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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2331/2023

ATA/1265/2024 du 29.10.2024 sur JTAPI/357/2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;TRAVAUX DE CONSTRUCTION;TRAVAUX SOUMIS À AUTORISATION;PERMIS DE CONSTRUIRE;AUTORISATION PRÉALABLE;EXCEPTION(DÉROGATION);AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);ZONE À PROTÉGER;4E ZONE B;INTÉGRATION DANS LE PAYSAGE;PROTECTION CONTRE LE BRUIT;BRUIT DU TRAFIC
Normes : LCI.5; LCI.106.al1; LCI.146; LAT.14; LAT.17.al1.letc; LaLAT.12.al5; LaLAT.19.al2; LaLAT.29
Résumé : Recours d’un couple propriétaire et usufruitier d’une parcelle adjacente à celles de la commune et sur lesquelles cette dernière a obtenu une autorisation préalable de construire au centre du village. Dans la mesure où, contrairement à ce que soutiennent les recourants, l’art. 106 al. 1 LCI est applicable même si aucune dérogation n’est nécessaire, qu’il n’est pas démontré qu’ils devront subir des inconvénients graves, que la chambre de céans n’a pas à substituer sa propre appréciation à celle des entités composées de spécialistes quant à la proportionnalité du projet et enfin que la question de l’imperméabilisation des sols sera examinée dans le cadre de la demande définitive de construire, le recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2331/2023-LCI ATA/1265/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 octobre 2024

3ème section

 

dans la cause

A_______ et B______ recourants
représentés par Me François BELLANGER, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

COMMUNE DE C______ intimés
représentée par Me Lucien LAZZAROTTO, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 avril 2024 (JTAPI/357/2024)


EN FAIT

A. a. A______ et B______ sont, respectivement, propriétaire et usufruitier de la parcelle n° 2'355 de la commune de C______ (ci-après : la commune), à l’adresse1______, route de D______, où ils demeurent.

La commune est propriétaire des parcelles nos 2'735 et 2'919, adjacentes à la parcelle précitée, ainsi que de la parcelle n° 902, sises 2______, route de D______. Ces parcelles sont situées presque totalement en zone 4B protégée. Seuls 34 m² de la parcelle n° 2'919 se trouvent en zone agricole.

B. a. Le 21 février 2023, l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC), rattaché au département du territoire (ci-après : le département ou DT), a accusé réception d’une demande d’autorisation de construire préalable déposée par la commune et portant sur la « Construction d’une salle pour le conseil municipal et de locaux associatifs et polyvalents avec réfectoire – rénovation et changement d’affectation d’une habitation et d’un atelier – aménagement d’une place publique – réaménagement du stationnement » sur ses parcelles précitées. Cette demande a été enregistrée sous le n° DP 3______. En lien avec cette demande, la commune a sollicité une autorisation de démolir enregistrée sous le n° M 4______. Le département a autorisé cette démolition le 13 juin 2023.

a.a. Dans le cadre de l’instruction de la DP 3______, les instances suivantes ont notamment été consultées :

- l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) et l’office cantonal de l’eau (ci-après : OCEau) ont préavisé favorablement le projet, sous conditions, respectivement les 27 mars et 3 avril 2023 ;

- le 6 mars 2023, le service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci‑après : SABRA) a préavisé favorablement le projet, sous conditions : le cadre légal de la protection de l’air devait être respecté s’agissant de la cuisine indiquée sur les plans (COD-1) ; le maître d’ouvrage devait s’assurer du respect des exigences de la norme SIA 181/2020 (COD-2) ; en cas de mise en place d’installation fixe produisant du bruit vers l’extérieur, le requérant devrait produire un rapport acoustique démontrant que le cadre légal de la protection contre le bruit était respecté au droit des locaux sensibles au bruit les plus exposés (COD-3) ;

- la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) s’est prononcée à deux reprises :

- le 2 mars 2023, elle a préavisé favorablement le projet, avec dérogations en application de l’art. 27 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), s’agissant d’aménagements hors zone à bâtir, et de l’art. 106 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), dès lors que le projet dérogeait aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, ainsi que les distances aux limites de propriétés et les vues droites. Sous la rubrique « Divers », elle a notamment indiqué : « M 4______ en cours ; projet de servitude de distance et de vue droite grevant les parcelles nos 2'421 et 2'355, établi le 18. 01. 2023 par E______ ingénieurs géomètres SA » ;

- le 5 mai 2023, elle a émis un préavis identique au précédent, sous réserve de la mention au projet de servitude qu’elle a supprimée ;

- l’office cantonal des transports (ci-après : OCT), s’est prononcé à deux reprises :

- le 13 mars 2023, il a demandé un projet modifié, soit la création d’une place pour personne à mobilité réduite (ci-après : PMR) en surface (MOD-1) ; la mise en cohérence du formulaire N03 – qui indiquait la création de huit places vélo, trois places dépose-minute et la suppression de quinze places en surface – avec le plan de masse N06 qui indiquait la création de cinq places de stationnement, la conservation de trois places, dont deux devenaient des places dépose-minute, la création d’une place de livraison et de dix places vélo (DOC-1) ; la production d’une analyse démontrant la capacité du parking souterrain à compenser la suppression des places de stationnement en surface (DOC-2) ;

- le 1er juin 2023, il a émis un préavis favorable, à la condition qu’une attention particulière soit portée à l’interface entre le trottoir et l’entrée du parking souterrain par un traitement spécifique du revêtement, puisque le secteur verrait davantage de piétons dû à l’élargissement du trottoir qui risquaient de se trouver en conflit avec les véhicules souhaitant accéder aux espaces de stationnement (souterrain et en surface) ;

- la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) s’est prononcée à deux reprises :

- le 3 avril 2023, elle a préavisé favorablement le projet, avec dérogations et sous conditions. La volumétrie générale du projet étant en adéquation avec l’échelle des bâtiments environnants, elle n’était pas opposée à l’octroi de la dérogation selon l’art. 106 LCI nécessaire à la faisabilité du projet (distances et vues droites, distances entre bâtiments insuffisantes). Le projet était situé dans la zone 4B protégée de C______, périmètre protégé au sens des art. 105 ss LCI et le déplacement des délégués, qui s’étaient rendus sur place pour une visite des bâtiments et des abords, avait permis de mieux évaluer l’impact des interventions sur le site et la substance bâtie des deux édifices prévus maintenus. Le projet intervenait sur une parcelle communale située au cœur du village, à mi-chemin entre la place du temple et les bâtiments scolaires, en second front à l’arrière du tissu ancien organisé le long de la route de D______. Le projet s’inscrivait dans une démarche ayant pour objet la transformation de bâtiments existants ayant reçu la valeur « intéressant » au recensement architectural cantonal et la construction de deux bâtiments d’utilité publique, ainsi que la création d’une place et divers espaces publics venant lier l’ensemble. Considérant les spécificités du contexte, la commission appréciait l’intention de développer un projet d’activité publique au cœur du village, de réaffecter des bâtiments anciens avec une valeur à la fois patrimoniale, historique et sociétale, et de favoriser une circulation piétonne en second front. Concernant les nouvelles constructions, le projet répondait aux objectifs d’intégration dans le site par une implantation et une volumétrie en adéquation avec l’échelle des bâtiments environnants. Dès lors, la commission n’avait pas d’objection à formuler, à condition d’intégrer la déchetterie et l’abri vélo dans l’étude du projet définitif afin de revaloriser l’espace public et d’éviter la prolifération d’éléments étrangers au caractère villageois, au profit d’un espace public épuré. Enfin, si elle était favorable « au principe de l’intervention déposé en demande préalable (implantation, destination, gabarit, volumétrie des bâtiments et dévestitures) », elle précisait que les questions relatives à l’aspect, l’expression architecturale, les matériaux, les transformations intérieures et les aménagements extérieurs seraient étudiées dans le cadre de la demande définitive ;

- le 30 mai 2023, elle a émis un préavis, favorable, avec dérogations et sous conditions, dont la teneur est quasi identique au précédent, ajoutant que, dans la mesure où le projet nécessitait un complément de dérogation à l’art. 106 LCI, elle était amenée à revoir le dossier et réitérait le contenu de son préavis du 3 avril 2023 ;

- les 3 avril et 30 mai 2023, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS), renvoyant aux préavis de la CMNS, a émis des préavis favorables sous conditions, avec dérogations au sens de l’art. 106 LCI ;

- l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) s’est prononcé à deux reprises :

- le 21 mars 2023, il a demandé un projet modifié. Saluant la qualité du dossier qui lui était soumis, y compris les documents historiques, il considérait que le principe de rénovation de la « Maison F______ » ne posait pas de problème particulier. Le maintien et l’intégration dans le bâtiment de la rampe du parking souterrain était un moyen de réduire sa visibilité, même si la casquette actuelle permettait une lecture d’un petit édicule. Le principe de développement de deux bâtiments en arrière de front bâti semblait pertinente. Néanmoins, la présence de stationnement en surface (côté est) rendait très imperméable le secteur. De plus, la proximité de la « Maison G______ » côté fontaine rendait peu lisible le dégagement souhaité. Il souhaitait que les surfaces de stationnement en surface, côté est, soient réduites afin de permettre un alignement entre les deux maisons prévues, et un aménagement plus végétal de ce secteur. Une synergie avec les places de stationnement en souterrain à proximité devait être recherchée, afin de limiter les emprises imperméables. Sous rubrique « Remarques », il a indiqué que le plan de servitude n’était pas signé et donc pas en force ;

- le 19 mai 2023, il a demandé un projet modifié, maintenant la demande de réduction du stationnement en surface, côté est, afin de conserver un angle perméable tout comme un dégagement d’espace public sur l’arrière de la parcelle. L’aménagement devait être plus végétal dans ce secteur afin de faire la liaison avec la propriété voisine. L’accès à ces places de stationnement n’était pas garanti, la servitude n’étant pas en force. Une synergie avec les places de stationnement en souterrain à proximité devait être recherchée, afin de limiter les emprises imperméables. Il a également repris la remarque figurant sur le préavis précité.

Ce dernier préavis contient une mention à teneur de laquelle l’analyse effectuée par l’OAC avait conduit cet office à le considérer comme favorable, avec souhaits.

b.a. Le 27 mars 2023, dans le cadre de l’enquête publique relative à la DP 3______, les époux A______ B______ ont présenté leurs observations.

Le projet prévoyait la construction d’un bâtiment, soit la « Maison G______ », en limite de leur propriété et nécessitait la constitution d’une servitude de distance et de vue droite sur leur parcelle à laquelle ils s’opposeraient. Quant à la « Maison H______ », conçue sur deux niveaux, dont le volume complet de toiture d’une élévation de 13.81 m, elle était prévue à 7.95 m de la limite de leur propriété et n’était pas non plus compatible avec le caractère général des bâtiments du secteur. Enfin, l’affectation des futurs bâtiments n’était pas compatible avec la zone, compte tenu des nuisances en terme de bruit et de circulation que le projet pouvait engendrer.

b.b Le 4 avril 2023, l’OAC a informé le mandataire de la commune qu’au vu des observations des époux A______ B______, force était de constater que le projet de servitude ne pourrait pas être instrumenté. Ce point, avec ce qui en découlait, devait impérativement être pris en compte. Un délai de 30 jours lui était imparti pour modifier le projet si la commune le souhaitait et transmettre les compléments et pièces utiles aux instances de préavis.

c. Le département a accordé l’autorisation préalable sollicitée le 13 juin 2023. Les conditions prévues dans les préavis devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de la décision. L’autorisation a été publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève du même jour.

C. a. Par acte du 11 juillet 2023, les époux A______ B______ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Ils ont invoqué la violation des art. 34 et 45 LCI. Il ressortait des plans visés ne varietur que la « Maison G______ » avait une hauteur de gabarit de 8.46 m. La distance minimale de 7.46 m, calculée selon l’art. 34 al. 1 LCI, entre cette construction et la limite de leur propriété n’était manifestement pas respectée. De plus, l’art. 106 LCI mentionné dans la décision litigieuse n’était pas applicable pour justifier une telle dérogation car le préavis de la commune faisait défaut. Le préavis de la CMNS était également muet à ce sujet, alors qu’une dérogation de cette importance nécessitait une détermination formelle. Aucune autorité n’avait examiné cette disposition légale. Les conditions d’octroi d’une dérogation n’étaient ainsi pas remplies. L’OU avait d’ailleurs réclamé à deux reprises la confirmation de l’octroi d’une servitude de distance et de vue droite et il ressortait du courrier du 3 avril 2023 adressé au mandataire par l’OAC que le projet de servitude ne pourrait pas être instrumenté. Ce courrier était « la reconnaissance que la seule solution légale envisageable » était la constitution d’une servitude, faute de quoi, l’autorisation ne pouvait qu’être refusée. La commune elle-même avait déposé un plan de servitude. Faute de servitude, l’autorisation aurait dû être refusée. Or, sur la seule base d’un plan cadastral, visé par la suite ne varietur, sur lequel la servitude avait été biffée sans la moindre justification, l’autorisation litigieuse avait été délivrée. L’OAC avait également, de manière arbitraire, « transformé » la demande de complément de l’OU du 19 mai 2023 en préavis favorable.

Le projet contrevenait à l’art. 19 al. 2 LaLAT dès lors que les futurs bâtiments, destinés à recevoir un nombre important de personnes, allaient générer un trafic automobile élevé, causant d’importantes nuisances incompatibles avec une zone d’habitation. Enfin, alors que le nouveau plan de stationnement déposé le 5 mai 2023 ne répondait pas à sa demande de modification du 13 mars 2023, l’OCT avait émis un préavis favorable, sous conditions, le 1er juin 2023. Ce nouveau plan n’avait toutefois pas été visé ne varietur dans l’autorisation litigieuse. Il n’y avait pas de plan de stationnement. Seul le plan original du 27 janvier 2023 traitait de cette question. Le plan adopté avec l’autorisation ne correspondait ainsi pas au préavis de l’OCT et ne répondait pas à ses demandes, compte tenu notamment de l’absence de places PMR. Rien ne justifiait le maintien d’autant de places en surface, à proximité immédiate de leur parcelle, alors que le parking communal n’était jamais rempli. Aucune explication n’avait d’ailleurs été fournie à cet égard et l’OCT ne semblait pas avoir examiné cette question. Force était ainsi de constater d’importantes informalités en lien avec la problématique du stationnement et la demande de complément de l’OU du 19 mai 2023.

b. Après que le DT et la commune se sont déterminés, les époux A______ B______ ont répliqué. Ils ont notamment soutenu que la dérogation de l’art. 106 LCI n’avait pas eu pour vocation de préserver le caractère architectural du village. Il s’était plutôt agit d’un « prétexte » pour déroger au régime légal ordinaire et densifier à l’excès la parcelle adjacente à la leur, en s’affranchissant de la nécessité d’obtenir des servitudes. En tout état, il paraissait absurde de soutenir que des constructions qui existaient depuis un siècle étaient problématiques du point de vue de la sauvegarde du caractère architectural du village et que leur remplacement par deux bâtiments modernes, surdimensionnés et en conflit avec le caractère du site, puisse y apporter une solution. Contrairement à la position de la CMNS, les futures constructions ne s’intégreraient pas dans le site.

c. Le 19 mars 2024, le TAPI a invité la commune à préaviser le projet et à se prononcer formellement sur l’octroi de la dérogation au sens de l’art. 106 LCI. La commune a préavisé favorablement le projet le 25 mars 2024.

d. Le 17 avril 2024, après que le département et la commune ont dupliqué, le TAPI a rejeté le recours.

Il n’était pas contesté que les parcelles concernées par le projet litigieux étaient situées en zone 4B protégée. Il n’était pas non plus contesté que les distances aux limites de propriétés n’étaient pas respectées. Dans la mesure où l’autorisation querellée avait été délivrée par le DT, à la suite de l’octroi d’une dérogation en vertu de l’art. 106 LCI, les arguments des époux en lien avec la violation des art. 34, 45 et 46 LCI étaient sans pertinence, la constitution d’une servitude de distance et de vue droite n’étant pas nécessaire. Il en allait de même de leurs griefs à l’égard des préavis évoquant la constitution d’une telle servitude.

La commune avait préavisé favorablement le projet, considérant que la dérogation en application de l’art. 106 LCI était justifiée. Le projet permettait à la fois de préserver le caractère architectural du village et de mettre à disposition des administrés des infrastructures utiles. En effet, l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions projetées respectaient le caractère et l’échelle de l’environnement bâti dans lequel le projet s’insérait harmonieusement. Pour sa part, la CMNS s’était rendue sur place pour une visite des bâtiments et de ses abords. Elle avait procédé à une analyse approfondie du dossier d’autorisation, avant de préaviser, par deux fois, favorablement le projet, donnant ainsi expressément son aval à l’octroi de la dérogation selon l’art. 106 LCI. La CMNS avait notamment apprécié la volonté de la commune de développer un projet d’activité publique au cœur du village, de réaffecter des bâtiments anciens avec une valeur à la fois patrimoniale, historique et sociétale, et de favoriser une circulation piétonne en second front. S’agissant des nouvelles constructions, elle avait considéré qu’elles s’intégraient dans le site, retenant que leur implantation et leur volumétrie étaient en adéquation avec l’échelle des bâtiments environnants. Les préavis de la CMNS avaient été suivis par les préavis favorables du SMS. Ces instances étant formées de spécialistes disposant des connaissances techniques requises à même d’évaluer les impacts du projet sur le site, leur préavis apparaissaient essentiels et rien ne laissait supposer qu’elles auraient pris en compte ou omis des éléments sans pertinence, ou qu’elles n’auraient pas procédé avec soin et diligence. Dans ces conditions, le TAPI n’avait pas à substituer sa propre appréciation à celle de ces entités.

Il ressortait du texte clair de l’art. 19 al. 2 LaLAT que des activités pouvaient être autorisées en zone 4. Quant à l’allégation du couple selon laquelle les futurs bâtiments induiraient un trafic automobile élevé, elle n’était nullement étayée et ne reposait que sur des conjectures. Le projet avait été soumis à l’OCT, instance spécialisée en la matière, qui avait émis un préavis favorable sans formuler de remarque à cet égard. En tout état, pour ce qui concernait le restaurant scolaire et les locaux parascolaires, il ne faisait aucun doute que les écoliers s’y rendraient à pied, l’école de la commune étant située à moins de 100 m, ce qui n’entrainerait aucune augmentation du trafic automobile. Quant aux activités en lien avec l’administration communale, même à admettre qu’elles induiraient une augmentation du trafic automobile, ce qui n’était pas démontré, elle ne dépasserait pas ce qui pouvait être qualifié de raisonnable et demeurerait compatible avec les caractéristiques de la zone. Il y avait ainsi lieu de retenir, conformément à la jurisprudence précitée, qu’un éventuel accroissement du trafic ne constituerait pas un inconvénient grave pour le voisinage. Au demeurant et comme déjà relevé dans d’autres affaires, le couple ne disposait pas d’un droit acquis à ce que la fréquentation de la route demeure telle quelle. Sous l’angle des nuisances sonores, aucun élément n’indiquait que les futures activités entraineraient nécessairement des nuisances supplémentaires et rien n’amenait à penser que celles‑ci seraient dans une mesure telle, qu’elles constitueraient des inconvénients graves. En l’état, une menuiserie se trouvait sur l’une des parcelles concernées et une telle activité générait un bruit conséquent. Le projet avait également été soumis à l’expertise du SABRA qui avait émis un préavis favorable, sous conditions. Il n’avait formulé aucune réserve quant au bruit engendré par les futures activités, se bornant à demander, en cas d’installation fixe produisant du bruit vers l’extérieur, comme une ventilation ou une pompe à chaleur, la production d’un rapport acoustique démontrant le respect des règles en matière de protection contre le bruit.

L’OU avait demandé la modification du projet considérant notamment que la présence du stationnement en surface, côté est, rendait très perméable le secteur et que la proximité de la « Maison G______ » du côté de la fontaine rendait peu lisible le dégagement voulu. Il souhaitait ainsi une réduction des surfaces de stationnement en surface afin de permettre un alignement entre les deux maisons prévues, un aménagement plus végétal du secteur, ainsi que la recherche d’une synergie avec les places de stationnement en souterrain à proximité pour limiter les emprises imperméables. Le 19 mai 2023, en dépit des explications fournies par la commune, il avait maintenu sa demande relative à la réduction du stationnement en surface, à un aménagement plus végétal du secteur et à la limitation des emprises imperméables.

D. a. Par acte du 21 mai 2024, les époux A______ B______ ont recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Ils ont conclu à son annulation et, cela fait, à celle de l’autorisation de construire.

Le TAPI devait s’imposer une certaine retenue lorsqu’il s’agissait de remettre en question les éléments relevant du pouvoir d’appréciation du département, soit, dans le cas d’espèce, lorsqu’il examinait si le projet respectait le caractère architectural et l’échelle de l’environnement bâti du village. En revanche, le TAPI n’était nullement limité dans sa cognition pour trancher la question de savoir si la dérogation avait été accordée en conformité avec le but, respectivement la ratio legis, de la loi. Si la CMNS avait constaté dans son préavis, suivi par le département, que les constructions litigieuses pourraient éventuellement s’intégrer dans le site, elle n’avait aucunement mentionné en quoi la dérogation au régime légal applicable serait nécessaire à la sauvegarde du site. En effet, le fait que le projet puisse hypothétiquement s’insérer harmonieusement dans le village grâce à une dérogation ne permettait pas encore de considérer que celle-ci s’imposait, la loi réservant expressément son caractère exceptionnel. Ils contestaient l’application de l’art. 106 al. 1 LCI en ce sens que le département et le TAPI avaient interprété cette disposition en contrariété avec son but. L’interprétation de cette disposition permettait d’aboutir au constat de la non-conformité de la décision litigieuse à celui‑ci.

L’art. 106 al. 1 LCI prévoyait la possibilité pour le département de fixer dans chaque cas particulier l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de manière à sauvegarder le caractère architectural et l’échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Une interprétation littérale révélait que le département disposait de cette compétence uniquement lorsque la sauvegarde du caractère architectural et l’échelle de l’environnement bâti du village ne pouvaient être garanties que par une dérogation au régime ordinaire. Cette interprétation était confortée par l’ajout, lors de l’adoption de la LCI le 14 avril 1988, de la seconde partie de l’al. 1 disposant que le département peut en conséquence, à titre exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues droites. Le mot « sauvegarde » n’avait pas été choisi au hasard par le législateur et témoignait d’une volonté de permettre la conservation du patrimoine bâti.

Les interprétations historique et systématique n’étaient pas pertinentes alors que l’interprétation téléologique était plus révélatrice. La chambre administrative avait retenu, dans un arrêt de 2006, qu’une dérogation aux règles générales de la LCI n’était possible, selon l’art. 106 al. 1 LCI, que si l’application des règles spéciales était imposée par les buts de protection pour lesquels elles avaient été édictées. En d’autres termes, l’art. 106 al. 1 LCI n’autorisait une dérogation aux disposition de la 4e zone et aux disposition générales de la LCI que si cette dérogation permettait d’assurer la sauvegarde du caractère architectural et l’échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Il en résultait que l’art. 106 al. 1 LCI s’appliquait dans l’hypothèse où un projet conforme au régime ordinaire de la 4e zone constituerait une atteinte excessive au caractère architectural et à l’environnement bâti du village, que seule une dérogation permettrait de sauvegarder. Il n’avait toutefois jamais été démontré ni soutenu qu’un projet conforme aux règles légales ordinaires constituerait une telle atteinte et qu’une dérogation selon l’art. 106 al. 1 LCI s’imposait ipso facto. De plus, il n’était pas démontré que la volumétrie et l’emplacement des constructions seraient dictés par un but de sauvegarde. Bien au contraire, la disproportion était manifeste entre les constructions existantes et celles projetées.

Au vu de sa nature, on ne pouvait qu’être choqué par l’inadéquation du projet aux définitions précitées et pourtant prétendument placé sous l’égide de la sauvegarde. La dérogation accordée ne poursuivait manifestement pas le but de « conserver » et de « maintenir intact » ou encore de « protection » et de « défense » pourtant consacrés par le but et le texte de la loi. Ce constat était confirmé par l’examen chronologique du dossier d’autorisation. En effet, l’art. 106 al. 1 LCI avait été évoqué a posteriori, une fois qu’ils avaient soulevé la problématique liée aux distances et vues droites dans leurs observations. Cette disposition avait dès lors été invoquée par opportunisme, au dernier moment, et seulement aux fins d’éluder la nécessité de constituer une servitude sur leur parcelle, alors que cet aspect devait « impérativement être pris en compte » aux dires même de l’OAC. La commune avait en outre prévu une servitude et un plan en conséquence.

Le préavis de la CMNS était très révélateur en ce qu’il indiquait qu’elle n’était pas opposée à l’octroi de la dérogation selon l’art. 106 al. 1 LCI nécessaire à la faisabilité du projet (distances et vues droites, distances entre bâtiments insuffisantes). Pourtant, une dérogation selon l’art. 106 al. 1 LCI devait être dictée et rendue nécessaire par un impératif de sauvegarde du caractère architectural d’un village et non dictée par les besoins impérieux d’un projet démesuré. Cela démontrait à nouveau que cette disposition avait été utilisée par pure convenance, en totale abstraction des buts de protection et de conservation pour lesquels elle avait pourtant été édictée. En d’autres termes, la dérogation en cause n’avait pas été octroyée pour sauvegarder le caractère architectural du village mais pour sauvegarder le projet litigieux après le constat de son infaisabilité. Le TAPI avait ainsi estimé à tort être lié par le pouvoir d’appréciation du département et des instances de préavis. Il disposait en effet d’un plein pouvoir de cognition sur l’interprétation du but de la loi et des griefs soulevés. L’octroi de la dérogation selon l’art. 106 al. 1 LCI était illégal. Dès lors, le projet ne respectait pas les distances aux limites de propriétés (art. 34 et 45 LCI), ce qui n’avait jamais été contesté et que le TAPI l’avait même confirmé.

Le projet n’était pas conforme à la 4e zone destinée principalement aux maisons d’habitation et dans laquelle des activités pouvaient être autorisées lorsqu’elles n’étaient pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage ou le public. Il fallait admettre, avec une vraisemblance confinant à la certitude, que le projet leur causerait des nuisances importantes et des inconvénients graves. Or, le TAPI avait estimé que rien n’indiquait que le projet engendrerait des nuisances et des inconvénients graves pour eux et qu’ils ne l’avaient pas démontré. Le TAPI s’était appuyé sur une jurisprudence qui précisait que la construction d’un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d’inconvénients graves, notamment s’il n’y a pas d’abus de la part du constructeur. Or, non seulement cette jurisprudence ne trouvait pas application ici, la construction de bâtiments d’activité n’étant pas conforme aux normes ordinaires applicables à la 4e zone, mais de plus les constructions dérogeaient au régime des distances par l’application de la dérogation (illégale) de l’art. 106 al. 1 LCI, étant rappelé que les bâtiments projetés, d’une volumétrie très largement supérieure aux bâtiments existants, seraient situés à quelques mètres seulement de leur parcelle.

En outre, le projet prévoyait un espace public en plein air, deux grands bâtiments d’activité, un parking souterrain et un parking en surface, sans compter la transformation de l’annexe de la menuiserie en grand espace polyvalent. Un restaurant scolaire et des activités parascolaires, une salle du conseil municipal et un espace piétonnier important ainsi qu’un espace déchetterie et des jeux pour enfants figuraient parmi les activités prévues. Cela laissait présager des nuisances sonores importantes, en journée comme en soirée.

Le TAPI leur avait reproché de ne pas être en mesure de démontrer un accroissement futur du trafic automobile. Une telle démonstration était difficile voire impossible à fournir sans effectuer une étude d’impact. Cette procédure étant essentiellement réservée aux projets de plus grandes envergures, il n’y avait pas lieu de leur en tenir rigueur. En tout état, les habitants de C______ étaient tributaires du mode de déplacement automobile, au vu de la desserte en transports publics et de la distance du village à la ville. La création de 1'420 m² de surface brute de plancher (ci-après : SBP) destinée à des activités ne pouvait qu’engendrer un accroissement majeur du trafic routier. En raison de leurs bonnes relations avec la commune, ils avaient plusieurs fois accepté des projets sans s’y opposer. Leur opposition au projet litigieux témoignait de l’ampleur excessive et de l’inconvénient majeur que celui-ci représentait à leurs yeux.

Ils avaient relevé en première instance que la procédure d’autorisation comprenait certaines informalités importantes quant à la question du traitement du stationnement et de la demande de complément de l’OU du 19 mai 2023.

Tout d’abord, ils avaient relevé que l’OCT avait émis, le 13 mars 2023, une demande de modification de projet mettant en cause notamment la création de cinq places de stationnement supplémentaires, de même que les indications figurant sur les plans. Le 5 mai 2023, un nouveau plan de stationnement avait été déposé par la requérante, sans modification du nombre de places. Les seuls changements étaient le remplacement d’une place de livraison par une place PMR et le décalage des deux places dépose-minute pour insérer la place livraison le long de la parcelle n° 2'355. Cela ressortait de la comparaison entre le plan original du 27 janvier 2023 et le plan modifié du 5 mai 2023. Ce dernier mentionnait la modification effectuée à la suite d’une demande complémentaire du préavis de l’OCT du 2 mars 2023. Sur la base de ce plan, l’OCT avait délivré un préavis positif, sous condition, le 1er juin 2023. Très curieusement, ce plan n’avait pas été visé ne varietur dans l’autorisation, qui ne comprenait pas de plan de stationnement. Le seul qui traitait de cette question était le plan original du 27 janvier 2023. En conséquence, le plan adopté avec l’autorisation ne correspondait pas au préavis de l’OCT et ne répondait pas à ses demandes, notamment l’absence de places PMR. Dans son jugement, le TAPI avait traité cette question de manière lapidaire. Restait que le plan liant pour l’autorisation, à savoir celui du 27 janvier 2023, visé ne varietur le 13 juin 2023 n’était pas le plan sur la base duquel l’OCT avait rendu son préavis favorable. La procédure d’autorisation avait donc été violée, le plan qui faisait foi étant celui du 27 janvier 2023 qui ne comprenait pas les modifications obligatoires exigées par l’OCT. Même si, comme l’avait retenu le TAPI, les plans modifiés et conformes avaient été présentés pour l’examen du projet, cela n’était pas déterminant, ces plans n’ayant pas été visés ne varietur.

Ensuite, il n’existait aucune motivation pour le maintien d’autant de places en surface, notamment à proximité immédiate de leur parcelle dès lors qu’il ressortait de la procédure que le parking commun n’était jamais rempli. La commune n’avait fourni aucune explication à ce sujet et l’OCT ne semblait pas avoir examiné la question. Le problème du stationnement en surface au regard de l’imperméabilisation des sols avait été soulevé par l’OU. Ce dernier avait demandé une modification du projet le 21 mars 2023 et requis une réduction des places de stationnement en surface côté Est afin de permettre un alignement des deux maisons prévues et un aménagement plus végétal de ce secteur. La commune n’ayant pas donné suite à cette demande, l’OU avait maintenu sa demande de complément le 19 mai 2023. L’OAC ne l’avait pas traitée et, de manière arbitraire, sans réelle motivation, il avait transformé cette demande pourtant essentielle en un préavis favorable, de manière à permettre la délivrance d’une autorisation illégale. Le TAPI avait balayé cet argumentaire au motif que le préavis n’était pas obligatoire et que le département était fondé à considérer que l’OU avait rendu un préavis favorable avec souhaits. Or, si le département pouvait s’écarter du préavis de l’OU, les raisons pour lesquelles il n’en avait pas tenu compte n’étaient pas motivées et ne ressortaient pas du dossier. Ce préavis et la demande de complément soulevant des questions essentielles, on ne pouvait admettre que c’était sans arbitraire que le préavis avait été considéré comme favorable et que l’autorisation avait été délivrée. Au surplus, la question de l’imperméabilisation du secteur méritait un plus ample examen, les places de stationnement maintenues étant selon la commune presque toutes situées sur la dalle du parking communal souterrain existant, sous-entendant qu’un projet plus optimal était possible à cet égard.

b. Le 24 juin 2024, le département a conclu au rejet du recours.

Le texte de l’art. 106 al. 1 LCI était clair. Le but de cette disposition était de préserver le caractère architectural et l’échelle de l’environnement bâti d’un village, raison pour laquelle, dans chaque particulier, l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier devait être fixé. La jurisprudence tant fédérale que cantonale était également claire. C’était après avoir procédé à une appréciation minutieuse de la situation que l’instance de préavis compétente s’était prononcée en prenant en considération les spécificités du contexte existant.

La construction de bâtiments d’activité était conforme à la zone 4B protégée. Pour ce qui concernait les nuisances, les recourants ne démontraient pas qu’elles allaient augmenter. En tous les cas, les instances compétentes avaient préavisé favorablement le projet. Traditionnellement, c’était enfin au cœur des villages que se concentraient les activités administratives ou commerciales.

Le fait que le plan de stationnement sur lequel l’OCT avait basé son préavis n’avait pas été visé ne varietur était sans effet sur la légalité de l’autorisation en cause. En effet, l’analyse du stationnement se faisait sur les plans idoines (ici le N06) sur lesquels l’instance de préavis s’était prononcée sans trouver à y redire. Enfin, l’OU n’était pas compétent pour se prononcer sur des aspects d’imperméabilisation du sol. S’agissant d’une autorisation préalable de construire, l’OCEau avait à juste titre indiqué que c’était dans le cadre du dépôt de la demande définitive qu’il serait analysé.

c. Le même jour, la commune a conclu, sous « suite de frais et dépens », au rejet du recours.

Le projet sauvegardait le caractère architectural et le site environnant. Les recourants ne faisaient que substituer leur propre appréciation à celle de la CMNS en alléguant une disproportion manifeste entre l’existant et les constructions projetées. Pour le reste, des activités pouvaient être autorisées dans la zone concernée et les nuisances seraient prises en compte dans le cadre de la demande définitive. Les recourants n’expliquaient pas en quoi ces nuisances seraient différentes ou plus importantes à l’avenir que celles liées à l’exploitation des bâtiments actuels, des locaux administratifs engendrant moins de nuisance pour le voisinage qu’une activité artisanale telle une menuiserie ou une laiterie. Ils ne démontraient pas non plus que le trafic allait augmenter. Enfin, la question du contenu du préavis de l’OU était exorbitant au litige.

d. Les recourants ont répliqué le 16 août 2024 persistant dans leurs griefs et leurs conclusions. S’ils estimaient que le projet était disproportionné et ne respectait pas le caractère architectural actuel du village, leur grief portait surtout sur la violation des buts consacrés par l’art. 106 al. 1 LCI. Ils se plaignaient de ce que l’autorité intimée puis le TAPI avaient perdu de vue le fait que cette disposition ne conférait pas au département un pouvoir discrétionnaire illimité, mais subordonnait celui-ci au respect des buts de sauvegarde et de protection des villages protégés pour lesquels cette norme avait été édictée. La dérogation n’avait pas été accordée en vertu de ces buts, mais uniquement aux fins de s’affranchir arbitrairement des règles légales pour forcer la réalisation d’un projet massif à la limite de leur propriété.

Il était faux de soutenir que la question des nuisances serait traitée de manière finale au moment de l’examen de l’autorisation de construire définitive, l’autorisation préalable ayant pour effet de fixer de manière définitive l’implantation et la destination du projet. Il leur était pour le reste impossible d’apporter la preuve concrète de l’augmentation des nuisances. Enfin, seul le plan visé ne varietur, qui ne tenait pas compte des exigences impératives de l’OCT, demeurait rattaché à l’autorisation de construire et, outre que cela violait la procédure d’autorisation, il était en conséquence périlleux pour la sécurité du droit d’octroyer une force légale à un plan sur lequel des modifications imposées de manière impérative ne figuraient pas.

e. Les parties ont été informées, le 19 août 2024, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de l’autorisation de construire préalable n° DP 3______ délivrée le 13 juin 2023 et confirmée par le TAPI dans le jugement en cause.

3.             Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l’autorité compétente (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700 ; art. 1 al. 1 LCI). Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l’autorisation de construire (art. 1 al. 6 LCI).

Selon l’art. 5 LCI, la demande préalable tend à obtenir du département une réponse sur l’implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet présenté (al. 1). L’art. 2 al. 1 à 3 LCI (relatif à la demande d’autorisation), l’art. 3 al. 1 à 5 (relatif à la procédure d’autorisation) ainsi que l’art. 4 al. 1 à 3 (relatif aux délais de réponse) sont applicables par analogie à la demande préalable (al. 3). La réponse à la demande préalable régulièrement publiée vaut décision et déploie les effets prévus aux art. 3, 5 al. 1 et 146 LCI (al. 5).

L’art. 146 al. 1 LCI prévoit que le recours dirigé contre une autorisation définitive, précédée d’une autorisation préalable en force au sens de l’art. 5 al. 1 LCI, ou d’un PLQ en force, ne peut porter sur les objets tels qu’agréés par ceux-ci.

De jurisprudence constante, la demande préalable d’autorisation de construire constitue une demande simplifiée qui peut être présentée avant le dépôt d’un projet définitif. Elle vise à épargner aux intéressés d’être contraints de dresser des plans de détail et à l’administration de compulser de tels plans, tant que les questions de principe ne sont pas résolues. Le but d’une telle demande est de déposer dans un premier temps un dossier simplifié afin de gagner du temps et de réduire les frais. En effet, si l’un des éléments du dossier visé dans la demande préalable n’est pas conforme, il est inutile d’engager des frais supplémentaires pour présenter un projet plus précis afin de déposer une demande en autorisation définitive.

En déposant une demande d’autorisation préalable d’implantation, le constructeur cherche à obtenir une décision de principe sur l’implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet. Il s’agit d’éviter d’engager des frais considérables liés à un projet d’envergure, compliqué ou potentiellement controversé, sans obtenir certaines assurances quant au caractère réalisable du projet. On ne se trouve pas dans l’hypothèse de deux procédures simultanées pouvant donner lieu à deux décisions contradictoires. Il s’agit d’une procédure en deux étapes donnant lieu d’abord à une autorisation préalable puis à une autorisation définitive. En réalité, il n’y a pas de risque de décisions contradictoires : soit l’autorisation préalable est accordée et le requérant peut passer à l’étape suivante, soit elle est refusée et il n’y a pas lieu de passer au stade suivant (ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 9b et les nombreux arrêts cités).

L’octroi d’une autorisation préalable de construire selon l’art. 5 al. 1 LCI constitue ainsi une simple étape vers la délivrance de l’autorisation définitive de construire et revêt un caractère incident alors même que l’autorité compétente tranche définitivement, au niveau cantonal (art. 5 al. 5 et 146 al. 1 LCI), certains éléments déterminants du projet (ATF 135 II 30 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_594/2017 du 1er novembre 2017 consid. 2.2 in SJ 2018 I p. 186 ; ATA/807/2020 du 25 août 2020 consid. 4).

4.             L’art. 14 LAT prévoit que les plans d’affectation règlent le mode d’utilisation du sol (al. 1). Ils délimitent en premier lieu les zones à bâtir, les zones agricoles et les zones à protéger (al. 2). Les zones à protéger comprennent notamment les localités typiques, les lieux historiques, les monuments naturels ou culturels (art. 17 al. 1 let. c LAT).

En droit genevois, les plans de zone, qui sont des plans d’affectation du sol, comprennent les zones protégées, qui constituent des périmètres délimités à l’intérieur d’une zone à bâtir ordinaire ou de développement et qui ont pour but la protection de l’aménagement et du caractère architectural des quartiers et localités considérés (art. 12 al. 5 LaLAT).

Selon l’art. 19 al. 2 LaLAT, la 4e zone est destinée principalement aux maisons d’habitation, comportant en principe plusieurs logements. Lorsqu’elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage ou le public, des activités peuvent également y être autorisées. Elle est divisée en deux classes : la 4e zone urbaine (4e zone A) (let. a) ; la 4e zone rurale (4e zone B) applicable aux villages et aux hameaux (let. b 1re phrase).

À teneur de l’art. 29 LaLAT, sont notamment désignées comme zones à protéger les villages protégés, selon les art. 105 à 107 LCI.

5.             Les recourants soulèvent tout d’abord le grief d’une violation de l’art. 106 al. 1 LCI.

5.1 L’art. 106 LCI prévoit que dans les villages protégés, le département, sur préavis de la commune et de la CMNS, fixe dans chaque cas particulier l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de manière à sauvegarder le caractère architectural et l’échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Le département peut en conséquence, à titre exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues droites (al. 1).

5.2 Les recourants soutiennent que la décision en cause violerait les buts de la disposition précitée. Selon eux, tout d’abord, le département disposerait de la compétence de fixer l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier uniquement lorsque la sauvegarde du caractère architectural et l’échelle de l’environnement bâti du village ne peuvent être garanties que par une dérogation au régime ordinaire. Ils affirment ensuite que l’art. 106 al. 1 LCI aurait seulement vocation à s’appliquer dans l’hypothèse où un projet conforme au régime ordinaire de la quatrième zone constituerait une atteinte excessive au caractère architectural et à l’environnement bâti du village que seule une dérogation permettrait de sauvegarder. Ils exposent que la dérogation de l’art. 106 al. 1 LCI n’aurait en l’espèce pas été octroyée pour sauvegarder le caractère architectural du village, mais pour sauvegarder le projet litigieux après le constat de son infaisabilité. Les recourants soutiennent enfin que le projet en cause serait disproportionné et qu’il ne respecterait pas le caractère architectural du village et de la place dans laquelle les constructions prévues ont vocation à s’insérer.

Les recourants ne peuvent être suivis dans leur argumentation. En effet, comme le souligne le département dans sa réponse au recours, l’art. 106 al. 1 LCI précise sans ambiguïté que, dans chaque cas particulier, et donc non uniquement lorsque la sauvegarde du caractère architectural et l’échelle de l’environnement bâti du village ne peuvent être garanties que par une dérogation au régime ordinaire, le département fixe l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier. Au surplus, et contrairement à ce que prétendent les recourants, la mise en œuvre de l’art. 106 al. 1 LCI n’est en rien liée à l’octroi d’une dérogation, cette disposition étant applicable même dans l’hypothèse où aucune dérogation n’est nécessaire. Cela ressort par exemple de l’ATA/232/2006 du 2 mai 2006, sur la base duquel les recourants fondent principalement leur démonstration, le projet litigieux porté devant la justice à cette occasion n’ayant requis aucune dérogation aux dispositions de la LCI (consid. 4b). Cet arrêt précise plus loin que dans les cas où aucune dérogation à la LCI fondée sur l’art. 106 LCI ne doit être examinée, seules restent à examiner les questions de la sauvegarde du caractère architectural et de l’échelle de l’agglomération et du site environnant (consid. 7).

Ensuite, et contrairement à ce que les recourants semblent affirmer, l’art. 106 al. 1 LCI, spécialement applicable aux villages protégés, confère un large pouvoir d’appréciation au département. Celui-ci peut fixer lui-même les règles applicables aux constructions dans le but de sauvegarder le caractère d’un village et le site environnant, et déroger aux dispositions ordinaires. Ce large pouvoir d’appréciation et de décision implique la possibilité de refuser un projet qui, ne respectant pas ces prescriptions spéciales, porterait une atteinte excessive au caractère d’un village protégé, soit que les bâtiments existants méritent une protection particulière, soit que le projet en lui-même n’est pas satisfaisant du point de vue de l’intégration (arrêt du Tribunal fédéral 1C_579/2015 du 4 juillet 2016 consid. 3.2).

En l’espèce, c’est bien une fois que le département a fixé l’implantation, le gabarit, le volume et le style du projet litigieux après s’être assuré de la sauvegarde du caractère architectural et de l’échelle du village, notamment grâce au préavis de la CMNS, qu’il a dérogé aux distances. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, rien n’indique que la dérogation de l’art. 106 al. 1 LCI n’aurait en l’espèce pas été octroyée pour sauvegarder le caractère architectural du village, mais pour sauvegarder le projet litigieux après le constat de son infaisabilité. Du reste, leur argument selon lequel l’art. 106 al. 1 LCI aurait été évoqué a posteriori après qu’ils avaient soulevé la problématique des distances et des vues droites dans leurs observations ne résiste pas à l’examen. En effet, les recourants ont produit leurs observations dans le cadre de l’enquête publique le 27 mars 2023. Or, il ressort du préavis de la DAC rendu le 2 mars 2023 déjà que cette autorité se réfère tant à la problématique soulevée qu’à l’art. 106 LCI.

5.3 S’agissant du caractère disproportionné du projet, les premiers juges ont correctement rappelé que l’art. 106 LCI renferme une clause d’esthétique particulière, plus précise que l’art. 15 LCI, soit une notion qui varie selon les conceptions de celui qui l’interprète et selon les circonstances de chaque cas d’espèce (ATA/934/2019 précité consid. 8b et les références citées). Cette notion juridique indéterminée laisse donc un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/141/2009 du 24 mars 2009 et les références citées).

Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Selon le système prévu par la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsque la consultation d’une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l’appréciation qu’est amenée à effectuer l’autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/934/2019 précité consid. 8c ; ATA/537/2017 du 9 mai 2017 consid. 4c ; ATA/956/2014 du 2 décembre 2014 et les références citées).

La loi ne prévoit aucune hiérarchie entre les différents préavis requis. Néanmoins, dans le cadre de l’application de l’art. 106 al. 1 LCI où la commune et la CMNS doivent être consultées, la chambre de céans a toujours jugé qu’en cas de préavis divergents, une prééminence était reconnue à celui de la CMNS puisqu’elle est composée de spécialistes en matière d’architecture, d’urbanisme et de conservation du patrimoine (arrêt du Tribunal fédéral 1C_582/2012 du 9 juillet 2013 consid. 5.2). Lorsque sa consultation est imposée par la loi, son préavis, émis à l’occasion d’un projet concret, revêt un caractère prépondérant (ATA/670/2012 du 2 octobre 2012 consid. 6).

Selon la jurisprudence cantonale, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de ces dernières. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi. De même, s’agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre de céans exerce son pouvoir d’examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/213/2018 du 6 mars 2018 consid. 9 ; ATA/1547/2017 du 28 novembre 2017 consid. 5e et les références citées).

Les règles précitées ayant été rappelées, il peut être renvoyé au jugement litigieux (partie en droit, ch. 25) dès lors que les premiers juges ont à juste titre retenu que la commune, puis la CMNS, qui s’est rendue sur place, ont préavisé favorablement le projet, le SMS ayant suivi la CMNS. Ces instances étant composées de spécialistes, la chambre de céans n’a en l’espèce pas à substituer sa propre appréciation à celle de ces entités dont rien ne laisse à penser qu’elles auraient omis des éléments essentiels dans l’analyse du caractère proportionné ou non du projet.

Ce premier grief sera en conséquence écarté.

6.             Les recourants soulèvent ensuite le grief de violation de la non-conformité à la zone. Ils soutiennent que le projet de la commune leur causera, avec une vraisemblance confinant à la certitude, des nuisances importantes et des inconvénients graves. Ils mettent en évidence des nuisances sonores et l’accroissement du trafic.

6.1 L’autorisation est délivrée si la construction ou l’installation est conforme à l’affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d’autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

Selon l’art. 19 al. 2 LaLAT, cité intégralement au considérant précédent, la 4e zone est destinée principalement aux maisons d’habitation, comportant en principe plusieurs logements. Lorsqu’elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage ou le public, des activités peuvent également y être autorisées.

La règle de l’art. 19 al. 2 LaLAT rejoint celle de l’art. 14 al. 1 let. a LCI qui prévoit que le département peut refuser une autorisation lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (ATA/883/2014 du 11 novembre 2014 consid. 5). Est réservée l’application de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41 ; art. 14 al. 2 LCI). L’art. 14 LCI appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée. Elle n’a toutefois pas pour but d’empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/825/2024 du 9 juillet 2024 consid. 8.17).

La notion d’inconvénients graves est une notion juridique indéterminée qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation et n’est limitée que par l’excès et l’abus de pouvoir (ATA/987/2024 du 20 août 2024 consid. 6.14 et l’arrêt cité).

Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, l’accroissement du trafic routier, s’il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable pour la circulation au sens de l’art. 14 LCI ; de fait, l’accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l’art. 14 LCI (ATA/206/2024 du 13 février 2024 consid. 6.1 et l’arrêt cité).

6.2 En l’espèce, comme cela découle du texte clair de l’art. 19 al. 2 LaLAT, des activités peuvent être autorisées dans la zone litigieuse. Les recourants indiquent craindre des nuisances sonores importantes du fait que le projet, situé à la limite de leur propriété, prévoit un espace public en plein air, deux grands bâtiments d’activités, un parking souterrain, et un parking en surface ainsi que la transformation de l’annexe de la menuiserie en grand espace polyvalent. Ils soulignent que parmi les activités prévues figurent un restaurant scolaire et des activités parascolaires, une salle du conseil municipal et un espace piétonnier auxquels s’ajoutent un espace déchetterie et des jeux pour enfants. Si on ne peut exclure une augmentation des nuisances sonores, les recourants mettant en évidence les comportements possiblement bruyants des enfants, rien ne permet de considérer que ces nuisances doivent être qualifiées de graves. On ne voit pas que le département aurait excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation en autorisant le projet litigieux, même si celui-ci est susceptible d’avoir des effets sur la situation ou le bien-être des recourants, au motif que des enfants pourraient parfois jouer bruyamment, le SABRA n’ayant pour le reste émis aucune réserve quant au bruit engendré par les futures activités, sa réserve portant sur l’éventuelle installation d’une ventilation ou d’une pompe à chaleur. Les premiers juges ont enfin retenu qu’à l’heure actuelle une menuiserie se trouve sur l’une des parcelles concernées et qu’il est patent qu’une telle activité génère un bruit important. Les recourants n’ont pas contesté le TAPI sur ce point.

Pour ce qui concerne l’accroissement du trafic routier, s’il est certes difficile pour les recourants d’en apporter la preuve définitive, force est de constater qu’ils se contentent d’affirmer, sans motiver leurs dires au moyen d’une étude ou d’une analyse même sommaire, que les habitants de la commune étant tributaires du mode de déplacement automobile, la création du projet destiné à des activités ne peut qu’engendrer un accroissement majeur du trafic. Cette simple affirmation ne suffit pas à remettre en cause les préavis des deux instances compétentes en la matière, à savoir le SABRA et l’OCT, qui n’ont formulé aucune réserve quant à une éventuelle augmentation du bruit en lien avec le trafic. De manière pertinente, les premiers juges ont retenu, sans être contestés sur ce point, que les écoliers se rendront à pied au restaurant scolaire et aux locaux parascolaires, l’école étant située à moins de 100 m. Le TAPI sera également suivi dans son constat que les activités en lien avec l’administration communale, même à admettre qu’elles induisent une augmentation du trafic automobile, cette dernière ne dépasserait pas ce qui peut être qualifié de raisonnable. L’activité de l’administration doit en effet être mise en lien avec la taille de la commune qui compte moins de 3’000 habitants. En l’état, elle n’est ouverte au public que le matin de 09h00 à 12h00 à l’exception du mardi, jour où elle est ouverte de 09h00 à 12h00 puis de 13h30 à 17h00.

Le département ayant agi dans le respect de la loi et de sa liberté d’appréciation, ce grief sera en conséquence également écarté.

7.             Les recourants soulèvent enfin le grief de la violation de la procédure d’autorisation au motif que le plan de stationnement sur lequel l’OCT a basé son préavis du 1er juin 2023 n’est pas visé ne varietur. Ils prétendent que le plan liant pour l’autorisation litigieuse serait celui établi le 27 janvier 2023 et visé ne varietur le 13 juin 2023. Ils se plaignent également de ce que l’autorisation litigieuse ne prendrait pas en compte une demande de l’OU relative à l’imperméabilisation des sols.

7.1 Il ressort de la procédure que la commune a déposé avec sa demande préalable d’autorisation de construire un plan de stationnement établi le 27 janvier 2023. Dans son premier préavis émis le 13 mars 2023, l’OCT a demandé un projet modifié. En conséquence, la commune a modifié son projet et déposé un plan de stationnement corrigé le 4 mai 2023, le plan de masse N06. L’OCT a ensuite émis son préavis favorable, sous condition, le 1er juin 2023, sans émettre cette fois de réserve quant au stationnement. Il n’apparaît pas que l’un ou l’autre de ces plans aurait été visé ne varietur.

À teneur du jugement litigieux, le département avait expliqué, en réponse à ce grief déjà soulevé par les recourants en première instance, que l’examen du projet sous l’angle des places de stationnement se faisait exclusivement sur la base des plans idoines, en l’occurrence le N06, et qu’ils n’étaient jamais visés ne varietur. Dans sa réponse au recours, le département le confirme. Il peut être donné acte de ce qui précède au département, étant rappelé que l’OCT a quoi qu’il en soit délivré un préavis favorable, sous condition mais sans émettre de réserve s’agissant des places de stationnement après que l’intimée a modifié son projet.

Pour illustrer leur grief, les recourants s’appuient, en première instance puis devant la chambre de céans, sur des plans différents selon les instances, ces plans ne semblant au surplus pas pertinents s’agissant des places de stationnement. À l’appui de leur grief devant le TAPI, les recourants ont en effet comparé un plan de rez‑de‑chaussée établi le 27 janvier 2023 et visé ne varietur le 13 juin 2023, avec le plan de stationnement dans sa version du 4 mai 2023. Devant la chambre de céans, ils comparent cette fois un plan d’étage 1 également établi le 27 janvier 2023 et visé ne varietur le 13 juin 2023, avec le même plan de stationnement. Il est dès lors difficile de suivre les recourants dans leur argumentation.

7.2 Les recourants soulignent que l’OU a, dans son premier puis dans son second préavis, insisté sur l’imperméabilisation des sols. Ils se plaignent de ce que l’OAC, plutôt que de tenir compte des demandes de modifications formulées par l’OU, a transformé ces demandes en un préavis favorable avec souhaits, cette question revêtant une importance particulière du point de vue environnemental. Les recourants seront renvoyés au jugement litigieux (consid. 29), dans lequel les premiers juges ont examiné ce grief. Ils ont jugé, sans être contredits sur ce point, que la loi n’imposait pas la consultation de l’OU et que même si cet office avait rendu un préavis négatif le département aurait été libre de s’en écarter. Cela étant, dans sa réponse au recours, le département expose que la question de l’imperméabilisation des sols sera quoi qu’il en soit examinée par l’OCEau dans le cadre du dépôt de la demande définitive, ce dont il lui est donné acte.

La procédure ayant été conduite conformément au droit, ce grief sera lui aussi écarté.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge solidaire des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Il sera alloué à la commune intimée, qui y a conclu et qui compte moins de 10'000 habitants (ATA/1043/2024 du 3 septembre 2024 consid. 5 et les arrêts cités), une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 mai 2024 par A______ et B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 avril 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge solidaire de A______ et B______ un émolument de CHF 1'500.- ;

alloue à la commune de C______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à la charge solidaire de A______ et B______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me François BELLANGER, avocat des recourants, à Me Lucien LAZZAROTTO, avocat de la commune de C______, au département du territoire – OAC, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’à l’office fédéral du développement territorial (ARE).

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Claudio MASCOTTO, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :