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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/618/2021

JTAPI/1021/2021 du 07.10.2021 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/137/2022

Descripteurs : RENOUVELLEMENT DE L'AUTORISATION;REJET DE LA DEMANDE;CAS DE RIGUEUR;PROPORTIONNALITÉ;SÉJOUR;INTÉGRATION SOCIALE;ASSISTANCE PUBLIQUE;AFFECTION DORSALE;DÉCISION DE RENVOI
Normes : LEI.33.al1; LEI.62.al1.lete; LEI.96; LEI.30.al1.letb; OASA.31; LEI.83.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/618/2021

JTAPI/1021/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 octobre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Stéphane REY, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1966, est ressortissant du Sénégal.

2.             Arrivé en Suisse en décembre 1996 afin d'épouser sa compagne de l'époque, ressortissante suisse, M. A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour le 26 mars 1997, valable jusqu'au 11 septembre 2001, par l'office cantonal de la population, devenu l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM).

3.             Les époux se sont séparées en 1998, et l'OCPM a refusé par décision du 30 avril 2002, de renouveler l'autorisation de séjour de M. A______. Il a également prononcé son renvoi de Suisse.

Cette décision a été confirmée par jugement de la Commission cantonale de recours de police des étrangers du 25 février 2003. À la suite de cette décision, un délai au 15 juillet 2003 lui a été imparti par l'OCPM pour quitter le territoire suisse.

4.             Entendu par la police le 11 septembre 2005, à la suite d'un contrôle dans les transports publics genevois, M. A______ a déclaré qu'il savait résider en Suisse en situation irrégulière, son permis B étant échu.

Il habitait « à gauche à droite chez des amis » et ne travaillait plus depuis 2003.

5.             Le 21 juillet 2008, B______ Sàrl a sollicité la délivrance d'une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______ afin de pouvoir l'employer dans son restaurant.

6.             Le 15 septembre 2008, cette demande a été refusée par l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, l'ordre de priorité n'ayant pas été respecté.

Un délai au 17 octobre 2008 était imparti à M. A______ pour quitter la Suisse.

7.             Ce délai a été prolongé au 31 janvier 2009, la lettre recommandée du 15 septembre 2008 n'ayant pas été retirée par son destinataire et la carte de sortie initiale étant arrivée à échéance.

8.             Par courrier adressé à l'OCPM le 16 avril 2009, M. A______ a sollicité l'annulation de la décision d'expulsion le concernant, afin de pouvoir rester en Suisse. Il y habitait depuis près de quatorze ans et n'avait jamais bénéficié de l'aide sociale.

En outre, il avait ouvert à l'encontre de son employeur, pour qui il travaillait au noir, une procédure auprès de la juridiction des Prud'hommes à Genève et sa présence était requise. Enfin, il était en couple depuis deux ans et souhaitait officialiser cette relation.

9.             Par courrier du 7 mai 2009, l'OCPM a demandé que lui soient transmises diverses informations s'agissant de la procédure prudhommale et des préparatifs en vue du mariage.

10.         En mai 2009, M. A______ a transmis les documents sollicités. Sa fiancée, Madame C______ a également indiqué à l'OCPM qu'elle souhaitait pouvoir épouser M. A______. Elle a joint, comme requis, l'attestation de prise en charge financière de son fiancé.

11.         Par courrier du 8 juin 2009, l'OCPM a indiqué à M. A______ être disposé à donner suite à sa requête et à lui octroyer l'autorisation de séjour sollicitée, sous réserve de la décision de l'office fédéral compétent, auquel son dossier était transmis.

À la suite de l'approbation fédérale, M. A______ a dès lors été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour valable du 14 décembre 2009 au 13 juillet 2010.

12.         Par courrier du 13 décembre 2010, statuant sur la demande de renouvellement du titre de séjour de M. A______, l'OCPM a demandé à ce dernier de le renseigner sur ses moyens d'existence et sur « ses intentions professionnelles ».

13.         Par courrier du 26 janvier 2011, M. A______ a indiqué à l'OCPM qu'il travaillait chez D______ et qu'il lui avait déjà fait parvenir son contrat de travail.

Il a joint divers documents, dont une copie de son ancien permis de séjour, la quittance pour son renouvellement et divers certificats de travail, en sus du formulaire M dûment complété.

14.         Le 28 juillet 2011, l'OCPM a informé M. A______ être disposé à donner suite à sa demande de prolongation de son autorisation de séjour, son dossier étant transmis pour décision à l'office fédéral compétent.

15.         Le 10 octobre 2011, l'OCPM a invité M. A______ à lui transmettre diverses informations concernant ses projets de mariage, les raisons pour lesquelles il n'avait pas encore été célébré, quelle était la date envisagée et les raisons pour lesquelles il ne faisait pas ménage commun avec sa future épouse, ainsi que des copies des trois dernières fiches de salaire.

16.         Par courrier du 16 novembre 2011 adressé à l'OCPM, Mme C______ a indiqué être séparée de M. A______ et qu'il n'y avait pas de projet de mariage ni de ménage commun.

17.         Le 26 mars 2012, l'office fédéral des migrations, devenu le secrétariat d'Etat aux migrations le 1er janvier 2015 (ci-après : SEM), a approuvé le renouvellement de l'autorisation de séjour de M. A______, lui précisant toutefois que celui-ci ne se faisait que pour une année, et qu'une nouvelle évaluation de sa situation professionnelle et financière serait réalisée à son échéance.

18.         Par courrier du 26 avril 2013, l'OCPM a demandé à M. A______ de lui indiquer les raisons pour lesquelles il avait eu recours aux prestations financières de l'Hospice général (ci-après : HG) en 2012, justificatifs à l'appui.

19.         Le 3 mai 2013, M. A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour auprès de l'OCPM.

20.         Le 3 juin 2013, l'OCPM a informé M. A______ être disposé à donner suite à sa demande de renouvellement, au regard des éléments transmis avec sa demande, sous réserve de l'approbation du SEM.

21.         Par courrier du 17 juin 2013, le SEM a informé le requérant qu'il envisageait de refuser de donner son approbation à la prolongation de son autorisation de séjour.

En effet, malgré sa séparation, il l'avait autorisé en 2012 à poursuivre son séjour, en le prévenant que sa situation financière et professionnelle serait réexaminée à l'échéance de l'autorisation. Or, sa situation ne s'était pas améliorée dans l'intervalle, étant donné qu'il bénéficiait toujours de l'aide de l'HG, malgré son long séjour en Suisse.

Un délai de trente jours lui était imparti pour transmettre d'éventuelles observations.

22.         Le 15 mai 2014, M. A______ a écrit à l'OCPM pour s'enquérir du traitement de son dossier. Le SEM lui avait demandé divers documents, qu'il avait transmis, mais depuis cette date il était sans nouvelles de son dossier. Il faisait son possible depuis qu'il vivait en Suisse, et avait l'opportunité de travailler pour D______ à J______ (VS), or sans permis de séjour valable, « sa situation était compromise ».

23.         Le 30 octobre 2014, le SEM a accusé réception du dernier courrier de M. A______ et lui a octroyé un nouveau délai au 21 novembre 2014 pour lui transmettre les éventuelles observations nouvelles, au regard du temps écoulé.

24.         Le 9 février 2015, pour donner suite à la prise d'emploi de M. A______ auprès de E______, l'OCPM lui a délivré une autorisation révocable en tout temps, valable jusqu'à droit connu sur la demande d'autorisation de séjour.

25.         Le 10 février 2015, l'OCPM a demandé au SEM de lui indiquer où en était le traitement du dossier, lequel lui a indiqué qu'une décision serait prise courant mars 2015.

26.         Par courrier du 17 mai 2016, M. A______ a sollicité des informations quant au traitement de sa demande, étant sans nouvelles du SEM malgré la transmission à deux reprises des documents demandés.

Il avait été malade en 2015 et avait été hospitalisé pour plusieurs opérations d'hernies discales.

27.         Par courriel du 19 mai 2016, l'OCPM a demandé au SEM de l'informer de l'évolution du traitement du dossier.

Ce dernier lui a indiqué qu'une décision serait prise courant juin, le dossier étant en cours d'actualisation dans ses services.

28.         Par courrier du 18 janvier 2017, le SEM a octroyé à M. A______ une autorisation de séjour valable une année. À l'échéance, l'autorité cantonale procéderait à une nouvelle évaluation de sa situation. Si son intégration faisait défaut, il s'exposait à un éventuel refus de renouvellement de son autorisation de séjour et, cas échéant, à une mesure de renvoi de Suisse.

L'autorisation de séjour était valable jusqu'au 15 janvier 2018.

29.         Le 10 décembre 2018, donnant suite à la requête de renouvellement d'autorisation de séjour de M. A______, l'OCPM a invité ce dernier à lui transmettre divers renseignements, justificatifs à l'appui, s'agissant notamment des raisons pour lesquelles il percevait des prestations de l'assistance publique, les démarches entreprises en vue d'assurer son indépendance financière, des recherches d'emploi ou des justificatifs démontrant son incapacité de travail, (certificats médicaux, attestations de l'assurance-accident) et tout autre preuve de ses efforts d'intégration socio-professionnelle.

Si son état de santé l'empêchait d'être financièrement indépendant, il lui revenait de l'informer des démarches entreprises auprès de l'assurance-invalidité, du stade auquel se trouvait la procédure en cours auprès de l'AI, et lui faire parvenir le rapport médical du SEM complété par son médecin traitant.

Il convenait de lui transmettre une liste complète des membres de sa famille résidant en Suisse et à l'étranger, les éventuels liens maintenus avec eux, et s'il était retourné au Sénégal depuis son arrivée en Suisse, ainsi que tout autre justificatif permettant d'examiner dans quelle mesure un retour au Sénégal était impossible.

30.         Le 21 décembre 2018, M. A______ a répondu, revenant en détail sur son parcours professionnel, ses licenciements et une maladie qui s'était ajoutée depuis 2015 à ses problèmes professionnels. Il souhaitait trouver du travail et ne voulait pas être soutenu par l'aide sociale mais n'avait pas eu le choix à la fin de sa période de chômage. Il avait multiplié les stages et les recherches. Son neveu et son cousin vivaient en Suisse avec leurs familles respectives. Il avait encore quatre sœurs au Sénégal et deux frères en Côte d'Ivoire.

L'absence de renouvellement de son autorisation de séjour bloquait de nombreuses démarches, tant professionnelles que personnelles. Il ne pouvait pas quitter la Suisse, même pour se rendre en France afin de renouveler son passeport, désormais échu.

31.         Le 17 septembre 2019, l'OCPM a requis de M. A______ une attestation de son assistante sociale auprès de l'HG, indiquant les raisons pour lesquelles il percevait l'aide sociale, les démarches entreprises, l'intégralité de ses recherches d'emploi ou les justificatifs démontrant une incapacité de travail, et tout autre effort d'intégration socio-professionnelle, ainsi qu'un nouveau rapport médical du SEM complété par son médecin traitant.

32.         Par courrier du 10 octobre 2019, l'assistante sociale de M. A______ auprès de l'HG a répondu aux demandes de l'OCPM.

M. A______ s'était adressé à leur service lorsqu'il s'était retrouvé en fin de droit de ses indemnités de chômage. Il avait toujours fait preuve d'une réelle volonté pour se réinsérer, alors même que son état de santé ne s'était pas amélioré depuis qu'elle le suivait et qu'il avait déposé une demande AI encore en cours à ce jour, en raison des trois opérations au dos qu'il avait dû subir. Il avait suivi des cours au sein de l'HG pour gérer son administratif et ses frais médicaux.

Elle a joint à son courrier les attestations des stages et cours suivis par M. A______, et le rapport médical rempli à l'attention du SEM par son médecin-traitant le Docteur F______, le 24 septembre 2019.

Il ressortait de ce document que M. A______ était suivi depuis le 23 décembre 2015 pour une hernie discale opérée en décembre 2015, une récidive d'hernie discale opérée en mars 2018 et une cervicobrachialgie réfractaire opérée le 10 août 2015. Le patient était en bon état général au niveau psychique mais souffrait de séquelles post-opératoires et d'hypoesthésie en territoire L5-S1 gauche avec déficit moteur. L'évolution était lentement favorable s'il n'y avait pas d'efforts physiques. Le traitement consistait en des activités physiques adaptées et de la physiothérapie. M. A______ prenait plusieurs médicaments, soit le Lodine, le Prednisone et le Lyrica, en réserve selon la douleur. En outre, une activité professionnelle était possible en respectant les limitations fonctionnelles, soit le port de charges au-delà de 5 kg de manière répétitive ou 10 kg de manière ponctuelle. La position assise devait se faire sur une chaise haute afin de décharger la colonne. Un contrôle médical une fois tous les trois mois (soit quatre fois par an) et un contrôle neurologique une fois par an étaient à prévoir.

33.         Le 25 octobre 2019, l'OCPM a demandé à M. A______ de lui préciser à quel stade se trouvait la procédure initiée auprès de l'assurance-invalidité (ci-après: AI).

34.         Par courrier du 1er novembre 2019, M. A______ a indiqué à l'OCPM que sa demande AI avait été refusée, l'office AI privilégiant un soutien actif dans la recherche d'un emploi approprié, au regard de l'évolution de sa maladie par rapport à une rente AI.

35.         Par courrier du 28 février 2020, l'OCPM a informé M. A______ qu'en raison des prestations d'aide sociale dont il bénéficiait depuis le 1er janvier 2010, pour un montant total de CHF 171'800.-, et ce malgré les mises en garde du SEM, il remplissait un motif de révocation au sens de l'art. 62 al. 1 let. e loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Il avait l'intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse.

La durée de son séjour ne pouvait à elle seule justifier le maintien de son autorisation. En effet, il était arrivé en Suisse à 30 ans pour la première fois et avait passé toute sa jeunesse et son adolescence au Sénégal. Il n'avait pas démontré avoir des attaches avec la Suisse, aucun membre de sa famille proche n'y résidant pour le surplus. Malgré les recherches d'emploi et les problèmes médicaux mentionnés au dossier, rien ne justifiait une telle dépendance à l'aide sociale, puisqu'il ressortait des certificats médicaux qu'il était apte à exercer une activité lucrative à 100% pour autant qu'elle soit adaptée à ses limitations fonctionnelles.

36.         Le 13 mars 2020, M. A______ a répondu à l'OCPM, expliquant son parcours professionnel.

Il avait toujours travaillé depuis son arrivée en Suisse, mais le temps pris pour le renouvellement de son permis de séjour avait compliqué ses recherches d'emploi. Néanmoins, il avait œuvré pour D______ à la satisfaction de son employeur depuis 2011, avant d'être injustement licencié. Ses problèmes de santé l'avaient ensuite empêché de retrouver un emploi, mais il avait multiplié démarches et stages, sans succès.

37.         Par courrier du 13 juillet 2020, l'OCPM a fait part une nouvelle fois à M. A______ de son intention de refuser sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai de trente jours lui était imparti pour exercer par écrit son droit d'être entendu.

En substance, il remplissait un motif de révocation selon l'art. 62 al. 1 let. e LEI, bénéficiant de prestations d'aide sociale pour un montant total de CHF 187'897.- et la mesure était proportionnée aux circonstances, l'intérêt public à son éloignement l'emportant sur son intérêt privé à demeurer en Suisse.

38.         Par courrier du 28 juillet 2020, M. A______ a fait usage de son droit d'être entendu.

Il était très malade et souffrait d'une nouvelle hernie discale. Il avait été licencié par E______ en raison de sa maladie, et avait fait toutes les mesures et stages prescrits par le chômage et l'HG. Son objectif était de sortir de l'aide sociale et de payer ses dettes, mais le renouvellement qui tardait de son permis de séjour avait compliqué ses recherches. Il n'était pas loin d'une dépression en raison de ses soucis, tant médicaux que professionnels.

39.         Par décision du 19 janvier 2021, l'OCPM a refusé de prolonger l'autorisation de séjour sollicitée par M. A______ et prononcé son renvoi de Suisse, le dossier ne faisant pas apparaitre que celui-ci était illicite, impossible ou non raisonnablement exigible. Un délai au 1er mars 2021 lui était imparti pour quitter le territoire.

M. A______ bénéficiait depuis le 1er janvier 2010 de prestations d'aide sociale pour un montant total au jour de la décision de CHF 208'507.-. Sa situation financière s'était péjorée malgré deux mises en garde du SEM. Il remplissait le motif de révocation de l'art. 62 al. 1 let. e LEI. Son droit au renouvellement de son autorisation de séjour était de ce fait éteint.

En outre, la pesée des intérêts lui permettait de considérer que l'intérêt public à son éloignement l'emportait sur son intérêt privé à demeurer en Suisse. En effet, la durée de séjour ne pouvait à elle seule justifier le maintien de son autorisation de séjour. Il avait passé sa jeunesse et son adolescence au Sénégal, étant arrivé en Suisse à l'âge de trente ans. Il n'avait pas démontré avoir des attaches particulières avec la Suisse, où ne vivait aucun membre de sa famille.

Malgré ses recherches d'emploi et ses problèmes médicaux, rien ne justifiait une telle dépendance à l'aide sociale, dès lors qu'il ressortait des certificats médicaux qu'il pouvait exercer une activité lucrative. Il n'était pas démontré qu'il se trouvait en incapacité durable de travail en raison de son état de santé et selon ses explications du 12 novembre 2019, l'octroi d'une rente AI lui avait été refusé.

Il faisait en outre l'objet d'actes de défaut de biens pour un montant à ce jour de CHF 40'000.-.

40.         Le 19 février 2021, M. A______, sous la plume de son avocat, a interjeté recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation, et à la prolongation de son titre de séjour. Préalablement, il convenait de lui octroyer un délai pour compléter son recours.

L'OCPM n'avait pas correctement analysé son état de santé ni examiné exhaustivement une possible et hypothétique prise en charge médicale au Sénégal, pas plus que les raisons pour lesquelles il avait bénéficié de l'aide sociale. La décision querellée était donc arbitraire, car elle se basait sur un état de fait incomplet, malgré les pièces et documents fournis.

41.         Le 8 mars 2021, le recourant a complété son recours, persistant dans ses précédentes conclusions et explications.

Il souffrait d'une maladie neuro-motrice depuis 2015, laquelle limitait sa capacité de travail. Les conditions dans lesquelles il avait été amené à bénéficier de l'aide sociale dans le cadre du renouvellement de son autorisation de séjour résultaient de sa maladie, ce qui l'avait empêché de reprendre une activité lucrative, malgré sa volonté.

Il a joint de nombreuses pièces à l'appui de son recours, notamment divers certificats de travail et de stage, des documents concernant sa période de chômage, des attestations des aides financières de l'HG, et des certificats médicaux établis entre 2015 et 2021, dont il ressort ce qui suit :

-          dans le certificat médical du 26 mai 2015, le médecin-traitant de M. A______, le Docteur G______ a expliqué que son patient souffrait d'une hernie discale cervicale entrainant une irradiation douloureuse et des troubles neurologiques du membre supérieur gauche, et qu'il était en incapacité de travail depuis le 1er février 2015 ;

-          par certificat médical daté du 17 mars 2016, le Dr F______ a précisé que M. A______ devait changer d'activité professionnelle en raison de limitations incompatibles avec son activité dans le domaine de la sécurité. Il ne pouvait porter des charges au-delà de 10kg et la position assise devait se faire uniquement sur chaise haute, afin de libérer la colonne ;

-          par certificats médicaux des 1er novembre 2017, 24 septembre 2019, 10 juillet 2020, et 3 février 2021, le Dr F______ a certifié qu'il convenait d'adapter le travail du recourant en évitant le port de charges, les flexions du tronc et les charges au niveau de la colonne cervicale et lombaire ;

-          par certificat médical du 24 janvier 2018, le Dr F______ a précisé que le patient était en incapacité de travail en raison de douleurs invalidantes depuis le 27 novembre 2017 et ce jusqu'à nouvel avis médical du service de neurochirurgie des HUG ;

-          le 6 juillet 2020, dans un avis neurologique adressé au médecin-traitant de M. A______, le Docteur H______ a indiqué que le patient prenait auparavant un traitement à base de Lyrica, de Tramal, de Plexia et de Dafalgan, et, au moment de l'examen, « du corticoïde avec du Prednisolone, et du Tramal associé à du Paracétamol, permettant d'améliorer partiellement la symptomatologie du patient ». Il avait été opéré en 2015 au niveau de la région lombaire avec reprise opératoire pour une hernie discale le 19 mars 2018. La chirurgie avait permis une amélioration « assez appréciable de la symptomatologie présentée par le patient » ;

-          le 23 juillet 2020, le Docteur I______ a indiqué dans son attestation médicale que la capacité de travail dans une activité adaptée était de 100%, qu'une intervention chirurgicale n'était pas exclue et, au plan des limitations fonctionnelles, qu'il convenait d'éviter le port de poids de plus de 5 kg répétitivement, les rotations cervicales au-dessus de l'horizontal et le travail sur des échelles/échafaudages.

Il ressort également des documents joints à l'appui du recours que M. A______ a effectué divers stages dans le cadre d'un retour à l'emploi, en mars 2017, mars et avril 2019, mars à août 2020, à l'entière satisfaction de ses employeurs.

42.         Dans ses observations du 26 avril 2021, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Il a produit son dossier.

Il n'était pas contesté que le recourant souffrait de problèmes de santé. Néanmoins, il ressortait des certificats médicaux produits, qu'une activité adaptée était possible à temps plein. Depuis plusieurs années, le recourant dépendait cependant de l'aide sociale, pour un montant de CHF 208'507.- à ce jour. Le SEM l'avait déjà mis en garde à deux reprises quant au fait que son autorisation de séjour pourrait ne pas être renouvelée, en fonction de sa situation professionnelle. Un effort lui avait été demandé pour assurer son intégration professionnelle.

Enfin, s'agissant du renvoi, le recourant invoquait une mise en danger de sa santé. Or, le traitement suivi consistait en la prise de Lodine et de Lyrica, deux fois par jour. En l'absence d'efforts physiques, l'évolution médicale était lentement favorable. En outre, la politique sanitaire au Sénégal était basée sur les soins de santé primaires, assurant aux citoyens l'accès aux services cliniques de base et aux médicaments génériques. En l'absence d'éléments contraires, le renvoi était raisonnablement exigible.

43.         Dans sa réplique du 20 mai 2021, le recourant a persisté dans ses précédentes explications et conclusions.

Il a précisé que sa maladie était bien plus grave que ce que l'autorité intimée prétendait. Elle nécessitait un suivi thérapeutique et des contrôles réguliers et constants. Les deux médicaments mentionnés par l'autorité, soit le Lodine et le Lyrica, étaient introuvables au Sénégal, ce qui pouvait être constaté en consultant la liste nationale des médicaments et produits essentiels du Sénégal. Ces médicaments n'y figuraient pas, ils n'étaient donc pas distribués par les services de santé sénégalais. En cas de renvoi dans son pays, il n'aurait donc pas accès aux soins nécessaires au traitement de sa maladie et son état de santé se péjorerait, avec des conséquences extrêmement graves.

44.         Dans sa duplique du 9 juin 2021, l'OCPM a indiqué confirmer sa décision et proposer le rejet du recours.

Renseignements pris auprès du médecin de confiance de l'Ambassade de Suisse à Dakar, le médicament Lyrica était disponible au Sénégal. L'anti-inflammatoire Lodine n'existait pas sous le même nom mais il en existait d'autres, équivalents et de la même famille. Enfin, le Vimovo, association d'ésoméprazole et de naxproxène n'existait pas au Sénégal en tant que tel, mais il existait des protecteurs gastriques et des anti-inflammatoires seuls.

Partant, le traitement médicamenteux administré au recourant selon les ordonnances et rapports médicaux figurant au dossier était disponible au Sénégal et il ressortait pour le surplus desdits certificats médicaux, qu'une activité lucrative était possible, pour autant qu'elle soit adaptée. Enfin, le pronostic de l'évolution médicale était lentement favorable, s'il n'y avait pas d'efforts physiques.

45.         Il ressort de l'extrait le plus récent du registre des poursuites, daté du 13 janvier 2021, qui figure au dossier de l'OCPM, que M. A______ faisait à cette date l'objet de plus de trente actes de défaut de biens pour un total de CHF 46'612.-, principalement au préjudice des assurances sociales, des HUG, de la Confédération, ainsi que de l'administration fiscale cantonale du canton de Genève.

46.         Selon les attestations de l'HG datées des 18 octobre 2011, 13 avril 2015, 31 octobre 2018, 18 septembre 2019 et 18 janvier 2021, M. A______ a bénéficié de prestations financières du 1er janvier 2010 au 30 novembre 2012, puis du 1er avril au 30 septembre 2013, du 1er juin au 31 juillet 2015, et de manière continue depuis le 1er mai 2016. Il a donc perçu des prestations financières de CHF 14'632.- en 2010, CHF 14'170,- en 2011, CHF 5'921.- en 2012, CHF 2'263.- en 2013, CHF 1'179.40 en 2015, CHF 4'032.20 en 2016, CHF 20'537.90 en 2017, CHF 52'109.65 en 2018, CHF 51'079.90 en 2019, et CHF 50'361.70 en 2020, soit un montant total de plus de CHF 215'000.-.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l'autorité intimée refusant de renouveler l'autorisation de séjour du recourant.

6.             Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

7.             En l'espèce, dès lors que la demande de renouvellement d'autorisation de séjour a été déposée le 19 janvier 2018, c'est la LEI et l'OASA dans leur teneur avant le 1er janvier 2019 qui s'appliquent, étant précisé que la plupart des dispositions sont demeurées identiques.

8.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Sénégal.

9.             Selon l'art. 33 al. 1 LEI, l’autorisation de séjour est octroyée pour un séjour de plus d’une année.  Elle est octroyée pour un séjour dont le but est déterminé et peut être assortie d’autres conditions (al. 2). Sa durée de validité est limitée, mais peut être prolongée s’il n’existe aucun motif de révocation au sens de l’art. 62 al. 1 LEI (al. 3). Pour fixer la durée de validité de l’autorisation de séjour et de sa prolongation, les autorités tiennent compte de l’intégration de l’étranger (al. 4).

Ce droit s'éteint toutefois s'il existe un motif de révocation au sens de l'art. 63 LEI (art. 51 al. 1 let. b LEI). Il existe notamment un motif de révocation lorsque l'étranger dépend de l'aide sociale (art. 62 al. 1 let. e LEI applicable par renvoi de l'art. 63 al. 1 let. a LEI).

10.         La révocation ou le non-renouvellement de l'autorisation de séjour d'un étranger pour des raisons de dépendance à l'aide sociale suppose qu'il existe un risque concret d'une telle dépendance. De simples préoccupations financières ne suffisent pas. Pour évaluer ce risque, il faut non seulement tenir compte des circonstances actuelles, mais aussi considérer l'évolution financière probable à plus long terme, compte tenu des capacités financières de tous les membres de la famille (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1041/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.2 ; 2C_633/2018 du 13 février 2019 consid. 6.2 ; 2C_184/2018 du 16 août 2018 consid. 2.3). Une révocation ou un non-renouvellement entrent en considération lorsqu'une personne a reçu des aides financières élevées et qu'on ne peut s'attendre à ce qu'elle puisse pourvoir à son entretien dans le futur. À la différence de l'art. 63 al. 1 let. c LEI, qui concerne les autorisations d'établissement, l'art. 62 al. 1 let. e LEI n'exige pas que l'étranger lui-même ou une personne dont il a la charge dépende « durablement et dans une large mesure » de l'aide sociale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_95/2019 du 13 mai 2019 consid. 4.3.1 ; 2C_1041/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.2 et les références citées).

La période déterminante pour évaluer si la dépendance à l'aide sociale est durable n'est pas limitée à deux ou trois ans. Au contraire, ce nombre d'années constitue en principe la durée minimale à partir de laquelle il peut être admis que l'autorité disposera de suffisamment de recul pour apprécier ou non le caractère durable et important de la dépendance de l'étranger de l'aide sociale (ATF 119 Ib 1 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_268/2011 du 22 juillet 2011 consid. 6.2.4).

Pour apprécier si une personne se trouve dans une large mesure à la charge de l'aide sociale, il faut tenir compte du montant total des prestations déjà versées à ce titre (arrêts du Tribunal fédéral 2C_268/2011 précité consid. 6.2.3 et 2C_210/2007 du 5 septembre 2007 consid. 3.1).

11.         En l'espèce, il ressort du dossier que le recourant est arrivé en Suisse en 1996, à l'âge de trente ans et y séjourne donc depuis près de vingt-cinq ans. Depuis son arrivée, il a travaillé de manière discontinue en tout cas jusqu'en 2015, avant d'être au chômage en raison de problèmes de santé. Il était toutefois déjà au bénéfice de prestations de l'HG depuis 2010, sans que cette aide ne soit consécutive à des problèmes médicaux. Depuis cette date, tant le nombre d'actes de défaut de biens que le montant de l'aide versée n'ont cessé de croître, bien qu'il ressorte du dossier que la capacité de travail du recourant avant 2015 était complète, et qu'elle l'est actuellement, à teneur des certificats médicaux produits, sous réserve de l'exercice d'une activité adaptée (pas de port de charges ni de flexions répétées de la colonne vertébrale). Il ressort de l'attestation de l'HG du 18 janvier 2021 que le montant total des prestations financières versées atteignait au moment de la décision CHF 215'000.-.

En outre, le SEM avait formellement attiré l'attention du recourant, à deux reprises, en 2013 et en 2017 sur le risque de non renouvellement de son permis de séjour si sa situation professionnelle et financière ne s'améliorait pas.

Ainsi, le constat doit être posé qu'à ce jour encore le recourant est, et ce depuis de nombreuses années, entièrement soutenu par l'aide sociale, sans qu'une sortie en soit rendue vraisemblable à courte ou moyenne échéance. Il ne peut pas non plus compter sur d'éventuelles futures rentes versées par d'autres assurances sociales, sa demande auprès de l'AI n'ayant pas abouti selon ses déclarations. Dans ces conditions, même s'il devait bénéficier d'un titre de séjour, il est vraisemblable que le recourant demeurerait à l'assistance publique.

12.         Vu ce qui précède, la condition de l’art. 62 al. 1 let. e LEI pour le
non-renouvellement de l’autorisation de séjour du recourant est réalisée.

13.         Il doit encore être examiné si la décision querellée respecte le principe de la proportionnalité, au vu des intérêts privés et publics en présence.

14.         Selon l’art. 96 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (al. 1). Lorsqu’une mesure serait justifiée, mais qu’elle n’est pas adéquate, l’autorité compétente peut donner un simple avertissement à la personne concernée en lui adressant un avis comminatoire
(al. 2).

15.         Ainsi, même lorsqu’un motif de révocation de l’autorisation est réalisé, le prononcé de la révocation ne se justifie que si la pesée des intérêts à effectuer dans le cas d’espèce fait apparaître la mesure comme proportionnée aux circonstances (art. 5 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 96 LEI ; ATF 139 II 121 consid. 6.5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1189/2014 du 26 juin 2015 consid. 3.4.1). Doivent être prises en considération toutes les circonstances du cas d’espèce (ATA/968/2016 du
15 novembre 2016 consid. 9), soit la durée du séjour en Suisse, l'âge de l'arrivée dans ce pays, les relations sociales, familiales et professionnelles, le niveau d'intégration et les conséquences d'un renvoi de l'intéressé (arrêts du Tribunal fédéral 2C_148/2015 du 21 août 2015 consid. 5.3 ; 2C_1189/2014 du 26 juin 2015 consid. 3.4.1).

16.         Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 et 36 Cst., se compose des règles d’aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités).

Dans le cadre du principe de la proportionnalité, en présence d’une dépendance à l’aide sociale, les éléments à considérer sont en particulier la responsabilité et/ou la faute de la personne concernée quant à cette dépendance, la durée de celle-ci, la durée du séjour en Suisse, le degré d’intégration et les inconvénients de la révocation de l’autorisation pour l’étranger et sa famille (arrêts du Tribunal fédéral 2C_263/2016 du 10 novembre 2016 consid. 3.2 ; 2C_120/ 2015 du 2 février 2016 consid. 3.1 et les références citées). À cet égard, les causes de ladite dépendance ainsi que la question de savoir si la personne concernée est dépendante de l’aide sociale de par sa propre responsabilité et/ou faute et dans quelle mesure relèvent non de la condition de l’art. 62 al. 1
let. e LEI, mais du principe de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_263/2016 précité consid. 3.2).

17.         À teneur de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d’admission (art. 18 à 29 LEI) notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs.

18.         L’art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits - étant précisé que le nouveau droit n’est pas plus favorable à l’intéressé -, prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant (let. a), du respect de l’ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière, ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), et des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives et commentaires du SEM, Domaine des étrangers, octobre 2013, actualisées le 1er janvier 2021, ch. 5.6.10).

19.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d’une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200
consid. 4 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; ATA/400/2016 du
10 mai 2016 consid. 6c). Elles ne confèrent pas de droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L’autorité doit néanmoins procéder à l’examen de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce pour déterminer l’existence d’un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 précité consid. 4c).

La reconnaissance de l’existence d’un cas d’extrême gravité implique que l’étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d’existence doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d’autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d’admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l’étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n’ait pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d’extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu’on ne puisse exiger qu’il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d’amitié ou de voisinage que l’intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu’ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39
consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du
28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A_718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ;
C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; ATA/828/2016 du 4 octobre 2016 consid. 6d).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5414/2013 précité consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014
consid. 4.3).

20.         L’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d’origine, mais implique qu’il se trouve personnellement dans une situation si grave qu’on ne peut exiger de sa part qu’il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l’ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d’une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d’exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n’exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d’un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/828/2016 précité consid. 6d).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

21.         Des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une dérogation aux conditions d'admission (ATA/155/2011 du 8 mars 2011, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_315/2011 du 28 juillet 2011 ; ATAF C-6116/2012 du 6 février 2014 consid. 7.1).

22.         Il se justifie d’examiner ci-après la situation de l’intéressé en parallèle sous les angles du principe de la proportionnalité et de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, que celui-ci invoque, dans la mesure où les circonstances à prendre en compte comme critères s’avèrent ici pour un grand nombre identiques.

23.         En l'espèce, le recourant a passé près de vingt-cinq ans en Suisse où il est arrivé à l'âge de trente ans. Cela étant, il ne semble pas s'y être particulièrement intégré, ni sur le plan professionnel ni sur le plan social. Il ne soutient pas s'être engagé dans la vie associative ou culturelle à Genève et ne fait pas état de liens personnels particulièrement forts qu'il y aurait tissés au-delà du réseau de connaissances pouvant être raisonnablement attendu de tout étranger ayant séjourné plus d'une vingtaine d'années en Suisse. Il ne peut se prévaloir d'un comportement irréprochable dans la mesure où il n'a pas respecté la décision de renvoi de 2003, et fait l'objet de poursuites et de multiples actes de défaut de bien. Son intégration sociale ne peut ainsi être qualifiée de particulièrement marquée.

Son intégration professionnelle en Suisse s'est limitée comme déjà relevé à plusieurs périodes d'emploi, jusqu'en 2015. Malgré ceux-ci, il bénéficiait déjà depuis 2010 de l'aide sociale. Il en dépend dès lors depuis plus de dix ans. Le SEM l'a par ailleurs mis en garde à deux reprises lors du renouvellement de son autorisation de séjour en 2013, puis en 2017, des conséquences possibles en l'absence d'amélioration de sa situation financière et professionnelle. Or, celle-ci s'est péjorée au fil des ans. À cet égard, sa maladie et son influence sur son état de santé doivent être prise en considération à compter de 2015, s'agissant des aides reçues à partir de cette période.

Sur le plan médical, il doit être relevé que tous les certificats médicaux produits par le recourant attestent d'une capacité de travail complète aujourd'hui, sous réserve d'une activité adaptée, évitant la station assise sans chaise permettant de libérer colonne et le port de charges répétitives. Au vu de ce qui précède, il ne peut être considéré que sa dépendance à l'aide sociale dépende de son état de santé. Enfin, les documents médicaux fournis précisent que l'évolution médicale est lentement favorable, sous réserve d'efforts physiques.

Le recourant a passé toute son enfance, son adolescence, ainsi que le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine. En outre, en cas de retour, il pourra vraisemblablement compter sur le soutien de sa famille, puisqu'il compte encore, selon ses déclarations, quatre sœurs et leurs familles au Sénégal, et deux frères en Côte d'Ivoire. Certes, il séjourne en Suisse depuis 1996, soit près de vingt-cinq ans. Cette durée, bien qu'elle puisse être qualifiée de longue, doit toutefois être relativisée dès lors qu'entre 2001 et 2009, il ne disposait plus de titre de séjour et aurait dû quitter la Suisse, conformément à la décision de renvoi, ce qu'il n'a pas fait.

Ainsi, un retour au Sénégal impliquerait certes un déracinement et des difficultés d’adaptation pour le recourant, qu'il convient de ne pas minimiser. Toutefois, il ne se trouve pas dans la situation de quitter un pays dans lequel il bénéficie d’une situation stable et d’une intégration poussée, et il n’expose pas précisément en quoi les conditions de sa réintégration sociale au Sénégal, au regard de sa situation personnelle, professionnelle, médicale et familiale, seraient gravement compromises, de sorte qu’une impossibilité ou une difficulté particulièrement élevée de réintégration dans ce pays ne peuvent pas être retenues.

En définitive, l’examen des circonstances et la pesée des intérêts en présence, dont ressort la prépondérance de l’absence d’intégration professionnelle et économique par rapport à la durée du séjour de l’intéressé en Suisse et des difficultés qu’il pourrait connaître en cas de renvoi au Sénégal, ne font pas apparaître le
non-renouvellement de l’autorisation de séjour comme disproportionné, ni comme contraire à l’art. 30 al. 1 let. b LEI.

C’est donc sans excès ou abus de son pouvoir d’appréciation que l’OCPM a rejeté la demande de renouvellement d’autorisation de séjour émise par le recourant.

24.         Le recourant expose enfin qu'il lui est impossible de retourner dans son pays, la gravité de son état de santé et la nécessité de poursuivre son traitement rendant son retour inexigible.

25.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64 let. d al. 1 LEI).

Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5268/2008 du 1er juin 2011 consid. 10 ; C-406/2006 du 2 septembre 2008 consid. 8 et la référence citée ; ATA/163/2020 du 11 février 2020 consid. 14 ; ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6).

26.         Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). S'agissant plus spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêt du TAF E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées ; ATA/731/2015 du 14 juillet 2015 consid. 11b). Ainsi, il ne suffit pas en soi de constater, pour admettre l'inexigibilité de l'exécution du renvoi, qu'un traitement prescrit sur la base de normes suisses ne pourrait être poursuivi dans le pays de l'étranger. On peut citer ici les cas de traitements visant à atténuer ou guérir des troubles psychiques ou physiques qui ne peuvent être qualifiés de graves (ATAF D-2671/2014 du 18 mars 2014 consid. 5.2.1 ; D-6827/2010 du 2 mai 2011 consid. 8.3). Si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance de l'étranger concerné, cas échéant avec d'autres médications que celles prescrites en Suisse, l'exécution du renvoi dans l'un ou l'autre de ces pays sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées).

27.         En l’espèce, il ressort du dossier que les médicaments prescrits en Suisse au recourant sont disponibles au Sénégal, cas échéant sous une autre forme ou en combinant deux médicaments existants. Son état de santé ne nécessite pas d'autres traitements à teneur du dossier. En outre, les certificats médicaux, en particulier celui du Dr F______, précisent que l'évolution est lentement favorable, sous réserve d'efforts physiques.

Partant, le recourant serait en mesure de bénéficier du suivi nécessaire à sa santé au Sénégal. Ses conditions minimales d’existence sont dès lors garanties au sens de la jurisprudence en lien avec l’art. 83 al. 4 LEI.

Au vu de ce qui précède, c’est à bon droit que l’autorité intimée a considéré que le renvoi du recourant était raisonnablement exigible.

28.         Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

29.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d'une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

30.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

31.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 19 février 2021 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 19 janvier 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             le laisse à la charge de l’État de Genève, sous réserve de la décision finale de l'assistance juridique en application de l'art. 19 al. 1 RAJ ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière