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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1556/2018

ATA/614/2018 du 18.06.2018 ( EXPLOI ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1556/2018-EXPLOI ATA/614/2018

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 18 juin 2018

sur effet suspensif et mesures provisionnelles


dans la cause

 

A______ SÀRL
représentée par Me Yann Lam, avocat

contre


OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL



Vu le recours interjeté le 8 mai 2018 par A______ Sàrl – qui exploite notamment un restaurant dans le canton de Genève, dont elle est aussi propriétaire – contre la décision de l’office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT ou office) du 28 mars 2018, prononçant notamment un refus, déclaré exécutoire nonobstant recours, de lui délivrer l’attestation visée par l’art. 25 de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 (LIRT - J 1 05) pour une durée de deux ans, en application de l’art. 45 al. 1 let. a LIRT, à compter de la notification de la décision ;

vu les demandes de restitution de l'effet suspensif et de retrait de la liste des entreprises ayant été sanctionnées par l’office, accompagnant le recours ;

vu les observations sur effet suspensif de l’OCIRT du 25 mai 2018, concluant au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif ainsi que de la demande d’octroi de mesures provisionnelles consistant à retirer A______ Sàrl de la liste des entreprises ayant été sanctionnées par l’office ;

vu le mémoire de réponse de l’OCIRT du 8 juin 2018 ;

vu les art. 21 et 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ;

vu l’art. 9 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 26 septembre 2017 ;

attendu qu’aux termes de l’art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l’art. 21 al 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2) ;

qu’elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405) ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités) ;

que la chambre de céans dispose dans l’octroi de mesures provisionnelles d'un large pouvoir d'appréciation (ibidem) ;

que la décision attaquée repose principalement sur l’application de l’art. 45 al. 1 let. a LIRT, en vertu duquel, lorsqu'une entreprise visée par l'art. 25 LIRT ne respecte pas les conditions minimales de travail et de prestations sociales en usage, l'office peut prononcer une décision de refus de délivrance de l'attestation visée audit art. 25 pour une durée de trois mois à cinq ans, la décision étant immédiatement exécutoire ;

que la recourante n’a pas contesté être soumise au respect des usages, en vertu d'une disposition légale, réglementaire ou conventionnelle, conformément à l’art. 25 al. 1 LIRT ;

qu’elle a admis certaines des infractions aux Usages Hôtels, restaurants et cafés (ci-après : UHCR 2014), entrés en vigueur le 1er janvier 2014 et modifiés en janvier 2017, que l’OCIRT lui a reprochées par sa lettre du 19 janvier 2018 et sa décision querellée ;

qu’elle invoque dans son recours, au fond, outre une inégalité de traitement en raison de l’absence d’avertissement préalable ainsi qu’une violation du principe de la proportionnalité, une violation de l’art. 42A du règlement d'application de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 23 février 2005 (RIRT - J 1 05.01), aux termes duquel, en cas d'infractions aux usages ou de refus de renseigner au sens de l’art. 42 al. 4 du règlement d'application de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 23 février 2005 (RIRT - J 1 05.01), l'office notifie à l'entreprise un avertissement et lui accorde un délai pour se mettre en conformité (al. 1) et, si le contrevenant ne donne pas suite dans les délais, l’office prononce les sanctions prévues à l'art. 45 al. 1 LIRT (al. 2 1ère phr.) ;

que ces griefs ne pourront être examinés et tranchés que dans l’arrêt au fond ;

qu’au demeurant, la décision querellée ne peut pas être d’emblée considérée comme manifestement infondée ;

qu’à l’appui de sa demande de restitution de l’effet suspensif, la recourante invoque la menace d’un dommage difficile à réparer, en raison de l’art. 13 al. 1 let. b de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22) qui prévoit que l’autorisation d’exploiter est caduque lorsque l’office prononce la décision prévue à l’art. 45 al. 1 LIRT et à condition que celle-ci soit en force ;

qu’elle se plaint en outre de la publicité négative de la publication de sa raison sociale dans la liste des entreprises faisant l’objet d’une décision exécutoire et accessible au public, selon l’art. 45 al. 3 LIRT ;

que cela étant, lorsque l’autorité intimée a déclaré exécutoire nonobstant recours le refus de délivrer pendant deux ans l’attestation de conformité aux usages à la recourante, elle n’a fait qu’appliquer la loi, laquelle ne lui accorde aucune latitude lorsqu’elle opte pour une telle sanction (ATA/439/2016 du 26 mai 2016 consid. 11b) ;

qu’une restitution de l’effet suspensif concernant la mesure prévue par l’art. 45 al. 1 let. a LIRT reviendrait à accorder à titre provisoire ce que la société obtiendrait le cas échéant sur le fond, avant même d’avoir instruit de manière complète la procédure, un tel procédé étant proscrit par la jurisprudence (ATA/335/2017 du 22 mars 2017 consid. 9 ; ATA/658/2016 du 28 juillet 2016 consid. 3 ; ATA/439/2016 précité consid. 11b) ;

que, sur la base des pièces figurant au dossier, la décision attaquée ne paraît prima facie pas arbitraire, la recourante ne le prétendant du reste pas, de sorte que la chambre administrative ne restituera pas l’effet suspensif au recours concernant cet aspect, sans qu’il y ait besoin de procéder à une pesée des intérêts (ATA/306/2018 du 4 avril 2018 consid. 9 ; ATA/658/2016 précité consid. 3 ; ATA/439/2016 précité consid. 11b) ;

que par ailleurs, sur la base d’un examen sommaire du cas, on ne voit en l’état pas en quoi la recourante, comme elle le prétend dans son recours, se serait mise en conformité par rapport aux infractions aux usages reprochées par l’OCIRT, cette question devant au demeurant faire l’objet d’un examen au fond, non sur mesures provisionnelles (ATA/439/2016 précité consid. 11c) ;

que, comme indiqué en bas du formulaire qu’elle a signé le 12 mars 2018, son « engagement à respecter les usages » « ne vaut, en aucun cas, attestation du respect des usages » ;

qu’enfin et par surabondance, sous l’angle de la proportionnalité, la décision querellée n’étant, vu le recours devant la chambre de céans, pas entrée en force, l’absence de restitution de l’effet suspensif ne pourrait pas entraîner la caducité de son autorisation d’exploiter selon l’art. 13 al. 1 let. b LRDBHD, seule un arrêt au fond ayant une telle conséquence ;

qu’en outre, l’inscription de la société dans la liste des entreprises faisant l’objet d’une décision exécutoire au sens de l’art. 45 al. 3 LIRT n’exclut en tout état de cause pas la poursuite de l’exploitation de son restaurant ;

que du reste, l’effet suspensif ne pouvant pas être restitué pour ce qui est de l’art. 45 al. 1 let. a LIRT, il ne peut pas être, pour les mêmes motifs, donné droit sur mesures provisionnelles à la conclusion de la recourante tendant au retrait de son inscription sur la liste établie par l’OCIRT sur la base de l’art. 45 al. 3 LIRT, l’inscription sur ladite liste étant une conséquence, en principe automatique, d’une infraction au sens de l’art. 26A LIRT ainsi que des mesures prévues à l’art. 45 al. 1 LIRT (ATA/306/2018 précité consid. 11 ; ATA/658/2016 précité consid. 3) ;

que, vu ce qui précède, la restitution de l’effet suspensif et/ou des mesures provisionnelles au recours seront refusées, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu’à droit jugé au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours de A______ Sàrl et/ou d’ordonner des mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Yann Lam, avocat de la recourante, ainsi qu'à l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail.

 

 

 

La vice-présidente :

 

 

Ch. Junod

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :