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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2621/2012

ATA/361/2013 du 11.06.2013 ( FPUBL ) , ADMIS

Descripteurs : ; COMPÉTENCE ; ORGANISATION(PROCÉDURE) ; PRÊT DE CONSOMMATION ; POURSUITE POUR DETTES ; ACTION EN RECONNAISSANCE DE DETTE
Normes : LOJ.132 ; LP.79 ; règlement relatif aux prêts au personnel du 1er janvier 2001 de la Commune de Lancy
Résumé : L'intimée, employée de la Commune de Lancy, a bénéficié d'un prêt de son employeur pour racheter des années de cotisations auprès de son institution de prévoyance professionnelle. Son contrat de travail a pris fin alors que le prêt n'était pas totalement remboursé. La commune a donc agi par voie de poursuite afin de récupérer le solde du prêt non encore remboursé. Le prêt se fondant sur des rapports de droit public, la chambre administrative est compétente pour connaître de l'action en reconnaissance de dette. Elle est également compétente pour lever l'opposition au commandement de payer et prononcer la mainlevée définitive. La commune ne pouvant procéder à la compensation de sa créance avec celle détenue par l'intimée auprès de l'institution de prévoyance professionnelle, et le cas d'espèce n'étant pas réglé par le règlement relatif aux prêts du personnel de 2001 auquel était soumise l'intimée, la commune était en droit d'agir par la voie de la poursuite. L'action en reconnaissance de dette est admise et l'opposition au commandement de payer est levée définitivement.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2621/2012-FPUBL ATA/361/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 juin 2013

 

dans la cause

 

COMMUNE DE LANCY
représentée par Me Jacques-André Schneider, avocat

contre

Madame M______
représentée par Me Christian Canela, avocat

 



EN FAIT

Madame M______, née le ______1952, a été engagée par la commune de Lancy (ci-après : la commune) à partir du 14 juin 1993.

Le 13 mars 2001, Mme M______ a signé une reconnaissance de dette en faveur de la commune, en vertu de laquelle elle reconnaissait lui devoir une somme de CHF 34'815,60, sans intérêts et remboursable par mensualités de CHF 200.-, qui devaient être prélevées sur son salaire.

Ce prêt d'un montant de CHF 33'362,30 avait été octroyé en 2000 par son employeur en vue de racheter des années d'affiliation auprès de la Caisse d’assurance du personnel de la Ville de Genève et des Services industriels de Genève (ci-après : CAP).

Dès le 30 décembre 2004, Mme M______ s'est trouvée en incapacité de travail totale pour raison de maladie. La commune était tenue, selon le statut du personnel, de lui verser la totalité de son traitement pendant sept cent trente jours. A la fin de cette période, soit à la fin de décembre 2006 et sauf événement nouveau, les prestations en sa faveur s'interrompaient.

Au 31 décembre 2005, le solde dû pour le rachat d'années d'affiliation auprès de la CAP s'élevait à CHF 20'419,90.

Le 8 janvier 2006, Mme M______ a confirmé son accord avec le solde dû et s'est engagée à continuer à rembourser le prêt par une retenue mensuelle de CHF 300.-.

A la suite d'un courrier du 26 juin 2006 lui demandant comment elle envisageait de solder le prêt avant l'échéance de fin 2006, puisque ses prestations s’interrompraient, Mme M______, sous la plume de son mandataire, a invité la commune, par courrier du 18 septembre 2006, à effectuer elle-même les démarches nécessaires auprès de la CAP pour être couverte. L'art. 5 al. 2 du règlement « Prêts au personnel » dans sa version du 1er décembre 2002 (ci-après : le règlement 2002) prévoyait que si les rapports de travail cessaient avant le remboursement complet du prêt, le solde de la créance non déduit du salaire était cédé à la CAP afin d'être compensé, à due concurrence, avec la prestation de libre passage. Le prêt était alors cédé à la CAP.

Le 22 septembre 2006, la commune a attiré l'attention de Mme M______ sur le fait que le règlement 2002 avait fait l'objet de modifications. Dans sa version du 1er juin 2005, l'art. 5 al. 2 du règlement « Prêts au personnel » (ci-après : le règlement 2005) prévoyait que pour un rachat d’années d’affiliation à la CAP, si les rapports de travail cessaient avant le remboursement complet du prêt, le solde de la créance non déduit du salaire était cédé à la CAP afin d'être compensé, à due concurrence, avec la prestation de libre passage. Le prêt était alors cédé à la CAP. L’art. 5 al. 3 indiquait qu'au cas où la législation en vigueur ne permettrait pas la compensation avec la prestation de libre passage, le montant restait dû à la commune. Un arrangement particulier serait pris. La prestation de libre passage n'étant pas exigible, la somme de CHF 18'019,90 lui restait due.

A la suite d'un échange de correspondances entre les parties, la commune a procédé à une compensation entre une partie des remboursements dus et des montants que la commune reconnaissait devoir à Mme M______ à titre de solde de vacances (CHF 6'614,40) et d'heures supplémentaires (CHF 1'081,20) pour un total de CHF 7'695,60. Au 31 décembre 2006, la créance de la commune se montait à CHF 17'156,80. Le solde du prêt s'élevait, après compensation, à CHF 9'461,20 (CHF 17'156,80 - CHF 7'695,60). De plus, la CAP avait initié une procédure de mise à l'invalidité.

Le 13 décembre 2006, la commune a corrigé le calcul de la compensation, en incluant la déduction des charges sociales dues sur les heures supplémentaires et les vacances, ce qui impliquait que le solde dû à Mme M______ au titre de vacances et d'heures supplémentaires s'élevait finalement à CHF 7'134,60 et non à CHF 7'695,60. Il fallait par ailleurs prendre en considération un autre prêt de CHF 336,90 consenti à Mme M______ pour la X______ (ci-après : la X______). La créance totale de la commune s'élevait ainsi au 31 décembre 2006 à CHF 17'493,70 (CHF 17'156,80 + CHF 336,90). Le solde de la dette au 31 décembre 2006 s'élevait ainsi à CHF 10'359,10 (CHF 17'493,70 - CHF 7'134,60).

Le 22 décembre 2006, Mme M______, dans l'impossibilité matérielle de contrôler l'exactitude de son solde de vacances ou des heures supplémentaires effectuées, s'est opposée à la compensation entre sa créance et sa dette. Par ailleurs, elle ne comprenait pas le lien qu'avait la commune par rapport au prêt conclu avec la X______.

Le 31 décembre 2006, les rapports de travail entre la commune et Mme M______ ont pris fin. A cette date, le prêt n'était pas totalement remboursé.

Le 1er février 2007, la CAP a écrit à Mme M______. Compte tenu de la fin de son contrat de travail avec la commune, elle avait droit à une prestation de libre passage. Un formulaire était joint à la correspondance afin que Mme M______ communique à la CAP les informations nécessaires à l'affectation de sa prestation de libre passage. Sans réponse de sa part dans un délai de six mois suivant la fin de son contrat de travail, la CAP verserait sa prestation de libre passage auprès d'une institution supplétive de prévoyance professionnelle.

Le 23 février 2007, la X______, assurance perte de gain, a rétrocédé à la commune un montant de CHF 940,50 au titre de libération de primes compte tenu de l'incapacité de travail de Mme M______. Dès lors, la dette de Mme M______ était réduite d'autant et s'élevait ainsi à CHF 9'361,70 (sic).

Le 13 juin 2007, la X______, apprenant que Mme M______ avait recouvré une pleine capacité de travail depuis le 1er juin 2007, a requis de la commune le paiement de CHF 181,80 au titre de primes pour la période de juin à décembre 2007.

La commune s'étant acquittée de ce montant, la dette de Mme M______ s'élevait dès lors à CHF 9'543,50 (CHF 9'361,70 + CHF 181,80).

Le 22 octobre 2007, Mme M______ a allégué avoir été induite en erreur par la commune lors des discussions l'ayant amenée à contracter le prêt et a sollicité un arrangement.

Le 24 octobre 2007, la commune a rejeté les arguments de Mme M______.

Le 31 octobre 2007, la CAP a informé la commune que conformément aux instructions de Mme M______, elle avait procédé au transfert de la prestation de sortie de Mme M______ « valeur 4 juin 2006 » auprès de la Fondation de libre passage de la Banque cantonale de Genève (ci-après : la fondation). Dès lors, une éventuelle compensation entre la créance de la commune et la prestation de sortie de Mme M______ n'était plus réalisable.

Le 1er novembre 2007, la commune a prié Mme M______ de lui transmettre une proposition d'échelonnement de remboursement de sa dette s'élevant à CHF 9'543,50.

Le 6 novembre 2007, Mme M______ a précisé qu'elle ne s'était pas opposée à la compensation de la créance de la commune avec la prestation de sortie que la CAP était tenue de lui verser. Il appartenait à la commune de rechercher une solution avec la CAP ou tout tiers en vue du remboursement du solde du prêt, ceci sans compensation avec les indemnités liées à son contrat de travail. Il ne lui était pas possible de transmettre à la commune une proposition d'échelonnement de remboursement au vu de sa situation financière actuelle.

Le 7 novembre 2007, la commune en a pris acte et a interpellé la CAP sur l'éventuelle possibilité de restituer la prestation de sortie de Mme M______ à la CAP et de procéder à la compensation avec sa créance.

Le 3 décembre 2007, la CAP a informé la commune qu'une restitution de tout ou partie de la prestation de sortie de Mme M______ en vue de procéder à une compensation n'était pas envisageable, dans la mesure où aucun motif ne pouvait légalement être invoqué pour obtenir l'accord de la fondation à une telle restitution. De plus, et contrairement à ce qu'elle affirmait, Mme M______ n'avait jamais manifesté son intention de compenser la créance de la commune avec sa prestation de sortie. En signant la demande d'ouverture d'un compte de libre passage, elle avait manifesté son refus de compensation.

Le 19 décembre 2007, la commune a fixé à Mme M______ un ultime délai au 14 janvier 2008 pour transmettre une proposition d'échelonnement de remboursement de la dette de CHF 9'543,50, faute de quoi une réquisition de poursuite serait déposée.

Le 25 novembre 2008, le mandataire de Mme M______ a informé la commune qu'il ne la représentait plus.

Le 31 janvier 2008, la commune a adressé à l'office des poursuites (ci-après : OP) une réquisition de poursuite à l'encontre de Mme M______ pour un montant de CHF 9'543,50 plus intérêts à 5 % dès le 26 juin 2006, correspondant au solde impayé dû en vertu de la reconnaissance de dette du 13 mars 2001. La poursuite a été enregistrée sous n° ______. Cet acte a été frappé d'opposition.

Le 2 décembre 2008 et avant de déposer la requête en mainlevée, la commune a invité Mme M______ à rembourser sa dette, éventuellement par acomptes.

Par requête du 9 février 2009, la commune a requis auprès du Tribunal de première instance (ci-après : TPI) la mainlevée provisoire de l'opposition formée par Mme M______, poursuite n° ______ à hauteur de CHF 9'343,50 (recte : CHF 9'543,50).

Par jugement du 6 mars 2009 (JTPI/3339/2009), le TPI a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition au commandement de payer, poursuite n° ______ et a condamné Mme M______ à payer à la commune un montant de CHF 600.- à titre de dépens.

Le 7 avril 2009, sous la plume de son nouveau conseil, Mme M______ a déposé auprès du TPI une action en libération de dette contre la commune, en concluant à ce qu'il soit constaté qu'elle n’était pas débitrice du montant réclamé et à ce que la CAP soit appelée en cause. Elle avait été victime d'une erreur essentielle dans la mesure où elle ne s'attendait pas à devoir rembourser elle-même le solde dû et pensait que la commune s'arrangerait directement avec la CAP.

Le 8 janvier 2010, la commune a conclu à l'irrecevabilité de l'action pour cause d'incompétence et, au fond, à son rejet « sous suite de frais et dépens ».

Par jugement du 15 avril 2010 (JTPI/4526/2010), le TPI a déclaré irrecevable l'action en libération de dette de Mme M______ et l'a condamnée en tous les dépens, lesquels comprenaient une indemnité de procédure de CHF 800.- valant participation aux honoraires d'avocat de la commune. Mme M______ et la commune étaient liées par un contrat de droit public et Mme M______ aurait dû agir devant le Tribunal administratif en libération de dette. Ce jugement a été notifié au conseil de Mme M______ le 26 avril 2010.

Par acte daté du 17 mai 2010, Mme M______ a saisi le Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), d’une action en libération de dette en concluant à sa recevabilité et à son admission.

Par arrêt du 22 mars 2011 (ATA/186/2011), la chambre administrative a déclaré irrecevable l'action en libération de dette, sans qu'il soit nécessaire de déterminer si cette irrecevabilité était fondée sur la tardiveté du recours ou le défaut de signature originale. Aucune indemnité de procédure n'était allouée à la commune.

Le 13 mai 2011, Mme M______ a formé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral contre ce jugement en concluant à son annulation « sous suite de frais et dépens ».

Par arrêt du 21 novembre 2011 (2C_404/2011), le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé l'ATA/186/2011 du 22 mars 2011.

Le 25 avril 2012, la commune a fait notifier à Mme M______ un commandement de payer pour trois montants :

–               CHF 9'543,50 avec intérêts à 5 % dès le 26 juin 2006 ;

–               CHF 660.- avec intérêts à 5 % dès le 6 mars 2009 ;

–               CHF 800.- avec intérêts à 5 % dès le 15 avril 2010.

La poursuite a été enregistrée sous n° ______.

Cet acte a été frappé d'opposition.

Le 27 août 2012, la commune a déposé auprès de la chambre administrative une action en reconnaissance de dette contre Mme M______ en concluant à son admission, à la condamnation de Mme M______ au paiement des sommes précitées y compris les intérêts, à la mainlevée définitive de l'opposition formée par Mme M______ au commandement de payer n° ______, et à ce que la poursuite n° ______ suive sa voie, « sous suite de frais et dépens ».

La chambre administrative était compétente pour recevoir l'action car la commune et Mme M______ avaient été liées par un contrat de droit public et le prêt avait été octroyé en raison de ce lien.

La chambre administrative était par ailleurs compétente pour prononcer la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, dans la mesure où elle était compétente pour statuer sur le fond du litige. Les montants de CHF 660.- et de CHF 800.-, relatifs aux frais consécutifs aux procédures préalablement intentées, étaient en relation de connexité matérielle avec l'action en reconnaissance de dette. L'économie de procédure et la connexité matérielle justifiaient une attraction de compétence en faveur de la chambre administrative pour prononcer la mainlevée définitive de l'opposition.

En application du règlement « Prêts au personnel » du 1er janvier 2001 (ci-après : le règlement 2001) ainsi que du règlement 2005 et compte tenu de l'impossibilité de compenser sa créance avec la prestation de sortie de Mme M______, la commune était en droit de réclamer à cette dernière le montant de CHF 9'543,50 avec intérêts à 5 % dès le 26 juin 2006, correspondant au jour où la commune avait dénoncé le prêt et exigé son remboursement.

Mme M______ ne pouvait se prévaloir d'une erreur de consentement quant à la conclusion du prêt. Toute personne qui contractait un emprunt devait s'attendre à le rembourser, à plus au moins long terme. De plus, Mme M______ avait, pendant plusieurs années, remboursé le prêt par des retenues mensuelles sur son salaire, de sorte qu'elle avait accepté le principe du remboursement par actes concluants. Le délai d'un an pour se prévaloir de l'erreur essentielle était par ailleurs échu et Mme M______ n'avait pas résolu le contrat. Enfin, l'admission d'une éventuelle erreur aurait eu pour conséquence la restitution des prestations.

Subsidiairement, la commune était en droit de réclamer son dû en vertu des règles sur l'enrichissement illégitime, dont les conditions étaient également réalisées.

Le 29 août 2012, le juge délégué a invité Mme M______ à lui faire parvenir ses observations d'ici au 28 septembre 2012.

Le 24 septembre 2012, Mme M______ a sollicité une prolongation d'un mois pour répondre à l'écriture de la commune dans la mesure où elle n'avait pas encore mandaté un avocat pour se défendre.

Le 27 septembre 2012, le juge délégué a fait droit à sa demande et a ainsi prolongé au 26 octobre 2012 le délai pour produire son écriture.

Mme M______ n'a cependant pas produit d'écriture.

Le 6 novembre 2012, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 7 décembre 2012 pour formuler toute requête ou observations complémentaires, ensuite de quoi la cause serait gardée à juger.

Le 4 décembre 2012, la commune a informé le juge délégué qu'il n'avait rien à ajouter, tout en se réservant le droit de solliciter un délai si Mme M______ se déterminait dans le cadre de ce litige.

Mme M______ ne s’est pas déterminée dans le délai imparti.

Le 9 avril 2013, le juge délégué a prié la commune de lui faire parvenir le contrat de prêt conclu en 2000 avec Mme M______, le règlement relatif aux prêts au personnel de la commune du 7 janvier 1997, celui du 1er décembre 2002 ainsi que tout autre règlement concernant les prêts au personnel non encore remis. Il priait également de lui expliquer la dichotomie entre le montant prêté de CHF 33'362,30 en 2000 et la reconnaissance de dette signée par Mme M______ en 2001 indiquant un montant de CHF 34'815,60.

Le 3 mai 2013, la commune a expliqué qu'au début de l'année 2000, elle avait accordé à Mme M______ un prêt d'un montant de CHF 33'362,30 en vue de racheter des années d'affiliation auprès de la CAP. La commune avait donc effectué l'opération de rachat demandé. Toutefois, au mois de février 2001, Mme M______ lui avait indiqué qu'elle souhaitait, pour des raisons fiscales, que cette opération soit faite en 2001 et non en 2000. La commune avait donc demandé à la CAP d'annuler la transaction initiale et elle avait effectué une nouvelle opération de rachat en 2001 pour un montant de CHF 34'815,60. Par la suite, un nouveau prêt sans intérêts d'un montant de CHF 34'815,60 annulant et remplaçant le prêt initial de 2000 avait été octroyé à Mme M______ sur la base de l'art. 1b du règlement 2001.

La commune a remis au juge délégué le règlement du 1er décembre 2002. Celui du 7 janvier 1997 n'était plus en sa possession. Quant au contrat de prêt, conclu en 2000 et annulé en 2001, il ne figurait plus au dossier et ne pouvait être communiqué.

La commune n'a toutefois pas remis le contrat de prêt de 2001.

Le 13 mai 2013, le juge délégué a transmis à Mme M______ l'écriture précitée ainsi que ses annexes, lui fixant un délai au 24 mai 2013 pour se déterminer.

Le 23 mai 2013, Mme M______, sous la plume de son nouveau mandataire, a remis à la chambre administrative un mémoire concluant « sous suite de frais et dépens » au rejet de l'action intentée par la commune et à la radiation de la poursuite n° ______.

Elle avait pris connaissance du règlement 2005 uniquement en 2007, il ne la liait donc pas. Si l'inexécution de son obligation de remboursement devait lui être reprochée, celle-ci devait être reléguée à l'arrière-plan eu égard à la faute de la commune qui n'avait pas cédé sa créance à la CAP. Elle avait été dans l'erreur lors des discussions l'ayant amenée à emprunter le montant de CHF 34'815,60. Enfin, la commune n'avait pas la légitimation active pour réclamer le solde dû puisque l'art. 5 du règlement 2002 prévoyait que le prêt était cédé à la CAP si les rapports de travail cessaient avant la fin du remboursement complet du prêt.

Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

La chambre administrative examine d'office la recevabilité d'un recours ou d'une demande portée devant elle (ATA/293/2013 du 7 mai 2013 consid. 1 ; ATA/193/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/68/2012 du 31 janvier 2012 ; ATA/191/2011 du 22 mars 2011).

a. Aux termes de l'art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (al. 1 ; art. 56A al. 1 de l’ancienne loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - aLOJ en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010).

Le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6, al. 1, let. a et e, et 57 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Sont réservées les exceptions prévues par la loi (al. 2 ; art. 56A al. 2 aLOJ).

La chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l’objet d’une décision au sens de l’al. 2 et qui découlent d’un contrat de droit public. Les dispositions de la LPA en matière de recours s’appliquent par analogie à ces actions (al. 3 ; art. 56G aLOJ).

b. Avant le 1er janvier 2009, la chambre administrative n'était compétente pour connaître des recours contre les décisions concernant le statut et les rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel de l’Etat que dans la mesure où une disposition légale, réglementaire ou statutaire le prévoyait (56B al. 4 aLOJ). Quant à l'art. 56G aLOJ qui réglementait l'ancienne action pécuniaire largement utilisée pour régler le contentieux financier de la fonction publique, sa teneur a été modifiée. Tout d'abord intitulé « action contractuelle » depuis l'entrée en vigueur le 1er janvier 2009 de la modification législative du 18 septembre 2008, et réservé aux prétentions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision et qui découlent d'un contrat de droit public, il est devenu depuis le 1er janvier 2011 l'art. 132 al. 3 LOJ.

Le but du législateur était de simplifier le contentieux administratif de la fonction publique. Désormais, la voie du recours à la chambre administrative est ouverte en cas de litige entre un agent public et une collectivité publique portant sur des prétentions pécuniaires, dans tous les cas où la détermination relative à celles-ci peut sans difficulté faire l'objet d'une décision ordinaire (PL 10253, ad art. 56G LOJ, p.49). La conséquence de cette modification est importante. Le fonctionnaire ne peut plus intenter une action pécuniaire pour des prétentions fondées sur les rapports de service. Il doit formuler ses prétentions auprès de l’autorité qui, selon lui, viole ses droits (art. 4A LPA). L’autorité ouvre alors une procédure qui est régie par la LPA. Après avoir instruit la cause, l’autorité concernée prend une décision sujette à recours. La juridiction administrative n'intervient plus que sur recours contre cette décision. De son côté, l'action contractuelle de l'art. 132 al. 3 LOJ n'est plus une voie de droit ouverte pour ce type de contentieux, étant désormais réservée à celui des contrats de droit public (ATA/402/2012 du 26 juin 2012 consid. 2b ; ATA/655/2011 du 18 octobre 2011 ; ATA/125/2011 du 1er mars 2011 ; ATA/458/2010 du 29 juin 2010 ; ATA/9/2010 du 12 janvier 2010 ; ATA/575/2009 du 10 novembre 2009 et les références citées).

En l'espèce, les prétentions de la commune, de même que les frais consécutifs aux procédures préalablement intentées contre Mme M______, trouvent leur fondement dans les règlements édictés par le conseil administratif de la commune relatifs aux prêts accordés à son personnel. Ces prêts ne peuvent être accordés qu'aux personnes liées par un rapport de travail avec la commune et qui se trouvent dans un rapport de droit public avec elle. De plus, on ne se trouve pas dans une situation où les prétentions de la commune pourraient faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 4 LPA.

Dès lors et conformément à l'art. 132 al. 3 LOJ, la cour de céans peut bien être saisie par la voie de l'action en reconnaissance de dette.

c. Quant à la compétence de la chambre de céans pour prononcer la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer n° ______, l'art. 79 de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP - RS 281.1) précise que le créancier peut agir par la voie de la procédure civile ou administrative pour faire reconnaître son droit et ainsi annuler l'opposition. La doctrine relève à ce propos qu'il importe peu que le juge saisi de l'action en reconnaissance de dette soit le juge ordinaire ou spécialisé (par exemple : le Tribunal des prud'hommes, le Tribunal des baux, le Tribunal de commerce), le juge pénal saisi de conclusions civiles, voire une autorité administrative - mais à l'exclusion des tribunaux arbitraux, qui peuvent connaître de l'action dite de reconnaissance de dette, mais ne peuvent pas lever l'opposition dans le dispositif de leur sentence - pourvu que la prétention déduite en poursuite, puis en justice soit une prétention de droit privé - par opposition à une prétention de droit public ou administratif - en raison de l'objet de la contestation ou de droit « civil » en raison de la survivance de la théorie du fisc (P-R. GILLIERON, Commentaire de la LP, tome 1, 1999, p. 1197).

En l'espèce, la commune, en accordant un prêt à Mme M______ pour racheter des années de cotisations auprès de la CAP, a agi comme un privé et que partant la chambre de céans, en tant que juge spécialisé, est compétente pour connaître du sort de la requête en mainlevée définitive contre l'opposition au commandement de payer n° ______.

a. Le 1er janvier 2001, le conseil administratif de la commune a édicté un règlement relatif aux prêts au personnel (le règlement 2001).

L'art 1b du règlement 2001 prévoyait, sous certaines conditions, la possibilité pour l'employé de la commune de demander à la commune un prêt pour financer un rachat d'années d'affiliation auprès de la CAP.

Aux termes de l'art. 2 du règlement 2001, lorsque les dispositions du prêt sont établies, la Ville de Lancy procède à l'établissement d'un contrat de prêt, valant comme reconnaissance de dette, dûment signé par les deux parties.

L'art. 3 du règlement 2001 prévoit que les mensualités et la durée du remboursement sont définies sur le contrat de prêt, selon accord entre les parties ; toutefois, pour un rachat d’années d’affiliation à la CAP, l'extinction du prêt doit obligatoirement intervenir avant que l'employé ait atteint l'âge de 57 ans révolus.

En cas de cessation de fonction, si l’assuré quitte l'administration communale avant que le prêt n'ait été totalement remboursé, l'employé restitue à la Ville de Lancy le solde non encore remboursé (art. 5 du règlement 2001) ; pour un rachat d’années d’affiliation à la CAP, le solde non remboursé est restitué à la commune directement par la CAP ; une fois la commune en possession du remboursement, le contrat de prêt devient caduc.

b. Ce règlement a été annulé et remplacé par le règlement 2002, qui lui-même a été annulé et remplacé par le règlement 2005. Toutefois, le règlement 2001 demeure applicable à la présente cause dans la mesure où le contrat de prêt conclu entre la commune et Mme M______ en 2001 l'a été en vertu dudit règlement. Les règlements 2001, 2002 et 2005 ne contiennent par ailleurs aucune disposition sur la question de leur applicabilité aux contrats de prêts fondés sur les précédents ou futurs règlements.

c. En l'espèce, Mme M______ a obtenu, début 2001, un prêt d'un montant de CHF 34'815,60 pour racheter des années d'affiliation auprès de la CAP (art. 1b du règlement 2001). Les rapports de travail entre la commune et Mme M______ ont pris fin le 31 décembre 2006 et à cette date, le prêt n'était pas totalement remboursé.

En application de l'art. 5 du règlement 2001, le solde dû devait être restitué à la commune directement par la CAP. Cette restitution aurait très vraisemblablement été effectuée par un jeu de compensations entre la prestation de libre passage de Mme M______ et la créance de la commune contre celle-ci. Or, cette restitution était devenue impossible, dans la mesure où Mme M______ avait procédé au transfert de sa prestation de sortie « valeur 4 juin 2006 » auprès de la fondation. Le règlement 2001 ne réglant pas cette situation particulière, la commune était en droit de réclamer le solde dû, soit CHF 9'543,50, par la voie de la poursuite, et elle dispose donc de la légitimation active. Le grief de défaut de légitimation active sera dès lors rejeté. Il en sera de même de celui tiré des vices du consentement, dans la mesure où Mme M______ a d'une part contracté librement le prêt en 2001 sur la base du règlement 2001 et d'autre part reconnu au moins par deux fois sa dette et accepté des prélèvements sur son salaire au titre de remboursement de sa dette.

Selon l'art. 79 LP, le créancier à la poursuite duquel il est fait opposition agit par la voie de la procédure civile ou administrative pour faire reconnaître son droit. Il ne peut requérir la continuation de la poursuite qu’en se fondant sur une décision exécutoire qui écarte expressément l’opposition.

La décision de reconnaissance du droit du créancier doit à la fois condamner le débiteur au paiement d'une somme d'argent et, accessoirement, lever (recte : prononcer) à due concurrence la mainlevée (A. SCHMIDT, LP - Commentaire romand, 2005, p. 327, n. 25 ad art. 79 LP).

En l'espèce, Mme M______ a reconnu le 13 mars 2001 devoir à la commune un montant de CHF 34'815,60. Elle a par ailleurs attesté par sa signature, le 8 janvier 2006, accepter le montant de CHF 20'419,90 dû au 31 décembre 2005, montant ramené à CHF 9'543,50 suite aux paiements des mensualités et suite aux diverses compensations effectuées.

Dès lors, la commune demeure créancière d'un montant de CHF 9'543,50 représentant le solde du prêt qu'elle avait octroyé à Mme M______ en 2001. Le droit doit lui être reconnu puisqu'une compensation de sa créance avec la prestation de sortie de Mme M______ est impossible ; aucun moyen de fond (nullité du contrat de prêt, vice de consentement, acte illicite, compensation ou défaut de légitimation active), ni d'exceptions propres au droit des poursuites (extinction de la dette, obtention d'un sursis, prescription) n'étant réalisés en l'espèce.

De plus, suite aux jugements du TPI des 6 mars 2009 et 15 avril 2010, la commune est également créancière d'un montant de CHF 660.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 6 mars 2009 et de CHF 800.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 15 avril 2010. Ces montants doivent de la même façon être admis, dans la mesure où ces indemnités de procédure correspondent aux dépens de la commune pour sa défense dans le cadre des différentes procédures contre Mme M______ afin de récupérer son dû.

Au vu de ce qui précède, l'action sera admise. Mme M______ sera condamnée à verser à la commune la somme de CHF 9'543,50 avec intérêts moratoires à 5 % dès le 1er janvier 2007, et non dès le 26 juin 2006 comme le soutient la commune. En effet, l'exigibilité du solde dû naît au moment de la fin des rapports de travail (art. 5 du règlement 2001), soit dès le 1er janvier 2007.

Mme M______ sera également condamnée à verser à la commune les sommes de CHF 660.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 6 mars 2009 et de CHF 800.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 15 avril 2010.

La mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer poursuite n° ______, notifié à Mme M______ le 25 avril 2012 sera prononcée, à concurrence de :

–               CHF 9'543,50, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 1er janvier 2007 ;

–               CHF 660.-, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 6 mars 2009 ;

–               CHF 800.-, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 15 avril 2010.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de Mme M______ (art. 87 al. 1 LPA). La commune a conclu à l’allocation d’une indemnité de procédure. Il ne sera pas fait droit à cette demande, dès lors que Lancy compte plus de 25'000 habitants. Elle a les moyens de disposer de son propre service juridique sans recourir à un avocat externe. Dans ces conditions, aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA ; Arrêt du Tribunal fédéral 8C_70/2010 du 20 décembre 2010 consid. 8 ; ATA/186/2011 du 22 mars 2011 ; ATA/95/2011 du 15 janvier 2011 ; ATA/294/2010 du 4 mai 2010 et les références citées).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable l'action en reconnaissance de dette du 27 août 2012 formée par la commune de Lancy à l'encontre de Madame M______ ;

au fond :

l'admet ;

condamne Madame M______ à verser à la commune de Lancy la somme de CHF 9'543,50 plus intérêts à 5 % l'an, dès le 1er janvier 2007 ;

condamne Madame M______ à verser à la commune de Lancy la somme de CHF 660.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 6 mars 2009 ;

condamne Madame M______ à verser à la commune de Lancy la somme de CHF 800.- plus intérêts à 5 % l'an, dès le 15 avril 2010 ;

prononce la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, poursuite n° ______, notifié à Madame M______ le 25 avril 2012, à concurrence de :

- CHF 9'543,50, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 1er janvier 2007 ;

- CHF 660.-, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 6 mars 2009 ;

- CHF 800.-, avec intérêts moratoires à 5 % l'an dès le 15 avril 2010 ;

met à la charge de Madame M______ un émolument de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jacques-André Schneider, avocat de la commune de Lancy ainsi qu'à Me Christian Canela, avocat de Madame M______.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Hurni, MM. Dumartheray et Verniory, juges, Mme Chirazi, juge suppléante.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :