512/2017 du 28 février 2018 consid. 3.2 ; 6B_69/2017 du 28 novembre 2017 consid. 2.2.1). L’attention requise du conducteur implique qu’il soit en mesure de parer rapidement aux dangers qui menacent la vie, l’intégrité corporelle ou les biens matériels d’autrui.

18.         En l'espèce, dans ses écritures, le recourant prétend que les faits retenus par l'autorité pénale n'atteindraient pas la gravité que l'OCV leur prête. Il allègue que le fait d'avoir effectué un wheeling, manœuvre certes non autorisée, ne saurait être qualifié d'infraction moyennement grave dès lors que ce geste démontrait, au contraire, d'une très bonne maîtrise de son motocycle, de surcroît à une vitesse qui n'était pas excessive, sur une route totalement déserte, à une heure particulièrement tardive et à un endroit où le tracé était rectiligne. Il n'avait pas créé de mise en danger concrète. Même à analyser la situation sous l'angle de la mise en danger abstraite, celle-ci devrait tout au plus être qualifiée de particulièrement faible au vu des circonstances rappelées ci-dessus.

Le recourant ne saurait cependant être suivi. Conformément à la jurisprudence précitée, bien qu'il ait été reconnu coupable de violation simple des règles de la circulation routière sur le plan pénal, le juge administratif, comme rappelé ci-avant, n'est pas lié par l'appréciation de la faute faite par le juge pénal.

Le tribunal retient qu'en effectuant un wheeling, soit une figure ou cascade consistant à rouler uniquement sur la roue arrière avec un deux roues, le recourant a violé son devoir de prudence en ne restant plus constamment maître de son véhicule.

En effet, la direction des motocycles, laquelle est contrôlée par le guidon et la position du motocycliste, est l'élément qui permet de diriger le véhicule par sa roue avant. Ainsi, en circulant sur la roue arrière uniquement, le motocycliste n'est plus en mesure de freiner utilement − le frein avant procurant environ 70 % de la capacité de freinage d’un motocycle − ni de braquer pour éviter un obstacle.

Il s'en suit qu'en effectuant cette cascade, le recourant, dont la visibilité était par ailleurs entravée, n'est plus resté constamment maître de son véhicule. C'est d'autant plus vrai qu'il a effectué cette acrobatie sur plusieurs dizaines de mètres – ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas − et que, pour conserver cette position, il a nécessairement dû maintenir une certaine vitesse, voire accélérer.

Aussi, en circulant avec la roue avant levée sur plusieurs dizaines de mètres, le recourant a adopté un comportement dangereux dès lors qu'il n'était plus en mesure de réagir utilement et rapidement en cas de changement de circonstances.

En outre, contrairement à ce qu'il soutient, même à une heure tardive, s'agissant d'un axe de circulation bordé, à droite, d'une bande cyclable et d'un trottoir, à gauche, d'un trottoir, un cycliste ou un piéton aurait pu circuler, respectivement se trouver sur le trottoir, voire traverser la chaussée. Aussi, un tel comportement − qui viole les règles de la circulation routière − constitue une mise en danger abstraite accrue, le fait qu'aucun autre usager ne se soit trouvé devant, derrière ou à proximité de lui au moment où il effectuait cette acrobatie, n'étant dû qu'au hasard.

En conséquence, c'est à bon droit que l'autorité intimée a retenu que le recourant avait commis une infraction moyennement grave au sens de l'art. 16b al. 1 let. a LCR.

19.         S’agissant de la sanction, l’art. 16b al. 2 let. b LCR prévoit qu’après une infraction moyennement grave, le permis de conduire est retiré pour quatre mois au minimum si, au cours des deux années précédentes, le permis a été retiré une fois en raison d'une infraction grave ou moyennement grave.

20.         Les circonstances du cas d’espèce doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire, notamment l’atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile. La durée minimale du retrait ne peut toutefois pas être réduite (art. 16 al. 3 LCR). Ces éléments doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, de manière à atteindre autant que possible l'effet éducatif et préventif auquel tend la mesure (arrêt du Tribunal fédéral 1C 430/2011 du 7 mars 2012 consid. 4.1).

21.         En l'espèce, le recourant ayant un antécédent en raison d’un retrait de permis d’une durée de trois mois prononcé le 9 mai 2022 pour une infraction grave, mesure dont l'exécution a pris fin le 31 janvier 2023, ce dernier se trouve dans la situation prévue par l’art. 16b al. 2 let. b LCR. En conséquence, le retrait de permis pour la nouvelle infraction doit être de quatre mois au moins. Sur la base des éléments en sa possession, le tribunal s’en tiendra à ce minimum.

22.         Il en résulte que la décision de l'OCV ne peut être que confirmée.

Ne reposant sur aucun motif valable, le recours sera rejeté.

23.         Dans la mesure où il succombe, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant en application de l'art. 87 al. 1 LPA et du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 17 novembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 18 octobre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière