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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1051/2016

ATA/853/2022 du 23.08.2022 sur JTAPI/1273/2021 ( ICCIFD ) , REJETE

Recours TF déposé le 01.01.2023, rendu le 31.10.2023, REJETE, 9C_655/2022, 2C_778/2022
Recours TF déposé le 23.09.2022, rendu le 01.01.2023, SANS OBJET, 9C_655/2022, 2C_778/2022
Descripteurs : DROIT FISCAL;IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL;IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT;PROCÉDURE FISCALE;IMPÔT SUR LA FORTUNE;FORTUNE IMMOBILIÈRE;IMMEUBLE;VALEUR VÉNALE(SENS GÉNÉRAL);VALEUR FISCALE;DÉDUCTION DES INTÉRÊTS PASSIFS;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;CONSULTATION DU DOSSIER;SECRET FISCAL;DÉDUCTION DES FRAIS GÉNÉRAUX;DETTE;FARDEAU DE LA PREUVE;OBJET DU LITIGE;REFORMATIO IN PEJUS;MAXIME INQUISITOIRE;POUVOIR D'APPRÉCIATION;INTÉRÊT MORATOIRE;ÉTANCHÉITÉ
Normes : Cst.29; LPA.44; LPA.45; LIFD.110; LHID.39; LPFisc.11; LPFisc.54; LHID.14.al1; LIPP.50; aLIPP-III.7; RIPP.25; aRIPP-III.4; LIFD.33.al1.lethbis; LIPP.32; LPFisc.50; LPFisc.51; LIFD.142.al4; LPFisc.54; LIFD.145; LIPP.56; LHID.15; LHID.17.al1; aLIPP-III.4.al1; LIFD.33.al1.leta; LPGIP.12; LPGIP.14; LPGIP.20
Résumé : Aucune violation du droit d’être entendu. Conformément à la jurisprudence, aux principes, de la légalité et de l’égalité de traitement, il convient d’appliquer strictement le taux de capitalisation propre à chaque zone afin de déterminer la valeur fiscale d’immeubles locatifs n’ayant pas fait l’objet d’une vente récente. Des frais médicaux dont le caractère nécessaire n’est pas démontré et dont le coût est excessivement élevé au regard de ce qui est généralement admis, ne peuvent être déduits. Dans le cadre de la procédure de taxation, équivalent à un examen complet de la taxation, le TAPI est compétent pour procéder à une reformatio in pejus en examinant les éléments soulevés devant lui par l’AFC-GE. Les intérêts moratoires sur acomptes et les intérêts compensatoires négatifs ne peuvent être déduits des revenus des contribuables ni de leur fortune dès lors qu’ils n’étaient pas échus aux périodes concernées. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1051/2016-ICCIFD ATA/853/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 août 2022

4ème section

 

dans la cause

 

Les héritiers de feu A______ et feu B______ , soit Madame C______ et Monsieur D______
représentés par Mes Xavier Oberson et Alexandre Faltin, avocats

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 décembre 2021 (JTAPI/1273/2021)


EN FAIT

1) Au cours des années 2008 à 2010, les époux A______ et B______ et leur fils, Monsieur D______ , ont été copropriétaires, à concurrence de respectivement 40 %, 40 % et 20 %, de deux immeubles locatifs sis E______ et F______ à Genève (ci-après : les immeubles locatifs), en zone d’affectation 2.

2) D’après le registre du commerce genevois, M. D______ est administrateur-président avec signature individuelle de la société G______ SA (ci-après : G_SA), dont il détenait, au cours desdites années, un tiers du capital-actions en qualité de propriétaire et un autre tiers en qualité de nu-propriétaire, l’usufruitier de ce tiers étant son père, M. B______ . A______ détenait quant à elle le troisième tiers de ce capital-actions (constitué de 5’000 actions de CHF 1’000.- nominatives liées).

Le but social de G_SA est « acquisition, construction, exploitation et gérance d’hôtels, notamment à Genève de l’"H______ " ainsi que location, vente et cession de droits hôteliers ; acquisition, vente, exploitation et gestion de restaurants, brasseries, cafés et tea-rooms », dont six établissements à Genève.

3) Depuis l’année 2008, A______ a été hospitalisée au sein de la clinique I______ (ci-après : la clinique). Selon son site internet (https://www.genolier.net/notre-clinique), cette dernière « est l’établissement phare de Swiss Medical Network. Avec près de 120 lits et 180 médecins, il s’agit d’une des cliniques privées les plus grandes de Suisse. Elle offre des soins médicaux spécialisés et adaptés, une technologie de pointe, une équipe médicale expérimentée et des services hôteliers de premier ordre ».

4) À une date non établie, M. D______ a été désigné aux fonctions de co-curateur de sa mère.

5) Dans leurs déclarations fiscales rectifiées pour les années 2008 et 2009, et celle pour l’année 2010, les époux A______ et B______ ont notamment fait valoir en déduction de leurs revenus imposables des frais liés au handicap de A______ , pour un total de respectivement CHF 1______, CHF 2______ et CHF 3______. Au titre de fortune imposable, ils y ont notamment indiqué la valeur fiscale des immeubles locatifs, pour respectivement CHF 4______, CHF 4______ et CHF 5______, ainsi que celle des titres de G_SA, lesquels ne leur avaient apporté aucun rendement.

6) Selon le « questionnaire médical » relatif à l’état de handicap de A______ , que la clinique a rempli le 30 septembre 2010 à l’attention de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), « la durée quotidienne moyenne de l’aide nécessaire » était de « 12 à 14 heures/jour ».

7) Par courrier du 2 mars 2012, les époux A______ et B______ ont indiqué à l’AFC-GE que la capitalisation de l’état locatif des immeubles locatifs aboutissait à « une évaluation disproportionnée » de ceux-ci, compte tenu de leur « valeur réelle » et « de la charge fiscale que cela entraîn[ait] au regard de leurs revenus ». À cet égard, ils joignaient un tableau indiquant la valeur des immeubles locatifs obtenue par capitalisation de leur état locatif, celle déterminée par une expertise de la Banque cantonale de Genève (ci-après : BCGE) et la différence entre ces deux valeurs (CHF 6______ pour l’année fiscale 2008, CHF 7______ pour l’année fiscale 2009 et CHF 8______ pour l’année fiscale 2010), précisant que la valeur découlant de cette expertise avait été reportée dans leurs déclarations fiscales pour lesdites années, « afin que leurs taxations n’aboutissent pas à un résultat disproportionné ». Ils ont enfin ajouté que leur « imposition cantonale » pour les années 2009 et 2010 excéderait 60 % de leurs revenus, si les immeubles locatifs étaient évalués en capitalisant leur état locatif, et que cela serait contraire à la jurisprudence cantonale en matière d’impôts cantonal et communal (ci-après : ICC).

8) Le 24 janvier 2013, M. B______ est décédé, laissant pour seuls héritiers légaux et réservataires son épouse, A______ , et ses enfants, Madame C______ et M. D______ (ci-après : les héritiers).

9) Selon un second « questionnaire médical » relatif à l’état de handicap de A______ , rempli le 17 avril 2012 par le Docteur I______, médecin au sein de la clinique, à l’attention de l’AFC-GE, « la durée quotidienne moyenne de l’aide nécessaire » était de « 12 h d’aide au minimum ». Selon un troisième questionnaire rempli par le même médecin le 3 mars 2013, la durée de l’aide nécessaire était de « 6 à 8 heures minimum/jour ».

10) Par courrier du 29 août 2014, les héritiers ont remis à l’AFC-GE deux certificats médicaux datés des 5 et 21 août 2014 relatifs à l’état de santé de A______.

D’après le certificat médical du 5 août 2014, A______ « [était] complètement dépendante car elle présent[ait] un coma Glasgow 3 sur artériopathie cérébrale et AVC multiple avec épilepsie. La patiente ne parl[ait] pas et ne communiqu[ait] pas. Elle [était] nourrie par sonde (PEG). Elle [était] incontinente des selles et des urines. Elle [pouvait] être mise au fauteuil pendant 1 à 2 heures par jour et ceci [était] la seule mobilisation hors lit. Elle bénéfici[ait] donc de la présence d’une infirmière en permanence (24h/24) et de deux aides comme compagnie ».

Selon le certificat médical du 21 août 2014, « la patiente [ ] a[vait] besoin d’une surveillance constante neurologiquement et des soins infirmiers très spécifiques à son état. Madame J______ ne [pouvait] communiquer mais entend[ait] ce que l’on di[sait] et ce qui se pass[ait] autour d’elle, il [était] donc nécessaire d’avoir une personne proche d’elle afin qu’elle ait un contact avec le monde extérieur qui puisse la stimuler et prendre soin d’elle ».

11) Les 5 et 17 décembre 2014, l’AFC-GE a adressé aux héritiers des bordereaux se rapportant à l’imposition 2008 à 2010 de A______ et de son défunt mari, à teneur desquels elle avait admis au titre de frais liés au handicap de cette dernière CHF 9______ (2008), CHF 10______ (2009) et CHF 11______ (2010), précisant à cet égard : « Après avoir analysé avec grande attention les éléments que vous nous avez remis et en tenant compte de la situation très particulière de Mme A______ , nous sommes d’accord d’admettre le montant total à votre charge, après participation de l’assurance maladie, des frais de traitements médicaux, visites de médecins et divers soins de la clinique, à l’exception toutefois des frais liés à une garde privée permanente et à ses accessoires dans la mesure où ses frais relèvent, selon nous et même si l’expression n’est pas très heureuse en la circonstance, de la convenance personnelle ». Elle avait arrêté la valeur fiscale des immeubles locatifs à CHF 12______ pour 2008 (CHF 13______ + CHF 14______), CHF 15______ pour 2009 (CHF 16______ + CHF 17______) et CHF 18______ pour 2010 (CHF 19______ + CHF 20______), sur la base de la capitalisation de leur état locatif déclaré.

12) Le 19 décembre 2014, les héritiers ont élevé réclamation contre ces bordereaux, précisant que celle-ci portait sur le refus de l’AFC-GE d’admettre la totalité des frais médicaux liés au handicap de A______ et sur la valeur fiscale des immeubles locatifs.

Les frais de « garde privée » de cette dernière, en particulier ceux relatifs à « un lit accompagnant », n’étaient pas de la convenance personnelle, mais directement liés à sa santé. Ces frais portaient sur une infirmière et une aide infirmière qualifiées, occupées en permanence à respecter un protocole précis et détaillé de « nursing » et ayant notamment pour mission de s’assurer à tout moment que A______ ne s’étouffait pas, vu qu’elle ne pouvait plus déglutir.

Ils avaient fourni des expertises de la BCGE confirmant le résultat excessif de la capitalisation de leur état locatif. Le taux appliqué aux immeubles locatifs était celui des immeubles commerciaux en zones d’aménagement 1 et 2. Les éléments suivants confirmaient le caractère « discutable » d’une capitalisation de l’état locatif à un taux fixé « sur une base statistique uniquement », soit :

-       l’immeuble était à la limite de la zone 3, ce qui ferait passer le taux de capitalisation de 4,86 % à 6,36 % pour l’année 2010, s’il était en cette zone, et réduirait de 24 % sa valeur fiscale ;

-       l’immeuble était d’affectation mixte. Or, les taux de capitalisation appliqués étaient ceux pour des immeubles commerciaux, en application de la méthode de prépondérance laquelle n’était pas prévue par la législation dans ce domaine. Si on tenait compte des taux de capitalisation applicables à la part de logements, sa valeur fiscale serait réduite de 18 % pour 2008, 14 % pour 2009 et 23 % pour 2010 ;

-       depuis 2013, le taux de capitalisation des immeubles en zone 1 était bien inférieur au taux de ceux en zone 2. On ne pouvait pas, pour les années antérieures à l’année 2013, augmenter « artificiellement » la valeur fiscale des immeubles en zone 2, en prenant en compte le taux de capitalisation des immeubles en zone 1.

Ils produisaient en outre un certificat médical du Dr I______ du 18 décembre 2014, certifiant que la prise en charge de A______ « nécessit[ait] une infrastructure lourde avec un personnel adéquat. Ce personnel comport[ait] une infirmière et une aide infirmière qui [étaient] occupées en permanence à respecter un protocole de nursing précis et détaillé. L’absence d’une telle prise en charge signifierait un décès rapide de la patiente. Il [était] clair que dans la polypathologie que présent[ait] cette patiente, des soins continus et expérimentés [étaient] indispensables. C’est ainsi que nous avons pu garantir sa survie au cours des six dernières années. Sans ces soins attentifs, la patiente décéderait rapidement de bronchoaspirations, de surinfections pulmonaires ou autre ou de complications neurologiques. Les divers handicaps susmentionnés [devaient] être compensés par une présence permanente ».

13) Par décisions du 3 mars 2016, l’AFC-GE a rejeté la réclamation.

La valeur fiscale des immeubles locatifs était estimée conformément à la loi.

Les cliniques privées ou les hôpitaux publics avaient, en règle générale, une organisation à même de leur permettre d’assumer l’ensemble des soins que l’état de santé de leurs patients nécessitait. Bien que l’on pouvait toujours atteindre un degré supérieur, voire exceptionnel, dans l’aide que l’on souhaitait apporter à une personne très fortement atteinte dans sa santé, dans un lieu censé justement couvrir l’ensemble des besoins médicaux, ce genre de frais, qui excédaient largement la totalité de ceux « demandés au sein de la clinique », dépassaient le coût des mesures usuelles et nécessaires et se révélaient dès lors somptuaires, de telle sorte qu’ils n’étaient pas déductibles.

14) Par acte du 6 avril 2016, les héritiers ont recouru contre ces décisions auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), en concluant à leur annulation et à celle des bordereaux y relatifs.

Reprenant leurs arguments, ils ont en particulier ajouté que les frais liés au handicap de A______ , dont en particulier la « garde privée permanente et ses accessoires », étaient des frais indispensables à la protection de sa vie.

Les expertises de la BCGE relatives à la valeur des immeubles locatifs, fondées sur la valeur de gage de ces derniers, mettaient en exergue que la valeur fiscale de ces biens obtenue par capitalisation de l'état locatif n'avait « absolument plus rien à voir avec la réalité économique ». L'imposition de A______ et de feu son époux était confiscatoire, le ratio entre la charge fiscale et le revenu imposable oscillant entre 66,95 % et 75,77 %. Si les frais du handicap litigieux devaient être admis en déduction, l'impôt confiscatoire serait encore plus important.

Ils ont notamment produit une comptabilité relative aux dépenses liées au handicap de A______ , distinguant les frais de « traitements et soins » facturés par la clinique des « prestations externes (gardes privées) » et des frais pour un « lit accompagnant », facturés également par cette clinique, ainsi que de nombreuses factures y relatives.

15) Par décisions des 18 août 2016 et 9 août 2017, la cause a été suspendue d'entente entre les parties.

16) Par courrier du 31 août 2018, les héritiers ont produit un nouveau certificat médical du Docteur K______ du 23 février 2018, indiquant que la situation médicale de A______ « nécessit[ait] un plateau technique hospitalier et un personnel médical en permanence. En particulier, la présence d’une garde privée, c’est-à-dire une infirmière personnelle, [était] nécessaire 24h/24 notamment en raison de troubles de la déglutition et du risque de bronchoaspirations qui [pouvaient] nécessiter une réaction infirmière immédiate. En plus de ce facteur sécuritaire, son état de dépendance totale nécessit[ait] des soins infirmiers continus qui lui [étaient] administrés toutes les 30 à 40 minutes et ceci 24h/24 (cf. protocole quotidien des soins infirmiers). C’[était] grâce à ces soins que A______ a[vait] pu survivre au cours de ces dix dernières années. Si ceux-ci devaient être stoppés, des complications ne manqueraient pas de survenir rapidement avec des conséquences vraisemblablement fatales ».

Ils ont par ailleurs sollicité l’audition du médecin précité et du Dr I______, si le TAPI « devait avoir le moindre doute quant au bien-fondé des frais médicaux et liés au handicap ou quant à leur nécessité ».

17) L’AFC-GE a conclu à la reformatio in pejus des taxations querellées et au rejet du recours.

Les éléments ressortant du dossier ne permettaient pas de conclure que les frais de garde privée de A______ et ses accessoires, soit CHF 21______, n’excédaient pas ce qui était usuel et nécessaire. Durant la période litigieuse, la clinique avait facturé à A______ des prestations totalisant CHF 22______. Elle avait admis en déduction l’intégralité de cette somme. Dans un lieu censé couvrir l’ensemble des besoins médicaux, les frais se révélaient somptuaires. Les certificats médicaux et autres documents produits ne démontraient pas que la clinique n’était pas en mesure de prendre en charge la totalité du séjour et des traitements de A______ . La loi fiscale posait des limites à la participation de l’État aux dépenses liées à un handicap lorsqu’elles étaient engagées par souci de confort personnel ou excessivement élevées. De telles dépenses ne devaient pas être prises en charge par les autres contribuables. La règle relative à la déduction forfaitaire pour ce genre de frais, bien qu’elle ne s’appliquait pas en l’espèce, mettait en évidence que les montants requis en déduction par les héritiers étaient extrêmement élevés.

Une expertise privée ne pouvait aboutir qu’à une estimation. Il convenait donc de s’en tenir à la méthode prévue par le législateur genevois, basée sur la capitalisation du rendement locatif et conforme au droit fédéral.

Concernant la reformatio in pejus requise, il résultait d’un rapport de la division des affaires pénales et enquêtes de l’administration fédérale des contributions (ci-après : la DAPE) du 15 juin 2018, produit « sous secret fiscal », que G_SA avait octroyé des prestations appréciables en argent à feu M. B______ , ce qui avait ainsi diminué la valeur fiscale des titres de cette société. M. D______ avait reconnu tous les faits de ce rapport et les éléments objectifs et subjectifs d’une soustraction fiscale étaient réalisés au niveau de cette société. Dès lors, elle concluait à ce que ces montants non déclarés soient intégrés dans les taxations litigieuses, relevant qu’à la suite de ladite enquête de la DAPE, ces prestations appréciables en argent avaient été ajoutées au bénéfice imposable de G_SA, de sorte que la valeur des titres de celle-ci avait également été rectifiée.

Les calculs des contribuables concernant une imposition confiscatoire ne tenaient pas compte de l'augmentation importante du revenu et de la fortune en raison des reprises précitées.

18) Les héritiers ont répliqué, en sollicitant l’accès aux documents produits sous le couvert du secret fiscal, ainsi que la déduction des dettes fiscales et des intérêts de retard y relatifs des « impôts » litigieux.

La conclusion de l’AFC-GE tendant à la reformatio in pejus des taxations querellées était irrecevable. Elle excédait l’objet du litige, limité aux frais médicaux liés au handicap, à la valeur fiscale de leur part de copropriété dans les immeubles locatifs et au caractère confiscatoire de leur imposition.

Le caractère « excessivement élevé » des frais liés au handicap n’était pas en soi un motif suffisant pour nier leur déductibilité. La clinique ne proposait pas un service de garde permanente en chambre. Les certificats médicaux qu’ils avaient produits étaient clairs en ce qu’ils certifiaient que A______ décéderait rapidement sans les soins attentifs et les gardes litigieuses.

D’après la jurisprudence, la prise en considération de la valeur de rendement d’un immeuble pour déterminer la valeur fiscale de celui-ci n’avait qu’une portée subsidiaire par rapport à la valeur de marché.

L’argumentation de l’AFC-GE quant au caractère confiscatoire de leur imposition devait être écartée, puisque les suppléments qu’elle entendait ajouter à leur revenu et fortune imposables n’étaient pas inclus dans l’objet du litige.

À titre subsidiaire, si les reprises requises par l’AFC-GE devaient être examinées par le TAPI, elles ne pouvaient être admises. L’AFC-GE produisait sous le secret fiscal des estimations des titres de G_SA et deux rapports de la DAPE, sans qu’ils aient pu les consulter. Ils sollicitaient dès lors l’accès aux documents produits « sous secret fiscal » et la possibilité de s’exprimer et de proposer des contre-preuves.

Enfin, les dettes fiscales découlant des suppléments que l’AFC-GE entendait ajouter devraient, si ceux-ci étaient fondés, venir en déduction de leur fortune imposable et les intérêts de retard y relatifs être déduits tant de leur revenu que de leur fortune.

19) L’AFC-GE a dupliqué en persistant dans ses conclusions.

Les héritiers sollicitaient, de manière manifestement dilatoire, la production des pièces auxquelles ils avaient déjà eu ou pouvaient avoir accès. La production de ces pièces aurait été possible si M. D______ avait, en sa qualité de contribuable concerné ou d’administrateur de G_SA, délié l’AFC-GE du secret fiscal, ce qu’il avait refusé. La communication des pièces en question n’était pas indispensable dans la mesure où les éléments utiles à cette procédure avaient été portés à la connaissance des héritiers.

La valeur des titres de G_SA avait été calculée conformément à la circulaire applicable, compte tenu des prestations appréciables en argent ressortant de l’enquête de la DAPE et que M. D______ avait admises. Celui-ci avait collaboré au cours de cette enquête et les montants repris n’étaient ni contestés, ni contestables. Dans l’estimation de ces titres, elle avait notamment tenu compte d’une déduction forfaitaire de 30 %. Les reprises du revenu et de la fortune avaient ainsi été calculées correctement.

Les taxations litigieuses n'étant pas entrées en force, il était possible de les modifier tant à l'avantage qu'au désavantage des intéressés. Si dans le cadre de la réclamation ou de la procédure de recours, l'AFC-GE découvrait un élément ne faisant pas l'objet de la taxation, elle devait le faire valoir immédiatement, ce qui découlait également du principe de l'économie de procédure. Si elle ne faisait pas valoir un élément découvert au cours de la procédure concernant une taxation non entrée en force, elle ne remplirait plus les conditions d'ouverture d'un rappel d'impôt. Elle n'avait donc pas d'autre choix que de conclure à la reformatio in pejus au sujet des éléments non déclarés mentionnés dans sa réponse au recours.

20) Par décision incidente du 28 janvier 2020, le TAPI a rejeté la requête des contribuables tendant à la communication de pièces couvertes par le secret fiscal.

21) Par courrier du 7 février 2020, les héritiers ont relevé que pour déterminer la valeur des titres de G_SA, l’AFC-GE semblait s’être fondée sur l’évaluation des sociétés immobilières dont les loyers ou fermage dépendaient dans une large mesure du bénéfice ou du chiffre d’affaires de l’activité commerciale déployée par le locataire, ce qui avait pour conséquence que la valeur substantielle comptait double et que le taux de capitalisation était calculé selon un mode particulier. Or, tel n’était pas le cas en l’occurrence, G_SA exploitant un hôtel cinq étoiles et n’étant pas une société immobilière. Par ailleurs, il apparaissait que dans ses estimations, l’AFC-GE n’avait pas déduit de la valeur de substance de G_SA les impôts dus sur les reprises requises dans sa réponse, lesquels venaient en diminution de la valeur des titres de cette société. Ils demandaient une vérification de ces points, sur la base des pièces produites sous secret fiscal.

22) Le 7 août 2020, C______ et M. D______ ont informé le TAPI du décès de A______ le 3 avril 2020 ; ils en étaient les héritiers uniques. Leurs conseils les représentaient également dans le cadre de la succession fiscale de feu leur mère.

À la suite de leur contestation de la méthode d'évaluation des titres de G_SA, l'AFC-GE leur avait communiqué, le 4 août 2020, des nouvelles estimations datées du 26 février 2020, dont ils produisaient des copies. Il serait contradictoire que l'AFC-GE maintienne ses conclusions, alors qu'elle avait procédé ultérieurement à de nouvelles estimations. Ils invitaient le TAPI à interpeller l'AFC-GE à ce sujet. Ces estimations prenaient en compte, pour la valeur de substance de G_SA, les dettes fiscales de celle-ci. Elles ignoraient en revanche le fait que G_SA n'était pas une société immobilière, ce tant pour les taux de capitalisation que pour la pondération de la valeur de substance et de celle de rendement. Pour les taux de capitalisation, on pouvait prendre ceux indiqués par la Conférence suisse des impôts pour les sociétés commerciales.

23) Par courrier du 9 septembre 2020, l’AFC-GE a indiqué qu’après nouvelle analyse du dossier, l’estimation des actions G_SA serait opérée conformément aux principes usuels prévalant pour les sociétés commerciales, à savoir la prise en compte de la moyenne pondérée entre la valeur de rendement doublée d’une part et la valeur substantielle d’autre part. Les taux de capitalisation de sociétés commerciales, pour les périodes de taxation 2008 à 2010, s’élevaient respectivement à 6 %, 10,50 % et à 9 %, comme l’indiquaient les héritiers dans leur courrier du 7 août 2020. Elle versait à la procédure le détail de la nouvelle estimation des actions de G_SA, couvert par le secret fiscal. Il devait lui être donné acte de ce qu’elle procéderait à l’estimation des titres G_SA conformément auxdites estimations.

Elle relevait que les valeurs déterminantes y figurant étaient identiques à celles datées du 26 février 2020 que les héritiers avaient annexées à leur courrier du 7 août 2020, à l’exception du taux de capitalisation, ce qui aboutissait à une valeur totale de la société inférieure à celle résultant de l’estimation du 26 février 2020 pour les taxations litigieuses 2009 et 2010. Pour la taxation 2008, le résultat annuel moyen de l’estimation du 7 septembre 2020 et la valeur substantielle de G_SA étaient identiques à l’estimation du 26 février 2020, le total de la valeur de rendement simple étant inférieur dans cette nouvelle estimation. En revanche, la différence de traitement dans la pondération de la valeur de rendement et de substance entre l’estimation du 26 février 2020 et du 7 septembre 2020 aboutissait à une valeur totale de l’entreprise supérieure à celle résultant de cette dernière estimation. Cela étant, pour les trois années litigieuses, la valeur de G_SA était néanmoins inférieure à celle qui avait été estimée le 26 février 2020.

24) a. Par jugement du 15 septembre 2020 (JTAPI/802/2020), le TAPI a partiellement admis le recours et renvoyé la cause à l’AFC-GE pour nouvelles taxations dans le sens des considérants.

b. Par arrêt du 13 avril 2021 (ATA/410/2021), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a admis partiellement le recours des héritiers du 22 octobre 2020 et renvoyé la cause au TAPI pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Le TAPI avait statué avant que les héritiers aient le temps d’exercer leur droit à la réplique spontanée, ce qu’ils avaient fait par courrier du 16 septembre 2020. Le TAPI ne s’était pas non plus prononcé sur l’accès des héritiers aux nouvelles pièces produites le 9 septembre 2020 « sous secret fiscal ». Leur droit d’être entendus avait été violé.

25) Le 5 août 2021, les héritiers, invités à se déterminer sur les observations du 9 septembre 2020 de l’AFC-GE, ont conclu à la remise des nouvelles estimations de G_SA, ou à ce que leur contenu essentiel leur soit communiqué, en réservant leurs droits.

Il était incompatible avec le droit d’accès au dossier des parties que l’AFC-GE requière qu’il lui soit donné acte de procéder à l’estimation des titres G_SA conformément à des nouvelles évaluations de G_SA « sous secret fiscal », alors que le contenu essentiel de ces estimations ne leur avait pas été communiqué, en particulier le montant que l’AFC-GE entendait ajouter à la fortune imposable (valeur fiscale par action) et que l’occasion de s’exprimer à ce sujet ne leur avait pas été donnée.

Dans ce contexte, tout impôt anticipé (ci-après : IA) payé par G_SA au titre des prestations appréciables en argent alléguées en faveur de feu M. B______ devrait être mis à la charge de ce dernier en tant que bénéficiaire. En effet, l’IA n’était pas remboursable en l’espèce, feu M. B______ n’ayant pas déclaré les prestations appréciables en argent. Dès lors, ce montant étant dû, il devait être déduit de la fortune imposable. Alternativement, cet IA payé par G_SA devait aussi conduire à une réduction de la valorisation des parts de G_SA, diminuant d’autant leur fortune imposable. En tout état, les intérêts de retard sur l’IA devaient être portés en déduction de la valeur des actions.

Ils réitéraient leur demande d’audition de deux médecins.

26) Le 27 septembre 2021, l’AFC-GE a indiqué que sa communication « sous secret fiscal » du 9 septembre 2020 découlait de la décision du TAPI du 20 juin 2019. Elle produisait les lettres au conseil d’administration de G_SA au sujet de l’estimation des titres en cause. Les griefs portant sur l’IA en lien avec les prestations appréciables en argent n’avaient pas été formulés dans le recours auprès de la chambre administrative, alors même que les héritiers, qui connaissaient le détail des estimations G_SA du 26 février 2020, ne les avaient critiquées qu’au regard du taux de capitalisation.

27) Le 11 octobre 2021, les héritiers en ont pris acte. La question de la valorisation des actions G_SA n’était que subsidiaire par rapport à leur principale position. Néanmoins, ils invitaient le TAPI à revenir sur la position prise dans son jugement du 15 septembre 2020.

En faisant valoir que leur argumentation concernant l’IA relevait de griefs nouveaux, l’AFC-GE ne tenait pas compte de la maxime inquisitoire ni de celle d’application du droit d’office.

28) Par jugement du 13 décembre 2021, le TAPI a admis partiellement le recours, en renvoyant le dossier à l'AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation dans le sens des considérants.

La question de la recevabilité de la conclusion formée par les héritiers le 5 août 2021, tendant à une déduction sur la fortune liée à l’IA, pouvait rester indécise compte tenu du pouvoir d’appréciation du TAPI dans le cadre de la procédure de recours et de l’application du droit d’office.

Une suspension de la procédure ne s’imposait pas en raison du décès de feu A______ le 3 avril 2020.

Il n’était pas donné droit à la demande d’audition des Drs K______ et I______. En outre, les héritiers avaient obtenu le contenu essentiel (montant par actions) des pièces produites par l’AFC-GE le 9 septembre 2020, sous le secret fiscal, de sorte qu’il n’y avait pas lieu d’examiner ce point plus avant.

Le système prévu par le droit cantonal genevois pour évaluer les immeubles locatifs – appliqué aux héritiers – n’était pas en lui-même arbitraire ou non conforme à la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14). Il n’apparaissait pas que les immeubles locatifs en cause avaient fait l’objet d’une vente récente établissant leur valeur vénale. L’expertise produite par les héritiers n’était pas suffisante et déterminante pour l’établir. Les taux de capitalisation présentaient un caractère schématique, qui ne pouvait tenir compte de toutes les spécificités du cas d’espèce. Il convenait d’appliquer strictement le taux de capitalisation propre à chaque zone pour des questions d’égalité de traitement. L’état locatif déclaré par les héritiers devait ainsi être capitalisé au taux prévu par la loi. Les héritiers ne prétendaient pas que
l’AFC-GE n’aurait pas appliqué correctement ces taux, ni qu’elle aurait mal calculé les valeurs fiscales.

Le TAPI était habilité à procéder lui-même à une nouvelle taxation, nonobstant les conclusions des parties à cet égard. Il lui incombait de procéder à une reformatio in pejus, même en cas de retrait du recours, dès lors qu’il s’agissait de décisions de taxation « manifestement incompatibles avec les dispositions applicables » et que leur correction revêtait « une importance notable », au vu des montants des impôts à reprendre. Cette approche était conforme au principe de l’économie de procédure. Les solutions retenues par la jurisprudence citée par les héritiers n’étaient pas transposables in casu, notamment en raison du fait que celle-ci concernait une procédure en rappel d’impôt et non pas une procédure de taxation non entrée en force.

La valeur de rendement des titres de G_SA retenue par l’AFC-GE devait être confirmée, puisqu’elle était conforme à la circulaire applicable et correspondait à celle articulée par les héritiers. Les valeurs substantielles figurant dans les estimations du 9 septembre 2020 devaient également être validées, étant donné qu’elles étaient identiques à celles figurant dans les évaluations du 26 février 2020, que les héritiers avaient approuvées. La valeur de la participation dans G_SA devait ainsi être fixée conformément aux estimations du 9 septembre 2020. Les héritiers ne contestant pas les reprises sur le revenu – ni dans leur principe ni dans leur quotité –, celles concernées par la reformtio in peius étaient validées.

Les héritiers n’avaient pas établi que tous les frais médicaux dont ils faisaient état avaient été nécessaires et donc déductibles, alors que le caractère d’exception des déductions à l’impôt entraînait une interprétation restrictive de la nature et de l’étendue de celles-ci. Les montant que l’AFC-GE avait retenus à titre de frais de handicap déductibles étaient confirmés.

Le remboursement de l’IA était exclu. Les dettes effectives liées à l’IA étaient déductibles, mais ne pouvaient conduire à une réduction de la valorisation des parts de G_SA.

Vu les reprises sur le revenu et la fortune concernées par la reformatio in pejus et les déductions à effectuer compte tenu des dettes liées à l’IA, il n’était pas possible de déterminer, à ce stade de la procédure, s’il s’agissait ou non d’une imposition confiscatoire. Il appartiendrait à l’AFC-GE d’examiner cette question lors de l’établissement des bordereaux rectificatifs.

29) Par acte du 18 janvier 2022, les héritiers ont recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, en concluant à son annulation, à la fixation de la valeur fiscale des immeubles locatifs à CHF 4______ pour les périodes fiscales 2008 et 2009 et à CHF 5______ pour la période fiscale 2010, à la déduction des frais médicaux et/ou liés à un handicap de feu A______ , ainsi qu’au renvoi de la cause à l’AFC-GE, respectivement au TAPI pour l’établissement de nouvelles taxations. Subsidiairement, ils sollicitaient l’audition des Drs I______ et K______.

La valeur fiscale reportée dans leurs déclarations fiscales était de CHF 4______ pour 2009, et non pas de CHF 23______. En outre, les montants indiqués comme valeur fiscale des immeubles locatifs correspondaient au 100 % et non pas au 80 % détenus par les contribuables. Quant aux valeurs fiscales des titres G_SA, le montant était de CHF 24______ pour 2008 et de CHF 25______ pour 2009.

Leur droit d’être entendu et les garanties de procédure avaient été violés par le refus d’audition et l’absence de jugement sur la déduction des dettes fiscales et intérêts de retard. Le TAPI avait renoncé aux auditions requises sur la base de « simples apparences » alors qu’une appréciation anticipée des preuves ne pouvait avoir lieu qu’en cas de conviction. Le TAPI n’avait donc pu trancher en connaissance de cause et ne disait pas si lesdites auditions étaient superflues ou non pertinentes. Les auditions des Drs I______ et K______ demeuraient toutefois nécessaires vu les considérations retenues par le TAPI pour écarter la prise en compte d’une partie des frais de handicap. Par ailleurs, le TAPI avait commis un déni de justice et une violation du droit d’être entendu en ne se prononçant pas sur la question de la déduction des dettes fiscales et intérêts de retard éventuels.

L’évaluation fiscale des immeubles locatifs était erronée. À cet égard, ils reprenaient leurs précédents développements. La valeur et la force probante des expertises qu’ils avaient produites avaient été admises. Il en ressortait une différence importante entre celles-ci et les valeurs fiscales. Le TAPI opposait au rapport d’activité de la commission d’experts pour la détermination des taux de capitalisation pour les immeubles locatifs du 30 juin 2011, le caractère schématique du taux de capitalisation, sans remettre en cause les constatations de ce document. Il en résultait que peu de transactions avaient été observées, de sorte que le taux de capitalisation de 4,86 % pour 2010 devait être considéré avec beaucoup de précaution. L’art. 50 let. a de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) démontrait que le taux de capitalisation basé sur un échantillon trop faible de transactions ne pouvait pas être appliqué tel quel, mais devait faire l’objet d’un ajustement afin que la valeur fiscale se rapproche au plus de la valeur vénale du bien immobilier. S’agissant du principe d’égalité de traitement, contrairement au TAPI, ils ne soutenaient pas qu’il faudrait appliquer schématiquement leur approche dans tous les cas.

Le TAPI ne remettait pas en cause la qualification de feu A______ en tant que personne handicapée. L’état de santé de celle-ci avant son décès impliquait qu’elle risquait de s’étouffer à tout moment en cas de nécessité de déglutir. Les mesures prises avaient permis d’assurer sa survie au cours des dernières années. Il s’agissait donc de « frais absolument vitaux ». Retenir qu’ils auraient « voulu et décidé » les soins litigieux était en contradiction avec les pièces produites. Dès lors que le TAPI retenait qu’ils n’avaient pas établi la nécessité de tous les frais, il fallait admettre a contrario que certains frais avaient été nécessaires, ce qui revenait à exclure qu’ils auraient simplement « voulu » que ces soins soient prodigués. Une aide variant entre 6h et 14h par jour était importante, d’autant plus lorsqu’elle était étalée sur 24h, rendant ainsi les frais liés au handicap concernant la garde privée permanente et indispensables à la protection de la vie de feu A______ .

La reformatio in pejus devait respecter le cadre strict de l’objet du litige tel qu’il résultait des moyens soulevés par les parties. Seul le dispositif attaqué fixait le cadre dans lequel le TAPI pouvait faire usage de sa compétence en matière d’établissement des faits. Cela impliquait pour l’administration qu’elle ne pouvait ajouter des nouveaux éléments taxables par une extension indue de l’objet du litige. La prise en compte de nouveaux éléments après le dépôt du recours au TAPI revenait à les priver de deux étapes de la procédure contentieuse, sans que le législateur n’ait prévu une telle exception. La conclusion de l’AFC-GE relative à l’intégration de nouveaux éléments taxables dans le revenu et la fortune pour les années 2008 à 2010 aurait dû être déclarée irrecevable par le TAPI, de sorte que celui-ci ne pouvait entrer en matière sur les points sortant du cadre fixé par le recours.

Subsidiairement, les déductions des dettes fiscales (fortune) et des intérêts de retard (revenu) devaient être prises en compte. Les intérêts de retard sur l’impôt anticipé devaient être portés en déduction de la valeur des actions. Les taxations devaient être modifiées en leur faveur sur les points suivants : les dettes fiscales ICC/IFD 2008, 2009 et 2010 découlant des suppléments que le fisc entendait ajouter devraient, s’ils étaient fondés, venir en déduction de la fortune imposable pour les ICC 2008, 2009 et 2010 ; les intérêts de retard que l’AFC-GE facturerait pour les années 2008, 2009 et 2010 devaient être déduits sur les nouveaux bordereaux ICC/IFD 2008, 2009 et 2010, pour le revenu et la fortune, et les intérêts de retard dus sur les années 2008 à 2010 devraient être déduits comme dette en 2010. Dites déductions devraient être calculées précisément par l’AFC-GE lors du renvoi de la cause. Le TAPI ne se prononçait pas sur le fait que les intérêts de retard sur l’impôt anticipé devaient en tout cas être portés en déduction de la valeur des actions.

30) L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Les recourants n’avaient formulé aucun grief contre les valeurs retenues pour évaluer G_SA en tant que société commerciale avec la prise en compte de la moyenne entre sa valeur de rendement doublée et sa valeur substantielle, de sorte qu’elles devaient être confirmées.

L’audition des médecins qui avaient établi les certificats médicaux en 2014 et 2018 – qui n’avait été sollicitée que dans un courrier au TAPI du 31 août 2018 – pour les périodes fiscales 2008 à 2010 n’apparaissait pas comme une mesure qui permettrait d’attester, avec une force probante accrue, d’éléments qui avaient déjà fait l’objet d’attestations écrites de ces mêmes personnes. Il s’agissait donc de déterminer si la part de frais non admise de CHF 26______ constituait des dépenses « excessivement élevées qui excédaient ce qui était usuel et nécessaire ». Elle avait elle-même admis la déduction de CHF 22______ pour les frais médicaux et renvoyait à la motivation du jugement entrepris à cet égard. Elle avait indiqué dans les avis de taxation accompagnant les bordereaux les raisons pour lesquelles les montants portés en déduction à ce titre dans les déclarations fiscales y relatives pour les années 2008 à 2010 n’avaient pas été admis. Dans ses précédentes écritures, elle avait également rappelé que les frais admis correspondaient à la totalité des coûts facturés par la clinique. Le refus de la déductibilité totale des frais médicaux sollicités était justifié par leur caractère « non usuel ». Les recourants avaient d’ailleurs reconnu que la déduction sollicitée ne présentait pas un caractère usuel et que le fait d’être économiquement en mesure d’assumer de tels frais n’autorisait pas que leur déduction doive impérativement être admise. Les frais sollicités n’étaient pas déductibles pour une part plus élevée que celle admise.

Le calcul des dettes fiscales serait arrêté une fois la cause jugée de manière définitive. Ce n’était qu’une fois les bordereaux émis que les recourants pourraient, s’ils le souhaitaient, les critiquer. Leur demande était donc prématurée sur ce point. Au surplus, elle était mal fondée. Les précédentes déductions avaient été prises en considération. Les intérêts qui seraient réclamés au terme de la procédure seraient des intérêts moratoires sur acomptes ou des intérêts compensatoires négatifs. Ils seraient échus à la notification du décompte final. La déduction sollicitée en matière de fortune ne pourrait être calculée qu’au moment où seraient établis les bordereaux rectificatifs et la demande de déduction d’intérêts moratoires sur acomptes ou d’intérêts compensatoires était infondée, le litige ne découlant pas d’une procédure en rappel d’impôts.

S’agissant de l’estimation fiscale des immeubles locatifs, elle voyait mal qu’il soit fait application pour les années 2008 à 2010, d’un changement de taux qui était survenu entre trois et cinq ans après les périodes concernées, sauf à violer les principes de la légalité et de l’égalité de traitement.

Le TAPI s’était effectivement prononcé sur la question des intérêts de retard sur l’impôt anticipé à porter en déduction de la valeur des actions.

Au surplus, elle renvoyait au jugement querellé.

31) Le 17 mars 2022, les recourants ont fait valoir leur droit d’accès au dossier, en sollicitant que les éléments qui ne leur avaient pas été communiqués en lien avec la réponse de l’AFC-GE, en particulier le bordereau de pièces, soient retournés à celle-ci et ne soient pas pris en considération, ou qu’au moins le contenu essentiel desdites pièces leur soit communiqué.

32) Le 24 mars 2022, la juge déléguée a confirmé aux recourants que la réponse de l’AFC-GE comportait huit pages. Les pièces produites « sous secret fiscal » étaient celles versées devant le TAPI, soit les rapports d’enquêtes de la division affaires pénales et enquêtes du 22 novembre 2017 et du 15 juin 2018, ainsi que les estimations des titres de G_SA pour les années fiscales 2008 et 2010, effectuées le 8 décembre 2017 et 7 septembre 2020. Cette dernière estimation – sur laquelle le TAPI s’était fondé – retenait une valeur fiscale brute par action de G_SA de CHF 27______ pour 2008, de CHF 28______ pour 2009 et de CHF 29______ pour 2010. Les valeurs fiscales nettes étaient de CHF 30______ pour 2008, CHF 31______ pour 2009 et de CHF 32______ pour 2010.

33) Les recourants ont répliqué, en persistant dans leurs conclusions et précédents développements.

Ils prenaient acte de la communication de la chambre administrative quant au contenu des pièces tenues secrètes.

Ils qualifiaient d’« éventuels » les dettes fiscales et intérêts de retard dont la déduction était demandée dans la mesure où si le recours devait être admis, la question de ladite déduction ne se poserait pas.

34) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 2 LPFisc ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Tout d’abord, il convient d’écarter le grief de constatation inexacte ou incomplète des faits par le TAPI, dans la mesure où la chambre de céans a retenu les faits pertinents à l’issue du présent litige dans la partie en fait exposée plus haut.

À cet égard, la valeur fiscale des immeubles locatifs indiquée par le TAPI pour l’année 2009 a été corrigée par celle indiquée dans la déclaration fiscale rectifiée du 6 février 2012, soit CHF 4______ (cf. ch. 5 en fait). De même, les valeurs fiscales des immeubles locatifs retenues par l’intimé dans les bordereaux de taxation des 5 et 17 décembre 2014 ont également été rectifiées. Ainsi, elles correspondent effectivement à une part de 80 % de la valeur fiscale totale des immeubles locatifs (cf. ch. 11 en fait).

3) Préalablement, les recourants font valoir une violation de leur droit d’être entendu, en raison du refus d’audition des Dr I______ et K______. Ils se prévalent également de leur droit d’accès au dossier, demandant que le contenu essentiel des pièces produites par l’intimée en annexe à ses écritures du 2 mars 2022, leur soit communiqué.

a. Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour le justiciable de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2). Ce droit n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3).

Il n'y a pas violation du droit à l'administration des preuves lorsque la mesure probatoire refusée est inapte à établir le fait à prouver, lorsque ce fait est sans pertinence ou lorsque, sur la base d'une appréciation non arbitraire des preuves dont elle dispose déjà, l'autorité parvient à la conclusion que les faits pertinents sont établis et que le résultat, même favorable au requérant, de la mesure probatoire sollicitée ne pourrait pas modifier sa conviction (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.3 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. Le droit de consulter le dossier est un aspect du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (ATF 132 II 485 consid. 3.2). 

Le principe de l'accès au dossier figure à l'art. 44 LPA, alors que les restrictions sont traitées à l'art. 45 LPA. Ces dispositions n'offrent pas de garantie plus étendue que l'art. 29 Cst. (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 145 n. 553 et l'arrêt cité).

L'art. 45 LPA prévoit que l'autorité peut interdire la consultation du dossier si l'intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l'exigent (al. 1). Le refus d'autoriser la consultation des pièces ne peut s'étendre qu'à celles qu'il y a lieu de garder secrètes et ne peut concerner les propres mémoires des parties, les documents qu'elles ont produits comme moyens de preuves, les décisions qui leur ont été notifiées et les procès-verbaux relatifs aux déclarations qu'elles ont faites (al. 2). Une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l'autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l'affaire et lui a donné en outre l'occasion de s'exprimer et de proposer les contre-preuves (al. 3).

c. La chambre administrative et les autorités fiscales sont soumises au secret fiscal en vertu des art. 110 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), 39 LHID et 11 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17). Des renseignements peuvent être communiqués dans la mesure où une disposition légale fédérale ou cantonale le prévoit expressément (art. 110 al. 2 LIFD ; art. 39 al. 1 LHID ; art. 12 al. 6 LPFisc). Le contribuable a le droit de consulter les pièces du dossier qu'il a produites ou signées (art. 114 al. 1 LIFD, art. 41 al. 1 LHID, art. 17 al. 1 LPFisc). Il peut prendre connaissance des autres pièces une fois les faits établis et à condition qu'aucune sauvegarde d'intérêts publics ou privés ne s'y oppose (art. 114 al. 2 LIFD, art. 41 al. 1 LHID, art. 17 al. 2 LPFisc).

En particulier, le secret fiscal est opposable à l'actionnaire d'une société, dans la mesure où celle-ci dispose de la personnalité morale et qu'elle constitue une personne tierce et distincte de l'actionnaire, en dépit de la position de celui-ci au sein de ladite société en tant que directeur ou administrateur (ATF 126 I 122 consid. 5b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_669/2008 du 8 décembre 2008 consid. 5.2 ; 2P.185/2006 du 27 novembre 2006 consid. 4.2 ; Peter LOCHER, Kommentar zum Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, III. Teil - Art. 102 -222 DBG, 2015, ad art. 110 n. 20 et 24, et ad art. 114 n. 22 et 28 s). Dans ce dernier cas, lorsqu'en raison de sa position au sein de la société, les données de celle-ci ne sont pas secrètes envers l'actionnaire, celui-ci doit cependant s'adresser à la société (art. 715a de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220) et non aux autorités fiscales (Walter FREI, Das Akteneinsichtsrecht im Zürcher Steuerrecht und das Sonderproblem der Bewertung nichtkotierter Aktien beim Minderheitsaktionär, in Zürcher Steuerpraxis Vol. 1, 1992, p. 73 ss, p. 89 s). Lorsque des documents de la société se trouvent dans le dossier fiscal de l'actionnaire, celui-ci peut en prendre connaissance seulement après une pesée des intérêts conforme à l'art. 114 al. 2 LIFD, à l'art. 41 al. 1 LHID et à la disposition cantonale pertinente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_160/2008 du 1er septembre 2008 consid. 2.4.2 ; Peter LOCHER, op. cit., ad 114 n. 29).

d. En l'espèce, les recourants sollicitent l’audition des Drs I______ et K______ pour expliquer la nature exacte des frais revendiqués en déduction et leur justification médicale. Or, le dossier comprend déjà plusieurs questionnaires et certificats médicaux concernant feu A______ , établis par lesdits médecins. Ces documents décrivent en particulier les aides nécessaires et l’état de santé de la patiente. Compte tenu de ces éléments, il n’apparaît pas que l’acte d’instruction sollicité apporterait des précisions utiles. De plus, les recourants se sont déjà déterminés par écrit à de nombreuses reprises sur ces faits, tant devant l'AFC-GE, le TAPI, que la chambre de céans. Ils ont en particulier exercé leur droit d'être entendu dans le cadre de la présente procédure au moyen de plusieurs écritures et ont pu produire les pièces qu'ils estimaient utiles. Ainsi, les auditions demandées ne sont pas de nature à apporter un éclairage utile ou nouveau aux questions à trancher.

Il ne sera dès lors pas donné suite à la requête des recourants.

Quant aux pièces remises par l’intimée « sous secret fiscal » en annexe à ses écritures du 2 mars 2022, la chambre administrative en a communiqué le contenu essentiel aux recourants par courrier du 24 mars 2022. Elle a alors précisé qu’il s’agissait de celles produites par-devant le TAPI, soit les rapports d’enquêtes de la DAPE des 22 novembre 2017 et 15 juin 2018, ainsi que les estimations des titres de G_SA pour les années fiscales 2008 et 2010, effectuées les 8 décembre 2017 et 7 septembre 2020.

Leur droit d’accès au dossier a ainsi été respecté.

4) Les recourants considèrent que le TAPI aurait commis un déni de justice formel en n’examinant pas le grief relatif à la déduction des dettes fiscales et intérêts de retard éventuels.

a. Selon la jurisprudence, l'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 136 I 6 consid. 2.1 ; ATF 117 Ia 116 consid. 3a et les références). Il en va de même lorsqu'elle restreint sa cognition à l'arbitraire alors même qu'elle dispose d'un plein pouvoir d'examen (arrêt du Tribunal fédéral 1A.25/2006 du 13 mars 2007 consid. 4.1). S'agissant d'une autorité judiciaire, le déni de justice, tel qu'il vient d'être décrit, peut constituer une violation de la garantie de l'accès au juge ancrée à l'art. 29a Cst. Cette disposition donne en effet le droit d'accès à une autorité judiciaire exerçant un pouvoir d'examen complet sur les faits et du droit (ATF 137 I 235 consid. 2.5 et consid. 2.5.2).

b. Dans l'examen des recours qui leur sont soumis, tant le TAPI que la chambre administrative disposent d'un plein pouvoir d'examen. Ils peuvent à nouveau déterminer les éléments imposables, voire, après avoir entendu le contribuable, modifier la taxation au détriment de celui-ci (art. 11 al. 1 et 54 LPFisc).

c. En l’espèce, contrairement aux allégations des recourants, le jugement entrepris traite en ses considérants 33 à 36 (p. 28s.) de la question de la déductibilité des dettes et des intérêts.

Dans le cadre de l’examen du caractère confiscatoire de l’imposition des contribuables, le TAPI a également rappelé qu’il appartiendrait à l’intimée d’examiner cette question lors de l’établissement des bordereaux rectificatifs qu’elle notifierait ultérieurement (consid. 45 p. 33).

Ainsi, l’intimée a elle-même confirmé dans ses écritures responsives par-devant la chambre de céans, que le calcul des dettes serait arrêté une fois la cause jugée de manière définitive. À cet égard, elle a rappelé que les précédentes déductions avaient été prises en considération, ce que les recourants ne contestent pas. Elle s’oppose en revanche à la déduction des intérêts de retard, point qui sera examiné dans les considérants suivants.

Les recourants reprochent donc à tort au TAPI de ne pas avoir examiné la question de la déduction des dettes fiscales et intérêt de retard éventuels. Le grief tiré du déni de justice formel doit être rejeté.

5) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI du 13 décembre 2021 confirmant les taxations 2008 à 2010 de feu les époux A______ et B______ selon les bordereaux de taxation des 5 et 17 décembre 2014.

Demeurent litigieuses les questions relatives à l’évaluation des immeubles locatifs, la déduction des frais médicaux et liés à un handicap, la détermination de l’objet du litige, la déduction des dettes fiscales de la fortune imposable et des intérêts de retard éventuels des nouveaux bordereaux de taxation ICC/IFD 2008, 2009 et 2010 pour le revenu et la fortune, ainsi que la déduction des intérêts de retard liés à l’IA de la valeur des actions de G_SA. La valeur de rendement des titres de G_SA n’est plus contestée.

6) À titre liminaire, il convient d’examiner le droit applicable, le litige concernant les périodes fiscales 2008 à 2010, soit en partie une période antérieure au 1er janvier 2010.

a. De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses (arrêt du Tribunal fédéral 2C_663/2014 du 25 avril 2015 consid. 4 ; 2C_476/2014 du 21 novembre 2014 consid. 4.1 ; ATA/191/2020 du 18 février 2020 consid. 4b ; ATA/379/2018 du 24 avril 2018 et les références citées).

b. La LIPP prévoit qu'elle s'applique dès la période fiscale 2010, les périodes antérieures étant régies par l'ancien droit (art. 72 al. 1 LIPP).

c. La présente affaire concerne l'ICC et l’IFD 2008 à 2010. Trouvent ainsi application la LHID, la LPFisc, la LIFD, entrée en vigueur le 1er janvier 1995, dans sa teneur lors des périodes fiscales en cause, ainsi que les cinq anciennes lois sur l'imposition des personnes physiques (aLIPP-I à aLIPP-V du 22 septembre 2000) pour les périodes fiscales 2008 et 2009 et la LIPP pour la période fiscale 2010.

d. Par ailleurs, la question étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme l'admet la jurisprudence (ATA/440/2020 du 30 avril 2020 consid. 3b ; ATA/1834/2019 du 17 décembre 2019 consid. 2b et la référence citée).

7) Dans un premier grief, les recourants reprochent au TAPI d’avoir confirmé une stricte application du taux de capitalisation à chaque zone d’aménagement pour le calcul de la valeur fiscale des immeubles locatifs, sans avoir pris en considération les expertises fournies.

a. L'impôt sur la fortune a pour objet l'ensemble de la fortune nette (art. 13 al. 1 LHID). La fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée (art. 14 al. 1 LHID).

b. L’art. 14 al. 1 LHID laisse une importante liberté aux cantons pour élaborer et mettre en œuvre leur réglementation, aussi bien quant au choix de la méthode de calcul applicable pour estimer la valeur vénale que pour déterminer compte tenu du caractère potestatif de l'art. 14 al. 1, 2ème phrase LHID dans quelle mesure le critère du rendement doit, le cas échéant, également être intégré dans l’estimation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_953/2019 du 14 avril 2020 consid. 4.1). Un certain schématisme est admis en la matière, pourvu que l’évaluation ne soit pas fondée sur le seul critère du rendement et qu’elle n’aboutisse pas à des résultats qui s’écartent par trop de la valeur vénale (ATF 134 II 207 consid. 3.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_874/2010 du 12 octobre 2011 consid. 3.1 ; ATA/1401/2021 du 21 décembre 2021 consid. 4a ; ATA/1728/2019 du 26 novembre 2019 consid. 3b et les références citées). Les cantons ne peuvent ainsi pas prévoir des règles d’évaluation tendant de manière générale à une sur- ou sous-estimation des immeubles, par exemple en instituant un abattement automatique de leur valeur vénale pour en déterminer la valeur fiscale, ou en fondant l’imposition sur un pourcentage de la valeur vénale (ATF 134 II 207 consid. 3.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_194/2018 du 1er octobre 2018 consid. 5.1).

La valeur vénale correspond à la valeur du marché objective d'un immeuble, à savoir la valeur qui serait vraisemblablement obtenue lors d'une aliénation dans les conditions usuelles des affaires (ATF 128 I 240 = RDAF 2003 II 219 ; 124 I 193 consid. 4b ; Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, 6ème éd., Zurich 2002, p. 235 ; Felix RICHNER/Walter FREI/ Stefan KAUFMANN, Kommentar zum harmonisierten Zürcher Steuergesetz, Zurich 1999, n. 5 ad § 39).

La valeur vénale au sens du droit fiscal ne correspond pas à une valeur que l’on peut déterminer exactement de manière mathématique mais, en règle générale, à une valeur d’estimation ou de comparaison. Dans la mesure où toute estimation, quelle que soit la méthode utilisée, aboutit à une certaine marge, variable, d’inexactitude, il est admissible de fixer la valeur déterminante pour l’impôt sur la fortune des immeubles sur la base d’estimations prudentes, schématiques, même si cela a pour conséquence que les valeurs ainsi déterminées divergent dans une certaine mesure des valeurs effectives du marché (ATF 128 I 240 consid. 3.2.2 ; ATA/1401/2021 précité consid. 4b ; ATA/394/2008 du 29 juillet 2008 consid. 4b).

c. Dans le canton de Genève, l'aLIPP-III, respectivement la LIPP, précisent que l'état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû (art. 4 al. 1 aLIPP-III et 49 al. 1 LIPP). La fortune est estimée, en général, à la valeur vénale (art. 4 al. 2 aLIPP-III et 49 al. 2 LIPP), soit la valeur attribuée à un objet sur le marché des échanges économiques, lors d’un achat ou d’une vente dans des conditions normales ; lorsque la valeur vénale d’un élément de fortune est donnée par le résultat d’une transaction ayant eu lieu sur le marché libre, elle devient la valeur fiscale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_442/2012 du 14 décembre 2012 consid. 4.4).

Les immeubles situés dans le canton sont estimés d'après l'art. 7 aLIPP-III, respectivement l'art. 50 LIPP, qui posent des principes d'évaluation différents selon le type d'immeuble considéré (immeuble locatif [let. a] ; immeuble servant exclusivement et directement à l'exploitation d'un commerce [let. b] ; immeuble servant à l'exploitation agricole et sylvicole [let. c] ; autres immeubles [let. d] ; etc.).

d. L’art. 50 LIPP établit les principes d’évaluation des immeubles situés dans le canton. La valeur des immeubles locatifs est calculée, en capitalisant l'état locatif annuel aux taux fixés chaque année par le Conseil d'État, sur proposition d'une commission d'experts, composée paritairement de représentants de l'administration fiscale et de personnes spécialement qualifiées en matière de propriétés immobilières et désignées par le département. L'état locatif annuel se détermine d'après les loyers obtenus des locaux loués et des loyers qui pourraient être obtenus de ceux susceptibles d'être loués, y compris ceux occupés par le propriétaire et sa famille (let. a).

En application de ces dispositions, le Conseil d'État fixe chaque année, à
l'art. 25 du règlement d'application de la LIPP du 13 janvier 2010 (RIPP - D 3 08.01), le taux de capitalisation applicable sur la base des transactions constatées sur le marché immobilier entre le 1er janvier de l'année précédant l'année fiscale et le 30 juin de l'année fiscale. Cette formulation correspond à celle de l’art. 3 al. 1 aRIPP-III.

Selon l’art. 4 aRIPP-III, pour l'année fiscale 2008, les taux de capitalisation des immeubles locatifs sont les suivants : 4,96 % pour les immeubles de logements dont l'âge est inférieur à 20 ans au 31 décembre ou à la fin de l'assujettissement (let. a) ; 6,75 % pour les immeubles de logements dont l'âge est égal ou supérieur à 20 ans au 31 décembre ou à la fin de l'assujettissement (let. b) ; 7,00 % pour les immeubles HBM, HLM, HCM, et HM (let. c) ; 5,56 % pour les immeubles commerciaux et autres immeubles locatifs (let. d). Pour l’année fiscale 2009, les taux de capitalisation des immeubles locatifs sont les suivants : 4,96 % pour les immeubles de logements dont l’âge est inférieur à 20 ans au 31 décembre ou à la fin de l’assujettissement (let. a) ; 6,37 % pour les immeubles de logements dont l’âge est égal ou supérieur à 20 ans au 31 décembre ou à la fin de l’assujettissement (let. b) ; 7,00 % pour les immeubles HBM, HLM, HCM, et HM (let. c) ; 5,46 % pour les immeubles commerciaux et autres immeubles locatifs (let. d).

L'art. 25 al. 3 RIPP mentionne les taux de capitalisation applicables en distinguant les immeubles de logements dont l'âge est inférieur à vingt ans, les immeubles de logements dont l'âge est égal ou supérieur à vingt ans, les immeubles HBM, HLM, HCM et HM, les immeubles commerciaux et autres immeubles locatifs situés dans les zones d'affectation du sol 1 et 2, et les immeubles commerciaux et autres immeubles locatifs situés dans les autres zones. Les zones 1 et 2 comprennent les quartiers de la ville qui se trouvent dans les limites des anciennes fortifications ainsi que les quartiers édifiés sur le territoire des anciennes fortifications et des quartiers nettement urbains qui leur sont contigus (art. 19 al. 1 let. a et b de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - LaLAT - L 1 30).

e. Le Tribunal fédéral a jugé que l'évaluation des immeubles locatifs sis dans le canton de Genève sur la base du critère de capitalisation de l'état locatif annuel au taux fixé par une commission d'experts était conforme aux exigences posées par l'art. 14 LHID (ATF 134 II 2017 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_194/2018 précité consid. 5.3 ; 2C_442/2012 précité consid. 4.4 ; 2C_316/2010 du 29 juillet 2010 et 2C_820/2008 du 23 avril 2009).

Il a considéré que la règle spécifique prévue par le droit genevois pour évaluer les immeubles locatifs s'insère dans le cadre défini largement par l'art. 14 al. 1 LHID ; le principe de la capitalisation de l'état locatif inscrit à l'art. 50 let. a LIPP renvoie à la valeur de rendement, tandis que la prise en considération, pour déterminer le taux de capitalisation applicable, des transactions constatées sur le marché ou, pour les immeubles de logements, de l'âge de ces derniers (art. 50 let. a LIPP en lien avec l'art. 25 al. 1 et 3 RIPP), se réfère à des critères qui relèvent plus particulièrement de la valeur vénale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_820/2008 précité consid. 3.3). Le taux de capitalisation des immeubles locatifs au sens de l'art. 50 let. a LIPP est ainsi calculé non pas de manière abstraite, mais en fonction des transactions réalisées durant une période donnée (ATF 134 II 207 consid. 3.8 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_442/2012 précité consid. 4.4 ; 2C_316/2010 précité consid. 3.3 ; 2C_820/2008 précité consid. 3.3 et 5.2 ; ATA/1834/2019 du 17 décembre 2019 consid. 12a ; ATA/1728/2019 du 26 novembre 2019 consid. 5d).

La fixation schématique de la valeur vénale et les règles pour l’élaboration desquelles les cantons disposent d’une large marge de manœuvre, notamment en ce qui concerne la prise en considération de la valeur de rendement, n’ont cependant qu’une portée subsidiaire. Elles trouvent seulement application pour fixer la valeur vénale d’un immeuble qui n’a pas fait l’objet d’une vente récente. En effet, en raison du principe de droits fédéral et cantonal selon lequel la fortune est estimée à la valeur vénale soit la valeur attribuée à un objet sur le marché des échanges économiques, lors d'un achat ou d'une vente dans des conditions normales, lorsque la valeur vénale d'un élément de fortune est donnée par le résultat d'une transaction ayant eu lieu sur le marché libre, elle devient la valeur fiscale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_442/2012 précité consid. 4.4 ; 2C_316/2010 précité consid. 3.3 ; ATA/670/2014 précité consid. 6b).

En revanche, à la différence d'une vente effectivement réalisée, une expertise même effectuée par un cabinet de conseils immobiliers renommé ne peut aboutir qu'à une estimation, laquelle comporte inévitablement des éléments d'appréciation. Dans ces circonstances, lorsque le prix établi par l'expertise diverge de la valeur fiscale, on ne saurait en déduire d'emblée que cette dernière est arbitraire (arrêts du Tribunal fédéral 2C_442/2012 précité consid. 5.4 ; 2C_820/2008 du 23 avril 2009 consid. 6.3 ; ATA/482/2014 du 24 juin 2014 consid. 3b et 4).

f. En l’espèce, il n’est pas contesté que les immeubles en cause n’ont pas fait l’objet d’une vente récente permettant d’établir leur valeur vénale.

Dans ce contexte, les recourants ont produit des expertises de la BCGE, dont les valeurs pour les immeubles locatifs concernés sont notablement inférieures à celles résultant du calcul effectué selon les modalités prévues par la loi. Le TAPI a écarté lesdites expertises au motif que celles-ci n’étaient pas suffisantes et déterminantes pour établir la valeur vénale. Ainsi, contrairement aux allégations des recourants, les expertises n’ont pas été écartées au seul motif qu’elles avaient été produites par une partie. À cela s’ajoute qu’elles n’établissent pas qu’en cas de vente de leurs immeubles locatifs, ces valeurs vénales seraient appliquées. Conformément à la jurisprudence susrappelée, le seul fait que les valeurs vénales estimées par l’expertise produite divergent des valeurs fiscales retenues, ne saurait indiquer d’emblée que ces dernières sont arbitraires.

Les recourants estiment que les expertises de la BCGE, corroborées par le rapport d’activité de la commission d’experts pour la détermination des taux de capitalisation pour les immeubles locatifs du 30 juin 2011, démontreraient une surévaluation de la valeur vénale des immeubles locatifs en raison de l’application du taux de capitalisation. Toutefois, cette approche ne prend pas en considération le fait que ce mode de calcul a effectivement été validé par le Tribunal fédéral, de jurisprudence constante. En outre, tant l’art. 25 RIPP que l’art. 3 al. 1 aRIPP-III prévoient une adaptation du taux de capitalisation applicable sur la base des transactions constatées sur le marché immobilier entre le 1er janvier de l’année précédant l’année fiscale et le 30 juin de l’année fiscale. Ainsi, pour les années 2008 à 2010, le taux de capitalisation applicable aux immeubles locatifs a fait l’objet de variations. À teneur de la loi, l’adaptation annuelle de ces taux de capitalisation résulte de surcroît de la proposition d’une commission d’experts, composée de spécialistes en la matière, à laquelle les recourants se réfèrent en invoquant le rapport d’activité précité. Ce dernier fait d’ailleurs état d’une modification des taux pour l’avenir et non pas rétroactive. En ces circonstances, c’est à juste titre que le TAPI a retenu que, conformément aux principes de la légalité et de l’égalité de traitement, il convenait d’appliquer strictement le taux de capitalisation propre à chaque zone. En effet, évaluer un immeuble en fonction de sa situation précise ou de ses caractéristiques spécifiques reviendrait à contourner le système élaboré par le législateur à cette fin.

Cela étant dit, les recourants ne contestent pas que les taux de capitalisation appliqués in casu par l’intimée, tels qu’ils ressortent des dispositions légales y relatives, seraient erronés.

Par ailleurs, les recourants prétendent à tort que des valeurs fiscales équivalant à 100 % de la valeur des immeubles locatifs auraient été prises en considération, alors que la part de copropriété des contribuables est de 80 %. En effet, il ressort des bordereaux de taxation des 5 et 17 décembre 2014 que la somme des valeurs fiscales des immeubles locatifs mentionnées, soit CHF 12______ pour 2008, CHF 15______ pour 2009 et CHF 18______ pour 2010, correspond bien à 80 % de la valeur totale desdits biens. Ce sont d’ailleurs les chiffres indiqués par les contribuables dans leurs déclarations fiscales – y compris celles rectifiées – à titre de loyers encaissés, que l’intimée a pris en considération dans le cadre de leur imposition, tel que cela ressort des bordereaux précités. Les montants inscrits par les contribuables comme charges et frais d’entretien des immeubles locatifs ont également été repris par l’intimée pour 2008 et augmentés pour les années 2009 et 2010.

Au vu de ce qui précède, ce grief sera écarté.

8) Dans un deuxième grief, les recourants invoquent la déduction de la totalité des frais médicaux et liés à un handicap, ceux-ci ayant été justifiés par l’état de santé de feu A______ .

a. Selon l'art. 33 al. 1 let. h bis LIFD (dans sa teneur lors des périodes fiscales en cause), le contribuable peut défalquer de son revenu les frais liés à son handicap ou de celui d'une personne à l'entretien de laquelle il subvient, lorsque le contribuable ou cette personne est handicapé au sens de la loi fédérale sur l'élimination des inégalités frappant les personnes handicapées du 13 décembre 2002 (Loi sur l'égalité pour les handicapés, LHand - RS 151.3) et que le contribuable supporte lui-même les frais.

En matière d’ICC, sont également déduits du revenu « les frais provoqués par la maladie, les accidents ou l'invalidité du contribuable ou d'une personne à sa charge, lorsque le contribuable supporte lui-même ces frais et que ceux-ci excèdent 1 % des revenus imposables diminués des déductions prévues aux art. 2 à 8 de la présente loi » (art. 4 al. 2 aLIPP-V). L'art. 32 let. c LIPP a quant à lui une teneur identique à celle de l'art. l'art. 33 al. 1 let. h bis LIFD.

b. L'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a édicté une circulaire n° 11 du 31 août 2005 (ci-après : la circulaire n° 11) sur la déductibilité des frais de maladie et d'accident et des frais liés à un handicap.

D'après la jurisprudence, afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales, l'administration peut expliciter l'interprétation qu'elle leur donne dans des directives. Celles-ci n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce
(ATF 145 II 2 consid. 4.3). Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_522/2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3 ; ATA/829/2019 du 25 avril 2019 consid. 6a).

c. Une personne handicapée est une personne qui souffre d’une déficience corporelle, mentale ou psychique présumée durable, de sorte qu’elle ne peut pas ou a des difficultés à accomplir les actes de la vie quotidienne, à entretenir des contacts sociaux, à se mouvoir, à se former, à se perfectionner ou à exercer une activité professionnelle. La déficience est durable lorsqu’elle empêche ou gêne depuis au moins un an l’exercice desdites activités ou qu’elle les empêchera ou les gênera vraisemblablement pendant au moins un an. L’entrave aux actes de la vie quotidienne, à la vie sociale, à la formation, au perfectionnement et à l’activité professionnelle doit être provoquée par la déficience corporelle, mentale ou psychique elle-même (lien de cause à effet). Les personnes résidant en institution et les patients qui bénéficient de soins à domicile nécessitant des soins et une prise en charge d’au moins 60 minutes par jour sont toujours considérées comme handicapées (circulaire n° 11, n° 4.1 p. 6 s.).

d. Les frais sont liés à un handicap lorsqu’ils sont occasionnés (lien de cause à effet) par un handicap tel que le définit le chiffre 4.1 ci-dessus et qu’ils ne constituent ni des frais d’entretien courant, ni des dépenses somptuaires. Les frais d’entretien courant sont les dépenses servant à satisfaire les besoins individuels, parmi lesquelles figurent les frais usuels d’alimentation, d’habillement, de logement, de soins corporels, de loisirs et de divertissements. Les dépenses engagées par simple souci de confort personnel ou excessivement élevées qui excèdent ce qui est usuel et nécessaire (dépenses somptuaires telles l’achat d’un fauteuil roulant de course ou l’aménagement d’une piscine) ne sont pas déductibles (circulaire n° 11, n° 4.2 p. 7).

Les frais liés à un handicap comprennent en particulier les frais d’assistance, ainsi que ceux de séjour en institution et de séjour de placement temporaire.

Pour autant que les frais d’assistance soient occasionnés par le handicap, les frais des soins ambulatoires (soins infirmiers et soins de base), d’assistance et d’accompagnement destinés à faciliter les actes de la vie quotidienne, l’entretien de contacts sociaux satisfaisants, le déplacement, la formation et le perfectionnement ainsi que les frais de surveillance sont déductibles indépendamment de la personne qui fournit ces prestations (services d’aide et de soins à domicile, aides-soignants privés, assistants, services d’assistance, etc. ; circulaire n° 11, n° 4.3.1 p. 8).

Les frais, taxes et émoluments de séjour dans un home pour personnes handicapées ou dans un établissement médico-social sont déductibles. Il en va de même des frais de séjour pour placement temporaire dans de tels établissements ou dans des centres de vacances pour handicapés. Le total de ces frais doit toutefois être minoré du montant correspondant aux frais d’entretien courant qu’aurait dépensés la personne à son domicile. Ces frais d’entretien courant se calculent soit d’après les directives de calcul du minimum vital au sens de l’art. 93 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1), soit selon les directives cantonales correspondantes. Les frais d’un séjour dans un home pour personnes âgées ne sont pas déductibles au titre de frais liés à un handicap si le handicap ne justifie pas ce séjour (circulaire n° 11, n° 4.3.4 p. 8).

e. La déduction au sens de l’art. 33 al. 1 let. h bis LIFD n’est possible que pour les dépenses effectives et à charge du contribuable, soit non assumées par les assurances, privées ou sociales. Aucun palier n’est posé à la déductibilité de ces dépenses (Yves NOËL/Bastion VERREY in Danielle YERSIN/Yves NOËL [éd.], Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2ème éd., 2017, n. 88 ad art. 33 LIFD).

À la place des frais qu'elles ont effectivement supportés, les personnes handicapées peuvent prétendre à une déduction forfaitaire annuelle de CHF 2'500.- , CHF 5'000.- ou CHF 7'500.-, suivant que leur impotence est faible, moyenne ou grave (circulaire n° 11, ch. 4.4 p. 8).

f. En matière fiscale, il appartient à l'autorité de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d'impôts. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve, ces règles s'appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5 ; ATA/1239/2021 du 1 novembre 2021 consid. 5a ; ATA/1223/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3c).

Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale apportent suffisamment d'indices révélant l'existence d'éléments imposables, il appartient à nouveau au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations et de supporter le fardeau de la preuve du fait qui justifie son exonération (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2021 du 29 juillet 2021 consid. 3.2).

g. En l’occurrence, il n’est pas contesté que feu A______ se trouvait dans un état de santé très critique. La qualification de feu A______ en tant que personne handicapée a été admise. Seule demeure litigieuse la question de la déductibilité de la totalité des frais médicaux avancés.

En tant que frais médicaux déductibles, l’intimée a admis une somme de CHF 22______ sur un montant total de CHF 33______. Cette part correspond à la totalité des coûts facturés par la clinique, laquelle devait couvrir l’ensemble des besoins médicaux de feu A______ . Cette dernière pouvait bénéficier d’une aide privée, dont les frais auraient été déductibles, dans son propre logement. La part de frais non admise de CHF 26______ constituait des dépenses excessivement élevées, excédant ce qui était usuel et nécessaire au sens du chiffre 4.2 de la circulaire n° 11.

Contrairement aux allégations des recourants, le fait que l’intimée ait eu l’élégance d’indiquer qu’il n’était pas « très heureux » de considérer les frais litigieux comme étant de « convenance personnelle », n’implique pas une reconnaissance de leur caractère nécessaire. Ce n’est d’ailleurs pas cet aspect qui est remis en cause. En effet, il n’est pas nié que l’état de santé de feu A______ impliquait un suivi médical adapté. En revanche, il est considéré que la nécessité de faire appel à une aide privée, en plus des prestations à disposition au sein de la clinique qui offre une surveillance continue, n’est pas démontrée. De plus, les coûts de surveillance dépassent celui des mesures usuelles et nécessaires, et apparaissent somptuaires.

Les recourants prétendent également à tort que le TAPI se serait limité à quelques extraits choisis des questionnaires et certificats médicaux remis. Sur la base de ceux-ci, les premiers juges ont constaté des contradictions dans la durée de la surveillance nécessaire de feu A______ durant les années 2008 à 2010, tandis qu’aucune modification de l’état de santé de celle-ci n’était mentionnée parallèlement. Les frais médicaux induits par la surveillance permanente de la patiente divergent ainsi des prescriptions, alors que les recourants n’apportent aucune précision quant au détail du déroulement de cette aide privée, ajoutée à des soins infirmiers constants. Ils n’établissent, en particulier, pas que les prestations fournies par la clinique ne couvraient pas l’ensemble des soins nécessaires à feu A______ . L’hypothèse contraire permettrait d’ailleurs de douter de l’adéquation d’une hospitalisation permanente dans ce type d’établissement médical, si les soins adaptés n’y étaient pas assurés.

Force est ainsi de constater que les recourants ne démontrent pas que la part de frais non admise de CHF 26______ correspond à des prestations nécessaires et que les coûts de celles-ci ne sont pas excessivement élevés au regard de ce qui est généralement admis. Le caractère usuel des frais médicaux non admis dont ils réclament la déduction ne peut ainsi être retenu.

9) Dans un troisième grief, les recourants estiment que la conclusion de l’intimée relative à l’intégration de nouveaux éléments taxables dans le revenu et la fortune pour les années fiscales 2008 à 2010 aurait dû être déclarée irrecevable par le TAPI.

a. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/242/2020 du 3 mars 2020 consid. 2a). N'est donc pas nouveau un chef de conclusions n'allant pas, dans son résultat, au-delà de ce qui a été sollicité auparavant ou ne demandant pas autre chose (arrêts du Tribunal fédéral 2C_77/2013 du 6 mai 2013 consid. 1.3 ; 8C_811/2012 du 4 mars 2013 consid. 4).

b. Le TAPI invite le département à se déterminer et à lui faire parvenir le dossier. Lorsque l'avis présenté par le département en réponse au recours du contribuable contient de nouveaux arguments de fait ou de droit, le TAPI invite le contribuable à s'exprimer également sur ceux-ci (art. 50 al. 1 LPFisc). Dans la procédure de recours, le TAPI a les mêmes compétences que le département dans la procédure de taxation (art. 50 al. 2 LPFisc). Le TAPI prend sa décision après instruction du recours. Il peut à nouveau déterminer tous les éléments imposables et, après avoir entendu le contribuable, il peut également modifier la taxation au désavantage de ce dernier (art. 51 al. 1 LPFisc ; ATA/1572/2017 du 5 décembre 2017 consid. 3a).

L’art. 50 al. 2 LPFisc a la même teneur que l’art. 142 al. 4 LIFD. Ces dispositions ne sont pas prévues pour la procédure de recours par-devant la chambre administrative (art. 54 LPFisc et 145 LIFD).

Si l’introduction d’une procédure de recours dépend exclusivement de la volonté des parties, la maxime de disposition cède immédiatement la place à la maxime d’office pour la suite de la procédure, et la commission de recours - soit le TAPI dans le canton de Genève - n’est notamment plus liée par les conclusions des parties. Cela n’empêche pas que l’objet litigieux de la décision attaquée reste en principe déterminant pour la suite de la procédure, dans la mesure où l’autorité de recours ne procède pas d’office à un contrôle complet de la décision de taxation (Hugo CASANOVA/Claude-Emmanuel DUBEY in Danielle YERSIN/ Yves NOËL [éd.], Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2ème éd., 2017, n. 7 ad art. 142 LIFD).

Dans la mesure où la commission de recours dispose d’un plein pouvoir d’examen, des allégations de faits et moyens de preuves nouveaux sont en principe recevables. Dans le cas particulier d’un recours dirigé contre une taxation d’office, le contribuable peut, bien que de manière limitée, également rattraper des manquements antérieurs dans l’accomplissement de ses devoirs de procédure. Quoi qu’il doive en principe le faire en procédure de réclamation déjà n’exclut pas d’éventuels compléments en procédure de recours, pour autant qu’il ait au moins déjà formulé une réclamation recevable. Dans la procédure devant une seconde instance cantonale au sens de l’art. 145 LIFD, il n’est pas contraire à l’art. 142 al. 4 LIFD de restreindre le pouvoir d’examen et de limiter le droit d’alléguer des faits nouveaux, cela vaut notamment pour la taxation d’office, mais toujours dans les limites posées par les art. 110 et 111 LTF (Hugo CASANOVA/ Claude-Emmanuel DUBEY, op. cit., n. 13 ad art. 142 LIFD).

En procédure de taxation, la maxime inquisitoire prévaut : l'autorité n'est pas liée par les éléments imposables reconnus ou déclarés par le contribuable. Si des indices paraissent mettre en doute l'exactitude de la déclaration, l'administration, après investigation, pourra s'en écarter et modifier les éléments du revenu en faveur ou en défaveur de ce dernier (ATA/686/2017 du 20 juin 2017 consid. 5c ; Peter AGNER/Beat JUNG/Gotthard STEINMANN, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2001, n. 2 ad art. 130 p. 421).

c. Le Tribunal fédéral a par ailleurs relevé que ni la LIFD, ni la LHID, ni la LPFisc ne contiennent de dispositions particulières dérogeant au principe général selon lequel l'objet de la contestation définit le contenu de la procédure. En effet, tant les art. 140 ss LIFD, qui règlent la procédure devant la première et, le cas échéant, la deuxième instance cantonale de recours, que l'art. 50 LHID, qui traite en général de la « procédure de recours », ne contiennent que les principes de la procédure en question. Quant à la LPFisc, il n'y a dans cette loi, notamment aux art. 44 à 54 LPFisc consacrés à la procédure de recours en matière fiscale, aucune règle permettant une telle dérogation. La possibilité de procéder à une reformatio in pejus, prévue expressément par l'art. 54 LPFisc, permet à l'autorité fiscale et aux autorités judiciaires d'aller au-delà des conclusions des parties et de modifier la décision au désavantage du contribuable, mais elle ne saurait pas pour autant autoriser celles-ci à dépasser le cadre strict de l'objet de la contestation. Il en va de même de la libre appréciation des faits, voire de la possibilité de tenir compte de nova (ATF 144 II 359 consid. 4.4 et les références citées ; ATA/685/2021 du 29 juin 2021 consid. 13).

Selon la jurisprudence, le rappel d'impôt n'équivaut pas à un examen complet de la taxation ordinaire et doit au contraire être restreint aux points pour lesquels les conditions légales sont cumulativement remplies, c'est-à-dire, pour l'essentiel, l'existence de faits et moyens de preuve nouveaux et une imposition insuffisante. Les nouveaux arguments que le contribuable peut faire valoir de son côté pour diminuer l'imposition dans la procédure de rappel d'impôt sont limités : le contribuable ne doit pas profiter de la procédure de rappel d'impôt pour revenir librement sur l'ensemble de la taxation ; sous réserve d'une erreur manifeste, celui-ci peut uniquement demander que la taxation soit reprise en sa faveur sur les points qui, précisément, font l'objet du rappel d'impôt. Le Tribunal fédéral a alors relevé que cela signifiait, dans l’affaire qui lui était soumise, que la déduction des frais et des charges liés aux revenus imposables du recourant, qui n'avait pas été demandée durant la procédure de taxation initiale, ne pouvait plus être exigée en procédure de rappel d'impôt (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1069/2019 du 14 avril 2020 consid. 6.2).

d. En l’espèce, les parties sont en désaccord sur l’étendue des compétences du TAPI en matière de reformatio in pejus dans le cadre d’une procédure de taxation. Selon les recourants, celle-ci serait limitée par l’objet du litige, que l’intimée ne pourrait étendre en ajoutant des nouveaux éléments taxables en cours de procédure. La prise en compte de nouveaux éléments après le dépôt du recours reviendrait à les priver de deux étapes de la procédure contentieuse pour faire valoir leur droit d’être entendu.

Les art. 50 al. 1 et 51 al. 1 LPFisc prévoient expressément la compétence pour le TAPI d’examiner complètement la taxation en cause, y compris en tenant compte des nouveaux éléments de fait ou de droit présentés par l’intimée, en prévoyant la nécessité pour les recourants de pouvoir s’exprimer à cet égard.

In casu, dès ses écritures responsives du 30 novembre 2018 par-devant le TAPI, l’intimée a sollicité la reformatio in pejus des taxations querellées, en intégrant les reprises au titre de prestations appréciables en argent versées à feu M. B______. Dite demande était fondée sur le rapport de la DAPE du 15 juin 2018. Ces éléments ont été soumis aux recourants, lesquels ont pu ainsi faire valoir leur point de vue à cet égard. Ce n’est donc pas le TAPI qui s’est de lui-même livré à un examen complet des taxations litigieuses. Au contraire, il a limité son pouvoir d’appréciation aux éléments soulevés par les parties, conformément aux bases légales applicables.

Contrairement à l’approche des recourants et tel que susrappelé, à la différence d’une procédure de taxation non entrée en force, une procédure en rappel d’impôt n’équivaut pas à un examen complet de la taxation.

C’est donc à bon droit que le TAPI a retenu sa compétence pour procéder à une reformatio in pejus en examinant les éléments soulevés devant lui par l’intimée. Le fait que, concrètement, par souci d’économie de procédure et compte tenu des compétences spécifiques de l’intimée en matière de taxation, le TAPI lui renvoie le dossier pour procéder à une nouvelle imposition selon ses directives, n’affecte nullement sa compétence.

Ce grief doit être rejeté, de sorte qu’il convient d’examiner la conclusion subsidiaire des recourants portant sur la déduction des dettes fiscales et intérêts de retard éventuels, ainsi que des intérêts de retard sur l’impôt anticipé à porter en déduction de la valeur des actions.

10) a. Sont déduites de la fortune brute les dettes chirographaires ou hypothécaires justifiées par titres, extraits de comptes, quittances d'intérêts ou déclaration du créancier (art. 56 al. 1 LIPP). Il ne peut être déduit que les dettes effectivement dues par le contribuable (art. 56 al. 2 1ère phr. LIPP).

Jusqu’au 31 décembre 2013, l’art. 15 al. 4 1ère phrase LHID prévoyait que l’impôt sur la fortune était calculé d’après l’état et la valeur de la fortune au début de la période fiscale ou de l’assujettissement. Depuis le 1er janvier 2014, l'art. 17 al. 1 LHID indique que la fortune imposable se détermine d'après son état à la fin de la période fiscale.

L’art. 4 al. 1 aLIPP-III prévoyait que l'état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû. L’art. 49 LIPP reprend cette formulation.

b. Les dettes fiscales peuvent être déduites de la fortune brute même si elles ne sont pas encore chiffrées à la date déterminante ; elles sont dues en vertu de la loi (Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, 6ème éd., 2002, p. 240 ; Archives 12 p. 396, 397 ; Archives 23 p. 101 consid. 2). Les dettes prescrites, simplement possibles, futures ou correspondant à des expectatives ne sont en principe pas déductibles. Selon le principe de périodicité, la cause juridique et fait générateur de la dette doivent être réalisés au moment déterminant pour l'imposition de la fortune. En revanche, l'échéance de la dette ne constitue pas une condition à la déductibilité de celle-ci (ATF 138 II 311 consid. 3.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2014 précité consid. 3.1).

c. En matière d'IFD, le revenu net se calcule en défalquant du total des revenus imposables les déductions générales et les frais mentionnés aux art. 26 à 33a LIFD (art. 25 LIFD). Selon l'art. 33 al. 1 let. a LIFD, sont déduits du revenu les intérêts passifs privés à concurrence du rendement imposable de la fortune au sens des art. 20, 20a et 21 LIFD, augmenté d'un montant de CHF 50'000.-. La déduction d'intérêts passifs suppose l'existence d'une dette pécuniaire ; ce n'est que si une relation existe entre les intérêts et la dette qu'il peut être question d'intérêts passifs (ATF 143 II 396 consid. 2.1 et les références citées).

En droit cantonal, l'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus, prestations et avantages du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques, en espèces ou en nature et quelle qu'en soit l'origine, avant déductions (art. 1 aLIPP-IV et 17 LIPP). Le revenu net se calcule en défalquant du total des revenus bruts les déductions générales et les frais mentionnés aux art. 2 à 8 aLIPP-V et 29 à 37 LIPP (art. 1 aLIPP-V et 28 LIPP). Sont déductibles les intérêts des dettes échus pendant la période déterminante à concurrence du rendement de la fortune augmentée de CHF 50'000.-, à l'exclusion des intérêts des prêts qu'une société de capitaux accorde à une personne physique la touchant de près ou ayant une participation déterminante à son capital et dont les conditions diffèrent de façon importante des clauses habituellement convenues dans les relations d'affaires entre tiers (art. 6 al. 1 aLIPP-V et 34 let. a LIPP).

d. La notion d'intérêts passifs déductibles est interprétée de manière restrictive. Un intérêt passif suppose l'existence d'une dette pécuniaire. L'intérêt est la rémunération due lors de l'allocation ou de la non restitution de capital, dans la mesure où elle est régulièrement calculée en pour cent, au pro rata du temps et en quota du capital. Les intérêts de retard et les intérêts moratoires sont des intérêts déductibles (Yves NOËL, op. cit., ad art. 33 n. 7 ; Rainer ZIGERLIG/Guido JUD in Martin ZWEIFEL/Peter ATHANAS [éd.], Kommentar zum Schweizerischen Steuerrecht, I/2a - Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer [DBG], Art. 1-82, 2ème éd., 2008, ad art. 33 n. 9). Ne constituent des intérêts passifs que les prestations d'un débiteur au créancier qui n'ont pas juridiquement pour effet d'amortir une dette en capital existante (Xavier OBERSON, op. cit., p. 210, n. 341).

e. En droit cantonal, la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales du 26 juin 2008 (LPGIP - D 3 18) distingue les intérêts moratoires sur acomptes payés tardivement ou impayés en totalité ou en partie (art. 9 LPGIP), les intérêts moratoires sur le solde du décompte final (art. 20 LPGIP) et les intérêts compensatoires négatifs (art. 14 LPGIP).

Durant la période fiscale, les impôts cantonaux et communaux annuels sur le revenu et la fortune des personnes physiques sont perçus à titre provisoire, sous forme d'acomptes (art. 4 al. 1 et 5 al. 1 LPGIP). Un intérêt moratoire est perçu sur les acomptes payés tardivement ou impayés en totalité ou en partie (art. 9 al. 1 LPGIP), lequel court dès l'expiration du délai de paiement de l'acompte concerné jusqu'au paiement respectivement et au plus tard jusqu'au terme général d'échéance (art. 9 al. 3 LPGIP). Ils sont facturés au compte du contribuable lors de la notification du décompte final (art. 12 al. 2 du règlement relatif à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales - RPGIP - D 3 18.01). Le contribuable peut requérir auprès du département une modification ou une suppression de ses acomptes figurant sur la facture d'acomptes, au moyen de la formule officielle (art. 5 al. 3 LPGIP).

Aux termes de l'art. 12 LPGIP, les impôts périodiques des personnes physiques sont échus le 31 mars de l'année civile qui suit l'année fiscale (al. 1), le terme général d'échéance étant maintenu si le contribuable n'a reçu, à cette date, aucune décision de taxation (al. 3). Selon l'art. 14 LPGIP, si, au terme général d'échéance, les montants perçus à titre provisoire pour l'année ou la période fiscale sont insuffisants par rapport à l'impôt fixé dans le bordereau de taxation, la différence est soumise à un impôt compensatoire (al. 1). Les intérêts compensatoires négatifs courent à partir du terme général d'échéance jusqu'à la date de notification du bordereau de taxation et du décompte final (al. 2). En cas de versements volontaires ou de transferts de crédits postérieurs au terme général d'échéance, la différence est rectifiée et les intérêts courent, durant la période visée à l'al. 2, pro rata temporis (al. 3). Ils sont facturés au compte du contribuable lors de la notification du décompte final (art. 15 al. 2 RPGIP).

Le solde indiqué dans le décompte final est échu à la date de notification du décompte et doit être payé ou remboursé dans un délai de trente jours dès l'échéance (art. 18 al. 1 et 2 LPGIP). Le solde du décompte final, en faveur de l'État, porte intérêt moratoire, s'il n'est pas payé à l'expiration du délai prévu à l'art. 18 al. 2 LPGIP jusqu'à la date du paiement (art. 20 LPGIP).

f. Le Tribunal fédéral a observé que, sous les anciennes dispositions de la loi sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP - D 3 05), le législateur genevois avait instauré deux types d'intérêts à charge du contribuable : les intérêts moratoires et les intérêts financiers. La nouvelle LPGIP distingue toujours les premiers (art. 9 et 20 LPGIP) des seconds, appelés désormais « intérêts compensatoires négatifs » (art. 14 LPGIP). Les intérêts moratoires sont dus lorsque le contribuable n'a pas acquitté une créance à l'expiration d'un certain délai (art. 364 aLCP) et les intérêts financiers le sont lorsque le total des acomptes provisionnels payés par le contribuable est inférieur au montant de l'impôt total (art. 361 al. 4 aLPC et art. 3 du règlement transitoire genevois du 28 novembre 2001 relatif à la perception des acomptes provisionnels, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2008 - aRTAP). Ils sont donc mis à la charge du contribuable indépendamment de tout retard dans un paiement (arrêt du Tribunal fédéral 2C_520/2011 du 8 mai 2012 consid. 3.4).

Avec l'introduction du système postnumerando, il fallait en effet rétablir un déséquilibre financier dès lors que les contribuables sont taxés au plus tôt au cours de l'année suivante, avec pour conséquence que les collectivités publiques perdent les intérêts pour la part supérieure aux acomptes et doivent de plus rembourser le trop perçu d'impôts au taux des intérêts moratoires. Les intérêts financiers, que l'on appelle désormais intérêts compensatoires négatifs, sont destinés à réduire les pertes induites par le système (arrêts du Tribunal fédéral 2C_939/2011 du 7 août 2012 consid. 6 ; JTAPI/1387/2012 du 12 novembre 2012). Le Tribunal fédéral relève en outre qu'il « appartient aux contribuables d'estimer le montant de leurs impôts afin, le cas échéant, de payer un éventuel solde si celui-ci devait s'avérer supérieur aux acomptes provisionnels et d'éviter des intérêts financiers » (arrêt du Tribunal fédéral 2C_520/2011 précité consid. 3.4).

g. S’il est vrai que les intérêts moratoires sur IFD, les intérêts moratoires sur acomptes et les intérêts compensatoires négatifs sur ICC constituent des intérêts passifs au même titre que les intérêts moratoires sur rappel d’impôt, il n’en demeure pas moins que leur régime fiscal diffère (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2021 du 3 mars 2021 consid. 9, confirmant l’arrêt ATA/440/2021 du 20 avril 2021).

Dans cette jurisprudence, le Tribunal fédéral a rappelé avoir jugé que le droit fédéral ne donnait pas d'indication sur la question de savoir dans quelle période fiscale devaient être déduits les intérêts moratoires sur les rappels d'impôt de sorte que les cantons conservaient sur cette question une marge de manœuvre. Considérant que les intérêts moratoires sur rappel d'impôt au sens de l'art. 151 LIFD ont la particularité d'être directement liés au montant du rappel d'impôt dû par le contribuable pour chaque période fiscale en cause, le Tribunal fédéral a jugé qu'il n'était pas insoutenable, au vu du droit fiscal du canton de Genève, d'admettre que le contribuable pouvait les déduire de son revenu dans chacune des années fiscales sur lesquelles portent les rappels d'impôt (arrêt 2C_258/2017 du 2 juillet 2018 consid. 6.8.1 non publié in ATF 144 II 359). Il n'y a pas lieu de revenir sur cette jurisprudence particulière au régime du rappel d'impôt qui résulte d'un examen limité à l'arbitraire du droit cantonal autonome. Il suffit de constater qu'à la différence des intérêts moratoires sur rappel d'impôt au sens de l'art. 151 LIFD, le régime de déduction des intérêts moratoires sur impôt fédéral direct, des intérêts moratoires sur acomptes et des intérêts compensatoires négatifs sur impôt cantonal et communal découle du droit fédéral que le Tribunal fédéral examine librement. De cet examen libre, il résulte que, non seulement, ces intérêts passifs ne sont pas directement liés à un rappel d'impôt, comme l'a jugé à juste titre l'instance précédente, mais encore que le moment de leur déduction correspond au moment où ils sont échus et exigibles en vertu des dispositions rappelées in casu. Ces deux types d'intérêts moratoires ne sont par conséquent pas comparables.

h. En vertu des principes de l'étanchéité des exercices et de la périodicité de l'impôt, chaque exercice est considéré comme un tout autonome, sans que le résultat d'un exercice puisse avoir une influence sur les suivants, et le contribuable ne saurait choisir au cours de quelle année fiscale il fait valoir les déductions autorisées. Les déductions doivent être demandées dans la déclaration d'impôts de l'année au cours de laquelle les faits justifiant l'octroi des déductions se sont produits (ATA/1637/2019 du 5 novembre 2019 consid. 8a ; ATA/1470/2017 du 14 novembre 2017 consid. 5d ; ATA/547/2012 du 21 août 2012 consid. 6) ; plus généralement, les deux principes précités impliquent que tous les revenus effectivement réalisés ainsi que tous les frais engagés durant la période fiscale en cause sont déterminants pour la taxation de cette période (arrêt du Tribunal fédéral 2C_87/2015 du 23 octobre 2015 consid. 8.1.2 et les références citées ; Message concernant les lois fédérales sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes ainsi que sur l'impôt fédéral du 25 mai 1983 in FF 1983 III p. 177).

i. En l’occurrence, les recourants demandent, d’une part, que les dettes fiscales ICC/IFD 2008, 2009 et 2010 découlant des suppléments ajoutés soient déduites de la fortune imposable pour les ICC 2008, 2009 et 2010, et que les intérêts de retard qui seront facturés pour les années 2008, 2009 et 2010 soient déduits des nouveaux bordereaux de taxation ICC/IFD 2008, 2009 et 2010, pour le revenu et la fortune. D’autre part, ils requièrent que les intérêts de retard sur l’IA soient portés en déduction de la valeur des actions.

L’intimée ne conteste pas la déduction des dettes fiscales de la fortune imposable. Elle relève que celle-ci ne pourra être calculée qu’au moment où les bordereaux rectificatifs seront établis. Il convient d’en prendre acte.

Concernant la déduction des intérêts de retard pour les années fiscales 2008, 2009 et 2010, il y a lieu de relever qu’il s’agit ici d’un recours dans le cadre d’une procédure de taxation, et non pas d’une procédure en rappel d’impôt. Il s’ensuit que, selon la jurisprudence susrappelée, les intérêts visés par les recourants constituent des intérêts moratoires sur IFD, des intérêts moratoires sur acomptes et des intérêts compensatoires négatifs sur ICC, lesquels ne sont déductibles qu’au moment où ils sont échus et exigibles en vertu des dispositions légales applicables. Ainsi, les intérêts moratoires dus sur les créances d’IFD commencent à courir trente jours après la notification des bordereaux définitifs. De même, les intérêts moratoires sur acomptes et les intérêts compensatoires négatifs ne sont échus qu’à partir de la facturation lors de la notification du décompte final.

In casu, les taxations 2008 à 2010 ont été accompagnées chacune d’un décompte final daté respectivement des 5 et 17 décembre 2014. Seuls les décomptes finaux relatifs aux années 2009 et 2010 font état d’intérêts compensatoires négatifs. Lesdites décomptes finaux, postérieurs aux années en cause, ne peuvent donc aboutir à des déduction d’intérêts moratoires sur acomptes et d'intérêts compensatoires négatifs dans les revenus des contribuables pour les périodes de taxation 2008 à 2010, n'étant pas échus à ces périodes.

S'agissant de la déduction des intérêts négatifs précités de la fortune des contribuables pour les exercices fiscaux litigieux, ceux-ci n’étaient alors pas échus, de sorte qu’ils ne sont pas devenus des dettes durant ceux-ci.

Aucune déduction de la fortune des contribuables lors des périodes de taxation 2008 à 2010 ne saurait dès lors être admise.

Le même raisonnement s’applique aux intérêts négatifs liés à l’IA, lesquels peuvent être déduits en tant que dette à compter de leur échéance, mais pas imputés sur la valeur des actions de G_SA en vertu de principe de déterminance (ATF 137 II 353 consid. 6.2 ; 136 II 88 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_712/2020 précité consid. 4.2 ; 2C_132/2020 du 26 novembre 2020 consid. 7.2).

Ce grief doit donc également être écarté.

Par conséquent, entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

11) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2’500.- sera mis à la charge solidaire des recourants, qui succombent intégralement (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 janvier 2022 par les héritiers de feu A______ et feu B______ , soit Madame C______ et Monsieur D______ , contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge solidaire de Madame C______ et Monsieur D______ un émolument de CHF 2’500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Xavier Oberson et Alexandre Faltin, avocats des recourants, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :