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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4435/2022

ATA/1183/2023 du 31.10.2023 sur JTAPI/669/2023 ( ICCIFD ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 08.12.2023, 9C_762/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4435/2022-ICCIFD ATA/1183/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 octobre 2023

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Goran ANTONIJEVIC, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
19 juin 2023 (JTAPI/669/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : le contribuable) exerçait une activité indépendante à travers une raison individuelle active dans la maçonnerie et le carrelage, qui a été inscrite au registre du commerce de Genève (ci-après : RC) le 6 janvier 2009, sous le nom « B______ ». Il en était l’unique titulaire avec signature individuelle.

L’inscription de l’entreprise a été radiée du RC le 29 mars 2021 par suite de cessation de l’exploitation.

b. Dans ses déclarations fiscales 2008 à 2012, qu’il a déposées conjointement avec son épouse d’alors (de laquelle il a divorcé en 2013), le contribuable a indiqué une fortune nulle et les revenus imposables suivants :

Année Revenus ICC Revenus IFD

2008 CHF 91'484.- CHF 86'900.-

2009 CHF 92'454.- CHF 88'985.-

2010 CHF 116'952.- CHF 122'261.-

2011 CHF 120'864.- CHF 128'803.-

2012 CHF 117'900.- CHF 123'078.-

Ses comptes commerciaux joints faisaient état de chiffres d’affaires de l’entreprise de CHF 821'718.- (2008), CHF 855'706.- (2009), CHF 831'990.- (2010), CHF 915'176.- (2011) et CHF 922'775.- (2012).

c. Pour ces périodes fiscales, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a taxé le contribuable sur une fortune nulle et sur les revenus suivants :

Année Revenus ICC Revenus IFD

2008 CHF 93'908.- CHF 89'300.-

2009 CHF 94'878.- CHF 91'300.-

2010 CHF 111'090.- CHF 116'400.-

2011 CHF 122'095.- CHF 128'600.-

2012 CHF 127'372.- CHF 130'900.-

Pour la période 2010, elle a opéré une reprise sur le revenu de CHF 2'939.- pour l’utilisation privée du véhicule professionnel. Pour l’année 2011, elle a admis en déduction la pension alimentaire versée jusqu'à la majorité de la fille C______, soit jusqu'en août 2011 (CHF 6'400.-). Pour chacune de ces deux années, elle a admis, s’agissant des impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC), une charge de famille entière (pour le fils) et une demi-charge (pour la fille). S’agissant de l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD), elle a admis deux charges entières.

Ces taxations sont entrées en force, sans avoir été contestées.

B. a. Le 7 juillet 2017, l'AFC-GE a informé le contribuable de l'ouverture à son encontre de procédures en rappel et en soustraction des ICC et IFD 2007 à 2012, au motif que d’après une communication de l'administration fédérale des contributions (division de la TVA ; ci-après : AFC-CH), il n'avait pas déclaré l'entier du chiffre d'affaires de son activité indépendante, ni certains de ses comptes bancaires et postaux. Elle lui a demandé de lui remettre divers documents concernant ses avoirs mobiliers et son entreprise individuelle.

b. Dans le cadre de l’instruction de ces procédures, le contribuable a produit des éléments non déclarés concernant son activité indépendante, dont des biens mobiliers (avoirs sur des comptes bancaires et postaux et dans un coffre-fort) et des immeubles à l’étranger (Italie et France). Les relevés bancaires et postaux non déclarés faisaient état d’encaissements liés à son activité indépendante (CHF 1'190'024.- en 2008, CHF 889'197.- en 2009, CHF 889'916.- en 2010, CHF 998'350.- en 2011 et CHF 978'974.- en 2012) et à la location en 2012 de sa maison en France (CHF 19'795.- = EUR 16'422.70). Il en ressortait un chiffre d’affaires non déclaré de CHF 378'550.- en 2008, CHF 45'951.- en 2009, CHF 125'448.- en 2010, CHF 110'166.- en 2011 et CHF 90'497.- en 2012.

c. Le 26 janvier 2022, l'AFC-GE a notifié au contribuable et à son ex-épouse des bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2007 à 2012 et, au contribuable uniquement, deux bordereaux d’amende pour la soustraction des ICC et IFD 2012, précisant que les procédures s’étaient terminées sans amendes pour les années 2007 à 2011.

Les suppléments d’impôt s’élevaient à CHF 51'272.50 (ICC 2007), CHF 20'695.10 (IFD 2007), CHF 112'187.60 (ICC 2008), CHF 46'622.10 (IFD 2008), CHF 12'381.35 (ICC 2009), CHF 3'743.65 (IFD 2009), CHF 33'679.60 (ICC 2010), CHF 16'233.85 (IFD 2010), CHF 29'703.90 (ICC 2011), CHF 14'572.10 (IFD 2011), CHF 24'876.55 (ICC 2012) et CHF 12'394.80 (IFD 2012).

Les reprises sur les revenus et fortune concernaient le chiffre d’affaires de l'entreprise individuelle et les biens mobiliers et immobiliers non déclarés.

La quotité des amendes infligées pour la soustraction des ICC et IFD 2012 était fixée à une fois le montant de ces impôts (CHF 24'876.- et CHF 12'394.-), compte tenu de la faute intentionnelle, de l’importance des montants soustraits et de la bonne collaboration du contribuable.

d. Le 25 février 2022, le contribuable a formé réclamation contre ces bordereaux, précisant que son ex-épouse les avait contestés par une réclamation séparée.

Jusqu’en 2013, les comptes de son entreprise individuelle avaient été établis par une fiduciaire.

Les bordereaux d’amende étaient contestés dans leur principe et, subsidiairement, dans leur quotité. L’importance des montants soustraits avait été retenue comme circonstance aggravante, alors que le montant de la reprise sur le chiffre d’affaires 2012 s’élevait à seulement CHF 90'497.-. De plus, il avait pleinement collaboré tout au long de la procédure, en fournissant notamment des relevés de crédits et en répondant aux questions posées, même si les faits remontaient jusqu’à 2007. Enfin, le fait d’avoir fait confiance en des mandataires qualifiés pour l’établissement de sa comptabilité, présumant de ce fait que celle-ci ne posait pas de problèmes, devait être retenu comme une circonstance atténuante.

e. Le 31 mars 2022, le contribuable a complété sa réclamation.

Certains versements non déclarés sur ses comptes bancaires n’avaient pas de lien avec son activité professionnelle. En raison de l’ancienneté des périodes concernées, il lui était impossible de retrouver systématiquement l’origine de tous les crédits. Il se rappelait toutefois avoir utilisé ces comptes de manière « particulièrement désorganisée ». Il avait régulièrement procédé à des prélèvements dans « un compte » et à des versements sur un « autre compte », notamment afin de procéder à « certains achats » ou de mettre de l’argent à disposition de sa conjointe. Par ailleurs, à de nombreuses reprises, il avait dû rembourser des clients en espèces suite à des « erreurs de paiement » ou à des conflits concernant la facturation. Certains crédits, totalisant plus de CHF 20'000.‑, provenaient de diverses assurances. En outre, des encaissements réalisés lors d’une année pouvaient correspondre à des facturations d’un autre exercice.

Pour déterminer son chiffre d'affaires 2007 à 2012, l'AFC-GE avait cumulé des crédits sur ses comptes bancaires. Cette méthode était inappropriée car elle aboutissait à un résultat ne correspondant pas à la réalité économique. Elle tenait en effet compte d’un « nombre important » de versements étrangers à son activité indépendante, qu’il n’était pas en mesure de préciser exhaustivement au vu de l'ancienneté des périodes fiscales concernées. Il n’avait pas établi de bilans pour les exercices 2007 à 2009, ni de grands livres 2010 à 2012, mais avait remis à
l'AFC-GE des pièces comptables qui auraient « éventuellement » permis de déterminer le chiffre d'affaires réel de son activité. Par ailleurs, selon l'expérience de la vie, le chiffre d’affaires retenu par l'AFC-GE ne correspondait pas à celui d'une entreprise de carrelage de la taille de celle qu’il exploitait, en employant seulement deux salariés de 2007 à 2009, trois de 2010 à 2012 et un sous-traitant. Selon les informations qu'il avait pu obtenir en se renseignant sur le marché, les chiffres moyens « estimés » de son entreprise devaient s’élever au maximum à CHF 690'000.- par année entre 2007 et 2009, à CHF 910'000.- par année entre 2010 à 2012 et à CHF 1'000'000.- à partir de 2013. Dès lors, les chiffres d’affaires qu’il avait déclarés étaient corrects.

L’amende 2012 ne se justifiait pas dans son principe, dès lors que l'élément subjectif de la conscience et de la volonté d'éluder l'impôt, de même que l'imprévoyance coupable, n’étaient pas donnés. En effet, il n'avait pas fait d'études ni travaillé dans un domaine administratif. Pour la préparation de sa comptabilité et de ses déclarations fiscales, il avait fait appel à des fiduciaires de la place. Ainsi, il était excessif de lui infliger une amende, en sus d'un rappel d'impôt.

Pour la quotité de l'amende, une circonstance aggravante avait été retenue à tort, alors que le montant des reprises effectuées en 2012 était « limité ». En effet, dans la mesure où il ne se justifiait pas d'effectuer des reprises sur le chiffre d’affaires, le montant des redressements effectués dans le cadre des taxations 2007 à 2012 était faible, si bien qu’il ne pouvait être retenu comme une circonstance aggravante.

f. Par courrier du 30 juin 2022, donnant suite à une demande de renseignements de l'AFC-GE du 8 avril 2022, le contribuable lui a notamment indiqué que, selon ses estimations, son chiffre d’affaires s’était élevé à CHF 640'000.- en 2007, CHF 770'000.- en 2008, CHF 690'000.- en 2009, CHF 820'000.- en 2010, CHF 910'000.- en 2011 et CHF 820'000.- en 2012.

g. Par courrier recommandé du 2 septembre 2022, l'AFC-GE a informé le contribuable de son intention de rectifier en sa défaveur les bordereaux de rappel des ICC et IFD 2012, en raison d’une reprise supplémentaire sur le chiffre d’affaires de CHF 10'000.-, et lui a demandé de produire divers documents concernant ses loyers commerciaux et les taxes d’habitation relatives à son immeuble en France.

h. Par décision du 17 novembre 2022, l'AFC-GE a partiellement admis la réclamation du 25 février 2022, en ce sens que les reprises sur le chiffre d’affaires 2008, 2010 et 2011 étaient réduites de respectivement CHF 7'928.-, CHF 59'277.- et CHF 1'160.- et que celles sur les avoirs au coffre-fort étaient ramenées à CHF 20'000.- pour toutes les années en cause. La réclamation était rejetée pour le surplus.

Lors du contrôle effectué par l'AFC-CH, il avait été constaté que le contribuable n’avait tenu aucun livre de caisse, que les opérations en caisse ne pouvaient pas être suivies de manière fiable, que la caisse n'était pas probante, que certaines factures encaissées en espèces n’avaient pas été comptabilisées et que des recettes avaient été encaissées directement sur divers comptes bancaires et postaux, sans avoir été saisies en comptabilité.

Il ressortait des mouvements des comptes bancaires et postaux non déclarés qu’un bon nombre de crédits, jugés commerciaux, n’étaient pas saisis en comptabilité. Les reprises correspondaient à la différence entre les crédits bancaires jugés commerciaux et le chiffre d'affaires déclaré par le contribuable, soit CHF 370'622.- (2008), CHF 45'951.- (2009), CHF 66'171.- (2010), CHF 109'006.- (2011) et CHF 90'497.- 2012. Pour les périodes 2008, 2010 et 2011, et suite à la réclamation du contribuable, elle avait considéré comme non commerciaux les montants de respectivement CHF 7'928.-, CHF 59'277.- et CHF 1'160.-. Si l'on pouvait difficilement estimer un chiffre d'affaires non déclaré en l’absence de moyens de preuve suffisants, « les entrées de plusieurs comptes bancaires [étaient] suffisamment probantes pour vérifier les produits comptabilisés dans les comptes de pertes et profits de chacune des années concernées ». Ainsi, en comparant les crédits des comptes bancaires commerciaux et privés, on pouvait s'apercevoir que tous les crédits commerciaux n'avaient pas été comptabilisés. En revanche, elle avait corrigé les erreurs relevées dans la réclamation.

S’agissant du principe et de la quotité des amendes 2012, le contribuable n'avait pas enregistré ni déclaré les chiffres d'affaires litigieux. Certaines recettes n'étaient pas saisies en comptabilité, tout comme des encaissements en espèces. Par ailleurs, il avait commis d'autres soustractions en ne déclarant pas ses deux biens immobiliers et les rendements y relatifs, ainsi que ses comptes bancaires et coffre-fort. Dès lors, il avait agi avec la volonté d'induire le fisc en erreur, ne serait-ce que sous forme de dol éventuel. Les amendes étaient ainsi justifiées dans leur principe. L'ensemble de ces infractions avait été commis intentionnellement ou, à tout le moins, par dol éventuel. Les montants soustraits étaient importants, ce qui était une circonstance aggravante. Cependant, elle avait retenu également la bonne collaboration comme circonstance atténuante. Par conséquent, la quotité fixée à une fois le montant de l'impôt soustrait était confirmée.

i. Le même jour, l'AFC-GE a notifié au contribuable des bordereaux rectificatifs tenant compte des corrections admises.

C. a. Par acte du 21 décembre 2022, le contribuable a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Préalablement, il a conclu à ce que le TAPI constate que la prescription absolue avait été acquise pour l’année fiscale 2007.

La reprise sur ses avoirs au coffre-fort (CHF 20'000.-) n’était plus contestée. S’agissant des reprises sur son chiffre d’affaires, il a produit un tableau récapitulant les montants retenus à tort par l’AFC-GE pour les périodes fiscales 2007 à 2013 (pièce 35). Il s’agissait de crédits bancaires, provenant notamment des caisses de compensation GGE (Groupement genevois d’entreprises du bâtiment et du génie civil) et AVS, totalisant CHF 117'122.05, qui n’avaient aucun lien avec son activité professionnelle.

Par ailleurs, l'AFC-GE n’avait corrigé que le montant du chiffre d’affaires, sans ajuster celui des charges. La méthode employée par l'AFC-GE n'était ainsi pas cohérente. Elle n’était pas non plus « optimale », dès lors qu’elle ne permettait pas de déterminer son chiffre d’affaires effectif et d’établir sa réelle capacité contributive. Selon ses estimations, le chiffre d’affaires que l’on pouvait raisonnablement lui attribuer s’élevait à CHF 690'000.- par année entre 2007 et 2009 et à CHF 910'000.- par année entre 2010 à 2012.

Il contestait les bordereaux d’amende ICC et IFD 2012 sur leur principe et, subsidiairement, sur leur quotité, rappelant qu’il ne disposait pas de connaissances ou compétences en matière administrative, comptable et/ou fiscale et que, jusqu'en 2013, il avait fait appel à un mandataire spécialisé pour établir ses comptes, sans qu’il puisse se douter un instant qu’ils étaient erronés. II avait d'ailleurs changé de mandataire en 2014, dès qu'il s'était aperçu que sa comptabilité n'était pas faite correctement. Dans ces conditions, il lui semblait excessif et injustifié de le punir doublement, en lui infligeant des amendes et des rappels d'impôt.

Enfin, l'AFC-GE n’avait pas motivé la seule circonstance aggravante retenue, alors que le montant repris en 2012 restait limité. À cet égard, il a rappelé sa bonne collaboration et avoir fait preuve de toute la diligence requise dans le cadre de ses déclarations fiscales. Partant, eu égard à l'écoulement du temps, l'absence d'antécédents, sa manière de procéder, sa situation actuelle et son état de santé, ainsi qu'à toutes les démarches entreprises afin de structurer son activité professionnelle et s'assurer que sa comptabilité et ses déclarations fiscales soient établies de manière correcte, il lui semblait plus que raisonnable de ne retenir que des circonstances atténuantes et, par conséquent, de fixer l'amende au tiers du montant de l'impôt soustrait.

b. Dans sa réponse du 7 mars 2023, l'AFC-GE a relevé que la période fiscale 2007 était atteinte par la prescription.

Après avoir effectué un contrôle de l’entreprise individuelle du contribuable, elle avait identifié du chiffre d’affaires non comptabilisé qu’elle avait réintégré dans le cadre de la procédure de rappel d’impôt. La méthodologie qu’elle avait employée reposait sur des éléments concrets, à savoir les relevés bancaires et postaux du contribuable. Il n’y avait pas lieu de prendre en compte de nouvelles charges par estimation, car celles-ci étaient réputées avoir déjà été comptabilisées. Dans la mesure où il n’était pas question d’une comptabilité intégralement reconstituée, seule la part du chiffre d’affaires réputé manquant était reprise. Les estimations et l'analyse des statistiques de la Chambre Genevoise du Carrelage et de la Céramique (CGCC) n’étaient pas déterminantes.

Elle avait reconstitué l’ensemble du chiffre d’affaires sur la base des relevés bancaires et postaux. Concrètement, le chiffre d’affaires avait été déterminé en comptabilisant l’ensemble des crédits des comptes bancaires et en déduisant du total le chiffre d’affaires initialement déclaré. Tenant compte des observations du contribuable au cours de la procédure et des éléments produits sous pièce n° 35 (recourant), la reconstitution donnait lieu aux éléments suivants :

Années fiscales

2008

2009

2010

2011

2012

Chiffre d’affaires reconstitué

CHF 1'190'024.-

CHF 889'197.-

CHF 889'916.-

CHF 998'350.-

CHF 998'769.-

Chiffre d’affaires déclaré

CHF 821'718.-

CHF 855'706.-

CHF 831'990.-

CHF 915'176.-

CHF 922775.-

Reprises du chiffre d’affaires

CHF 368'306.-

CHF 33'491.-

CHF 57'926.-

CHF 83'174.-

CHF 75'994.-

Il était toutefois précisé que les tableaux que le contribuable avait joints à son recours (pièce n° 35) indiquaient certains montants qu’elle avait déjà corrigés au stade de la réclamation, ainsi que des sommes qu’elle n’avait jamais reprises au titre du chiffre d’affaires (2010 : vente de titres pour CHF 42'069.70 ; 2011 :
CHF 1'160.-).

Les amendes étaient justifiées dans leur principe et leur quotité. Le contribuable avait déposé des déclarations fiscales incorrectes, n’y mentionnant pas l'entier de ses revenus et de sa fortune, si bien que des soustractions avaient été commises. Il n'avait ainsi pas fait le nécessaire pour s'assurer que ses taxations soient complètes et exactes et avait donc violé une obligation légale lui incombant. Il en avait résulté un dommage pour la collectivité publique. En retenant, pour la quotité, l’intention, l’importance des montants soustraits et la bonne collaboration, elle n’avait pas outrepassé son pouvoir d'appréciation. Elle n'avait pas tenu compte des circonstances aggravantes, telles que le « délit fiscal » commis par le contribuable ou encore le caractère répétitif de son comportement délictueux, qui auraient pu justifier une quotité d’amende plus élevée. Aussi, la quotité de l'amende était modérée.

c. Par jugement du 19 juin 2023, le TAPI a partiellement admis le recours et renvoyé le dossier à l’AFC-GE pour nouveaux bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2010 et 2011 dans le sens des considérants.

Il était donné acte de ce que l’AFC-GE avait indiqué annuler les bordereaux de rappel des ICC et IFD 2007 pour cause de prescription, ramener le revenu locatif 2010 et 2011 de l’immeuble français de CHF 19'381.- à respectivement CHF 5'749.- et CHF 5'137.- et accepter une déduction forfaitaire pour frais d’entretien de cet immeuble en 2012.

Les décisions de taxation du recourant pour les années 2008 à 2012 n’avaient pas été contestées. Celles-ci étaient donc entrées en force concernant les éléments alors retenus, en particulier une demi-charge de famille pour sa fille (ICC 2011 et 2012) et un revenu supplémentaire de CHF 2'939.- pour l’utilisation privée du véhicule professionnel (ICC et IFD 2010). Les bordereaux de rappel d’impôts du 26 janvier 2022, rectifiés sur réclamation le 17 novembre 2022, ne portaient que sur la question des reprises effectuées concernant le chiffre d’affaires relevé lors du contrôle effectué par l’AFC-CH, le loyer de l’immeuble français et les avoirs gardés dans le coffre-fort.

En se contentant de soutenir que l’AFC-GE n’avait pas prouvé que les montants crédités sur ses comptes bancaires correspondaient à son chiffre d’affaires, le contribuable avait inversé le fardeau de la preuve. Il perdait également de vue que les montants qui accroissaient le patrimoine d’une personne étaient inclus dans son revenu imposable, quelle qu'en soit l’origine.

S’agissant du revenu locatif de son immeuble français, l’AFC-GE avait accepté de n’imposer que la valeur locative pour les périodes 2010 à 2011. En revanche, pour la période 2012, il convenait de confirmer le montant de CHF 19'795.- au lieu de celui de CHF 19'381.- correspondant à la location en 2013. Au vu du faible montant en cause, il était toutefois renoncé à une reformatio in peius.

S’agissant des amendes ICC et IFD 2012, les conditions de la soustraction fiscale étaient remplies, de sorte qu’elles étaient justifiées dans leur principe. La soustraction procédait d’une faute grave. Tenant compte de la bonne collaboration du contribuable, l’AFC-GE avait fixé la quotité des amendes à une fois les impôts soustraits, ce qui apparaissait proportionné aux circonstances et à l’intensité de sa faute.

D. a. Par acte expédié le 24 juillet 2023, le contribuable a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à l’annulation des bordereaux de rappels d’impôts IFD et ICC 2008 à 2012 et les bordereaux d’amende ICC et IFD 2012 et au renvoi de la cause à l’AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation 2008 à 2012.

La méthode de l’AFC-GE consistant à cumuler les crédits ressortant de ses comptes bancaires, sans opérer une grande analyse, ne pouvait aboutir qu’à un résultat ne reflétant pas sa réalité économique, puisqu’elle revenait à prendre en considération des éléments qui ne faisaient pas partie de son activité commerciale. Il avait identifié environ 40 exemples de crédits retenus à tort par l’AFC-GE comme étant du chiffre d’affaires, ce qui représentait une reprise injustifiée de plus de CHF 130'000.- entre 2008 et 2012.

Une comparaison entre les résultats découlant du contrôle et ceux d’une entreprise de carrelage de la taille de la sienne permettait de démontrer le caractère inapproprié des reprises effectuées.

Les cotisations personnelles AVS/AI/APG étaient justifiées par l'usage commercial, de sorte qu’elles auraient dû être prises en compte pour déterminer le montant net imposable. Refuser de prendre en considération une provision pour l'AVS revenait à reporter la déduction des charges sociales sur l’année 2023, alors que son entreprise n’existait plus depuis 2021 et que sa capacité contributive était totalement différente de celle des années précédentes.

Les amendes pour l’année fiscale 2012 n’étaient pas justifiées. Pour les motifs déjà exposés, aucune faute, même par négligence, ne devait lui être reprochée. S’agissant de la quotité, il aurait été plus raisonnable de ne retenir que la circonstance atténuante, fixant l’amende en dessous du montant de l’impôt soustrait, notamment au tiers du montant concerné.

b. Par réponse du 3 août 2023, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours, en se référant à la réponse et à la duplique qu’elle avait formées devant le TAPI.

c. Le 18 août 2023, le contribuable a sollicité la tenue d’une audience pour faire valoir sa position.

d. Le recourant a répliqué le 6 septembre 2023, reprenant sa précédente motivation.

e. Par duplique du 14 septembre 2023, l’AFC-GE a persisté. Le fait que la présente procédure ne comportât que des amendes ICC et IFD pour l’année 2012 s’expliquait en raison des prescriptions intervenues pour les années antérieures lors de la notification.

f. Le 5 octobre 2023, l’AFC-GE a sollicité la disjonction de la présente cause, afin de traiter les volets administratif et pénal séparément.

g. À l’audience de comparution personnelle et de plaidoiries du 20 octobre 2023, le recourant a confirmé que sa pièce 35 récapitulait tous les montants retenus à tort par l’autorité fiscale. S’agissant des cotisations sociales relatives aux années 2007 à 2013, il s’agissait bien des montants versés durant les années correspondantes.

L’AFC-GE a relevé qu’elle avait tenu compte de toutes les déductions apportées par le recourant, si celles-ci étaient suffisamment probantes. Les montants afférant aux ventres de titres n’avaient pas été pris en compte dans le chiffre d’affaires de l’entreprise. Elle a confirmé les montants figurant dans sa pièce 25a intimée.

À l’issue de l’audience, les parties ont plaidé. Le recourant a persisté dans ses précédentes conclusions, sollicitant en outre la jonction de la cause avec celles concernant les exercices subséquents. S’agissant des bordereaux d’amendes IFD et ICC 2012, il a conclu à leur annulation, subsidiairement à ce que les amendes soient fixées à un tiers des montants en jeu. Il a également produit un bordereau de pièces complémentaires contenant deux jugements du TAPI du 16 octobre 2023 concernant les exercices subséquents et un arrêt récent du Tribunal fédéral. L’AFC-GE a renoncé à sa demande de disjonction et conclu au rejet du recours.

La cause a été gardée à juger à l’issue de l’audience.

h. Le 26 octobre 2023, le recourant a informé la chambre de céans qu’il allait déposer sans tarder deux recours contre les jugements du TAPI.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant conclut à titre préalable à la jonction de cette procédure avec les causes concernant les exercices fiscaux subséquents.

2.1 L’autorité peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune (art. 70 al. 1 LPA). La jonction n’est toutefois pas ordonnée si la première procédure est en état d’être jugée alors que la ou les autres viennent d’être introduites (art. 70 al. 2 LPA).

2.2 En l’occurrence, par jugements du 16 octobre 2023, le TAPI a rejeté les recours formés par le recourant contre les décisions de l’autorité fiscale s’agissant des exercices 2013 à 2020. Dans la mesure où ces jugements n’ont pas encore été contestés devant la chambre de céans, aucune jonction ne peut, en l’état, être opérée. S’ajoute à cela que la présente cause a été gardée à juger. Ainsi, même si les procédures en question étaient introduites devant la chambre de céans, il n’y aurait pas lieu de les joindre à la présente procédure.

3.             Il convient dans un premier temps de délimiter l’objet du litige.

3.1 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/499/2021 du 11 mai 2021 consid. 2a). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/330/2023 du 28 mars 2023 consid. 3a ; ATA/499/2021 du 11 mai 2021 consid. 2a).

3.2 En l’espèce, le recourant ne conteste plus les reprises liées au véhicule professionnel, ni celles liées au bien immobilier sis à Morillon, en France. Il ne revendique plus non plus de charges de famille. Le litige porte ainsi uniquement sur le bien-fondé des reprises effectuées sur le chiffre d’affaires réalisé par son entreprise pour les années 2008 à 2012, à l’admissibilité de la déduction de provisions pour les cotisations AVS en relation avec les revenus repris en matière d’ICC et IFD, ainsi que les amendes infligées pour la soustraction des ICC et IFD 2012.

4.             Se pose la question de la prescription.

4.1 En l'absence d'une réglementation expresse contraire, le droit applicable à la taxation est celui en vigueur pendant la période fiscale en cause. Le rappel d'impôt relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (arrêts du Tribunal fédéral 9C_715/2022 du 19 juillet 2023 consid. 5 ; 2C_700/2022 du 25 novembre 2022 consid. 4.1 et la référence). En revanche, en ce qui concerne la poursuite pénale pour soustraction fiscale (consommée ou tentée), le nouveau droit, entré en vigueur le 1er janvier 2017 (RO 2015 779 ; FF 2012 2649), s'applique au jugement des infractions commises au cours de périodes fiscales précédant son entrée en vigueur s'il est plus favorable que le droit en vigueur au cours de ces périodes fiscales (principe de la lex mitior ;  art. 205f de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 [LIFD - RS 642.11] et 78f de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 [LHID - RS 642.14 ]).  

4.1.1 L'art. 152 al. 1 LIFD prévoit que le droit d'introduire une procédure de rappel d'impôt s'éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète. Le droit de procéder au rappel d'impôt s'éteint quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 152 al. 3 LIFD ;
cf. ATF 140 I 68 consid. 6.1). Les art. 61 al. 1 et 3 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17) et 53 al. 2 et 3 LHID posent les mêmes principes. La problématique peut donc être examinée conjointement pour l'IFD et les ICC.

4.1.2 Avant le 1er janvier 2017, la poursuite pénale de soustraction d'impôt consommée se prescrivait par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’a pas été effectuée ou l’a été de façon incomplète (art. 184 al. 1 let. b aLIFD). La prescription était en outre interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite du contribuable (art. 184 al. 2 aLIFD). Depuis le 1er janvier 2017, le délai de prescription est de dix ans et il ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente avant l'échéance dudit délai (art. 184 al. 1 let. b et al. 2 LIFD). L'art. 58 al. 1 et 3 LHID, en vigueur depuis le 1er janvier 2017, a un contenu identique à celui de l'art. 184 LIFD. Il a été repris en droit cantonal à l’art. 77 LPFisc, selon lequel la poursuite pénale pour soustraction d’impôt consommée se prescrit donc par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’a pas été effectuée ou l’a été de façon incomplète (art. 77 al. 1 let. b LPFisc). La prescription ne court plus si une décision a été rendue par l’autorité compétente (art. 75) avant l’échéance du délai de prescription (art. 77 al. 2 LPFisc).

4.2 En l’occurrence, un avis d’ouverture de la procédure de rappel d’impôt a été notifié au recourant le 7 juillet 2017 pour l’IFD et les ICC des périodes fiscales 2007 à 2012. Le délai de prescription de dix ans des art. 152 al. 1 LIFD, 53 al. 2 LHID et 61 al. 1 LPFisc a ainsi été respecté. S’agissant du délai de quinze ans, la péremption du droit de procéder aux rappels d’impôts pour l’année 2007 est survenue à la fin de la période fiscale 2022. S’agissant des périodes 2008 à 2012, le délai de péremption de quinze ans n’est pas encore atteint.

En ce qui concerne la soustraction d’impôts, l’autorité fiscale a rendu le 26 janvier 2022 un bordereau d’amende IFD et ICC pour l’année 2012, soit moins de dix ans avant la fin de cette année fiscale. En application du nouveau droit, qui prévoit que la prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente avant l'échéance du délai de prescription de dix ans à compter de la fin de la période fiscale, la poursuite pénale n'est pas prescrite. Il en va de même en application de l'ancien droit, qui prévoyait un délai absolu de quinze ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'avait pas été effectuée.

5.             Le recourant conteste que les montants crédités sur ses comptes bancaires et postaux, qui ont été repris par l’autorité intimée, constituent des éléments de son revenu imposable.

5.1 Selon l'art. 16 al. 1 LIFD, l'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques. Cette disposition exprime la théorie de l'accroissement du patrimoine, respectivement du principe de l'imposition du revenu global net, selon lesquels tous les montants qui accroissent le patrimoine d'une personne sont inclus dans son revenu imposable, à moins d'être expressément exonérés (ATF 146 II 6 consid. 4.1 ; 143 II 402 consid. 5.1). Dans la LIFD, les revenus exonérés sont les gains en capitaux privés (art. 16 al. 3 LIFD) et les revenus énumérés dans la liste exhaustive figurant à l'art. 24 LIFD (ATF 143 II 402 consid. 5.1). Dans un système caractérisé par une imposition générale des revenus, ces exceptions à l'imposition doivent être interprétées de manière restrictive (ATF 146 II 6 consid. 4.1 ; 143 II 402 consid. 5.3. et les références).

L'art. 18 al. 1 LIFD dispose en particulier que sont imposables tous les revenus provenant de l'exploitation d'une entreprise commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou sylvicole, de l'exercice d'une profession libérale ou de toute autre activité lucrative indépendante. Constituent notamment de tels revenus, tous les bénéfices en capital provenant de l'aliénation, de la réalisation ou de la réévaluation comptable d'éléments de la fortune commerciale (art. 18 al. 2 LIFD). L’art. 58 s’applique par analogie aux contribuables qui tiennent une comptabilité en bonne et due forme (al. 3).

5.2 Selon l’art. 130 LIFD, l’autorité de taxation contrôle la déclaration d’impôt et procède aux investigations nécessaires (al. 1). Elle effectue la taxation d’office sur la base d’une appréciation consciencieuse si, malgré sommation, le contribuable n’a pas satisfait à ses obligations de procédure ou que les éléments imposables ne peuvent être déterminés avec toute la précision voulue en l’absence de données suffisantes. Elle peut prendre en considération les coefficients expérimentaux, l’évolution de fortune et le train de vie du contribuable (al. 2). Le recours à des coefficients expérimentaux, la prise en compte de l’évolution de fortune et le train de vie du contribuable ne sont pas limités à la procédure de taxation d’office ; ces moyens sont également ouverts à l’autorité dans le cadre d’une taxation ordinaire (Isabelle ALTHAUS-HOURIET, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, 2e éd., Bâle 2017, n. 27 ad art. 130 LIFD). 

5.3 En matière fiscale, il appartient à l'autorité de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d'impôts. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve, ces règles s'appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_89/2014 du 26 novembre 2014 consid. 7.2 ; ATA/1197/2018 du 6 novembre 2018 consid. 3a).

En droit fiscal, le principe de la libre appréciation de la preuve s'applique. L'autorité forme librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées, en choisissant entre les preuves contradictoires ou les indices contraires qu'elle a recueillis. Cette liberté d'appréciation, qui doit s'exercer dans le cadre de la loi, n'est limitée que par l'interdiction de l'arbitraire (Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, 7e éd., 2016, p. 502 s.). Il n'est pas indispensable que la conviction de l'autorité de taxation confine à une certitude absolue qui exclurait toute autre possibilité ; il suffit qu'elle découle de l'expérience de la vie et du bon sens et qu'elle soit basée sur des motifs objectifs (arrêts du Tribunal fédéral 2C_710/2016 du 25 août 2016 consid. 6.2 ; 2C_1201/2012 du 16 mai 2013 consid. 4.5 ; 2C_47/2009 du 26 mai 2009 in RDAF 2009 II 408 consid. 5 ; ATA/119/2019 du 5 février 2019 consid. 8 ; ATA/558/2014 du 17 juillet 2014).

5.4 En l’espèce, pour calculer le revenu imposable des périodes fiscales 2008 à 2012, l’autorité de taxation a déterminé le chiffre d’affaires en comptabilisant l’ensemble des crédits figurant sur les relevés bancaires et postaux non déclarés du contribuable et en déduisant du total ainsi obtenu le chiffre d’affaires initialement déclaré. Les montants des reprises correspondent à la différence entre ces moments.

Devant la chambre de céans, le recourant conteste la méthodologie employée par l’autorité de taxation, faisant valoir qu’elle aurait dû recourir à la méthode des chiffres d’expérience ou coefficients expérimentaux. Il perd toutefois de vue que les comptes bancaires et postaux produits en cours de procédure font état de versements non déclarés à hauteur de CHF 1'200'269.- en 2008, CHF 901'657.- en 2009, CHF 957'438.- en 2010, CHF 1'025'342.- en 2011 et CHF 1'013'272.- en 2012. Ces montants sont venus accroître son patrimoine et représentaient de ce fait a priori des revenus imposables. Ainsi, dans la mesure où l’autorité intimée disposait d’éléments concrets indiquant une augmentation de revenus du contribuable, il n’était pas nécessaire de procéder à une taxation par appréciation. Les montants figurant sur les comptes bancaires justifiaient, à eux seuls, la reprise et l’imposition sur la totalité de ces sommes, à moins que le caractère non imposable des montants en cause ne soit démontré. La charge de cette contre-preuve revenait toutefois au contribuable, selon les principes précités.

Pour démontrer que les montants crédités ne devaient pas être pris en compte à titre de chiffre d’affaires, le recourant a fourni, devant le TAPI, un tableau récapitulant les montants retenus à tort par l’AFC-GE (pièce 35 recourant). Ainsi, pour les années 2008 à 2012, un montant total de CHF 171'867.50 (soit CHF 10'244.05 pour 2008 ; CHF 11'293.55 pour 2009 ; CHF 109'432.40 pour 2010 ; CHF 26'394.55 pour 2011 et CHF 14'502.95 pour 2012), correspondant à des transactions provenant d’institutions d’assurance et de caisses de compensation (GGE et AVS), devait être déduit des montants retenus à titre de chiffre d’affaires sur la base des relevés bancaires et postaux. Devant le TAPI, l’intimée a admis que le recourant avait réussi à démontrer que ces montants ne constituaient pas des revenus provenant de son activité lucrative indépendante. Elle a ainsi proposé de déduire ces montants de la totalité des crédits non déclarés figurant sur les comptes UBS, Postfinance, Crédit Suisse et Crédit agricole. Seul faisait exception le montant de CHF 42'069.70 correspondant à la vente de titres pour l’année 2010, qui n’avait jamais été pris en compte dans le chiffre d’affaires de l’entreprise et qui n’avait, ainsi, pas donné lieu à une reprise. Il en résultait ainsi des reprises à hauteur de CHF 368'306.- pour 2008, CHF 33'491.- pour 2009, CHF 57'926.- pour 2010, CHF 83'174.- pour 2011 et CHF 75'994.- pour 2012 (pièce 25a intimée). Il convient ainsi de confirmer le montant de ces reprises, lesquelles correspondent aux pièces produites par le recourant.

C’est le lieu de préciser, s’agissant du montant de CHF 42'069.70 correspondant à la vente de titres, que le recourant ne conteste pas spécifiquement cette reprise. Or, s’il était d’avis que ce gain ne constituait pas un revenu provenant d’une activité lucrative indépendante, il lui appartenait de prouver cette allégation, conformément au principe qui veut que le contribuable prouve les faits qui ont pour effet de diminuer la dette fiscale.

Il appert ainsi que les reprises sont uniquement composées de montants dont le contribuable n’a pas pu démontrer qu’il ne s’agissait pas d’un revenu. Devant la chambre de céans, le recourant n’a produit aucune autre pièce pour compléter le tableau déjà produit en pièce 35. Or, s’il était d’avis que d’autres montants ne constituaient pas un revenu provenant d’une activité lucrative indépendante, il lui appartenait, comme déjà dit, de prouver cette allégation.

Il convient dès lors de donner acte à l’AFC-GE de ce qu’elle s’est engagée à ramener les reprises litigieuses à CHF 368'306.- pour 2008, CHF 33'491.- pour 2009, CHF 57'926.- pour 2010, CHF 83'174.- pour 2011 et CHF 75'994.- pour 2012.

6.             Le recourant reproche ensuite à l’autorité précédente de n’avoir pas porté en déduction les charges complémentaires relatives aux cotisations d’assurances sociales. Il estime que l’autorité de taxation aurait dû prendre en considération une provision pour cotisations AVS.

6.1 Sont déduits du revenu imposable des personnes physiques les primes, cotisations et montants légaux, statutaires ou réglementaires versés à
l'assurance-vieillesse et survivants, à l'assurance-invalidité et à des institutions de la prévoyance professionnelle (art. 33 al. 1 let. d LIFD).

6.2 D'après l'art. 125 al. 2 LIFD, les personnes physiques dont le revenu provient d'une activité lucrative indépendante et les personnes morales doivent joindre à leur déclaration les extraits de comptes signés (bilan, compte de résultats) de la période fiscale ou, à défaut d'une comptabilité tenue conformément à l'usage commercial, un état des actifs et des passifs, un relevé des recettes et des dépenses ainsi que des prélèvements et apports privés. L'art. 125 al. 2 LIFD ne précise pas les exigences auxquelles doivent répondre ces états et relevés, qui dépendent des circonstances du cas d'espèce, en particulier du type d'activité et de l'ampleur de cette dernière. Dans tous les cas, ils doivent être propres à garantir une saisie complète et fiable du revenu et de la fortune liés à l'activité lucrative indépendante et pouvoir être contrôlés dans des conditions raisonnables par les autorités fiscales (arrêt du Tribunal fédéral 2A.128/2007 du 14 mars 2008, in RF 63/2008, 630, consid. 5.2 et les références citées).  

6.3 À teneur de l'art. 960e al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), les dettes sont comptabilisées à leur valeur nominale (al. 1). L'art. 960e al. 2 CO prévoit que, lorsqu'en raison d'événements passés, il faut s'attendre à une perte d'avantages économiques pour l'entreprise lors d'exercices futurs, il y a lieu de constituer des provisions à charge du compte de résultat, à hauteur du montant vraisemblablement nécessaire (al. 2). En outre, son alinéa 3 précise que des provisions peuvent être constituées notamment au titre de charges régulières découlant des obligations de garantie (ch. 1), de remise en état des immobilisations corporelles (ch. 2), de restructurations (ch. 3) et de mesures prises pour assurer la prospérité de l'entreprise à long terme (ch. 4). Il ressort de la formulation de l'art. 960e al. 2 et 3 CO (« il y a lieu » en opposition à « peuvent ») que les provisions relevant de l'al. 2 sont requises par le droit commercial, contrairement à celles mentionnées à l'alinéa 3 (Markus REICH/Marina ZÜGER/Philipp BETSCHART, Kommentar zum Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer [DBG], 4e éd. 2022, n° 1 ad art. 29 LIFD et les références).  

6.4 Aux termes de l'art. 29 al. 1 let. a LIFD, des provisions peuvent être constituées à la charge du compte de résultats pour les engagements de l'exercice dont le montant est encore indéterminé. Les véritables provisions au sens de l'art. 29 al. 1 let. a LIFD se distinguent par le fait qu'elles sont constituées pour un engagement fondé sur la loi ou sur un contrat (ATF 147 II 209 consid. 4.1.1). La provision permet d'imputer au bénéfice de l'exercice en cours une charge ou une perte effective ou à tout le moins vraisemblable, mais dont le montant n'est pas encore connu avec précision et qui ne sera déterminé que dans une période ultérieure (ATF 141 II 83 consid. 5.1).  

Les cotisations sociales, dont le paiement repose sur la loi, peuvent être rangées dans la catégorie des provisions (R. DANON, op. cit., 2e éd. 2017, n. 22 ad art. 63 LIFD et les références citées). 

6.5 Selon la jurisprudence, l'admissibilité d'une provision au plan fiscal suppose la réalisation de deux conditions cumulatives. Il faut d'une part qu'elle soit justifiée par l'usage commercial et d'autre part qu'elle ait été dûment comptabilisée. Si une provision n'a pas été comptabilisée, sa prise en compte au plan fiscal est en principe exclue. L'admission au plan fiscal d'une provision non comptabilisée doit néanmoins intervenir si cette absence de comptabilisation viole une norme du droit commercial impérative sous l'angle du droit fiscal, comme l'art. 960e al. 2 CO. Une telle correction du bilan (« Bilanzberichtigung ») ne peut toutefois être admise qu'à titre exceptionnel. Le Tribunal fédéral a par ailleurs récemment souligné qu'une correction du bilan ne pouvait pas intervenir pour compenser une omission comptable imputable au contribuable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_784/2017 du 8 mars 2018 consid. 7.3 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_29/2012 du 16 août 2012 consid. 2.1, in RF 67/2012 p. 756, où le Tribunal fédéral a jugé qu'il fallait faire preuve de la plus grande retenue lorsque des corrections de bilan ont un but fiscal). Il a en revanche admis qu'il fallait corriger une provision pour impôt qui avait bien été comptabilisée, mais qui était devenue insuffisante en raison d'une reprise effectuée dans le bénéfice imposable (ATF 141 II 83 consid. 5.5 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 6.5, in RDAF 2015 II 267).  

6.6 Les cotisations AVS se calculent sur la base du revenu découlant du résultat de l'exercice commercial clos au cours de l'année de cotisation et du capital propre investi dans l'entreprise à la fin de l'exercice commercial (art. 22 al. 2 du règlement fédéral du 31 octobre 1947 sur l'assurance-vieillesse et survivants RAVS – RS 831.101). Pour établir le revenu déterminant, les autorités fiscales cantonales se fondent sur la taxation passée en force de l'impôt fédéral direct (art. 23 al. 1 RAVS). Les cotisations définitives ne peuvent donc être déterminées, au plus tôt, que l'année suivant celle en cause. Pendant l'année de cotisation, les personnes tenues de payer des cotisations doivent verser périodiquement des acomptes de cotisations (art. 24 al. 1 RAVS). Qu'elles soient considérées comme privées ou commerciales, les cotisations sociales d'un indépendant peuvent faire l'objet d'une provision si le contribuable tient une comptabilité en partie double. Le contribuable peut également choisir une méthode plus simple et enregistrer les cotisations, soit à la date de la facture (des acomptes et des décisions définitives), soit à celle du paiement, même si cela ne coïncide pas avec l'année pour laquelle les cotisations sont dues. Lorsque le contribuable a choisi une des méthodes admises, il doit s'y tenir (cf. ATF 141 II 83 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2010 du 2 février 2011 consid. 2.1 ; 2A.128/2007 du 14 mars 2008, in RF 63/2008, 630, consid. 5.4 et les références citées).  

6.7 Dans un arrêt récent 2C_487/2022 du 5 septembre 2023, concernant un agriculteur exploitant des parcelles à titre d’indépendant, le Tribunal fédéral a estimé que quand bien même le recourant ne provisionnait pas ses cotisations AVS dans sa comptabilité, il tenait une comptabilité en partie double, de sorte que la création de provisions dans sa comptabilité pour ses cotisations AVS était possible. À la suite des reprises effectuées s’agissant des revenus du contribuable en lien avec la vente des parcelles, le refus d’admettre au plan fiscal une provision initialement non comptabilisée pour les cotisations AVS de l’année 2017 violait l’art. 960e al. 2 CO, disposition comptable impérative sous l’angle du droit fiscal. L'augmentation très importante du montant dû à titre de cotisations AVS pour l'année 2017, par rapport aux précédents exercices, impliquait qu'une provision soit établie à ce titre dans la comptabilité du contribuable. En outre, le contribuable n’avait pas intégré une telle provision dans sa comptabilité sans faute de sa part, car il ne pouvait pas savoir que les autorités fiscales allaient reprendre le montant des ventes de ses terrains dans son revenu, celui-ci ayant déjà été taxé sous l'angle de l'impôt sur les gains immobiliers. Dans ces circonstances particulières, il convenait de retenir que la correction, sous l'angle fiscal, de la comptabilité du contribuable, en ce sens que les cotisations AVS pour l'année 2017 calculées sur la base du revenu du contribuable comprenant la vente des parcelles étaient provisionnées pour cet exercice, était justifiée afin que la taxation corresponde le plus possible à la situation financière réelle du contribuable (consid. 4.7).  

6.8 En l’occurrence, l’autorité intimée a relevé que le recourant avait opté pour la méthode de l’encaissement, en ce sens que les cotisations étaient enregistrées à la date de leur paiement. Devant la chambre de céans, le recourant ne conteste pas cet élément, qui résulte au demeurant des pièces au dossier et de ses explications lors de l’audience de comparution personnelle. Les cotisations AVS étaient donc enregistrées à une date qui ne coïncidait pas avec l’année pour laquelle elles étaient dues. Ainsi, en application des principes précités, c’est le moment du règlement des factures par l’indépendant qui est déterminant, étant rappelé que lorsque le contribuable choisit une des méthodes admises, il doit s’y tenir. Contrairement à la situation ayant donné lieu à l’arrêt 2C_487/2022 précité, le recourant ne tenait pas une comptabilité en partie double, de sorte que la création de provisions dans sa comptabilité pour ses cotisations AVS n’était pas possible. On ne saurait d’ailleurs admettre que c’est sans faute de sa part que le recourant n’a pas intégré une telle provision dans sa comptabilité. C’est le lieu de rappeler que les rappels d’impôts font suite à une communication de l’AFC-CH, selon laquelle le recourant n’avait pas déclaré un certain nombre de comptes bancaires et postaux. L’instruction a ensuite révélé que des montants importants – au total près de CHF 600'000.- pour les années 2008 à 2012 – crédités sur des comptes bancaires à son nom, n’avaient jamais été déclarés aux autorités fiscales. C’est partant à juste titre que le TAPI a considéré que le paiement des cotisations n’était déductible que dans l’année de leur versement effectif. Pour le reste, le recourant n’a produit aucune pièce permettant de justifier la prise en compte de charges supplémentaires durant la période litigieuse.

Le recours doit en conséquence être rejeté sur ce point.

7.             Le recourant conteste le bien-fondé des amendes infligées par l’autorité intimée pour soustraction d’impôts concernant l’année fiscale 2012.

7.1 Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (art. 175 al. 1 LIFD ; art. 56 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) ; art. 69 al. 1 LPFisc).

Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent dès lors être réunis : la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier. Les deux premières conditions sont des éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, tandis que la faute en est un élément constitutif subjectif (arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 9.1 et 11 ; 2C_874/2018 précité consid. 10.1 ; ATA/859/2018 du 21 août 2018 consid. 13b et la référence).

La violation d'une obligation légale peut résulter d'une irrégularité dans la comptabilité ou du fait de remplir sa déclaration fiscale de manière non conforme à la vérité et non complète, en violation de l'art. 124 al. 2 LIFD (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1018/2015 précité consid. 9.4.2 et les références citées).

7.2 La soustraction est punissable aussi bien intentionnellement que par négligence. La notion de négligence des art. 175 LIFD et 56 LHID est identique à celle de l'art. 12 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) : commet un crime ou un délit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle, par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle. Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_874/2018 précité consid. 10.1.3 ; 2C_129/2018 précité consid. 9.1 et les références ; ATA/407/2022 du 12 avril 2022 consid. 6 a).

La preuve d'un comportement intentionnel de la part du contribuable doit ainsi être considérée comme apportée lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que celui-ci était conscient du caractère erroné ou incomplet des indications fournies. Si cette conscience est établie, il faut présumer qu'il a voulu tromper les autorités fiscales, afin d'obtenir une taxation plus favorable (arrêts du Tribunal fédéral 2C_792/2021 du 14 mars 2022 consid. 6.4.1 ; 2C_1052/2019 du 18 mai 2020 consid. 3.7.1 ; 2C_184/2019 du 25 septembre 2019 consid. 3.2 et 2C_444/2018 du 31 mai 2019 consid. 10.4.1). Cette présomption ne se laisse pas facilement renverser, car l'on peine à imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu'il sait incorrectes ou incomplètes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1066/2018 du 21 juin 2019 consid. 4.1 ; 2C_129/2018 précité consid. 9.1). Le dol éventuel suffit pour retenir l'intention (arrêts du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_444/2018 précité consid. 9.2) : il suppose que l'auteur envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins, parce qu'il s'en accommode au cas où il se produirait (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 précité consid. 17.3.1 et les arrêts cités ; ATA/407/2022 précité consid. 6b). En revanche, agit par négligence celui qui, par une imprévoyance coupable, ne se rend pas compte ou ne tient pas compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable lorsque l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle, ce par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1052/2019 précité consid. 3.7.1 ; 2C_1066/2018 précité consid. 4.1 ; 2C_1018/2015 précité consid. 9.4.4).

Lorsqu'il mandate une fiduciaire pour remplir sa déclaration d'impôts, le contribuable n'est pas déchargé de ses obligations et responsabilités fiscales, mais doit supporter les inconvénients d'une telle intervention ; il répond en particulier des erreurs de l'auxiliaire qu'il n'instruit pas correctement ou dont il ne contrôle pas l'activité, du moins s'il était en mesure de reconnaître ces erreurs (arrêts du Tribunal fédéral 2C_814/2017 du 17 septembre 2018 consid. 9.4 ; 2C_908/2011 du 23 avril 2012 consid. 3.5 et les références, in RDAF 2012 II 324). Lorsqu'un contribuable signe sa déclaration fiscale, conformément à l'art. 124 al. 2 LIFD, il endosse la responsabilité de la véracité des indications qui s'y trouvent ; il répond ainsi lui‑même des infractions fiscales commises si une faute lui est imputable. Il ne faut pas que le contribuable qui se fait représenter soit favorisé par rapport au contribuable qui remplit sa déclaration fiscale lui-même, par la possibilité de se soustraire à sa responsabilité en se retranchant derrière son représentant pour des fautes qui lui sont imputables. Pour retenir l'intention, à tout le moins par dol éventuel, il faut toutefois que le contribuable ait pu reconnaître le caractère erroné de la déclaration fiscale s'il avait agi avec la diligence requise et qu'il ait ainsi été en mesure de la faire corriger (arrêts du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 3 et les références, in RF 75/2020 p. 71).  

Lorsque le contribuable qui ne dispose pas de connaissances fiscales particulières choisit un mandataire compétent et lui communique tous les documents et renseignements nécessaires à l’établissement d’une déclaration conforme à la vérité, on ne peut raisonnablement pas lui reprocher de signer sa déclaration sans la contrôler dans les moindres détails. Il y aurait plutôt lieu de déterminer si le contribuable a transmis des documents incomplets à son mandataire, s’il l’a correctement instruit ou s’il s’est entendu avec lui pour commettre l’infraction fiscale (ATA/1262/2015 précité consid. 7c ; ATA/370/2015 précité consid. 6c ; ATA/798/2014 du 14 octobre 2014 et les références citées).

7.3 En l’espèce, le recourant ne conteste pas que les éléments objectifs de la soustraction fiscale, soit l’existence de déclarations d’impôts irrégulières, étaient remplis, mais invoque son absence de compétences et de connaissances en matière comptable et fiscale. Il s’en était remis au professionnel qu’il avait mandaté pour s’occuper du volet administratif de son entreprise. Il avait d’ailleurs changé de mandataire en 2014, après avoir constaté que sa comptabilité n’était pas effectuée de manière correcte.

Or, même sans être au bénéfice d’une formation particulière en fiscalité, il convient de retenir que le recourant, de par son activité professionnelle à titre d’indépendant, disposait des capacités suffisantes pour se rendre compte des conséquences de l’absence d’enregistrement de certaines recettes dans les comptes de son entreprise. Il ne pouvait ignorer que plusieurs comptes bancaires et biens immobiliers, de même que son coffre-fort, ne figuraient pas dans ses déclarations fiscales, étant rappelé que l’instruction menée par l’autorité intimée a permis d’établir que des revenus de plus de CHF 600'000.- n’avaient pas été déclarés aux autorités fiscales pour les années 2008 à 2012.

Conformément à la jurisprudence précitée, le fait que sa comptabilité et ses déclarations fiscales aient été établies par une fiduciaire ne permet pas de le décharger de ses obligations fiscales. Le recourant n’a d’ailleurs pas démontré avoir informé sa fiduciaire de tous les éléments de fortune et de revenus en cause. Il invoque certes avoir changé de fiduciaire en 2014 après avoir constaté que sa comptabilité n’avait pas été effectuée de manière correcte, mais ne soutient pas en avoir avisé les autorités fiscales. Par ailleurs, en agissant en tant que titulaire de l’entreprise individuelle, bénéficiant d’une signature individuelle, le recourant ne pouvait faire abstraction de ses obligations légales, au sens des art. 958 ss CO, en matière de présentation des comptes et comptabilisation au bilan. Ses fonctions de titulaire ne lui permettaient pas de renoncer à ses obligations, ce d’autant moins qu’il lui revenait de signer les rapports de gestion dans lesquels les comptes étaient présentés, selon l’art. 958 al. 3 CO. La preuve d'un comportement intentionnel, à tout le moins sous la forme du dol éventuel, doit ainsi être considérée comme apportée.

C’est partant à juste titre que l'autorité intimée a retenu que les éléments constitutifs d'une soustraction d'impôt étaient réunis.

8.             Reste à examiner la quotité des amendes prononcées.

8.1 En cas de soustraction consommée, l’amende est, en règle générale, fixée au montant de l’impôt soustrait. Si la faute est légère, l’amende peut être réduite jusqu’au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 2 LPFisc). Le montant de l’impôt soustrait constitue donc le premier critère de fixation de l’amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d’augmentation de sa quotité (ATA/407/2022 du 12 avril 2022 consid. 6c).

La quotité précise de l’amende doit par ailleurs être fixée en tenant compte des dispositions de la partie générale du CP, les principes de l’art. 47 CP régissant la fixation de la peine s’appliquant. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l’impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l’auteur. Les circonstances atténuantes de l’art. 48 CP sont aussi applicables par analogie (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1 s).

Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales, qui doivent faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi, disposent d’un large pouvoir d’appréciation lors de la fixation de l’amende, l’autorité de recours ne censurant que l’abus du pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_12/2017 du 23 mars 2018 consid. 7.2.1 ; ATA/1002/2020 du 6 octobre 2020 consid. 9b et les références citées).

8.2 En l’espèce, quoi qu’en pense le recourant, le montant des reprises sur le chiffre d’affaires de l’entreprise pour l’année 2012, soit CHF 75'994.-, est relativement important. S’ajoute à cela que les comptes bancaires et postaux, biens immobiliers et coffre-fort litigieux n'ont pas été déclarés pendant presque dix ans, ce qui constitue des éléments à charge, de même que le caractère intentionnel de l’infraction, commise à tout le moins par dol éventuel.

L’autorité intimée a retenu une quotité d’une fois le montant des impôts soustraits. Compte tenu de la gravité des faits reprochés, ce montant apparait justifié au regard de la bonne collaboration du recourant neutre en matière de quotité de la peine. L'autorité intimée a ainsi respecté le cadre légal et n'a pas fait preuve d'une sévérité excessive.

En conséquence, les amendes infligées sont justifiées tant dans leur principe que dans leur quotité.

Le recours est ainsi partiellement admis. Les bordereaux de rappels d’impôts IFD et ICC 2008 à 2012 sont annulés dans la mesure reconnue par l’AFC-GE. Le dossier sera donc renvoyé à celle-ci afin qu’elle établisse des bordereaux de rappel d’impôt IFD et ICC 2008 et 2012 tenant compte des rectifications qu’elle a admises. Le jugement du TAPI sera confirmé pour le surplus.

9.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge du recourant. N’obtenant que très partiellement gain de cause, une indemnité de procédure de CHF 1’000.- lui sera allouée.

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 juillet 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 juin 2023 ;

 

au fond :

l’admet partiellement ;

annule le jugement querellé dans le sens des considérants ;

renvoie la cause à l'AFC-GE pour qu'elle établisse de nouveaux bordereaux de rappel d’impôts 2008 à 2012 au sens des considérants ;

confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

constate la prescription du droit de procéder au rappel d’impôts pour l’ICC et l’IFD 2007 ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge de A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’000.- à A______, à la charge de l’État de Genève (AFC-GE) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Goran ANTONIJEVIC, avocat du recourant, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Eleanor McGREGOR , présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :