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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3108/2016

ATA/53/2017 du 24.01.2017 ( FORMA ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3108/2016-FORMA ATA/53/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 janvier 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT



EN FAIT

1. Madame A______, née le ______ 1996, a entrepris en août 2012 une formation gymnasiale au Collège Madame-de-Staël, après une 11ème année en regroupement A au cycle d'orientation de Drize.

2. Durant l'année scolaire 2015-2016, l'intéressée a effectué sa quatrième année gymnasiale, à l’issue de laquelle est décerné le certificat de maturité gymnasiale.

3. Au terme du premier semestre, en janvier 2016, la recourante a satisfait aux normes de promotion, avec une moyenne générale de 4.5, une seule discipline insuffisante. Avec une moyenne de 3.4, les mathématiques étaient la branche inférieure à la moyenne.

4. Durant la session d'examens de maturité de juin 2016, Mme A______ a obtenu la note 3.0 à l'examen écrit de mathématiques.

5. Le 10 juin 2016, elle a obtenu la note 2.5 à son examen oral de mathématiques.

La recourante a été interrogée par Madame B______, la professeure chargée de l'enseignement de ladite branche, assistée d'un juré. L'examen comprenait une partie théorique sur le théorème de Fermat, ainsi qu'une partie pratique, soit la résolution d'un cas pratique sur la loi binomiale.

6. Mme A______ a obtenu son diplôme de maturité gymnasiale, avec une moyenne générale de 4.6. Selon le procès-verbal du 25 juin 2016, qui récapitulait les notes obtenues aux examens de maturité, ainsi que les moyennes générales de l'année, elle avait une moyenne générale en mathématiques insuffisante, s'élevant à 3.0 suite aux examens de maturité.

7. La moyenne générale de l'intéressée de l'année scolaire en mathématiques était déjà insuffisante avant les examens de maturité et s'élevait à 3.5.

8. Le 27 juin 2016, Mme A______ a demandé des explications à la direction du Collège Madame-de-Staël concernant sa note à l'oral de mathématiques et à consulter le procès-verbal dudit examen. Selon la recourante, la direction de son établissement lui a répondu qu'il fallait qu'elle fasse recours auprès de la direction de l'enseignement secondaire II du département de l'instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DGES II), la direction de l’établissement n'étant pas compétente pour les recours des étudiants. Mme A______ a toutefois pu, auprès de celle-ci, comparer ses prises de note avec les acétates de son examen oral.

9. Le 14 juillet 2016, Mme A______ a interjeté un recours auprès de la DGES II contre la note qui lui avait été attribuée suite à son examen oral de mathématiques du 10 juin 2016.

Celle-ci était arbitraire, tout comme le déroulement de l'examen dont elle résultait. Ayant obtenu sa maturité gymnasiale, elle craignait que cette note, inférieure à la moyenne, lui ferme l'accès à certaines universités étrangères.

Elle appuyait ses critiques sur un compte rendu qu’elle avait elle-même établi en vue de rapporter les conditions qu'elle tenait pour injustes, dans lesquelles l’examen oral s’était déroulé.

10. Le 16 août 2016, la DGES II a rejeté le recours de Mme A______.

La recourante avait obtenu sa maturité à la session de juin 2016, malgré une note insuffisante en mathématiques. Le déroulement de l'examen n'était pas arbitraire, à teneur des procès-verbaux en résultant. Par ailleurs, le simple sentiment d'avoir réussi un examen et la rédaction suite à celui-ci d'un compte rendu, ne permettaient pas de démontrer que la notation était arbitraire, ce d'autant plus que la note était décidée de concertation entre le juré et l'enseignante titulaire.

11. Le 16 septembre 2016, Mme A______ a interjeté un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de la DGES II du l6 août 2016 précitée, concluant à son annulation, ainsi qu'à la réévaluation de sa note de mathématiques.

Elle reprenait les arguments mentionnés au stade du recours devant la DGES II, en insistant sur le fait qu'elle ne s'était pas sentie écoutée par les diverses autorités, et ressentait un fort sentiment d'injustice. Sa moyenne insuffisante en mathématiques, même si elle avait obtenu sa maturité gymnasiale, "obérait ses chances d'accéder à des universités à l'étranger".

12. Le 20 octobre 2016, la DGES II a répondu au recours, concluant à son rejet et reprenant les arguments déjà mentionnés dans le courrier du 16 août 2016.

La note attribuée à l'examen oral de mathématiques de maturité n'était pas arbitraire, comme le démontrait l'analyse des remarques prises durant l'examen par Mme B______ et par le juré. L'examen oral avait été jugé insuffisant sur la base de critères objectifs, applicables à tous les élèves dans cette filière de formation. Par ailleurs, la recourante cumulait des lacunes importantes en mathématiques, comme le démontrait l'analyse de ses résultats dans cette branche sur plusieurs semestres. Rien ne permettait de conclure à l'arbitraire pour la note insuffisante obtenue suite à l'examen oral précité. Les causes de cet échec relatif étaient à chercher ailleurs.

13. Le 18 novembre 2016, la recourante a complété sa position, reprenant pour l'essentiel ses précédents arguments et insistant sur le fait que si elle cumulait certaines lacunes en mathématiques, comme la DGES II l'avait fait remarquer, il était tout à fait possible d'obtenir de bonnes notes à des oraux de mathématiques, une grande partie de la note concernant l'apprentissage de théorèmes « par cœur ». Elle soulevait l'existence d'une inimitié particulière entre Mme B______ et elle-même, au point qu'elle avait souhaité changer de classe pour sa quatrième année de collège, ce qui n'avait pas été possible pour des raisons d'effectifs et de logistique. Elle expliquait également que si sa professeure titulaire était accompagnée d'un juré, celui-ci n'avait pas pu poser de questions durant l'examen, ce qui remettait en cause l'impartialité de la notation de sa présentation orale.

14. Les parties ont été informées par le juge délégué que la cause était gardée à juger le 1er décembre 2016.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 40 du règlement de l’enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 - REST - C 1 10.31).

La qualité pour recourir de Mme A______ mérite examen, dans la mesure où elle entend contester une note obtenue dans le cadre d’une session d’examen conduisant à l’obtention d’un diplôme qu’elle a en définitive obtenu.

2. La chambre de céans examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/918/2016 du 1er novembre 2016 ; ATA/343/2012 du 5 juin 2012 ; ATA/68/2012 du 31 janvier 2012 ; ATA/191/2011 du 22 mars 2011 ; ATA/396/2010 du 8 juin 2010 ; ATA/277/2010 du 27 avril 2010).

3. Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b).

La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/374/2016 du 3 mai 2016 ; ATA/98/2012 du 21 février 2012 ; ATA/5/2009 du 13 janvier 2009, et les références citées).

4. Pour disposer d'un intérêt digne de protection, le recourant doit disposer d'un intérêt actuel et pratique à l’admission du recours (ATF 135 I 79 consid. 1 ; 134 II 120 consid. 2 ; ATA/867/2010 du 7 décembre 2010 consid 1 ; ATA/365/2009 du 28 juillet 2009 consid. 3b ; ATA/207/2009 du 28 avril 2009 consid. 3 et les références citées).

5. Selon la jurisprudence applicable au recours de droit administratif, dont il n'y a pas lieu de s'écarter (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.3.1), l'intérêt digne de protection consiste dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que le recourant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grande que la généralité des administrés. L'intérêt invoqué - qui n'est pas nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais peut être un intérêt de fait - doit se trouver, avec l'objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF 133 II 468 consid. 1 ; ATF 130 V 196 consid. 3 ; ATF 128 V 34 consid. 1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_837/2013 du 11 avril 2013 consid. 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_244/2011 du 31 août 2011 consid 3.2 ; ATA/374/2016 précité ; ATA/188/2011 du 22 mars 2011 ; ATA/146/2009 du 24 mars 2009).

L'intérêt pratique est donné quand le recourant peut démontrer que sa situation factuelle et/ou juridique peut être avantageusement influencée par l'issue du recours. En d'autres termes, l'admission du recours doit procurer un avantage ou éviter un désavantage au recourant, si et dans la mesure où l'autorité de recours lui adjuge l'un au moins de ses chefs de conclusion. Cette exigence s'apprécie à la lumière de celles-ci, formulées dans son recours. La condition de l'intérêt digne de protection concerne ainsi l'effet du recours sur la situation du recourant en cas d'admission. (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2082-2084 pp. 733,734).

En matière de formation et de contestation de résultats d’examens, la chambre administrative a jugé irrecevable par défaut d’intérêt pratique un recours interjeté par une étudiante de l’université qui contestait des notes, pourtant bien supérieures à la moyenne, attribuées pour la rédaction et la soutenance de sa thèse de doctorat. L’intérêt au recours invoqué, soit le risque que ces notes (5 et 5.5) entravent son avenir académique en Chine ou aux États-Unis restait du domaine de l’hypothèse, sans que l’existence d’un préjudice concret soit établie (ATA/130/2016 du 9 février 2016 consid. 2c).

6. Un intérêt digne de protection suppose également un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 135 I 79 consid. 1 ; 128 II 34 consid. 1b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_133/2009 du 4 juin 2009 consid. 3 ; Hansjörg SEILER, Handkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], 2007, n. 33 ad art. 89 LTF p. 365 ; Karl SPUHLER/Annette DOLGE/Dominik VOCK, Kurzkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Zurich/St-Gall 2006, n. 5 ad art. 89 LTF p. 167). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s’il s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 ; 118 Ib 1 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2 ; ATA/230/2016 du 15 mars 2016) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3 ; ATA/1085/2016 du 20 décembre 2016 ).

7. En l'espèce, par son recours du 15 septembre 2016, la recourante remet en question la note 2.5 obtenue suite à l'examen oral de mathématiques. Certes cette note est inférieure à la note 4 considérée comme la note minimale suffisante (art. 27 al. 2 REST) et la moyenne qu’elle a obtenue en mathématiques à l'issue des examens de maturité est inférieure à la moyenne minimale requise pour être considérée comme suffisante pour l’obtention de la maturité (art. 25 al. 2 let. b du règlement relatif à la formation gymnasiale au Collège de Genève du 14 octobre 1998 - RGymCG C 1 10.71 en vigueur jusqu’au 29 août 2016). Néanmoins, la recourante a pu obtenir sa maturité, en dépit de cette insuffisance, conformément aux critères de promotion de l’art. 25 aRGymCG. Dès lors, dans cette mesure, l'intéressée n’a plus aucun intérêt pratique à obtenir l’annulation de la décision de non-entrée en matière concernant sa note d'examen, et, partant, plus d’intérêt à l’admission de son recours.

8. La recourante considère bénéficier d’un intérêt à recourir parce que la note qu’elle conteste serait la cause de la moyenne insuffisante qu’elle a obtenue dans la branche considérée et que cette note très basse obèrerait ses chances d'accéder à plusieurs universités étrangères. Elle invoque cependant cet argument in abstracto, sans apporter d’éléments démontrant qu’elle se trouverait concrètement dans une telle situation désavantageuse. Dans ces circonstances, en l’absence d’intérêt pratique particulier à l'admission du recours, aucun intérêt digne de protection à recourir ne peut lui être reconnu. Au demeurant, la note de maturité pour la branche des mathématiques constitue une moyenne combinant plusieurs notes acquises durant l'année scolaire avec celles des deux examens (écrit et oral) de maturité. À teneur du procès-verbal du 25 juin 2016, la moyenne en mathématiques de Mme A______ avant l'examen oral de mathématiques était de 3.5, soit déjà insuffisante. Rien ne permet par conséquent de conclure que la note 2.5 constitue à elle seule la cause de la moyenne insuffisante susmentionnée.

9. Au vu de ce qui précède et dans le prolongement de la jurisprudence de la chambre administrative (ATA/130/2016 précité), le recours sera déclaré irrecevable, vu l’absence de qualité pour recourir.

10. Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art.  87  al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 16 septembre 2016 par Madame A______ contre la décision du 16 août 2016 du département de l'instruction publique, de la culture et du sport ;

met à la charge de Mme A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :