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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/616/2024

ATA/1138/2024 du 27.09.2024 ( EXPLOI ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.11.2024, 2C_548/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/616/2024-EXPLOI ATA/1138/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 septembre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Christophe WILHELM, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL intimé



EN FAIT

A. a. A______ est le fils de B______, décédé le ______ 2024 à 93 ans. Ce dernier, en situation de dépendance à la suite d'un accident vasculaire cérébral (ci‑après : AVC) survenu en 2010, souffrait d'aphasie. Il vivait depuis le 24 octobre 2017 à Genève et était séparé de son épouse, C______, née le ______ 1939.

b. D______, né le ______ 1963, ressortissant philippin et titulaire du permis B (obtenu dans le cadre de « l'opération Papyrus »), a été employé en tant qu'aide à domicile (ménages, courses, cuisine, toilettes et sorties médicales notamment) en faveur de B______ de mars 2018 jusqu'au 31 avril 2023. Il a été engagé à cet effet par A______.

Il a vécu dans le même appartement que B______ dès le mois d'avril 2018. Il a travaillé sept jours sur sept de mars 2018 à septembre 2022, accomplissant 45 heures par semaine du 1er mars au 30 avril 2018 puis 136.5 heures par semaine (de 8h00 à 13h30 et de 18h00 à 8h00). En raison de problèmes de santé liés à une surcharge de travail, attestés par certificat médical du 6 septembre 2022 transmis à A______, il a ensuite travaillé quatre jours sur sept d'octobre 2022 à avril 2023, accomplissant 78 heures par semaine.

Il a perçu un salaire mensuel net de CHF 1'500.- en 2018, de CHF 1'420.- en 2019, de CHF 1'404.95 de janvier à août 2020, de CHF 1'946.20 de septembre 2020 à septembre 2022, de CHF 1'222.65 d'octobre 2022 à janvier 2023 et de CHF 1'253.70 de janvier à avril 2023. Outre le paiement des primes d'assurance maladie de base, il a bénéficié d'un salaire en nature correspondant à CHF 990.- par mois jusqu'en septembre 2022, puis CHF 572.- d'octobre 2022 à avril 2023.

Du 19 septembre 2017 au 16 janvier 2023, il a suivi des cours de français, deux soirs par semaine, de 20h00 à 21h30. Il partait du domicile de B______ à 19h30 et y revenait à 22h00.

c. E______ a été employée en tant qu'aide à domicile (ménages, courses, cuisine, toilettes, sorties médicales) en faveur de B______ depuis le 25 septembre 2022, pour pallier la réduction du temps de travail de D______. Elle a été engagée à cet effet par A______.

Du 22 septembre 2022 au 28 février 2023, elle a travaillé trois jours sur sept, accomplissant 58.5 heures par semaine. Dès le mois de mars 2023, elle a accompli 78 heures de travail par semaine. Son salaire contractuel a été fixé à CHF 1'815.05 bruts, soit CHF 1'625.35 nets par mois après déductions, pour un temps de travail de 18 heures par semaine. Le contrat de travail a été signé par A______. Elle a bénéficié d'une chambre et de trois repas par jour à son lieu de travail, soit un salaire en nature de CHF 424.30 par mois pour trois jours par semaine.

B. a. Le 23 février 2018, D______ a déposé une demande d'autorisation de séjour M auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Selon le formulaire y relatif, signé par A______ et le requérant, ce dernier était domicilié à la même adresse que B______, lequel était mentionné comme l'employeur. Était en revanche indiquée l'adresse électronique de A______. Le salaire annuel brut de D______ s'élevait à CHF 18'000.-, y compris la nourriture et le logement. Il travaillait 45 heures par semaine en qualité d'employé de maison.

b. Par courrier du 1er avril 2019 adressé à A______ et B______, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci‑après : OCIRT) leur a demandé de lui transmettre des documents et renseignements concernant toute personne ayant travaillé dans leur ménage à partir du 1er janvier 2013.

c. Le 10 avril 2019, A______ a notamment répondu que D______ avait été engagé comme « aide à domicile » par son père le 15 mars 2018. Celui-là travaillait de 10h00 à 12h00 et de 17h00 à 20h00 du lundi au samedi, soit 30 heures par semaine.

Étaient transmises les fiches de salaire et l'attestation des salaires 2018 sur laquelle B______ figurait en tant qu'employeur.

Cette réponse est restée sans suite.

C. a. Par courrier du 1er novembre 2022, l'OCIRT a prié A______ de lui transmettre des documents et informations concernant tous les employés ayant été en charge de son père et de son propre ménage à partir du 1er avril 2019.

b. A______ a répondu que son père employait deux salariés comme aides à domicile, à savoir D______ et E______ depuis les 1er mars 2018 et 25 septembre 2022 respectivement.

Il n'existait aucun logement de fonction ni salaire en nature. E______ travaillait du vendredi au lundi, de 10h00 à 13h00 et de 17h00 à 20h00, soit un total de 18 heures par semaine. Elle recevait un salaire mensuel brut de CHF 1'815.05 et un salaire net de CHF 1'625.35.

Étaient joints divers documents concernant les deux aides à domicile.

c. D______ a été entendu par l'OCIRT le 4 janvier 2023. Son audition a fait l'objet d'un rapport établi par une inspectrice du travail, rapport qui n'a pas été signé par l'intéressé.

Ce dernier a confirmé avoir été engagé par A______. Au moment de son engagement, B______ était déjà hémiplégique et dépendant. Un mois et demi environ après, il avait été installé dans un nouveau logement avec ce dernier afin d'y assurer une présence 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Il avait une pause entre 13h00 ou 14h00 jusqu'à 18h00 au plus tard, heure à laquelle il devait préparer le repas du soir. Sa journée se terminait vers minuit après le coucher de B______. Il devait rester en veille passive la nuit, celui-ci ne devant pas être laissé seul.

C______ séjournait à Genève environ une fois par trimestre pour deux semaines environ. Pendant ses séjours, il rentrait le soir dormir dans son propre studio. En juillet 2022, le séjour de l'intéressée avait duré environ un mois, dont six jours dans le chalet familial où il avait accompagné les époux.

Depuis que E______ avait été engagée pour pallier la réduction de son horaire de travail, il travaillait avec elle en alternance. Ses horaires d'activité étaient du lundi à 10h00 au vendredi à 10h00, 24 heures sur 24, et sa collègue prenait le relais du vendredi à 10h00 au lundi à 10h00, 24 heures sur 24.

d. Le 5 janvier 2023, E______ a été entendue par l'OCIRT. Son audition a fait l'objet d'un rapport établi par une inspectrice du travail que l'intéressée n'a pas signé.

Elle avait été engagée par A______. Elle travaillait du vendredi à 10h00 jusqu'au lundi à 10h00, sans pause, en alternance avec D______, qui œuvrait les quatre autres jours de la semaine, du lundi à 10h00 au vendredi à 10h00. B______ était très faible et dépendant. Sa journée de travail commençait avec la préparation de son repas, puis elle devait le réveiller vers 10h00. Le reste de la journée, elle restait auprès de lui ou l'emmenait se promener. Pendant sa sieste, elle effectuait, outre la préparation de ses repas, la vaisselle, le ménage, le rangement et la lessive notamment. Sa journée de travail prenait fin à minuit, lorsqu'il s'endormait.

e. Le 11 janvier 2023, l'OCIRT a informé A______ avoir procédé à l'audition de D______ et E______ et lui a fait part de leurs déclarations. Celles-ci ne correspondant pas aux renseignements qu'il avait fournis, il était invité à faire parvenir ses observations en y joignant tout justificatif utile.

f. Le 6 février 2023, A______ a sollicité l'octroi d'un délai supplémentaire pour fournir la documentation requise et a notamment remis en cause la véracité des déclarations de E______ et D______. Cette dernière contestait la teneur de ses propres déclarations et affirmait ne pas avoir reçu copie du procès‑verbal de son audition.

g. Le 17 février 2023, l'OCIRT a entendu une deuxième fois D______ et a dressé un procès-verbal d'audition que l'intéressé a signé.

N'ayant pas de titre de séjour en Suisse depuis 2001, il souhaitait à tout prix déposer une demande de régularisation dans le cadre de l' « opération Papyrus ». Il devait justifier d'un revenu régulier. Il n'avait jamais reçu de contrat de travail écrit. Aphasique, B______ n'utilisait plus que deux mots, raison pour laquelle il devait se référer pour tout à son fils. À partir d'avril 2018, A______ lui avait demandé de rester avec son père 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, ce qu'il avait accepté.

Sa journée de travail commençait autour de 8h00. Il devait ensuite aider B______ à prendre son petit-déjeuner et ses médicaments, ainsi que l'aider à faire sa toilette notamment. En l'absence de rendez-vous dans la matinée, auxquels il l'accompagnait, l'intéressé dormait plus longtemps et il en profitait pour effectuer entre autres le ménage, des courses alimentaires, la cuisine, la vaisselle, la lessive et le repassage. Son fils lui communiquait les horaires des rendez-vous et les adresses par téléphone ou message.

Lorsque B______ n'avait pas d’obligations dans la journée, il pouvait s'absenter de son domicile pendant quelques heures, par exemple pour travailler chez un autre employeur, entre 13h30/14h00 et 17h00/18h00. Avec l'accord de A______, il travaillait pour un autre employeur depuis fin 2018. Il consacrait à cet emploi accessoire les lundis et vendredis après-midi, soit deux fois deux heures. À son retour, il préparait le dîner et, après le repas, B______ regardait la télévision pendant qu'il nettoyait la vaisselle et la cuisine. Il restait ensuite à sa disposition. Il le préparait pour le coucher vers 23h30 ou minuit. B______ l'appelait parfois durant la nuit pour l'accompagner aux toilettes.

A______ avait mis à disposition une carte bancaire réservée aux courses alimentaires, qu'il utilisait en alternance avec sa nouvelle collègue. Il gardait les tickets de caisse.

D______ a transmis des échanges de messages WhatsApp et de courriels avec A______. Leur contenu sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

h. D______ a été en arrêt maladie du 21 février au 30 avril 2023, pour des raisons médicales liées à une surcharge de travail, attestées par un certificat médical. Il a transmis l'information le 21 février 2023 à A______, lequel l'a prié de se reposer et lui a indiqué que sa propre employée domestique resterait la nuit avec son père.

Le 25 février 2023, il a remis sa démission à A______ avec effet au 30 avril 2023.

i. Le 21 mars 2023, après s'être vu octroyer plusieurs prolongations de délai, A______ a complété ses déterminations et a transmis à l'OCIRT plusieurs documents, notamment les extraits bancaires 2018 à 2022 démontrant les paiements des salaires et des primes d'assurance-maladie de D______.

Ce dernier avait été engagé pour un travail du lundi au samedi, de 10h00 à 12h00, puis de 17h00 à 20h00, pour un total de 30 heures hebdomadaires. Sa présence 24 heures sur 24 et sept jours sur sept ne s'était jamais produite ni n'avait été convenue. Aucune veille n'avait été exigée. Il avait toujours travaillé auprès d'autres employeurs en dehors de ses horaires de travail.

j. Le 14 avril 2023, à la suite de la consultation de son dossier, A______ a une nouvelle fois complété ses déterminations. Il contestait entièrement le contenu des pièces consultées, en particulier les procès-verbaux d'audition de ses employés et les messages WhatsApp.

k. Le 19 juin 2023, l'OCIRT a une nouvelle fois entendu D______. Son audition a fait l'objet d'un rapport établi par une inspectrice du travail qui n'a pas été signé par l'intéressé. Ce dernier a exposé avoir reçu ses derniers salaires à hauteur de CHF 2'000.- bruts par mois. Il avait également perçu un solde de congé de CHF 613.05 bruts.

Il a transmis son extrait de compte individuel AVS, les décomptes de salaire de mars et avril 2023, ainsi que des tickets de caisse relatifs aux courses effectuées pour les besoins de B______ de 2018 à 2022. Le contenu de ces pièces sera repris dans la mesure utile dans la partie en droit du présent arrêt.

l. Le 23 juin 2023, l'OCIRT a prié A______ de se mettre en conformité, les prescriptions en matière de salaires minimaux impératifs ayant été violées depuis mars 2018. Il lui incombait de corriger le salaire de D______ et E______ avec effet au 1er mars 2018, de déclarer rétroactivement tous ses autres employés à l'AVS et ajuster leurs salaires conformément au contrat‑type de travail avec salaires minimaux impératifs de l’économie domestique du 13 décembre 2011 (CTT-EDom - J 1 50.03). Il l'a invité à lui remettre les documents attestant de la mise en conformité et lui a imparti un délai pour se déterminer.

D______ travaillait du lundi au dimanche de 8h00 à 13h30 et de 18h00 à 24h00. Entre 24h00 et 8h00, il était astreint à la veille. La durée du travail retenue pour la période de mars 2018 à septembre 2022 était donc de 19.5 heures par jour. Il totalisait ainsi 136.5 heures par semaine. D'octobre 2022 à avril 2023, la durée du travail journalier était également de 19.5 heures. Prenant en compte la réduction du temps de travail à quatre jours par semaine, la durée hebdomadaire de travail était de 78 heures.

La durée du travail de E______ était d'au moins 19.5 heures par jour, y compris huit heures de présence de nuit (24h00‑8h00). Pour les trois jours de travail hebdomadaire, elle totalisait 58.5 heures.

D______ avait été payé (salaire mensuel net) CHF 1'500.- en 2018, CHF 1'420.- en 2019, CHF 1'404.95 de janvier à août 2020, CHF 1'946.20 de septembre 2020 à septembre 2022, CHF 1'222.65 d'octobre 2022 à janvier 2023 et, enfin, CHF 1'253.70 de février à avril 2023. S'y ajoutait un salaire en nature consistant en la mise à disposition d'une chambre et en la consommation de trois repas par jour au lieu de travail, valant CHF 990.- par mois (hormis les mois de mars et avril 2021 et les périodes des vacances ou des visites de C______) et CHF 572.- par mois à partir d'octobre 2022 pour quatre jours par semaine. Les primes d'assurance‑maladie de base étaient déduites de son salaire brut à hauteur de CHF 407.80 par mois en 2018, CHF 545.10 par mois en 2019 et CHF 519.50 par mois depuis 2020. Le salaire contractuel de E______ était fixé à CHF 1'815.05 bruts, soit un montant équivalant à CHF 1'625.35 nets par mois après déductions. Elle bénéficiait d'une chambre et de trois repas par jour au lieu de travail, soit un salaire en nature de CHF 424.30 par mois pour trois jours par semaine.

Après avoir exposé en détails le salaire qu'auraient dû toucher les employés pour chaque période, l'OCIRT a arrêté la sous-enchère salariale totale à CHF 623'951.92 bruts/nets à l'égard de D______ et à CHF 30'625.13 bruts/nets à l'égard de E______.

m. Le 22 septembre 2023, après trois prolongations de délai, A______ a allégué que seul son père revêtait la qualité d'employeur et a contesté les reproches qui lui étaient adressés, précisant que les heures de travail que D______ consacrait à son père s'élevaient, tout au plus, à 105 heures par semaine, dont devaient être déduites les heures de présence de sa mère quatre fois par an durant trois à six semaines pendant lesquelles l'employé n'était sollicité que trois heures par jour, soit 1'080 heures par an.

Il a également contesté les montants des rattrapages salariaux et ne pouvait fournir la majeure partie des justificatifs réclamés. Il sollicitait la tenue d'une audience. Il a transmis, notamment, le témoignage écrit de F______, ami de la famille A______, une attestation de C______, une attestation de D______ ainsi qu'un tableau Excel remanié représentant les heures de travail effectuées par ce dernier. Le contenu de ces pièces sera repris dans la mesure utile dans la partie en droit du présent arrêt.

n. Le 3 octobre 2023, D______ a été entendu à nouveau par l'OCIRT, lequel a dressé un procès-verbal que l'intéressé a signé.

A______ prenait toutes les décisions ; il accordait les vacances, organisait les remplacements, versait les salaires et transmettait les décomptes salaire. Son père ne pouvait ni parler ni écrire. Ce dernier hochait sa tête pour lui signifier qu'il avait compris. Il devait interpréter son langage corporel.

Lorsque C______ était à Genève, il était convenu qu'il parte après le déjeuner entre 13h00 ou 14h00. Il reprenait le travail le jour suivant à 9h00. Ils avaient besoin de lui tous les jours et il assumait les tâches habituelles. Ayant plus de 80 ans, elle n'était pas en mesure de le remplacer.

S'il avait eu le choix, il n'aurait pas habité chez B______. Pour des raisons de sécurité, son fils voulait absolument un employé « live-in » afin qu'il ne reste jamais seul la nuit. Il devait toujours être présent auprès de son père, de jour comme de nuit, sauf l'après-midi. Il n'avait qu'un autre employeur chez lequel il travaillait deux fois deux heures par semaine.

o. Le 27 octobre 2023, l'OCIRT a réitéré sa demande de mise en conformité et a rejeté la demande d'audition de A______.

Les témoignages écrits de C______ et F______ présentaient un caractère subjectif et non pas des faits avérés. Le témoignage de C______ devait être apprécié avec circonspection, vu le lien de parenté les unissant. En outre, les tickets de caisse gardés par D______ démontraient que ce dernier faisait des courses à tout moment de la journée lorsque C______ était présente. Les échanges de messages WhatsApp entre D______ et C______ démontraient qu'il travaillait avant 10h30 et après 13h30 et que celle-ci lui donnait des instructions. Malgré sa présence, A______ sollicitait D______, y compris à des heures où il alléguait que l'employé ne travaillait pas. Il n'y avait pas donc lieu de soustraire 1'080 heures travaillées par an du temps de travail de D______.

Il a transmis à A______ B______ le procès-verbal d'audition de D______ du 3 octobre 2023.

p. Par courrier du 13 décembre 2023 adressé à l'OCIRT et après un report de délai, A______ a maintenu sa position, précisant notamment que les rattrapages salariaux réclamés étaient disproportionnés.

Étaient joints les justificatifs relatifs à des ajustements de salaires de E______ pour la période de janvier à octobre 2023 (CHF 37'221.40) et d'une nouvelle employée, pour la période d'avril à octobre 2023. Il n'était pas en mesure de produire l'ensemble des justificatifs mentionnés dans la demande de mise en conformité.

Le contenu des pièces mentionnées sera repris dans la mesure utile dans la partie en droit du présent arrêt.

q. Le 22 janvier 2024, l'OCIRT a prononcé à l'encontre de A______ une amende de CHF 29'400.-, fixé un émolument de sanction de CHF 100.-, des frais de contrôle de CHF 900.- ainsi qu'un émolument administratif de CHF 35.-.

A______ revêtait la qualité d'employeur de D______ et E______. Les capacités de B______ étaient trop limitées pour qu'il pût prendre des décisions relatives aux questions administratives ou organisationnelles. A______ avait recruté les employés et versait leurs salaires. Il était le seul à décider de l'organisation du travail et à fixer le salaire.

Il était établi, sur la base des déclarations de D______, des échanges de messages WhatsApp et de courriels avec A______ ainsi que des nouveaux décomptes salaires, que D______ avait travaillé de mars 2018 à septembre 2022 à raison de 136.5 heures par semaine. Ses horaires avaient été réduits à 78 heures par semaine à partir du 22 septembre 2022 jusqu'à la fin des rapports de travail. À ce décompte devaient être soustraites 144 heures de travail par année pendant lesquelles l'employé s'absentait pour se rendre aux cours de langue française. Quant à la limitation de la durée de travail effectif à trois heures par jour lorsque C______ rendait visite à son conjoint, rien n'étayait une telle durée. Au contraire, les employés restaient à disposition pour exécuter leur travail. La réduction ponctuelle des horaires ne pouvait pas être considérée autrement que comme une libération de l'obligation de travailler pour laquelle le salaire restait dû.

Après avoir rappelé le salaire que D______ avait touché durant sa période d'activité, tel qu'exposé dans sa lettre du 23 juin 2023, l'OCIRT a relevé qu'eu égard à la durée de travail retenue et à sa catégorie salariale avec plus de quatre ans d'expérience professionnelle utile, l'intéressé aurait dû être rémunéré, à titre de salaire minimum mensuel, salaire en nature compris, CHF 4'077.- du 1er mars au 30 avril 2018, CHF 13'970.- du 1er mai 2018 au 31 octobre 2020, CHF 15'207.60 du 1er novembre 2020 au 31 décembre 2020, CHF 12'423.04 du 1er janvier au 31 décembre 2021, CHF 12'494.63 du 1er janvier au 30 septembre 2022, CHF 7'139.79 du 1er octobre au 31 décembre 2022 et CHF 7'441.87 du 1er janvier au 30 avril 2023.

Après un rappel du temps de travail de E______ et du salaire que celle-ci avait perçu durant sa période d'activité, tels qu'exposés dans sa lettre du 23 juin 2023, l'OCIRT a relevé que son salaire minimum légal applicable correspondait, salaire en nature compris, à CHF 5'354.84 pour 58.5 heures par semaine du 25 septembre au 31 décembre 2022, CHF 5'549.87 pour 58.5 heures par semaine du 1er janvier 2023 au 28 février 2023 et CHF 7'441.87 pour 78 heures par semaine du 1er mars 2023 au 30 septembre 2023.

La sous-enchère salariale était ainsi de CHF 566'752.80 bruts/nets à l'égard de D______ et CHF 57'599.33 bruts/nets à l'égard de E______, pour un total de CHF 624'352.12 bruts/nets.

Outre l'importance de la sous-enchère et la demande vaine de mise en conformité, la sanction tenait compte des conditions déplorables de la sous‑enchère salariale, caractérisée par la précarité économique de l'employé dont l'exercice d'une activité lucrative constituait le seul espoir de voir son séjour en Suisse régularisé ainsi que par une charge de travail mettant en péril sa santé. À cela s'ajoutaient les motivations économiques et la mauvaise collaboration de A______.

D. a. Par acte remis à la poste le 21 février 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation. Il a sollicité sa comparution personnelle, l'audition de témoins ainsi que l'octroi de l'effet suspensif.

Son droit d'être entendu avait été violé. Il avait insisté à plusieurs reprises pour être entendu oralement, sans succès. L'OCIRT n'avait pas non plus jugé utile d'entendre ses parents. Il n'avait jamais pu participer aux auditions de D______ et E______. L'OCIRT avait accordé une force probante accrue aux déclarations des employés tout en écartant à tort les contre‑preuves produites.

Les faits avaient été constatés de façon incomplète et inexacte. Il avait été qualifié à tort d'employeur. Il n'était qu'un proche aidant.

La méthode de calcul utilisée par l'OCIRT pour établir les heures de travail des employés n'était pas adéquate. Elle ne prenait pas en compte les déductions du temps non travaillé pendant les séjours de C______. Celle‑ci séjournait quatre fois par an pour des durées de trois à six semaines au domicile de son conjoint afin de l'assister dans ses tâches quotidiennes, réduisant ainsi le temps de travail des employés à trois heures par jour. En outre, D______ n'avait pu effectuer de veilles, puisque dès que B______ était couché, celui-ci ne réclamait plus rien. L'intéressé était employé par plusieurs personnes durant la journée, à raison de deux heures par jour au minimum. Il convenait donc de déduire un minimum de 1'080 heures par an.

Les pièces justifiant des achats au moyen de la carte de crédit mise à disposition des employés n'avaient pas de valeur probante pour l'établissement de leurs heures de travail.

Pour la période du 25 septembre 2022 au 28 février 2023, E______ avait accompli 66 heures de travail par semaine, dont 22 heures de veille sans interruption. Depuis lors, elle accomplissait 50 heures par semaine de jour, douze heures par semaine de nuit et 26 heures par semaine de veille. Dans son décompte, l'OCIRT avait omis de considérer la présence de C______ au domicile de son époux. Les heures que cela représentait, soit 252 heures par an, devaient être déduites du décompte.

Il s'était fié aux garanties de l'OCIRT et avait suivi les directives de ce dernier, augmentant dès septembre 2020 le salaire de D______ à hauteur de CHF 2'772 brut par mois. Les rattrapages salariaux qu'il avait effectués pour E______ et la nouvelle employée l'exemptaient de toute faute. Il avait collaboré en tout temps, en fournissant toutes les informations et pièces demandées. La quotité de l'amende ne respectait pas le principe de proportionnalité.

b. L'OCIRT a conclu au rejet du recours, persistant dans les termes de sa décision.

c. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions et développant sa précédente argumentation.

Bien qu'aphasique, son père disposait de toutes ses facultés en tant qu'employeur et avait conservé jusqu'à son dernier jour sa pleine capacité de discernement, comme l'attestait la signature d'un acte instrumentalisé par un notaire en présence et sur la base d'une attestation médicale de son médecin traitant du 27 juillet 2023. Les outils de travail étaient exclusivement fournis par B______.

d. Une audience de comparution personnelle et d'enquêtes s’est tenue le 14 août 2024 devant la chambre administrative.

da. A______ a indiqué que son père, depuis son aphasie, était devenu très expressif, de sorte qu'il arrivait parfaitement à se faire comprendre, même s'il n'était plus capable d'écrire. Si D______ devait changer ses horaires, il en parlait à son père et l'en informait. Lui‑même n'intervenait que sur le plan administratif et s'était occupé du processus d'engagement. Lorsque sa mère était à Genève, elle faisait tout, sauf l'aide à la toilette le matin, si bien que la journée de travail de D______ s'arrêtait en fin de matinée. Il avait notamment signé le formulaire de l'OCPM du 23 février 2018 ainsi que le contrat de travail de E______. Il n'y avait pas eu d'autres rattrapages salariaux que ceux figurant au dossier.

db. D______, assisté d'un interprète, et E______ ont confirmé les déclarations qu'ils ont faites devant l'OCIRT.

À l'issue de l'audience, l'OCIRT a indiqué souhaiter produire les SMS qu'il avait échangés avec E______.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur la question de savoir s'il convenait d'ordonner la production des SMS mentionnés par l'OCIRT.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant a sollicité son audition ainsi que celle de D______, E______, C______ et F______. En outre, dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, il se plaint de l'audition non contradictoire des employés menée par l'OCIRT, du fait que ses parents n'ont pas été entendus et que l'OCIRT n'avait accordé aucune valeur probante aux preuves qu'il avait offertes.

L'OCIRT demande à pouvoir produire les SMS échangés avec E______.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 132 II 485 consid. 3.21). Ce droit n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier. En outre, il n'implique pas le droit à une audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 Selon l’art. 28 al. 1 LPA, lorsque les faits ne peuvent être éclaircis autrement, les autorités suivantes peuvent au besoin procéder à l’audition de témoins : le Conseil d’État, les chefs de départements et le chancelier (let. a) ; les autorités administratives qui sont chargées d’instruire des procédures disciplinaires (let. b) ou les juridictions administratives (let. c). L’art. 42 al. 1 LPA prévoit que les parties ont le droit de participer à l’audition des témoins, à la comparution des personnes ordonnées par l’autorité ainsi qu’aux examens auxquels celle-ci procède.

La doctrine précise que les autorités administratives qui ne sont pas mentionnées à l'art. 28 al. 1 LPA conservent la possibilité d'entendre des tiers, mais à titre de renseignements uniquement (MGC 1984 14/I 1565 ; Stéphane GRODECKI/ Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 349 ad art. 20 LPA).

2.3 Les représentants de l'OCIRT, les membres de l'inspection paritaire des entreprises et les commissions paritaires chargées du contrôle par délégation sont notamment habilités à interroger les travailleurs hors de la présence de l'employeur (art. 2 al. 1 let. b du règlement d'application de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 23 février 2005 - RIRT - J 1 05.01).

2.4 Dans un cas portant sur l’audition par l’OCIRT de chauffeurs d’une plateforme de diffusion de courses, la chambre de céans a retenu que ceux-ci n’ayant pas été entendus par une autorité au sens de l’art. 28 al. 1 LPA, ils ne pouvaient être considérés comme des témoins. L’OCIRT n’était en conséquence pas tenu de convier les recourantes aux auditions des chauffeurs. Au demeurant, les procès‑verbaux de ces auditions avaient été adressés aux recourantes avant le prononcé de la décision et celles-ci n’avaient pas sollicité l’audition des chauffeurs par la chambre administrative. En outre, si tant est qu’il fallût admettre une violation de leur droit d’être entendues, celle-ci avait été réparée devant la chambre administrative, les recourantes ayant pu se déterminer sur ces auditions devant celle-ci, étant relevé que la chambre administrative disposait d’une pleine cognition en fait et en droit (ATA/1151/2020 du 17 novembre 2020 consid. 4bb). Le même raisonnement a été appliqué plus récemment à l’audition par l’OCIRT d’employés de maison et de voisins dans un cas de respect des conditions du contrat-type de travail de l’économie domestique (ATA/1335/2023 du 12 décembre 2023 consid. 4.5 ; ATA/1268/2023 du 24 novembre 2023 consid. 4).

2.5 Saisi d’un recours contre l’ATA/1151/2020, le Tribunal fédéral a relevé que l'argument tiré de l'absence de la qualité de témoin n'était pas forcément décisif, dès lors que pouvait exister un droit de participer à l'audition de personnes appelées à fournir des renseignements par exemple. Cela étant, la jurisprudence retenait notamment, en procédure fédérale, qu'il n'y avait pas de violation du droit d'être entendu lorsque la partie avait eu la possibilité de prendre connaissance du procès‑verbal des auditions et de se déterminer à ce sujet (arrêt 1C_534/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.2). Le recourant ne démontrait pas que le droit de procédure cantonal genevois offrirait des garanties plus étendues. Les recourantes avaient reçu les procès-verbaux des auditions ; elles avaient pu se prononcer avant que la décision ne soit rendue puis dans le cadre du recours devant la chambre administrative. Dans ces conditions, leur droit d'être entendues avait été respecté (arrêt du Tribunal fédéral 2C_34/2021 du 20 mai 2022 consid. 4.2.2).

2.6 En l'espèce, D______, E______ et le recourant ont été entendus par la chambre de céans, de sorte qu’il a été satisfait à la requête du recourant relative à l'audition de ces personnes.

Il n'apparaît en revanche pas nécessaire d'entendre C______ et F______. En effet, le recourant s’est vu offrir la possibilité de faire valoir ses arguments non seulement par écrit mais également oralement devant la chambre de céans et s’est exprimé de manière circonstanciée sur l'objet du litige. Le dossier contient les déclarations détaillées des deux employés, entendus tant par l'OCIRT que la chambre de céans, et de nombreuses pièces, fournies par les deux parties. Il contient également de nombreux renseignements concernant les faits sur lesquels l’audition de C______ et F______ est requise. Le recourant n'indique du reste pas quels éléments, autres que ceux ressortant déjà des attestations produites, ces auditions pourraient apporter à la solution du litige.

L'ensemble des écritures et des pièces produites suffisent donc à la chambre de céans pour se prononcer en toute connaissance de cause. Dès lors, la requête d'actes d'instruction sera écartée.

Pour ces mêmes motifs, il n'y a pas non plus lieu d'ordonner la production des SMS échangés entre l'OCIRT et E______, ce d'autant plus que celui-là n'indique pas en quoi cette production serait pertinente pour l’issue du litige.

2.6.1 En vertu de l'art. 2 al. 1 let. b RIRT, l'OCIRT pouvait entendre D______ et E______ en l'absence du recourant. Ce dernier n'est donc pas fondé à se plaindre de leur audition non contradictoire.

Au demeurant, un autre motif commande de retenir cette solution. Les comptes rendus des déclarations des travailleurs, entendus à titre de renseignements et non en tant que témoins, – l'OCIRT ne faisant pas partie des autorités visées par l'art. 28 al. 1 LPA –, ont été transmis au recourant, qui a ainsi pu en prendre connaissance et se déterminer en toute connaissance de cause avant le prononcé de la décision attaquée, puis à nouveau dans son recours. Ainsi, et conformément à la jurisprudence précitée, l'OCIRT n'était pas tenu de faire participer l'intéressé ou son père aux auditions desdits travailleurs, sous forme écrite ou orale.

Même à admettre une violation du droit d’être entendu du recourant, celle-ci aurait été réparée au plus tard devant la chambre de céans, dès lors que l'intéressé a pu se déterminer sur ces auditions devant celle-ci également. Par surabondance, la chambre de céans a entendu les deux employés et le recourant a participé à leur audition.

2.6.2 Ce dernier a transmis une attestation établie par sa mère. Par conséquent, mais également vu les nombreuses autres pièces figurant déjà au dossier, l'OCIRT pouvait procéder à une appréciation anticipée des preuves disponibles et ainsi se dispenser d'entendre les parents du recourant, contrairement à ce que celui-ci fait valoir, sans violer son droit d'être entendu. Par surabondance, l'aphasie de feu B______, confirmée par le recourant lors de son audition devant la chambre de céans notamment, s'opposait de facto à ce qu'il soit entendu par l’OCIRT.

Le grief tiré de la violation du droit d'être entendu sera donc écarté.

2.6.3 Pour le surplus, en tant que le recourant fait valoir que l'OCIRT n'aurait accordé aucune valeur probante aux preuves qu'il avait offertes, contrairement à la valeur probante prétendument excessive attribuée aux déclarations de D______, cette critique ne relève pas du droit d'être entendu, mais plutôt de l'appréciation des preuves qui sera examinée avec les griefs au fond (arrêt du Tribunal fédéral 2C_34/2021 du 20 mai 2022 consid. 4.2.2).

3.             Le litige porte sur la conformité au droit de l’amende administrative infligée au recourant pour sous-enchère salariale.

Le recourant conteste revêtir le statut d'employeur à l'égard des employés domestiques de feu son père.

3.1 Selon l'art. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté (al. 1). Cette manifestation peut être expresse ou tacite (al. 2).

En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 II 93 consid. 5.2.1). Lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante (échange de manifestations de volonté concordantes), qu’elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait ; si au contraire, alors qu’elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s’entendre, ce dont elles étaient d’emblée conscientes, il y a un désaccord patent et le contrat n’est pas conclu. Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante, mais que l’une d’elles, ou toutes deux n’ont pas compris la volonté interne de l’autre, ce dont elles n’étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent. Le contrat est alors conclu dans le sens objectif que l’on peut donner à leurs déclarations de volonté selon le principe de la confiance ; en pareil cas, l’accord est de droit (ou normatif ; ATF 144 III 93 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_739/2022 du 5 janvier 2024 consid. 7.2 et les arrêts cités).

Ainsi, en présence d'un litige sur l'interprétation d'un contrat, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO), le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2 ; 129 III 664 consid. 3.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu’il s’agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l’époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et 5.2.3 ; 132 III 268 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_739/2022 du 5 janvier 2024 consid. 7.2 et les arrêts cités).

L’appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. S’il ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties, parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes, ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté exprimée par l’autre au moment de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu’elle l’affirme en procédure, mais doit résulter de l’administration des preuves –, le juge doit recourir à l’interprétation normative (ou subjective), c’est-à-dire rechercher leur volonté objective en déterminant le sens que, d’après les règles de la bonne foi, chacune d’elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l’autre (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3).

3.2 La loi fédérale sur les conditions minimales de travail et de salaire applicables aux travailleurs détachés en Suisse et sur les mesures d'accompagnement du 8 octobre 1999 (LDét - RS 823.20) règle le contrôle des employeurs qui engagent des travailleurs en Suisse et les sanctions qui leur sont applicables en cas de non‑respect des dispositions relatives aux salaires minimaux prévus par les contrats‑types de travail au sens de l’art. 360a CO (art. 1 al. 2 LDét). Selon l'art. 1 al. 3 LDét, la notion de travailleur est régie par le droit suisse (art. 319 à 362 CO).

3.3 À teneur de l'art. 319 al. 1 CO, par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni. Les éléments caractéristiques de ce contrat sont donc une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération (arrêts du Tribunal fédéral 4A_53/2021 du 21 septembre 2021 consid. 5.1.3 ; 4A_64/2020 du 6 août 2020 consid. 6.1).

Le rapport de subordination revêt une importance primordiale dans la qualification du contrat de travail. Il présuppose que le travailleur est soumis à l'autorité de l'employeur pour l'exécution du contrat et cela au triple point de vue personnel, fonctionnel (organisation et contrôle), temporel (horaire de travail) et, dans une certaine mesure, économique (ATF 125 III 78 consid. 4, SJ 1999 I p. 385 ; 121 I 259 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_553/2008 du 9 février 2009 consid. 4.1).

Le travailleur est assujetti à la surveillance, aux ordres et instructions de l'employeur ; il est intégré dans l'organisation de travail d'autrui et y reçoit une place déterminée (arrêts du Tribunal fédéral 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.1 ; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.1).

3.4 Selon l'art. 321d CO, l'employeur peut établir des directives générales sur l'exécution du travail et la conduite des travailleurs dans son exploitation ou son ménage et leur donner des instructions particulières (al. 1) ; le travailleur observe selon les règles de la bonne foi les directives générales de l'employeur et les instructions particulières qui lui ont été données (al. 2). Il s'agit du corollaire du rapport de subordination. L'employé doit suivre les directives même lorsqu'elles sont inappropriées ou inefficaces parce qu'il n'a ni l'obligation, ni le droit d'en contrôler l'opportunité (Rémy WYLER/Boris HEINZER, Droit du travail, 4e éd., 2019, p. 155). Ce pouvoir de direction est exercé par l’employeur lui-même, mais il peut être délégué en partie ou entièrement à un tiers (arrêt du Tribunal fédéral 4A_344/2015 du 10 décembre 2015 consid. 3.4).

3.5 Lorsqu'un représentant agit au nom d'autrui, les droits et obligations dérivant de l'acte accompli passent directement au représenté si le représentant disposait des pouvoirs suffisants à cet effet en vertu du droit public, de la loi ou de la volonté du représenté (art. 33 al. 2 CO) ou, à défaut de pouvoirs, si le représenté ratifie l'acte accompli en son nom (art. 38 CO), ou encore si le tiers de bonne foi pouvait se fier aux pouvoirs qui lui avaient été communiqués, même tacitement (art. 33 al. 3, 34 al. 3 et 37 CO ; ATF 131 III 511 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_487/2018 du 30 janvier 2019 consid. 5.2.2).

Dès lors qu'il agit avec pouvoirs, le représentant n'engage pas seulement le représenté par ses actes, mais également par ce qu'il sait ou doit savoir. Étant donné que la volonté du représentant est le « moteur de la représentation », la connaissance ou l'ignorance par manque d'attention de certains faits par le représentant sont directement attribuées au représenté. C'est ainsi que la question du consentement, comme condition d'existence d'un contrat, est jugée en fonction du représentant et non du représenté (Christine CHAPPUIS, in Luc THÉVENOZ/Franz WERRO [éd.], Commentaire romand du code des obligations, 3e éd., 2021, n. 21 ad art. 32 CO).

La manifestation de la volonté d'agir au nom d'autrui peut intervenir de manière expresse ou par actes concluants. La manifestation intervient par actes concluants lorsque le tiers doit déduire l'existence d'un rapport de représentation des circonstances. Aussi celui qui laisse créer l'apparence d'un pouvoir de représentation se trouve-t-il lié par les actes accomplis en son nom (ATF 131 III 511 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_58/2010 du 22 avril 2010 consid. 4.2).

3.6 La société simple est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d'unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d'atteindre un but commun (art. 530 al. 1 CO). Le but de la société simple peut être de conclure en commun un contrat ; les moyens nécessaires pour atteindre le but social peuvent consister dans des prestations pécuniaires ou personnelles, qui ne seront pas nécessairement égales ni toujours prédéterminées. La conclusion d'un contrat de société simple peut résulter tacitement du comportement des parties, même si ces dernières ne sont pas conscientes de conclure un tel contrat (ATF 124 III 363 consid. II/2a ; 116 II 707 consid. 2a).

Lorsque deux personnes emploient un salarié à plein temps dont elles déterminent l'occupation, en se répartissant, sur la base d'accords internes, leurs droits et obligations envers lui, il convient d'admettre qu'elles sont liées par un contrat de société simple, dont le but est l'utilisation des services du travailleur (arrêts du Tribunal fédéral 8C_130/2020 du 30 juin 2020 consid. 7.3 ; 4C.41/1999 du 12 juillet 2000 consid. 5b). Chacune d'elles a le droit d'administrer la société (art. 535 al. 1 CO) et de la représenter envers tout tiers, tel le salarié (art. 543 al. 3 CO), les associés étant solidairement responsables des engagements qu'ils ont assumés envers ledit tiers, singulièrement en agissant conjointement (art. 544 al. 3 CO ; arrêt du Tribunal fédéral 4C.41/1999 précité consid. 5b ; ATA/555/2024 du 3 mai 2024 consid. 2.6).

Dans le domaine du travail domestique, la jurisprudence tant en matière administrative que civile a ainsi retenu la qualité d'employeuse d'une recourante qui donnait régulièrement à l'employée de maison de sa mère des instructions sur la manière d'effectuer son travail (ATA/555/2024 du 3 mai 2024 consid. 2.6 ; ATA/894/2022 du 6 septembre 2022 consid. 6 et les arrêts cités).

3.7 En espèce, les prestations de travail fournies par les employés auprès de feu B______ ne sont pas remises en question et il n'est pas non plus contesté qu'ils étaient chacun liés par un contrat de travail. Les parties divergent cependant sur l'identité de la partie employeuse.

Alors que l'OCIRT a retenu que le recourant revêtait la qualité d'employeur de D______ et E______, l'intéressé prétend avoir agi à l'égard des employés exclusivement en qualité de représentant ou proche aidant de feu son père, lequel était le seul bénéficiaire des prestations des employés. Il le représentait certes dans l'organisation et la mise en œuvre de certains de ses souhaits mais n'intervenait pas dans ses rapports avec ses employés, sauf pour la gestion de la logistique et les formalités administratives. De tels actes entraient dans le cadre d'une entraide familiale exclusivement.

Il ne peut toutefois être suivi.

En premier lieu, outre le fait qu'il a admis intervenir sur le plan administratif, il ressort de ses propres déclarations devant la chambre de céans, mais aussi de celles de D______ et de E______ tant devant l'OCIRT que la chambre de céans, qu'il a engagé seul ces derniers et les rémunérait notamment. Certes, la lettre d'engagement de la seconde ainsi que les documents officiels figurant au dossier (formulaires de l'OCPM des 23 février 2018, 23 septembre 2019, 16 avril 2020, 5 mars 2021 et 18 novembre 2022 et attestations de salaire notamment) portent différentes signatures attribuées à feu B______. Or, comme l'a retenu l'OCIRT, ces signatures ont été apposées par le recourant, ce qu'il a admis.

En deuxième lieu, il ressort des messages WhatsApp échangés entre le recourant et D______ ainsi que des déclarations de ce dernier, que le recourant communiquait très régulièrement avec les employés pour leur demander des nouvelles de son père, mais aussi et surtout pour leur transmettre des instructions sur les tâches à accomplir ou pour s'assurer de la bonne exécution des directives données. On peut citer, par exemple, le rappel adressé à D______ afin qu'il serve des aliments frais et variés à son père ou lui administre des médicaments (15 août 2022) et la communication aux employés des rendez-vous médicaux de son père (2 mars 2022 et 17 août 2022).

En troisième lieu, selon les déclarations concordantes des employés, que rien ne permet de remettre en cause, le recourant accordait les vacances et ces derniers s'adressaient à lui pour toute question en lien avec l'organisation de leur travail. Il fixait également les horaires de travail, soit à l'engagement soit peu de temps après, et gardait le contrôle en cas de changement, ayant admis devant la chambre de céans en être informé, le cas échéant. C'est également à lui que D______ a adressé ses certificats médicaux, auxquels le recourant a donné suite en acceptant la réduction du temps de travail de son employé puis sa démission. Il était en outre le seul destinataire des revendications ou plaintes de D______ en lien avec ses conditions de travail (cf. courriel du 16 août 2022).

Au vu de ce qui précède, il apparaît que le recourant prenait toutes les décisions en lien avec le travail des employés et que feu B______ n'avait aucun pouvoir de décision. Il ne pouvait en être autrement, puisque l'AVC dont ce dernier avait été victime l'avait rendu dépendant et aphasique, ce qui l'empêchait de donner des instructions et de remplir les obligations d'un employeur sur le plan administratif, bien qu'il arrivât à se faire comprendre par des gestes. Le fait qu'il ait signé un acte notarié le 25 juillet 2023 et que son médecin ait attesté de sa capacité de discernement pour cet acte seulement ne change rien à sa dépendance et à son aphasie. Enfin, outre le fait que feu B______ n'était pas en mesure de faire usage des moyens de communication modernes, le recourant n'a jamais indiqué aux employés qu’il ne faisait que transmettre les instructions de son père et agissait sur délégation de ce dernier, ce qui ne ressort du reste pas du dossier.

Dès lors, les employés étaient soumis à l'autorité du recourant, qui s'est comporté comme le seul référent pour l'exécution du contrat, et cela des points de vue personnel, fonctionnel, temporel et économique.

Les arguments contraires de ce dernier n'y changent rien. En effet, il ne peut être suivi lorsqu'il allègue que feu B______ était le seul bénéficiaire des prestations de travail fournies par les employés. En effet, l'embauche des employés pour s'occuper en permanence de ce dernier le soulageait également dans son quotidien, comme l'a déjà admis la chambre de céans dans un cas similaire (ATA/894/2022 du 6 septembre 2022 consid. 6), et ainsi que l'illustrent ses déclarations relatives à ses séjours à l'étranger pour des raisons professionnelles. De même, le fait qu'il ne partageait pas le même foyer et que les outils de travail étaient fournis par feu son père n'est pas déterminant ni même pertinent, puisque la prestation des employés consistait précisément à prendre soin de celui-ci à son domicile.

La qualité d'employeur du recourant est donc établie.

Le grief, mal fondé, sera par conséquent écarté.

4.             Remettant en cause la méthode de calcul utilisée par l'OCIRT, le recourant conteste les heures de travail des employés retenues et, partant, le montant de la sous‑enchère salariale.

4.1 Selon le CTT-EDom, en vigueur dès 2016 et jusqu’à la fin des relations de travail des employés, sont considérés comme personnel de l'économie domestique les travailleurs occupés dans un ménage privé (art. 1 CTT-EDom). Le CTT-EDom s’applique à tout le personnel affecté aux activités domestiques traditionnelles ou nouvelles, notamment aux maîtres d'hôtel, gouvernantes, cuisiniers, cuisinières, valets de chambre, femmes de chambre, chauffeurs, jardiniers, jardinières, ainsi qu’aux autres employés de maison affectés notamment au nettoyage, à l’entretien du linge, aux commissions, à la prise en charge d’enfants, de personnes âgées, de personnes handicapées et de malades, à l’assistance aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux malades dans la vie quotidienne (art. 1 al. 2 CTT‑Edom).

La durée de la semaine de travail desdits travailleurs est de 45 heures (art. 5 al. 1 CTT-EDom). À teneur de l'art. 7 CTT-EDom, sont réputées heures supplémentaires les heures accomplies en sus du maximum quotidien ou hebdomadaire (al. 1). Les heures effectuées les dimanches et jours fériés ouvrent droit, au choix du travailleur, soit à une majoration de salaire de 50%, soit à un congé payé majoré de 50% (al. 2).

L’employeur tient un registre des heures de travail et des jours de repos effectifs. Le travailleur peut s’informer en tout temps sur ses heures de travail, jours de repos, jours fériés et vacances qui lui restent à prendre (art. 10bis al. 3 CTT‑EDom). À défaut, l'enregistrement de la durée du travail fait par le travailleur vaut moyen de preuve en cas de litige (art. 10bis al. 4 CTT-EDom).

4.2 Les salaires minimaux prévus dans le CTT-EDom ont un caractère impératif au sens de l’art. 360a CO (art. 10 al. 7 CTT-EDom). Les contrats-types édictés en application de l’art. 360a CO, relatif aux salaires minimaux, présentent un caractère impératif, de sorte qu’il ne peut être dérogé aux salaires minimaux en défaveur du travailleur (art. 360d al. 2 CO).

4.3 L’art. 10 CTT-Edom, dans sa teneur applicable au moment des faits, concrétise l’obligation de l’employeur de verser les salaires minimaux à ses employés pour une durée hebdomadaire de 45 heures, étant précisé qu’en cas de travail partiel, le salaire minimum est calculé prorata temporis (art. 10 al. 7 CTT EDom). Les salaires minimaux s’élevaient, à partir du 1er janvier 2018, à CHF 3'801.- pour un employé non qualifié, à CHF 4485.- entre novembre et décembre 2020, à CHF 4'512.- à partir du 1er janvier 2021 et à CHF 4537.65, dès le 1er janvier 2022 pour les deux catégories de travailleurs, sans distinction.

Les montants ci-dessus comprennent le salaire en nature pour le logement et pour la nourriture. S’il est logé ou nourri par l’employeur, le travailleur reçoit en espèces la différence entre ces montants et la valeur du logement ou de la nourriture selon les normes AVS en vigueur, rappelées en annexe au CTT-EDom (art. 10 al. 3 CTT‑EDom).

Un décompte détaillé mentionnant les composantes du salaire (notamment salaire brut, heures supplémentaires), ainsi que les retenues (notamment AVS, assurances, impôt à la source) est remis chaque mois au travailleur (art. 10 al. 6 CCT-EDom).

4.4 Parmi les objectifs de la LDét figure le contrôle des employeurs qui engagent des travailleurs en Suisse, et les sanctions qui leur sont applicables en cas de non‑respect des dispositions relatives aux salaires minimaux prévus par les contrats types de travail au sens de l'art. 360a CO (art. 1 al. 2 LDét).

4.5 Le travail à rémunérer, au sens de l'art. 319 CO, s'entend de toute occupation humaine qui tend, de manière planifiée, à la satisfaction d'un besoin. Il ne s'agit pas nécessairement d'un comportement actif. Lorsque le travailleur se tient prêt à fournir sa prestation, cette seule disponibilité à travailler contribue en effet à la satisfaction des besoins de l'employeur. Le service de disponibilité est une prestation de travail ; il ne se conçoit que contre rétribution (art. 320 al. 2 CO), car le travailleur ne fournit pas cette prestation de manière désintéressée, mais en vue de la prestation principale (rémunérée ; ATF 124 III 249 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 4A_96/2017 du 14 décembre 2017 consid. 2.1 et 4A_334/2017 du 4 octobre 2017 consid. 2.2 et 2.3).

4.6 En l'occurrence, il n'est pas contesté que le recourant a engagé au minimum deux employés affectés à la prise en charge quotidienne de feu son père et aux activités domestiques traditionnelles (en l'occurrence ménages, courses, cuisine, toilettes et sorties médicales notamment). Il appartient donc à la catégorie des employeurs mentionnés à l'art. 1 al. 2 LDét et est ainsi soumis au respect des dispositions de la LDét qui renvoient à celles du CTT-Edom.

4.6.1 L'OCIRT a retenu que D______ avait travaillé sept jours sur sept de mars 2018 à septembre 2022, accomplissant 45 heures par semaine du 1er mars au 30 avril 2018 puis 136.5 heures par semaine (soit 19.5 heures par jour de 8h00 à 13h30 et de 18h00 à 8h00), ainsi que quatre jours sur sept d'octobre 2022 à avril 2023, pour 78 heures de travail par semaine. Il a déduit 144 heures par année pendant lesquelles l'employé s'absentait de son lieu de travail pour se rendre aux cours de langue française. Cette déduction n'est pas contestée par le recourant.

L'OCIRT a également retenu, d'une part, que E______ avait travaillé trois jours sur sept du 22 septembre 2022 au 28 février 2023, accomplissant 58.5 heures par semaine, et, d'autre part, qu'elle avait accompli 78 heures par semaine dès mars 2023.

Les décomptes établis par l'OCIRT ne prêtent pas le flanc à la critique. En effet, il ressort des déclarations constantes de D______ que celui-ci a été engagé afin d'assurer une présence 24 heures sur 24 et sept jours sur sept (puis quatre jours sur sept) auprès de feu B______, qu'il avait une pause entre 13h00 ou 14h00 jusqu'à 18h00 au plus tard, que sa journée commençait autour de 8h00 et se terminait vers minuit après le coucher de feu B______ et qu'il devait rester en veille passive la nuit, celui-ci sollicitant parfois son aide, une à deux fois par semaine. En outre, le 16 août 2022, lorsque l'employé s'est plaint de ses conditions de travail auprès de A______, il a notamment rappelé qu'il s'occupait de son père dès le matin et restait à ses côtés jusqu'à 13h30, qu'il restait en soirée avec lui jusqu'à son coucher à minuit et qu'il se réveillait parfois dans la nuit pour l'assister, ce que le recourant n'a pas contesté. Les déclarations de D______ sont d'autant plus crédibles que B______, aphasique et en état de dépendance, avait besoin d'une assistance et d'une présence continues au quotidien, y compris un service de veille permanente. La nécessité d'un tel service de veille ressort d'ailleurs de l'échange du 23 février 2023 entre le recourant et D______. En effet, lorsque l'employé a annoncé au premier son arrêt maladie, ce dernier a répondu que sa propre employée domestique resterait la nuit avec son père.

Aussi, E______ a indiqué, de façon constante également et de manière concordante avec les déclarations de D______, qu'elle travaillait du vendredi à 10h00 jusqu'au lundi à 10h00, sans pause, en alternance avec D______, qui œuvrait les quatre autres jours de la semaine. Le recourant n'a pas contesté les affirmations de son employée, qui a tout au plus précisé, sans apporter de preuves, qu'elle avait un autre emploi de deux heures et demi certains matins. Il sied de préciser que l'OCIRT a concédé à son avantage quatre heures et demie de pause dans l'estimation de la durée du temps de travail effectif, ce qui explique que la durée de travail hebdomadaire retenue soit inférieure à celle avancée par le recourant pour la période du 25 septembre 2022 à fin février 2023.

Les déclarations des travailleurs sur leur temps de travail sont d'autant plus importantes que le recourant ne tenait aucun registre des jours et heures de travail et des jours de repos effectifs, ni de décomptes réguliers des salaires versés, et qu'il s'est contredit au fil de la procédure sur le temps de travail de ses employés. En effet, à cet égard, il a d'abord indiqué, en remplissant le formulaire M du 23 février 2018, que D______ travaillait 45 heures par semaine. Puis, jusqu'à son courrier du 22 septembre 2023, il a soutenu qu'aucune veille n'était prévue et que les employés accomplissaient les durées de travail prévues contractuellement, soit désormais 30 heures hebdomadaires pour D______ et 18 heures hebdomadaires pour E______, pour finalement revenir, dès le 22 septembre 2023, sur ses déclarations et finalement admettre que D______ accomplissait, selon lui, quinze heures par jour (de 10h00 à 13h30 et de 19h00 à 7h00) et E______ 66 heures du 25 septembre 2022 au 28 février 2023, puis 88 heures.

Il convient également de relever que, dans son mémoire de recours, l'intéressé a soutenu que D______ n'avait pu effectuer de veilles, puisque dès que B______ était couché, celui-ci ne réclamait, selon lui, plus rien. Or, cet argument est contradictoire à plusieurs titres. D'une part, le recourant a finalement admis que le temps de travail de son employé s'étendait notamment de 23h00 à 7h00. D'autre part, dans son recours, il a exposé que E______ était astreinte aux veilles de nuit, si bien qu'il apparaît invraisemblable que D______ ne le soit pas lui aussi, leurs tâches étant les mêmes. Pour le surplus, la position de l'intéressé se heurte aux déclarations constantes de D______ et à l'échange du 23 février 2023 précité.

Enfin, les tickets de caisse de 2018 à 2022 produits par D______ (G______, H______, I______ et pharmacies) laissent apparaître que ce dernier effectuait des courses pour les besoins de ce dernier à toute heure de la journée, y compris avant 10h00 et entre 13h00 et 19h00. En effet, parmi ces tickets de caisse, plus de 250 font état d'achats dans cette tranche horaire. Cet élément vient renforcer la thèse selon laquelle D______ travaillait à tout le moins de 8h00 à 13h30 et de 18h00 à 8h00, et non pas de 10h00 à 13h30 et de 19h00 à 7h00 comme soutenu par le recourant, dont la position ne trouve aucun appui dans le dossier. Contrairement à ce qu'il prétend, l'on ne saurait dénier toute valeur probante aux tickets de caisse au seul motif que les employés pouvaient utiliser la carte bancaire mise à leur disposition pour effectuer des courses même en dehors des heures de travail. En effet, cette tâche faisait partie de leur cahier des charges et ils étaient assignés au service de son père 24 heures sur 24.

4.6.2 Les éléments apportés par le recourant ne permettent pas de remettre en cause les décomptes de l'OCIRT.

En premier lieu, l'attestation de D______ comportant le décompte de ses heures d'activité auprès d'autres employeurs produit par le recourant ne modifie pas le résultat auquel l'OCIRT a abouti dans l'estimation des horaires de travail. En effet, selon ce décompte, le travailleur aurait consacré plus de 18 heures par semaine à d’autres emplois. Or, ce nombre est inférieur au temps de pause hebdomadaire retenu par l'OCIRT, soit 31.5 heures par semaine (4.5 x 7), et pendant lequel D______ travaillait deux fois deux heures par semaine chez un autre employeur les après-midis, ce qui n'est pas contesté.

En second lieu, la présence de la mère du recourant à Genève, pendant une période que ce dernier a estimé à quatre fois par an pour des durées de trois à six semaines au domicile de feu son conjoint, n'a aucune influence sur le temps de travail des employés, qui restait le même. En effet, si le recourant fait valoir que sa mère remplaçait les employés pendant ses séjours, en prenant en charge le défunt jour et nuit, hormis une sortie chaque matin de 10h30 à 13h30 assurée par ces derniers, le dossier montre une réalité différente.

Il ressort des échanges de messages WhatsApp entre D______ et la mère du recourant que celle-ci lui donnait des instructions, et ce même avant 10h00 et après 13h30. Il restait ainsi chargé d'effectuer des courses à tout moment de la journée et même l'après-midi (4 février 2022 ; 2 janvier 2023 [messages échangés entre D______ et E______]), d'appeler le chauffagiste (8 février 2022, 16h59) ou encore de passer la prendre à la gare à 15h30 (29 juin 2022). De même, les échanges de messages entre le recourant et D______ ainsi que les photographies versées à la procédure montrent que ce dernier a accompagné les parents du recourant, qui plus est à la demande de celui-ci, lors de leur séjour à Chamonix (14 juin 2022), ce que l'employé a confirmé, et qu'il a notamment dû s'occuper de feu B______ et de son épouse lorsque ceux-ci avaient été atteints du Covid-19 (5 janvier 2023), ce que des échanges de messages entre E______ et D______ confirment (2 janvier 2023).

Si D______ a certes indiqué que, pendant les présences de C______, il avait la possibilité de rentrer chez lui pour la nuit, il a toutefois précisé que le couple pouvait avoir besoin de lui tous les jours, le soir également, notamment si C______ devait sortir, s'il fallait les amener chez leur fils ou si feu B______ recevait un invité. Ces déclarations sont corroborées par les éléments qui précédent.

Il apparaît donc que, malgré la présence – sporadique – de la mère du recourant, les employés continuaient d'exécuter leur travail aux conditions convenues, C______, âgée de 80 ans, ne pouvant les remplacer que très partiellement, et restaient à disposition du couple. Dans la mesure où ils étaient astreints à une présence obligatoire 24 heures sur 24 auprès de feu B______, à la demande du recourant (ce qui ressort des déclarations concordantes des employés), et à défaut de convention contraire des parties en lien avec les visites ponctuelles de C______, leur disponibilité équivalait à du temps de travail devant être rémunérée (art. 320 al. 2 CO). De même, et dans ces circonstances, le fait de les laisser retourner à leur domicile pour la nuit doit être considéré une libération de l'obligation de travailler pour laquelle le salaire restait dû.

Dans ces conditions, il n'est pas utile de déterminer la durée moyenne des séjours de C______. Pour le surplus, les déclarations écrites de celle-ci selon lesquelles, lors de ses séjours, elle s'occupait de son mari hormis trois heures par jour sont contredites par les éléments exposés ci-avant, étant également observé qu'elle n'y a pas indiqué qu'elle se serait chargée des tâches ménagères dévolues aux employés. Ses déclarations sont du reste peu crédibles vu le besoin de prise en charge accru de son époux. Au demeurant, la valeur probante de son attestation doit être relativisée compte tenu de son lien de parenté avec le recourant (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n°446 ad art. 31, p. 117).

En dernier lieu, l'attestation écrite de F______ n'est d'aucun secours au recourant, pour plusieurs raisons. D'abord, elle doit être appréhendée avec circonspection compte du lien d'amitié existant entre F______ et les A______. Ensuite, ce dernier a indiqué avoir séjourné à deux reprises uniquement chez feu B______ (2021 et 2022), de sorte qu'il n'a qu'une connaissance très limitée de la situation. Son attestation est en outre peu crédible, puisqu'elle contredit les propres déclarations du recourant, en tant que l'intéressé prétend qu'après le petit-déjeuner, D______ était libre, ce qui n'était pas le cas. Enfin, il a lui-même confirmé la disponibilité de l'employé à s'occuper de feu B______, voire du couple.

Au vu de tout ce qui précède, l’OCIRT était fondé à retenir les heures de travail susmentionnées.

4.6.3 Les montant des salaires versés aux employés ne sont pas contestés. Ils ressortent d'ailleurs des déclarations de ces derniers et du recourant, des fiches de salaire produites, des certificats de salaire ainsi que des relevés de compte du J______ notamment.

D______ a ainsi perçu un salaire mensuel net de CHF 1'500.- en 2018, de CHF 1'420.- en 2019, de CHF 1'404.95 de janvier à août 2020, de CHF 1'946.20 de septembre 2020 à septembre 2022, de CHF 1'222.65 d'octobre 2022 à janvier 2023 et de CHF 1'253.70 de janvier à avril 2023. Outre le paiement des primes d'assurance maladie de base, il a bénéficié d'un salaire en nature correspondant à CHF 990.- par mois jusqu'en septembre 2022, puis CHF 572.- d'octobre à avril 2023.

Quant à E______, elle a perçu un salaire de CHF 1'625.35 nets par mois depuis son engagement.

Les montants, déterminés par l'OCIRT, que les employés auraient dû recevoir ne sont pas non plus contestés et sont du reste conformes aux prescriptions applicables. C'est donc à bon droit que l'OCIRT a retenu que la sous-enchère salariale était de CHF 566'752.80 à l'égard de D______ et CHF 57'599.33 à l'égard de E______, pour un total de CHF 624'352.12.

Le grief sera ainsi écarté.

5.             Le recourant se plaint implicitement d'une violation du principe de la bonne foi, dans la mesure où il se serait fié aux garanties de l'OCIRT et aurait suivi les directives de ce dernier.

5.1 Ancré à l'art. 9 Cst., et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1 ; ATA/175/2023 du 28 février 2023 consid. 4b et les références citées). En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1).

Une personne ne saurait tirer avantage de la fausseté des déclarations qu'elle a faites ou de l'inexactitude de comportement qu'il a eu antérieurement. Les administrés sont liés pas les renseignements, mêmes inexacts, qu'ils ont donnés puisque l'exercice d'un droit contrairement aux règles de la bonne foi n'est pas protégé (ATA/1357/2020 du 22 décembre 2020 consid. 6c et les références citées).

5.2 En l'espèce, il est certes vrai que c'est seulement le 1er novembre 2022, soit plus de trois ans après le courrier de réponse du 10 avril 2019 du recourant adressé à l'OCIRT, resté sans suite, que celui-ci a repris la procédure de contrôle ayant abouti à la décision querellée. Toutefois, le 10 avril 2019, le recourant a sciemment donné des renseignements erronés à l'OCIRT en indiquant que D______ travaillait – seulement – 30 heures par semaine en qualité d'aide à domicile de son père. Conformément à la jurisprudence précitée, il ne saurait tirer avantage de la fausseté de ses déclarations et ne peut ainsi pas se prévaloir de l'inaction de l'OCIRT pendant ces trois ans, étant au demeurant relevé qu'il apparaît douteux que celle-ci puisse être considérée comme l'assurance que le recourant respectait le CTT-Edom.

Pour ces raisons, il n'est pas fondé à invoquer le principe de la bonne foi.

Mal fondé, le grief sera écarté.

6.             Le recourant conteste la quotité de l'amende qui lui a été infligée.

6.1 Selon l’art. 35 al. 3 de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 (LIRT - J 1 05), l’OCIRT est l'autorité de contrôle compétente pour le prononcé des sanctions et mesures administratives prévues par l'art. 9 LDét. En outre, il est spécifiquement désigné pour être l’autorité compétente pour contrôler le respect des salaires minimaux prévus dans les contrats-types de travail (art. 34A LIRT) et pour prononcer les sanctions administratives qui s’imposent selon l’art. 9 LDét en cas de non-respect de ceux-ci (art. 34B al. 1 LIRT).

6.2 Selon l’art. 39N LIRT, l'OCIRT peut prononcer une amende administrative de CHF 30'000.- au plus lorsqu'un employeur ne respecte pas le salaire minimum prévu à l'art. 39K LIRT. Ce montant peut être doublé en cas de récidive (al. 1). L'office peut également mettre les frais de contrôle à la charge de l'employeur (al. 2).

6.3 La LDét ne contient aucune précision concernant les principes afférents au prononcé d’une amende administrative et à sa quotité. Les règles générales en la matière peuvent ainsi s’appliquer, rien ne s’y opposant.

6.4 Les amendes administratives prévues par la législation cantonale sont de nature pénale. Leur quotité doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal. En vertu de l'art. 1 al. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, ce qui vaut également en droit administratif sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 1 et 3 et 107 CP). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût‑ce sous la forme d'une simple négligence (ATA/927/2024 du 7 août 2024 consid. 4.3 et les arrêts cités). L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP ; ATA/849/2024 du 15 juillet 2024 consid. 4.11.1 et les arrêts cités).

La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/935/2024 du 12 août 2024 consid. 6.1.1 et les arrêts cités).

Il doit être également tenu compte, en application de l'art. 106 al. 3 CP, de la capacité financière de la personne sanctionnée. Sont prises en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst. ; ATA/623/2024 du 21 mai 2024 consid. 4.3 et les arrêts cités).

6.5 De jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La chambre administrative ne la censure qu’en cas d’excès ou d'abus (ATA/131/2023 du 7 février 2023 consid. 5d ; ATA/1253/20 du 13 décembre 2022 consid. 3b).

6.6 La chambre administrative a confirmé une amende de CHF 1'300.- pour une sous-enchère salariale de CHF 24'051.-, commise pendant dix mois, par un employeur dont la collaboration à l’instruction avait été excellente, qui avait procédé au rattrapage salarial et n’avait pas d’antécédents (ATA/1071/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.2). Elle a confirmé une amende de CHF 8'000.- portant sur une sous-enchère salariale de CHF 42'668.-, ayant duré plus d'un an et demi, dans le contexte d’une mauvaise collaboration et de l’absence de rattrapage salarial (ATA/521/2023 du 22 mai 2023 consid. 4.2). Pour une sous-enchère salariale de près de CHF 380'000.- ayant duré quatre ans au détriment de cinq travailleuses domestiques, la chambre administrative a réduit l'amende de CHF 28'000.- à CHF 14'000.- en raison de l'absence d'antécédents, de la faute et de la collaboration de recourante requalifiées de moyenne (ATA/894/2022 du 6 septembre 2022 consid. 9). Dans une affaire dans laquelle la sous-enchère salariale de CHF 166'709.80 a duré trois années et demie et concernait deux employés domestiques, l'amende fixée à CHF 24'300.- a été réduite à CHF 15'000.- pour tenir compte de la situation financière de la recourante (ATA/555/2024 du 3 mai 2024 consid. 4.7).

Dans les affaires relevant de la violation des prescriptions en matière de salaire minimum légal, une amende, dont le montant a été arrêté au maximum de CHF 30'000.-, a été infligée à une société pour avoir pratiqué une sous-enchère de CHF 565'537.54 au préjudice de 43 salariés durant deux ans (ATA/349/2024 du 7 mars 2024 consid. 9.3). En outre, une amende de CHF 28'700.- a été confirmée pour faute particulièrement grave dans le cadre d'une sous-enchère salariale de CHF 274'327.- à l'égard de douze stagiaires pendant une durée de plus de deux ans (ATA/217/2024 du 14 février 2024 consid. 3.10).

6.7 En espèce, l'OCIRT a infligé au recourant une amende de CHF 29'400.-, soit un montant proche du maximum légal mais restant dans la fourchette autorisée par la loi. Elle a été fixée en prenant en compte l'ampleur de la sous-enchère salariale (CHF 624'352.12), la durée de cinq ans et sept mois pendant laquelle celle-ci a été pratiquée et la mauvaise collaboration du recourant, dont la faute a été estimée lourde.

Cette pondération n’est pas critiquable.

En effet, le montant de la sous-enchère salariale est important et celle-ci a été pratiquée à dessein par le recourant pendant une longue durée, permettant ainsi à ce dernier de ne pas débourser un montant considérable.

Malgré l'ouverture de la procédure de contrôle du 1er avril 2019, l'intéressé n'a entrepris aucune démarche, sous réserve de ce qui suit, pour se conformer aux prescriptions du CTT-EDom. Au contraire, il a longtemps faussement prétendu que D______ n'effectuait que 30 heures de travail par semaine et qu'il respectait le temps de travail contractuellement convenu avec les employés, avant de se dédire le 22 septembre 2023 et d'admettre le principe de la sous-enchère.

Les documents requis n'ont été que très partiellement produits. Même lorsqu'il a produit certains d'entre eux, il ne l'a fait qu’après plusieurs relances de l’OCIRT. Il a en outre refusé de fournir des renseignements sur l'employée domestique travaillant pour lui ainsi que les remplaçants employés pendant les années en cause, ce qu'il ne conteste pas. Ainsi, et contrairement à ce qu'il soutient, il apparaît que sa collaboration n'a pas été satisfaisante.

Par ailleurs, sa volonté de réaliser des économies, qui plus est en recourant à un travailleur en situation de précarité et soucieux de préserver son statut légal obtenu dans le cadre de l'« opération Papyrus », dénote un certain mépris du respect des dispositions légales applicables ainsi qu'une volonté de tirer profit de la situation.

Le recourant se prévaut d'avoir procédé à une mise en conformité partielle en déclarant en partie ses dernières employées aux assurances sociales et en faisant un rattrapage partiel du salaire de E______. Or, en tant que le montant de CHF 37'221.40 versé à celle-ci est relativement faible par rapport à la somme totale de la sous-enchère salariale (5.96%), ce versement n'est pas propre à relativiser la gravite de sa faute, ce d'autant plus qu'il a été effectué tardivement (le 22 novembre 2023 selon l'extrait de compte du J______). Pour le surplus, le recourant a confirmé, lors de son audition devant la chambre de clans, ne pas avoir procédé à d'autres rattrapages salariaux, en particulier pas en faveur de D______.

L’amende de CHF 29'400.- apparaît ainsi proportionnée à l’importance de la sous‑enchère salariale, à la gravité de la faute du recourant et à sa faible collaboration, même s’il n’a pas d’antécédents. Le recourant n'allègue du reste pas qu'il se trouverait dans l'impossibilité de s'en acquitter.

Les frais de contrôle de CHF 900.-, l'émolument de sanction de CHF 100.- et l'émolument administratif de CHF 35.- ont été établis à satisfaction de droit par l’OCIRT. Le recourant ne les conteste d’ailleurs pas.

Entièrement mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

7.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.-, qui prend en compte la tenue d'une audience ainsi que les frais d'interprète de CHF 160.-, sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

Compte tenu du prononcé du présent arrêt, la requête en octroi de l'effet suspensif est sans objet, ce qu'elle était au demeurant déjà dès le dépôt du recours, puisque celui-ci produit ex lege un effet suspensif et que l'OCIRT n'a pas ordonné l'exécution nonobstant recours de sa décision (art. 66 al. 1 et 3 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 février 2024 par A______ contre la décision de l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 22 janvier 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christophe WILHELM, avocat du recourant, ainsi qu'à l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. DESCHAMPS

 

la présidente siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :