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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4116/2023

ATA/93/2024 du 29.01.2024 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4116/2023-FPUBL ATA/93/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 29 janvier 2024

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Romain JORDAN, avocat

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE intimés
représenté par Me Marc HOCHMANN FAVRE, avocat



Vu le recours interjeté le 8 décembre 2023 par A______ contre la décision des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 7 novembre 2023 résiliant les rapports de service de la précitée avec effet au 26 novembre 2023 ; qu’elle conclut, préalablement, à l’apport de l’intégralité de son dossier, à l’audition des parties, de B______, de C______ et de D______ et, principalement, à l’annulation de la décision et à sa réintégration ;

qu’elle avait travaillé auprès de la Ville de Genève (ci-après : la ville), mais s’était vue contrainte de « se mettre en arrêt maladie » en raison d’un burnout en février 2022 ; que son arrêt avait été prolongé jusqu’en septembre 2022 ; qu’étant persuadée qu’un retour à son poste de travail n’était pas possible, elle avait mandaté un avocat afin de négocier une convention de départ ; que les parties, impliquant le maire, le secrétaire général et le directeur adjoint du secrétaire général (ci-après : adjoint) s’étaient mises d’accord sur « le principe d’un départ » au 30 septembre 2022 et une indemnité de neuf mois de salaire ; que son conseil avait informé, le 29 septembre 2023, l’adjoint des termes de l’accord et qu’il se tenait à disposition pour « le mettre en musique », à savoir la rédaction de la convention ; qu’elle avait été convaincue que ses rapports de service avec la ville avaient pris fin au 30 septembre 2023 et ainsi accepté un poste de responsable des ressources humaines (ci‑après : RH) au sein du département de psychiatrie des HUG ; qu’elle avait informé ces derniers, pour qui elle avait commencé à travailler le 1er octobre 2023, des négociations en cours avec la ville ; qu’elle avait croisé fortuitement l’adjoint fin octobre 2023 et, interrogée quant à sa situation, n’avait pas souhaité répondre ; que le directeur du contrôle financier avait immédiatement après cette rencontre appelé les RH des HUG et eu confirmation de son engagement ; que, par courrier du 2 novembre 2023, le Conseil administratif de la ville (ci-après : CA) l’avait informée de son intention de résilier les rapports de service avec effet immédiat pour justes motifs ; qu’elle avait été entendue sur ces faits par la ville le 3 novembre 2023 ; que le 7 novembre 2023, les HUG avaient résilié ses rapports de service avec effet au 26 novembre 2023 ;

qu’elle fait valoir que la décision est dépourvue de motivation justifiant son caractère exécutoire ; que ce dernier la condamnait à une précarité brutale ; que, sur le fond, elle observait que la décision ne contenait pas d’état de fait ni motivation et avait été prise sans vérifier si les allégations de la ville étaient fondées ; que, dans les trois jours impartis avant son audition, elle n’avait pas eu le temps d’accéder au dossier et faire valoir efficacement son point de vue ; que les HUG, même après un examen sommaire de la situation, auraient dû se rendre compte que la version qu’elle soutenait était plausible ;

que les HUG ont conclu au rejet de la requête de restitution de l’effet suspensif ; que la recourante avait déposé sa candidature le 20 mai 2023 ; qu’elle avait indiqué, lors du contact qu’elle avait eu avec le professeur E______, chef du département de psychiatrie, qu’elle était disponible à compter du 1er octobre 2023 et attendait une confirmation écrite des HUG pour donner sa démission à la ville ; qu’ainsi, les HUG avaient établi une attestation d’engagement au 1er octobre 2023, sous réserve de l’aboutissement favorable de toutes les démarches administratives ; que différentes pièces avaient été demandées à la recourante, dont la fiche « renseignements personnels » qu’elle devait remplir ; que l’intéressée avait retourné cette pièce le 15 août 2023, indiquant comme date de départ de la ville le « 29/09/2023 » et que le motif de départ était « démission » ; que par courriel du 8 septembre 2023, l’assistante RRH des HUG, avait indiqué à A______ qu’elle avait besoin de tous les documents demandés pour organiser son arrivée le 1er octobre 2023 ; que celle-ci avait répondu, par courriel du 12 septembre 2023 qu’elle ne pourrait apporter en mains propres son dossier, car « la période, avant [s]on départ, [était] bien chargée, entre la clôture des dossiers en cours et la formation de [s]on successeur » et qu’elle remettrait les documents le lendemain ; que la recourante avait commencé son activité pour les HUG le 2 octobre 2023 à 8h00 ; que le 1er novembre 2023, les HUG avaient eu la confirmation, par la ville, que A______ était toujours employée de celle-ci ; que le 3 novembre 2023, un entretien entre le prof. E______, l’adjoint à la direction des RH des HUG, la responsable RH du département de psychiatrie et la recourante avait eu lieu lors duquel celle-ci avait été informée que les HUG avaient appris qu’elle n’avait pas démissionné de son poste à la ville, contrairement aux indications qu’elle avait fournies ; qu’elle avait alors expliqué qu’il existait un contentieux entre elle et la ville et que son conseil négociait une transaction et qu’elle disposait d’une confirmation de libération au 30 septembre 2023 ; qu’elle avait admis avoir été négligente ; qu’un délai au 7 novembre 2023 lui avait été imparti pour transmettre tout élément utile, une décision étant ensuite prise ; que dans un courriel du même jour, l’intéressée avait indiqué que sa situation « avait bien été réglée préalablement à [son] entrée en fonction aux HUG » ; que par courriel du 6 novembre 2023, elle avait ajouté qu’elle était « au bénéfice d’une résiliation avec effet immédiat, malgré une convention de départ datée du 29 septembre 2023 » ; que, selon la pièce que la recourante avait jointe à son courriel, la ville envisageait un licenciement avec effet immédiat et l’invitait à se déterminer à cet égard jusqu’au 6 novembre 2023 ; que la responsable RH du département de psychiatrie avait convoqué la recourante à un entretien le lendemain à 10h00 ; que lors de celui-ci, elle lui avait remis la décision querellée ; qu’aucune urgence ne justifiait la restitution de l’effet suspensif ;

que, dans sa réplique sur effet suspensif, la recourante a relevé que les intérêts financiers des HUG ne seraient pas mis en péril par la restitution de l’effet suspensif, dès lors qu’elle continuerait à mettre sa force de travail à leur bénéfice ; que le refus de sa requête la privait du contrôle judiciaire de ses griefs et vidait l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) de sa substance ;

que, sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par le président de ladite chambre, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par une juge ;

que l'art. 66 LPA qui prévoit que, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/795/2021 du 4 août 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020) ;

qu’elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ; que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

que lors de l'octroi ou du retrait de l'effet suspensif, l'autorité de recours dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

qu’en l'espèce, il convient en premier lieu de relever que le refus de restituer l’effet suspensif n’est nullement susceptible de priver la recourante du contrôle judiciaire de la décision querellée ; qu’en effet, la chambre administrative examinera les mérites du recours, quelle que soit la décision sur restitution de l’effet suspensif ;

que, contrairement à ce que soutient la recourante, le refus de ladite restitution n’est pas de nature à vider l’art. 66 LPA de sa substance, cette disposition servant précisément à guider la juge dans l’examen des conditions d’octroi ou de restitution de l’effet suspensif ;

que si, certes, la décision querellée ne comporte pas de motivation sur son caractère immédiatement exécutoire, l’autorité intimée a apporté, dans sa détermination à ce sujet, des éléments exposant sa position ;

que les conclusions sur effet suspensif visent in casu à ce que la recourante obtienne, durant la procédure, ce qu’elle réclame au fond ; or, comme évoqué ci-dessus, les mesures provisionnelles ne sauraient anticiper le jugement au fond ;

que, par ailleurs et comme le relève l’autorité intimée, l'intérêt public à la préservation des finances des HUG est important et prime l’intérêt financier de la recourante à percevoir son salaire durant la procédure (ATA/227/2023 du 7 mars 2023 ; ATA/466/2021 du 28 avril 2021 et les références citées) ;

qu’en outre, bien qu’elle s’en prévale, la recourante ne rend pas vraisemblable qu’elle subirait un préjudice financier difficilement réparable en cas de refus de restituer l’effet suspensif, ne produisant aucune pièce relative à sa situation financière ;

qu’enfin, et sans préjudice de l’examen au fond, les chances de succès du recours ne paraissent pas à ce point manifestes qu’elles justifieraient à elles seules la restitution de l’effet suspensif, étant relevé que l’employeur dispose d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’il décide de résilier les rapports de service pendant la période probatoire (ATA/942/2021 du 14 septembre 2021 consid. 7b ; ATA/398/2019 du 9 avril 2019 consid. 6b ; ATA/408/2017 du 11 avril 2017) ;

que la requête de restitution de l’effet suspensif sera, partant, rejetée ;

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais du présent incident ;

qu’a priori, la valeur litigieuse au sens des art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) est supérieure à CHF 15'000.- .

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête de restitution de l’effet suspensif ;

réserve le sort des frais de l’incident ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, avenue du Tribunal-fédéral 29, 1005 Lausanne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Romain JORDAN, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Marc HOCHMANN FAVRE, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

 

 

Le président :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :