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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1442/2020

JTAPI/274/2021 du 18.03.2021 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;PROTECTION DE LA FORÊT;DISTANCE À LA FORÊT;VOISIN;ESTHÉTIQUE;AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);POUVOIR D'APPRÉCIATION;LOI CANTONALE SUR LA PROTECTION DES EAUX;PROTECTION DES EAUX;ZONE DE PROTECTION DES EAUX
Normes : LForêts.11.al2.letc; LEaux-GE.15.al3; LEaux.36.ala; OEaux.41c; LCI.15
Parties : GINNASI Alessandro, DE LA GRANDVILLE-GINNASI Diane, CARRARA Yann, CHAUVIN CARRARA Pauline, KUFFER Olivier, ONOFRI Stéphanie, DESLAGE-BERTHET Mathieu, DESLAGE-BERTHET Sophie, HOLZER Nicolas, HOLZER Chloé, EHRICH Verena, OEGGERLI Henri, MAFFIOLI OEGGERLI Alessandra, MICHAUD Boris, MICHAUD Delphine, THOINET Olivier, BIHR Karen / ATTI Aurore, ATTI Michael, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, S.I.M. CONCEPT SA
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1442/2020 LCI

JTAPI/274/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 18 mars 2021

 

dans la cause

 

 

Madame Karen BIHR, Monsieur Olivier THOINET, Madame Diane DE LA GRANDVILLE-GINNASI, Monsieur Alessandro GINNASI, Madame Pauline CHAUVIN CARRARA, Monsieur Yann CARRARA, Madame Stéphanie ONOFRI, Monsieur Olivier KUFFER, Madame et Monsieur Sophie et Mathieu DESLAGE-BERTHET, Madame et Monsieur Chloé et Nicolas HOLZER, Madame Verena EHRICH, Madame Alessandra MAFFIOLI OEGGERLI, Monsieur Henri OEGGERLI et Madame et Monsieur Delphine et Boris MICHAUD, représentés par Me Andreas FABJAN, avocat, avec élection de domicile

contre

 

Madame et Monsieur Aurore et Michael ATTI, représentés par Me Yannick FERNANDEZ, avocat, avec élection de domicile

S.I.M. CONCEPT SA, représentée par Me Diane SCHASCA et Me Mathias BUHLER, avocats, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             Madame et Monsieur Barbara et Daniel ATTI sont copropriétaires de la parcelle n° 2'849 de la commune de Lancy, à l'adresse 11, chemin des Croizonniers. Cette parcelle est sise en partie en zone 5, en zone bois et forêts et en zone ferroviaire. Elle se situe par ailleurs au bord de la rivière de la Drize.

Les époux ATTI sont également copropriétaires de la parcelle n° 1'484 de la commune de Lancy.

2.             Le 31 janvier 2019, S.I.M Concept SA (ci-après : SIM Concept) a requis l'autorisation de construire un habitat groupé de six logements (34% HPE), un parking souterrain et l'abattage d'arbres sur la parcelle n° 2849 susmentionnée (DD 112'306).

3.             Lors de l'instruction de cette requête, les préavis suivants ont notamment été rendus :

-          les 18 février et 8 juillet 2019, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a émis des préavis demandant de modifier le projet et réservant les demandes de dérogation selon les art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et 26 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30) ;

-          le 5 mars 2019, la commission d'architecture (ci-après : CA) a demandé la modification du projet. Elle validait l'implantation et le volume du projet sur cette parcelle très contraignante. Cela étant, elle demandait de multiplier ou d'agrandir les ouvertures en façade du côté nord/est, ceci pour bénéficier de dégagements plus conséquents sur le cordon boisé. La typologie de l'appartement B situé au rez-de-chaussée devait être modifiée, les espaces de jour orientés sur la terrasse du côté de l'accès public n'étaient pas suffisamment privatifs. La demande de dérogation selon l'art. 59 al. 4 LCI (34% HPE) était en suspens ;

-          le 8 mars 2019, la commission consultative de la diversité biologique (ci-après: CCDB) a émis un préavis favorable à la dérogation selon l'art. 11 al. 2 let. c de la loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10), sous conditions de la constitution d'une prairie arbustive ou fleurie, de 5 m, pour obtenir une lisière étagée ;

-          le 13 mars 2019, l'Office cantonal des transports (ci-après : OCT) a demandé des pièces complémentaires et un projet à modifier, la localisation de la place visiteur devant être à l'extérieur et facilement accessible. Les places pour vélos devaient être facilement accessibles et abritées. Un tiers de l'offre de stationnement devait être situé au rez-de-chaussée ou à proximité immédiate des allées d'immeubles pour répondre à un usage quotidien ;

-          le 18 mars 2019, l'office de l'urbanisme (ci-après : SPI) a demandé que « le dossier soit complété d'un argumentaire clair justifiant en quoi les circonstances du projet justifient la majoration de densité demandée » en application de l'art. 59 al. 4 LCI ;

-          le 21 mars 2019, l'Office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a rendu un préavis favorable à une dérogation au sens de l'art. 11 al. 2 let. c LForêts, sous conditions de créer une bande herbeuse en prairie extensive, de 5 m de large, le long de la lisière forestière, de respecter les conditions mises au préavis liant concernant le dossier d'abattage pour les arbres hors forêt, en relation au présent dossier et de protéger, lors des travaux, le domaine vital des arbres hors forêt conservés, sis à proximité du chantier. Par ailleurs l'OCAN faisait remarquer qu'il publierait dans la Feuille d'avis officielle (ci-après: FAO) le relevé de la lisière n° 2014-23r/08 en constatation de nature forestière ;

-          le 22 mars 2019, l'OCAN a émis un préavis liant pour les arbres hors forêts, avec souhaits et sous conditions notamment de replanter des arbres pour un montant d'au moins CHF 39'500.- ;

-          le 23 mars 2019, la commune de Lancy a demandé un complément concernant la gestion des déchets et la servitude de passage à pied ;

-          les 25 mars et 27 juin 2019, l'Office cantonal de l'Eau (ci-après : OCEau) a demandé des pièces complémentaires ;

-          le 24 juillet 2019, l'OCT a émis un préavis favorable, sans observation ;

-          le 25 juillet 2019, le SPI a émis un préavis favorable, sans observation ;

-          le 6 août 2019, la CA a demandé de modifier le projet, préconisant de déplacer le monte-véhicules au nord-est de la parcelle ;

-          le 16 août 2019, la commune de Lancy a é mis un préavis favorable, sous condition ;

-          les 22 novembre et 9 décembre 2019, la DAC a demandé des modifications du projet en lien avec les art. 72, 73 et 109 LCI. S'agissant du calcul du rapport des surfaces, elle a calculé un taux de 27.5% HPE suite à un report de droit à bâtir de 430 m2 de la parcelle n° 1'484 à la parcelle n° 2'849 ;

-          le 3 décembre 2019, la CA a émis un préavis favorable, sous conditions de soumettre les teintes et les matériaux pour approbation avant la commande ;

-          le 23 janvier 2020, l'OCEau a demandé des pièces complémentaires en lien avec l'évacuation des eaux pluviales dans le milieu naturel récepteur et relevé que le bassin de rétention de remplacement était en partie situé dans la surface inconstructible au sens de l'art. 15 al. 1 de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (LEaux-GE - L 2 05), et dans l'espace réservé aux eaux au sens de l'art. 36a de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux - RS 814.20) ;

-          le 28 janvier 2020, la DAC a émis un préavis favorable à la construction d'un habitat groupé de 27.5% HPE et à la dérogation selon l'art. 26 LaLAT, sous conditions ;

-          le 28 janvier 2020, l'OCEau a émis un préavis favorable sous conditions et avec dérogations selon les art. 15 al. 3 let. b LEaux et 41c al. 1 let. c OEaux.

4.             Par décision du 8 avril 2020, publiée dans FAO le même jour, le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a délivré l'autorisation de construire globale sollicitée et accordé les dérogations aux art. 59 al. 10 LCI, 15 al. 3 let. b LEaux-GE, 41c al. 1 let. c OEaux et 11 al. 2 let. c LForêts.

5.             Par acte du 19 mai 2020, complété le 9 juin 2020, Madame Karen BIHR, Monsieur Alessandro GINNASI, Madame Diane DE LA GRANDVILLE-GINNASI, Monsieur Yann CARRARA, Madame Pauline CHAUVIN CARRARA, Monsieur Olivier KUFFER, Madame Stéphanie ONOFRI, Monsieur Mathieu DESLAGE-BERTHET, Madame Sophie DESLAGE-BERTHET, Monsieur Nicolas HOLZER, Madame Chloé HOLZER, Madame Verena EHRICH, Monsieur Henri OEGGERLI, Madame Alessandra MAFFIOLI OEGGERLI, Monsieur Boris MICHAUD, Madame Delphine MICHAUD, Monsieur Olivier THOINET ont formé recours, sous la plume de leur conseil, auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Le site faisant l'objet de la requête en autorisation de construire présentait des caractéristiques extraordinaires liées à la fois à la présence d'un cours d'eau, de la forêt environnante et d'un domaine classé présentant un intérêt patrimonial exceptionnel. Le projet de construction avait exigé pas moins de trois dérogations aux normes juridiques applicables, qui avaient été délivrées sans aucune motivation et violation des conditions légales. En outre, une dérogation relative à l'indice d'utilisation du sol (ci-après : IUS) avait été artificiellement contournée, suite au report des droits à bâtir d'une parcelle voisine et le préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) n'avait pas été requis.

La décision querellée avait été délivrée en dérogation de l'art. 11 al. 1 LForêts mais les conditions prévues à l'al. 2 let. c de cette loi n'étaient pas réunies. Il n'existait en effet aucun plan d'affectation du sol ni aucune plan d'alignement. En outre, la nouvelle construction ne s'inscrivait pas dans un alignement de constructions existantes, dès lors qu'un tel alignement n'existait pas. L'autorisation prévoyait par ailleurs l'abattage d'un nombre important d'arbres de grandes valeurs, lequel portait une grave atteinte au site ainsi qu'à la conservation de la forêt présente au bord de la Drize. Les mesures compensatoires imposées par l'OCAN n'étaient pas suffisantes.

L'autorisation dérogatoire ne respectait pas les dispositions de la LEaux du fait que le bassin de rétention ne constituait à l'évidence pas une construction ou une installation en relation avec le cours d'eau.

Le préavis de la CMNS était obligatoire, alors qu'il ressortait du dossier d'autorisation que cette instance n'avait pas été consultée et n'avait donc pas préavisé cette demande.

Enfin, le projet, en contradiction fondamentale avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, violait l'art. 15 LCI.

6.             Dans leurs observations du 27 juillet 2020, les époux ATTI, sous la plume de leur conseil, ont conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

La CCBD s'était prononcée en faveur du projet et de la dérogation selon l'art. 11 al. 2 let. c LForêts et l'emprise du projet était située intégralement sur la partie bâtissable de la parcelle des intimés s'inscrivait, bien qu'en retrait pour respecter les zones inconstructibles, dans un alignement de constructions existantes.

L'emprise du projet était située intégralement en dehors des périmètres d'inconstructibilité en rapport avec la lisière de la forêt présente sur la parcelle et le cours d'eau à proximité, à l'exception du remplacement d'un bassin de rétention. L'OCEau, aux termes d'un examen minutieux, s'était prononcé en faveur du projet et de la dérogation selon les art. 15 al. 3 let. b LEaux-GE et 41c al. 1 let. c OEaux.

Enfin, l'instruction de la requête en autorisation de construire avait permis de recueillir le préavis favorable de la CA aux termes d'un triple examen du projet et après diverses modifications du projet. Le secteur se prêtait par ailleurs parfaitement à la réalisation d'habitats groupés, divers projets de ce type avaient ainsi été autorisés ces dernières années à proximité immédiate de la parcelle n° 2'849 ou étaient en cours d'instruction. L'autorité intimée n'avait ainsi commis aucun abus de son pouvoir d'appréciation.

7.             Dans ses observations du même jour, SIM Concept, sous la plume de ses conseils, a conclu principalement au rejet du recours; préalablement qu'il soit ordonné à la CMNS de se prononcer sur la dérogation prévue par l'art. 11 al. 2 let. c LForêts par un préavis en bonne et due forme, ainsi que sur celle prévue par l'art. 15 al. 3 let. b LEaux-GE ; le tout sous suite de frais et dépens.

La dérogation à l'art. 11 al. 2 let. c LForêts, bien que non-nécessaire (le nouveau tracé étant non entré en force), avait été pourtant été examinée par l'OCAN et la CCDB qui avaient estimé, de manière concordante, que les conditions auxquelles était soumise la potentielle dérogation étaient réalisées. Le projet était, en effet, notamment aligné avec le bâtiment qui lui était le plus proche, soit celui sis sur la parcelle n° 1'485. Il était demandé à cet égard au tribunal de céans de requérir le préavis manquant auprès de la CMNS.

Il était demandé de même s'agissant de la dérogation à l'art. 15 LEaux-GE. Par ailleurs, contrairement à ce que les recourants soutenaient, le bassin de rétention avait justement pour fonction de réguler le déversement des eaux pluviales dans la Drize, de manière à éviter que celle-ci ne s'assèche ou n'entre en crue. Ce bassin avait été légèrement déplacé, conformément à la demande formulée par l'OCEau, ce qui n'impactait en rien ses fonctions écologiques du cour d'eau et de ses rives, ni la sécurité de personnes ou de biens.

Enfin, la succession des trois préavis de la CA et de leur contenu démontraient l'attention particulière qu'avait portée cette commission au projet querellé. Les critiques des recourants s'inscrivaient en contradiction des préavis favorables émis par les instances spécialisées et apparaissaient spécieux et erronés. La volumétrie du bâtiment n'apparaissait pas critiquable et le projet s'insérait parfaitement dans son environnement et dialoguait harmonieusement avec le bâti environnant.

8.             En date du 4 août 2020, la CMNS a rendu un préavis, demandant des modifications du projet et réservant ainsi la demande de dérogations selon les art. 15 LEaux-GE et 11 LForêts. « Suite à l'analyse minutieuse du dossier, à sa mise en relation avec d'autres réalisations équivalentes et toujours en insistant sur la pratique de la CMNS dérogeant uniquement dans des cas exceptionnels où le projet ne pouvait pas se réaliser autrement et que la dérogation offre une plus-value indispensable pour une construction de qualité dans la frange avec l'espace naturel protégé », la commission demande pour cette requête :

-          d'exclure toutes nouvelles interventions au sein des 10 m de distance à la lisière forestière ;

-          de préserver la majorité des arbres existants sur la parcelle si leur espace vital n'est pas impacté par la nouvelle construction ;

-          et de réduire le programme entre les 10 m et les 20 de distance à la lisière forestière. « En effet, cet espace pour lequel une dérogation est envisageable au sens de la loi ne peut pas supporter une emprise si importante du projet qui va jusqu'à proposer un mur courbe sur la limite. »

9.             Le 11 août 2020, l'OCAN a publié dans la FAO sa décision en constatation de la nature forestière (n° 2019-38c).

10.         Dans ses observations du 21 août 2020, le DT s'en est rapporté à justice sur la recevabilité du recours et a conclu à son rejet.

Hormis la qualité pour recourir des époux GINNASI, cette qualité était questionnable pour ce qui concernait les autres recourants, ceux-ci ne faisant valoir aucun intérêt pratique à la modification ou à l'annulation de la décision en cause.

La construction autorisée s'inscrivait dans l'alignement de constructions existantes et plus particulièrement dans l'alignement des chemins J.-B. David et des Croizonniers. Par ailleurs, l'autorité chargée de constater la nature forestière d'une zone arborée ainsi que sa lisière était l'OCAN qui avait examiné le dossier et qui s'était prononcé favorablement à la dérogation prévue à l'art. 11 sal. 2 let. c LForêts. Renseignements pris auprès de cette dernière, il avait bien été tenu compte de la procédure actuellement en cours de constatation de la nature forestière sur cette parcelle. Par ailleurs, l'OCAN avait dans l'intervalle publié dans la FAO, soit le 11 août 2020, sa décision en constatation de la nature forestière. Il était en outre précisé dans la publication que cette décision était liée à la DD 112'306. Les arbres dont l'abattage était autorisé étaient situés hors de la zone bois et forêts, de sorte que c'était les dispositions du règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 (RCVA - L 4 05.04) qui s'appliquaient. Les recourants n'avaient pas démontré que les arbres à abattre seraient de grande valeur. Partant, l'octroi à la dérogation au sens de l'art. 11 al. 2 let. c LForêts était parfaitement justifié.

L'application de la dérogation à l'art. 15 al. 3 LEaux-GE s'agissant du déplacement du bassin 1 dans la surface inconstructible était justifiée.

Le grief relatif à l'absence de préavis de la CMNS devait être écarté puisque celui-ci avait été obtenu en date du 4 août 2020. L'OCT avait demandé, le 13 mars 2019 qu'une place de parking visiteur soit déplacée à l'extérieur du bâtiment et qu'elle soit facilement accessible. Or, renseignements pris auprès de cette instance, elle acceptait de revenir sur sa demande de modification et consentait à ce que la place de parking visiteur reste au sous-sol, comme prévu initialement. S'agissant enfin de la demande de la CMNS de réduire le programme entre les 10 m et les 20 m de distance à la lisière forestière, celle-ci ne faisait en définitive que concrétiser son opposition de principe à toute construction sise dans la zone dérogatoire.

La CA et la commune avaient préavis favorablement le projet, validant ainsi ses aspects esthétiques et sa cohérence avec le quartier, de sorte que le grief relatif à l'art. 15 LCI était également infondé.

11.         Dans des écritures spontanées du 9 septembre 2020, SIM Concept a exposé que la teneur du nouveau préavis rendu par la CMNS faisait apparaître que la place visiteur prévue dans le projet, et déplacée selon la volonté de l'OCT, se trouvait à moins de 10 m de la lisière de la forêt, dont le tracé venait tout juste d'être modifié. En conséquence, l'intimée modifiait son projet, en ce sens que la place de parking était déplacée en sous-sol. Les plans figurant cette modification étaient joints à la présente et notait à cet égard l'accord de principe de l'OCT. Néanmoins, afin d'éviter toutes critiques sur ce point, elle requérait respectueusement du tribunal de transmettre ces nouveaux plans à l'OCT, afin que celle-ci se prononce par un préavis en bonne et due forme.

12.         Dans sa réplique du 16 octobre 2020, les recourants ont contesté l'existence d'un alignement au sens de l'art. 11 al. 2 let. c LForêts. La modification demandée par la CMNS dans son préavis du 4 août 2020 s'agissant de l'exclusion de toute intervention au sein de 10 m de distance forestière devait être considérée comme essentielle puisqu'elle avait précisément fait l'objet d'un préavis de l'OCT sollicitant l'exact opposé lorsqu'il a requis que la place de parking soit déplacée à l'extérieur de bâtiment pour des raisons d'accessibilité. Le revirement de l'OCT évoqué par le DT était surprenant et semblait se fonder sur des considérations étrangères à celle que cet office était censé prendre en considération en lien avec l'examen des projets de construction et l'établissement des préavis puisque le déplacement de la place de stationnement était admis uniquement parce que la surface sur laquelle elle était prévue n'était pas constructible. Par conséquent, le DT aurait dû dans tous les cas requérir de l'OCT qu'il rende un nouveau préavis relatif au sort de la place de parking initialement prévue en zone inconstructible, lequel devrait exiger qu'une autre solution soit trouvée qui permette de régler le problème d'accessibilité constaté.

Il convenait par ailleurs de constater que si le préavis de la CMNS avait été requis à temps, le DT aurait sollicité que le projet soit modifié et n'aurait en aucun cas délivré l'autorisation de construire contestée. Il ne saurait aujourd'hui simplement ignorer ce préavis en l'écartant purement et simplement aux fins de maintenir l'autorisation de construire délivrée à tort. Enfin, le préavis de la CMNS confirmait que le projet, par ses dimensions, sa situation et son aspect extérieur, nuirait au caractère du quartier.

13.         Les parties intimées ont dupliqué en date du 9 octobre 2020. S'agissant des époux ATTI, ils ont notamment demandé au tribunal, par économie de procédure, soit de demander à l'OCT de rendre un préavis en bonne et due forme et de conditionner l'autorisation de construire, soit de viser ne varietur les plans modifiés produits par la requérante, soit encore d'amender l'autorisation de construire, en ajoutant dans le dispositif du jugement la condition : « La place visiteur située en surface sera déplacée en sous-sol ».

14.         Par pli du 6 novembre 2020, le tribunal a transmis à l'OCT les nouveaux plans produits au dossier par la requérante, faisant suite au préavis rendu par la CMNS le 4 août 2020. Il lui était demandé de lui transmettre un nouveau préavis sur ces plans. Si l'OCT devait rendre un préavis favorable, il lui était demandé d'indiquer pour quelle raison cette solution ne posait plus de problème et cas échéant, de proposer une autre solution.

15.         Le 18 novembre 2020, l'OCT a rendu un préavis favorable portant sur ces nouveaux plans, sous conditions d'échanger la place visiteur avec la place habitant située à droite de la cage d'escalier afin de rendre la place pour les visiteurs plus visible et facile d'accès, laquelle pourrait aussi servir pour la manoeuvre en sortie en marche avant pour le véhicule habitant relocalisé en parallèle avec le monte-charge ; et d'équiper l'entrée au parking/monte-charge d'un interphone pour permettre et faciliter l'accès aux visiteurs.

Dans son courrier d'accompagnement, daté du 26 novembre 2020, l'OCT a précisé que l'exigence qu'elle avait posée dans son précédent préavis de disposer la place de stationnement dédiée aux visiteurs à l'extérieur reposait sur les « bonnes pratiques pour le bon usage et le confort des usagers » et qu'il n'y avait pas d'exigence normative en la matière. Il ne voyait pas d'inconvénient à ce que la place de stationnement dédiée aux visiteurs soit dorénavant prévue dans le parking en sous-sol, sous réserve de la norme VSS 640 291a.

16.         Invités à se déterminer sur ce préavis, les parties ont en substance persisté dans leurs conclusions. Dans sa détermination du 8 décembre 2020, SIM Concept s'est notamment engagée à respecter les deux conditions posées par le préavis de l'OCT.

17.         Pour le surplus, les écritures des parties et les pièces qu'ils ont produites seront reprises en tant que besoin dans la partie en droit.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l'espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité du recours suppose encore que leurs auteurs disposent de la qualité pour recourir.

4.             À teneur de l'art. 60 al. 1 let. b LPA, toute personne qui est touchée directement par une décision, et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, est titulaire de la qualité pour recourir.

5.             L'intérêt digne de protection implique que le recourant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, répondant ainsi à l'exigence d'être particulièrement atteint par la décision. L'intérêt invoqué, qui peut être un intérêt de fait, doit se trouver dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération avec l'objet de la contestation. Ces exigences ont été posées de manière à empêcher l'action populaire (ATF 137 II 40 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_56/2015 consid. 3.1 ; 1C_152/2012 consid. 2.1).

En ce qui concerne les voisins, la jurisprudence a indiqué que seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 ; 133 II 409 consid. 1). La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse ou se trouvant à proximité immédiate de celle-ci (ATF 121 II 171 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; 1C_125/2009 du 24 juillet 2009 consid. 1).

6.             En l'espèce, les recourants sont tous propriétaires de parcelles voisines ou à proximité immédiate de la parcelle litigieuse. Ils font par ailleurs valoir des griefs liés au droit de la construction. Ils font par ailleurs valoir des griefs tirés du droit des constructions qui, s'ils sont admis, peuvent avoir une influence sur leur situation concrète.

Partant, ils ont la qualité pour recourir.

7.             Dans un premier grief, les recourants font valoir que l'autorisation de construire querellée viole l'art. 11 al. 2 let. c LForêts du fait que la dérogation octroyée ne respecterait pas les conditions légales. Il n'existerait aucun plan d'affectation du sol ni aucun plan d'alignement et la nouvelle construction ne s'inscrirait pas dans un alignement de constructions existantes. Par ailleurs, l'abattage important d'arbres prévu par l'autorisation porterait une grave atteinte au site ainsi qu'à la conservation de la forêt présente au bord de la Drize.

8.             Selon l'art. 17 al. 1 de la loi fédérale sur les forêts du 4 octobre 1991 (LFo - RS 921.0), les constructions et installations à proximité de la forêt peuvent être autorisées uniquement si elles n'en compromettent ni la conservation, ni le traitement, ni l'exploitation. Les cantons fixent la distance minimale appropriée qui doit séparer les constructions et les installations de la lisière de la forêt. Cette distance est déterminée compte tenu de la situation et de la hauteur prévisible du peuplement (ATA/558/2013 du 27 août 2013 et les références citées).

9.             L'art. 11 al. 1 LForêts prévoit que l'implantation de constructions à moins de 20 m de la lisière de la forêt est interdite.

Selon l'art. 11 al. 2 LForêts, le département peut accorder des dérogations pour des constructions respectant l'alignement fixé par un plan d'affectation du sol, un plan d'alignement, ou s'inscrivant dans un alignement de constructions existantes, pour autant que la construction nouvelle soit réalisée sur un terrain en zone à bâtir et située à 10 m au moins de la lisière de la forêt et qu'elle ne porte pas atteinte à la valeur biologique de la lisière (let. c).

Sauf pour les procédures instruites en procédure accélérée, le département compétent en matière de forêts, la commune, la CMNS et la CCDB doivent être préalablement consultés (art. 11 al. 3 LForêts).

L'octroi de dérogations est subordonné aux intérêts de la conservation de la forêt et de sa gestion, au bien-être des habitants, ainsi qu'à la sécurité de ces derniers et des installations ; ces dérogations peuvent être assorties de conditions relatives à l'entretien de la lisière et de compensations, au sens des articles 8 et 9 de la loi (art. 11 al. 5 LForêts).

10.         En ce qui concerne la condition de l'alignement, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de confirmer qu'un chemin d'accès ainsi qu'une maison vouée à la démolition pouvaient être pris en compte pour tracer l'alignement existant au sens de l'art. 11 al. 2 let. c LForêts (arrêt du Tribunal fédéral 1C_18/2018, du 20 novembre 2018, consid. 2.3). Un plan d'alignement n'est pas obligatoire, respectivement n'a pas à être établi, puisque l'art. 11 al. 2 let. c LForêts ne le prévoit pas. La chambre administrative de la cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a relevé, dans un arrêt du 30 novembre 2010 (ATA/843/2010), que « la notion d'alignement ne doit pas être comprise comme une référence à une ligne droite. Il s'agit plutôt de déterminer si le projet s'inscrit à l'intérieur d'un périmètre déjà construit, dont le tracé de la bordure, par rapport à la forêt, ne doit pas faire apparaître la future construction comme une excroissance ».

11.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3b ; ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4b).

Lorsque la loi autorise l'autorité administrative à déroger à l'une de ses dispositions, notamment en ce qui concerne les constructions admises dans une zone, elle confère à cette autorité un pouvoir d'appréciation qui n'est limité que par l'excès ou l'abus, le tribunal n'ayant pas compétence pour apprécier l'opportunité des décisions prises (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11b ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 4b ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 consid. 7b).

De façon générale, l'autorité administrative jouit en effet d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations, lesquelles ne peuvent toutefois être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité, se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs (ATA/246/2016 du 15 mars 2016 consid. 6b ; ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 5b ; ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 6).

Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. Leur intervention n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Elles sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, si elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore si elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/318/2017 du 21 mars 2017 consid. 6d ; ATA/246/2016 du 15 mars 2016 consid. 6b ; ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 5b).

12.         En l'espèce, la lisière de la forêt a été déterminée par un plan, aujourd'hui définitif et exécutoire. Ainsi, seul ce plan et la décision de constatation de la nature forestière y relative (n° 2019-38c) font foi pour déterminer la limite de la forêt. Il ressort par ailleurs du dossier que l'emprise du projet est située intégralement sur la partie bâtissable de la parcelle et s'inscrit, contrairement à l'appréciation des recourants, dans un alignement de constructions existantes, plus particulièrement partant de l'extrémité Nord-Est du chemin J.B David situé à la droite du bâtiment sis sur la parcelle n° 1'485, vers l'extrémité Nord-Est du chemin des Croizonniers, bien qu'en retrait pour respecter les zones inconstructibles. De plus, l'exigence d'alignement doit manifestement être relativisée, lorsque, comme en l'espèce, la lisière concernée ne concerne qu'un petit tronçon de la limite de propriété (cf. ATA/123/2018 du 6 février 2018 consid. 3c). S'agissant ainsi de la question de l'alignement, le raisonnement suivi par les autorités ayant préavisé favorablement l'octroi de la dérogation à la loi sur la forêt doit ainsi être confirmé.

13.         Dans le cadre de l'instruction de la demande définitive, tant la CCBD que l'OCAN, instances spécialisées en matière de diversité biologie et de protection de la végétation, se sont déclarées en faveur de la dérogation à l'art. 11 al. 2 let. c LForêts. Enfin, dans le cadre de la présente procédure, la CMNS a rendu un préavis, le conditionnant notamment au respect de la limite inconstructible des 10 m depuis la lisière de la forêt. Cette demande a été respectée par le déplacement de la place de parking visiteur en sous-sol comme cela ressort des nouveaux plans produit par l'intimée dans le cadre de la procédure, lequel a été préavisé favorablement par l'OCT le 18 novembre 2020.

A cet égard, il n'est pas contesté que le projet de construction querellé a subi une modification en cours de procédure. Dans la mesure où ladite modification n'est pas essentielle, au point, par exemple, d'impliquer un changement de régime juridique, il faut admettre que le tribunal peut réparer ce manquement dans le cadre de la présente procédure en sollicitant la production d'un préavis complété de la part de l'OCT, puis en donnant aux parties la possibilité de s'exprimer au sujet de celui-ci, étant observé, pour le surplus, que, ce faisant, il ne prive pas les recourants du double degré de juridiction prévu par la loi (à ce sujet, arrêts 1C_387/2014 consid. 3.4 et 6.3.2; 1A.236/2000 du 6 août 2001 ; ATA/414/2017 du11 avril 2017 consid. 4a; ATA/1187/2015 du 3 novembre 2015 consid. 3a), ce qui ne semble au demeurant pas contesté par les recourants.

14.         S'agissant plus particulièrement du préavis précité de l'OCT du 18 novembre 2020, cet office a expliqué que sa demande précédente tendant à ce que les places de parking visiteur soient facilement accessibles et ainsi situées à l'extérieur reposait non sur des contraintes légales mais sur des « bonnes pratiques pour un usage le confort des usagers ». Le grief des recourants selon lequel des problèmes d'accessibilité demeureront, que l'utilisation de l'ascenseur se révèlera "extrêmement" malaisé et peu pratique au quotidien, entre dans le cadre de l'appréciation à laquelle celle du juge ne peut se substituer. Les recourants ne critiquent pas pour autant en tant que tel ce préavis et plus particulièrement, ne démontrent, ni même n'allèguent, que le déplacement de la place de parking serait non conforme aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements, et, partant, n'avancent pas le moindre argument propre à conduire le tribunal à s'écarter de l'avis des spécialistes consultés. Enfin, le fait que selon l'avis des recourants, les visiteurs de la construction projetée se gareront sur le chemin des Croizonniers excède le cadre du litige, étant souligné que la conformité d'un projet au droit de la construction n'est examinée par le tribunal que sur la base d'une utilisation conforme aux autres règles de droit. Quoi qu'il en soit, en tant que le parking sauvage est par définition prohibée, les recourants disposent de voies de droit permettant cas échéant d'y remédier (cf. JTAPI/197/2021 du 24 février 2021 consid. 28 ; JTAPI/1068/2019 du 2 décembre 2019 consid. 37 et la réf. citée).

15.         La CMNS requiert également la préservation de la majorité des arbres existants sur la parcelle si leur espace vital n'est pas impacté par la nouvelle construction. Ce point a été examiné par l'OCAN qui impose, au titre de condition, reprise dans l'autorisation de construire (ch. 5) de protéger, lors de travaux, le domaine vital, des arbres hors forêt conservés, ainsi que de replanter les arbres abattus pour compenser ceux qui vont être abattus. Ce point peut ainsi être considéré comme respecté. S'agissant du dernier point sollicité par le préavis de la CMNS, soit de « réduire le programme entre les 10 m et les 20 de distance à la lisière forestière. En effet, cet espace pour lequel une dérogation est envisageable au sens de la loi ne peut pas supporter une emprise si importante du projet qui va jusqu'à proposer un mur courbe sur la limite », tel n'est pas l'avis de l'OCAN et de la CCBD, qui pour sa part a demandé la réalisation d'une prairie arbustive ou fleurie de 5 m, pour obtenir une lisière étagée. Ces instances sont plus à même d'apprécier les conséquences écologiques et la lisère forestière du projet, qui ont toutes deux préavisé favorablement cette dérogation d'un point de vue environnemental. Le DT a relevé à cet égard qu'il s'agissait plutôt d'une opposition de principe de la part de la CMNS à toute construction sise en zone dérogatoire, comme elle le fait remarquer en tête de ses remarques. Le fait de suivre les préavis des instances spécialisées - concordantes - et en écartant le préavis de la CMNS sur ce point ne souffre d'aucune critique.

Enfin, les conditions imposées par l'OCAN, notamment en prévoyant des plantations compensatoires pour un montant de CHF 39'500.-, s'inscrivent dans la préservation des intérêts de la conservation de la forêt et de sa gestion au sens des art. 8 et 9 LForêts, étant encore relevé que tous les arbres dont l'abattage a été autorisé sont situés hors de la zone bois et forêts et qu'ils ne revêtent pas une valeur (historique, paysagère ou écologique) particulière (cf. à cet égard ATA/401/2006 du 26 juillet 2006 ; ATA/684/2002 du 12 novembre 2002). L'absence d'atteinte à la valeur biologique de la lisière a par ailleurs été examinée en tant que les instances de préavis ont soumis leur accord à la dérogation à la réalisation d'une prairie extensible dans la distance des 10 m entre la lisière forestière et la future construction.

Ce grief doit donc être rejeté.

16.         Les recourants reprochent ensuite une violation de l'art. 15 LEaux-GE.

17.         La LEaux-GE a notamment pour but d'assurer la protection des cours d'eau et favoriser leur amélioration (let. e) (art. 1 al. 1 LEaux-GE).

Les cours d'eau et leurs rives doivent être protégés afin de préserver et de rétablir leurs fonctions hydrauliques, biologiques et sociales (art. 10 LEaux-GE).

18.         Selon l'art. 15 LEaux-GE, intitulé « surfaces inconstructibles », aucune construction ou installation, tant en sous-sol qu'en élévation, ne peut être édifiée à une distance de moins de 10, 30 ou 50 m de la limite du cours d'eau, selon la carte des surfaces inconstructibles annexée (al. 1).

Toutefois, dans le cadre de projets de construction, le département peut accorder des dérogations, pour autant que celles-ci ne portent pas atteinte aux fonctions écologiques du cours d'eau et de ses rives ou à la sécurité des personnes et des biens, notamment pour des constructions ou installations d'intérêt général dont l'emplacement est imposé par leur destination (al. 3 let. a) ou pour des constructions ou installations en relation avec le cours d'eau (al. 3 let. b). Ces dérogations doivent être approuvées par le département et faire l'objet d'une consultation de la commune et de la CMNS (al. 4) ; elles peuvent être assorties de charges ou conditions (al. 5).

19.         Quant à l'art. 41c OEaux, il dispose que ne peuvent être construites dans l'espace réservé aux eaux que les installations dont l'implantation est imposée par leur destination et qui servent des intérêts publics, tels que les chemins pour piétons et de randonnée pédestre, les centrales en rivières et les ponts. Si aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose, les autorités peuvent en outre autoriser notamment les parties d'installations servant au prélèvement d'eau ou au déversement d'eau dont l'implantation est imposée par leur destination (let. c).

20.         En l'espèce, le projet querellé déplace légèrement l'emplacement du bassin de rétention 1 a pour accueillir la nouvelle construction, en partie situé dans la surface inconstructible au sens de 15 LEaux, et en partie dans l'espace réservé aux eaux au sens de l'art. 36a LEaux, comme cela ressort du préavis de l'OCEau du 28 janvier 2020, le milieu récepteur étant la Drize. Comme l'OCEau l'a relevé dans ce préavis (sous la rubrique "équipements publics d'assainissement"), il s'agit d'un bassin public d'assainissement destiné à recueillir les eaux pluviales de différentes parcelles et poursuit donc un intérêt général. Or, l'OCEau, dans le préavis susvisé, s'est prononcé favorablement à l'application de la dérogation à l'art. 15 al. 3 LEaux-GE, après avoir examiné le projet et demandé des compléments à pas moins de quatre reprises. L'OCEau a par ailleurs conditionné son préavis (rubrique COD ch. 10) à l'évacuation des eaux pluviales dans la Drize via l'exutoire existant. Par ailleurs, tant la CMNS que la commune ont été consultées.

21.         Dans la mesure où le département a suivi ce préavis positif et - obligatoire - et que les recourants n'apportent pas d'éléments permettant de le remettre en cause, l'autorité de recours doit observer une certaine retenue. Ils ne font nullement valoir que déplacement du bassin n° 1 en question porterait atteinte aux fonctions écologiques de la Drize ou à la sécurité des personnes et des biens.

Il sera encore relevé que les normes en question ne poursuivent que des buts d'intérêt public et que les recourants ne peuvent prétendre à titre personnel qu'ils tireraient du respect de ces normes un avantage plus important que n'importe qui. Partant, sous cet angle, on peut se demander si leurs griefs ne correspondraient pas à une action populaire et seraient dès lors irrecevables (cf. JTAPI/633/2019 du 2 juillet 2019 confirmé par ATA/1124/2020 du 10 novembre 2020).

22.         Il en découle que ce grief doit lui aussi être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

23.         Enfin, les recourants se prévalent d'une violation de l'art. 15 LCI en tant que le projet serait en « contradiction fondamentale » avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Plus particulièrement, la volumétrie du projet ne serait pas en adéquation avec le quartier ni avec les caractéristiques de la zone. Le bâtiment présenterait par ailleurs une forme tout à fait singulière en raison des multiples contraintes liées à la parcelle, et serait beaucoup plus dense et plus imposant que toutes les constructions environnantes.

24.         Aux termes de l'art. 15 LCI, le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur, nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). Il se fonde notamment sur le préavis de la CA ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments, de la nature et des sites. Il tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

25.         La clause d'esthétique de l'art. 15 LCI fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées (arrêt du Tribunal fédéral 1C_370/2015 du 16 février 2016 consid. 4.1 ; ATA/1065/2018 du 9 octobre 2018 consid. 3d ; ATA/1382/2017 du 10 octobre 2017 consid. 5). Leur contenu variant selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce, ces notions laissent à l'autorité un large pouvoir d'appréciation, celle-ci n'étant limitée que par l'excès ou l'abus de celui-ci. L'autorité de recours s'impose une retenue particulière lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est manifestement mieux en mesure qu'elle d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, en matière de technique, en matière économique, en matière de subventions et en matière d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (cf. ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3d ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4c ; ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5b ;).

26.         La CA, instance composée de spécialistes, a examiné à plusieurs reprises le projet et s'est prononcée favorablement, dans son préavis du 5 mars 2019, ayant en particulier validé l'implantation et le volume du projet sur la parcelle en cause et relevé que celle-ci était contraignante. Les demandes de modification et de compléments qu'elle a requises notamment par des directives de nature architecturale et esthétiques montrent qu'elle a examiné attentivement ces aspects. De même, la commune, dont l'avis doit être pris en compte sous l'angle de l'art. 15 LCI, a également rendu un préavis favorable, sans observation. Pour le surplus, aucune des instances spécialisées consultées n'a fait état d'une quelconque problématique en lien avec la question de l'esthétique; notamment l'office de l'urbanisme a préavisé favorablement la densité du projet, étant encore précisé que contrairement à ce qu'allèguent les recourants, la CMNS n'a nullement « confirmé que le projet, par ses dimensions, sa situation et son aspect extérieur, nuirait au caractère du quartier ».

Dès lors, en retenant que le projet ne nuirait pas au caractère ou à l'intérêt du quartier et, ainsi, en délivrant l'autorisation de construire sur la base des préavis recueillis et en tenant compte de tous les intérêts en présence, le département n'a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d'appréciation.

27.         Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

28.         Au vu de l'activité déployée par le tribunal dans la présente procédure, les recourants, qui succombent, sont solidairement condamnés au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l'avance de frais versée à la suite du dépôt du recours art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03).

29.         Vu l'issue du litige, les recourants seront condamnés, conjointement et solidairement, à verser une indemnité de procédure de CHF 1'200.- tant à Mme et M. ATTI, qu'à S.I.M. CONCEPT SA. (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 19 mai 2020 par Madame Karen BIHR, Monsieur Olivier THOINET, Madame Diane DE LA GRANDVILLE-GINNASI, Monsieur Alessandro GINNASI, Madame Pauline CHAUVIN CARRARA, Monsieur Yann CARRARA, Madame Stéphanie ONOFRI, Monsieur Olivier KUFFER, Madame et Monsieur Sophie et Mathieu DESLAGE-BERTHET, Madame et Monsieur Chloé et Nicolas HOLZER, Madame Verena EHRICH, Madame Alessandra MAFFIOLI OEGGERLI, Monsieur Henri OEGGERLI et Madame et Monsieur Delphine et Boris MICHAUD contre la décision du département du territoire du 8 avril 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             condamne les recourants, conjointement et solidairement, à verser à Madame et Monsieur Aurore et Michael ATTI une indemnité de procédure de CHF 1'200.- ;

5.             condamne les recourants, conjointement et solidairement, à verser à S.I.M Concept SA une indemnité de procédure de CHF 1'200.- ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


 

Siégeant : Michèle PERNET, présidente, Bénédicte MONTANT et Julien PACOT, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties

Genève, le

 

La greffière