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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/20079/2021

ACPR/493/2023 du 26.06.2023 sur OCL/1384/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR;CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;ABUS DE CONFIANCE;ESCROQUERIE;DIMINUTION EFFECTIVE DE L'ACTIF;FAUX TÉMOIGNAGE
Normes : CPP.382; CPP.115; CPP.105; CPP.319; CP.138; CP.146; CP.164; CP.306; CP.307

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20079/2021 ACPR/493/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 26 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant en personne,

recourant,

contre l'ordonnance de classement rendue le 26 octobre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 7 novembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 26 octobre 2022, notifiée le 31 suivant, par laquelle le Ministère public a classé ses plaintes du 18 octobre 2021.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance querellée, au renvoi de la cause au Ministère public pour suite d'instruction et à ce que B______ et C______ soient condamnés "en tous les dépens".

b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'200.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ se sont connus en 1999 dans le cadre de leurs activités professionnelles.

b. Dès le 1er septembre 2009, A______ a été engagé au sein de D______ SA (ci-après: D______), société inscrite au Registre du commerce de Genève, dont B______ était propriétaire et administrateur. Du 24 mars 2009 au 10 janvier 2020, E______ en était le directeur.

c. F______ SA (ci-après: F______) – devenue Société F______ SA le ______ 2021 – est une société inscrite au Registre du commerce de Genève, dont B______ a été administrateur du 24 octobre 2008 au 10 janvier 2020, date à laquelle C______ – épouse du précité depuis 2010 – en est devenue l'administratrice. Du 25 février 2009 au 20 mai 2021, le but de la société était de détenir un immeuble sis route 1______ no. ______ (parcelle 2______) à Genève.

d. Par plis du 18 octobre 2021, A______ a déposé deux plaintes.

d.a. En substance, il ressort de la première, déposée contre B______ et C______ pour abus de confiance et escroquerie, ainsi que des nombreux documents produits, que son contrat de travail avec D______ avait été résilié pour le 31 mars 2020 et qu'il n'avait pas perçu son salaire d'octobre 2019 à mars 2020.

Entre octobre 2019 et février 2020, B______ lui avait en outre demandé, à plusieurs reprises, de lui octroyer des prêts pour régler ses affaires en Russie. Le prénommé lui avait expliqué "manque[r] de liquidités" mais n'avoir pas de problème pour le remboursement puisque lui-même et sa famille disposaient d'actifs, dont l'immeuble détenu par F______. Comme B______ n'avait pas de compte bancaire en Russie, ce dernier lui communiquait les coordonnées bancaires et passeports des tiers à qui il devait verser l'argent. Ainsi, il avait prêté au prénommé, entre le 4 octobre 2019 et le 27 février 2020, depuis son compte personnel auprès de [la banque] G______ ou par le biais de tiers – à qui lui-même avait emprunté de l'argent –, en totalité EUR 41'700.- et USD 37'990.75. Comme il connaissait B______ depuis vingt ans et qu'ils avaient travaillé ensemble de nombreuses années, il n'avait pas estimé "nécessaire", vu leur lien d'amitié et de confiance, de conclure des accords écrits.

Le 31 octobre 2019, sur demande de B______, il avait encore prêté USD 70'000.- à D______. Selon le contrat, le remboursement devait avoir lieu, au plus tard, le 31 [recte: 15] novembre 2019. Il avait transféré ce montant à la société depuis son compte G______ [en 2017, il avait prêté USD 95'000.- à D______, qui lui avaient été remboursés].

En janvier 2020, B______ lui avait expliqué avoir transféré l'intégralité du capital-actions de F______ à son épouse car il devait partir en Russie. En son absence, cette dernière devait vendre l'immeuble et gérer les "affaires familiales", dont D______. Lors d'une rencontre en juillet 2020 à H______ [Russie], B______ lui avait promis de rembourser "tout ce qu'il lui d[evait]" avec le produit de la vente de l'immeuble, ce qu'il lui avait confirmé par message WhatsApp. Or, B______ avait été incarcéré en Russie à la fin octobre.

Sur l'ensemble des prêts, seuls EUR 20'000.- avaient été remboursés par F______, le 10 juillet 2020.

Le 8 février 2021, il avait déposé une réquisition de poursuite contre D______ pour les salaires impayés (CHF 94'795.50 + 5% dès le 31.12.2019) ainsi que le prêt du 31 octobre 2019 (CHF 63'600.- + intérêt 5% dès le 15.11.2019). Le 25 suivant, D______ y avait formé opposition partielle, reconnaissant la dette relative aux arriérés de salaires. Par jugement du 8 mars 2021 (respectivement jugement du 5 octobre 2021 rendu ensuite de la rectification d'une erreur matérielle), il avait obtenu la mainlevée provisoire de l'opposition s'agissant du prêt du 31 octobre 2019.

Puis, l'immeuble détenu par F______ avait été vendu et il avait reçu, de cette dernière le 25 mars 2021, EUR 71'974.59 à titre d'arriérés de salaires et EUR  27'401.16 pour le remboursement du prêt du 31 octobre 2019. Le lendemain, il avait attiré l'attention de D______ sur le fait que le solde des dettes restait dû.

Le 14 juillet suivant, D______ avait été déclarée en faillite. Dans ce cadre, C______, entendue en tant que "personne de référence" le 2 septembre 2021, avait menti à l'"officier", déclarant que B______ était hospitalisé en Russie alors qu'il y était incarcéré. De plus, sachant que l'Office des faillites ne pourrait pas saisir les actifs de F______ dans le cadre de la faillite de D______, elle avait affirmé que "tout" avait été remboursé. En parallèle, le Tribunal des prud'hommes avait déclaré sa demande irrecevable, vu la survenance de la faillite.

B______ et C______ avaient "abusé" de sa confiance avec des "intentions frauduleuses". Ainsi, EUR 21'700.- et USD 37'990.57 ne lui avaient pas été remboursés, et D______ lui devait encore CHF 16'019.31 et USD 38'146.15.

d.b. Il ressort, en substance, de la seconde plainte, intitulée "[a]ffaire contre I______ LLP", ainsi que des nombreux documents produits, qu'en 2012, il avait acquis, à la demande de B______, par "l'intermédiaire du gestionnaire du compte de [la banque] J______", une société panaméenne, K______, dans le but d'effectuer des transactions sur les marchés financiers et de redistribuer les gains au prorata des montants apportés. Il avait versé, depuis son compte G______, les 21 septembre et 31 octobre 2012, respectivement EUR 100'000.- et EUR 126'000.-, sur le compte de K______ dans les livres de J______. Toutefois, comme B______ n'avait pas apporté de fonds propres, il avait requis que la société soit transférée à ce dernier, à qui il avait demandé le remboursement de ses fonds. B______ n'était pas intéressé.

En mai 2013, il s'était rendu à H______ (Russie) avec son frère, L______, pour négocier les termes de leur coopération avec B______, en particulier s'agissant de l'investissement d'EUR 226'000.-. Dans ce cadre, ils avaient convenu que L______ deviendrait "manager" de I______ LLP (ci-après: I______) (Royaume Uni) – dont C______ était l'unique ayant droit économique depuis 2016 –, laquelle détenait 94,171% de M______, elle-même actionnaire unique de N______, sociétés ouzbèkes actives dans le textile.

Le 18 mars 2016, la licence de O______, banque russe dont B______ était Président du Conseil d'administration, avait été révoquée. Le 10 août suivant, O______ avait été déclarée en faillite.

B______ lui avait alors demandé de l'aide pour éponger ses dettes en Russie. Il lui avait alors rappelé avoir déjà investi EUR 226'000.- dans K______. Comme son frère, manager de I______, savait que M______ était une usine prospère, il avait accepté qu'une participation de I______ serve de gage et lui soit transférée en cas de non-remboursement de la dette. Son frère avait aussi remis près d'USD 500'000.- en espèces à des tiers en Russie sur demande de B______, étant précisé qu'une partie de cette somme consistait en l'héritage de leur père, en Russie. Vu le lien d'amitié et de confiance qui les liait – dont E______ était témoin –, il n'avait pas estimé "nécessaire" de conclure un accord écrit sur ce qui précède.

Par la suite, B______ lui avait demandé de patienter avant d'obtenir le remboursement de la dette, dans la mesure où il avait des projets pour M______, lesquels devaient rendre l'usine encore plus profitable. En juillet 2017, le prénommé avait remplacé son frère au poste de manager de I______, expliquant vouloir superviser lesdits projets. Courant 2018, à la suite de ses demandes répétées de remboursement ou de transfert de la participation convenue, B______ lui avait dit avoir obtenu des prêts de banques ouzbèkes en vue de financer les projets pour M______. Il fallait toutefois encore "du temps" pour que les nouveaux équipements arrivent, soient installés et mis en service. En mars 2019, il avait eu connaissance des contrats de prêts conclus entre [la banque] P______ et M______, lesquels s'élevaient à USD 5'100'000.- environ et étaient garantis par tous les biens de la société ainsi que ceux de N______, évalués à près de 10 millions. "Ne voulant plus patienter, et tenant compte de la charge de crédit de M______, [il] a[vait] exigé en mars 2019 le transfert immédiat des parts de I______ comme convenu avec B______ en mai 2017", ce que ce dernier et son épouse avaient accepté. Par accord du 2 avril 2019, le capital-actions de I______ avait été divisé à parts égales entre lui et C______, ce dont E______ avait été témoin.

"[E]n avril 2019", P______ avait intenté une action contre M______ en Ouzbékistan, laquelle avait cessé de servir les prêts. Ensuite du jugement rendu le 5 août 2019, les biens de M______ avaient été vendus aux enchères pour éteindre la dette.

Dans le cadre de cette procédure, B______ avait prétendu, d'une part, ne pas avoir donné son accord quant aux prêts obtenus par M______ et, d'autre part, que les sommes prêtées avaient été volées par les responsables de la société. Or, il ressortait de l'enquête que près de la moitié des fonds prêtés avaient été transférés pour "acomptes d'achat de l'équipement de textile" sur des comptes bancaires de la société russe Q______ et la société panaméenne R______ SA (ci-après: R______), auprès de la banque S______, dont B______ était ayant droit économique. De plus, ce dernier détenait une signature sur les comptes.

Se fondant sur le droit ouzbèke, il avait demandé à B______, à plusieurs reprises, quand l'équipement "prévu" devait être livré, étant précisé que ce dernier avait dit à P______ que celui-ci serait livré en août 2019. Il avait alors informé B______ qu'un "défaut de livraison" et le "non-remboursement des acomptes versés par les banques" entraineraient une importante pénalité. M______ avait finalement été condamnée, le 30 janvier 2020, par le Tribunal de commerce d'Ouzbékistan, au paiement d'une pénalité équivalente à CHF 870'000.-. Le 17 décembre 2020, la faillite de M______ avait été prononcée, faute de paiement de ladite pénalité par la société.

Lors d'une rencontre durant l'été 2020 avec B______ à H______, ce dernier avait promis de rembourser la dette correspondant à USD 500'000.- remis par son frère et EUR 226'000.- à K______ – alors même que celle-ci aurait dû être réglée par le transfert de la moitié du capital-actions de I______ –, dans la mesure où les actions de I______ n'avaient plus de valeur ensuite de la vente aux enchères des actifs de M______. Il entendait la rembourser au moyen du produit de la vente de l'immeuble appartenant à F______.

À cette occasion, il avait aussi appris que, le 14 octobre 2019, le Tribunal arbitral de la ville de H______ avait prononcé la saisie provisoire des biens de B______ dans le cadre de l'affaire O______, qu'une plainte avait été déposée contre les responsables de la banque – dont le prénommé faisait partie –, lesquels étaient soupçonnés d'avoir "détourné" les fonds de la banque et que, le 2 août 2019, la société russe T______ avait intenté une action en justice par-devant le Tribunal de la ville de X______ [Russie] réclamant à B______ USD 1'500'000.- de dommages et intérêts. Au vu de ces éléments, il apparaissait que B______ avait transféré l'immeuble détenu par F______ à son épouse pour tenter de dissimuler ses biens à ses créanciers, dont il faisait partie.

Ainsi, B______ et C______ avaient "abusé" de sa confiance pour s'approprier ses fonds, et les actions de I______ avaient perdu de la valeur en raison de leurs actes "frauduleux". Vu leur lien de confiance et d'amitié, il avait cru B______ "sur parole", ce d'autant qu'il disait vouloir réaliser de nouveaux projets devant rendre l'usine encore plus profitable. B______ l'avait privé de toute information sur les activités réelles de M______, en remplaçant son frère au poste d'administrateur de I______. Il avait retardé le transfert de sa participation pour "avoir la possibilité d'effectuer la manœuvre avec l'obtention frauduleuse de prêts octroyés à M______ en 2018". Il avait ensuite accepté le transfert dont ils avaient convenu en mai 2017, tout en sachant que ses actes mèneraient à la confiscation des biens de M______ et donc à une diminution de la valeur des actions de I______. B______ l'avait aussi induit en erreur en prétendant que les responsables de M______ avaient volé les fonds prêtés. Ce dernier avait fait toute "une mise en scène" et avait communiqué des "informations fausses", ayant mené à une perte significative de son patrimoine.

Dans une partie II. (pp. 25 ss), A______ dénonce des actes commis par B______ et C______ et les sociétés qui leur sont affiliées, pouvant être constitutifs d'infractions. Selon lui, suivant le même schéma que celui décrit précédemment, ces derniers avaient détourné les fonds de O______ sur la base de contrats fictifs pour acomptes d'achat d'équipements au profit de sociétés qu'ils contrôlaient ou détenaient, lesquelles avaient un compte bancaire en Suisse. Par la suite, la livraison ou le remboursement de l'acompte n'avait pas eu lieu et les prêts n'avaient pas été remboursés à la banque. Il précisait enfin que B______ détenait 19.7% des actions de O______ par le biais de D______.

e. Entendu par le Ministère public le 8 juin 2022, A______ a expliqué avoir déposé plainte pour l'arriéré de salaires ainsi que pour les montants prêtés, entre octobre 2019 et février 2020, à des proches de B______ soit à la société D______, lesquels n'avaient pas été remboursés. B______, qui lui avait dit manquer de liquidités, ne lui avait pas donné plus d'explications quant à l'utilisation de ces sommes. Aucun contrat n'avait été conclu, à l'exception du prêt consenti le 31 octobre 2019 en faveur de D______. Il n'était pas non plus prévu que l'argent soit utilisé dans un but déterminé.

Il avait demandé à B______ de lui indiquer comment il entendait le rembourser à l'occasion du premier prêt. Comme ce dernier lui avait assuré qu'il rembourserait tous les prêts, il ne lui avait pas posé la question pour les suivants.

S'agissant de l'investissement d'EUR 226'000.- en 2012, aucun contrat n'avait été signé. Il reprochait à B______ de ne pas l'avoir remboursé. En 2013, B______ lui avait dit avoir investi son argent dans une société ouzbèke (M______), investissement avec lequel il était en accord. S'agissant des garanties, B______ lui avait dit qu'ils contrôleraient l'argent ensemble et que chacun recevrait sa part de dividende. Si quelque chose n'allait pas, il le rembourserait.

B______ avait évoqué le transfert des actions de I______, à titre de garantie, pour la première fois en 2017, lorsque son frère lui avait remis la somme d'USD 500'000.-. Cet argent, qui appartenait à son frère, se trouvait en Russie depuis 2008. Ce dernier n'avait pas encore été remboursé.

En été 2020, il avait rencontré B______ à H______, lequel avait promis de le rembourser par le biais de F______, dont il reconnaissait ne pas être le créancier.

f. Par pli du 12 septembre 2022, A______ a informé le Ministère public avoir transmis aux autorités russes, dans le cadre des procédures pénales et arbitrales pendantes contre B______, les éléments contenus dans ses plaintes, ainsi que l'extrait de l'acte de mariage des époux, dans la mesure où, lors d'une audience ayant eu lieu à la fin août 2022 à H______, l'avocat du prénommé avait contesté l'existence dudit mariage.

g. Dans le délai imparti par avis de prochaine clôture du 14 septembre 2022, A______ s'est opposé au classement annoncé par le Ministère public.

Lorsque la responsabilité subsidiaire des responsables de O______ – dont B______ faisait partie – avait été engagée, ce dernier avait tenté de dissimuler ses actifs. Comme D______ – dont ce dernier était propriétaire et administrateur – était l'ayant droit de O______ et que la saisie provisoire de ses biens avait été prononcée en novembre 2019, B______ avait débuté le processus de mise en liquidation de D______ en décembre 2019. Dans le cadre de la procédure arbitrale à H______, B______ avait fourni au juge une copie certifiée conforme datée du 21 juin 2019 d'un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de D______ du 18 janvier 2016 dont il ressortait qu'il avait cédé ses actions et n'était plus l'actionnaire unique de D______ alors que, selon l'extrait du registre des actionnaires obtenu dans le cadre de la faillite de ladite société, il l'avait été jusqu'en février 2022. Enfin, en octobre 2019, B______ avait insisté pour qu'il octroie le prêt d'USD 70'000.- à D______, lui rappelant que le prêt consenti en 2017 à ladite société avait été remboursé, et ce alors qu'il savait déjà qu'il n'allait pas le rembourser puisqu'il allait liquider la société et la mettre en faillite.

B______ avait promis de rembourser les salaires impayés et le prêt du 31 octobre 2019 à D______ avec le produit de la vente de l'immeuble propriété de F______, mais C______, qui administrait la liquidation de D______, avait contesté ses créances, et ce malgré que ses prétentions salariales eussent été reconnues par la société et qu'il eût obtenu la mainlevée du Tribunal de première instance s'agissant du prêt du 31 octobre 2019. Cette dernière avait aussi menti en affirmant que B______ était dans une situation critique et qu'un divorce était en cours en Russie. La faillite de la société avait été suspendue, faute d'actifs et il n'avait pas pu être désintéressé intégralement. Il ressortait aussi des documents de la faillite que la société avait une dette envers la Y______ LPP.

Bien que conscient d'une problématique liée à la compétence des autorités suisses sur le volet I______, il maintenait que les faits reprochés à B______ et C______, à savoir le détournement de fonds prêtés par O______ aux sociétés écrans/offshores ayant des comptes auprès de banques suisses, dans le but de financer des opérations fictives et de se procurer un enrichissement illégitime, étaient poursuivis d'office.

L'analyse des documents bancaires des sociétés citées dans ses plaintes et les auditions de B______, C______ ainsi que de E______ étaient nécessaires à l'établissement de la vérité.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que le litige relatif au paiement du salaire de A______ en tant qu'employé de D______ était de nature civile.

S'agissant du non-remboursements des prêts ainsi que de la somme d'EUR 226'000.-, dans la mesure où les prêts consentis par A______ à B______ (directement ou par le biais de tiers) n'avaient pas de clause d'affectation et que ce n'était qu'ultérieurement que le prénommé lui avait demandé de patienter et qu'il serait remboursé au moyen du produit de la vente d'un immeuble détenu par F______, il ne s'agissant pas de sommes "confiées". La problématique était donc civile. Il en allait de même du prêt consenti le 31 octobre 2019 à D______.

S'agissant du prêt d'USD 500'000.- remis par son frère à B______ en 2017 en Russie, A______ n'était pas directement lésé par ces faits et le Ministère public n'était pas compétent à raison du lieu. Il en allait de même des actes dénoncés en lien avec O______.

D. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public une "constatation incomplète des faits".

Au fond, il réitère que B______, ensuite de la révocation de la licence de O______, avait tenté de cacher les liens entre D______ et O______, notamment par la production, dans le cadre de la procédure russe, de la copie du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 18 janvier 2016. Comme B______ savait que D______ allait être liquidée, ce dernier avait insisté pour que le prêt du 31 octobre 2019 soit consenti en faveur de la société, et ce afin de ne pas le rembourser. B______ avait aussi entrepris des démarches pour dissimuler ses actifs à ses créanciers, dont il faisait partie. Ainsi, alors que le prénommé avait promis de rembourser les prêts – octroyés en sa faveur ou celle de D______ – au moyen du produit de la vente de l'immeuble détenu par F______, il avait transféré l'intégralité des actions de la société à son épouse. Cette dernière, dans le cadre de la procédure de faillite de D______, avait menti sur la situation personnelle de B______ et n'avait pas reconnu ses créances, consciente que seul un accord "oral et amical" existait entre lui-même et F______ pour le recouvrement de celles-ci, dans la mesure où ladite société n'était pas "affiliée" à D______.

En mars 2019, lors du transfert de la moitié du capital-actions de I______ en remboursement de la dette d'USD 500'000.- remis par son frère et son investissement d'EUR 226'000, il avait été victime d'une escroquerie. B______ et C______ – qui avaient détourné les fonds de M______ en 2018 déjà – par le biais de prêts octroyés sur la base de contrats fictifs, étaient conscients que les actions de I______ n'avaient aucune valeur. Dans la mesure où lesdits fonds avaient été transférés sur le compte de sociétés offshores en Suisse et que les faits étaient poursuivis d'office, les autorités suisses étaient compétentes.

Pour le surplus, il maintient que le "détournement" des fonds de O______ était poursuivi d'office et que l'analyse de la documentation bancaire était propre à établir ces faits. Il ajoute que des comptes bancaires de B______, ouverts auprès de banques suisses, avaient été clôturés, ce qui le laissait penser à "une éventuelle non-conformité aux réglementations bancaires". En outre, après la révocation de la licence bancaire de O______, les époux avaient vendu leurs sociétés – dont U______ SA et V______ SA et W______ SA – à un prix significativement inférieur à leur montant d'achat et d'investissement. Enfin, il soupçonnait B______ d'avoir "manipulé" les comptes de D______ dans la mesure où la dette en faveur de T______ n'y figurait pas.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

 

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             2.1. Le recours a été déposé selon la forme et concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du plaignant, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP).

2.2. Seule la personne qui a toutefois un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée dispose de la qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP).

2.2.1. Selon l'art. 115 al. 1 CPP, il faut entendre par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Seul doit être considéré comme lésé celui qui est personnellement et immédiatement touché, c'est-à-dire celui qui est titulaire du bien juridique ou du droit protégé par la loi, contre lequel, par définition, se dirige l'infraction (ATF 119 Ia 342 consid. 2 p. 345 ; 119 IV 339 consid. 1d/aa p. 343). Pour être directement touché, le lésé doit en outre subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie, ce qui exclut les dommages par ricochet (arrêt du Tribunal fédéral 6B_655/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.1). Les personnes subissant un préjudice indirect n'ont donc pas le statut de lésé et sont des tiers n'ayant pas accès au statut de partie à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_191/2014 du 14 août 2014 consid. 3.1).

2.2.2. S'agissant en particulier d'infractions contre le patrimoine – telle que l'abus de confiance (art. 138 CP) ou encore l'escroquerie (art. 146 CP) – le propriétaire ou l'ayant droit des valeurs patrimoniales lésées est considéré comme la personne lésée (arrêts du Tribunal fédéral 1B_18/2018 du 19 avril 2018 consid. 2.1; 1B_191/2014 du 14 août 2014 consid. 3.1; 6B_361/2013 du 5 septembre 2013 consid. 1).

2.2.3. L'art. 251 CP (faux dans les titres) protège, en tant que bien juridique, d'une part, la confiance particulière placée dans un titre ayant valeur probante dans les rapports juridiques et, d'autre part, la loyauté dans les relations commerciales
(ATF 142 IV 119 consid. 2.2 p. 121ss et les références citées). Le faux dans les titres peut également porter atteinte à des intérêts individuels, en particulier lorsqu'il vise précisément à nuire à un particulier (ATF 140 IV 155 consid. 3.3.3 p. 159). Tel est le cas lorsque le faux est l'un des éléments d'une infraction contre le patrimoine, la personne dont le patrimoine est menacé ou atteint ayant alors la qualité de lésé (ATF 119 Ia 342 consid. 2b p. 346 ss; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1274/2018 du 22 janvier 2019 consid. 2.3.1 et les arrêts cités).

2.2.4. L'art. 305bis ch. 1 CP (blanchiment d'argent) protège, outre l'administration de la justice, les intérêts patrimoniaux des personnes lésées par une infraction préalable (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 14 ad art. 160 et n. 4 ad art. 305bis).

2.3.1. En l’espèce, le recourant dispose de la qualité pour recourir s'agissant de ses griefs en lien avec un éventuel acte d'escroquerie ou d'abus de confiance, commis par le mis en cause en personne ou par le biais de sociétés, dès lors qu'il paraît, prima facie, avoir été directement lésé par les faits dénoncés.

2.3.2. En revanche, en tant que ses griefs concernent des actes commis au préjudice de O______, de M______, respectivement des banques ouzbèkes ayant octroyé des prêts à ladite société, ou encore d'autres sociétés (U______ SA, V______ SA et W______ SA), le recourant n'a pas la qualité pour agir, n'étant pas titulaire du patrimoine de ces sociétés, éventuellement atteintes par les infractions dénoncées. Il en va de même de l'infraction commise au préjudice de son frère (art. 138 CP). Il pourrait tout au plus revêtir la qualité de dénonciateur (art. 105 al. 1 let. b CPP), lequel ne jouit toutefois d'aucun droit en procédure, à l'exception d'être informé de la suite donnée à sa dénonciation (art. 301 al. 2 et 3 CPP). Il n'a en particulier pas qualité pour recourir contre une ordonnance de classement (art. 301 al. 3 CPP). Enfin, le recourant semble se plaindre de blanchiment d'argent, sur des comptes bancaires en Suisse, de fonds détournés au préjudice de M______. Il n'apparait toutefois pas lésé par cette disposition qui protège, en premier lieu, l'administration de la justice, ni par l'infraction préalable qu'il dénonce, laquelle aurait été commise au préjudice de M______. Il ne dispose dès lors pas de la qualité pour recourir sur ce point non plus.

2.3.3. Le recourant se plaint encore du fait que B______ aurait produit, en août 2022, dans le cadre de la procédure de faillite de O______ en Russie, un faux document. Indépendamment de la question de la compétence des autorités suisses, le recourant n'a pas démontré avoir été atteint dans ses intérêts individuels par l'acte dénoncé.

2.3.4. Enfin, le recourant reproche, pour la première fois, à B______ d'avoir "manipulé" les comptes de D______ ou encore de l'éventuel "non-conformité" à la règlementation bancaire de ses comptes détenus auprès de banques suisses. Faute de décision préalable, la Chambre de céans ne saurait se pencher sur ces accusations.

Son recours doit par conséquent être déclaré irrecevable sur ces points.

3.             Le recourant se plaint d'une constatation incomplète des faits par le Ministère public (art. 393 al. 2 let. b CPP).

Comme la juridiction de céans dispose d'un plein pouvoir de cognition (art. 393 al. 2 CPP; arrêt du Tribunal fédéral 1B_139/2022 du 2 mai 2022 consid. 2.2), les éventuelles lacunes/inexactitudes entachant l’ordonnance querellée auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-avant.

Le grief sera donc rejeté.

4.             4.1. Aux termes de l'art. 319 al. 1 let. b CPP, le ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure notamment lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis.

4.2. La décision de classer la procédure doit être prise en application du principe "in dubio pro duriore", qui découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91). Ce principe vaut également pour l'autorité judiciaire chargée de l'examen d'une décision de classement. Il signifie qu'en règle générale, un classement ou une non-entrée en matière ne peut être prononcé par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243; arrêt du Tribunal fédéral 6B_116/2019 du 11 mars 2019 consid. 2.1).

4.3. Commet un abus de confiance au sens de l’art. 138 ch. 1 al. 2 CP, celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d’un tiers, des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.

Sur le plan objectif, l’infraction suppose qu’une valeur ait été confiée, autrement dit que l’auteur ait acquis la possibilité d’en disposer, mais que, conformément à un accord (exprès ou tacite) ou un autre rapport juridique, il ne puisse en faire qu’un usage déterminé, en d’autres termes, qu’il l’ait reçue à charge pour lui d’en disposer au gré d’un tiers, notamment de la conserver, de la gérer ou de la remettre (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_613/2016 et 6B_627/2016 du 1er décembre 2016 consid. 4 ; 6B_635/2015 du 9 février 2016 consid. 3.1). Le comportement délictueux consiste à utiliser la valeur patrimoniale contrairement aux instructions reçues, en s’écartant de la destination fixée (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_356/2016 du 6 mars 2017 consid. 2.1).

Suivant les circonstances, des valeurs patrimoniales remises dans le contexte d'un prêt sont susceptibles d'être qualifiées de valeurs patrimoniales confiées. Il faut toutefois définir de cas en cas si le contrat de prêt à la base de leur remise comporte un devoir, à charge du bénéficiaire, d'en conserver la contre-valeur. S'agissant d'un prêt, un tel devoir fera en règle générale défaut, puisque le débiteur n'est en principe tenu que de rembourser la somme prêtée. Des fonds prêtés ne représentent d'ailleurs qu'exceptionnellement des valeurs patrimoniales appartenant à autrui. L'appartenance à autrui des valeurs patrimoniales prêtées et le devoir d'en conserver la contre-valeur (Werterhaltungspglicht) ne seront retenues que lorsque leur affectation est clairement prédéfinie, et sert dans le même temps à assurer la couverture du prêteur ou, à tout le moins, à diminuer son risque de perte. L'utilisation de l'argent prêté contrairement à sa destination convenue peut dès lors être constitutive d'un abus de confiance lorsqu'elle remet en cause cet objectif et s'avère propre à causer un dommage au prêteur (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bale 2017, n. 35 ad. art. 138 CP).

4.4. L’art. 146 CP réprime le comportement de celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne et l’aura de la sorte déterminée à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers.

Pour qu’il y ait escroquerie, il ne suffit pas qu’il y ait tromperie, il faut encore que celle-ci soit astucieuse. L’astuce est réalisée lorsque l’auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu’il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n’est pas possible, ne l’est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l’auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu’elle renoncera à le faire en raison d’un rapport de confiance particulier (ATF 142 IV 153 consid. 2.2.2 ; 135 IV 76 consid. 5.2). L’astuce n’est en revanche pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d’attention ou d’éviter l’erreur avec le minimum de prudence que l’on pouvait attendre d’elle (ATF 135 IV 76 consid. 5.2).

4.5. Selon l’art. 164 ch.1 CP, se rend coupable de diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers, le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, et s'il a été déclaré en faillite ou si un acte de défaut de biens a été dressé contre lui, aura diminué son actif, en cédant des valeurs patrimoniales à titre gratuit ou contre une prestation de valeur manifestement inférieure.

L'art. 164 ch. 1 CP réprime un délit propre, qui ne peut être commis que par le débiteur. Lorsque cette qualité échoit à une personne morale, les personnes physiques qui en sont organes sont, en vertu de l'art. 29 CP, punissables en tant qu'auteurs, si elles ont agi en ces qualités pour cette dernière (ATF 131 IV 49 consid. 1.3.1 p. 53).

4.6. En l'espèce, le litige relatif aux prétentions salariales du recourant envers D______ relève manifestement de la justice prud'homale – dûment saisie – de sorte que le classement sur ce point est justifié.

4.7. S'agissant des prêts consentis par le recourant au mis en cause (directement ou à travers D______) ou encore de l'investissement d'EUR 226'000.-, il apparait que, à l'exception du prêt consenti en faveur de D______, aucun contrat n'a été conclu avec le mis en cause. Lors de son audition par le Ministère public, le recourant n'a pas critiqué l'utilisation faite des sommes prêtées, reprochant seulement au mis en cause de ne pas les avoir restituées. Il expose ne s'être enquis de la manière dont il allait être remboursé qu'à l'occasion du premier prêt. Ce n'était que durant l'été 2020 que le mis en cause avait promis d'utiliser le produit de la vente de l'immeuble détenu par F______ pour le rembourser.

Au vu de ce qui précède, l'on ne saurait retenir que l’argent aurait été utilisé contrairement à la destination voulue par les parties. Il n’existe donc pas de prévention d’abus de confiance, les éléments constitutifs de cette infraction n’étant, à l’évidence, pas réalisés. On ne voit pas quels actes d'instruction supplémentaires seraient à même d’établir, voire déjà de rendre vraisemblable, la réalisation de l'infraction; en effet, tout conflit quant à l'exécution ou non d'un contrat de prêt serait de nature civile et il n'appartient dès lors pas aux autorités pénales de le régler.

4.8. Le recourant reproche au mis en cause de l'avoir astucieusement trompé en lui transférant la moitié du capital-actions de I______ pour éteindre la dette
d'EUR 226'000.-, alors qu'il savait que celle-ci, qui détenait majoritairement M______, n'avait plus de valeur, puisqu'il avait détourné, avec son épouse et à leur profit, depuis 2018, les prêts accordés par les banques ouzbèkes à cette dernière.

Or, rien ne permet de retenir que ledit transfert aurait été organisé par le mis en cause dans le seul but de porter préjudice au recourant.

Tout d'abord, le recourant admet que la possibilité de procéder audit transfert pour éteindre ladite dette avait été évoquée, pour la première fois entre les parties en 2017, soit à une période durant laquelle la société ne rencontrait pas de problème particulier.

En outre, le transfert litigieux a eu lieu en mars 2019, sur demande du recourant – et non sur incitation du mis en cause –, qui explique avoir "exigé" le transfert "immédiat" des parts convenues. Au moment du transfert, le recourant, qui avait eu accès aux contrats de prêts, savait que la banque ouzbèke avait octroyé des prêts importants à M______, lesquels étaient notamment garantis par tous les biens de l'entreprise. Il savait aussi que les équipements achetés au moyen de ces prêts n'avaient pas encore été livrés, ainsi que le mis en cause le lui avait dit. Il savait enfin quelles seraient les conséquences d'un défaut de remboursement des mensualités, respectivement d'un défaut de livraison du matériel acheté, précisant avoir expressément attiré l'attention du mis en cause sur les pénalités importantes auxquelles la société serait exposée.

Au regard de ces éléments, l'existence d'une quelconque tromperie, qui plus est astucieuse, ne peut qu'être niée. L'audition de E______ n'apparait pas propre à modifier ce constat et aucun autre acte d'instruction ne permettrait d'arriver à une conclusion différente.

Les éléments constitutifs de l'art. 146 CP ne sont ainsi manifestement pas réunis.

4.9. Le recourant reproche encore au mis en cause une diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers pour avoir, en janvier 2020, cédé l'intégralité du
capital-actions de F______ à son épouse dans le but de ne pas rembourser ses dettes, dont celle qu'il avait à l'égard de D______.

En l'occurrence, à teneur du contrat du 31 octobre 2019, aucune garantie n'a été donnée par le mis en cause s'agissant du remboursement dudit prêt. Ce n'est que durant l'été 2020 que l'intéressé aurait promis au recourant de le rembourser au moyen du produit de la vente de l'immeuble, lequel était alors détenu par une société dont il n'était plus administrateur depuis quelques mois, ce dont le recourant avait connaissance. Or, dans la mesure où le recourant n'était pas créancier de F______, respectivement que ladite société n'était pas débitrice du recourant s'agissant de la dette litigieuse, il n'y a aucune place pour l'infraction dénoncée, étant rappelé qu'un administrateur, respectivement un actionnaire, ne répond pas personnellement des dettes contractées par la société.

5.             5.1. L'art. 306 CP réprime celui qui, étant partie dans un procès civil, aura donné sur les faits de la cause, après avoir été expressément invité par le juge à dire la vérité et rendu attentif aux suites pénales, une fausse déclaration constituant un moyen de preuve.

L'art. 307 al. 1 CP punit celui qui, étant témoin, expert, traducteur ou interprète en justice, aura fait une déposition fausse sur les faits de la cause, fourni un constat ou un rapport faux, ou fait une traduction fausse.

S'agissant de délits propres purs, ces infractions ne peuvent être commises que par des personnes possédant les qualités énoncées par la loi (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand du Code pénal II, 2e éd., Bâle 2017, n. 4 et 9 ad. art. 306 CP et n. 4 ad art. 307 CP).

Si l'art. 306 CP protège indirectement les intérêts privés des autres parties au litige, il tend en premier lieu à sauvegarder la justice dans la recherche de la vérité (arrêts du Tribunal fédéral 6B_794/2015 du 4 avril 2016 consid. 2.1. et 1B_489/2011 du 24 janvier 2012 consid. 2.2). Les intérêts privés des parties ne sont donc défendus que de manière indirecte (ATF 123 IV 184 consid. 1c; arrêt du Tribunal fédéral 1B_596/2011 du 30 mars 2012 consid. 1.5.2; S. TRECHSEL / M. PIETH (éd.), Schweizerisches Strafgesetzbuch : Praxiskommentar, 4e éd., Zurich 2021, n. 1 ad art. 307; A. DONATSCH / W. WOHLERS, Strafrecht IV, Delikte gegen die Allgemeinheit, Zurich, 2004, p. 423; U. CASSANI, Commentaire du droit pénal suisse, vol. 9, Berne, 1996, n. 1 ad art. 307). Il en résulte que les particuliers ne sont lésés que si leurs intérêts privés ont été effectivement touchés par les actes en cause, de sorte que leur dommage apparaît comme la conséquence directe de l'acte dénoncé, ce qu'ils doivent exposer (ATF 123 IV 184 consid. 1c; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung - Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2e éd., Bâle 2014, n. 81 ad art. 115).

5.2. Enfin, s'agissant des prétendues fausses déclarations faites par C______, dans le cadre de la procédure de faillite de D______, point n'est besoin d'examiner si le recours aurait été recevable sous cet angle, puisqu'il aurait été mal fondé. En effet, les conditions d'application des infractions précitées ne sont pas réunies, la mise en cause n'étant ni partie, ni témoin à la procédure mais représentante de son époux. En tout état, il ne ressort pas du procès-verbal produit qu'elle aurait été invitée à dire la vérité et rendue attentive aux poursuites pénales en cas de fausse déclaration.

6.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

7.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'200.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'200.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente, Monsieur Christian COQUOZ et Madame Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/20079/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'115.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

1'200.00