Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/106/2021

JTAPI/839/2021 du 26.08.2021 ( LCR ) , REJETE

REJETE par ATA/1168/2021

Descripteurs : DÉCISION INCIDENTE;DOMMAGE IRRÉPARABLE;PERMIS DE CONDUIRE;RETRAIT DE SÉCURITÉ;ALCOOL;EXPERTISE
Normes : LPA.57.letc; LCR.15.al1.leta
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/106/2021 LCR

JTAPI/839/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 26 août 2021

 

dans la cause

 

 

Monsieur A______, représenté par Me Samir DJAZIRI, avocat, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DES VEHICULES

 

 

 


EN FAIT

1.             Le 7 novembre 2017, vers 2h du matin, Monsieur A______ (ci-après : le recourant), né le ______1976, a été grièvement blessé à l'occasion d'un accident, alors qu'il circulait en état d'ébriété au guidon de sa moto. A teneur du rapport de police établi le 28 janvier 2018 suite à cet événement et de ses annexes, il avait alors une concentration d'éthanol dans le sang situé entre 1,99 à 2,76 g/kg. Il avait circulé à une vitesse inadaptée, n'était pas resté maître de son motocycle, qui avait percuté un trottoir, ce qui avait provoqué sa chute.

2.             Par courrier du 31 janvier 2018, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) lui a fait savoir que les autorités de police lui avaient transmis leur rapport, attirant notamment son attention sur le fait qu'une mesure administrative pouvait être prise à son encontre, indépendamment de l'amende ou d'une autre sanction pénale, de sorte qu'un délai de quinze jours ouvrables lui était imparti pour produire ses observations écrites.

3.             Le 23 février 2018, à sa demande, l'OCV a suspendu la procédure dans l'attente de l'issue de l'affaire sur le plan pénal.

4.             Par ordonnance pénale du 26 octobre 2018, le Ministère public l'a condamné à une peine pécuniaire de cent jours-amende, avec sursis pendant trois ans, et à une amende de CHF 1'400.- pour infraction à l'art. 91 al. 2 let. a de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01).

Cette ordonnance est entrée en force suite au retrait, annoncé le 3 février 2020, de l'opposition qu'il avait formée à son encontre, alors que la procédure se trouvait en mains du Tribunal de police, ce dont l'OCV a été informé par le Ministère public le 30 octobre 2020.

5.             L'OCV lui a ensuite accordé un délai échéant le 16 novembre, puis le 23 novembre 2020, pour lui soumettre d'éventuelles observations écrites.

6.             Il s'est exprimé par courriers des 23 novembre et 7 décembre 2020 sous la plume de son conseil.

7.             Par décision du 11 décembre 2020, prise en application de l'art. 15d al. 1 let. a LCR, l'OCV lui a fait obligation de se soumettre à une expertise auprès de l'unité de médecine et psychologie du trafic du centre universitaire romand de médecine légale (ci-après : CURML), précisant que s'il ne donnait pas suite aux requêtes et convocations des experts, son permis de conduire serait retiré à titre préventif.

Sous « infraction(s) retenue(s) », il y est indiqué :

« Conduite en état d'ébriété en présentant un taux d'alcool qualifié, soit avec un taux d'alcoolémie minimum au moment critique de 1.99 gr. ‰, vitesse inadaptée aux circonstances ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation, de la visibilité, perte de maîtrise du véhicule, heurt d'un trottoir et embardée, le 07.11.2017 à 01:54 sur la route de Chancy en direction d'Onex au guidon d'un motocycle ».

L'examen du dossier l'incitait à concevoir des doutes quant à son aptitude à la conduite, raison pour laquelle cet examen était ordonné. Les frais d'expertise étaient à sa charge. Une décision finale serait prise lorsque les questions relatives à son aptitude auraient été élucidées ou, en cas de non soumission à l'expertise, dans le délai de trois mois.

Un recours contre cette décision pouvait être formé dans les dix jours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

8.             Par acte posté le 11 janvier 2021, sous la plume de son conseil, il a recouru auprès du tribunal contre cette décision, dont il a requis l'annulation, subsidiairement moyennant le renvoi du dossier à l'OCV « afin qu'une nouvelle décision soit prise dans le sens des considérants », avec suite de frais et dépens.

Il a indiqué avoir reçu ladite décision - devant être perçue comme une décision finale - le 14 décembre 2020, de sorte que son recours, formé dans le délai de trente jours, arrivant à échéance le 27 janvier 2021 en prenant en compte les féries judiciaires du 18 décembre 2020 au 2 janvier 2021, était recevable.

Il a fait valoir que les conditions l'obligeant à se soumettre à une expertise n'étaient pas réunies.

Le Ministère public ne l'avait aucunement reconnu coupable de vitesse inadaptée aux circonstances, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité, comme cela ressortait de la décision attaquée. Par ailleurs, les faits du 7 novembre 2017 avaient été tout à fait isolés, dans la mesure où il n'avait jusqu'alors « aucunement conduit s'il avait consommé de l'alcool ». Il n'avait d'ailleurs aucun antécédent jusque-là et n'avait fait l'objet d'aucune sanction administrative ou procédure pénale pour des faits postérieurs, étant souligné que son permis de conduire n'avait pas été retiré à titre préventif. Enfin, il consommait de l'alcool de façon très occasionnelle et ne conduisait pas dans une telle hypothèse. Dans ces conditions, il ne pouvait y avoir aucun doute quant à son aptitude à la conduite, de sorte que les conditions de l'art. 15d al. 1 let. a LCR n'étaient pas réalisées.

9.             Le 12 mars 2021, l'OCV a produit son dossier et conclu au rejet du recours, considérant que sa décision était conforme à la loi et à la jurisprudence.

10.         Le recourant a répliqué le 14 mai 2021, sous la plume de son conseil.

Il s'était soumis à un examen sanguin le 21 avril 2021. Il ressortait notamment du rapport y relatif, sous la rubrique « produit d'addiction », qu'il présentait un taux de CDT de 1.51 %, soit largement inférieur à la norme de 2.50 %. Cette analyse corroborait pleinement ses explications selon lesquelles les faits du 7 novembre 2017 avaient été tout à fait isolés et sa consommation d'alcool était très occasionnelle.

Il persistait donc dans les termes et conclusions de son recours.

11.         Par courrier du 27 mai 2021, l'OCV a indiqué qu'il n'avait pas d'observations supplémentaires à formuler.

EN DROIT

1.            Le tribunal est compétent pour statuer en première instance sur les recours portant, comme en l’espèce, sur les décisions prises par l'OCV en application de la LCR (art. 115 et 116 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.            Interjeté en temps utile, c’est-à-dire dans le délai de dix jours, s’agissant d’une décision incidente (art. 4 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), car prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu’une étape vers la décision finale (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. aussi ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 1 et l'arrêt cité ; Cédric MIZEL, La preuve de l'aptitude à la conduite et les motifs autorisant une expertise, Circulation routière 3/2019, p. 35 ; cf. encore, par analogie, ATF 122 II 359 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_212/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1 ; 1C_154/2018 du 4 juillet 2018 consid. 1.1 et 1C_514/2016 du 16 janvier 2017 consid. 1.1, portant sur le retrait à titre préventif du permis de conduire), et devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 115 et 116 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05 ; art. 17 al. 1, 3 et 4, 57 let. c, 62 al. 1 let. b, 62 al. 3 1ère phr. et 63 al. 1 let. c LPA).

3.            A teneur de l'art. 57 let. c LPA, les décisions incidentes sont susceptibles de recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.

4.            Lorsqu’il n’est pas évident que le recourant soit exposé à un préjudice irréparable, il lui incombe d’expliquer dans son recours en quoi il serait exposé à un tel préjudice et de démontrer ainsi que les conditions de recevabilité de son recours sont réunies (ATF 136 IV 92 consid. 4 ; 133 II 353 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 2).

5.            Selon la jurisprudence, une décision est susceptible de causer un préjudice irréparable si le recourant encourt un retrait provisoire du permis de conduire et doit avancer les frais de l'examen médical auquel il doit se soumettre et qui ne lui seront peut-être pas restitués (arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 1 et les références ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. également arrêt 1C_328/2011 du 8 mars 2012 consid. 1).

6.            En l'occurrence, le recourant - qui est à tort parti du principe que la décision entreprise était une décision finale - ne s'est aucunement prononcé sur cette question, alors qu'il lui incombait de le faire. Néanmoins, dès lors que ladite décision stipule, conformément à ce que prévoit l'art. 45 du règlement sur les émoluments de l’office cantonal des véhicules du 15 décembre 1982 (REmOCV - H 1 05.08), que les frais d'expertise seront à sa charge (cf. à cet égard art. 9 al. 1 let. d du règlement du centre universitaire romand de médecine légale, site de Genève, du 25 septembre 2013 - RCURML - K 1 55.04), qu'il devra (très vraisemblablement) s'acquitter d'une avance et que s'il ne se soumet pas à l'expertise, son permis lui sera retiré, la condition de l'art. 57 let. c LPA apparaît réalisée, si bien qu'il convient d'entrer en matière (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1).

7.            Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

8.            Selon l'art. 14 al. 1 LCR, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).

9.            Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fait l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1). Un examen d'aptitude est en particulier ordonné, selon l'art. 15d al. 1 let. a LCR, lorsqu'un conducteur a circulé en étant pris de boisson avec un taux d'alcool dans le sang de 1,6 g pour mille ou plus ou un taux d'alcool dans l'haleine de 0,8 mg ou plus par litre d'air expiré, des concentrations aussi élevées étant l'indice d'un problème de consommation abusive, voire d'addiction (Message du Conseil fédéral du 20 octobre 2010 concernant Via sicura, le programme d'action de la Confédération visant à renforcer la sécurité routière, in FF 2010 p. 7755 et les auteurs cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2019 du 26 juin 2019 consid. 3.3 ; 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; 1C_331/2016 du 29 août 2016 consid. 5).

Lorsque l'alcoolémie relevée est supérieure à ces valeurs au moment des faits, l'autorité n'a pas d'autre choix que de mettre en œuvre une expertise, afin de lever tout doute sur l'éventualité d'une dépendance à l'alcool et sur l'aptitude à la conduite de l'intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 1C_331/2016 du 29 août 2016 consid. 5 ; cf. aussi ATA/390/2018 du 24 avril 2018 consid. 4).

10.        Aux termes de l'art. 16 al. 1 1ère phr. LCR, les permis et les autorisations de conduire sont retirés lorsque l'autorité constate que les conditions légales de leur délivrance ne sont pas ou ne sont plus remplies. Cette disposition se réfère en particulier à l'art. 14 LCR (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1). Précisant le régime applicable au retrait du permis de conduire pour cause d'inaptitude, l'art. 16d al. 1 LCR prévoit que le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée notamment à la personne dont les aptitudes physiques et psychiques ne lui permettent pas ou plus de conduire avec sûreté un véhicule automobile (let. a) ou qui souffre d'une forme de dépendance la rendant inapte à la conduite (let. b).

Ces mesures constituent un retrait de sécurité (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 122 II 359 consid. 1a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_384/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3.1), en ce sens qu'elles ne tendent pas à réprimer et ne supposent pas la commission d'une infraction fautive à une règle de la circulation, mais sont destinées à protéger la sécurité du trafic contre les conducteurs inaptes (cf. not. ATF 133 II 331 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 2). Elles peuvent ainsi être ordonnées sans qu'il y ait un jugement pénal passé en force (ATF 122 II 359 consid. 2b).

11.        La décision de retrait de sécurité du permis pour cause d'inaptitude à la conduite constitue une atteinte grave à la personnalité et à la sphère privée de l'intéressé ; elle doit reposer sur une instruction précise des circonstances déterminantes (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 133 II 284 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_242/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.2 ; 1C_331/2016 du 29 août 2016 consid. 4 ; 1C_557/2014du 9 décembre 2014 consid. 3 ; 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

12.        L'existence d'une dépendance à l'alcool est admise si la personne concernée consomme régulièrement des quantités exagérées d'alcool, de nature à diminuer sa capacité à conduire des véhicules, et se révèle incapable de se libérer ou de contrôler cette habitude par sa propre volonté. La dépendance doit être telle que l'intéressé présente plus que tout autre conducteur le risque de se mettre au volant dans un état ne lui permettant plus d'assurer la sécurité de la circulation. La notion de « dépendance » au sens des art. 14 al. 2 let. c et 16d al. 1 let. b LCR ne se confond donc pas avec la notion médicale de dépendance à l'alcool. La notion juridique permet déjà d'écarter du trafic les personnes qui, par une consommation abusive d'alcool, se mettent concrètement en danger de devenir dépendantes au sens médical (ATF 129 II 82 consid. 4.1 ; 127 II 122 consid. 3c et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_128/2020 du 29 septembre 2020 consid. 2.1 ; 1C_320/2017 du 9 janvier 2018 consid. 2.2 ; 1C_106/2016 du 9 juin 2016 consid. 4.1). Le fait de ne pas pouvoir dissocier l'alcool et la conduite est aussi propre à entraîner une inaptitude à conduire des véhicules automobiles, même en l'absence d'une dépendance à l'alcool, justifiant le retrait du permis de conduire en application de l'art. 16d al. 1 let. a LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_584/2019 du 18 novembre 2019 consid. 2).

S'agissant de l'expertise de la médecine du trafic, la jurisprudence a précisé les exigences que celle-ci doit respecter pour constituer une base de décision suffisante en matière de retrait de sécurité. La mise en évidence d'une consommation d'alcool nuisible pour la santé suppose d'abord une analyse de laboratoire où divers marqueurs sont mesurés. Les résultats ainsi obtenus doivent être appréciés en relation avec d'autres examens, tels que l'analyse approfondie des données personnelles, l'examen détaillé des courses effectuées en état d'ébriété, une anamnèse de l'alcoolisme - soit l'analyse du comportement de consommation (consommateur d'habitude ou occasionnel) de l'intéressé et de son impression subjective à ce propos -, de même qu'un examen médical complet, où l'on prêtera une attention particulière aux changements de peau dus à l'alcool (ATF 129 II 82 consid. 6.2.1 et 6.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_250/2016 du 2 septembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_106/2016 du 9 juin 2016 consid. 3.1.3 ; 1C_173/2009 du 27 mai 2009 consid. 3.1 ; 1C_243/2007 du 6 novembre 2007 consid. 2.2).

13.        En l'espèce, on regrettera tout d'abord l'écoulement du temps survenu entre l'évènement ayant donné lieu à la décision attaquée et le prononcé de celle-ci. Plus de trois années se sont en effet écoulées entre ces deux moments, ce qui entache passablement la crédibilité, la justification et le caractère compréhensible de la mesure décidée à l'encontre du recourant, étant souligné que lorsqu'il s'agit d'un retrait de sécurité, il n'est pas critiquable de ne pas attendre l'issue de la procédure pénale et de statuer sans délai (arrêts du Tribunal fédéral 1C_191/2016 du 5 juillet 2016 consid. 5).

Cela étant, il n'en demeure pas moins qu'il n'appartient ni au recourant, ni au tribunal, à ce stade, de se déterminer sur la question de l'aptitude à la conduite de celui-là, à laquelle l'expertise souhaitée par l'OCV, qui envisage bien l'éventualité d'un retrait de sécurité et, dans cette perspective, a ouvert une procédure, doit répondre. La prise en considération de tous les éléments plaidant pour ou contre cette aptitude aura en effet lieu à l'issue de cette procédure. La seule question qui se pose à ce stade revient en effet à savoir s'il existe ou non des doutes quant à cette aptitude, susceptible de justifier la mise en œuvre d'une telle expertise. Or, il n'est pas contesté que le recourant a conduit un véhicule avec un taux d'alcool dans le sang situé entre 1,99 et 2,76 g ‰, ce qui fonde en soi un soupçon préalable que son aptitude à la conduite pourrait être réduite (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5d et la référence), de sorte qu'il doit se soumettre à une enquête, comme l'exige l’art. 15d al. 1 let. a LCR. L'OCV n'avait pas de marge de manœuvre à cet égard et les résultats d'analyse du 22 avril 2021 que le recourants a produits, qui, à eux seuls, ne sont pas significatifs, n'apparaissent en aucune mesure suffisants, au vu de la jurisprudence précitée, pour lever de tels doutes.

La mesure querellée ne prête donc pas le flanc à la critique.

14.        Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

15.        Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA et du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).

Vu l'issue du litige, le recourant n’a pas droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

 

1.            déclare recevable le recours interjeté le 11 janvier 2021 par Monsieur A______ contre la décision prise à son égard par l'office cantonal des véhicules le 11 décembre 2020 ;

2.            le rejette ;

3.            met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______, lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

4.            dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.            dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 57 let. c, 62 al. 1 let. b et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10, rue Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le 26 août 2021

 

 

 

Le greffier