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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/605/2024

JTAPI/171/2024 du 27.02.2024 ( MC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);PROLONGATION
Normes : LEI.75.al1.letc; LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/605/2024 MC

JTAPI/171/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Benoît MAURON, avocat

 

contre

 

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le prétendument dénommé Monsieur A______, né le ______ 1982 et originaire de Guinée-Bissau, mais dépourvu de tout document d'identité, a déposé, le 2 mars 2010, une demande d'asile en Suisse, laquelle a fait l'objet d'une décision de non-entrée en matière et de renvoi. La prise en charge et l'exécution du renvoi de l'intéressé ont été confiées au canton de Genève. En raison de la disparition de l'intéressé, son transfert en Espagne, Etat Dublin responsable, n'a pas pu être effectué.

2.             Après avoir été reprise en 2016, la procédure d'asile a été radiée en raison de l'absence de collaboration de l'intéressé. M. A______ a par ailleurs fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse, notifiée le 24 octobre 2015 et valable jusqu'au 2 octobre 2019. En outre, le 22 juin 2017, l'intéressé s'est vu notifier par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une décision immédiatement exécutoire de renvoi de Suisse.

3.             Entre le 18 janvier 2014 et le 17 octobre 2022, M. A______ a été condamné à sept reprises pour, notamment, entrée illégale (violation de l'interdiction d'entrer en Suisse prononcée à son encontre), séjour illégal, opposition aux actes de l'autorité, empêchement d'accomplir un acte officiel, délit contre la loi sur les stupéfiants et rupture de ban – l'intéressé, sous le coup d'une mesure d'expulsion judiciaire prononcée le 13 septembre 2018 pour une durée de dix ans par le Tribunal de police de Genève, étant revenu en Suisse après s'être vu notifier, le 27 juin 2019, par l'autorité administrative compétente, une décision de non-report de la mesure d'expulsion judiciaire, décision qui lui avait imparti un délai de 48 heures pour quitter le territoire helvétique.

4.             La demande de soutien en vue de l'exécution du renvoi, initiée auprès du secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM) en mai 2017, n'a à ce jour pas abouti en raison de l'absence de collaboration de M. A______.

En 2017, l'intéressé a été présenté à une délégation de Guinée-Bissau devant laquelle il a prétendu être originaire de Gambie, et ce alors même qu'à son arrivée en Suisse, il avait déclaré être ressortissant de Guinée-Bissau.

En 2018, dans le cadre d’un test LINGUA, il ne s'est pas du tout montré coopératif, prétendant ne pas pouvoir parler en langue mandingue.

En 2019, présenté à une délégation de Gambie, il a indiqué devant celle-ci être originaire de Guinée-Conakry.

Afin de poursuivre le processus d'identification et en vue d'obtenir la reconnaissance officielle de l'intéressé en tant que ressortissant gambien, le SEM a décidé de présenter à nouveau M. A______ à une délégation gambienne dans le cadre des prochaines auditions centralisées qui auront lieu à la fin du mois de novembre 2023, auditions à la suite desquelles l'intéressé - une fois officiellement identifié – pourrait, compte tenu de l'absence de collaboration dont il faisait preuve depuis de nombreuses années, être inscrit sur le prochain vol spécial prévu à destination de la Gambie.

5.             Le 17 octobre 2022, M. A______ a été incarcéré à la Prison de Champ-Dollon, puis transféré à l'établissement de la Brenaz le 12 janvier 2023 dans le cadre de l'exécution des peines prononcées à son encontre les 6 mars 2021 et 17 octobre 2022 par le Ministère public.

6.             Par jugement du 6 juin 2023, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a refusé la libération conditionnelle à M. A______. Il ressortait dudit jugement que: « S'agissant du pronostic, il se présente sous un jour très défavorable au vu des nombreux antécédents du précité. Les courtes peines privatives de liberté successives prononcées à son encontre ne l'ont pas dissuadé de récidiver. Il a par ailleurs récidivé après l'octroi d'une libération conditionnelle le 9 mars 2016. Sa situation personnelle demeure inchangée et on ne perçoit aucun effort du précité pour modifier la situation, étant rappelé qu'il fait l'objet d'une expulsion de Suisse d'une durée de dix ans. Aucun projet concret et étayé n'est présenté, de sorte qu'il se retrouvera à sa sortie dans la même situation personnelle que celle ayant mené à ses dernières condamnations, à savoir en situation illégale en Suisse, sans travail, ni logement. Il n'a aucune garantie de pouvoir séjourner légalement en Espagne, où il dit vouloir se rendre à sa sortie. Enfin, le précité n'entreprend aucune démarche aux fins de se procurer des pièces de légitimation. En l'état, rien n'indique que le précité saurait mettre davantage à profit une nouvelle libération conditionnelle et le risque qu'il commette de nouvelles infractions apparaît très élevé, étant précisé qu'à teneur des dernières condamnations figurant à son casier judiciaire, ce risque ne se limite pas à des infractions à la loi sur les étrangers et l'intégration ».

Il ressortait du rapport d'arrestation du 17 octobre 2022 que M. A______ reconnaissait être venu en Suisse le 16 octobre 2022 depuis la France - où il déclarait vivre, sans toutefois connaître son adresse -, n'avoir aucun lieu de résidence fixe sur le territoire helvétique, avec lequel il n'avait au demeurant aucun lien particulier, ni aucune source légale de revenu. Il ressortait également des déclarations de l'intéressé qu'il n'avait effectué aucune démarche en vue de son retour dans son pays d'origine, où il n'avait d'ailleurs aucune intention de rentrer.

7.             À sa sortie de prison, le 30 septembre 2023, M. A______ a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

8.             Le 30 septembre 2023, à 14h25, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de cinq mois.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi dans son pays d’origine mais souhaitait se rendre au plus vite en Espagne et quitter la Suisse.

9.             Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI ou le tribunal) le même jour.

10.         Entendu le 2 octobre 2023 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu’il était originaire de Guinée. Il n’avait aucun document d'identité à produire. Il était revenu en Suisse le 16 octobre 2022 en provenance d'Espagne et avait immédiatement été arrêté et mis en détention pénale. Il n’avait jamais habité en France, n’y ayant passé que la nuit du 16 au 17 octobre 2022. Il n’avait pas d'autorisation de séjour en Espagne : il avait travaillé dans la culture des fruits. Il n’était pas d'accord de retourner en Gambie ni en Afrique. S’il était remis en liberté, il se rendrait en Espagne.

La représentante du commissaire de police a remis au tribunal une enveloppe scellée contenant les indications sur la date d'un vol spécial. Elle a confirmé que M. A______ serait présenté fin novembre à une délégation gambienne afin d'identification. Une fois qu'il serait officiellement reconnu comme étant gambien, un laissez-passer serait délivré en vue de son renvoi, étant précisé qu'aucun vol avec escorte policière ne pouvait être organisé à destination de la Gambie. Elle a demandé la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative prononcé à l’encontre de M. A______ le 30 septembre 2023 pour une durée de cinq mois.

L’intéressé, par l’intermédiaire de son conseil, a conclu à sa mise en liberté immédiate pour pouvoir se rendre à Barcelone, subsidiairement à ce que la durée de sa détention soit réduite à trois mois.

11.         Par jugement JTAPI/1______/2023 du 3 octobre 2023, le tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 30  septembre 2023 à 14h25 à l’encontre de M. A______ pour une durée de cinq mois, soit jusqu'au 28 février 2024, inclus.

12.         Le 20 octobre 2023, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté le 13 octobre 2023 par M.  A______ contre le jugement précité du tribunal (ATA/2______/2023).

13.         Le 28 novembre 2023, l'intéressé a été présenté lors d'une audition centralisée menée par une délégation de la République de Gambie.

14.         Le 12 février 2024, le SEM a expliqué à l’OCPM que l'intéressé avait refusé de collaborer lors de l'audition centralisée du 28 novembre 2023, en se disant notamment d'origine guinéenne. À ce jour, des démarches de vérifications sur la base d'un passeport échu étaient toujours en cours du côté des autorités gambiennes. Dans l'intervalle et si cela s'avérait nécessaire, il poursuivrait les mesures d'identification et conduirait l'intéressé aux prochaines auditions guinéennes qui devraient avoir lieu au cours du deuxième semestre 2024.

15.         Par requête motivée du 16 février 2024 l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

16.         Devant le tribunal, lors de l'audience de ce jour, M. A______ a déclaré qu’il n’était pas d’accord de retourner en Gambie. Il était originaire de Guinée Conakry. Il n’était toutefois pas d’accord non plus de retourner dans ce pays car il y risquerait pour sa vie. Il souhaitait être remis en liberté et quitter la Suisse. Cas échéant, il le ferait immédiatement.

La représentante de l’OCPM a indiqué n’avoir pas d’éléments nouveaux à apporter par rapport à ce qui était déjà au dossier. Les démarches de vérification sur la base du passeport échu de M. A______ étaient toujours en cours. De même, ils envisageaient toujours de le présenter, si besoin, aux prochaines auditions guinéennes qui devraient avoir lieu au cours du deuxième semestre 2024. Elle a conclu à la confirmation de la demande de prolongation de la détention de M.  A______ pour une durée de trois mois, étant précisé que ce dernier pouvait toujours contacter la délégation de son pays d’origine afin d’obtenir un laissez-passer qui permettrait de finaliser, dans les meilleurs délais, son refoulement et ainsi mettre fin rapidement à sa détention administrative.

Le conseil de l'intéressé a conclu au rejet de la demande de prolongation de la détention et à la libération immédiate de son client. Subsidiairement, la durée de la prolongation devait être réduite à un mois. La prolongation de la détention administrative de M. A______ était disproportionnée et son renvoi n’apparaissait pas prévisible.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 16 février 2024, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

4.             Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

5.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17  novembre 2015 consid. 2.1).

6.             À teneur de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI (cum art. 75 al. 1 LEI), après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21  décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment si elle a franchi la frontière malgré une interdiction d’entrer en Suisse et n'a pu être renvoyée immédiatement (let. c).

7.             Il découle de la jurisprudence qu'une décision d'expulsion pénale au sens des art.  66a ou 66abis CP vaut comme interdiction d'entrée pour la durée prononcée par le juge pénal (ATA/179/2018 du 27 février 2018 consid. 4).

8.             Une mise en détention administrative est aussi envisageable si des éléments concrets font craindre que la personne entend se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de l'art. 90 LEI (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI), ou encore si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

9.             La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

10.         Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

11.         Selon la jurisprudence, le devoir de célérité est en principe violé lorsque, pendant plus de deux mois, aucune démarche n'est accomplie en vue de l'exécution du refoulement par les autorités compétentes, sans que cette inaction soit en première ligne causée par le comportement des autorités étrangères ou celui de l'intéressé lui-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; ATA/567/2016 du 1er juillet 2016 consid. 7a).

12.         Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI). Concrètement, dans ces deux circonstances, la détention administrative peut donc atteindre dix-huit mois (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2C_560/2021 du 3 août 2021 consid. 8.1).

13.         Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention de maintien ou de levée tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention. La détention doit en particulier être levée, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, si le motif de la détention n'existe plus ou si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu'elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI (cf. ATA/92/2017 du 3 février 2017 consid. 5a ; ATA/1173/2015 du 30 octobre 2015 consid. 5b).

14.         Selon la jurisprudence, le simple fait que les autorités chargées du refoulement des étrangers se heurtent à des difficultés et risquent de ne pouvoir le faire en temps utile n'est pas suffisant pour lever la détention. Sous l'angle du principe de la proportionnalité, la détention n'est inadmissible que si des raisons sérieuses laissent penser que la mesure d'éloignement ne pourra certainement pas intervenir avant la fin du délai légal de détention (ATF 122 II 148 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.584/2003, 2A.606/2003 du 8 janvier 2004 consid. 6 ; 2A.549/2003 du 3  décembre 2003 consid. 2.2 ; Grégor CHATTON/Laurent MERZ in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, n. 5 p. 780).

15.         En l'espèce, s'agissant du principe de la détention de M. A______, sa légalité a déjà été examinée et admise par le tribunal le 3 octobre 2023 et confirmée par la chambre administrative le 20 octobre 2023. En l'absence d'un changement déterminant des circonstances depuis lors, il n'y sera pas revenu.

L'assurance du départ effectif de M. A______ répond toujours à un intérêt public certain et s'inscrit dans le cadre des obligations internationales de la Suisse (cf. not. art. 3 ch. 3 de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du Conseil du 16  décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, reprise par la Suisse dans le cadre du développement de l'acquis de Schengen - Directive sur le retour - RO 2010 5925), étant rappelé que les autorités suisses doivent s'assurer du fait qu'il quittera effectivement le territoire, désormais - et sans autre option possible en l'état - à destination de son pays d'origine (cf. not. art. 8 par. 6 de la Directive sur le retour et 15f de l'ordonnance sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers du 11 août 1999 - OERE - RS 142.281). Ainsi, M.  A______ ne saurait être remis sans autre en liberté pour quitter la Suisse en choisissant lui-même son lieu de destination. Dans son principe, la détention en cause n'est par conséquent toujours pas contraire au principe de la proportionnalité.

Concernant le principe de diligence et célérité, il est en l'état respecté. En effet, le temps pris en vue de finaliser le renvoi de l'intéressé ne saurait être imputé aux autorités suisses, ces dernières étant tributaires de la reconnaissance de l’intéressé par les autorités de son pays d’origine, origine qui doit encore être établie et, ensuite, la délivrance d’un laissez-passer par ces dernières en sa faveur.

A cet égard, comme rappelé par la représentante de l’OCPM lors de l’audience, si M. A______ se décidait à collaborer et/ou entreprenait lui-même des démarches auprès des autorités guinéennes, dès lors qu’il prétend à nouveau être originaire de Guinée après avoir auparavant soutenu être gambien, un laissez-passer pourrait être rapidement obtenu et son renvoi finalisé, ce qui mettrait immédiatement fin à sa détention administrative.

S'agissant enfin de la durée requise par l'OCPM (trois mois), elle respecte le cadre légal. En effet, M. A______ est détenu administrativement depuis le 30 septembre 2023, de sorte que la durée de la détention administrative admissible en vertu de l'art. 79 LEI n'est de loin pas atteinte. Elle ne le sera pas non plus à l'issue de la prolongation de trois mois sollicitée par l'OCPM, étant observé, qu'en l'absence de coopération de l’intéressé, sa détention pourrait se prolonger jusqu'à dix-huit mois en application de l'art. 79 al. 2 let. a LEI. Enfin, elle permettra aux autorités de poursuivre les démarches de vérifications sur la base d'un passeport du côté des autorités gambiennes et, si cela s'avérait nécessaire, de poursuivre les mesures d'identification en conduisant l'intéressé aux prochaines auditions guinéennes qui devraient avoir lieu au cours du deuxième semestre 2024.

16.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera admise pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 28 mai 2024, inclus.

17.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 16 février 2024 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 28 mai 2024, inclus ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière