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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/766/2014

ATA/243/2015 du 03.03.2015 ( FORMA ) , REJETE

Descripteurs : INSTRUCTION(ENSEIGNEMENT) ; ÉCOLE PRIVÉE ; FORMATION SCOLAIRE SPÉCIALE ; CONTRIBUTION AUX FRAIS D'ÉCOLE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : Cst.29.al2 ; Cst.9 ; LIJBEP.4.al4 ; LIJBEP.5 ; LIJBEP.7 ; RIJBEP.4 ; RIJBEP.5 ; RIJBEP.8 ; RIJBEP.10 ; RIJBEP.11 ; RIJBEP.12 ; RIJBEP.14 ; RIJBEP.15.al3 ; RIJBEP.19.al1 ; RIJBEP.22 ; RIJBEP.27 ; RIJBEP.33 ; LIP.4A
Résumé : La législation pertinente limite clairement l'octroi et le financement des mesures de pédagogie spécialisée aux enfants et jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés qui sont scolarisés dans une école publique ordinaire ou dans une structure d'enseignement spécialisé dûment accréditée à cet effet. En l'espèce, le recourant est scolarisé dans une école privée qui ne compte pas parmi les structures d'enseignement spécialisé de jour accréditées pour dispenser des prestations de pédagogie spécialisée. Faute d'être scolarisé dans un établissement public, il ne peut donc pas bénéficier d'une prestation d'assistance à l'intégration scolaire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/766/2014-FORMA ATA/243/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 mars 2015

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant en son nom personnel et en qualité de représentante de son enfant mineur, B______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT



EN FAIT

1) B______ est né le ______ 2009.

2) Souffrant d’une anomalie congénitale, il présente un retard de développement, notamment au niveau du langage.

3) Du mois d’août 2010 au mois de juillet 2013, il a fréquenté une crèche sise à Vernier.

4) Par décision du 4 décembre 2012, le secrétariat à la pédagogie spécialisée (ci-après : SPS) du département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP) lui a octroyé une mesure de pédagogie spécialisée consistant dans de la logopédie, pour la période allant du 20 août 2012 au 19 août 2014.

5) Par décision du 3 juillet 2013, le même service a également accepté de prendre en charge, du 15 août 2013 au 14 août 2015, les coûts liés à la psychomotricité ambulatoire que ses médecins avaient prescrite.

6) Le 26 août 2013, B______ a été scolarisé auprès d’une école privée, C______ (ci-après : C______) sis à Veyrier, pour y suivre le programme d’enseignement primaire.

7) Le 9 décembre 2013, Madame A______ a adressé au SPS un formulaire pré-imprimé de demande initiale de mesures de pédagogie spécialisée pour son fils B______.

La prestation demandée consistait dans de l’assistance à l’intégration scolaire (ci-après : AIS). Suite à un entretien avec le personnel enseignant de C______ du 25 novembre 2013, il apparaissait que B______ avait besoin d’être accompagné dans son quotidien scolaire à raison de trois heures par jour.

8) Par courrier simple du 12 décembre 2013, le SPS a adressé à Mme A______ un projet de décision consistant dans un refus de sa demande.

La prestation AIS faisait partie des mesures de pédagogie spécialisée en classes ordinaires prévues par l’art. 10 al. 4 du règlement sur l’intégration des enfants et des jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés du 21 septembre 2011 (RIJBEP - C 1 12.01). Il s’agissait d’une mesure renforcée telle que définie à l’art. 12 al. 2 du même règlement. S’agissant d’une mesure fournie dans l’établissement scolaire ordinaire, ce dernier devait être accrédité à teneur de l’art. 4 al. 4 de la loi sur l’intégration des enfants et des jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés (LIJBEP - C 1 12). Seul un tel établissement pouvait accueillir un assistant à l’intégration scolaire. L’AIS ne pouvait ainsi être octroyée que dans une école publique ou privée subventionnée, ce qui n’était pas le cas de de C______.

Mme A______ disposait d’un délai de trente jours pour faire valoir, par écrit ou oralement, ses objections contre le projet de décision, délai à l’échéance duquel une décision sujette à recours lui serait notifiée.

9) Le 28 janvier 2014, Mme A______ a contacté le SPS pour s’enquérir des suites données à sa demande. En cette occasion, un collaborateur du service lui aurait indiqué que celle-ci allait recevoir une suite favorable.

10) Par décision du 13 février 2014, le SPS a refusé la demande de prestation AIS formée par Mme A______ pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le projet de décision du 12 décembre 2013.

11) Par courrier recommandé du 21 février 2014, Mme A______ a fait part de son étonnement au SPS.

Elle n’avait jamais reçu le projet de décision du 12 décembre 2013, tandis que le 28 janvier 2014, un collaborateur du service lui avait annoncé l’acceptation de sa demande et la communication prochaine de cette décision favorable.

Ces informations contradictoires la décontenançaient et la mettaient mal à l’aise vis-à-vis de C______, dans la mesure où elle avait déjà communiqué à cette dernière la nature favorable de la décision qui lui avait été annoncée par téléphone. Elle était soucieuse que son fils puisse être accompagné dans un établissement scolaire qu’il affectionnait et dans lequel il avait accompli des progrès considérables en regard du chemin parcouru en trois ans de fréquentation de crèche.

12) Le 26 février 2014, la cheffe du SPS a répondu à Mme A______.

Elle déplorait vivement cette suite de malentendus et la priait d’en excuser le service. Le projet de décision aurait dû lui parvenir, puisqu’il lui avait été adressé le 12 décembre 2013. À réception, elle aurait pu faire valoir ses objections. Le motif de refus de la prestation demandé se fondant sur le RIJBEP, il lui aurait toutefois été difficile de le contester. Le seul argument qui permettrait au service de revenir sur sa décision tenait dans une scolarisation de B______ dans une école publique.

13) Par acte du 13 mars 2014, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 13 février 2014, concluant à son annulation et à l’octroi de la prestation AIS requise pour son fils B______.

Durant les trois ans durant lesquels B______ avait fréquenté la crèche, elle avait vécu dans un sentiment d’angoisse permanent. Au sein de cette structure, comme vraisemblablement dans d’autres, on voulait à tout prix catégoriser les enfants. Elle avait attendu avec impatience l’entrée de B______ à C______. Après six mois de recul, celui-ci avait fait des progrès considérables. Jusque-là stigmatisante, la différence de son fils était perçue par cet établissement scolaire comme complémentaire.

L’art. 5 al. 1 RIJBEP excluait le financement d’un enseignement spécialisé en école privée. Dans le cas présent, il ne s’agissait toutefois pas de dispenser un enseignement spécialisé à son fils, mais de l’accompagner afin de soutenir sa progression. Sa demande d’AIS s’inscrivait parfaitement dans le contexte décrit par l’art. 10 al. 4 RIJBEP qui mentionnait le soutien individuel à l’élève dispensé en classe ordinaire par des enseignants spécialisés ou des éducateurs sociaux ou spécialisés, par des assistants à l’intégration scolaire qualifiés, etc. Le RIJBEP était une réglementation récente qui nécessitait d’être adaptée. Dans la mesure où C______ cultivait des valeurs simples et ne faisait aucune discrimination à l’égard des enfants présentant des différences, il n’y avait pas d’obstacles à ce que cet établissement scolaire soit accrédité et à ce que des mesures de pédagogie spécialisée en classe ordinaire puissent y être dispensées.

14) Le 3 avril 2014, le DIP a conclu au rejet du recours.

L’AIS consistait dans une mesure de pédagogie spécialisée qui, selon l’art. 11 RIJBEP, ne pouvait être fournie que dans des établissements de structures de pédagogie spécialisée accrédités. C______ n’était pas accréditée au sens de l’art. 4 al. 4 LIJBEP, de sorte que le SPS avait correctement appliqué le droit en vigueur.

15) Le 9 avril 2014, la chambre administrative a imparti à la recourante un délai au 24 avril 2014 pour indiquer si elle persistait dans son recours et, cas échéant, déposer une éventuelle réplique.

Mme A______ n’a pas donné suite à cette invite.

16) Le 16 janvier 2015, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 10 al. 1 LIJBEP ; art. 41 RIJBEP ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Selon l’art. 5 al. 5 LIJBEP, le SPS statue sur les demandes et attribue les différentes prestations prévues par la loi dans le but de favoriser l’intégration des enfants et jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés (art. 1 al. 1 LIJBEP).

b. à teneur de l’art. 19 al. 1 RIJBEP, toute demande de mesure individuelle renforcée en pédagogie spécialisée est adressée au SPS par les représentants légaux ou l’élève majeur, au moyen des formules officielles mises à disposition. L’art. 22 RIJBEP dispose que les représentants légaux, le mineur capable de discernement ou l’élève majeur sont associés aux étapes de la procédure de décision. Ils ont accès au dossier et peuvent obtenir copie des pièces (al. 1). Ils peuvent s’exprimer à tout moment de la procédure oralement ou par écrit. Leur droit d’être entendu est respecté avant toute décision (al. 2). Cette disposition concrétise les exigences constitutionnelles en matière de protection du droit d’être entendu s’agissant des décisions rendues par le SPS.

c. Garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 c. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 c. 4.3 et réf. citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et les arrêts cités).

d. Il est une garantie de nature formelle dont la violation doit en principe entraîner l’annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1 p. 285 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_1/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3 ; ATA/68/2013 du 6 février 2013 consid. 3). Une réparation devant l’instance du recours est toutefois possible si celle-ci jouit du même pouvoir d’examen que l’autorité intimée (ATF 138 I 97 consid. 4.16.1 p. 103 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 s. ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 et références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; 1C_104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013 consid. 4). La réparation dépend cependant de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_63/2008 du 25 août 2008 consid. 2.1 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013 consid. 4) ; elle peut se justifier en présence d'un vice grave notamment lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 s ; 136 V 117 consid. 4.2.2.2 p. 126 s ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; ATA/321/2010 du 11 mai 2010 consid. 11). Enfin, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de la violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir eu le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/304/2013 du 14 mai 2013 consid. 4 c ; ATA/126/2013 du 26 février 2013).

3) La recourante soutient qu’elle n’a pas reçu le projet de décision du 12 décembre 2013 qui lui aurait donné l’occasion, conformément aux art. 29 al. 2 Cst. et 22 al. 2 RIJBEP, d’exercer son droit d’être entendu avant que le refus de prestation d’AIS querellé ne soit formellement rendu.

Selon la jurisprudence, s'il appartient à l'administré qui réclame ou qui recourt, d'établir qu'il l'a fait dans le respect du délai légal, le fardeau de la preuve de la notification de la décision appartient à l'administration (ATA/740/2012 du 30 octobre 2012 consid. 2). Celle-ci supporte les conséquences de l’absence de preuve, en ce sens que si la notification, ou sa date, sont contestées, et qu’il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l’envoi (ATF 136V 295 consid. 5.9 p. 295 ; 129 I 8 consid. 2.2. p. 10 ; 124 V 400 consid. 2a p. 402 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_293/2010 du 31 mai 2010 consid. 3 ; 6B_955/2008 du 17 mars 2009 ; 2C_637/2007 du 4 avril 2008 consid. 2.4 ; 9C_411/2008 du 17 septembre 2008 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral A_3390/2011 du 1er février 2012 consid. 1.3.1).

En l’espèce, seul un exemplaire de la décision du 13 février 2014 figure au dossier de l’autorité intimée avec la mention qu’il s’agit d’une copie, tandis que le projet de décision litigieux s’y retrouve en deux exemplaires, dont un seul muni de la mention précitée. Dans son courrier du 26 février 2014, comme au cours de la présente procédure, le SPS n’a pas prétendu que ce projet, vraisemblablement adressé en courrier simple, était bien parvenu à la recourante, ni n’en a apporté la preuve. Dans ces circonstances et par analogie avec les règles relatives à la notification des décisions, il convient de considérer que le projet de décision du 12 décembre 2013 n’est pas parvenu à la recourante.

Celle-ci n’a donc pas eu l’occasion de faire valoir son point de vue avant que la décision querellée ne soit rendue, en violation de son droit d’être entendu. Toutefois, il se justifie d’admettre que ce vice a été réparé au cours de la présente procédure. Dans son recours, Mme A______ a, en effet, pu développer ses arguments aussi efficacement que ce qu’elle aurait pu faire à réception du projet de décision du 12 décembre 2013. La décision de refus de prestation querellée se fonde en outre sur un pur motif de légalité que la chambre de céans est pleinement habilitée à revoir à teneur de l’art. 61 al. 1 let. a LPA. L’annulation de la décision est le renvoi de la cause au SPS ne constituerait, dans ces conditions, qu’une vaine formalité et allongerait inutilement la procédure.

4) Selon la recourante, un collaborateur du SPS lui aurait indiqué, par téléphone du 28 janvier 2014, que sa demande en mesures de pédagogie spécialisée avait reçu une suite favorable.

Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 p. 193 ; ATF 137 I 69 consid. 2.5.1 ; 131 II 627 consid. 6.1 p. 637 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_151/2012 du 5 juillet 2012 consid. 4.2.1; 2C_1023/2011du 10 mai 2012 consid. 5). Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, on doit être en présence d’une promesse concrète effectuée à l’égard d’une personne déterminée. Il faut également que l’autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (arrêts précités ; ATA/811/2012 du 27 novembre 2012 consid. 2.a ; ATA/398/2012 du 26 juin 2012 consid. 8 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, 2012, vol. 1, 3ème éd. p. 922 ss n. 6.4.1.2 et n. 6.4.2.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 196 s n. 578 s ; Georg MÜLLER/Ulrich HÄFELIN/FelixUHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 2010, 6ème éd., p. 140ss et p. 157 n. 696 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2006, vol. 2, 2ème éd., p. 546 n. 1165 ss).

En l’espèce, il n’est pas nécessaire d’investiguer la question de savoir si une information erronée a bel et bien été donnée à Mme A______ concernant le sort réservé à sa demande. En effet, la recourante ne prétend pas avoir pris des dispositions à la suite du coup de téléphone litigieux, dont la modification causerait préjudice à son fils ou elle-même, de sorte qu’elle ne pourrait pas déduire un droit de cette information, quelles que soient les circonstances dans lesquelles celle-ci lui aurait été donnée.

5) Selon l’autorité intimée, la prestation d’AIS requise par la recourante ne peut bénéficier à B______ au motif que ce dernier est scolarisé dans une école privée qui n’est pas accréditée pour dispenser ce type de mesures. À l’inverse, la recourante soutient que son fils y aurait droit, compte notamment tenu de la qualité de l’établissement scolaire en cause.

a. Les prestations de pédagogie spécialisée susceptibles de bénéficier aux enfants et jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés domiciliés dans le canton (art. 3 LIJBEP) sont énumérées à l’art. 7 al. 1 LIJBEP. Y figurent notamment les mesures de pédagogie spécialisée dans une école ordinaire ou dans une école spécialisée qui sont détaillées dans le RIJBEP (art. 7 al. 3 LIJBEP). C’est également ce règlement qui fixe les critères d’octroi des prestations prévues (5 al. 4 LIJBEP).

b. Selon l’art. 10 al. 4 RIJBEP, les mesures de pédagogie spécialisée en classe ordinaire comprennent notamment le soutien individuel à l’élève dispensé en classe ordinaire par des enseignants spécialisés ou des éducateurs sociaux ou spécialisés, ainsi que par des assistants à l’intégration scolaire qualifiés. Les enfants et les jeunes à besoin éducatifs particuliers ou handicapés qui présentent l’une des atteintes à la santé énumérées à l’art. 15 al. 3 et qui sont partiellement ou totalement intégrés en milieu scolaire ordinaire ont droit à de telles mesures à teneur de l’art. 14 RIJBEP. Les mesures de pédagogie spécialisée en classe ordinaire comptent parmi les mesures individuelles dite renforcées (art. 12 RIJBEP) qui, lorsqu’elles sont octroyées par le SPS, sont en principe financées par ce dernier (art. 33 al. 1 RIJBEP).

c. Les prestations de pédagogie spécialisée sont dispensées soit par l’office médico-pédagogique ou les Hôpitaux universitaires de Genève, soit par des structures de pédagogie spécialisée accréditées, ainsi que par des logopédistes ou des thérapeutes en psychomotricité indépendants accrédités (art. 11 RIJBEP ; art. 4 al. 4 LIJBEP). Les art. 27 à 32 RIJBEP règlent la procédure d’accréditation de ces structures et thérapeutes, accréditation dont les structures d’enseignement spécialisé de jour ou à caractère résidentiel publiques sont exemptés (art. 27 al. 1 RIJBEP), mais à laquelle sont astreints les structures d’enseignement spécialisé de jour ou à caractère résidentiel subventionnées (art. 27 al. 2 RIJBEP). Il appartient à l’office de l’enfance et de la jeunesse de procéder à cette accréditation (art. 4 RIJBEP).

6) Il n’est pas contesté que C______ ne compte pas parmi les structures d’enseignement spécialisé de jour accréditées pour dispenser l’une ou l’autre des prestations de pédagogie énumérées à l’art. 10 RIJBEP.

L’objet du présent litige consiste donc à savoir si B______ peut bénéficier d’une prestation d’AIS, financée par le SPS et dispensée par un prestataire public ou privé remplissant les exigences de l’art. 11 RIJBEP, tout en étant scolarisé dans une école privée au sens des art. 14 à 15A de la loi sur l’instruction publique du 6 novembre 1940 (LIP - C 1 10).

Les textes réglementaires et légaux excluent que tel puisse être le cas. En réservant les mesures prévues par l’art. 10 al. 4 RIJBEP aux enfants et jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés « partiellement ou totalement intégrés en milieu scolaire ordinaire », l’art. 14 RIJBEP vise incontestablement ceux qui sont scolarisés dans un établissement public. Cette interprétation est seule compatible avec l’art. 8 RIJBEP qui, sous le titre « en enseignement ordinaire », prévoit l’inscription des enfants ou jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés en âge de scolarité obligatoire ou postobligatoire « dans l’école publique ordinaire correspondant à leur secteur de recrutement » (al. 1) et règle les modalités d’intégration (totale, partielle ou non indiquée) de ces élèves « dans l’enseignement public ordinaire » (al. 3). Elle se déduit également du texte de l’art. 5 al. 1 RIJBEP, à teneur duquel le SPS est l’autorité compétente pour l’octroi des mesures individuelles renforcées en pédagogie spécialisée et pour leur financement, hormis celui de l’enseignement spécialisé dispensé en école privée non subventionnée ou à domicile.

Adoptées le 21 septembre 2011, ces dispositions réglementaires respectent la volonté du législateur qui visait à promouvoir l’intégration des enfants et des jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés au sein des écoles publiques, respectivement à confier à l’état le soin de déterminer et d’accréditer les institutions ou prestataires d’exercice public ou privé susceptibles de dispenser des mesures de pédagogie spécialisée (art. 4 al. 4 LIJBEP). Cet objectif ressort en particulier du nouvel art. 4A LIP qui a été adopté le 14 novembre 2008 en parallèle de la LIJBEP. Dans cette disposition insérée parmi les dispositions du chapitre II traitant de l’enseignement public, est en effet rappelé le principe de l’intégration des bénéficiaires de la LIJBEP au sein de ce dernier.

Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de procéder à une interprétation contra legem de la législation pertinente qui limite clairement l’octroi et le financement des mesures de pédagogie spécialisée aux enfants et jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés qui sont scolarisés dans une école publique ordinaire ou une structure d’enseignement spécialisé dûment accréditée à cet effet. Il n’appartient pas plus à la chambre administrative de se prononcer sur une éventuelle accréditation de C______ au sens des art. 28 et suivants RIJBEP, dans la mesure où cet établissement n’a pas formé une telle demande auprès de l’office de l’enfance et de la jeunesse selon la procédure prévue à cet effet, n’y fait l’objet d’une quelconque décision en la matière.

En tant qu’elle refuse l’octroi et le financement de mesures de pédagogie spécialisée à B______ au motif que celui-ci est scolarisé dans un établissement scolaire privé, non accrédité pour les dispenser, la décision du 13 février 2014 doit donc être confirmée.

 

7) En tout point mal fondé, le recours sera, en conséquence, rejeté. La procédure étant gratuite (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument ne sera mis à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 mars 2014 par Madame A______ contre la décision du département de l’instruction publique, de la culture et du sport du 13 février 2014 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______,agissant en son nom personnel et en qualité de représentante de son enfant mineur, B______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :