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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/873/2013

ATA/518/2014 du 01.07.2014 sur JTAPI/502/2013 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/873/2013-ICCIFD ATA/518/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er juillet 2014

1ère section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______

représentés par le cabinet fiduciaire F. Zurcher, mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 avril 2013 (JTAPI/502/2013)


EN FAIT

1) Madame et Monsieur A______ sont contribuables à Genève.

2) Le 22 août 2011, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a communiqué aux époux A______ leurs bordereaux d'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et d'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) 2008.

3) Le 6 septembre 2011, les époux A______, représentés par leur fiduciaire, ont formé réclamation auprès de l'AFC-GE contre lesdits bordereaux. Ils contestaient les montants retenus à titre de charges et frais d'entretien d'immeubles ainsi que de frais de garde.

4) Par décisions sur réclamation du 4 octobre 2012, l'AFC-GE a maintenu les décisions de taxation litigieuses. Les contribuables n'avaient pas répondu ni à la lettre du 23 mai 2012 ni au courrier recommandé du 14 août 2012 envoyés à ce sujet par le service immobilier.

Un recours était ouvert dans les trente jours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Une avance de frais pouvait être demandée par ce dernier.

5) Le 25 octobre 2012, la fiduciaire des contribuables s'est adressée au service immobilier de l'AFC-GE, en déclarant faire suite au courrier de celui-ci du 23 mai 2012.

6) Le 1er mars 2013, l'AFC-GE a transmis ce courrier au TAPI comme objet de sa compétence après avoir interpellé les contribuables sur leur intention de recourir.

7) Par courrier du 15 mars 2013, le TAPI a accusé réception dudit courrier. Il partait du principe que les époux A______ voulaient effectivement recourir auprès de lui contre les décisions sur réclamation de l'AFC-GE.

Les époux A______ étaient invités à s'acquitter dans le délai fixé de l'avance de frais au moyen du bulletin de versement joint, sous peine d'irrecevabilité du recours. Le délai indiqué sur ledit bulletin était le dimanche 14 avril 2013, le montant de l'avance de frais étant fixé à CHF 500.-.

8) Le même jour, soit le 15 mars 2013, le TAPI a fixé à l'AFC-GE ainsi qu'à l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH), en tant qu'autorités intimées, un délai au 18 juin 2013 pour communiquer leurs observations sur le recours ainsi que, pour l'AFC-GE, le dossier fiscal des contribuables.

9) Par jugement du 29 avril 2013, le TAPI a déclaré le recours irrecevable. L'avance de frais n'avait pas été versée au jour du prononcé.

10) Le 5 mai 2013, la fiduciaire des contribuables a adressé au TAPI son « dossier de recours ». L'avance de frais a été payée le 6 mai 2013.

11) Le 20 mai 2013, par le biais de leur fiduciaire, les contribuables ont adressé au TAPI une « réclamation ».

Selon la lettre du TAPI du 15 mars 2013, un délai au 18 juin 2013 leur (sic) était imparti pour communiquer le dossier fiscal ainsi que leurs observations. L'avance de frais avait ainsi été effectuée le 6 mai 2013, soit avant le délai venant à échéance le 18 juin 2013. Ce n'était qu'en recevant le jugement attaqué qu'ils avaient compris que c'était le délai mentionné sur le bulletin de versement qui faisait foi, et non celui mentionné dans la lettre précitée.

12) Par jugement du 4 juillet 2013, le TAPI s'est déclaré incompétent et a transmis l'acte du 20 mai 2013 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

13) Le 18 juillet 2013, interpellés par le juge délégué, les contribuables ont manifesté leur intention de voir leur courrier du 20 mai 2013 traité comme un recours.

14) Le 13 septembre 2013, l'AFC-GE s'en est rapportée à justice. Elle n'était pas compétente en matière d'avance de frais.

15) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile et dûment transmis à la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement relèvent du droit de procédure cantonal. Par conséquent, les cantons restent libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1).

La procédure administrative genevoise prévoit que la juridiction saisie invite le recourant à payer une avance de frais destinée à couvrir les frais et émoluments de procédure présumables. À cette fin, elle lui fixe un délai raisonnable (art. 86 al. 1 LPA). Si l’avance de frais n’est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (art. 86 al. 2 LPA).

Les juridictions administratives disposent ainsi d'une grande liberté d’organiser la mise en pratique de cette disposition. Elles peuvent choisir d’envoyer la demande d’avance de frais d’entrée de cause par pli recommandé (ATA/280/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 ; ATA/594/2009 du 17 novembre 2009).

3) a. Les délais fixés par la loi sont des dispositions de droit public qui présentent un caractère impératif. À ce titre, ils ne sont pas susceptibles d’être prolongés, restitués ou suspendus, sauf par le législateur lui-même (art. 21 al. 1 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 - et 16 al. 1, 1ère phr. LPA ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, Berne 2000, p. 378). De fait, celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/304/2014 du 29 avril 2014 consid. 4c ; ATA/271/2014 du 15 avril 2014 consid. 3a ; ATA/234/2014 du 8 avril 2014 consid. 4 et les arrêts cités).

b. S’agissant d’un acte soumis à réception, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/ Étienne POLTIER, Droit administratif, Vol. II, 3ème éd., 2011, p. 302 s., n. 2.2.8.3). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 137 III 308 consid. 3.1.2 ; 118 II 42 consid. 3b ; 115 Ia 12 consid. 3b ; Arrêts du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 ; 2A.54/2000 du 23 juin 2000 consid. 2a et les références citées). Celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d’une communication officielle à son adresse habituelle s’il devait s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 p. 399 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_549/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.2.1 et les références citées). Un envoi est réputé notifié à la date à laquelle son destinataire le reçoit effectivement.

c. Pour examiner si l’intéressé a été « empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé », la jurisprudence procède par analogie avec les cas susceptibles de constituer des cas de force majeure au sens de l’art. 16 al. 1 LPA.

d. Tombent sous cette dernière notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (SJ 1999 I p. 119 ; RDAF 1991 p. 45 ; ATA/536/2010 du 5 août 2010 ; ATA/515/2009 du 13 octobre 2009).

4) Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

5) La responsabilité du mandant ne saurait être dissociée de celle de son mandataire. En effet, le premier est responsable des actes de celui qui le représente et répond de toute faute de ses auxiliaires (ATA/378/2014 du 20 mai 2014 consid. 5 ; ATA/271/2014 précité ; ATA/739/2013 du 5 novembre 2013 ; ATA/626/2011 du 4 octobre 2011).

Par ailleurs, selon la jurisprudence fédérale, les actes du représentant sont opposables au représenté comme les siens propres ; ce principe vaut également en droit public (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_280/2013 du 6 avril 2013).

6) Le formalisme excessif (au sens de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 ; 130 V 177 consid. 5.4.1 ; 128 II 139 consid. 2a ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_133/2009 du 24 juillet 2009 consid. 2.1 = SJ 2010 I 25). Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé ; il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 précité consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2 ; 2C_250/2009 du 2 juin 2009 consid. 5.1 ; 9C_831/2007 du 19 août 2008). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est du reste pas pertinente (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2 ; 2C_450/2008 du 1er juillet 2008 consid. 2.3.4).

7) Dans le cas d'espèce, les recourants ont payé l'avance de frais le 6 mai 2013, soit après le prononcé du jugement d'irrecevabilité par le TAPI et plus de trois semaines après l'expiration du délai de paiement, ou plus précisément du terme fixé au 14 avril 2013.

Toutefois, ils ne font état d'aucune circonstance qui constituerait un empêchement non fautif de payer le montant réclamé dans le délai imparti. Au contraire, ils invoquent une confusion avec le délai qui leur aurait été fixé au 18 juin 2013 pour présenter leurs observations et produire le dossier fiscal. Or ce n'est à l'évidence pas à eux que le TAPI avait demandé le dossier de la cause et des observations responsives sur le recours, mais aux autorités intimées, à savoir l'AFC-GE et l'AFC-CH.

Par ailleurs, la lettre du TAPI mentionnait clairement le montant à verser, le délai pour ce faire et l'irrecevabilité du recours comme conséquence du non-paiement dans les délais. S'agissant plus précisément du terme de paiement, la lettre faisait expressément référence au bulletin de versement annexé.

8) Pour le surplus, l'avance de frais demandée par pli simple a été envoyée au mandataire constitué pour les recourants. Ceux-ci ne sauraient toutefois se prévaloir de l'erreur de ce dernier, puisque, selon la jurisprudence déjà citée, ils doivent se laisser opposer les actes de leur représentant.

Par conséquent, la chambre de céans ne peut que confirmer le jugement d'irrecevabilité prononcé par le TAPI.

9) Au vu toutefois des graves et nombreuses erreurs de procédure commises tout au long du traitement du dossier par le mandataire des recourants, celui-ci doit être averti qu'en cas de réitération de tels comportements à l'avenir, la chambre de céans ne lui reconnaîtra plus le statut de mandataire professionnellement qualifié au sens de l'art. 9 LPA.

10) Mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée vu l'issue du litige (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 mai 2013 par Madame et Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 avril 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame et Monsieur A______ représentés par le cabinet fiduciaire F. Zurcher, mandataire, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :