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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/2627/2019

ACST/16/2020 du 19.06.2020 ( ABST ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2627/2019-ABST ACST/16/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 19 juin 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A______

et

B______

et

C______
représentés par Me François Bellanger, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT

 



EN FAIT

1) a. Monsieur A______ est de nationalité suisse, domicilié sur le territoire de la commune genevoise D______ et titulaire des droits politiques dans le canton de Genève. Il est propriétaire d'une habitation servant de logement, sise à la route E______, sur la parcelle n° 1______ de la commune D______.

b. La B______ (ci-après : B______) est une association au sens des art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), ayant son siège à Genève. Elle a pour but la promotion, la représentation et la défense de la propriété foncière dans le canton. Ses membres sont des propriétaires de biens fonciers sous toute forme juridique et des personnes manifestant un intérêt particulier pour la propriété immobilière.

c. La C______ (ci-après : C______) est une association au sens des art. 60 ss CC, ayant son siège à Genève. Elle a pour but notamment de défendre collectivement les intérêts des maisons membres et de promouvoir au sens large la profession de régisseur et de courtier. Peut être admise à faire partie de la C______ toute entreprise individuelle ou personne morale dont les ayants droit remplissent notamment les conditions d'être inscrits au registre du commerce de Genève et d'exercer les activités principales de régisseurs ou de courtiers dans le canton de Genève.

2) a. La Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie (ci-après : EnDK) est une association au sens des art. 60 ss CC qui vise à favoriser efficacement la collaboration, dans le domaine de l'énergie, au niveau cantonal et entre les cantons et la Confédération, à examiner les questions relevant de la compétence des cantons et à améliorer l'information réciproque. Ses décisions en matière d'énergie ont valeur de recommandations pour les cantons.

Le 9 janvier 2015, l'assemblée générale de l'EnDK a approuvé le Modèle des prescriptions énergétiques des cantons (ci-après : MoPEC), édition 2014 (ci-après : MoPEC 2014).

Le MoPEC constitue un ensemble de prescriptions énergétiques élaborées conjointement par les cantons sur la base de leurs expériences en matière d'exécution. Il est leur « dénominateur commun » dans ce domaine. Il poursuit des objectifs notamment d'édicter des prescriptions déployant des effets significatifs au plan énergétique, de définir des objectifs à atteindre pour les cantons et des exigences légales mesurables et de tenir compte des différences des cantons sur le plan énergétique. Il sert à garantir une certaine uniformité entre les différents cantons. Sous MoPEC 2014, ch. 4 « Transposition des modules dans le droit cantonal » il est prévu sous forme de « recommandation pressante » qu'il est « obligatoire » pour les cantons de reprendre les dispositions de son module de base « qui revêt en quelque sorte une valeur contraignante ». Cette reprise permettrait d'ancrer dans les lois cantonales sur l'énergie les dispositions exigées par le législateur fédéral dans la loi sur l'énergie du 30 septembre 2016 (LEne - RS 730.0). Simultanément, elle concrétise les exigences fixées par l'EnDK dans les prescriptions des « Principes directeurs de la politique énergétique » élaborés par celle-ci et fournit la base pour l'introduction au niveau national du « Certificat énergétique cantonal des bâtiments » (ci-après : CECB) homogène. Dans cette optique, le module de base contient les exigences minimales pour les bâtiments chauffés ou rafraîchis, exigences concernant notamment les installations techniques du bâtiment comme le chauffage et le chauffage de l'eau chaude sanitaire. Il contient également des dispositions sur les énergies renouvelables et le CECB.

b. La Société suisse des ingénieurs et des architectes (ci-après : SIA), est une association au sens des art. 60 ss CC. Elle a pour objectif de promouvoir l'ingénierie, l'architecture et les autres disciplines scientifiques de la construction, de la technique et de l'environnement. Elle participe activement à l'élaboration, au développement, à la publication et à la mise en oeuvre d'instruments techniques et juridiques destinés à l'exercice de la profession, en particulier des normes et des règlements dans ses domaines de compétence.

En matière énergétique, la SIA a élaboré notamment la norme SIA 380/4, édition 2006, sur l'énergie électrique dans le bâtiment, la norme SIA 380/1, édition 2016, sur les besoins de chaleur de chauffage des bâtiments et la norme SIA 387/4, édition 2017, sur l'électricité, dans les bâtiments - l'éclairage : calcul et exigences.

c. L'association Minergie, constituée conformément aux art. 60 ss CC, ayant pour membres notamment la Confédération, les cantons et les secteurs de l'économie et de la formation et des membres individuels, et pour but entre autres de promouvoir l'utilisation rationnelle de l'énergie et le recours aux énergies renouvelables pour contribuer à réduire la pollution de l'environnement tout en améliorant la qualité de vie et la compétitivité, a, le 1er février 2019, modifié son règlement des labels Minergie® (confort et efficacité énergétique) / Minergie-P® (basse consommation énergétique) / Minergie-A® (autonomie énergétique), avec effet au 1er janvier 2019.

L'association Minergie définit et certifie les labels précités pour les nouvelles constructions et les rénovations de bâtiments construits avant l'année 2000 selon la norme SIA 380/1, version 2016. Le règlement décrit les exigences techniques qu'un bâtiment doit remplir pour pouvoir être certifié bâtiment Minergie. Les définitions, les limites et les dispositions essentielles du module de base du MoPEC 2014 s'appliquent à Minergie, indépendamment du fait ou de la manière dont elles sont prises en compte dans un canton concerné. L'association a ainsi adopté les exigences du MoPEC 2014 relatives aux besoins énergétiques annuels pondérés pour le chauffage, l'eau chaude, la ventilation et la climatisation des nouveaux bâtiments et fixé des exigences similaires pour les rénovations. Elle a notamment repris les exigences relatives à la couverture des besoins de chaleur dans les nouveaux bâtiments. Pour l'association, les prescriptions cantonales en matière de construction et d'énergie restent néanmoins prioritaires par rapport à ses labels Minergie.

3) Le 7 mai 2008, le Conseil d'État de la République et canton de Genève (ci-après : Conseil d'État) a déposé auprès du Grand Conseil un projet de loi (ci-après : PL 10258) modifiant la loi genevoise sur l'énergie du 18 septembre 1986 (LEn - L 2 30).

Selon l'exposé des motifs, l'une des principales innovations du PL 10258 était l'obligation de principe d'une installation de panneaux solaires thermiques sur tout bâtiment neuf et lors de la rénovation de la toiture d'un bâtiment existant. La notion d'énergie renouvelable retenue reprenait les termes de l'art. 1 let. f de l'ancienne ordonnance sur l'énergie du 7 décembre 1998 (aOEne), modifiée le 1er novembre 2017 (OEne - RS 730.01) et mentionnait comme énergie renouvelable la force hydraulique, l'énergie solaire, la géothermie, la chaleur ambiante, l'énergie éolienne et la biomasse. Un règlement du Conseil d'État devait définir les prescriptions et les standards à respecter pour permettre une évolution plus souple en la matière notamment par rapport aux normes SIA 380/4 et aux exigences du MoPEC. Des exceptions à l'exigence nouvelle rendant obligatoire, en principe, la pose de capteurs solaires thermiques sur la toiture des bâtiments seraient définies dans le règlement susmentionné notamment en cas de toitures mal orientées, de locaux inoccupés pendant l'été ou de problèmes d'intégration dans un ensemble architectural existant voire dans le cas où le bâtiment serait alimenté par d'autres énergies renouvelables. Parmi les énergies renouvelables, le PL 10258 accordait la priorité à l'énergie solaire. Cette modification est entrée en vigueur le 5 août 2010.

4) Le 1er septembre 2014, la Commission de l'énergie et des Services industriels de Genève a présenté au Grand Conseil son rapport portant sur l'examen du rapport du Conseil d'État au Grand Conseil, sur la conception générale de l'énergie 2005-2009, le projet de conception générale de l'énergie 2013 (ci-après : RD 986-A) et sur la proposition d'une résolution du Conseil d'État au Grand Conseil approuvant la conception générale de l'énergie (ci-après : R 732), comprenant un rapport de majorité, un autre de première minorité et celui de deuxième minorité.

Selon le rapport de la majorité, l'office cantonal de l'énergie (ci-après : OCEN) promouvait la construction d'installations décentralisées de production d'énergie solaire thermique, solaire photovoltaïque et de géothermie de faible profondeur. Il avait pour objectif de couvrir jusqu'en 2035 11 % de la consommation par des panneaux solaires thermiques.

S'agissant du concept de la société à 2'000 watts, celui-ci demande une réduction drastique de la consommation totale et une modification profonde des sources d'énergie. Le niveau de 2'000 watts est un standard mondial, qui correspond au niveau jugé supportable à long terme pour la planète. En Suisse, il implique de réduire, d'ici l'an 2100, la consommation d'énergie primaire - générée par les dépenses d'énergie finale de la population - à 2'000 watts par personne, et les émissions de gaz à effet de serre (GES) à une tonne par personne et par an (Concept pour l'établissement du bilan de la société à 2'000 watts, septembre 2014, SuisseEnergie pour les communes, Ville de Zurich, Société suisse des ingénieurs et des architectes SIA, lettre ii). Cet objectif implique une consommation d'énergie par habitant divisée par trois par rapport au niveau d'alors, avec trois-quarts d'énergie renouvelable.

Lors de l'examen de la proposition de la R 732, par le département en charge de l'énergie, reprenant les termes de l'art. 18a de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (Loi sur l'aménagement du territoire - LAT - RS 700), dans les zones à bâtir et les zones agricoles, les installations solaires suffisamment adaptées aux toits ne nécessitaient pas d'autorisation selon l'art. 22 al. 1 LAT. De tels projets devaient être simplement annoncés à l'autorité compétente. L'expression « installations solaires » de la LAT regroupait à la fois les installations solaires thermiques et les panneaux photovoltaïques. La LEn obligeait la pose de panneaux thermiques.

Le texte de la proposition de la R 732 approuvant la conception générale en matière d'énergie soumis au Grand Conseil contenait des réserves aux recommandations à intégrer lors de l'élaboration du plan directeur cantonal de l'énergie. Concernant l'énergie solaire, la R 732 approuvée par le Grand Conseil demandait au Conseil d'État de renoncer à exiger notamment une autorisation pour l'installation des capteurs solaires, sauf exception, de viser une production d'électricité photovoltaïque à court terme de 100 GWh en 2025 en raison du potentiel de toitures plates sur le canton, le développement des énergies renouvelables étant un des piliers de la transition énergétique et le solaire, l'un des piliers des énergies renouvelables.

5) a. Le 5 juin 2019, le Conseil d'État a adopté un règlement modifiant le règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01), ayant la teneur suivante :

Art. 1 Modifications

Le règlement d'application de la loi sur l'énergie, du 31 août 1988, est modifié comme suit :

Art. 12B (nouvelle teneur)

Bâtiments neufs (HPE-Neuf)

1 Sont considérés comme répondant à un standard de haute performance énergétique les bâtiments neufs au bénéfice du label Minergie® ou de tout autre label équivalent avec un taux de production propre d'électricité d'au moins 10W/m2 de surface de référence énergétique.

2 Sont certifiés de haute performance énergétique les bâtiments neufs dont la valorisation de l'enveloppe thermique par un taux de production propre d'électricité est d'au moins 10W/m2 de surface de référence énergétique, dont la valorisation de la toiture par la pose de capteurs solaires thermiques couvre au moins 30 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire, dont l'alimentation principale en chaleur provient d'énergies non fossiles et locales ou d'un réseau thermique à distance dont la part d'énergies non fossiles et locales est d'au moins 50 %, et qui répondent à l'une des alternatives suivantes :

a) le respect des valeurs limites des besoins d'énergie annuels pondérés pour le chauffage, la préparation de l'eau chaude sanitaire, la ventilation et le rafraîchissement dans les bâtiments à construire définies dans le modèle de prescriptions énergétiques des cantons de 2014 (ci-après : MoPEC 2014), le respect des valeurs limites de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage et le respect des valeurs limites relatives à la demande globale en énergie définies par la norme SIA 387/4 édition 2017 pour l'éclairage ;

b) l'obtention de la classe énergétique B/B selon le certificat énergétique cantonal des bâtiments assorti d'un rapport de conseil (ci-après : CECB Plus) ou le cahier technique SIA 2031 édition 2016 et, si le bâtiment n'est pas destiné au logement et qu'il est climatisé, le non-dépassement de la puissance électrique nécessaire pour la climatisation de 7W/m2 de surface climatisée ;

c) le respect du 80 % des valeurs limites de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage, le respect des valeurs cibles relatives à la demande globale en énergie définies par la norme SIA 387/4 édition 2017 pour l'éclairage et, si le bâtiment n'est pas destiné au logement et qu'il est climatisé, le non-dépassement de la puissance électrique nécessaire pour la climatisation de 7W/m2 de surface climatisée.

Extensions de bâtiments (HPE-Neuf)

3 Sont certifiées de haute performance énergétique pour la performance globale du bâtiment existant et de son extension les extensions de bâtiments existants dont la valorisation de l'enveloppe thermique par un taux de production propre d'électricité est d'au moins 10W/m2 de la surface d'emprise au sol globale du bâtiment, dont la valorisation de la toiture par la pose de capteurs solaires thermiques couvre au moins 30 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire, et qui respectent les valeurs limites de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage et les valeurs cibles relatives à la demande globale en énergie définies par la norme SIA 387/4 édition 2017 pour l'éclairage.

Bâtiments rénovés (HPE-Reno)

4 Sont considérés comme répondant à un standard de haute performance énergétique les bâtiments rénovés au bénéfice du label Minergie® Rénovation ou de tout autre label équivalent avec un taux de production propre d'électricité d'au moins 20W/m2 de la surface d'emprise au sol du bâtiment.

5 Sont certifiés de haute performance énergétique les bâtiments rénovés dont la valorisation de l'enveloppe thermique par un taux de production propre d'électricité est d'au moins 20W/m2 de la surface d'emprise au sol du bâtiment, dont la valorisation de la toiture par la pose de capteurs solaires thermiques couvre au moins 30 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire, et qui répondent à l'une des alternatives suivantes :

a) le respect des valeurs limites des besoins d'énergie annuels pondérés pour le chauffage, la préparation de l'eau chaude sanitaire, la ventilation et le rafraîchissement dans les bâtiments à construire définies dans le MoPEC 2014 majorées de 70 %, et le respect des valeurs limites de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage majorées de 50 % ;

b) l'obtention de la classe énergétique C/B selon le CECB Plus ou selon le cahier technique SIA 2031 édition 2016 et, si le bâtiment n'est pas destiné au logement et qu'il est climatisé, le non-dépassement de la puissance électrique nécessaire pour la climatisation de 12W/m2 de surface climatisée.

Art. 12C (nouvelle teneur)

Bâtiments neufs et extensions (THPE-2000 W)

1 Sont considérés comme répondant à un standard de très haute performance énergétique les bâtiments neufs au bénéfice du label Minergie® A, Minergie® P-Eco ou de tout autre label équivalent avec un taux de production propre d'électricité d'au moins 30W/m2 de surface de référence énergétique.

2 Sont certifiés de très haute performance énergétique les bâtiments neufs dont la valorisation de l'enveloppe thermique par un taux de production propre d'électricité est d'au moins 30W/m2 de surface de référence énergétique, dont la valorisation de la toiture par la pose de capteurs solaires thermiques couvre au moins 50 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire, dont l'alimentation principale en chaleur provient d'énergies non fossiles et locales ou d'un réseau thermique à distance dont la part d'énergies non fossiles et locales est d'au moins 80 %, et qui répondent à l'une des alternatives suivantes :

a) le respect du 70 % des valeurs limites des besoins d'énergie annuels pondérés pour le chauffage, la préparation de l'eau chaude sanitaire, la ventilation et le rafraîchissement dans les bâtiments à construire définies dans le MoPEC 2014, le respect des valeurs cibles de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage et le respect des valeurs cibles relatives à la demande globale en énergie définies par la norme SIA 387/4 édition 2017 pour l'éclairage ;

b) l'obtention de la classe énergétique A/A selon le CECB Plus ou le cahier technique SIA 2031 édition 2016 et, si le bâtiment n'est pas destiné au logement et qu'il est climatisé, le non-dépassement de la puissance électrique nécessaire pour la climatisation de 7W/m2 de surface climatisée.

Bâtiments rénovés

3 Sont considérés comme répondant à un standard de très haute performance énergétique les bâtiments rénovés au bénéfice du label Minergie®A, Minergie®P-Eco ou de tout autre label équivalent avec un taux de production propre d'électricité d'au moins 20W/m2 de la surface d'emprise au sol du bâtiment.

4 Sont certifiés de très haute performance énergétique les bâtiments rénovés dont la valorisation de l'enveloppe thermique par un taux de production propre d'électricité est d'au moins 20W/m2 de la surface d'emprise au sol du bâtiment, dont la valorisation de la toiture par la pose de capteurs solaires thermiques couvre au moins 50 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire, dont l'alimentation principale en chaleur provient d'énergies non fossiles et locales ou d'un réseau thermique à distance dont la part d'énergies non fossiles et locales est d'au moins 80 %, et qui répondent à l'une des alternatives suivantes :

a) le respect des valeurs limites des besoins d'énergie annuels pondérés pour le chauffage, la préparation de l'eau chaude sanitaire, la ventilation et le rafraîchissement dans les bâtiments à construire définies dans le MoPEC 2014, le respect du 90 % des valeurs limites de la norme SIA 380/1 édition 2016 pour les besoins de chaleur pour le chauffage et le respect des valeurs cibles relatives à la demande globale en énergie définies par la norme SIA 387/4 édition 2017 pour l'éclairage ;

b) l'obtention de la classe énergétique B/A selon le CECB Plus ou le cahier technique SIA 2031 édition 2016 et, si le bâtiment n'est pas destiné au logement et qu'il est climatisé, le non-dépassement de la puissance électrique nécessaire pour la climatisation de 7W/m2 de surface climatisée.

Art. 12P (nouvelle teneur)

1 En application de l'article 15, alinéas 2 et 6, de la loi, le département peut déroger, sur requête dûment justifiée, à l'obligation de la valorisation des toitures neuves ou rénovées par la pose de capteurs solaires thermiques.

2 Le recours à d'autres énergies renouvelables ne constitue pas une exception à l'obligation de la valorisation des toitures par la pose de capteurs solaires thermiques.

Art. 2 Entrée en vigueur

Le présent règlement entre en vigueur le lendemain de sa publication dans la Feuille d'avis officielle.

b. Le même jour, le Conseil d'État a publié un communiqué de presse faisant état des modifications adoptées.

Il avait modifié le REn afin de rendre compatible les standards énergétiques genevois avec l'évolution des exigences en matière d'optimisation énergétique. L'adaptation introduite permettait d'atteindre les objectifs de la société à 2'000 watts et le zéro carbone pour les constructions neuves. Les critères pour obtenir les certifications avaient évolué à la suite du MoPEC 2014. Les certificats genevois n'étaient plus compatibles avec celui-ci. La modification adoptée accroissait les possibilités de certification des bâtiments dans le canton. Des mesures de soutien pour les constructions neuves répondant aux standards de très haute performance énergétique (ci-après : THPE) étaient prévues.

6) Publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 11 juin 2019, le règlement précité est entré en vigueur le 12 juin 2019.

7) Par acte déposé le 11 juillet 2019, M. A______, B______ et C______ ont interjeté recours auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) contre le règlement précité, concluant préalablement à l'octroi de l'effet suspensif au recours concernant l'art. 12P al. 2. Ils ont aussi conclu principalement à l'annulation de l'art. 12P al. 2 et de l'art. 2 souligné.

L'art. 2 souligné prévoyait l'entrée en vigueur du règlement le lendemain de sa publication dans la FAO. Le Conseil d'État n'avait pas prévu de disposition transitoire. Les milieux immobiliers n'avaient pas reçu d'informations au sujet des modifications en cause avant le communiqué de presse du Conseil d'État. Ils n'avaient pas pu se préparer aux changements législatifs, notamment concernant l'établissement des projets de construction. L'effet suspensif permettait l'introduction de dispositions transitoires et d'éviter ainsi aux professionnels et aux propriétaires des pertes financières importantes et des retards conséquents dans la réalisation de projets immobiliers d'envergure nécessaires pour le canton.

Ils n'étaient pas opposés sur le principe à la mise en conformité du règlement avec le droit supérieur et les objectifs énergétiques du canton. Néanmoins, ils acceptaient la mise en oeuvre des nouvelles exigences après une période transitoire. Il n'y avait pas d'urgence à faire entrer en vigueur les nouvelles dispositions sans tenir compte des impératifs pratiques des promoteurs immobiliers et des propriétaires du canton. Il n'y avait pas d'intérêt public prépondérant à l'application immédiate de l'art. 12P al. 2 REn. Le Conseil d'État devait prévoir des dispositions transitoires pour éviter une situation de blocage de projets immobiliers déposés ou sur le point de l'être.

L'art. 12P al. 2 REn était contraire aux art. 15 al. 2 et al. 6 LEn. Il imposait aux propriétaires de valoriser des toitures par la pose systématique et obligatoire de capteurs solaires thermiques au détriment de l'utilisation de toutes les autres énergies renouvelables. Il limitait celles-ci à la seule énergie solaire thermique. La LEn laissait pourtant, en fonction des circonstances et des impératifs techniques et financiers, aux propriétaires le choix entre l'énergie hydraulique, l'énergie solaire, l'énergie géothermique, la chaleur ambiante, l'énergie éolienne et l'énergie tirée de biomasse ou des déchets de biomasse (art. 19 al. 1 LEne ; art. 6 al. 1 LEn). En ne prévoyant pas de disposition transitoire, le REn violait le principe de la proportionnalité.

Le Conseil d'État n'avait pas associé aux discussions ni informé préalablement les milieux concernés de l'immobilier des changements réglementaires et de la date d'entrée en vigueur de ceux-ci. Le changement de loi sans aucune information préalable violait le principe de la sécurité du droit, les intéressés n'ayant pas pu se préparer et anticiper ce changement qui affectait la réalisation et la mise en oeuvre de leurs projets. Pour respecter les nouvelles normes, les propriétaires et les promoteurs étaient obligés de modifier leurs plans de construction et leurs plans financiers, engendrant ainsi d'importantes pertes financières et des retards dans la mise en oeuvre de leurs projets immobiliers. Les nouvelles dispositions ne devaient pas s'appliquer aux projets déjà déposés ou à ceux qui allaient l'être en juin ou juillet 2019.

8) Le 31 juillet 2019, le Conseil d'État a conclu au rejet de la demande d'octroi de l'effet suspensif, ainsi que, sur le fond, à celui du recours.

Les griefs de pertes financières importantes et de retards conséquents de dossiers de construction ne constituaient pas de justes motifs à l'application différée du nouveau droit. Les dossiers qui pourraient être affectés par les modifications adoptées seraient traités dans le respect de la sécurité du droit, de l'égalité de traitement et du principe de la proportionnalité de manière à minimiser l'impact de l'application immédiate des nouvelles dispositions réglementaires. Concrètement, l'analyse se ferait au cas par cas. Le cas échéant, un contrôle judiciaire serait effectué dans le cadre d'un contrôle concret contre une décision de l'administration. La nature des modifications règlementaires contestées n'entraînait en principe pas la révision complète de la conception d'un dossier d'autorisation de construire établi sous l'ancien droit. Les propriétaires considérés ne devaient a priori pas déposer de nouvelles demandes d'autorisation de construire, ni réaliser un nouveau concept énergétique. L'intérêt public de la politique du logement n'était pas menacé par le retard qui résulterait de l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions. L'intérêt privé invoqué ne pouvait pas l'emporter sur l'intérêt public à la protection de l'environnement et du climat. La nécessité de mettre en oeuvre la transition énergétique et de lutter contre le réchauffement climatique commandait l'application immédiate de l'art. 12P REn en lien avec les nouveaux standards énergétiques. Elle permettait des économies d'énergie et le passage au chauffage 100 % non fossile qui constituait une avancée en matière de politique énergétique.

Les nouveaux standards haute performance énergétique (ci-après : HPE) et THPE neuf ou rénovation obligeaient d'installer de manière conjointe des panneaux solaires thermiques et des panneaux solaires photovoltaïques. Pour le HEP neuf ou le THPE neuf et rénovation, il y avait obligation de produire l'énergie destinée au chauffage au moyen d'énergies non fossiles et locales. Le MoPEC 2014 ne permettait plus, en cas de construction ou de rénovation d'une toiture, d'installer des capteurs solaires thermiques pour chauffer une partie de l'eau chaude et obtenir une dérogation à cette obligation si l'intéressé installait une pompe à chaleur ou une chaudière en bois pour chauffer l'eau en lieu et place de capteurs solaires. Le requérant devait dès lors installer des panneaux solaires thermiques dans un bâtiment neuf ou rénové même si une pompe à chaleur ou une chaudière à bois était construite.

Il avait dû adapter les standards cantonaux pour s'aligner sur le MoPEC 2014 et ainsi les rendre compatibles avec les normes généralement admises en Suisse en matière de HPE et THPE, respecter l'évolution des prescriptions des normes SIA et remplir les conditions de la Confédération et du Modèle d'encouragement harmonisé des cantons (ci-après : ModEnHa) pour octroyer des subventions. Les nouveaux standards HPE neuf et THPE neuf et rénovation ne permettaient plus de renoncer à la pose de panneaux solaires thermiques, même si d'autres solutions de chauffage par le biais d'énergies non fossiles étaient mises en place en parallèle. Le maintien de l'exception aurait été en contradiction avec les exigences du standard HPE neuf, devenu obligatoire, dans la mesure où elle aurait fondé des exceptions systématiques à la pose des capteurs solaires thermiques. Il y avait une contradiction entre l'alinéa 1 et la première exception citée en deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'art. 15 LEn qui ne pouvaient plus être appliqués simultanément, l'application rigoureuse du 1er alinéa entraînant le non-respect de la première exception. Le respect du principe général de la HPE des bâtiments devait primer dans la mesure où il allait dans le sens de l'intérêt public de concrétiser la transition énergétique.

La disposition contestée pouvait se fonder aussi sur l'art. 15 al. 3 LEn qui autorisait de prévoir des exceptions aux alinéas 1 et 2 de l'art. 15 LEn. Elle annulait l'exception de l'art. 15 al. 2 LEn prévoyant de ne pas installer les panneaux solaires thermiques quand les besoins de chaleur pour l'eau étaient couverts par une autre énergie non fossile. Elle ne contrevenait pas à l'art. 15 al. 5 et 6 LEn. Pour les rénovations, il convenait de renoncer à l'utilisation des énergies non fossiles pouvant être brûlées (bois) et à la consommation d'électricité (pompe à chaleur) en faveur de la production de chaleur pour l'eau par les panneaux solaires. Par ailleurs, lors de la mise en oeuvre des dispositions légales, l'autorité était tenue de respecter le principe de la proportionnalité. L'obtention d'une dérogation était possible en cas de disproportion démontrée de l'exigence réglementaire dans un cas concret notamment en cas d'impossibilité de placer assez de panneaux solaires sur la toiture ou lorsqu'il était préférable du point de vue de la conservation de l'énergie et financier pour le propriétaire de privilégier une autre solution. La nouveauté en matière de valorisation de la toiture était l'obligation de poser des panneaux solaires photovoltaïques pour la production propre d'électricité.

La nouvelle disposition s'appliquait aux dossiers de demandes d'autorisation de construire en cours d'instruction devant l'autorité. Aucun droit acquis des intéressés n'était touché. Aucune dérogation ne pouvait être présumée avant le dépôt d'une demande d'autorisation de construire. Selon une pratique administrative du département, seules les demandes d'autorisations de construire déposées à partir du 12 juin 2019 étaient soumises au nouveau droit, celles d'avant le 12 juin 2019 l'étaient à l'ancien droit. Les requérants qui envisageaient une construction répondant au standard THPE devaient adapter leur projet pour bénéficier des subventions THPE valables dès le 12 juin 2019 conformément aux exigences du Programme Bâtiments de la Confédération. Le barème et les conditions de subventionnement antérieurs s'appliquaient aux dossiers qui correspondaient à l'ancien standard THPE. En cas de disproportion technique ou économique avérée de l'application du nouveau standard par rapport à l'ancien, des allégements pouvaient être consentis aux propriétaires concernés sur la base d'une demande de dérogation motivée.

Les milieux concernés avaient été consultés par le biais de la commission du standard énergétique composée des représentants des milieux immobiliers et des milieux économiques. Celle-ci avait donné son aval aux standards modifiés.

9) Par réplique du 17 septembre 2019, M. A______, B______ et C______ ont persisté dans leurs conclusions sur effet suspensif et au fond.

Le Conseil d'État admettait l'impact de l'application immédiate des dispositions modifiées sur leur activité. La modification des standards HPE ou THPE n'était pas nécessaire en vue de l'octroi de subventions, aucune disposition du droit fédéral n'exigeant le respect des nouveaux standards énergétiques fédéraux pour l'octroi de celles-ci. Le non-respect des standards subventionnés par la Confédération excluait uniquement de bénéficier d'un financement par le bais de la contribution globale annuelle de la Confédération à titre de mesures d'encouragement en matière d'énergie. Les modifications des art. 12B, 12C ou 12P REn n'étaient pas exigées par le droit fédéral avec effet immédiat pour la mise en conformité avec les nouvelles exigences énergétiques. Elles permettaient cependant au canton d'éviter de subir une restriction des financements fédéraux.

Lorsque 30 % des besoins de chaleur pour l'eau chaude sanitaire étaient couverts par d'autres énergies renouvelables, il n'était pas obligatoire de poser des capteurs solaires thermiques. Pour introduire la disposition contestée, il était indispensable de modifier l'art. 15 al. 2 LEn.

Le règlement des labels MinergieÒ n'était pas une base légale formelle. Il définissait les objectifs à atteindre, mais sans en imposer les moyens. Le Conseil d'État ne pouvait pas l'invoquer pour justifier les modifications contestées notamment pour imposer l'installation des capteurs solaires thermiques en violation des exceptions prévues par la LEn. Le règlement des labels MinergieÒ faisait uniquement référence aux énergies renouvelables. Les normes SIA avaient pour but une utilisation rationnelle et économique de l'énergie pour le chauffage dans le bâtiment. Elles contribuaient à la conception de bâtiments respectueux de l'environnement. Elles n'obligeaient pas d'équiper des bâtiments de capteurs solaires thermiques pour couvrir une partie de leurs besoins de chaleur pour la production d'eau chaude. Elles ne justifiaient pas la modification des art. 12B, 12C et 12P al. 2 REn. Le MoPEC 2014 définissait les exigences en matière énergétique pour les bâtiments. Il ne faisait pas mention du recours obligatoire aux capteurs solaires thermiques pour obtenir la certification MinergieÒ d'un bâtiment neuf. Il ne l'imposait pas. Il avait fixé l'objectif à atteindre en matière énergétique, mais sans déterminer de solutions techniques pour l'atteindre. Il laissait au constructeur le choix des moyens pour atteindre les exigences fixées. Pour les bâtiments d'habitation, il était possible de respecter l'exigence du MoPEC 2014 sans devoir installer des capteurs solaires thermiques. L'obligation de produire sa propre électricité d'au moins 10W/m2 de surface de référence énergétique (ci-après : SRE) sans la plafonner et l'obligation d'installer des capteurs solaires thermiques sans permettre l'usage alternatif d'autres énergies renouvelables allaient à l'encontre de l'objectif d'harmonisation de la législation cantonale avec le MoPEC.

La problématique soulevée par le recours était celle de la liberté de choix des énergies renouvelables pour les constructeurs. La pose de panneaux photovoltaïques était également problématique dans la mesure où la disposition attaquée ne prévoyait pas la limitation à 10W/m2 de SRE figurant pourtant dans le MoPEC 2014. Une pratique administrative appliquée en fonction de l'opportunité pour tenter de pallier l'absence de dispositions transitoires ne pouvait pas réparer la violation de l'art. 15 LEn par des modifications apportées au REn.

10) Le 19 septembre 2019, le juge délégué a transmis au Conseil d'État la réplique précitée et lui a fixé un délai pour dupliquer.

11) Par décision du 30 septembre 2019 (ACST/29/2019), la présidence de la chambre constitutionnelle a refusé d'octroyer l'effet suspensif au recours.

12) Le 9 octobre 2019, le Conseil d'État a adopté un règlement modifiant le règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01), ayant la teneur suivante :

 

Art. 1 Modifications

Le règlement d'application de la loi sur l'énergie, du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01), est modifié comme suit :

Art. 30 Dispositions transitoires (nouvelle teneur de la note), al. 2 et 3 (nouveaux)

Modifications du 9 octobre 2019

2 Les articles 12B, 12C et 12P dans leur teneur au 12 juin 2019 s'appliquent aux demandes d'autorisation de construire déposées à partir du 1er janvier 2020.

3 L'alinéa 2 a un effet rétroactif au 12 juin 2019.

Art. 2 Entrée en vigueur

Le présent règlement entre en vigueur le lendemain de sa publication dans la Feuille d'avis officielle.

13) La modification précitée a été publiée dans la FAO du 15 octobre 2019 et est entrée en vigueur le 16 octobre 2019.

14) Par détermination du 17 octobre 2019, le Conseil d'État a conclu à l'admission de la conclusion du recours demandant l'adoption d'un délai raisonnable pour mettre en oeuvre la disposition contestée et a, pour le surplus, persisté dans les conclusions de ses observations antérieures.

Sur le fond, les standards genevois avant la modification contestée étaient devenus incompatibles avec les normes SIA et ne correspondaient pas aux minima du MoPEC 2014 et du standard MinergieÒ. À défaut de leur révision, le canton ne pouvait pas accorder des subventions du Programme Bâtiments de la Confédération aux bâtiments répondant au règlement genevois, les anciens standards n'étant pas éligibles à ce programme. La modification des standards énergétiques était un choix de politique énergétique du canton et permettait de s'aligner sur les normes généralement admises en Suisse en matière de HPE et de THPE. Le choix d'accorder des subventions de droit fédéral et de droit cantonal complémentaires était également de politique énergétique et était fondé sur le ModEnHa. L'octroi de subventions de droit fédéral à des améliorations énergétiques d'impact non équivalent aurait été contraire aux recommandations du ModEnHa, entraîné une inégalité de traitement entre les administrés et constitué une utilisation des deniers publics contraire à l'intérêt public. Maintenir les standards anciens aurait été contraire aux intérêts économiques des propriétaires fonciers en les empêchant de bénéficier des contributions de la Confédération venant compléter le budget cantonal.

Le Conseil d'État, lui-même, s'était basé sur les standards MinergieÒ, les normes SIA et le MoPEC 2014 pour modifier les standards énergétiques genevois. Certes, ces différents instruments n'exigeaient pas explicitement la pose des panneaux solaires thermiques sur les bâtiments pour atteindre les objectifs fixés par les nouveaux standards énergétiques. Toutefois, cette pose combinée avec une installation de chauffage alimentée aux énergies renouvelables et une production propre d'électricité permettait d'obtenir le maximum d'économie d'énergie.

Il estimait nécessaire de combiner toutes les mesures précitées pour atteindre le but de la loi, l'utilisation rationnelle et économe de l'énergie. Par l'art. 15 al. 2 LEn, le législateur avait souhaité instaurer le principe de la pose des panneaux solaires thermiques. Celle-ci était exigée dès 2010 sur toute toiture neuve ou rénovée. L'exception de l'art. 15 al. 2 LEn ne se « conjuguait » plus avec le principe de l'obligation d'installer des panneaux solaires thermiques et l'évolution des standards énergétiques. La nature des mesures visant à économiser l'énergie devait être adaptée à l'évolution des techniques applicables, ce qui n'était pas le cas au moment de l'adoption de l'art. 15 LEn. L'art. 15 al. 3 LEn permettait des exceptions aux alinéas 1 et 2 de cette disposition. En matière de rénovation touchant la toiture de bâtiments, la pose de panneaux solaires était obligatoire. L'installation d'une chaudière alimentée à une autre source d'énergie renouvelable ne constituait pas une exception à cette obligation.

La modification réglementaire du 9 octobre 2019 avec effet rétroactif au 12 juin 2019 permettait aux milieux et propriétaires immobiliers de bénéficier d'un temps supplémentaire pour adapter leurs dossiers d'autorisation de construire aux nouveaux standards énergétiques. Le nouveau standard HPE serait exigé pour les constructions neuves faisant l'objet de demandes d'autorisation de construire déposées à partir du 1er janvier 2020.

15) Le 19 novembre 2019, M. A______, B______ et C______ ont persisté dans les conclusions de leur recours et de leurs observations antérieures.

La modification des art. 12B, 12C et 12P REn était justifiée uniquement par la volonté du Conseil d'État de respecter des standards d'associations privées et non par une mise en conformité au droit fédéral. L'art. 15 al. 2 LEn n'imposait pas une obligation de prévoir des capteurs solaires thermiques, mais une installation de ceux-ci en principe, sauf exception, notamment lorsque les besoins étaient couverts par d'autres énergies renouvelables, ou en cas de toiture mal orientée, de locaux inoccupés pendant l'été ou de faible besoin en eau chaude sanitaire en raison de l'affectation de l'immeuble. L'exception prévue à l'art. 15 al. 3 LEn était valable à la condition d'être conforme à l'art. 15 al. 2 LEn.

Par ailleurs, le Conseil d'État avait admis leurs conclusions relatives à l'introduction des dispositions transitoires en adoptant les modifications du REn du 9 octobre 2019 entrées en vigueur le 16 octobre 2019.

16) Ensuite de quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. La chambre constitutionnelle est l'autorité compétente pour contrôler, sur requête, la conformité des normes cantonales au droit supérieur (art. 124 let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00). Selon la législation d'application de cette disposition, il s'agit des lois constitutionnelles, des lois et des règlements du Conseil d'État (art. 130B al. 1 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

b. En l'espèce, le recours est formellement dirigé contre un règlement du Conseil d'État. La chambre de céans est par conséquent compétente pour connaître de la présente cause.

2) Le recours a été interjeté en temps utile à compter de la promulgation des modifications réglementaires attaquées, qui a eu lieu par publication dans la FAO du 11 juin 2019 (art. 62 al. 1 let. d et al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), et il respecte les conditions de forme et de contenu prévues par les art. 64 al. 1 et 65 LPA, y compris celle d'un exposé détaillé des griefs (art. 65 al. 3 LPA). Il est donc recevable de ce point de vue.

3) a. A qualité pour recourir toute personne touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d'État ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l'acte soit annulé ou modifié (art. 60 al. 1 let. b LPA). Cette disposition-ci formule de la même manière la qualité pour recourir contre un acte normatif et en matière de recours ordinaire. Elle ouvre ainsi largement la qualité pour recourir, tout en évitant l'action populaire, dès lors que le recourant doit démontrer qu'il est susceptible de tomber sous le coup de la loi constitutionnelle, de la loi ou du règlement attaqué (ACST/22/2019 du 8 mai 2019 consid. 3a et la référence citée).

b. En application de l'art. 111 al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le droit cantonal ne peut pas définir la qualité de partie devant l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral de manière plus restrictive que ne le fait l'art. 89 LTF. Aux termes de cette disposition, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (al. 1 let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (al. 1 let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (al. 1 let. c).

Lorsque le recours est dirigé contre un acte normatif, la qualité pour recourir est conçue de manière plus souple et il n'est pas exigé que le recourant soit particulièrement atteint par l'acte entrepris. Ainsi, toute personne dont les intérêts sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un jour a qualité pour recourir ; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition toutefois qu'il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les dispositions contestées (ATF 145 I 26 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_752/2018 du 29 août 2019 consid. 1.2).

La qualité pour recourir suppose en outre un intérêt actuel à obtenir l'annulation de l'acte entrepris, cet intérêt devant exister tant au moment du dépôt du recours qu'au moment où l'arrêt est rendu (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; ACST/22/2019 précité consid. 3b).

c. Une association ayant la personnalité juridique est habilitée à recourir soit lorsqu'elle est intéressée elle-même à l'issue de la procédure, soit lorsqu'elle sauvegarde les intérêts de ses membres. Dans ce dernier cas, la défense des intérêts de ses membres doit figurer parmi ses buts statutaires et la majorité de ceux-ci, ou du moins une grande partie d'entre eux, doit être personnellement touchée par l'acte attaqué (ATF 142 II 80 consid. 1.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_642/2018 du 29 mars 2019 consid. 1.2).

d. En l'espèce, M. A______ est domicilié dans le canton de Genève et est propriétaire d'un bien immobilier sis sur le territoire de la commune D______. Il est dès lors directement concerné par la disposition attaquée dans la mesure où en cas de nouvelle construction de bâtiment sur sa parcelle, les exigences prévues dans le REn, notamment l'obligation de la pose de capteurs solaires thermiques, pourraient lui être appliquées. La B______ a pour membres des propriétaires de biens fonciers et des personnes manifestant un intérêt particulier pour la propriété immobilière. Il se déduit de son but de représentation et de défense de la propriété foncière dans le canton, des prérogatives d'agir en justice au nom de ces derniers. La C______ a, quant à elle, pour but notamment de défendre collectivement les intérêts des maisons membres, qui peuvent être des entreprises individuelles ou des personnes morales dont les ayants droit remplissent notamment les conditions d'être inscrits au registre du commerce de Genève et d'exercer les activités principales de régisseurs ou de courtiers dans le canton de Genève. La question de savoir si la plupart des membres de la B______ sont des propriétaires fonciers ou des personnes manifestant un intérêt particulier pour la propriété immobilière et ceux de la C______, qui sont principalement des entreprises ou maisons, certes sans que ne soit exclu qu'il s'agisse d'entreprises individuelles, donc de personnes physiques, sont également titulaires des droits politiques et propriétaires des biens immobiliers dans le canton de Genève, peut souffrir de demeurer indécise dans la mesure où le recours est de toute manière recevable en tant qu'il est interjeté par M. A______.

Le recours est ainsi également recevable de ce point de vue.

4) a. Le recours porte sur la conformité de l'art. 12P al. 2 REn au droit supérieur, soit aux art. 6 et 15 LEn. Les recourants reprochent au Conseil d'État d'avoir limité le choix des énergies renouvelables à la seule énergie solaire en imposant la pose de capteurs solaires thermiques lors de la construction de bâtiments neufs ou de la rénovation de ceux existants.

b. À la suite de l'adoption, le 9 octobre 2019, de la modification du REn introduisant des dispositions transitoires à l'application des art. 12B, 12C et 12P REn avec effet rétroactif au 12 juin 2019, le Conseil d'État a fait droit à la conclusion des recourants demandant d'annuler partiellement l'art. 2 (souligné) du règlement contesté en tant qu'il autorisait l'entrée en vigueur immédiate de l'art. 12P al. 2 REn. Partant, cette conclusion est devenue sans objet, les recourants reconnaissant au demeurant dans leur écriture du 19 novembre 2019 que le Conseil d'État leur a donné satisfaction en adoptant les modifications du REn entrées en vigueur le 16 octobre 2019. Au surplus, il convient de rappeler que dans sa décision du 30 septembre 2019 (ACST/29/2019), la présidence de la chambre de céans avait refusé d'octroyer l'effet suspensif au recours.

c. Le recours est dirigé contre l'art. 12P al. 2 REn dont les recourants demandent l'annulation. Dans leur réplique du 17 septembre 2019 et leurs observations du 19 novembre 2019 cependant, ils s'en prennent également aux art. 12B et 12C REn lorsqu'ils soutiennent que les labels MinergieÒ, les normes SIA et le MoPEC 2014 ne justifiaient pas la modification de ces dispositions réglementaires et la suppression des exceptions à la pose de capteurs solaires thermiques. Ce grief entre néanmoins en contradiction avec les termes de leur recours selon lesquels ils acceptent la mise en oeuvre des exigences des nouveaux standards énergétiques, en l'occurrence prévus par les art. 12B et 12C REn, après une période transitoire tenant compte des impératifs pratiques des promoteurs immobiliers et des propriétaires du canton. Ils n'ont au demeurant, dans leur recours, pris aucune conclusion en annulation des art. 12B et 12C REn.

Dans ces circonstances, l'objet du recours porte uniquement sur l'annulation de l'art. 12P al. 2 REn, étant précisé que la chambre de céans est liée par les conclusions des parties, mais pas par les motifs qu'elles invoquent (art. 69 al. 1 LPA). Aussi, le grief fait au Conseil d'État d'avoir suivi des prescriptions d'institutions privées, à savoir l'EnDK, la SIA et Minergie, pour procéder aux modifications des art. 12B et 12C REn est sans pertinence en l'espèce. Par ailleurs, l'art. 45 al. 4 LEne reprend les labels Minergie et les prescriptions du MoPEC 2014. En outre, l'OEne prévoit que les cantons se basent sur les exigences cantonales harmonisées, soit le MoPEC notamment, pour édicter les dispositions au sens de l'art. 45 al. 3 LEne (art. 50 al. 1 OEne qui a repris la teneur de l'art. 11a al. 1 aOEne). Dans ces conditions, l'affirmation des recourants selon laquelle le Conseil d'État a suivi les prescriptions d'institutions privées doit être relativisée, dans la mesure où s'il est exact que la source de ces prescriptions est d'origine privée, car émanant d'associations au sens des art. 60 ss CC, et que leur nature peut être considérée comme une « soft law », il n'en reste pas moins que certaines de ces prescriptions ont été reprises dans la LEne.

5) Les recourants reprochent au Conseil d'État de ne pas les avoir mis au courant ni consultés au sujet des modifications contestées et de leur date d'entrée en vigueur.

Ce grief, qui implicitement se rattache à la violation du droit d'être entendu des recourants lors du processus d'adoption des normes réglementaires considérées, est invoqué par rapport à l'absence d'une disposition transitoire à l'application de la norme contestée. L'autorité intimée ayant fait droit à la conclusion des recourants demandant la mise en place d'une période transitoire à l'application de la norme contestée, ce grief est devenu sans objet. Au surplus, les milieux immobiliers sont représentés dans la commission consultative sur les questions énergétiques, rattachée au département s'occupant de l'énergie (art. 3 al. 1 let. h du règlement de la commission consultative sur les questions énergétiques du 26 avril 1989 - RCCQE - L 2 30.08), chargée, en vue de favoriser la concertation entre les milieux intéressés, d'émettre des avis ou de formuler des propositions à l'intention du Conseil d'État sur les questions relatives à la politique cantonale de l'énergie, et dans celle du standard énergétique nommée par le Conseil d'État (art. 13A al. 1 let. d REn). Selon celui-ci, la commission citée a participé aux travaux de modifications réglementaires intervenues et a donné son aval à celles-ci. Ainsi, les intérêts des associations de propriétaires et promoteurs immobiliers ont été défendus par leurs représentants, auxquels il incombait, le cas échéant, de leur rendre compte de l'avancement des travaux quant aux modifications contestées.

Dans ces circonstances, le grief des recourants tiré du droit d'être entendu doit être écarté.

6) Lorsqu'elle se prononce dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes, la chambre constitutionnelle, à l'instar du Tribunal fédéral, s'impose une certaine retenue et n'annule les dispositions attaquées que si elles ne se prêtent à aucune interprétation conforme au droit ou si, en raison des circonstances, leur teneur fait craindre avec une certaine vraisemblance qu'elles soient interprétées ou appliquées de façon contraire au droit supérieur. Pour en juger, il lui faut notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits en cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante et des circonstances dans lesquelles ladite norme serait appliquée (ATF 140 I 2 consid. 4 ; 137 I 131 consid. 2 ; 135 II 243 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_862/2015 du 7 juin 2016 consid. 3 ; 1C_223/2014 du 15 janvier 2015 consid. 4 ; 2C_668/2013 du 19 juin 2014 consid. 2.2 ; ACST/7/2016 du 19 mai 2016 consid. 8 ; ACST/19/2015 du 15 octobre 2015 consid. 3 ; ACST/2/2014 du 17 novembre 2014 consid 5b). Le juge constitutionnel doit prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d'une application conforme - ou non - au droit supérieur. Les explications de l'autorité sur la manière dont elle applique ou envisage d'appliquer la disposition mise en cause doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard du droit supérieur dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, elle puisse se révéler inconstitutionnelle ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait (ATF 140 I 2 consid. 4 ; 134 I 293 consid. 2 ; 130 I 82 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_862/2015 précité consid. 3 ; 1C_223/2014 précité consid. 4).

7) Selon les recourants, l'art. 12P al. 2 REn ne pouvait pas être adopté sans la modification de l'art. 15 al. 2 LEn. En limitant le choix des énergies renouvelables à la seule énergie solaire, le Conseil d'État aurait non seulement violé le principe de la légalité, mais aussi celui de la proportionnalité.

Ce faisant, les recourants reprochent, en réalité, au Conseil d'État d'avoir violé le principe de la séparation des pouvoirs.

Le principe de la séparation des pouvoirs est garanti au moins implicitement par toutes les constitutions cantonales ; dans le canton de Genève, il l'est explicitement par l'art. 2 al. 2 Cst-GE. Il impose le respect des compétences établies par la Constitution fédérale et interdit à un organe de l'État d'empiéter sur les compétences d'un autre organe. En particulier, il interdit au pouvoir exécutif d'édicter des dispositions qui devraient figurer dans une loi, si ce n'est dans le cadre d'une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 142 I 26 consid. 3.3 ; 138 I 196 consid. 4.1 ; 134 I 322 consid. 2.2 ; 130 I 1 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_251/2014 du 21 juillet 2014 consid. 2.2). Toutefois, la loi ne peut et ne doit pas contenir tous les détails, mais seulement les règles essentielles et les principaux droits et obligations, la mise en oeuvre, soit l'exécution, étant, quant à elle, de la compétence de l'exécutif (David HOFMANN, Le Conseil d'État dans la constitution genevoise du 14 octobre 2012, in David HOFMANN / Fabien WAELTI [éd.], Actualités juridiques de droit public 2013, 2013, p. 142).

À Genève, le Grand Conseil exerce le pouvoir législatif (art. 80 Cst-GE) et adopte les lois (art. 91 al. 1 Cst-GE), tandis que le Conseil d'État, détenteur du pouvoir exécutif (art. 101 Cst-GE), joue un rôle important dans la phase préparatoire de la procédure législative (art. 109 al. 1 à 3 et 5 Cst-GE), promulgue les lois (art. 109 al. 4 phr. 1 Cst-GE) et est chargé de leur exécution et d'adopter à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 phr. 2 Cst-GE). Il peut ainsi adopter des normes d'exécution, secondaires, sans qu'une clause spécifique dans la loi soit nécessaire (David HOFMANN, op. cit., p. 140). Celles-ci peuvent établir des règles complémentaires de procédure, préciser et détailler certaines dispositions de la loi, éventuellement combler de véritables lacunes. Elles ne peuvent en revanche pas, à moins d'une délégation expresse, poser des règles nouvelles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles sont conformes au but de la loi (ATF 134 I 313 consid. 5.3 ; 130 I 140 consid. 5.1 ; 129 V 95 consid. 2.1 ; 124 I 127 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_251/2014 précité consid. 2.2 ; ATA/1587/2017 du 12 décembre 2017 et références citées). Pour que le Conseil d'État puisse édicter des normes de substitution, ou normes primaires, il faut qu'une clause de délégation législative l'y habilite, étant précisé que la constitution cantonale ne l'interdit pas et que la délégation doit figurer dans une loi au sens formel, se limiter à une matière déterminée et indiquer le contenu essentiel de la réglementation si elle touche les droits et obligations des particuliers (ATF 133 II 331 consid. 7.2.1 ; 132 I 7 consid. 2.2 ; 130 I 1 consid. 3.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_744/2014 du 23 mars 2016 consid. 7 ; ACST/11/2017 du 30 juin 2017 consid. 9 ; David HOFMANN, op. cit., p. 140 s.).

La Cst-GE pose ainsi le principe de la priorité et de la primauté de la loi formelle - acte normatif voté par le Grand Conseil et passible du référendum facultatif (art. 67 Cst-GE) - comme moyen d'action de l'État, ce qui restreint considérablement le pouvoir normatif du Conseil d'État ; le Grand Conseil est fondamentalement et institutionnellement l'organe compétent pour édicter les règles de droit un tant soit peu importantes (Michel HOTTELIER / Thierry TANQUEREL, La constitution genevoise du 14 octobre 2012, SJ 2014 II 341 ss, p. 353 s.). Le non-respect desdites compétences respectives du Grand Conseil et du Conseil d'État constitue une violation du principe de la séparation des pouvoirs. Ce principe interdit en effet à un organe de l'État d'empiéter sur les compétences d'un autre organe, en particulier au pouvoir exécutif d'édicter des dispositions qui devraient figurer dans une loi, si ce n'est dans le cadre d'une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 142 I 26 consid. 3.3 ; 138 I 196 consid. 4.1 ; 134 I 322 consid. 2.2 ; 130 I 1 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_251/2014 du 21 juillet 2014 consid. 2.2).

Pour le surplus, c'est à la lumière des principes constitutionnels généraux qu'il y a lieu de définir les limites de l'activité réglementaire du Conseil d'État. Bien que cela ne soit pas expressément prévu par la constitution cantonale, le Conseil d'État peut adopter des ordonnances de substitution dépendantes, lorsque le législateur le met au bénéfice d'une délégation législative, pour autant que celle-ci figure dans une loi au sens formel et que le cadre de la délégation, qui doit être clairement défini, ne soit pas dépassé (ATF 132 I 7 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_744/2014 du 23 mars 2016 consid. 7 ; 1C_251/2014 précité consid. 2.2). Les règles les plus importantes doivent en tout cas figurer dans la loi (ATF 133 II 331 consid. 7.2.1 ; 130 I 1 consid. 3.4.2).

8) a. En vertu de l'art. 89 Cst., qui correspond à l'art. 24octies de l'ancienne Constitution fédérale du 29 mai 1874 (aCst.), la Confédération fixe les principes applicables à l'utilisation des énergies indigènes et des énergies renouvelables et à la consommation économe et rationnelle de l'énergie (al. 2). Elle légifère sur la consommation d'énergie des installations, des véhicules et des appareils. Elle favorise le développement des techniques énergétiques, en particulier dans les domaines des économies d'énergie et des énergies renouvelables (al. 3). Les mesures concernant la consommation d'énergie dans les bâtiments sont au premier chef du ressort des cantons (al. 4). Les buts de la politique énergétique de la Confédération sont, d'une part, d'assurer un ravitaillement énergétique qui soit suffisant, diversifié dans ses sources, sûr et compatible avec les exigences de l'économie et de la protection de l'environnement et, d'autre part, de promouvoir une utilisation économe et rationnelle de l'énergie (Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1, p. 271).

La Confédération a matérialisé sa compétence globale de légiférer sur la consommation de l'énergie en édictant, en 1998, la LEne qui a pour but notamment une utilisation économe et efficace de l'énergie. L'art 45 du chapitre 8 de cette loi, consacré à l'utilisation économe et efficace de l'énergie, qui a repris la teneur de l'art. 9 LEne 1998, prévoit, s'agissant des bâtiments, que les cantons créent un cadre favorable à l'utilisation économe et efficace de l'énergie et à l'utilisation des énergies renouvelables. Ils soutiennent la mise en oeuvre de normes de consommation relatives à l'utilisation économe et efficace de l'énergie. À cet égard, ils évitent de créer des entraves techniques au commerce injustifiées (al. 1). Les cantons édictent des dispositions sur l'utilisation économe et efficace de l'énergie dans les bâtiments existants ou à construire. Dans la mesure du possible, ils donnent la priorité à l'utilisation économe et efficace de l'énergie et à l'utilisation des énergies renouvelables et des rejets de chaleur. Ils édictent notamment des dispositions sur la part maximale d'énergies non renouvelables destinées à couvrir les besoins en chauffage et en eau chaude ; les rejets de chaleur peuvent être pris en compte notamment dans la part d'énergies renouvelables (al. 3 let. a) et la production d'énergies renouvelables et l'efficacité énergétique (let. d). Ils édictent des prescriptions uniformes sur l'indication de la consommation énergétique des bâtiments (certificat énergétique des bâtiments). Ils peuvent décider que le certificat est obligatoire sur leur territoire et, le cas échéant, dans quelles conditions (al. 5). Les cantons se basent sur les exigences cantonales harmonisées pour édicter les dispositions au sens de l'art. 45 al. 3 LEne, notamment celles relatives à la part maximale d'énergies non renouvelables destinées à couvrir les besoins en chauffage et en eau chaude (let a. phr. 1) et à la production d'énergies renouvelables et l'efficacité énergétique (let. d ; art. 50 al. 1 OEne). En matière de consommation énergétique des bâtiments notamment, le MoPEC [2008] constitue un « paquet complet » de dispositions de réglementation énergétique que les cantons ont élaboré conjointement sur la base de leurs expériences d'exécution (Message du Conseil du 21 août 1996 concernant la loi sur l'énergie [ci-après : Message LEne 1996] ; FF 1996 IV 1012, p. 6963).

La loi sur l'énergie ne prévoit qu'un éventail minimal de mesures. Pour promouvoir une utilisation économe et rationnelle de l'énergie et l'emploi des énergies renouvelables, les cantons peuvent, à leur guise, prendre des mesures plus incisives ou complémentaires dans le cadre de la loi sur l'énergie et de ses prescriptions d'application. Ils peuvent ainsi renforcer les principes inscrits dans la loi, mais non pas les affaiblir (Message LEne 1996, p. 1081). Dans le message LEne 2016 concernant la révision de la LEne, le Conseil fédéral a réaffirmé que selon l'art. 89 al. 4 Cst., les prescriptions concernant le domaine des bâtiments étaient surtout édictées par les cantons. Dans la loi sur l'énergie, la Confédération s'adresse aux législateurs cantonaux, auxquels elle ne donne qu'un cadre pour certains aspects. Mais sur le fond, elle leur laisse une marge de manoeuvre considérable. Sur la plupart des points, elle signifie aux cantons qu'ils doivent assurer une réglementation, mais elle ne leur indique pas (en détail) comment ils doivent réglementer. Les cantons sont tenus de trouver, au moyen de leurs prescriptions, un juste équilibre entre des intérêts potentiellement contraires notamment dans le cadre de la protection des monuments. Les mesures énergétiques doivent tenir compte de la qualité du tissu urbain (Message LEne 2016, p. 6902). Les cantons élaborent une planification des énergies renouvelables dans les plans directeurs sur l'énergie. La LEne n'impose pas de « quota d'énergies renouvelables » que les cantons devraient réserver sur leur territoire. Un certain flou demeure sur les types d'énergies renouvelables qui doivent faire l'objet d'une planification et sur l'étendue de cette planification (Mathieu SIMONA, Les conséquences de la Loi sur l'énergie du 30 septembre 2016 pour les cantons, in Jusletter du 19 décembre 2016, p. 5).

b. Selon le MoPEc 2014, les installations techniques du bâtiment doivent être construites ou - dans le cas de rénovations - renouvelées, et exploitées selon l'état de la technique. Le champ de compétences des cantons ne se limite pas à celui de l'exécution : les cantons sont également les principaux responsables de la législation matérielle en matière de consommation d'énergie dans les bâtiments, un domaine dans lequel la Confédération n'assume qu'une compétence subsidiaire. Les bâtiments et les installations, ainsi que leurs équipements, doivent être conçus et réalisés de manière à garantir une utilisation économe et rationnelle de l'énergie. Dans la mesure du possible, les rejets de chaleur et les énergies renouvelables doivent être exploités (art.1.12 al. 1 MoPEC 2014). Le montage d'un nouveau chauffe-eau électrique direct pour la production d'eau chaude sanitaire ou le remplacement d'un tel appareil ne devrait être autorisé dans les habitations que si l'eau chaude sanitaire était chauffée au moins à 50 % avec des énergies renouvelables ou des rejets thermiques (art. 1.16 al. 2 let. b MoPEC 2014).

c. À Genève, la LEn a pour but notamment de déterminer les mesures visant à l'utilisation rationnelle et économe de l'énergie et au développement prioritaire de l'exploitation des sources d'énergies renouvelables et indigènes (art. 1 al. 2). Selon l'art. 6 al. 1 LEn, sont considérées comme des énergies renouvelables l'énergie hydraulique, l'énergie solaire, l'énergie géothermique, la chaleur ambiante, l'énergie éolienne ainsi que l'énergie tirée de la biomasse et des déchets de biomasse.

Le règlement fixe les prescriptions et les standards énergétiques applicables en matière notamment de préparation d'eau chaude sanitaire (art. 14 al. 1 let. b LEn), d'éclairage (let. d) et de chauffage et de climatisation (let. e). L'art. 15 LEn, qui prévoit des prescriptions en matière de construction et de rénovation, a la teneur suivante : les prescriptions minimales fixées par le règlement dans les domaines régis par l'article 14 al. 1 LEn sont respectées lors de la construction, de l'équipement et de l'exploitation d'un nouveau bâtiment ou de l'extension d'un bâtiment existant. Ils respectent des standards de haute performance énergétique (art. 15 al. 1 LEn). Tout nouveau bâtiment ou toute extension d'un bâtiment existant sont en principe équipés de capteurs solaires thermiques, lesquels couvrent au minimum 30 % des besoins de chaleur admissibles pour l'eau chaude sanitaire. Le règlement prévoit des exceptions, notamment lorsque ces besoins sont couverts par d'autres énergies renouvelables, ou en cas de toiture mal orientée, de locaux inoccupés pendant l'été ou de faible besoin en eau chaude sanitaire en raison notamment de l'affectation de l'immeuble (al. 2). L'art. 15 al. 3 LEn stipule que le règlement peut prévoir des exceptions aux alinéas 1 et 2 de l'art. 15 LEn. Les prescriptions minimales fixées par le règlement dans les domaines régis par l'art. 14 al. 1 LEn sont applicables à toute rénovation de bâtiments et d'installations (art. 15 al. 4 LEn). Lors de la rénovation de toitures de bâtiments, des capteurs solaires thermiques sont posés, lesquels couvrent au minimum 30 % des besoins de chaleur admissibles pour l'eau chaude sanitaire (art. 15 al. 5 LEn). L'art. 15 al. 6 LEn prévoit que le règlement prévoit des exceptions à l'art. 15 al. 4 et 5 LEn, notamment lorsque la pose de capteurs solaires est financièrement disproportionnée, soit en raison des caractéristiques de l'immeuble, ou en cas de toiture mal orientée, de locaux inoccupés pendant l'été ou de faible besoin en eau chaude sanitaire en raison, notamment, de l'affectation de l'immeuble. Dans de tels cas, des solutions de remplacement sont cherchées chaque fois que c'est possible.

Le Conseil d'Étatarrête les dispositions nécessaires à l'exécution de la LEn (art. 25 LEn).

9) En l'espèce, l'art. 15 al. 2 LEn (bâtiments neufs) et l'art. 15 al. 5 LEn (rénovation de bâtiments) posent le principe de l'installation obligatoire des capteurs solaires thermiques dans tout nouveau bâtiment et extension de bâtiment et dans un bâtiment existant rénové. La question qui se pose, en termes de rang normatif, est de savoir si la disposition règlementaire contestée, soit l'art. 12P al. 2 REn, ne fait qu'expliciter les conditions de l'art. 15 LEn, en tant que norme secondaire, ou si elle impose des contraintes nouvelles, établissant ainsi des normes primaires.

Pour les nouveaux bâtiments et les extensions de bâtiments existants, l'art. 15 al. 2 LEn, fixe le principe selon lequel tout nouveau bâtiment ou extension d'un bâtiment existant doit être en principe équipé de capteurs solaires thermique pour produire au moins 30% des besoins en eau chaude sanitaire. Le règlement peut prévoir des exceptions à cette obligation, notamment si les besoins en eau chaude sanitaire sont couverts par d'autres énergies renouvelables, ou en cas de toiture mal orientée ou de locaux inoccupés pendant l'été ou de faible besoin en eau chaude sanitaire. En d'autres termes, le règlement ne peut qu'autoriser des exceptions à l'obligation d'équiper la toiture avec des capteurs solaires thermiques pour l'eau chaude sanitaire et ceci pour autant qu'une situation particulière le justifie, soit notamment (mais pas exclusivement) le fait que les besoins en eau chaude sanitaire soient couverts par d'autres énergies renouvelables.

Or, si l'art. 12P al. 1 REn est conforme à l'art. 15 al. 2 LEn en rappelant la possibilité de déroger à la pose de capteurs solaires thermiques, l'art. 12P al. 2 REn contrevient aux exceptions énumérées par la loi, prenant son contre-pied en prévoyant que le recours à d'autres énergies renouvelables ne constitue pas une exception à la pose de capteurs solaires thermiques. Ce faisant, l'art. 12P al. 2 REn rend obligatoire la pose de capteurs solaires thermiques en écartant la possibilité d'avoir recours à d'autres énergies renouvelables (celles-ci ne constituant « pas une exception ») alors même que la loi prévoit que l'on peut faire exception à l'obligation de poser des capteurs solaires thermiques « si les besoins sont couverts par d'autres énergies renouvelables ». Ce faisant, l'art 12P al. 2 REn pose une norme primaire, de surcroit contraire au texte même de l'art. 15 al. 2, 2ème phrase LEn.

La disposition attaquée peut être ainsi qualifiée de norme primaire. Elle institue une obligation nouvelle imposée aux propriétaires et aux promoteurs immobiliers en cas de construction d'un nouveau bâtiment ou d'extension d'un bâtiment existant, d'installer des capteurs solaires thermiques, sans qu'il soit possible de se dispenser de cette obligation en ayant recours à d'autres énergies renouvelables, réduisant ainsi les possibilités d'exceptions pourtant prévues par l'art. 15 al. 2 LEn.

Dans ces circonstances, il apparaît que, par l'adoption de l'art. 12P al. 2 REn, le Conseil d'État a limité le choix des propriétaires et des promoteurs immobiliers d'un nouveau bâtiment ou de l'extension d'un bâtiment existant d'avoir recours à d'autres énergies renouvelables que les capteurs solaires thermiques. La modification contestée viole par conséquent le principe de la séparation des pouvoirs. Le grief des recourants est dès lors fondé de ce point de vue.

La rédaction de l'art. 12P al. 2 REn, qui écarte spécifiquement les autres énergies renouvelables, ne permet aucune interprétation conforme. Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours et à l'annulation de l'art. 12P al. 2 REn.

10) Vu l'issue donnée au litige, aucun émolument ne sera mis à la charge des recourants (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera accordée aux recourants à la charge de l'État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 juillet 2019 par Monsieur A______, la b______ et la C______ contre le règlement du 5 juin 2019 modifiant le règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01) ;

au fond :

l'admet ;

annule l'art. 12P al. 2 du règlement du 5 juin 2019 modifiant le règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01).

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Monsieur A______, à la B______ et à la C______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à la charge de l'État de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me François Bellanger, avocat des recourants, ainsi qu'au Conseil d'État.

Siégeant : M. Verniory, président, M. Pagan, Mmes Lauber et McGregor, M. Knupfer, juges.

Au nom de la chambre constitutionnelle :

le greffier-juriste :

 

 

 

I. Semuhire

 

 

le président siégeant :

 

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :