Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/143/2025 du 04.02.2025 sur JTAPI/876/2024 ( PE ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/2449/2024-PE ATA/143/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 4 février 2025 2ème section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Fiduciaire B______ Sàrl, mandataire
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé
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Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2024 (JTAPI/876/2024)
A. a. Par décision du 18 juin 2024, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a rejeté la demande formée par A______.
b. Le 18 juillet 2024, Fiduciaire B______ Sàrl (ci-après : la fiduciaire), agissant pour A______, a saisi le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) d’un recours contre cette décision.
c. Par courrier recommandé du 22 juillet 2024, le TAPI a réclamé à A______, à l’adresse de la fiduciaire, le paiement d’une avance de frais de CHF 500.- dans un délai échéant le 21 août 2024, sous peine d’irrecevabilité.
d. Il ressort du système de suivi des envois de la poste que ce courrier a été remis le 2 août 2024 à 12h07 à C______, pour le compte de la fiduciaire.
e. Par jugement du 6 septembre 2024, le TAPI, constatant que l’avance de frais n’avait pas été effectuée dans le délai, a déclaré le recours irrecevable.
Ce jugement a été notifié le 12 septembre 2024 à B______, pour le compte de la fiduciaire.
B. a. Par acte remis à la poste le 7 octobre 2024, A______, représenté par la fiduciaire, a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) concluant à la régularisation de sa situation.
Il remplissait les conditions requises quant à son intégration en Suisse, aussi bien sur le plan professionnel que social.
La demande d’avance de frais lui avait bien été envoyée par courriel, mais celui‑ci avait malheureusement été reçu dans ses courriers indésirables.
b. Le 7 novembre 2024, l’OCPM s’en est rapporté à justice.
c. A______ n’a pas répliqué dans le délai imparti au 12 décembre 2024.
d. Le 16 décembre 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le recours ne contient pas de conclusions formelles.
2.1 Selon l'art. 65 al. 1 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d'irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA). Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant, pourvu que la chambre administrative et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/533/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b ; ATA/29/2016 du 12 janvier 2016 consid. 2b).
2.2 En l'occurrence, même si le recourant ne prend pas expressément de conclusions formelles, se contentant de demander la régularisation de sa situation, il fait valoir qu’il n’aurait pas reçu la demande d’avance de frais de sa mandataire, par quoi il faut comprendre qu'à la suite de la décision d'irrecevabilité rendue par le TAPI, il souhaite voir les effets de cette décision annihilés et le bien-fondé de son recours examiné.
3. Est litigieux le jugement du TAPI du 6 septembre 2024 déclarant irrecevable le recours pour défaut de paiement d'avance de frais.
3.1 L’exigence de l’avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non‑paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d’organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).
3.2 En vertu de l’art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l’avance n’est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).
3.3 Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 1re phr. LPA). Lorsque l’adresse du destinataire est inconnue, la notification a lieu par publication (art. 46 al. 4 1re phr. LPA).
Lorsque l’autorité de recours notifie une décision à l’adresse indiquée par un recourant, qui connaissait l’existence de la procédure pour l’avoir initiée par son recours, le délai de paiement de l’avance de frais est imparti conformément aux règles légales et principes jurisprudentiels (ATA/475/2016 du 7 juin 2016 consid. 4). Dès lors qu’un administré a déposé un recours, il se doit en effet de prendre toutes les dispositions utiles afin de réceptionner les communications qui vont immanquablement lui parvenir en rapport avec ce contentieux.
3.4 À rigueur de texte, l’art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d’appréciation à l’autorité judiciaire saisie (ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c).
3.5 Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l’accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2).
3.6 Il n’y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d’une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l’inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2). La gravité des conséquences d’un retard dans le paiement de l’avance sur la situation du recourant n’est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2).
3.7 Selon la jurisprudence constante, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/158/2020 du 11 février 2020 ; ATA/38/2020 du 14 janvier 2020 ; ATA/636/2017 du 6 juin 2017 consid. 4b et les références citées).
3.8 A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un détenu, qui disposait d’un délai de recours de trois jours, n’ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu’il ne pouvait le poster lui-même et qu’en outre ce pli avait été soumis à la censure de l’autorité (ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s’acquitter d’une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne restait qu’une semaine au justiciable pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5).
En revanche, n’ont pas été considérés comme des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l’ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b), le fait qu’un avocat ait transmis à son client la demande d’avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6), pas plus que la maladie, celle-ci n’étant admise comme motif d’excuse que si elle empêche le recourant d’agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c). Même une incapacité de travail totale, qui perdurerait encore, n’exclut pas une simple activité administrative (arrêts du Tribunal fédéral 2C_300/2017 du 27 mars 2017 consid. 3.2.4 ; 2C_1212/2013 du 28 juillet 2014 consid. 6.3), tendant à confier à un mandataire externe la défense de ses intérêts dans une procédure en restitution du délai (arrêt du Tribunal fédéral 2F_33/2020 du 22 décembre 2020 consid. 4).
3.9 En l’espèce, il n’est pas contesté que le délai imparti par le TAPI pour le paiement de l’avance de frais était suffisant, ni que la mandataire du recourant a reçu la demande d’avance de frais.
Le recourant fait valoir que le courrier par lequel sa mandataire lui a transféré la demande d’avance de frais aurait été reçu par erreur dans ses courriels indésirables.
Il ne détaille ni ne documente cette affirmation.
Cela étant, cette circonstance ne saurait être considérée comme un cas de force majeure. Le recourant devait s’attendre à recevoir une demande d’avance de frais au domicile élu auprès de sa mandataire. Il lui appartenait de se tenir informé, en vérifiant non seulement sa boîte de réception mais aussi les courriels indésirables, voire en prenant contact avec sa mandataire pour s’enquérir de la demande d’avance de frais. Les défauts affectant l’organisation du mandataire ou la communication entre celui-ci et le justiciable (ATA/596/2009 précité) ne sont pas constitutifs d’un cas de force majeure.
C’est ainsi de manière conforme au droit que le TAPI a prononcé l’irrecevabilité du recours pour défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.
4. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 7 octobre 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Fiduciaire B______ Sàrl, mandataire du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html
Recours en matière de droit public | Recours constitutionnel subsidiaire |
Art. 82 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours : a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ; … Art. 83 Exceptions Le recours est irrecevable contre : … c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent : 1. l’entrée en Suisse, 2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit, 3. l’admission provisoire, 4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi, 5. les dérogations aux conditions d’admission, 6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ; d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues : 1. par le Tribunal administratif fédéral, 2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ; … Art. 89 Qualité pour recourir 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ; b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. … Art. 95 Droit suisse Le recours peut être formé pour violation : a. du droit fédéral ; b. du droit international ; c. de droits constitutionnels cantonaux ; d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ; e. du droit intercantonal. Art. 100 Recours contre une décision1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ______________________________________________ | Art. 113 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89. Art. 115 Qualité pour recourir A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Art. 116 Motifs de recours Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels. Art. 100 Recours contre une décision 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ___________________________________________
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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)
1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.
3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.