Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/4075/2008

ATA/224/2009 du 05.05.2009 ( FIN ) , REJETE

Descripteurs : ; SOUSTRACTION D'IMPÔT ; FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : AIFD.129
Résumé : Cas de soustraction d'impôt confirmé dès lors que le contribuable n'avait pas déclaré des éléments de fortune et de revenu y relatifs. Dans cette affaire l'AFC-GE s'était entièrement basée sur les enquêtes effectuées par l'AFC-VD, ce qui était admissible, dans ce cas précis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4075/2008-FIN ATA/224/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 5 mai 2009

 

 

dans la cause

 

Monsieur C______
représenté par Me Antoine Kohler, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FEDERALE DES CONTRIBUTIONS

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE


 


EN FAIT

1. Le litige porte sur l'impôt fédéral direct pour la période 1989-1990.

2. A l'époque des faits, D______ (Suisse) S.A. (ci-après : D______ Suisse), de siège à Genève, était détenue à 100 % par D______ (Holding) S.A. (ci-après : D______ Holding) qui avait également son siège à Genève. Cette dernière, qui avait un capital-actions de CHF 500'000.- divisé en 50 actions au porteur, était détenue à 75 %, soit l'équivalent de 38 actions, par Monsieur C______ (ci-après : le contribuable ou le recourant) et à 25 % par D______ International Anstalt (ci-après : D______ International), établissement sis à Vaduz. Le contribuable était le président du conseil d'administration de D______ Suisse, société spécialisée dans le nettoyage professionnel et industriel, et le directeur de D______ Holding. Son père, A______, était le fondateur de D______ France S.A., société dont ce dernier avait vendu les actions dans les années septante à D______ International, laquelle en avait fait l'apport à D______ Holding lors de sa création en 1982. A______ avait cédé la gestion des affaires à son fils depuis qu'il n'était plus en mesure de les mener, soit depuis 1979.

3. Le contribuable s'est établi à Genève, en 1983. Puis il a élu domicile dans le canton de Vaud à la fin 1990.

4. a. Dans sa déclaration fiscale ICC 1988, valable pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 1989-1990, le contribuable a mentionné un revenu net total de CHF 375'490,15 et une fortune nette totale de CHF 554'861.- .

b. Dans sa déclaration fiscale ICC 1989, valable pour l'IFD 1989-1990, le contribuable a mentionné un revenu net total de CHF 347'740.- et une fortune nette totale de CHF 455'967.-.

c. Dans sa déclaration fiscale ICC 1990, valable pour l'IFD 1991-1992, le contribuable a indiqué un revenu net total de CHF 359'918.- et une fortune nette totale de CHF 443'910.-.

5. Par pli recommandé du 28 novembre 1995, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a informé le contribuable de l'ouverture d'une procédure en soustraction d'impôt prévue à l'art. 132 de l'arrêté du Conseil fédéral sur la perception d'un impôt fédéral direct du 9 décembre 1940 (AIFD) portant sur la période fiscale 1989-1990.

L'AFC-GE avait constaté que les éléments déclarés dans le canton de Vaud pour la période de taxation 1991-1992 faisaient apparaître une créance de CHF 3'000'000.- contre D______ Holding (rendement de CHF 210'000.- pour 1989 et CHF 210'000.- pour 1990) ainsi qu'une créance de CHF 3'000'000.- également contre D______ International (rendement de CHF 150'000.- en 1989 et 1990). La fortune imposable au 1er janvier 1991 s'élevait à CHF 7'260'000.-, alors qu’au 31 décembre 1990, la déclaration fiscale ICC du contribuable au 31 décembre 1989, montrait seulement une fortune nette de CHF 337'706.-. Les revenus déclarés dans les années de calcul 1989 et 1990 (déclaration vaudoise) ne pouvaient pas expliquer l'augmentation intervenue entre le 31 décembre 1989 et le 1er janvier 1991.

L'AFC-GE demandait au contribuable qu'il lui fournisse toute une série de documents liés aux sociétés D______ Holding et D______ International.

6. Par plusieurs courriers successifs, le contribuable a expliqué les raisons de l'augmentation de fortune intervenue entre le 31 décembre 1989 et le 1er janvier 1991.

Cette augmentation était due à ce qu'il avait touché dans le cadre de la succession de son père décédé en 1986. A______ avait remis, de son vivant, un patrimoine en fidéicommis à Monsieur M______, son ami et homme de confiance, avec instruction de transmettre, quatre ans après son décès, les biens suivants à son fils :

CHF 4'000'000.- en espèces ;

38 actions de D______ Holding ;

CHF 3'000'000.- sous forme d'une créance contre D______ Holding.

Ces biens devaient être remis au contribuable par D______ International. Comme preuve, le contribuable a produit une lettre signée par M. M______, datée du 2 septembre 1990, et rédigée par la fiduciaire X______, organe de contrôle de D______ Holding. Ce même M. M______, domicilié à Monte-Carlo, contrôlait D______ International, dont il était le bénéficiaire.

7. Le 12 décembre 1996, l'AFC-GE a informé le contribuable qu'elle clôturait la procédure en soustraction d'impôts ouverte le 28 novembre 1995. Elle a notifié en conséquence un bordereau "rappel d'impôt" d'un montant de CHF 72'863,70, ainsi qu'un bordereau amende, pour soustraction d'impôt consommée, d'un montant de CHF 18'216.-.

8. Le 3 janvier 1997, le contribuable a élevé réclamation à l'encontre des deux bordereaux précités en réexpliquant le contexte dans lequel il avait bénéficié d'une augmentation de fortune.

9. Par décision du 9 juillet 1998, l'AFC-GE a rejeté la réclamation au motif que le contribuable était titulaire d'une part théorique dans la succession de son père qui devait être considérée comme un élément de revenu et de fortune, imposable en vertu de l'art. 21 AIFD.

10. Le 10 août 1998, le contribuable a recouru contre cette décision auprès de la commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct remplacée, depuis le 1er janvier 2009, par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission).

11. Par décision du 14 mars 2001, la commission a rejeté le recours en confirmant le rappel d'impôt et l'amende infligés au contribuable. Celui-ci n'avait pas apporté la preuve de l'existence d'un contrat de fiducie ou d'un fidéicommis entre son père et M. M______. Il n'avait pas non plus contesté le calcul des reprises effectuées par l'AFC-GE.

12. En date du 23 avril 2001, le contribuable a déposé un recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif.

Il avait fait l'objet d'une procédure en soustraction dans le canton de Vaud concernant les exercices fiscaux dès 1991. Des décisions avaient été rendues, contre lesquelles une réclamation, respectivement un recours au Tribunal administratif vaudois avaient été formés au printemps 1998. A ce jour, l’administration cantonale des impôts du canton de Vaud (ci-après : AFC-VD) n'avait toujours pas présenté une réponse et avait encore, en janvier 2001, demandé un report, qui avait été accepté.

Sur le fond, la décision de la commission procédait d'un renversement inadmissible du fardeau de la preuve, affirmant que celui-ci incombait au contribuable, alors que les autorités qui avaient elles-mêmes instruit la cause, reconnaissaient que le fardeau incombait aux autorités fiscales. La taxation litigieuse faisait supporter au contribuable un impôt et une amende pour un patrimoine et des revenus qui ne lui appartenaient pas dans la période fiscale concernée. Enfin, la décision appliquait à tort à une substitution fidéicommissaire, entre deux résidents étrangers, les principes de la fiscalité suisse en matière de rapport fiduciaire.

Il conclut à la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé par le Tribunal administratif du canton de Vaud sur son recours contre la décision de l'AFC-VD du 27 février 1998, et jusqu'à droit jugé sur la réclamation contre la décision en matière d'IFD du 27 février 1998, à l'annulation des décisions de la commission et de l'AFC-GE du 9 juillet 1998, à l'annulation des bordereaux notifiés le 12 décembre 1996, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure.

13. Par décision du 26 avril 2001, le Tribunal administratif a prononcé la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi que jusqu'à droit jugé sur la réclamation du contribuable contre la décision en matière d'IFD.

14. Le 20 août 2002, le Tribunal administratif vaudois a rendu un arrêt portant sur un rappel d’impôt et une amende relatifs à l’ICC 1991 à 1996. Les éléments réunis par l’administration cantonale vaudoise des impôts (ci-après : ACI) étaient suffisamment pertinents pour considérer que les actifs attribués au contribuable se trouvaient dans sa sphère de disposition. 

En substance, la clé de voute de l’argumentation du contribuable tenait au seul document daté du 2 septembre 1990 signé par M______, lui permettant tout à la fois d’expliquer l’origine des fonds, de soutenir qu’il n’était pas l’ayant droit économique de D______ International et qu’il détenait pour la détentrice des avoirs que le fisc cherchait à lui imputer. Or, le contribuable avait repris la gestion des affaires de son père dès 1979. Il savait donc ce qui se passait dans le groupe comme l’attestait une lettre du 22 juillet 1986 de l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) résumant une réunion relative à la restructuration du groupe D______ à laquelle le contribuable avait participé. De plus, la succession du père du contribuable était importante (nombreux biens immobiliers, sociétés, etc.) et aucun document (testament, convention de partage privée ou notariée) n’avait été produit à ce sujet. Or, le contribuable avait admis avoir exigé et obtenu davantage que les autres cohéritières, ceci au terme de tractations, soutenant cependant à cet égard qu'il ignorait ce que les autres avaient reçu dans le partage.

Aux doutes quant à la véracité des propos du contribuable, s'ajoutait la documentation montrant les démarches entreprises en 1981 par la fiduciaire F______ auprès du fisc vaudois, ceci pour le compte de l'anonyme "bénéficiaire" de D______ International, alors désireux de constituer une holding en Suisse, d'y prendre domicile et de se substituer à l'établissement pour déclarer lui-même les actions. Le contribuable expliquait que le lien opéré par le fisc vaudois entre ces déclarations d'intention et son arrivée en Suisse deux ans plus tard ne permettait pas d'exclure que cela concernait son père. Or, selon ses propres dires son père avait vendu les actions de la holding française à D______ International à la fin des années septante et l'établissement de Vaduz avait depuis été contrôlé par M. M______. Il était ainsi curieux que le contribuable ait exclu en tant que "bénéficiaire" de l'Anstalt cette personne, sauf à en déduire qu'elle n'était effectivement pas contrôlée par ce dernier, mais par lui-même, vu le retrait d’A______ des affaires. A cet indice, se cumulait le constat que c'était bien le contribuable qui était venu s'établir en Suisse en 1983, peu après la constitution de D______ Holding, et qu'il était devenu ouvertement l'actionnaire majoritaire de cette dernière, concrétisant ainsi l'objectif que le "bénéficiaire" déclarait vouloir atteindre en 1981.

Au vu de la structure du groupe comme de la nature familiale de sa gestion, il était insoutenable de prétendre que le contribuable n'avait pas exercé de pouvoir au sein de D______ International.

Des virements bancaires produits par le fisc vaudois démontraient enfin que dite société avait une adresse au domicile genevois du contribuable. Celui-ci avait expliqué que ce domicile avait été constitué pour lui permettre de vérifier l'état de ses créances à l'encontre de l'Anstalt. Une telle corrélation n'était pas compatible avec l'absence de tout pouvoir d'intervention dans l'établissement.

15. Par arrêt du 7 avril 2003, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours de droit administratif et rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours de droit public formé par le contribuable contre l’arrêt précité. En substance, ni la constatation des faits ni leur appréciation par le Tribunal administratif vaudois n’apparaissaient comme manifestement fausses. Celui-ci était donc fondé à considérer que le contribuable disposait de D______ International, ce dernier se bornant à opposer son appréciation des faits à celle du Tribunal administratif vaudois et son argumentation étant moins convaincante que celle de ce Tribunal. De surcroît, l’arrêt du Tribunal administratif vaudois était fondé sur une répartition correcte du fardeau de la preuve puisque celui-ci n’avait pas mis ce fardeau à la charge du contribuable, mais à celle de l’AFC-VD qui devait apporter la preuve de la soustraction. Il avait ensuite estimé que cette administration, au vu des indices recueillis, avait prouvé les faits qu’elle avançait. C’était alors au contribuable d’infirmer les faits déterminants. Or, celui-ci s’était contenté de les contester sans apporter de preuve concluante. En particulier, l’attestation de M. M______ à elle seule et vu les autres éléments du dossier ne prouvait pas l’existence d’un fidéicommis. En revanche, il était exact que la qualification de « renversement du fardeau de la preuve » était erronée, ce qui ne portait pas à conséquence puisqu’en réalité ce fardeau n’avait pas été renversé. Enfin, les conditions de la soustraction fiscale étaient remplies.

16. Par courrier du 22 juillet 2003, le mandataire du contribuable a transmis au tribunal de céans copie de cet arrêt. Une procédure était toujours pendante par devant le Tribunal administratif vaudois concernant un rappel d'impôt IFD (1991-1996). Il a requis en conséquence que la suspension de la procédure genevoise prononcée le 26 avril 2001, soit maintenue jusqu'à droit jugé dans la procédure vaudoise.

17. Le 14 juin 2007, le Tribunal administratif vaudois a rendu un arrêt portant sur deux procédures. La première concernait l’IFD 1991-1992 et 1993-1994 (a). La seconde était relative à l’IFD 1997 à 2002 et à l’ICC 1999 à 2002 (b).

(a) Le contribuable revenait sur les divers points évoqués précédemment dans ses écritures, et rejetés tant par le Tribunal administratif vaudois le 20 août 2002 que par le Tribunal fédéral le 7 avril 2003. Le recourant n’apportait aucun élément nouveau propre à amener le Tribunal vaudois à se détacher de la solution retenue dans son arrêt et dans celui du Tribunal fédéral précités. En particulier, l’authentification de la signature de M______ ne changeait rien au fait que celui-ci avait joué le rôle de simple intermédiaire. Le recours devait être rejeté y compris pour ce qui concernait le prononcé d’amendes.

(b) Par identité de motifs, devait aussi être écarté le moyen soulevé dans son recours relatif à cette deuxième procédure, selon lequel le recourant ne disposait pas de la totalité des actifs de D______ international et de D______ holding. Il s'en suivait que le contribuable devait être tenu pour titulaire de la créance de la première à l’encontre de la seconde de ces sociétés. En revanche, les reprises d’intérêts découlant du prêt de D______ International à D______ Holding devaient être annulées puisque le procédé consistant à renoncer au versement d’intérêts ne pouvait être assimilé à une prestation appréciable en argent de la société à l’actionnaire ni à une évasion fiscale, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de procéder à ce titre à des reprises dans le revenu du contribuable.

18. Le 14 novembre 2007, le contribuable a transmis au Tribunal administratif ses observations en relation avec l'arrêt du Tribunal administratif vaudois du 14 juin 2007. L’arrêt précité ne revêtait pas l’autorité de la chose jugée dans le cadre la procédure genevoise, dès lors qu’elle avait trait à une procédure fiscale ouverte dans un autre canton en relation avec des périodes fiscales différentes. Le Tribunal fédéral n’avait jamais statué sur cette question sous un autre angle que celui, restreint, de l’arbitraire. En annexe, il a remis une attestation de Me Soldati, avocat et notaire à Lugano, authentifiant la signature de M. M______, un échange de correspondances remontant à l’année 1987, concernant le logo de D______ et attestant de la place tenue à l’époque par M. M______ au sein du groupe D______, ainsi qu’une lettre de la fiduciaire X______ S.A. du 17 février 1989, confirmant que M. M______ était bien l’ayant droit économique de D______ International à cette époque.

19. Le 8 février 2008, la commission a persisté dans les considérants et le dispositif de sa décision.

20. En date du 28 février 2008, l'AFC-GE a répondu au recours du contribuable en concluant à son rejet et s’est déterminée sur l’arrêt vaudois précité. Attendu que la procédure de rappel d’impôt du canton de Genève s’était fondée sur les résultats des enquêtes menées par l’autorité fiscale vaudoise, relatives aux années 1991 à 1996, il n’y avait pas matière à s’écarter de la solution du Tribunal administratif vaudois, qui confirmait les rappels d’impôt et amende pour ces années-là, dès lors que cet arrêt était entré en force. Quant aux reprises opérées sur les périodes 1997 à 2002 et au sujet desquelles le contribuable avait obtenu gain de cause, elles étaient indépendantes des bordereaux genevois 1989-1990 notifiés le 13 décembre 1996, soit antérieurement à l’extension de la procédure en soustraction fiscale vaudoise. Aussi, même si le contribuable avait obtenu gain de cause sur ce point, celui-ci ne faisait pas l’objet de la procédure en rappel d’impôt genevois, de sorte qu’il ne pouvait en tirer avantage.

21. Le 28 février 2008, l’AFC-CH a fait part de ses observations. La procédure genevoise encore ouverte devait être jugée indépendamment du résultat de la procédure fiscale vaudoise, laquelle concernait des années fiscales postérieures aux années fiscales qui faisaient l'objet de la procédure genevoise. Elle a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision de la commission.

22. Le 17 juin 2008, le tribunal de céans a admis le recours et annulé les bordereaux litigieux au motif que la créance en cause était prescrite.

23. Saisi d’un recours de l’AFC-GE contre l’arrêt précité, le Tribunal fédéral l’a admis le 5 novembre 2008 et a renvoyé la cause à l'instance cantonale pour qu’elle soit tranchée sur le fond.

24. Dans ses observations du 20 novembre 2008, l’AFC-GE a repris la teneur de son écriture du 28 février 2008 et a conclu au rejet du recours. S'agissant de l'authentification de la signature de M. M______, elle faisait siennes les conclusions précitées du Tribunal administratif vaudois et du Tribunal fédéral.

25. En date du 21 novembre 2008, la commission a persisté dans les considérants et le dispositif de sa décision du 14 mars 2001.

26. Le 15 décembre 2008, l’AFC-CH a conclu au rejet du recours du contribuable du 23 avril 2001, et à la confirmation de la décision de la commission en renvoyant aux observations de l'AFC-GE.

27. Le 15 décembre 2008, le contribuable s’est référé à son recours du 23 avril 2001 et à ses observations du 14 novembre 2007. S’agissant des amendes, la question était pendante, des observations finales ayant été déposées par devant le Tribunal administratif vaudois le 8 décembre 2008. Le contribuable a repris les conclusions de son recours initial.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al.1 let.a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Après l’entrée en vigueur le 1er janvier 1995 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’impôt fédéral direct (LIFD – RS 642.11), l’AIFD a été abrogé (art. 201 LIFD). Les dispositions de droit matériel de l’ancien AIFD restent toutefois applicables aux périodes fiscales antérieures selon le principe de la non-rétroactivité des lois (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.554/2006 du 7 mars 2007, consid.3 ; ATA/330/2007 du 26 juin 2007).

Le litige en tant qu’il porte sur la période fiscale 1989-1990 est par conséquent soumis à l’AIFD.

3. Selon l’art. 129 al. 1 AIFD, celui qui se soustrait totalement ou partiellement à l’impôt en éludant les obligations qui lui incombent, conformément aux art. 82 à 87, 89, 91 et 97 AIFD, dans la procédure de taxation, de réclamation, de recours et d’inventaire (lit.a) ou en celant des éléments essentiels à la détermination de l’existence ou de l’étendue de l’obligation fiscale ou en donnant, intentionnellement ou par négligence, des indications inexactes (lit. b), est passible d’une amende allant jusqu’à quatre fois le montant soustrait ; ce montant doit être payé en plus de l’amende.

4. Ainsi, un rappel d’impôt au sens de l’article précité ne peut être effectué que si l’existence d’une soustraction fiscale est établie, ce qui nécessite la réunion de trois éléments : la soustraction d’un montant d’impôt, la violation d’une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier (Arrêt du Tribunal fédéral du 7 mars 2007 2A.554/2006, consid.7.1 et les références citées).

5. La réalisation des éléments objectifs de la soustraction fiscale suppose, d’une part que les montants non déclarés constituent des éléments imposables induisant la perte d’un montant d’impôt revenant à la collectivité publique, d’autre part que ces montants soient entrés dans la sphère de disposition du contribuable. La condition subjective de la soustraction est quant à elle réalisée lorsque le contribuable a agi de manière fautive, soit intentionnellement, soit par négligence. La diminution ou la disparition de la base d’imposition et la perte d’impôt doivent avoir leur cause dans le comportement du contribuable qui a violé son obligation légale de déclarer, de renseigner ou de prouver, notamment en cachant des éléments essentiels pour déterminer la base d’imposition ou en donnant des indications inexactes sur les faits importants pour déterminer celle-ci. Ce comportement, qui peut consister en un acte ou une omission, a pour effet que l’autorité de taxation ignore complètement les faits générateurs de l’impôt ou se fonde sur un état de faits inexacts ou incomplets pour rendre sa décision. La preuve du caractère intentionnel d’une soustraction incombe à l’autorité fiscale, celle-ci étant toutefois facilitée par la présomption que celui qui agit avec conscience agit avec volonté. Le Tribunal fédéral considère que cette preuve est apportée lorsqu’il est établi de manière suffisamment certaine que le contribuable était conscient du caractère inexact ou incomplet de sa déclaration. Si cette conscience est établie, il faut alors partir de l’idée que le contribuable a aussi agi de manière intentionnelle, c’est-à-dire dans le but de tromper l’autorité fiscale et d’obtenir une taxation trop basse ou du moins, agissant par dol éventuel, qu’il a compté sérieusement sur cette possibilité (Archives de droit fiscal suisse, vol. 66 p. 258 et p. 467 ; RDAF 1995 38 ; ATF 114 Ib 27).

6. Ces considérations générales exposées, le présent litige pose d’entrée la question du fardeau de la preuve en termes de limites qu’il y a lieu d'établir à l’obligation faite au contribuable de renseigner, de déclarer ou de prouver, respectivement la question de l’étendue du devoir de l’autorité fiscale d’instruire et de se renseigner.

D’après le contribuable, la commission aurait procédé à un renversement inadmissible du fardeau de la preuve en sa défaveur, en exigeant qu’il prouve que le patrimoine sur lequel étaient fondés l’impôt et l’amende litigieuses ne lui appartenait pas à l’époque des faits.

7. En cette matière, la jurisprudence constante admet que l’administration fiscale supporte le fardeau de la preuve de démontrer l’existence d’éléments imposables, tandis qu’il incombe au contribuable de justifier les faits qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. L’exigence selon laquelle les autorités fiscales doivent examiner d’office l’état de faits est cependant limitée par ce qui apparaît comme raisonnable compte tenu des circonstances ; en présence d’indices concluants permettant d’établir l’existence de faits justifiant une imposition, il incombe au contribuable de remettre en cause le point de vue de l’administration fiscale. Il en va de même lorsque la présentation des faits par l’autorité est vraisemblable selon l’expérience de la vie. Dans ces situations, le fardeau de la preuve des allégations contraires à celles de l’administration fiscale repose alors sur le contribuable (ATF 121 II 257 consid. 4c/aa p. 266 ; ATA/607/2008 du 2 décembre 2008 ; ATA/330/2007 du 26 juin 2007).

En l'occurrence, le contribuable a argué devant la commission que la différence de revenu et fortune imposables résultant de la comparaison de ses déclarations fiscales 1989-1990 et 1991-1992 avait pour origine un patrimoine qui lui avait été remis en 1990 en exécution d'une substitution fidéicommissaire.

La commission a admis les faits tels qu’établis par l'AFC-GE, laquelle s'était elle-même fondée sur le résultat des enquêtes menées par l'autorité fiscale vaudoise relatives aux années 1991 à 1996. A cet égard, l’AFC-VD a réuni de nombreux indices lui permettant de considérer que le contribuable disposait de D______ International. Il incombait alors au contribuable d'infirmer ces éléments par la preuve du contraire du moment que les faits établis, sur la base d'indices précis, étaient hautement vraisemblables (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.215/2002 et 2A.479/2002 du 7 avril 2003, consid. 4.2).

Le contribuable n'a cependant pas été en mesure de fournir à l'AFC-GE ainsi qu'à la commission des preuves les renversant ou permettant une autre interprétation, comme, par exemple les documents relatifs à la succession de feu son père et au partage entre les héritiers, l'imposition du patrimoine et des revenus y afférant en France ou à Monaco, voire la correspondance échangée entre lui-même et M. M______ sur le contenu de l'attestation du 2 septembre 1990 ayant nécessité, aux dires du contribuable, de longues tractations. La seule preuve que le contribuable ait apportée est l'attestation précitée que la commission a jugée insuffisante pour admettre l'existence d'une substitution fidéicommissaire, en particulier en raison de la non authentification de la signature.

La décision de la commission est par conséquent fondée sur une répartition correcte du fardeau de la preuve puisque celle-ci n'a pas mis ce fardeau à la charge du contribuable, mais à celle de l'AFC-GE qui devait apporter la preuve de la soustraction. Elle a ensuite estimé que ladite administration, au vu des indices recueillis, avait prouvé les faits qu'elle avançait. Comme l'a retenu la commission, c'était alors au contribuable d'infirmer les faits déterminants. Or, celui-ci s'est contenté de les contester sans apporter de preuve concluante.

8. Les nouvelles pièces que le contribuable a annexées à ses observations du 14 novembre 2007, n'apportent pas d'autres éléments propres à amener le tribunal de céans à se détacher de la solution retenue par la commission. En particulier, l'authentification de la signature de M. M______ ne démontre pas qu'il ait agi autrement que comme intermédiaire, et les lettres relatives au logo de D______ vont dans ce sens, puisqu'elles établissent seulement que M. M______ en était le dessinateur, et que les dessins devaient être soumis pour approbation au contribuable en 1987, déjà.

9. Quant à la question de l'ayant droit économique de D______ International, le Tribunal administratif vaudois, par arrêts des 20 août 2002 et 14 juin 2007, s'est prononcé en détails sur la question. Il a rejeté la thèse du contribuable selon laquelle celui-ci ne disposait pas de la totalité des actifs de D______ international et de D______ Holding, au vu du résultat des enquêtes effectuées par l'AFC-VD. Le Tribunal fédéral a, par arrêt du 7 avril 2003, confirmé que le Tribunal administratif vaudois était fondé à considérer que le contribuable disposait de D______ International.

Dans son écriture du 15 décembre 2008, le contribuable argue qu'il ne saurait être renvoyé aux décisions vaudoises et les appliquer mutatis mutandis au volet genevois dès lors qu'elles concernent une procédure fiscale ouverte dans un autre canton en relation avec des périodes fiscales différentes.

Certes, seuls les facteurs fiscaux participent au caractère définitif de la décision de taxation. Les considérants, sur lesquels reposent les constatations n'ont que valeur de motivation. Il s'ensuit que les circonstances de fait et de droit sur lesquelles repose une taxation entrée en force, peuvent faire l'objet d'un nouvel examen et être jugées différemment lors de périodes ultérieures (RFAF 2006 II 228 consid. 4.2). Cela découle également de l'étanchéité des périodes fiscales (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.64/2004 du 19 juillet 2004, consid. 3.2 ; ATA/60/2008 du 2 décembre 2008).

Tel n'est cependant pas le cas en l'espèce. La période fiscale litigieuse, soit les années 1989-1990, objet de la procédure genevoise, est antérieure à celle faisant l’objet des arrêts vaudois d'une part. D'autre part, les faits sur lesquels reposent les procédures genevoises et vaudoises portent sur la question essentielle de savoir si le contribuable était ou non l'ayant droit économique de D______ International avant 1990. Attendu que la procédure de rappel d'impôt genevoise s'est entièrement appuyée sur les investigations vaudoises à ce sujet, et pour les motifs développés ci-dessus, il n'y a aucune raison de remettre en doute ces conclusions, ce d'autant moins que le contribuable n'a rien amené de nouveau étayant sa thèse.

10. Dans la mesure où il est établi que le contribuable était l'ayant droit économique de D______ International au cours de la période litigieuse, en ne déclarant pas les éléments de fortune et de revenu y relatifs, il les a soustraits de l'imposition et réalise ainsi la condition objective de la soustraction fiscale. Quant à la condition subjective, soit la faute du contribuable, le dol éventuel est pour le moins établi au vu des éléments exposés ci-dessus.

11. Le recourant ne conteste pas le montant de l’amende. Le Tribunal administratif constate néanmoins qu’en confirmant ledit montant, la commission n’a pas violé le droit fédéral. En effet, conformément au principe de la lex mitior, si un délit commis avant l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi est jugé après cette entrée en vigueur, la peine est fixée d’après le droit le plus favorable à l’intéressé (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.217/2005 du 16 octobre 2006, consid. 7.6). Les sanctions prévues par l’ancien et le nouveau droit sont différentes. A cet égard, l’art. 175 al. 2 LIFD est, en principe, plus favorable que l’art. 129 AIFD puisque la peine maximale est moins élevée. La nouvelle loi prévoit toutefois une réduction maximale autorisée au tiers du montant soustrait en cas de faute légère. Ainsi, dans cette dernière hypothèse l'ancienne disposition peut s'avérer plus avantageuse car, contrairement à l'art. 175 LIFD, elle ne prescrit pas une sanction minimum et permet de renoncer à toute amende (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.217/2005 du 16 octobre 2006, consid. 8.3). Tel est le cas en l'espèce, l'amende ayant été fixée à un quart du montant de l'impôt soustrait. L'amende de CHF 18'216.- sera en conséquence confirmée.

12. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

13. Un émolument de CHF 2'500.- sera mis à la charge du recourant.

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 avril 2001 par Monsieur C______ contre la décision du 14 mars 2001 de la commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct ;

au fond :

le rejette ;

confirme la décision du 14 mars 2001 de la commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 2'500.- ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Antoine Kohler, avocat du recourant, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’à la commission cantonale de recours en matière administrative.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :