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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/604/2002

ATA/828/2005 du 06.12.2005 ( CE ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.02.2006, rendu le 13.06.2006, REJETE, 2P.49/06
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/604/2002-CE ATA/828/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 6 décembre 2005

dans la cause

 

 

 

Monsieur B__________
représenté par Me Pascal Junod, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

CONSEIL D’ÉTAT

 

 

 

et

 

 

 

ÉTAT DE GENEVE


 


EN FAIT

1. M. B__________, né en 1949, a été engagé le __________ 1988 en qualité d'huissier-remplaçant à l'office des poursuites et des faillites (ci-après : l’OPF), rattaché au département de justice et police, devenu le département de justice, police et sécurité (ci-après : le département), puis nouvellement le département des institutions.

2. Le 1er janvier 1991, il a été nommé huissier 2 OPF.

3. Par arrêté du 24 juin 1999, le département a autorisé M. B__________ à exercer la profession de crieur dans le canton de Genève, lors des ventes volontaires aux enchères publiques.

4. Le 20 août 2001, Blanc Consultants S.A. ainsi que Mes Claudio Mascotto et Denis Matthey, mandatés par la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil, ont remis leur rapport à celle-ci après avoir procédé à de nombreuses auditions de fonctionnaires auxquels le respect "de la clause de confidentialité" a été assuré.

5. Le 31 août 2001, l'inspection cantonale des finances (ci-après : l’ICF) a rendu un rapport (N° 01-22) relatif aux OPF et qui a donné lieu à l'affaire dite des OPF, de nombreuses irrégularités ayant été constatées à cette occasion.

6. Par arrêtés des 5 et 12 septembre 2001, le Conseil d'Etat a ouvert une enquête administrative à l'encontre de M. B__________, en application de l'article 27 alinéa 2 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et l'a confiée à un collège d'enquêteurs, présidé par M. Kempf, magistrat à la retraite. De plus, le Conseil d'Etat a ordonné la suspension provisoire de fonction de M. B__________, avec maintien de son traitement. Cette décision a été déclarée exécutoire nonobstant recours.

7. Le 20 septembre 2001, l'Autorité de Surveillance des OPF (ci-après : l'AS) a ouvert une enquête disciplinaire à l'encontre de M. B__________, qu'elle a entendu avant de suspendre - le 28 novembre 2001 - son enquête dans l'attente de l'issue de la procédure pénale ouverte à l'égard de l'intéressé notamment. En application de l'article 11 du code de procédure pénale genevois du 29 septembre 1977 (E 4 20), elle avait en effet dénoncé à Monsieur le Procureur général les agissements portés à sa connaissance.

8. Entre le 30 octobre 2001 et le 31 janvier 2002, la commission d'enquête administrative a entendu M. B__________ à trois reprises ainsi que divers témoins.

Le 22 février 2002, M. B__________ a déposé ses observations.

9. La commission d'enquête administrative a rendu son rapport le 20 mars 2002.

Elle a proposé au Conseil d'Etat de mettre fin aux rapports de service avec l'intéressé, avec effet immédiat, en application des articles 21 alinéa 2 lettre b) et 20 alinéa 4 LPAC et de déclarer sa décision exécutoire nonobstant recours, en raison des graves manquements constatés et sur lesquels il sera revenu ci-après.

Le 10 mai 2002, M. B__________ a déposé ses observations au sujet du rapport précité. En substance, il a contesté le nombre et la gravité des reproches qui lui étaient adressés. Certains de ses collègues avaient menti ; quant à ses supérieurs hiérarchiques, ils étaient au courant des pratiques prévalant depuis de nombreuses années au sein des OPF.

Il n'avait pas ménagé sa peine et son travail n'était pas reconnu.

Enfin, le dossier devait être complété.

10. Par arrêté du 29 mai 2002, le Conseil d'Etat a licencié M. B__________ avec effet immédiat, cette décision étant déclarée exécutoire nonobstant recours.

Il était reproché à M. B__________ d'avoir porté préjudice à l'intérêt de l'Etat ainsi qu'à la considération et à la confiance dont la fonction publique doit être l'objet en :

- organisant des ventes violant l'article 11 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1), en achetant et en vendant des objets personnels par le biais de la salle des ventes, en utilisant au besoin des prête-noms ;

- ayant des occupations étrangères au service pendant ses heures de travail ;

- laissant un auxiliaire de la salle des ventes procéder à des sous-estimations et en ayant favorisé d'autres intérêts que ceux des créanciers ou des débiteurs.

Ces comportements étaient contraires aux articles 20 et 21 lettres b et c du règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics du 24 février 1999 (RLPAC - B 5 05 01).

De plus, M. B__________ avait violé le devoir de remplir consciencieusement et avec diligence les devoirs de sa fonction en violation de l'article 22 alinéa 1 RLPAC.

Il avait reçu des cadeaux et autres avantages, contrevenant ainsi à l'interdiction d'accepter des dons prescrite par l'article 25B RLPAC.

Il avait adopté une attitude conflictuelle générale avec ses collègues et un comportement particulièrement inacceptable envers deux collaboratrices de l'OPF Rhône-Arve, manquant ainsi à son devoir d'entretenir des relations dignes et correctes avec ses collègues et de veiller à la protection de leur personnalité, comme les articles 21 lettre a et 23 lettre f RLPAC lui en faisaient l'obligation.

Le nombre, la nature et la gravité de ces manquements constituaient un motif objectivement fondé au sens des articles 21 alinéa 2 lettre b et 22 lettres b et c LPAC justifiant le licenciement, car le rapport de confiance était irrémédiablement rompu.

11. Par acte déposé au greffe du Tribunal administratif le 1er juillet 2002, M. B__________ a recouru contre cet arrêté en concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif, ainsi qu'à l'apport de nombreuses pièces, dont tous les dossiers des personnes ayant fait l'objet d'une enquête administrative dans le cadre de l'affaire dite des OPF, et enfin à l'ouverture d'enquêtes.

Principalement , il concluait à l'annulation de la décision entreprise. Le Tribunal administratif devait constater que la résiliation des rapports de service était contraire au droit, puis ordonner à l'autorité compétente de réintégrer M. B__________ au sein des OPF. Subsidiairement, M. B__________ devait être réintégré au sein d'un autre service de l'administration cantonale. En cas de refus de la réintégration, M. B__________ devait se voir allouer une indemnité équivalente à 24 mois de son dernier traitement brut.

12. Invité à se déterminer sur la demande de restitution d'effet suspensif, le Conseil d’Etat s'y est opposé.

13. Par décision du 5 juillet 2002, le Président du Tribunal administratif a rejeté la demande et imparti au Conseil d'Etat un délai pour se déterminer sur le fond.

14. Le 31 juillet 2002, le Conseil d’Etat, soit pour lui le département des finances, a conclu au rejet du recours.

15. Le 4 octobre 2002, M. B__________ a saisi le Tribunal administratif d'une action pécuniaire contre l'Etat de Genève (cause A/931/2002), auquel il réclamait le versement de CHF 7'554,35 avec intérêts à 5 % dès le 5 juin 2002, représentant la prime de fidélité qui aurait dû lui être versée en juin. Il n’avait en effet reçu que son salaire jusqu'au 7 juin 2002, y compris les heures supplémentaires et les vacances dues à cette date.

16. Le 31 octobre 2002, l'Etat de Genève a conclu au rejet de la demande. Le droit au salaire de M. B__________ s'était éteint dès le 8 juin 2002. La prime de fidélité était versée avec le traitement de fin juin et était due pour autant que le bénéficiaire soit en activité au moment du paiement (art. 13A al. 1 du règlement d'application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RaLT - B 5 15.01). De plus, la prime avait pour but de s'assurer la collaboration d'un personnel déjà expérimenté en l'encourageant à rester au service de l'administration. Il serait contradictoire de l'allouer à un fonctionnaire dont les rapports de service avaient été résiliés avec effet immédiat.

17. L’instruction du recours de M. B__________ contre son licenciement s’est poursuivie.

Le 19 décembre 2002, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle.

M. B__________ a contesté les griefs qui lui étaient adressés concernant son comportement avec Mmes Ba__________, M__________ et C__________. Celles-ci n'avaient jamais déposé contre lui une plainte pour mobbing et la médiatrice n'avait jamais été saisie.

Il reconnaissait certes avoir reproché son incompétence à Mme C__________ et avoir fait des remarques à celle-ci concernant la durée de ses pauses, de ses téléphones privés ainsi que ses arrivées tardives. Il admettait que Mme C__________ s'était plainte auprès de ses supérieurs de son comportement envers elle.

Il admettait avoir menacé Mme Ba__________ de la gifler. Il contestait avoir imité sa démarche de même que les accusations de celle-ci au sujet de sa consommation d'alcool.

Il avait également reproché à Mme M__________ la durée de ses pauses, de ses téléphones privés et de ses arrivées tardives.

Ces trois personnes s'étaient entendues pour l'accuser et il sollicitait une confrontation avec elles.

18. Le 30 janvier 2003, M. B__________ a été confronté à Mmes B__________ et M__________.

A sa requête, Mme C__________ a été entendue le 6 mars 2003, hors la présence de M. B__________, le conseil de celui-ci étant cependant autorisé à assister à l'audience.

19. La procédure a été suspendue dans l'attente de l'issue de la procédure pénale.

20. Le 23 avril 2004, l'office du personnel de l’Etat a informé le juge délégué que par décision du 10 mars 2004, l'assurance invalidité fédérale avait reconnu à M. B__________ un degré d'invalidité de 100 % et lui avait alloué une pension d'invalidité à 100 %, soit CHF 3'763.- par mois, indexations non comprises, avec effet rétroactif au 1er octobre 2002.

21. Le 6 décembre 2004, le juge d'instruction a inculpé M. B__________ pour faux dans les titres commis dans l'exercice de fonctions publiques au sens de l'article 317 chiffre 1 CPS, soit pour avoir dans la succession répudiée de M. H__________, acquis un véhicule pour le prix de CHF 3'500.- pour son propre compte, en recourant à un prête-nom, sachant qu'il n'avait pas le droit d'acheter des biens dans le cadre de son office, et en établissant pour ce faire de faux documents, soit un procès-verbal de vente de gré à gré et une quittance au nom d'un tiers non concerné.

Dans un courrier du 3 janvier 2005, le juge d'instruction a précisé au juge délégué qu'aucune charge suffisante d'autres infractions n'avait pu être établie contre M. B__________ de sorte que la procédure (P/9262/02) avait été communiquée au Parquet le 14 décembre 2004.

Par ordonnance du 21 mars 2005, un procureur a classé ce dossier, vu le faible montant de l'opération précitée, l'ancienneté des faits et l'encadrement et la formation insuffisants dans un office connaissant des dysfonctionnements.

22. Le juge délégué a convoqué une audience de comparution personnelle le 25 mai 2005.

a. A cette occasion, le recourant a produit une décision du 13 janvier 2005 prise par la Commission de surveillance des OPF (A/1331/2002) constatant que l'enquête disciplinaire, ouverte à juste titre par la précédente autorité de surveillance des OPF, était devenue sans objet, M. B__________ n'étant plus membre de la fonction publique puisqu'il avait été reconnu invalide à 100 % dès le 1er octobre 2002.

M. B__________ a déclaré que ses conclusions en réintégration n'était pas devenues sans objet car son invalidité était due uniquement à la dépression dont il avait souffert à la suite de l'affaire des OPF. Si son état de santé s'améliorait comme il l'espérait, rien ne l'empêcherait de retravailler.

Il souhaitait connaître les griefs que le Conseil d’Etat retenait encore à son encontre, compte tenu du développement des procédures précitées. De plus, il voulait savoir quelles mesures ou sanctions avaient été prises à l'encontre des autres fonctionnaires des OPF, dont certains étaient toujours en place (Mmes S__________ et C__________, MM. O__________, N__________, W__________, R_________, A__________, U_________), car il pensait être le seul à avoir été licencié.

Il savait en revanche que Mme D_________ avait été inculpée, que M. V_________, gestionnaire actuellement à la retraite, avait été condamné à la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis et son huissier, M. G________, à un mois de prison avec sursis. Quant à MM. I________ et Y________, ils étaient tous deux décédés, l'un étant à la retraite et l'autre à l'AI.

b. La représentante du Conseil d’Etat a indiqué qu'elle devait solliciter des instructions pour savoir si l'autorité intimée entendait se déterminer sur les points précités. Quant à l'action pécuniaire, qui ne portait que sur le versement de la prime de fidélité du mois de juin 2002, elle ne pouvait être tranchée avant qu'il ne soit statué sur le licenciement, ce dont M. B__________ a convenu.

23. Le 30 juin 2005, le Conseil d’Etat a maintenu tous les griefs qu'il avait adressés initialement au recourant tels qu'ils résultaient du rapport de l'ICF, de même que les griefs additionnels concernant l'achat d'objets, les occupations étrangères au service pendant les heures de travail et l'attitude inadéquate de l'intéressé vis-à-vis de ses collègues, confirmée par les enquêtes auxquelles le tribunal de céans avait procédé.

Le Conseil d’Etat a encore précisé que les personnes citées par M.B__________ avaient fait l'objet des mesures ou sanctions suivantes :

- Mme S__________, substitut : le Conseil d’Etat n'avait pas prononcé de sanction disciplinaire à son encontre, estimant que celle infligée par l'AS pour deux griefs constituait une mesure immédiate et suffisante ;

- M. O__________ : le Conseil d’Etat avait renoncé au prononcé d'un avertissement. L'intéressé était actuellement adjoint à la direction des OPF ;

- M. N__________ : licenciement avec effet immédiat par arrêté du 26 juin 2002, suivi en 2003, d'une décision de l'assurance invalidité avec effet rétroactif au 1er janvier 2002 ;

- M. W__________ : retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée de deux ans ; cette sanction a toutefois été annulée et remplacée par une suspension d'augmentation de traitement pendant 2 ans par ATA/290/2004 du 6 avril 2004, confirmé par ATF 2P.126/2004 du 28 janvier 2005 ;

Des recherches en vue d'affecter M. W__________ à d'autres fonctions dans l'administration cantonale étaient restées vaines à ce jour ;

- M. R_________ : pas de sanction disciplinaire, les soupçons de manquements aux devoirs de service s'étant révélés infondés. M. R_________ était en charge de certains dossiers de faillites ; il a été nommé à la fonction de directeur du service des autorisations et patentes courant 2005 ;

- M. A__________ : a fait l'objet d'un blâme en raison de 3 griefs. Des recherches en vue d'affecter l'intéressé à d'autres fonctions dans l'administration cantonale étaient restées vaines à ce jour ;

- M. F________: n'avait fait l'objet d'aucune enquête administrative ;

- Mme D_________ : a reçu un blâme ; elle exerçait de nouvelles fonctions dans un autre service de l'administration cantonale depuis le 1er août 2004 ;

- Mme C__________ : pas de sanction disciplinaire, les soupçons de manquements aux devoirs de service s'étant révélés infondés. Mme C__________ avait quitté les OPF et exerçait de nouvelles fonctions dans un autre service de l'administration cantonale depuis le 1er mars 2004.

24. M. B__________ a encore déposé des observations le 10 août 2005 en réitérant ses griefs sur les manquements soulignés par le Conseil d’Etat dans sa dernière écriture et sur la violation du principe d'égalité de traitement au vu du sort réservé aux autres fonctionnaires mentionnés ci-dessus, dont certains étaient juristes de formation et mieux à même que lui de connaître leurs obligations.

25. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

1. La recevabilité du présent recours a déjà été admise dans la décision présidentielle du 5 juillet 2002.

En application de l'article 70 alinéa 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985, le recours et l'action pécuniaire seront joints (A/604/2002 et A/931/2002 sous un seul numéro, soit A/604/2002) même si, de jurisprudence constante, la seconde est subsidiaire (ATA/314/2005 du 26 avril 2005) et ne peut être tranchée qu’après la première cause.

2. Selon l'article 3 de la loi d'application genevoise de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 16 mars 1912 (LaLP - E 3 60), les fonctionnaires des offices sont nommés par le Conseil d'Etat. Ils sont soumis, comme les autres membres du personnel des offices, aux dispositions légales et réglementaires applicables au personnel de l'Etat.

En ce qui concerne les rapports de service et les règles disciplinaires, les fonctionnaires des OPF - tel M. B__________ - sont donc soumis au droit cantonal, soit à la LPAC et au RLPAC.

3. Parallèlement, le personnel des OPF est soumis à l'autorité de surveillance, qui est chargée des tâches d'inspection et de contrôle des offices et qui peut prononcer les mesures disciplinaires prévues à l'article 14 LP, à l'exception de la suspension et de la destitution des fonctionnaires et employés, lesquels sont prononcées par le Conseil d'Etat.

Le rôle de ladite autorité de surveillance est resté le même mais cette fonction est, depuis le 1er décembre 2002, exercée par la commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites, instituée lors de la modification dès cette date de la LaLP.

4. Les devoirs du personnel sont énumérés aux articles 20 et suivants RLPAC. L'article 20 prévoit que les membres du personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l'Etat et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice. Par leur attitude, ils doivent justifier et renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (art. 21 litt c RLPAC). De plus, ils doivent entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; ils doivent enfin permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 21 litt a RLPAC).

Ils doivent remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (art. 22 al. 1 RLPAC), respecter leur horaire de travail (art. 22 al. 2 RLPAC) et s'abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (art. 22 al. 3 RLPAC).

Enfin, il leur est interdit de solliciter ou d'accepter pour eux-mêmes ou pour autrui, des dons ou d'autres avantages en raison de leur situation officielle (art. 25 RLPAC).

5. A teneur des articles 20 alinéa 4 et 21 alinéa 2 lettre b LPAC, le Conseil d'Etat peut, pour un motif objectivement fondé, mettre fin aux rapports de service du fonctionnaire avec effet immédiat.

Sont constitutifs d'un motif objectivement fondé au sens de l'article 22 lettres b et c LPAC, retenus par le Conseil d’Etat, le manquement grave ou répété aux devoirs de service et l'inaptitude à remplir les exigences du poste.

La notion de motif objectivement fondé implique, notamment, que le Conseil d’Etat ne peut prendre en considération que des faits qui, objectivement sont à même de fonder une appréciation (Mémorial des séances du Grand Conseil 1996 43/VI 6361 ; ATA/9/2004 du 6 janvier 2004).

6. En l'espèce, M. B__________ a été licencié avec effet immédiat par arrêté du 29 mai 2002.

Le tribunal de céans admettra que M. B__________ conserve un intérêt actuel au recours, au sens de l'article 60 lettre b LPA s'agissant de savoir si la résiliation des rapports de service est contraire au droit puisqu’il pourrait dans cette hypothèse, prétendre au versement de son salaire du 8 juin au 30 septembre 2002. Ses conclusions en réintégration doivent cependant être déclarées irrecevables puisque depuis le 1er octobre 2002, l'assurance invalidité lui a reconnu un taux d'invalidité de 100 %. M. B__________ n'allègue en effet pas qu'il aurait recouvré depuis cette date une capacité de travail.

Le déroulement de l'enquête administrative qui fonde la décision de licenciement est conforme aux exigences de l'article 27 LPAC et les droits formels du recourant ont été respectés.

7. La LPAC a une nouvelle teneur depuis le 1er mars 1998. La jurisprudence développée sous l'empire de l'ancienne loi reste toutefois applicable, avec cette réserve que le licenciement pouvait intervenir avec effet immédiat s'il était "fondé sur une raison particulièrement grave excluant la continuation des rapports de service" (art. 23 al. 3 aLPAC), tandis que l'actuel alinéa 4 de l'article 20 précité ne pose aucune condition particulière à un licenciement prononcé avec effet immédiat (ATA/74/2003 du 11 février 2003).

8. a. La résiliation des rapports de service pour justes motifs peut être considérée comme une notion autonome de droit public (ATA/381/1999 du 22 juin 1999). Son contenu est objectif, en ce sens que la décision de licenciement doit être fondée sur l'incompatibilité existant entre la personne de l'agent et ses tâches au sein du service (ATA/493/1999 du 31 août 1999).

b. Il résulte de la jurisprudence du Tribunal fédéral qu'une mesure de résiliation des rapports de service avec effet immédiat ne peut intervenir que dans des cas de violation grave des obligations du fonctionnaire (ATF K. non publié du 21 janvier 1988, consid. 3d cité in ATA L. du 12 septembre 1990). La doctrine a encore précisé que les circonstances doivent être telles qu'elles ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé qu'il poursuive l'exécution du contrat; ces circonstances doivent être appréciées selon les règles de la bonne foi visées à l'article 2 alinéa 2 du Code civil (ATA/175/2002 du 9 avril 2002 et les références citées).

c. L'appréciation des justes motifs de résiliation ne peut cependant se déterminer d'une manière générale ; la solution dépend au contraire des circonstances du cas particulier, notamment de la position et de la responsabilité du travailleur, de la nature et de la durée des relations contractuelles, ainsi que du genre et de la gravité du grief. Au surplus, il existe une relation particulière entre l'Etat et ses agents, fonctionnaires ou employés, qui suppose l'obéissance de ces derniers à un certain nombre de devoir généraux de la fonction (ATA/74/2003 précité). Dans ce dernier arrêt, le tribunal de céans a confirmé le licenciement avec effet immédiat d'un fonctionnaire travaillant comme conseiller à l'office cantonal de l'emploi et qui avait traité le dossier de chômage de sa compagne et de la fille de celle-ci, accordant à son amie une allocation d'initiation au travail par le biais d'une association à but non lucratif dont il était le responsable.

De même, a été confirmé le licenciement avec effet immédiat d'un fonctionnaire de police qui s'était rendu coupable d'entrave à l'action pénale et de violation du secret de fonction en contactant, par amitié, les parents d'une personne suspectée de trafic de stupéfiants, de telle façon que l'enquête de police et le démantèlement d'une filière de trafiquants ont été compromis (ACOM V. du 30 janvier 1996).

9. En l'espèce, le classement de la procédure pénale et la décision de la commission de surveillance des OPF, constatant que la procédure disciplinaire conduite par l'organe de surveillance n'avait plus d'objet, n'empêchent pas le tribunal de céans d'examiner la réalité des griefs retenus par l'Etat à l'encontre du recourant.

La procédure pénale a établi de manière certaine que M. B__________ avait acquis une voiture dans le cadre de la succession répudiée de M. H__________ dans les circonstances sus-décrites ; le fait même qu'il ait agi sous le couvert d'un prête-nom, soit celui de Mme V__________, et qu'il ait établi de faux documents, démontrent qu'il savait qu'il n'avait pas le droit d'acquérir un bien dans le cadre de son office.

Ces faits sont non seulement avérés mais reconnus. Peu importe que le bénéfice final de cette opération ait été modeste.

De plus, l'enquête diligentée par la commission d'enquête administrative, dite commission Kempf, ainsi que les enquêtes menées par le tribunal de céans ont démontré que le comportement adopté par le recourant à l'encontre de Mmes M__________, Ba__________ et C__________ était inadéquat, contrevenant ainsi à l'article 21 lettres a et b RLPAC. Même si aucune plainte pour mobbing n'a été déposée par ces personnes contre M. B__________, il est avéré - quelles que soient les circonstances dans lesquelles ces faits se sont produits - que le recourant a menacé Mme Ba__________ de la gifler et que Mme C__________ s'était plainte à plusieurs reprises de M. B__________ auprès de la direction. Enfin, M. B__________ reprochait à Mme M__________ la durée de ses temps de pause et de ses téléphones privés.

Or, dans une jurisprudence déjà ancienne, confirmée cependant par le Tribunal fédéral (ATA G. du 11 avril 1995, confirmé par ATF 2P.205/1995 du 12 juin 1996), le licenciement d'une infirmière a été confirmé alors que ses compétences techniques étaient reconnues mais qu'elle entretenait des relations difficiles, voire conflictuelles, tant avec ses collègues qu'avec des patients. Plus récemment, ce grief a été admis comme constituant l'un des motifs justifiant le licenciement d'un fonctionnaire municipal (ATA/397/2005 du 31 mai 2005).

Ces deux griefs suffisent à justifier la résiliation avec effet immédiat des rapports de service, la relation de confiance étant irrémédiablement rompue. Le licenciement n'est ainsi pas contraire au droit. Il n'est ainsi pas nécessaire d'examiner les autres allégués, ayant notamment trait aux horaires du recourant ou à son éventuelle consommation exagérée d'alcool.

10. A la décharge du recourant, le tribunal de céans relèvera que les OPF devaient faire face à un volume de travail supérieur à la normale pendant ces années alors que les moyens mis à leur disposition étaient insuffisants (ATA/290/2004 du 6 avril 2004). Le scandale dit des OPF et les enquêtes conduites dans ce cadre ont mis en exergue des dysfonctionnements certains mais le recourant ne peut se réfugier derrière des pratiques généralisées pour minimiser ses agissements, au même titre qu'une fonctionnaire des HUG licenciée ayant commis un vol n'a pu invoquer une pratique généralisée de "coulage" pour excuser son comportement (ATA/53/2005 du 1er févier 2005).

11. Reste à examiner si le licenciement de M. B__________ contrevient au principe d'égalité de traitement, au vu du sort réservé par l'intimé aux autres fonctionnaires précités.

Une décision ou un arrêté viole le principe de l'égalité de traitement garanti par l’article 8 Cst (4 aCst) lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 118 Ia 1 consid. 3 p. 2-3 et arrêts cités).

M. B__________ n'a pas démontré que les fonctionnaires précités se seraient trouvés dans la même situation que lui. Il est en particulier le seul - à teneur du dossier en mains du tribunal - à s'être vu reprocher son comportement envers ses collègues. De plus, il n'avait pas les mêmes fonctions que les préposés ou les substituts.

Seul M. N__________, préposé, avait été licencié avec effet immédiat par arrêté du 26 juin 2002 mais le recours qu'il avait déposé a été déclaré irrecevable, l'intéressé ayant été reconnu invalide à 100 % avec effet au 1er janvier 2002 (ATA/787/2003 du 28 octobre 2003).

Mme S__________ a été sanctionnée par l'autorité de surveillance uniquement tandis que Mme D_________ ainsi que MM. A__________ et W__________ ont été sanctionnés par l'intimé.

MM. O__________, R_________ et Mme C__________ n'ont pas été sanctionnés, ayant été "blanchis". Il n'est dès lors pas choquant qu'ils aient depuis lors été promus à d'autres fonctions.

Il est vrai que M. F________ n'a pas fait l'objet d'une enquête administrative et que deux personnes (MM. W__________ et A__________), pourtant sanctionnées, sont toujours membres de l'administration cantonale mais sans affectation. Leur cas diffère cependant de celui du recourant, qui ne pourrait pas être réintégré du fait de son invalidité qui perdure.

Les situations de M. B__________ et des autres personnes citées ci-dessus ne sont donc pas comparables et le grief de violation d'égalité de traitement doit être rejeté.

12. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

13. Quant à l'action pécuniaire, elle sera rejetée également. Elle ne porte que sur la prime de fidélité réclamée par l'intéressé et qui aurait dû lui être versée à fin juin 2002, selon l'article 16 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LT - B 5 15). Or, ladite prime est due pour autant que le bénéficiaire soit en activité au moment du paiement (art. 13A al. 1 RaLT), comme l'a indiqué à juste titre l'autorité intimée dans son mémoire de réponse, ce qui n’était pas le cas du recourant, licencié dès le 7 juin 2002.

14. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de M. B__________. Il ne lui sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

préalablement :

joint les causes A/604/2002 et A/931/2002 sous n° A/604/2002 ;

au fond :

rejette le recours interjeté le 1er juillet 2002 par Monsieur B__________ contre la décision du Conseil d’Etat du 29 mai 2002 ;

rejette l’action pécuniaire ;

met à la charge de M. B__________ un émolument de CHF 1’000.- ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

communique le présent arrêt à Me Pascal Junod, avocat du recourant, au Conseil d’Etat ainsi qu’à l’Etat de Genève.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :