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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/349/2021

JTAPI/570/2021 du 04.06.2021 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR;AUTORISATION DE SÉJOUR;DURÉE;INTÉGRATION SOCIALE
Normes : LEI.30.al1.letb; OASA.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/349/2021

JTAPI/570/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 4 juin 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1985, est ressortissant du Kosovo.

2.             Le 9 octobre 2018, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour dans le cadre de l’opération « Papyrus ».

Il était arrivé en Suisse, à Genève, en provenance du Kosovo alors qu’il était très jeune. Il avait vécu en Suisse sans jamais quitter le territoire. Il avait eu de nombreux emplois depuis son arrivée pour subvenir à ses besoins, sans bénéficier d’aide sociale. Il était célibataire sans enfants et n’avait plus aucun lien avec le Kosovo. Il n’avait jamais fait l’objet d’une condamnation pénale, ni en Suisse ni dans son pays d’origine. Il était parfaitement intégré à Genève.

Il a joint diverses pièces à sa demande, soit notamment une attestation de l’Hospice général (ci-après : HG), datée du 29 août 2018, laquelle précise qu’il n’était pas aidé financièrement par cet organisme, un extrait, vierge de son casier judiciaire, émis le 28 août 2018, un extrait du registre des poursuites du 29 août 2018, ne faisant état d’aucune poursuite ni d’acte de défaut de biens, une attestation de soutien, des fiches de salaires, et une copie du contrat de bail de son logeur.

3.             Le 16 novembre 2018, son employeur, B______ a fait parvenir à l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) un formulaire M rempli afin d’embaucher M. A______ comme aide-jardinier, quinze heures par semaine.

4.             Une autorisation révocable en toute temps, valable jusqu’à droit connu sur la demande d’autorisation de séjour, a été délivrée par l’OCPM le 13 décembre 2018.

5.             Le 6 mars 2020, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser de lui octroyer l’autorisation de séjour sollicitée et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai de trente jours lui était imparti pour présenter ses éventuelles objections ou observations.

6.             À teneur du dossier, M. A______ n’a pas fait usage de son droit d’être entendu.

7.             Par décision du 16 décembre 2020, l’OCPM a refusé d’octroyer à M. A______ l’autorisation sollicitée, de soumettre son dossier au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis positif et a prononcé son renvoi de Suisse. Un délai au 17 février 2021 lui était imparti pour quitter la Suisse.

Les pièces produites ne permettaient pas de justifier une durée de séjour de dix ans minimum à Genève pour une personne célibataire sans enfants. Il n’avait fourni aucun justificatif de résidence à Genève pour les années avant 2018. Sa situation ne répondait donc pas aux critères de l’opération « Papyrus ».

En outre, il ne remplissait pas les critères d’un cas individuel d’extrême gravité. Il n’avait pas démontré une intégration socioculturelle remarquable ni qu’une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle.

Finalement, le dossier ne faisait pas apparaitre que l’exécution de son renvoi serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible.

8.             Par acte du 1er février 2021, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre la décision précitée, concluant implicitement à son annulation, et formellement au renvoi du dossier auprès de l’OCPM. Il a joint la décision querellée et la lettre d’intention de l’OCPM.

Il s’était installé en Suisse en 2014, à 21 ans. Il travaillait pour B______ depuis plusieurs années et était indépendant financièrement. Il n’avait jamais eu recours à l’aide de l’HG et n’avait ni poursuites ni casier judiciaire.

Il n’avait pas suivi de formation dans son pays, n’ayant fréquenté que l’école obligatoire, et n’avait jamais intégré le monde professionnel au Kosovo. Il ne s’était formé qu’en Suisse, et avait réussi à bien s’intégrer. Il avait des liens étroits avec le pays et parlait bien le français.

Il n’était pas envisageable qu’il retournât au Kosovo. Il lui serait impossible de s’y réintégrer, surtout qu’il n’y avait jamais travaillé. Il souhaitait la régularisation de ses conditions de séjour afin de vivre légalement en Suisse.

9.             Dans ses observations du 30 mars 2021, l’OCPM a conclu au rejet du recours. Il a produit son dossier.

Faute d’éléments nouveaux, il maintenait sa position. En effet, le recourant reprenait ceux formés dans le cadre de sa demande de régularisation. Il ne remplissait pas les conditions du cas de rigueur, respectivement de l’opération « Papyrus », dès lors qu’il n’avait pas été en mesure de démontrer un long séjour sur le territoire. Son intégration socioprofessionnelle était ordinaire et il n’existait pas de liens profonds avec la Suisse. Sa réintégration au Kosovo n’apparaissait pas compromise.

10.         Invité à répliquer par le tribunal, par courrier du 1er avril 2021, le recourant ne s’est pas manifesté dans le délai imparti au 22 avril 2021.

11.         Il ressort du dossier que le recourant a déposé auprès de l’OCPM des demandes de visa de retour les :

-          26 novembre 2018 pour un séjour au Kosovo d’un mois ;

-          15 mai 2019, pour un séjour au Kosovo d’un mois, afin de rendre visite à sa femme et à ses enfants ;

-          21 novembre 2019, pour un séjour au Kosovo d’un mois, afin de rendre visite à sa famille ;

-          7 septembre 2020 et 8 octobre 2020, pour un séjour au Kosovo, lesquelles ont été refusées par l’OCPM.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Le recourant conclut à l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, selon l’opération « Papyrus ».

6.             Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1), étant précisé que la plupart des dispositions sont demeurées identiques.

7.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

8.             L'opération « Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères.

Les critères pour pouvoir bénéficier de cette opération sont les suivants selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » (disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter, consulté le 31 mai 2021, ci-après : le livret) :

-     avoir un emploi ;

-     être indépendant financièrement ;

-     ne pas avoir de dettes ;

-     avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; le séjour doit être documenté ;

-     faire preuve d'une intégration réussie (minimum niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ;

-     absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

9.             Les preuves relatives au séjour dans le canton de Genève sont réparties dans deux catégories distinctes, selon leur force probante. Les preuves de catégorie A correspondent aux documents qui suffisent à eux seuls à démontrer le séjour de la personne concernée durant l'année correspondante. La catégorie A correspond notamment aux documents suivants : extrait AVS, preuve de cotisations LPP, attestation de l'administration fiscale, fiches de salaires, contrat de travail, de bail, copie de demandes auprès de tribunaux, preuves de versements d'allocations familiales, attestation de scolarité à Genève, documents scolaires genevois, attestation de suivi d'un cours de langue à Genève, preuves de paiement des primes assurances maladie ou accident, police d'assurance, abonnement TPG nominatif, extraits de comptes bancaires ou postaux, factures nominatives de médecin, de téléphone, des SIG.

Les preuves de catégories B correspondent aux documents dont la force probante est considérée comme moins grande (abonnement de fitness, témoignages « engageants », soit notamment d’enseignants, d’association dont le requérant est membre, d’anciens employeurs, de médecins, documents ou attestations de différentes démarches, y compris le fait d'avoir un passeport établi ou renouvelé par une représentation diplomatique du pays d'origine). Dans cette catégorie, chaque année de séjour doit être attestée par trois à cinq documents distincts.

10.         Le Conseil fédéral a précisé que, dans le cadre du projet pilote « Papyrus », le SEM avait procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes. Il ne s'agissait pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voyait pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjournait et travaillait illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation était constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a ; ATA/1234/2019 du 13 août 2019 consid. 6 ; ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

11.         L'opération « Papyrus » a pris fin le 31 décembre 2018, « date limite pour le dépôt des dossiers de régularisation dans le cadre du projet » (communiqué de presse du DSES et département de la cohésion sociale du 4 mars 2019, https://www.ge.ch/document/point-situation-intermediaire-relatif-cloture-du-projet-papyrus, consulté le 31 mai 2021).

12.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

13.         L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, précise cette disposition et prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité, l'autorité devant, lors de leur appréciation, tenir compte de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière, ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. .1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3986 2015 ; F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

La jurisprudence développée au sujet des cas de rigueur selon le droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 (art. 13f de l'ancienne ordonnance limitant le nombre des étrangers du 6 octobre 1986 - aOLE - RS 142.20) est toujours d'actualité pour les cas d'extrême gravité qui leur ont succédé (ATF 136 I 254 consid. 5.3.1 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017).

14.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et ancien art. 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 128 II 200 consid. 4 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/92/2020 du 28 janvier 2020 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017).

15.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 6f ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A_718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral ATAF C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ; C_5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; C_6726/2013 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; C_6628/2007 du 23 juillet 2009 consid. 5.2 ; ATA/92/2020 précité consid. 4e).

16.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATAF C-1478/2015 du 15 septembre 2015 consid. 4.4 ; C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3 ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 4 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/465/2017 du 25  avril 2017).

17.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; 2A.166/2001 du 21 juin 2001 consid. 2b/bb ; ATAF 2007/45 consid. 4.4 et 6.3 ; C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017). La durée du séjour (légal ou non) est, ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée (ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 précité ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le Tribunal fédéral a considéré que l'on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les années passées sur le territoire suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance (arrêt 2C_926/2010 du 21 juillet 2011 ; ATA/1538/2017 précité).

18.         S'agissant de l'intégration professionnelle, elle doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A_543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées).

19.         L'intégration socio-culturelle n'est en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. ATAF C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 et C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (ATAF C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

De plus, il est parfaitement normal qu'une personne ayant effectué un séjour prolongé en Suisse s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Le fait qu'un ressortissant se soit toujours comporté de manière correcte, qu'il ait créé des liens non négligeables avec son milieu et qu'il dispose de bonnes connaissances de la langue nationale parlée au lieu de son domicile ne suffit ainsi pas pour qualifier son intégration socio-culturelle de remarquable (cf. not arrêts du Tribunal administratif fédéral C-7467/2014 di 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ;
C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

20.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration (art. 96 al. 1 LEI). L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties.

21.         En l'espèce, au vu de l'examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal constate que le recourant ne satisfait pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur ni à celles exigées pour une demande de régularisation dans le cadre de l'opération Papyrus.

Il ressort de ses propres déclarations, ainsi que des pièces produites, qu’il est arrivé au plus tôt en Suisse en 2014, et la continuité de son séjour depuis cette date n’a non plus été établie à satisfaction. Ainsi, les documents produits ne permettent pas de retenir que le recourant avait son domicile à Genève durant la période examinée, de dix ans minimum.

Partant, il ne peut pas se prévaloir d’un séjour continu de dix ans en Suisse, tel qu’exigé dans le cadre de l’opération « Papyrus ». Par ailleurs, la durée globale de son séjour doit être fortement relativisée, dès lors qu’il a d’abord été effectué illégalement, puis à la faveur d’une tolérance des autorités cantonales, à la suite du dépôt de sa demande d’autorisation de séjour en octobre 2018. Dans ces circonstances, on ne saurait accorder un poids déterminant aux années qu'il a passées en Suisse, ce d'autant plus que le recourant a vécu toute son enfance et son adolescence, périodes essentielles pour la formation de la personnalité, et partant pour l'intégration sociale et culturelle, ainsi que le début de sa vie d'adulte au Kosovo.

Pour le surplus, s'agissant de son intégration en Suisse, à teneur des éléments du dossier, le tribunal relève que le recourant indique avoir acquis, sans les documenter, les compétences linguistiques requises pour s'établir en Suisse. Il sera relevé qu'il n'a pas de dettes, pas d'infraction inscrite à son casier judiciaire, et qu'il n'a pas bénéficié d'une quelconque aide financière de l'Hospice général.

S'agissant de son intégration professionnelle, force est de constater qu'elle ne revêt pas un caractère exceptionnel. En effet, le recourant indique travailler à ce jour en tant qu’aide-jardinier. En particulier, il n'établit pas avoir acquis pendant son séjour des connaissances et qualifications professionnelles particulières, qu'il ne pourrait mettre à profit en retournant au Kosovo, au contraire. Ces éléments ne permettent pas de retenir que son intégration socio-professionnelle pourrait être qualifiée d'exceptionnelle et partant, qu'il y aurait lieu d'outrepasser la condition du séjour continu de dix ans, condition nécessaire à l'octroi d'une autorisation de séjour.

En outre, le recourant étant actuellement âgé de 36 ans, il ne peut être retenu qu’il ne pourrait pas s'insérer sur le marché du travail en retournant dans son pays. Au contraire, il y a passé une grande partie de sa vie, notamment son enfance, son adolescence - périodes importantes pour la formation de la personnalité, - ainsi que le début de sa vie d'adulte, et il devrait être à même de s'y réintégrer, après, vraisemblablement une période de réadaptation. Du reste, le recourant, bien qu’il indique n'avoir aucune attache au Kosovo, a transmis plusieurs demandes de visa à l'OCPM pour pouvoir y retourner pendant un ou deux mois, ce qui dénote un certain attachement. Il précisait dans certaines demandes retourner au Kosovo pour voir « sa famille » et « sa femme et ses enfants ».

Quoi qu'il en soit, aucun élément du dossier n'atteste que les difficultés auxquelles il devrait faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontrent d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse. De plus, aucun élément ne permet de dire qu'une décision négative prise à son encontre comporterait de graves conséquences et entraînerait un véritable déracinement par rapport à la Suisse.

Au vu de ce qui précède, le tribunal constate que la décision querellée respecte le droit et que l'OCPM n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que l'intéressé ne remplissait pas les conditions d'octroi d'une autorisation de séjour.

22.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/709/2016 du 23 août 2016 consid. 8a et ATA/228/2018 du 2 mars 2015 consid. 8).

23.         Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). Il n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Il n'est pas licite lorsqu'il serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Il n'est pas raisonnablement exigible s'il met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

24.         En l'occurrence, dès lors qu'il a refusé de délivrer une autorisation de séjour au recourant, l'OCPM devait en soi ordonner son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI. Enfin, le recourant n'allègue pas, et il ne ressort pas du dossier, que son renvoi serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible au sens de l'art. 83 LEI.

25.         Le recours, mal fondé, doit donc être rejeté.

26.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

27.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2021 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 16 décembre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière