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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2935/2022

ATA/1107/2023 du 10.10.2023 sur JTAPI/533/2023 ( LDTR ) , REJETE

Recours TF déposé le 15.11.2023, 1C_614/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2935/2022-LDTR ATA/1107/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 octobre 2023

 

dans la cause

 

A______

B______

C______ et D______ recourants

représentés par Me Romolo MOLO, avocat

contre

E______

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 mai 2023 (JTAPI/533/2023)


EN FAIT

A. a. E______ est propriétaire des parcelles nos 162 et 2’619, feuille 1______, de la commune de F______, sur lesquelles est érigé un immeuble, sis rue G______ 28-30.

b. Par courriel du 10 avril 2018 à l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), se référant à trois autorisations en procédure accélérée (ci-après : APA) obtenues durant la même période pour les mêmes travaux sur trois immeubles différents, soit la rénovation de salles de bain et cuisines, elle souhaitait savoir pour quelle raison elle avait reçu des conditions diverses pour chacun d'entre eux, à savoir que les travaux n'auraient aucune incidence sur les loyers, que les loyers seraient contrôlés pendant 5 ans, ou que l'état locatif serait bloqué pendant 3 ans après la fin des travaux.

c. Par courriel du 29 juin 2018, l'OCLPF, soit pour lui H______, a notamment répondu « [l]a directive interne concernant la durée de contrôle [avait] été précisée en début d'année. Ainsi, les travaux de rénovation de ce genre, dont les coûts de travaux n'auraient pas de répercussion sur les loyers, n'auront pas ces derniers bloqués par la LTDR ».

B. a. Le 7 janvier 2020, E______ a déposé une demande d’APA portant sur la rénovation d'appartements du premier au quatrième étage de l'immeuble précité.

Dans la lettre d'explication du projet, elle a notamment indiqué que « ces travaux n'auront pas d'incidence sur les loyers des locataires ».

Elle a produit un état locatif de l'immeuble, qui serait identique à celui après travaux, la rénovation ayant lieu alors que les locataires demeureraient en place.

b. Dans le cadre de l'instruction du dossier, l’OCLPF a notamment rendu, le 28 février 2020, un préavis favorable sous conditions que : (1) les dispositions de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) soient respectées (art. 9) ; (2) toute modification ferait l'objet d'une demande complémentaire ; (3) « [l]es travaux de rénovation complète des cuisines et salles de bain, ainsi que le remplacement des canalisations au sous-sol n'auront aucune incidence sur les loyers des 46 appartements conformément à la lettre d'information envoyée aux locataires datée du 7 janvier 2020 [recte : 20 novembre 2019] ».

c. Par décision du 5 mars 2020, le département du territoire (ci-après : le département) a délivré l'autorisation de construire sollicitée (APA 2______), laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

Les conditions figurant dans le préavis de l'OCLPF du 28 février 2020 notamment devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l'autorisation.

Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

C. a. À compter du 26 janvier 2021, des échanges de correspondance ont eu lieu entre l’OCLPF, respectivement l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC), et E______ concernant l’augmentation de loyers de logements situés dans l'immeuble sis 30, rue G______.

b. Par courrier à E______ du 2 juillet 2021, l'OCLPF a ainsi relevé qu'il semblait que deux logements situés au quatrième étage de cet immeuble avaient fait l'objet d'une augmentation de loyer, ce qui était susceptible de constituer une infraction à la LDTR (I/3______).

Un délai lui était imparti pour faire part de ses observations concernant les modifications des loyers après les travaux de rénovation commencés le 5 mars 2020, ainsi que pour produire les plans conformes à l'exécution, datés et signés, l'état locatif de l'immeuble ainsi que les contrats de bail modifiés conformément au préavis LDTR de l'autorisation délivrée, et lui communiquer la date de fin des travaux.

c. Le 15 juillet 2021, E______ a observé qu’il ne ressortait pas de l'APA 2______ que l'immeuble litigieux serait contrôlé après la réalisation des travaux, ni le montant des loyers dits contrôlés, ni la durée d'un tel contrôle (3 ou 5 ans), ni que les avis de fixation des loyers des logements ainsi qu'un état locatif devraient être fournis à la fin des travaux.

Elle a produit : une copie de son courrier à l'OCLPF du 9 février 2021 dans lequel elle indiquait que certains baux avaient été résiliés par les locataires, dont une partie avait pu être remise en location. Le loyer des locataires avait subi une majoration, fondée sur le critère de l'adaptation aux loyers usuels du quartier (art. 269a let. a de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations - RS 220]), et non sur la base des travaux effectués dans ces appartements ; une attestation globale de conformité datée du 14 juillet 2021, certifiant que les travaux étaient conformes à l'autorisation de construire APA 2______ ainsi qu'aux lois et règlements applicables au moment de l'entrée en force de l'autorisation ; les plans conformes à l'exécution.

d. Par courriel du 16 mai 2022, l'OAC a interpellé E______ au sujet du courrier de l'OCLPF du 2 juillet 2021 précité et a sollicité la production de diverses pièces.

e. Le 19 mai 2022, E______ a rappelé ne pas avoir majoré les loyers en se prévalant des travaux à plus-value. En revanche, elle ne pouvait pas se voir privée de la possibilité d'invoquer d'autres critères de fixation du loyer prévus par le CO, en application du principe de la force dérogatoire du droit fédéral.

Le 23 mai 2022, elle a produit un état locatif de l'immeuble à cette date et un autre valant avant le 8 mai 2020.

Le 24 mai 2022, elle a informé le département que le chantier avait été clos le 14 juillet 2021 et a produit un état locatif de l'immeuble à cette date.

f. Par décision du 20 juillet 2022 (I/3______), le département, se référant à l'APA 2______, a ordonné à E______, en application des art. 44 LDTR et 129 et ss de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), de rétablir une situation conforme au droit, dans un délai de 30 jours, en procédant : a) à l'établissement d'un nouvel avis de fixation du loyer initial (formule officielle) respectant la condition n° 3 du préavis LDTR du 28 février 2020 pour chacun des 46 appartements concernés ; b) au remboursement du trop-perçu des locataires touchés par une augmentation du loyer, soit un montant de CHF 103'326.- (dont le détail par appartement était indiqué).

Les justificatifs attestant de la mise en œuvre intégrale de l'ordre susmentionné devaient lui être adressés dans le même délai.

De plus, au vu de l'infraction commise et en application des art. 44 LDTR et 137 LCI, une amende administrative de CHF 22'000.- lui était infligée. Celle-ci tenait compte de la gravité tant objective que subjective de l'infraction commise, dans le cadre de l'autorisation de construire délivrée le 5 mars 2020. Il apparaissait qu'alors qu'elle savait que ces travaux étaient soumis à autorisation de construire ainsi qu'au contrôle des loyers, cette décision n'avait, de manière intentionnelle, pas été respectée, avec des conséquences non négligeables sur les loyers payés. Son statut de professionnel de l'immobilier et l'importante proportion des logements touchés (58%) étaient également pris en compte.

Les travaux visés par l’APA 2______ étaient des travaux de rénovation soumis à la LDTR. Selon l’autorisation délivrée, ils n'auraient aucune incidence sur les loyers des 46 appartements, conformément à la lettre d'explication du projet datée du 7 janvier 2020. En vertu de l'art. 12 LDTR, ces loyers seraient appliqués, pour une durée de 3 ans, dès la fin des travaux, soit du 14 juillet 2021 au 13 juillet 2024. Il était ainsi faux de prétendre que les loyers des appartements concernés pouvaient être modifiés avant l'échéance de cette période de contrôle.

D. a. Par acte du 14 septembre 2022, E______ a recouru contre cette décision du département du 20 juillet 2022 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Cette décision violait le principe de la bonne foi, vu les assurances données par l'OCLPF par courriel du 29 juin 2018, de manière individuelle et concrète. Ce dernier n'avait en outre nullement indiqué, dans son préavis du 28 février 2020, que le montant des loyers ne pouvait connaître de variation sur la base d'un autre critère de fixation que celui des prestations supplémentaires du bailleur (art. 269a let. b CO). Elle pouvait dès lors comprendre de ce préavis que les travaux de rénovation faisant l'objet de l'APA 2______, dont les coûts n'avaient pas eu de répercussion sur les loyers, n'avaient « pas ces derniers bloqués par la LDTR ». Elle avait donc procédé à la majoration des loyers de nouveaux locataires sur les critères de l'adaptation aux loyers usuels du quartier (art. 269a let. a CO) et ceux des locataires en place de l'adaptation du loyer à l'évolution de l'indice suisse des prix à la consommation (ci-après : ISPC) (art. 269b CO), ce qui ressortait des avis de fixation du loyer initial et des avis de majoration de loyer.

La décision violait également les art. 269 ss CO, en particulier l'art. 269d CO. Interpréter le préavis de l'OCLPF du 28 février 2020 comme interdisant toute augmentation de loyer, suite aux travaux de rénovation faisant l'objet de l'APA 2______, même pour un autre motif que la répercussion des coûts de ces travaux, revenait à imposer un blocage des loyers pour une durée indéterminée, voire indéfiniment, faute pour l'autorité intimée d'avoir indiqué une limite temporelle, ce qui violait le droit fédéral.

Elle contestait tant le principe de l'amende que sa quotité. Aucune faute ne pouvait lui être reprochée. Il convenait de tenir compte de la lacune importante de l'autorité intimée, qui avait totalement omis d'indiquer que les loyers seraient bloqués et quelle serait la durée de ce blocage. Le principe de la proportionnalité n'avait en outre pas été respecté. L'autorité intimée s'était basée sur une proportion erronée de logements dont les loyers auraient prétendument été majorés à tort.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

Il était évident qu'un contrôle des loyers était imposé en application des art. 9 à 12 LDTR. E______ en avait conscience, puisque dès le dépôt de sa demande elle l’avait immédiatement informé, de même que les locataires, de l’absence d'incidence des travaux projetés sur les loyers. Il n'était pas utile de calculer de manière précise les incidences que ces travaux auraient pu avoir sur les loyers, puisqu'il n'était justement pas censé y en avoir. La durée du contrôle, de 3 ans, découlait de l'art. 12 LDTR.

En tant qu'instance de préavis, l'OCLPF n'était pas compétent pour donner des « assurances », ce que E______, active dans le domaine de la construction et de l'immobilier, ayant déjà obtenu différentes décisions du département, ne pouvait ignorer. Ces « assurances » n'avaient de surcroît pas été portées à sa connaissance. Dans le doute, E______ était en droit d'interpeller l’OAC, en sa qualité d'instance décisionnelle, afin de connaître la portée des conditions reprises dans l'APA 2______.

Aucune violation du principe de la force dérogatoire du droit fédéral ne pouvait être retenue, la LDTR étant, selon une jurisprudence constante, conforme au droit fédéral et à la garantie de la propriété, y compris dans la mesure où elle prévoyait un contrôle des loyers après transformation.

L'amende administrative, parfaitement fondée en droit et proportionnée devait être confirmée. En la matière, l'administration devait faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi ; elle jouissait d'un large pouvoir d'appréciation. Plus de la moitié des locataires avaient été concernés par cette augmentation. E______ ne démontrait pas que son paiement la confronterait à une situation financière particulièrement difficile.

c. Il ressort du dossier du département que par courrier du 20 novembre 2019 adressé à tous les locataires de l'immeuble sis rue G______ 28-30, E______, en se référant aux travaux de rénovation envisagés (remplacement des cuisines, des salles de bain et des fenêtres), précisait que « ces travaux ne [donneraient] lieu à aucune augmentation de loyer ».

d. Dans sa réplique, E______ a sollicité l'audition de I______, directeur à l’OCLPF.

En tant qu'office rattaché au département, les assurances données par l'OCLPF lui étaient opposables. Dans le cadre de travaux de rénovation réalisés dans un autre immeuble, il ressortait clairement d'un préavis de l’OCLPF du 17 avril 2019 que le loyer des 33 appartements concernés était bloqué, ainsi que la durée du blocage et le montant des loyers après travaux et qu’elle devait remettre au département un état locatif nominatif à la fin du contrôle.

Il ressortait d’un procès-verbal d’audience du 13 septembre 2022 devant le Tribunal des baux et loyers (ci-après : TBL) que H______ avait admis, concernant le préavis de l’OCLPF du 28 février 2020, penser qu’il y avait une marge d’interprétation des deux côtés. I______, avait déclaré qu’il ne pouvait pas être compris dudit préavis que toute hausse de loyers était exclue, telle que celle fondée sur les loyers du quartier.

e. Dans sa duplique, le département a relevé que ces témoignages de H______ et I______ ne liaient pas l’OAC, seule autorité décisionnaire, dans la mesure où ils travaillaient pour le compte de l’OCLPF.

S’il était vrai que l’autorisation de construire litigieuse ne précisait pas la durée du contrôle des loyers, l’art. 12 LDTR prescrivait qu’elle ne pouvait excéder 3 ans pour les travaux de rénovations ou de transformations « non lourds ». Si les bailleurs pouvaient, pour d’autres raisons que celles liées à la réalisation des travaux autorisés, augmenter les loyers, cela aurait pour effet d’annihiler la protection que la LDTR avait pour but de mettre en œuvre.

f. En réponse à une demande du TAPI, le département a fait savoir qu’il n’existait à l’OCPLF aucune directive interne écrite (« guide LDTR »). La pratique à laquelle H______ avait pu faire allusion dans son courriel du 29 juin 2018 et dont I______ avait parlé lors de son audition devant le TBL le 13 septembre 2022, n'était pas codifiée.

g. Lors d’une audience devant le TAPI le 4 avril 2023 :

g.a I______ a expliqué que le « guide LDTR » correspondait à des formulaires, lettres type et marches à suivre constituant l'environnement de travail de l'OCLPF. La casuistique découlait de procès-verbaux de séances internes lors desquelles certains cas particuliers étaient discutés.

Le préavis de l'OCLPF du 28 février 2020 contenait une phrase type concernant l'incidence des travaux sur les loyers car la requérante avait d'emblée informé son service ne pas répercuter le prix des travaux sur les loyers. Celle-ci n’avait toutefois effectivement donné aucune garantie de l'absence d'augmentation des loyers pour un autre motif. Il y avait environ une année et demie, voire deux ans, la phrase-type en question avait été modifiée. Selon ledit préavis, aucune augmentation de loyer pour quelque motif que ce soit n'était autorisée. Il était toutefois compréhensible que, en lisant la condition litigieuse, un tiers pouvait en déduire que des hausses de loyers pour d'autres motifs pouvaient être envisagées. Dans ses souvenirs, la durée de l'interdiction de hausse des loyers était de trois ans, étant relevé qu’une référence à l'art. 9 LDTR figurait dans le préavis en question. Il ignorait comment E______ pouvait savoir, à la lecture dudit préavis, si le contrôle était de trois ou de cinq ans, mais elle pouvait se renseigner sur ce point. L’OCLPF n'avait pas fixé le montant des loyers bloqués car ceux indiqués dans l'état locatif correspondaient aux loyers bloqués pendant la durée de contrôle.

Le courriel de H______ du 29 juin 2018 pouvait effectivement être lu dans le sens où les loyers ne seraient pas bloqués par la LDTR, ce qui était cependant faux. H______ avait effectivement la possibilité de donner des renseignements à des tiers, lesquels engageaient l'OCLPF.

g.b Le représentant du département a maintenu sa position. Ignorant les renseignements que pouvait donner l'OCLPF, l'OAC n'était absolument pas lié par de telles informations.

h. Le département a produit trois exemplaires de préavis récents favorables sous conditions rendus par le service LDTR de l'OCLPF lorsqu'un requérant s'engageait à ne pas répercuter le coût des travaux sur les loyers des locataires, à savoir :

-       du 30 mars 2023 sous conditions notamment que les dispositions de la LDTR soient respectées (art. 9 LDTR) (condition n° 1). Les loyers des 39 logements, situés du 1er au 10ème étage, n'excéderaient pas après travaux de CHF 673'083.- par an, comme indiqué dans le document état locatif annexé. Ces loyers seraient appliqués pour une durée de 3 ans dès la remise de chaque logement après la fin des travaux (art. 10 al. 1, 11 et 12 LDTR) (condition n° 2). Les travaux concernés par cette demande en autorisation de construire n'impliqueraient pas le départ des locataires. Toutefois, s'il s'avérait que l'utilisation du logement pendant les travaux serait trop difficile pour certaines personnes (point d'eau, WC, cuisine, pendant la nuit, etc.), un relogement temporaire serait mis à disposition par les propriétaires. Il y aurait 12 logements vacants à l'usage des locataires pendant le chantier, selon l'information aux locataires du 10 février 2023. L'ouverture du chantier serait subordonnée au relogement de ceux-ci (art. 42 al. 4 LDTR) (condition n° 3). Le requérant remettrait au département un état locatif nominatif de l'immeuble, à la fin de la période de contrôle (condition n° 4) ;

-       du 9 janvier 2023 sous conditions notamment que les dispositions de la LDTR soient respectées (art. 9 LDTR) (condition n° 1). Les travaux visés par la demande n'auraient aucune incidence sur les loyers des logements existants, comme indiqué dans la lettre d'information aux locataires datée du 15 juillet 2022 (condition n° 2). Les loyers des 28 logements existants situés du rez-de-chaussée au 7ème étage n'excéderaient pas après travaux l'état locatif indiqué dans le document D02. Ces loyers seraient appliqués pour une durée de 3 ans dès la remise en location de chaque logement après les travaux (art. 10 al. 1, 11 et 12 LDTR) (condition n° 3). Les travaux concernés par cette demande en autorisation de construire n'impliqueraient pas le départ des locataires (condition n° 4) ;

-       du 21 décembre 2022 sous conditions notamment que les dispositions de la LDTR soient respectées (art. 9 LDTR). Les travaux visés par la demande en autorisation de construire n'auraient aucune incidence sur les loyers des 21 logements existants, comme indiqué dans la lettre d'information aux locataires datée du 27 octobre 2022 (condition n° 2). Le montant des loyers des 21 appartements n'excédera pas après travaux celui mentionné dans le bail à loyer ou le dernier avis de fixation, pour chaque logement selon les pièces visées et enregistrées le 9 novembre 2022. Ces loyers seraient appliqués pour une durée de trois ans dès la remise en location après la fin des travaux (art. 10 al. 1, 11 et 12 LDTR) (condition n° 3).

i. Le TAPI a, par jugement du 9 mai 2023, admis le recours et annulé l’amende, dit qu’il n’était pas perçu d’émolument et alloué une indemnité de procédure de CHF 2'500.- à E______, à la charge de l’État.

Se posait la question du respect des conditions prévues dans l'APA 2______, plus particulièrement de la condition n° 3 du préavis de l'OCLPF du 28 février 2020 faisant partie intégrante de cette autorisation prévoyant que « [l]es travaux de rénovation complète des cuisines et salles de bain, ainsi que le remplacement des canalisations au sous-sol n'auront aucune incidence sur les loyers des 46 appartements ».

La position du département selon laquelle il apparaissait évident que cette condition imposerait un contrôle des loyers au sens des art. 10 et ss LDTR ne saurait être suivie. Cela ne ressortait pas expressément de l'autorisation querellée et le préavis du 28 février 2020 ne prévoyait ni le montant maximum des loyers des logements après travaux, ni la durée du contrôle. Il était également muet quant à une éventuelle obligation pour la propriétaire de remettre au département un état locatif de l'immeuble à la fin de la période de contrôle. Si le préavis faisait effectivement référence à l'art. 9 LDTR, il ne le faisait pas aux art. 10 ss LDTR, ni même à l'état locatif produit à l’appui de la requête. Le fait que la propriétaire ait confirmé dans le cadre de sa demande d’APA que les travaux de rénovation n'auraient aucune incidence sur les loyers n’y changeait rien puisque, comme le reconnaissait le département, E______ se référait expressément aux travaux à plus-value, sans exclure toute majoration fondée sur la base d'autres motifs.

S’y ajoutait que l'OCLPF admettait, dans le cas d'espèce, que l'existence d'un blocage des loyers n'avait rien d'évident, un tiers pouvant déduire de la condition litigieuse que des hausses de loyers pour d'autres motifs pouvaient être envisagées et qu’E______ ne pouvait pas connaître la durée du contrôle des loyers à la seule lecture du préavis de l’OCLPF du 28 février 2020. Celle-ci s'était préalablement renseignée auprès de ce service afin de connaître la teneur d'une telle condition et celui-ci avait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence. La propriétaire ne pouvait être en mesure de se rendre compte immédiatement de la prétendue inexactitude du renseignement fourni, de sorte qu'elle pouvait s’y référer de bonne foi.

Si les préavis plus récents de l'OCLPF prévoyaient expressément le montant maximum des loyers après travaux, la durée du contrôle, l'obligation de remettre un état locatif à la fin de la période de contrôle ainsi que la références aux art. 10 à 12 LDTR, respectivement à l'état locatif, cette pratique n'avait rien de nouveau. Il ressortait en effet d'un préavis de l'OCLPF du 17 avril 2019, que cette instance spécialisée procédait déjà de la sorte avant le 28 février 2020. Dès lors, E______ pouvait de bonne foi comprendre de l'absence de mention de ces éléments dans le préavis litigieux qu'aucun contrôle des loyers n'était imposé.

C’était donc à tort que le département avait retenu une infraction à la LDTR.

E. a. A______ (ci-après : A______), B______ ainsi qu’C______ et D______ ont formé recours contre ce jugement par acte déposé le 9 juin 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Ils ont conclu à l’annulation dudit jugement et à la confirmation de la décision du département du 20 juillet 2022.

B______, de même qu’C______ et D______ avaient été locataires d’un studio au 30, rue G______. Ils avaient fait valoir leurs droits en matière de contestation du loyer initial et de fixation judiciaire du loyer devant les autorités judiciaires compétentes, où ils étaient représentés par l’A______. E______ avait fait appel contre les deux jugements rendus au début de l’année 2023 par le TBL. Le TBL avait constaté la nullité partielle de leurs contrats de bail à loyer, au sens de l’art. 20 CO, dans la mesure où les loyers convenus contractuellement étaient contraires à l’autorisation de construire délivrée par l’OAC le 5 mars 2020, et les avait fixés, dès le 1er décembre 2020, à CHF 515.- par mois pour B______ (jusqu’au 15 juin 2021, date à laquelle il avait quitté l’appartement) et à CHF 615.- pour C______ et D______.

Ils étaient donc directement concernés par la décision de l’OAC du 20 juillet 2022 et avaient la qualité pour recourir.

Quand bien même la décision du 20 juillet 2022 sanctionnait la propriétaire, il était évident que cette dernière n’avait aucune intention de rembourser aux locataires concernés le trop-perçu de loyers de CHF 103’326.-. L’A______ avait la qualité pour recourir selon l’art. 45 al. 5 LDTR.

Dans la mesure où l’APA du 5 mars 2020 était en force et exécutoire, la propriétaire ne pouvait plus la remettre en cause. Le TAPI ne pouvait à son tour remettre en cause l’application in concreto des art. 10 à 12 LDTR. Il ne pouvait s’autosaisir de ce qui s’apparentait à une demande de reconsidération. Si le TAPI avait estimé que l’APA était peu claire, il aurait pu éventuellement réévaluer le montant de la sanction administrative mais ne pouvait pas simplement annuler la décision querellée.

L’analyse du TAPI était en tous les cas insoutenable. En effet, en application de l’art. 10 LDTR, le département devait fixer, comme condition d’une autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux. Il n’avait ainsi pas de marge d’appréciation. L’exception prévue à l’al. 2 de cette disposition était extrêmement restrictive, comme énoncé dans la doctrine de référence. Si la manière dont l’autorité administrative rédigeait actuellement ses préavis LDTR pouvait encore être critiquée, il ne faisait aucun doute que les loyers étaient bloqués pour une période minimale de 3 ans.

La propriétaire était particulièrement mal placée pour se prévaloir d’une violation du principe de la bonne foi, alors qu’elle était une société immobilière importante qui avait un portefeuille dans la région lémanique de CHF 1'551'000'000.- et avait dû déposer des centaines de demandes d’autorisation de construire ces dernières années. Elle avait de surcroît, dans son courrier du 16 janvier 2020, donné des assurances au département selon lesquelles les travaux de rénovation en cause n’auraient aucune incidence sur les loyers des 46 appartements. Elle violait de manière crasse ses obligations en matière de LDTR.

b. E______ a conclu principalement à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

Les trois recourants n’avaient pas participé à la procédure devant le TAPI ni requis leur appel en cause. L’A______ n’avait pas été empêchée de participer à la procédure de recours de première instance, alors qu’elle en avait eu connaissance le 13 septembre 2022 lors de l’audience de débat dans le cadre de la procédure civile opposant E______ à C______ et D______, qu’elle représentait. Le recours ne répondait de plus pas à l’exigence de motivation telle que prévue à l’art. 65 al. 2 de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), puisque les recourants se limitaient à reprendre la liste des arguments qu’elle avait elle-même soulevés devant le TAPI, dont ils ne critiquaient pas le jugement.

Elle rappelait qu’aucune période de blocage des loyers n’avait été fixée pour des travaux effectués dans l’immeuble sis 43, avenue J______, à Genève, alors qu’ils étaient identiques à ceux de la présente cause. Les loyers des deux recourants, nouveaux locataires, avaient été augmentés sur la base du critère des loyers usuels du quartier et non sur celui des prestations supplémentaires du bailleur. La décision litigieuse du 20 juillet 2022 faisait suite à deux dénonciations auxquelles elle n’avait pas eu accès.

Au fond, les premiers juges s’étaient prononcés sur le respect des conditions prévues par l’APA. Il n’avait jamais été question de remettre en cause l’application des art. 10 à 12 LDTR effectuée par l’OAC. Elle avait prouvé, pour les raisons qu’elle reprenait, n’avoir commis aucune faute et avoir été de bonne foi tant dans le cadre de la procédure qui avait mené à l’APA du 5 mars 2020, que dans celle relative à son application. L’argument des recourants consistant à soutenir que le TAPI aurait statué comme sur une demande de reconsidération de l’APA était aberrant, puisque ni l’APA du 5 mars 2020 ni le préavis de l’OCLPF du 28 février 2020 mentionnaient le montant des loyers fixés après travaux et la période de blocage des loyers. Si elle était certes habituée aux demandes d’autorisation de construire, il ne pouvait être contesté qu’elle avait sollicité les explications auprès de l’autorité compétente et que c’était en toute bonne foi qu’elle s’était fiée à une pratique interne du département prévoyant que les loyers des appartements dans lesquels les travaux de rénovation de cuisines et de salles de bains avaient été réalisés, dont les coûts n’auraient pas de répercussions sur les loyers, ne seraient pas bloqués par la LDTR. Or, elle avait respecté les engagements pris dans ce sens, ce que l’autorité administrative n’avait en revanche pas été en mesure de faire.

c. Le département a conclu à l’irrecevabilité du recours, faute de qualité pour agir des recourants.

d. Dans leur réplique, ces derniers ont relevé que leur qualité pour recourir devant les autorités cantonales ne pouvait pas s’apprécier de manière plus restrictive que devant le Tribunal fédéral, référence étant faite à l’art. 89 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Ils n’avaient pas participé à la procédure de première instance parce qu’ils n’y avaient aucun intérêt. La décision de l’OAC obligeait en effet la propriétaire à notifier à l’ensemble des locataires de nouveaux avis de fixation du loyer au montant conforme à l’APA, soit donc ce qu’ils souhaitaient obtenir. Ils ne s’étaient de plus pas vu notifier la décision en matière d’infraction. Si celle-ci devait avoir été publiée dans la FAO, il ne pouvait être exigé de l’A______ qu’elle consulte l’intégralité des décisions, alors même que les adresses des immeubles concernés n’étaient pas mentionnées. Ce n’était que lorsqu’E______ avait produit une copie de son recours au TAPI auprès de l’autorité judiciaire civile qu’ils en avaient eu connaissance. Il était donc tout à fait possible d’avoir la qualité pour recourir sans avoir participé à la procédure de première instance (ATA/1064/2022).

Il était affligeant que le département n’entende même pas faire respecter ses propres décisions. On pouvait même y voir une violation de l’art. 10 LDTR.

e. Les parties ont été informées, le 29 août 2023, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

Les intimés soutiennent que les recourants n’auraient pas la qualité pour recourir contre le jugement du TAPI, faute d’avoir eu cette qualité ou d’avoir été appelés en cause en première instance.

2. 2.1 Aux termes de l'art. 111 LTF, la qualité de partie à la procédure devant toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral (al. 1); l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral doit pouvoir examiner au moins les griefs visés aux art. 95 à 98 LTF (al. 3).

Il résulte de cette disposition que la qualité pour recourir devant les autorités cantonales ne peut pas s'apprécier de manière plus restrictive que celle pour recourir devant le Tribunal fédéral, les cantons demeurant libres de concevoir cette qualité de manière plus large (ATF 135 II 145 consid. 5 et les arrêts cités). En l'occurrence, il convient donc d'examiner la qualité pour recourir sous l'angle de l'art. 89 al. 1 LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1).

2.2 Selon l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c).

La teneur de l’art. 89 al. 1 let. b et c LTF correspond à celle de l'art. 60 al. 1 let. b LPA (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3).

2.3 À teneur de l’art. 60 al. 1 LPA, ont notamment qualité pour recourir : les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a) ; toute personne qui est touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’Etat ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (let. b).

La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/258/2020 du 3 mars 2020 consid. 2a et l'arrêt cité ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 184 n. 698).

2.4 Une association jouissant de la personnalité juridique est autorisée à former un recours en son nom propre lorsqu'elle est touchée dans ses intérêts dignes de protection (art. 60 al. 1 let. a et b LPA).

Ont aussi qualité pour recourir les organisations auxquelles la loi reconnaît le droit de recourir (art. 60 al. 1 let. e LPA), telle l’A______ selon l’art. 45 al. 5 LDTR, dont les conditions sont sans conteste réalisées en l’espèce.

2.5 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, sauf fait justificatif valable, celui qui n'a pas participé à la procédure devant l'autorité précédente n'a pas qualité pour recourir au Tribunal fédéral, indépendamment de l'intérêt qu'il peut avoir à l'annulation ou à la modification du jugement entrepris. Des faits justificatifs se présentent notamment quand l'autorité précédente, pour un motif procédural, dénie à tort à la personne concernée la qualité de partie ou en cas d'erreur ou d'omission de cette même autorité. Une exception à l'exigence posée par l'art. 89 al. 1 let. a LTF existe également lorsque la personne concernée est atteinte pour la première fois par l'arrêt attaqué. Si sa qualité pour agir apparaît seulement en cours de procédure, elle doit en principe être invitée à participer à l'instance. En outre, celui qui a renoncé à participer aux instances préalables au motif que d'autres agissaient d'ores et déjà, en leur nom propre, n'est pas habilité à recourir auprès du Tribunal fédéral contre le prononcé issu de cette procédure (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1054/2016 et 2C_1059/2016 du 15 décembre 2017 consid. 2.2 non publié aux ATF 144 II 147, et les références citées).

2.6 En l’espèce, ni l’A______ ni deux (dont un ancien) locataires de l’immeuble concernés par les travaux en cause n’ont participé à la procédure de première instance. Ils expliquent que d’une part la sanction administrative en cause les satisfaisait et d’autre part car ils n’auraient pas eu connaissance de la procédure en cours devant le TAPI avant une audience en septembre 2022 devant le TBL, instance en charge de la question de la fixation des loyers et qui plus est leur avait donné raison par deux jugements en prévoyant des loyers conformes à la LDTR.

Tant l’A______ que les deux autres recourants peuvent être suivis lorsqu’ils soutiennent n’avoir été atteints pour la première fois que par le jugement du TAPI du 9 mai 2023. La décision querellée n’est pas sujette à publication. Ce jugement, s’il devait être confirmé, a pour effet, indépendamment de l’amende infligée à la propriétaire de l’immeuble – que ni l’A______ ni les locataires de l’immeuble n’ont la qualité de contester – d’annuler l’ordre fait à la propriétaire de rétablir une situation conforme au droit en procédant à l'établissement d'un nouvel avis de fixation du loyer initial (formule officielle) respectant la condition n° 3 du préavis LDTR du 28 février 2020 pour chacun des 46 appartements concernés, dont ceux des recourants que l’A______ défend, et en remboursant les locataires touchés par une augmentation du loyer non conforme à la LDTR, soit un montant de CHF 103'326.‑.

Dans ces conditions, le fait que les recourants n’aient pas été parties à la procédure de première instance ne saurait constituer un obstacle à la reconnaissance de leur qualité pour recourir devant la chambre de céans.

Par ailleurs, il n’existe aucune obligation dans ce sens, contrairement à l’art. 147 al. 2 LCI, s’appliquant en matière de constructions, qui impose aux tiers un délai de 30 jours dès la publication, dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève, de l’existence d’un recours devant le TAPI pour intervenir dans la procédure, précisant que s'ils s'abstiennent de cette démarche, ils n'auront plus la possibilité de recourir contre la décision du TAPI, ni de participer aux procédures ultérieures (al. 2).

Ainsi, conformément aux art. 111 al. 1 et 89 al. 1 let. a LTF et 60 al. 1 let. a LPA, le grief sera écarté concernant la qualité pour recourir de l’A______, limitée toutefois comme déjà dit à la seule question de l’ordre de remise en état.

S'agissant de la question plus spécifique de la qualité pour agir des recourants, locataire et ancien locataire de l’immeuble litigieux, celle-ci pourra demeurer indécise dans la mesure où cette qualité est reconnue à l’A______.

3.             Le recours ne répondrait de plus, selon l’intimée, pas aux exigences de l’art. 65 LPA.

3.1 Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant Ainsi, une requête en annulation d'une décision doit être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu'elle ne déploie pas d'effets juridiques (ATA/433/2022 du 26 avril 2022 consid. 2a).

3.2 En l’espèce, le TAPI a, selon le dispositif de son jugement, admis le recours de la propriétaire portant, pour mémoire, sur tous les points de la décision du 20 juillet 2022. Certes, selon ses considérants, le TAPI a uniquement annulé l’amende litigieuse. Vu le raisonnement du TAPI, on doit toutefois admettre, sous peine de tomber dans le formalisme excessif, qu’il a entendu annuler complètement cette décision, ce que le dispositif indique clairement.

Aussi, on ne saurait se montrer trop formaliste quant aux conclusions et à la motivation du recours formé devant la chambre de céans, dont il ressort clairement qu’il vise le rétablissement de tous les points de la décision litigieuse et en particulier ceux liés à la fixation du loyer des recourants et à une éventuelle restitution du trop-perçu.

Ainsi, le recours est recevable.

4.             L’objet du litige est donc l’annulation par le TAPI de la décision du 20 juillet 2022 et non pas l’APA délivrée le 5 mars 2020. L’analyse de la situation doit néanmoins bien porter sur le contenu de cette APA et l’instruction ayant précédé sa délivrance, puisque la décision attaquée sanctionne la propriétaire pour prétendument ne pas l’avoir respectée.

En vertu de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

5.             5.1 Selon l’art. 1 al. 1 let. b LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation.

L’art. 3 al. 7 LCI prévoit que le département peut traiter par une procédure accélérée les demandes d’autorisation relatives à des travaux soumis à l’art. 1 notamment s’ils portent sur la modification intérieure d’un bâtiment existant ou ne modifient pas l’aspect général de celui-ci (let. b).

5.2 Selon son art. 1 al. 1, la LDTR a pour but de préserver l’habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l’habitat dans les zones visées à son art. 2.

À cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d’appartements, elle prévoit notamment l’encouragement à des travaux d’entretien et de rénovation raisonnables et proportionnés des maisons d’habitation (art. 1 al. 2 let. b LDTR).

Plus spécifiquement, la LDTR vise plusieurs objectifs, notamment améliorer la protection des locataires (MGC 1997 64/X 10562), et conserver sur le marché certains types de logements qui répondent à un besoin en raison de leur prix et de leur conception (ATF 116 Ia 401 consid. 9c).

La réglementation qu'elle met en place est conforme au droit fédéral, à la garantie de la propriété et à la liberté économique, y compris dans la mesure où elle prévoit un contrôle des loyers après transformations (ATF 116 Ia 401 consid. 9c ; 111 Ia 401 consid. 9 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.3).

5.3 Selon l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, par transformation, on entend notamment tous les travaux qui ont pour objet la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve de l'art. 3 al. 2 LDTR.

Selon cette dernière disposition, par travaux d’entretien, non assujettis à la LDTR, il faut entendre les travaux courants d’entretien faisant partie des frais d’exploitation ordinaires d’une maison d’habitation. Les travaux raisonnables d’entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation, pour autant qu’ils n’engendrent pas une amélioration du confort existant.

Le législateur a précisé que les travaux courants d'entretien sont ceux qui sont déjà couverts par les loyers, ou devraient l’être, une partie du loyer étant précisément censée permettre la constitution d’une réserve pour travaux d’entretien (MGC 1999 9/II 1082).

C’est le département, et non l’administré, qui détermine dans chaque cas si des travaux relèvent de l’entretien ou de la transformation. Si des travaux de pur entretien ne nécessitent pas d’autorisation, il incombe toutefois au propriétaire, en cas de doute, de demander l’avis du département et d’effectuer les démarches nécessaires pour agir en conformité de la loi (ATA/694/2016 du 23 août 2016 consid. 7 ; Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR : Démolition, transformation, rénovation, changement d'affectation et aliénation : immeubles de logement et appartements : loi genevoise et panorama des autres lois cantonales, 2014, p. 186).

5.4 Une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation. L'autorisation est accordée notamment pour les travaux de rénovation au sens de l'art. 3 al. 1 let. d LDTR (art. 9 al. 1 let. e LDTR).

5.4.1 Le département accorde l’autorisation si les logements transformés répondent, quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population (art. 9 al. 2 LDTR). Il s'agit d'hypothèses alternatives (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op.cit., p. 133). Par besoins prépondérants de la population, il faut entendre les loyers accessibles à la majorité de la population (art. 9 al. 3 LDTR).

5.4.2 Pour opérer la distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation, le raisonnement, admis de manière constante par la chambre administrative, se décline en deux temps. Premièrement, il faut examiner, si, de par leur nature, les travaux en cause relèvent de l'entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation, la jurisprudence de la chambre administrative précisant, sur ce point, que des travaux d'entretien sont susceptibles d'aboutir à une rénovation ou à une transformation soumise à la LDTR lorsque, n'ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l'existence de l'immeuble, ou encore parce qu'ils n'ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d'une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confère une incidence propre à engendrer un changement de standing de l'immeuble (travaux différés). Secondement, il convient de s'attacher à l'ampleur et, partant, au coût desdits travaux et à leur répercussion sur le montant du loyer, dès lors qu'il pourrait en résulter un changement d'affectation qualitatif des logements (ATA/651/2022 du 23 juin 2022 consid. 7b ; ATA/422/2020 du 30 avril 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

5.4.3 Il ressort des travaux législatifs ayant précédé la modification de l'art. 3 al. 1 let. d et al. 2 LDTR adoptée en 1999, que le Grand Conseil désirait, pour tracer une limite précise entre travaux soumis et non soumis à la loi, que soient pris en compte le coût de ces derniers et leur incidence sur les loyers, comme prévu par la jurisprudence (MGC 1999 9/11 1076). Lors du deuxième débat concernant le projet de modification de la LDTR, de nombreux amendements ont été soumis au Grand Conseil, notamment celui de préciser, à l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, que devaient être considérés comme travaux de rénovation ceux dont le coût total engendrait une augmentation de loyer de plus de 20% (MGC 1999 9/1 1211). Cet amendement a été rejeté par 48 non contre 46 oui (MGC 1999 10/11 1212 ; ATA/382/2008 du 29 juillet 2008 consid. 2c et l'arrêt cité).

Selon la jurisprudence de la chambre de céans, lorsque le coût des travaux n'est pas susceptible d'entraîner à lui seul une soumission des travaux à la LDTR, c'est la combinaison de ce montant et de son impact sur les loyers qui est jugée déterminante (ATA/651/2022 précité consid. 7b et l'arrêt cité).

5.5 Lorsqu'il accorde une autorisation en cas de démolition ou de transformation d'un immeuble soumis à la LDTR, le département fixe, comme condition de l'autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux (art. 10 1ère phr. LDTR), selon le mode de calcul prévu par l'art. 11 LDTR.

Le département renonce à la fixation des loyers et des prix prévue à l'art. 10 al. 1 LDTR lorsque cette mesure apparaît disproportionnée, notamment lorsque les loyers après transformations demeurent peu élevés (art. 10 al. 2 let. a LDTR) ou lorsque les logements à transformer sont des logements de luxe ou que leurs loyers dépassent d’ores et déjà d’au moins deux fois et demie les besoins prépondérants de la population (art. 10 al. 2 let. b LDTR).

L'art. 10 al. 2 LDTR n'énonce que trois cas de figure exemplatifs, de sorte que le département peut renoncer à fixer le loyer dans d'autres circonstances (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit., p. 275 ; ATA/185/2021 du 23 février 2021 consid. 5d et la référence citée).

5.6 Le principe de la proportionnalité, auquel l'art. 10 al. 2 LDTR se réfère, commande que la mesure étatique soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 144 I 306 consid. 4.4.1 ; 143 I 403 consid. 5.6.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2).

5.7 L’art. 12 LDTR prévoit la durée du contrôle de l’État des loyers et prix de vente maximaux fixés selon l’art. 11 LDTR, à savoir de 5 à 10 ans pour les constructions nouvelles et pendant 3 ans pour les immeubles transformés ou rénovés, durée qui peut être portée à 5 ans en cas de transformation lourde.

5.8 Ancré à l'art. 9 Cst., et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1 ; ATA/175/2023 du 28 février 2023 consid. 4b). En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1 ; ATA/349/2023 du 4 avril 2023 consid. 3.2.3). La protection de la bonne foi ne s'applique pas si l'intéressé connaissait l'inexactitude de l'indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2). Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (2) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_617/2019 du 27 mai 2020 consid. 4.1).

6.             6.1 Celui qui contrevient aux dispositions de la LDTR est passible des mesures et des sanctions administratives prévues par les art. 129 à 139 LCI et des peines plus élevées prévues par le code pénal suisse, du 21 décembre 1937 (art. 44 al. 1 LDTR).

Parmi les mesures administratives à disposition de l’autorité compétente figure l’ordre de remise en conformité (art. 129 let. e LCI). L’objectif d’une telle mesure est de rétablir une situation conforme au droit (ATA/185/2021 précité consid. 5f).

6.2.1 Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, une mesure visant les loyers, notamment le remboursement du trop-perçu de loyer et l'établissement d'un nouveau bail conforme aux conditions de l'autorisation de construire accordée, constitue une forme de remise en état au sens de l'art. 129 let. e LCI (ATA/185/2021 précité consid. 5f et les arrêts cités ; ATA/531/2012 du 21 août 2012 consid. 7b confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_496/2012 du 12 février 2013).

6.2.2 La répétition de l'indu (art. 63 al. 1 CO par analogie) fait par ailleurs partie des principes généraux du droit administratif, applicable sans base légale expresse. Dès lors, la restitution de loyers perçus en trop ordonnée par le département ne viole pas le principe de la légalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_250/2010 du 26 août 2010 consid. 3.2 et la référence).

6.2.3 Dès lors que l'art. 12 LDTR institue un contrôle des loyers après l'exécution des travaux de rénovation, l'obligation faite au propriétaire sous cet aspect inclut celle d'inscrire, dans le contrat de bail concerné, le montant du loyer fixé dans l'autorisation de rénover pendant le contrôle et de rectifier un bail à loyer qui s'en écarterait (arrêts du Tribunal fédéral 1C_184/2013 du 8 janvier 2014 consid. 2.1 ; 1C_496/2012 du 12 février 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/260/2014 du 15 avril 2014 consid. 11a et les autres arrêts cités).

Le blocage du loyer peut porter rétroactivement sur la période entre la fin des travaux exécutés illicitement et, en soi, l'entrée en force de l'autorisation de construire obtenue après coup, avec obligation de rembourser le trop-perçu au locataire (ATA/185/2021 précité consid. 5g et la référence citée). L'obligation de restituer le loyer ne vaut que pour la durée du contrôle étatique instaurée par la LDTR (ATA/185/2021 précité consid. 5g et les références citées).

7.             En l'occurrence, le 7 janvier 2020, l’intimée a déposé une demande d’APA portant sur la rénovation d'appartements du premier au quatrième étages d’un immeuble dont elle est propriétaire à la rue G______. Dans la lettre d'explication du projet à l’attention du département, elle a expressément indiqué que « ces travaux n'auront pas d'incidence sur les loyers des locataires ». Elle a produit un état locatif de l'immeuble, qui serait identique à celui après travaux, la rénovation se passant avec les locataires en place.

Il ressort ensuite explicitement de l'APA 2______, plus particulièrement de la condition n° 3 du préavis de l'OCLPF du 28 février 2020 faisant partie intégrante de cette autorisation que « [l]es travaux de rénovation complète des cuisines et salles de bain, ainsi que le remplacement des canalisations au sous-sol n'auront aucune incidence sur les loyers des 46 appartements ».

Il ne peut être déduit de cette condition qu’elle aurait imposé un contrôle des loyers au sens des art. 10 et ss LDTR. Il ne ressort en effet ni de l’APA ni dudit préavis le montant maximum des loyers des logements après travaux, loyers qui ne devaient justement pas être augmentés en raison de la plus-value découlant des travaux autorisés, la durée du contrôle ou encore une obligation pour la propriétaire de remettre au département un état locatif de l'immeuble à la fin de la période de contrôle. Le directeur de l’OCLPF a de plus admis devant le TAPI que, dans le cas d'espèce, l'existence d'un blocage des loyers n'avait rien d'évident et que l’on pouvait déduire de la condition litigieuse que des hausses de loyers pour d'autres motifs que la répercussion du coût de travaux pouvaient être envisagées.

S’y ajoute que la propriétaire intimée s’était précisément renseignée auprès de l’OCLPF en lui demandant, par courriel du 10 avril 2018, se référant à trois APA obtenues durant la même période pour des travaux identiques dans trois immeubles, portant sur la rénovation de salles de bain et cuisines, pour quelles raisons elle avait reçu des conditions diverses pour chacun d'entre eux. Selon ces APA, lesdits travaux n'auraient aucune incidence sur les loyers, respectivement ceux-ci seraient contrôlés pendant 5 ans ou encore l'état locatif serait bloqué pendant 3 ans après la fin des travaux.

L’OCLPF lui a répondu par courriel le 29 juin 2018, que « [l]a directive interne concernant la durée de contrôle [avait] été précisée en début d'année. Ainsi, les travaux de rénovation de ce genre, dont les coûts de travaux n'auraient pas de répercussion sur les loyers, n'auront pas ces derniers bloqués par la LTDR ». Or, c’est précisément ce que l’intimée a indiqué dans la demande d’APA ayant donné lieu à l’autorisation du 5 mars 2020, à savoir qu’elle ne répercuterait pas le coût de travaux sur les loyers des locataires en place. Nul ne soutient qu’elle n’aurait pas respecté cet engagement.

S’y ajoute que le département n’a pas contredit l’intimée qui a exposé qu’aucune période de blocage des loyers n’avait été fixée pour des travaux effectués dans l’immeuble sis 43, avenue J______, à Genève, alors qu’ils étaient identiques à ceux de la présente cause.

Si des préavis plus récents de l'OCLPF prévoient expressément le montant maximum des loyers après travaux, la durée du contrôle, l'obligation de remettre un état locatif à la fin de la période de contrôle ainsi que la références aux art. 10 à 12 LDTR, respectivement à l'état locatif, tel était déjà le cas d’un préavis de cette même instance du 17 avril 2019 concernant des travaux dans 33 appartements d’un autre immeuble de l’intimée, soit donc avant celui du 28 février 2020. Autrement dit, l’OCLPF a, à tort ou à raison, clairement laissé entendre par son préavis du 28 février 2020 ne disant mot sur ces points, que les loyers, non modifiés, ne seraient pas contrôlés.

Dès lors, E______, qui s’est basée sur des renseignements de l’OCLPF, instance spécialisée dans l’application de la LDTR, pouvait de bonne foi comprendre de l'absence de mention de ces éléments dans le préavis litigieux qu'aucun contrôle des loyers n'était imposé.

Ainsi, elle est restée libre, si elle s’y estimait fondée, à la suite de la résiliation de certains baux par des locataires, dont une partie des logements avaient pu être remise en location, de majorer les loyers sur les critères de l'adaptation aux loyers usuels du quartier selon l’art. 269a let. a CO ou sur la base de l'adaptation du loyer à l'évolution de l'ISPC selon l’art. 269b CO), charge aux locataires de contester ces majorations le cas échéant devant les instances civiles compétentes.

Quand bien même l’intimée est aguerrie au domaine immobilier, le département doit se voir opposer dans le cas d’espèce l’absence de précisions qu’il lui a données, tant par le préavis de l’OCLPF précité que le libellé de l’APA.

C’est donc à tort que le département a retenu une infraction à la LDTR dans cette situation précise, étant au demeurant relevé qu’il n’a pas recouru contre le jugement du TAPI.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à l’intimée, qui y a conclu, à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juin 2023 par l’A______, B______ ainsi qu'C______ et D______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge solidaire de l’A______, B______ ainsi qu'C______ et D______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à E______, à la charge solidaire de l’A______, B______ ainsi qu'C______ et D______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romolo MOLO, avocat des recourants, à Me Serge PATEK, avocat de E______, au département du territoire - OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Christian COQUOZ, Jean-Marc VERNIORY, Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :