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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4240/2015

ATA/122/2016 du 09.02.2016 ( AIDSO ) , REJETE

Recours TF déposé le 24.02.2016, rendu le 14.04.2016, IRRECEVABLE, 8C_150/2016
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4240/2015-AIDSO ATA/122/216

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 février 2016

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______


contre


HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1974, domicilié à Genève, a déposé une demande de prestations d’aide financière auprès de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) le 8 décembre 2009. Au titre de dernier emploi, il avait été employé à l’office des poursuites et faillites de façon temporaire. Il était au bénéfice d’une demi-licence en sciences économiques acquise auprès de l’Université de Genève. Il vivait sous le même toit que sa mère, née en 1939, retraitée. Il était apte à travailler à 100 %.

2. Il a régulièrement touché des prestations et a renouvelé sa demande, respectivement les 14 octobre 2010, 7 octobre 2011, 29 octobre 2012, 28 août 2013 et 5 septembre 2014.

Il a par ailleurs régulièrement signé le document intitulé « Mon engagement » en demandant le revenu minimal cantonal d’aide sociale (RMCAS), respectivement les 30 novembre 2009, 14 octobre 2010, 7 octobre 2011, 3 juillet 2012, 29 octobre 2012, 28 août 2013 et 5 septembre 2014.

3. Le 30 août 2011, il a fait l’objet d’un avertissement. Il avait été convoqué afin d’effectuer une mesure de recherche d’emploi intitulée « HESTIA ». En date du 9 août 2011, l’hospice avait été informé de l’annulation de son dossier. M. A______ avait assisté à la première séance d’information, mais ne s’était pas présenté aux entretiens donnés par le consultant. Suite à son manque d’implication et de collaboration en vue de sa réinsertion, il était informé que, dans le cas où il refuserait une nouvelle mesure de retour à l’emploi sans motif valable, l’hospice serait contraint de mettre un terme à son droit aux prestations RMCAS.

4. M. A______ a fait l’objet d’un second avertissement le 12 septembre 2013. Lors d’un entretien à l’hospice le 28 août 2013, ce dernier lui avait soumis différentes propositions d’activités de réinsertion pouvant convenir aux aspirations et aux compétences de l’intéressé, lequel avait choisi B______ pour une mission de secrétaire-réceptionniste. L’hospice avait été étonné de recevoir le courrier de l’administré du 2 septembre 2013 relatant un malentendu avec son assistante sociale. Contrairement à ce que pensait M. A______, le service du RMCAS ne proposait pas d’entretien pour un emploi rémunéré, mais des mesures, des ateliers ou des activités de réinsertion. Dans le cas où l’intéressé manquerait à nouveau d’implication et de collaboration en vue de sa réinsertion, l’hospice serait dans l’obligation de lui notifier une décision de réduction de ses prestations d’aide financière.

5. Le 27 avril 2015, M. A______ a signé, avec un collaborateur de l’hospice, un contrat d’aide sociale individuel (ci-après : CASI) intitulé « numéro 1 ». Trois pages décrivaient l’ « analyse des ressources et envies », ainsi que le « profil professionnel ». Suivaient trois pages relatives au « projet, objectifs et tâches ». Le CASI de l’intéressé mentionnait sous « objectif 1 » : « déterminer le projet » et fixait quatre tâches, une par mois, la première en mai 2015.

6. Selon le « décompte définitif de virement » pour la période du 1er au 30 juin 2015, M. A______ devait recevoir pour lui-même et sa mère CHF 1'366.80, primes d’assurance-maladie non comprises. À ce montant, s’ajoutaient CHF 225.- au titre de « correction prestations incitatives » pour un total de CHF 1'591.80. Le versement a été autorisé le 1er juin 2015.

7. a. Selon le « décompte définitif de virement » pour la période du 1er au 31 juillet 2015, M. A______ devait recevoir, pour lui-même et sa mère, CHF 1'287.80.

Aucune prestation incitative n’était mentionnée. Le virement a été autorisé par un collaborateur de l’hospice le 30 juin 2015.

b. CHF 225.- ont été versés au titre de « prestations incitatives » à l’intéressé, selon un  « décompte définitif de virement » pour la période du 1er au 31 juillet 2015, établi le 14 juillet 2015.

8. Par courrier du 14 juillet 2015, l’hospice a convoqué M. A______ pour un stage d’évaluation aux EPI du 10 août au 4 septembre 2015. La correspondance précisait que, s’il n’entrait pas en stage à la date prévue sans juste motif, ses prestations financières seraient réduites à titre de sanction.

9. Par courriel du 15 juillet 2015 à la collaboratrice en charge de son dossier, M. A______ a indiqué qu’il ne « mettrai[t] jamais les pieds dans cette saloperie de "stage d’évaluation", notamment condamnée par la Cour des comptes et dont j’ai des témoignages de l’OAPI, que je livrerai s’il le faut aux tribunaux ».

10. Selon le décompte définitif de virement pour la période du 1er au 31 août 2015, M. A______ et sa mère devaient recevoir CHF 1'366.80, montant des primes d’assurance-maladie non compris. Le virement a été autorisé le 30 juillet 2015.

Il n’était pas fait mention de « prestations incitatives ».

11. Par courrier du 19 août 2015, l’hospice a relevé que l’intéressé ne s’était pas présenté le 10 août 2015, date du début du stage, à leur convocation. Un entretien était en conséquence fixé le jeudi 27 août 2015 avec l’hospice afin qu’il s’explique sur les motifs de son comportement.

12. Par courrier recommandé du 26 août 2015, M. A______ a fait opposition à la suppression de son supplément d’intégration (ci-après : SI), dès août 2015, consécutive à son absence légitime du stage d’évaluation, ainsi qu’à sa convocation y relative, puisque la loi lui en donnait le droit absolu. Il réclamait CHF 9.75 de frais médicaux présentés quarante-trois jours auparavant au centre d’action sociale (ci-après : CAS) s’occupant de son dossier, ainsi que les CHF 6.- pour la lettre recommandée.

Trois raisons alternatives consacraient son refus. Les deux premières relevaient du principe de l’état de nécessité et la troisième du principe de la bonne foi. Il s’agissait respectivement de la privation d’eau infligée aux « stagiaires », du travail dissimulé au profit d’associations et de l’encadrement du stage, composé de chômeurs en fin de droit observant d’autres chômeurs en fin de droit en train de remplir des boîtes d’allumettes, de plier des enveloppes ou de monter puis de démonter des « cartes mères », pour un coût de CHF 2'000.- par stagiaire, à la charge des contribuables. Outre le rapport de la Cour des comptes, un autre dossier était à disposition de l’hospice sur la façon dont les stages étaient conduits.

13. Par courrier du 28 août 2015, l’hospice a informé M. A______ qu’il transmettait sa lettre au centre d’action sociale et de santé (ci-après : CAS) de St-Gervais pour raison de compétence. Renseignements pris, il apparaissait que la suppression du SI n’avait, à ce jour, pas fait l’objet d’une décision susceptible d’opposition. Par ailleurs, la demande de remboursement des frais médicaux était en cours de traitement.

14. Par acte du 2 septembre 2015, M. A______ a demandé au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) d’enjoindre à l’hospice de lui restituer son SI, ainsi que ses frais médicaux, présentés cinquante jours au préalable, ainsi que CHF 12.- de frais postaux.

L’hospice ne pouvait se prévaloir de son déni de décision pour refuser d’examiner son opposition, alors que la sanction était effective depuis vingt-trois jours, ce qui rendait la présente demande au TAPI recevable.

15. Par jugement sur compétence du 4 septembre 2015, le TAPI a déclaré irrecevable le recours formé le 2 septembre 2015 et l’a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

16. Il ressort du « décompte définitif de virement » pour la période du 1er au 30 septembre 2015 que M. A______ et sa mère avaient droit, pour le mois de septembre 2015, à CHF 1'366.80, montant des primes d’assurance-maladie non compris. Le virement a été autorisé le 7 septembre 2015.

Il n’est pas fait mention de « prestations incitatives ».

17. La chambre de céans a reçu le recours de M. A______ le 7 septembre 2015. Par courrier du 9 septembre 2015, un délai a été imparti au 18 septembre 2015 à l’hospice pour faire des observations.

18. Le 14 septembre 2015, l’hospice a prononcé, à l’encontre de M. A______, une « décision de réduction de prestations d’aide sociale de 15 % pour une durée de six mois ». La décision était exécutoire nonobstant opposition. Le forfait d’entretien était réduit de 15 % pendant six mois, à compter du 1er octobre 2015, et les prestations circonstancielles étaient supprimées, à l’exception des éventuelles participations aux frais médicaux et dentaires.

Au bas de la décision, il était mentionné qu’en tant qu’elle réduisait ses prestations à raison de 15 % pendant six mois et en tant qu’elle n’accordait pas à l’intéressé de SI pour le mois d’août 2015, la décision pouvait faire l’objet d’une opposition écrite.

19. Par réponse du 18 septembre 2015, l’hospice s’en est rapporté à justice sur la recevabilité du recours. Au fond, il a conclu au rejet du recours pour déni de justice.

20. Par arrêt du 3 novembre 2015, la chambre administrative a rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours interjeté le 2 septembre 2015 par M.  A______ pour déni de justice à l’encontre de l’hospice et a renvoyé le dossier à l’hospice pour décision sur opposition tant sur la suppression du SI à compter du mois d’août 2015 que sur la réduction des prestations d’aide sociale de 15 % pendant six mois, dès le 1er octobre 2015. Le recourant avait, dans le cadre de sa réplique du 24 septembre 2015, fait part de son opposition sans qu’il ne ressorte clairement du dossier de la chambre de céans s’il s’était aussi manifesté auprès de l’autorité compétente (ATA/1186/2015).

21. Par décision sur opposition du 10 novembre 2015, le directeur général de l’hospice a rejeté l’opposition de M. A______ contre la décision du 14 septembre 2015 et confirmé la réduction du forfait d’entretien de 15 % pour une durée de six mois, la suppression des prestations circonstancielles à l’exception des éventuelles participations aux frais médicaux et dentaires, et refusé l’octroi des suppléments d’intégration des mois juillet, août et septembre 2015. La décision était exécutoire nonobstant recours.

Le fait que le recourant considérait, en se fondant sur des documents au demeurant moins négatifs qu’il ne le prétendait, que le stage concerné était inapproprié ne constituait pas un motif pour s’y soustraire, ce d’autant plus qu’il en avait accepté le principe quelques jours auparavant et que ce stage ne lui avait pas été imposé. S’il entendait dénoncer les stages d’évaluation, il pouvait le faire en tant que citoyen par les voies de droit et d’expression qui lui étaient offertes à ce titre, mais pas par une action individuelle contraire aux obligations qui étaient les siennes en tant que bénéficiaire de prestations de l’hospice. Il était clairement informé des conséquences auxquelles il s’exposait et avait valablement et sans motif valable refusé de commencer, et conséquemment d’effectuer, le stage d’évaluation. L’envoi d’un courriel grossier et son absence au rendez-vous du 27 août 2015 avec la responsable d’unité et son assistante sociale, destiné à lui permettre de s’exprimer sur les motifs de son comportement, constituaient autant de faits aggravants. Cependant, dès lors qu’il s’agissait d’une première sanction, quand bien même il avait par le passé déjà fait preuve d’un manque de collaboration en ne suivant pas la mesure Hestia et en refusant une activité de réinsertion, sa faute pouvait être qualifiée de manquement simple.

La durée de celle-ci, fixée à six mois, soit la moitié de la durée maximale, paraissait adaptée.

Les suppléments d’intégration n’étaient pas un droit. L’hospice disposait d’un libre pouvoir d’appréciation, à la différence de ce qui prévalait lors de l’application stricte de la loi et des principes constitutionnels régissant l’aide sociale. Le pouvoir d’examen de l’instance d’opposition était en conséquence limité à l’arbitraire. Les suppléments d’intégration liés au CASI étaient octroyés en fonction de l’évaluation du résultat des tâches du mois précédent. Le SI du mois de juillet 2015 portait sur la tâche consistant à s’inscrire aux EPI. Le critère retenu pour apprécier la réalisation de cette tâche était de donner suite à la convocation. Dans la mesure où l’opposant ne s’était pas présenté aux EPI le premier jour prévu pour le stage, c’était avec raison que le CAS ne lui avait pas octroyé le SI correspondant. Celui d’août 2015 concernait le suivi du stage EPI, le critère était le rapport de fin de stage. Compte tenu du refus de M. A______ d’effectuer ce stage, la décision attaquée était également fondée. Dans la mesure où l’opposant ne s’était pas rendu au rendez-vous du 27 août 2015, il n’avait pas été possible de fixer une nouvelle tâche ou objectif et, par voie de conséquence, de lui octroyer un SI pour le mois de septembre 2015.

22. Par courrier du 7 décembre 2015, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision de l’hospice du 10 novembre 2015. Il a conclu à l’annulation de la déduction de 15 % sur son SI durant six mois et au versement de trois fois CHF 100.- « en vertu de 7A al. 1 let. b RIASI » appliqué aux mois d’août à octobre 2015.

Comme l’attestait le rapport 2015 de l’observatoire de l’aide sociale et de l’intégration (ci-après : OASI), son désistement du stage d’évaluation n’était pas fautif, puisqu’il avait vocation à le protéger « d’une privation d’eau » et de devoir travailler gratuitement au profit de tiers. Concernant « la convocation pour expliquer [mon] comportement », il était erroné de dire qu’elle avait été prévue pour lui proposer une tâche mensuelle. Si l’hospice organisait des stages « dénués de typicité pénales », une telle convocation n’aurait pas été nécessaire. Il l’avait déclinée par courrier recommandé. « Nul ne pouvait se prévaloir de sa propre turpitude ».

23. Par observations du 21 janvier 2016, l’hospice a conclu au rejet du recours.

Ses arguments seront repris dans la partie en droit en tant que de besoin.

24. Par réplique du 23 janvier 2016, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

25. Par courrier du 25 janvier 2016, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

26. Par courriers spontanés des 28 et 30 janvier 2016, M. A______ a notamment fait référence aux situations d’une ancienne conseillère fédérale, qui risquait deux ans et demi de prison en Espagne, mais bénéficiait de protection, d’un ancien procureur qui l’avait privé d’un héritage de trente millions, d’un acteur, titulaire d’un compte à la rue de la Corraterie, qui était son débiteur.

Il a par ailleurs amplifié sa demande de CHF 29,80, retirés en décembre 2015 de son décompte sans justification et de CHF 53,75 dus à une assurance que l’hospice l’avait contraint à conclure, sans être en mesure de le justifier par une base légale.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Le litige porte sur la décision sur opposition du directeur de l’hospice du 10 novembre 2015, diminuant le forfait d’entretien de l’intéressé de 15% pendant six mois, à compter du 1er octobre 2015 et supprimant toutes les prestations circonstancielles à l’exception des frais médicaux et dentaires, ainsi que refusant le versement du SI pour les mois de juillet, août et septembre 2015.

b. Le recourant forme des conclusions, nouvelles, tendant au remboursement de CHF 83,55. Outre le fait que l’art. 68 LPA a contrario interdit au recourant de prendre des conclusions qui n’auraient pas été formées devant la juridiction de première instance, des conclusions nouvelles prises au stade de la réplique sont irrecevables (ATA/1011/2015 du 29 septembre 2015 ; ATA/536/2014 du 17 juillet 2014). En l’espèce, le recourant a pris, le 28 janvier 2016 des conclusions nouvelles, après que la cause ait été gardée à juger, en paiement contre l’hospice de montants qu’il estime lui être dus depuis novembre 2015.

Ces conclusions, en tous les cas tardives, seront déclarées irrecevables.

3. Selon l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine (ATF 135 I 119 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_56/2012 du 11 décembre 2012 consid. 1.1).

L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, rappelé par l’art. 12 Cst. (ATA/343/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/452/2012 du 30 juillet 2012 ; Félix WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, 1995, p. 77).

4. a. Dans le canton de Genève, l'art. 12 Cst. a trouvé une concrétisation dans la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), dont le but est de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI), ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle a également pour objectif de garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies sous forme d’accompagnement social, de prestations financières et d’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

b. Les prestations d’aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI). Le bénéficiaire doit faire valoir sans délai ses droits auxquels l’aide financière est subsidiaire et doit mettre tout en œuvre pour améliorer sa situation sociale et financière (art. 9 al. 2 LIASI).

c. L’hospice est l'organe d'exécution de la LIASI (art. 3 al. 1 LIASI).

5. a. La personne majeure qui n’est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont il a la charge, a droit à des prestations d’aide financière (art. 8 al. 1 LIASI).

b. Ont droit aux prestations d'aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n'atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d'État (art. 21 al. 1 LIASI).

6. a. Les art. 14 à 20 LIASI traitent du CASI.

b. En contrepartie des prestations d’aide financière auxquelles il a droit et des mesures d'intégration sociale ou d'insertion professionnelle mises en place, le bénéficiaire s’engage à participer activement à l’amélioration de sa situation. Cet engagement prend la forme d’un contrat (art. 14 al. 1 LIASI).

c. À teneur de l’art. 20 LIASI, le bénéficiaire de prestations d'aide financière est tenu de participer activement aux mesures le concernant. Il doit, en particulier, s’engager contractuellement au sens des dispositions précédentes. S’il refuse de signer le CASI que lui propose l’hospice, ou s’il n’en respecte pas la teneur en l'absence de justes motifs, il s’expose aux sanctions prévues à l’art. 35 al. 1 let. e LIASI.

d. Les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées notamment si le bénéficiaire ne veut pas s’engager dans un CASI (art. 20 LIASI) ou n’en respecte pas intentionnellement les conditions (art. 35 al. 1 let. e LIASI). En cas de réduction, suspension, refus ou suppression des prestations d'aide financière, l’hospice rend une décision écrite et motivée, indiquant les voies de droit (art. 35 al. 2 LIASI). Les décisions de réduction sont rendues pour une durée déterminée à l’échéance de laquelle la situation est réexaminée (art. 35 al. 3 LIASI).

Les prestations d’aide financière peuvent être réduites dans les cas visés à l’art. 35 LIASI pendant une durée maximale de douze mois. En cas de manquement aux devoirs imposés par la loi, le forfait pour l’entretien de la personne fautive est réduit de 15% et toutes ses prestations circonstancielles sont supprimées, à l'exception de la participation aux frais médicaux et aux frais dentaires, au sens de l'art. 9 al. 2 à 4 du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01). En cas de manquement grave, le forfait pour l'entretien de la personne fautive est réduit aux montants définis par l’art. 19 RIASI et toutes ses prestations circonstancielles sont supprimées, à l'exception de la participation aux frais médicaux et aux frais dentaires, au sens de l'art. 9 al. 2 à 4 RIASI. Le degré de réduction est fixé en tenant compte des circonstances du cas (art. 35 RIASI).

e. Selon la jurisprudence, la suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit au surplus être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 ; ATA/825/2015 du 11 août 2015).

Conformément à la volonté du législateur exprimée dans son commentaire article par article de la LIASI, l’hospice général doit avertir le recourant des conséquences que ses actes peuvent avoir sur son droit aux prestations d’aide financières (ATA/828/2014 du 28 octobre 2014).

7. a. Les art. 21 et suivants LIASI traitent notamment des SI.

Le Conseil d'État définit par règlement les suppléments d'intégration pris en compte dans le calcul du droit aux prestations d'aide financière. Il en fixe les montants et les conditions d'octroi (art. 21 al. 3 LIASI).

Selon l’art. 25 LIASI, peuvent être accordés aux personnes qui, en application des art. 21 à 24 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière, notamment les suppléments d'intégration à titre de prestations à caractère incitatif (let. a). Le Conseil d'État définit par règlement ces prestations et fixe leurs conditions d'octroi.

b. Les art. 6 ss du RIASI détaillent deux prestations à caractère incitatif, dont les suppléments d'intégration (let. a), l’autre prestation n’étant pas pertinente en l’espèce.

Aux termes de l’art. 7A al. 4 RIASI, un supplément d’intégration mensuel de CHF 225.- est accordé au bénéficiaire qui atteint l’objectif mensuel fixé dans son contrat d’aide sociale individuel. En cas d’objectif non atteint, le supplément d’intégration est supprimé (let. a).

8. a. En l’espèce, le recourant s’est engagé à tout mettre en œuvre pour améliorer sa situation sociale et financière, notamment en participant à un stage d’évaluation à l’emploi et/ou aux autres mesures d’insertion professionnelle qui lui seraient proposées. Cet engagement ressort notamment des formulaires « mon engagement » qu’il a signé les 30 novembre 2009, 14 octobre 2010, 7 octobre 2011, 3 juillet 2012, 29 octobre 2012, 28 août 2013 et 5 septembre 2014, en contrepartie duquel il a pu percevoir des prestations financières (art. 14 al. 1 LIASI).

Par deux fois déjà, le recourant n’a pas respecté ses obligations au point qu’il s’est vu notifier un avertissement. Ces deux courriers, respectivement des 30 août 2011 et 12 septembre 2013, portaient déjà sur la problématique de la réinsertion professionnelle.

Il ressort par ailleurs des pièces versées à la procédure que le recourant a signé un CASI le 27 avril 2015. Selon celui-ci, un seul objectif était fixé pour une période de quatre mois, à savoir « déterminer le projet ». Cet objectif se décomposait en quatre tâches à accomplir, une par mois, la première en mai 2015. Celle du mois de juillet 2015 consistait à s’inscrire aux établissements publics pour l’intégration (ci-après : EPI). Le critère de réussite consistait en la « convocation ». Au titre de tâche du mois d’août 2015, le CASI mentionnait : « réalisation du stage aux EPI ». Le critère pour l’évaluation était le « rapport ».

En l’espèce, le 15 juillet 2015, le recourant a indiqué à l’intimé qu’il ne « mettrait jamais les pieds dans cette saloperie de "stage d’évaluation", notamment condamnée par la Cour des comptes et dont j’ai des témoignages de l’OAPI, que je livrerai s’il le faut aux Tribunaux ». Le recourant ne conteste par ailleurs pas qu’il n’a pas suivi le stage concerné, prévu du 10 août au 4 septembre 2015. Dans ces conditions, il n’a pas effectué les tâches des mois de juillet et août 2015. Par ailleurs, convoqué le 27 août 2015 pour discuter des motifs de son refus, il ne s’est pas présenté à l’entretien.

Le recourant a par ailleurs été dûment averti des conséquences en cas de non respect de son CASI, notamment par courrier du 14 juillet 2015 (ATA/828/2014 précité).

Il doit ainsi être constaté que le recourant n’a pas respecté son CASI.

b. Le recourant allègue de « justes motifs » au sens de l’art. 20 LIASI et invoque trois causes : « la privation d’eau infligée aux "stagiaires", le travail dissimulé au profit d’associations et l’encadrement du stage, composé de chômeurs en fin de droit observant d’autres chômeurs en fin de droit en train de remplir des boîtes d’allumettes, de plier des enveloppes ou de monter puis de démonter des "cartes mères", pour un coût de CHF 2'000.- par stagiaire, à la charge des contribuables ». Il fonde son argumentation sur un extrait d’un rapport de l’observatoire de la loi sur l'aide sociale et l'insertion (ci-après : OASI) et cite, sans le produire, un rapport de la Cour des comptes.

En l’espèce, les différentes critiques émises à l’encontre desdits stages et débattues publiquement datent de plusieurs mois voire années. Le seul fait que la Cour des comptes ait émis un rapport contenant des recommandations pour une amélioration desdits stages prouve que ceux-ci peuvent parfaitement être exigés des personnes dans la situation du recourant à défaut de quoi la Cour des comptes l’aurait relevé. Or tel n’est pas le cas, ce que le recourant ne prétend d’ailleurs pas non plus. De surcroît, le rapport n° 87 de la Cour des comptes traitant notamment des EPI est sorti précisément au moment où le recourant signait son CASI. Il a été relayé dans la presse. À aucun moment, avant juillet 2015, le recourant ne semble avoir questionné l’hospice sur l’articulation entre les critiques émises par la Cour des comptes et son CASI. Il a ainsi continué à bénéficier des prestations financières en mai et juin 2015. Par ailleurs, le rapport de l’OASI mentionne clairement qu’il se limite à relater le vécu des personnes qui ont bénéficié du dispositif d’insertion des personnes à l’aide sociale ou au chômage. Sa portée doit être relativisée en conséquence.

La simple production de ces documents prouve au contraire l’absence de justes motifs permettant à l’intéresser de ne pas effectuer le stage de réinsertion professionnelle qu’il s’est par ailleurs engagé à suivre en avril 2015 en toute connaissance de cause.

Le refus du recourant de se soumettre au stage n’est pas fondé sur de justes motifs. Le principe d’une sanction à son encontre est en conséquence fondé.

c. Au titre de sanction, l’hospice a décidé d’une diminution de 15 % du forfait d’entretien pendant six mois à compter d’octobre 2015 et la suppression de toutes prestations circonstancielles à l’exception des frais médicaux et dentaires.

En l'occurrence, la sanction consistant en une réduction de 15 % du forfait des prestations d'assistance du recourant et une suppression de toutes ces prestations circonstancielles, hormis la participation à ses frais dentaires et médicaux pendant six mois, est conforme à l’art. 35 RIASI. Elle respecte le principe de la proportionnalité, le maximum prévu par le règlement étant de douze mois, le recourant ayant fait l’objet de deux avertissements préalables, mais n’ayant jamais été sanctionné. L’hospice n’a en conséquence pas abusé de son pouvoir d’appréciation en prononçant une telle sanction à l'encontre du recourant.

Partant, ce grief sera rejeté.

9. La suppression du SI se fonde sur l’art. 25 LIASI et 7A al. 4 RIASI. Il ne s’agit pas d’un droit, mais d’une possibilité offerte à l’hospice au vu du terme employé par la loi de « peuvent ».

En l’espèce, au vu de l’attitude non coopérante de l’administré pendant les mois de juillet, août et septembre 2015, l’hospice n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant le versement du SI, l’objectif mensuel fixé dans le CASI n’étant pas atteint et le recourant n’ayant pas donné suite au rendez-vous fixé le 27 août 2015 pour évaluer la suite à donner à sa situation en septembre 2015.

Ce grief est écarté.

10. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 7 décembre 2015 par Monsieur A______ contre la décision du directeur de l’Hospice général du 10 novembre 2015 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :