Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1271/2024 du 19.12.2024 ( OCPM ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 19 décembre 2024
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dans la cause
Monsieur A______, agissant en son nom et celui de son enfant mineure, B______
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur A______, né le ______ 1986, et sa fille B______, née le ______ 2009, sont ressortissants brésiliens.
2. Auditionné le 3 février 2019 par les gardes-frontière après avoir été interpelé sans titre de séjour valable, M. C______ a déclaré être arrivé en Suisse en mars 2018 et ne pas être retourné dans son pays d’origine depuis cette date. Célibataire, il avait une enfant à charge au Brésil, dont la mère de celle-ci s’occupait avec sa propre mère. Il vivait en Suisse avec une autre femme qui devait accoucher en mars 2019, mais cette dernière l’avait mis à la porte et niait le fait qu’il fût le père de l’enfant à naître. Il allait néanmoins déposer une demande en reconnaissance de paternité.
3. Par ordonnance pénale du 4 février 2019, le Ministère public du canton de Genève l’a condamné à une peine de soixante jours-amende avec sursis pendant trois ans, pour séjour illégal en Suisse.
4. Le 21 mars 2019, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Il a expliqué que Madame D______, domiciliée au E______ (GE), ne voulait pas le reconnaître comme le père de son enfant. Il souhaitait obtenir une autorisation de séjour lui permettant d’entreprendre ces démarches en reconnaissance de paternité.
5. Par ordonnance pénale du 19 septembre 2019, le Ministère public de l’arrondissement de la Côte l’a condamné à quarante jours-amende avec sursis pendant trois ans et à une amende de CHF 300.-, pour activité lucrative sans autorisation. Le sursis octroyé le 4 février 2019 n’était toutefois pas révoqué.
6. Par courrier du 28 juillet 2019, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser d’accéder à sa demande d’autorisation de séjour et lui a accordé un délai de trente jours pour lui faire part, par écrit, de ses observations et objections éventuelles.
7. Par courrier du 3 septembre 2020, M. A______ a fait usage de son droit d’être entendu. Il n’avait pas encore pu effectuer le test ADN permettant de démontrer qu’il était le père de l’enfant E______, née le ______ 2019, car sa mère refusait de le faire. Il n’avait toutefois aucun doute sur le fait qu’il en était le père. Ne pas pouvoir voir sa fille et devoir retourner dans son pays d’origine avec la peur d’être contaminé par la Covid 19 risquaient de lui causer des troubles irréversibles sur sa santé mentale.
8. Par décision du 6 octobre 2020, l’OCPM a refusé de soumettre le dossier de M. A______ au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis positif et a prononcé son renvoi de Suisse.
À teneur des pièces justificatives produites, son séjour sur le territoire helvétique était de courte durée. Son intégration socioculturelle n’était pas particulièrement remarquable. Il n’avait pas démontré que ses revenus et ses moyens de subsistance en Suisse suffisaient pour assurer son autonomie financière de manière durable. Sa situation familiale ne justifiait pas une exemption des mesures de limitation à son égard. Au contraire, il disposait encore au Brésil d’un réseau familial proche, à savoir sa mère, sa fille B______ née en 2009 et deux frères. Sa paternité sur l’enfant E______ résidant en Suisse n’était pas établie. Enfin, il n’était pas prouvé qu’une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place.
9. Cette décision a été confirmée sur recours par jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) du 16 juin 2021 (JTAPI/616/2021), puis par arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 12 octobre 2021 (ATA/1061/2021).
10. Le 1er février 2022, l'OCPM a informé M. A______ que la décision du 6 octobre 2020 était exécutoire et qu'un délai au 1er avril 2022 lui était imparti pour quitter la Suisse.
11. Le même jour, l'OCPM a informé l'employeur de M. A______ ne serait plus autorisé à travailler en Suisse à partir du 1er avril 2022.
12. Par courriel du 16 mars 2022, M. A______ a sollicité la reconsidération de la décision du 6 octobre 2020. Il était titulaire d'un contrat de travail à durée déterminée au sein d'une société reconnue en Suisse depuis 2020 en tant qu'ouvrier polyvalent dans le bâtiment et son insertion professionnelle était incontestable, ce qui le rendait financièrement indépendant, tout comme le reste des membres de sa famille. Il était locataire d'un appartement et était père de deux enfants dont l'une, B______, âgée de 13 ans, qu'il avait fait venir à Genève, y était scolarisée et concernant l'autre, E______, née en mars 2019 à Genève, il était en cours de reconnaissance de paternité.
13. Par courrier du 23 mai 2022, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser d'entrer en matière sur sa demande de reconsidération.
14. Le 22 juin 2022, M. A______ a exercé son droit d'être entendu en mettant en avant son efficacité dans son emploi, la présence à Genève de sa fille de 13 ans ainsi qu'une frustration en cas de retour dans son pays d'origine, dans le sens où il n'avait pas réalisé ses rêves ni atteint ses objectifs.
15. Par décision exécutoire nonobstant recours du 5 septembre 2022, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération de la décision du 6 octobre 2020 et a prononcé son renvoi de Suisse.
Ses arguments ne pouvaient pas être pris en considération dans la mesure où les circonstances ne s'étaient pas modifiées de manière notable depuis la décision de refus et que les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA n'étaient pas remplies. Les éléments invoqués ne constituaient pas des faits nouveaux et importants susceptibles de modifier sa position.
Concernant sa fille B______, son renvoi était prononcé sur la base de l'art. 64 al. 1 let. c LEI.
16. Cette décision a été confirmée sur recours par jugement du tribunal du 15 juin 2023 (JTAPI/657/2023), puis par arrêt de la chambre administrative du 30 janvier 2024 (ATA/98/2024).
17. Le 8 août 2024, M. A______ a déposé une demande de reconsidération aux motifs qu’il souhaitait pouvoir obtenir à tout le moins une garde partagée avec la famille maternelle de E______, que la mère avait perdu la garde et qu’il était la personne la mieux placée pour assurer la garde sur cet enfant.
18. Par décision du 2 septembre 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération précitée.
Le souhait formulé d’obtenir à tout le moins la garde partagée avec la famille de maternelle E______ et d’être la personne la mieux placée pour assurer sa garde n’étaient pas des faits nouveaux et importants susceptibles de modifier sa position.
19. Par acte du 28 septembre 2024, M. A______ a formé recours en son nom et celui de sa fille B______ contre cette décision auprès du tribunal, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour pour lui et sa fille B______. A titre préalable, il sollicitait la restitution de l’effet suspensif.
La décision querellée portait atteinte à son droit à la vie privée et familiale selon l’art. 8 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Il était père de deux filles, B______ et E______, et disposait de liens affectifs et familiaux forts avec elles. La décision de renvoi compromettait gravement ces relations.
Le 16 août 2024, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : le TPAE) avait prononcé une décision instaurant un droit de visite régulier pour sa fille E______ dans le cadre du Point rencontre de la Dôle. Les visites se déroulaient selon un calendrier défini, à raison d’une fois tous les quinze jours, les samedis de 13h45 à 14h45, pour une durée de six mois du 21 septembre 2024 au 22 mars 2025. Ces visites étaient une preuve tangible et récente de la relation qu’il entretenait avec sa fille E______ et constituaient un fait nouveau qui n’avait pas été pris en compte. E______ était encore très jeune et se trouvait dans une phase cruciale de son développement émotionnel et affectif. L’exercice du droit de visite était essentiel pour préserver et renforcer leur lien parental. Toute interruption ou réduction de la fréquence de leurs rencontres compromettait ce processus et aurait des conséquences négatives pour E______. Sa situation familiale avait ainsi changé.
Sa fille, B______, était actuellement scolarisée en classe d’orientation professionnelle au Collège F______ et s’y épanouissait pleinement. Elle avait noué de fortes amitiés depuis son arrivée et participait à plusieurs activités parascolaires, notamment sportives et artistiques.
La décision querellée ne prenait pas suffisamment en considération l’intérêt supérieur de ses filles.
Il était bien intégré en Suisse tant sur le plan professionnel que social et souhaitait faire évoluer sa situation en tant que père.
20. Le 10 octobre 2024, l’OCPM a transmis ses observations.
À titre exceptionnel, et compte tenu des prochaines visites organisées au point de rencontre avec sa fille E______, il ne s’opposait pas à la restitution de l’effet suspensif bien que le recourant fisse l’objet d’une décision de renvoi définitive et exécutoire.
Au fond, le recourant se fondait une nouvelle fois, pour l’essentiel, sur sa relation avec sa fille E______, se prévalant de la protection accordée par l’art. 8 CEDH. Toutefois, en l’état du dossier, l’existence de liens affectifs entre père et fille n’étaient pas prouvés, et ni par ailleurs l’existence d’une relation économique dans le sens de la jurisprudence topique. Même si l’organisation des visites avec sa fille pourrait constituer un fait nouveau, cela n’était pas à ce stade suffisamment important pour permettre à lui seule d’entrer en matière sur sa requête.
21. Par décision du 16 octobre 2024 (DITAI/513/2024), le tribunal a admis la demande d’effet suspensif.
22. Le 15 novembre 2024, le recourant a répliqué, persistant dans ses conclusions et sollicitant pour le surplus que des mesures temporaires lui soit accordées pour que ses visites avec E______ soient prolongées ou assouplies.
Le lien affectif entre un parent et son enfant n’était pas toujours quantifiable par des preuves ou des documents juridiques, il se manifestait par le contact et le temps passé ensemble. Il était donc disproportionné d’exiger des preuves documentées de liens affectifs.
Il s’était toujours efforcé d’apporter un soutien actif et constant dans la vie de ses filles, en s’assurant de leur bien-être et de leur développement personnel. Pour formaliser cet engagement, il avait adressé au TPAE, le 4 novembre 2024, une proposition de contribution financière pour sa fille E______. Il s’engageait à contribuer à hauteur de CHF 200.- par mois afin de couvrir ses besoins essentiels, malgré une curatelle d’assistance financière. En parallèle, il a exprimé sa volonté de prendre en charge à 100% l’ensemble de ses besoins. Cet engagement incluait sa participation active aux côtés du Service de protection des mineurs, de sa tante, de sa mère et de toute autre partie concernée, pour garantir le développement harmonieux de E______.
23. Par écriture spontanée du 28 novembre 2024, le recourant a confirmé les conclusions prises dans le cadre de ses écritures.
24. Par duplique du 11 décembre 2024, l’OCPM a informé le tribunal que les précisions apportées par les courriers précités, ainsi que le dossier dans son ensemble ne lui permettait pas de modifier sa position.
En effet, pour l’essentiel, il rappelait qu’en l’absence d’éléments probants au dossier permettant de prouver notamment une relation étroite et effective d’un point de vue affectif et d’un lien économique attesté avec sa fille E______, il estimait que la protection accordée par l’art. 8 CEDH ne pouvait être appliquée en l’espèce.
Il se référait pour le surplus à sa décision du 2 septembre 2024, ainsi qu’à ses précédentes observations.
25. Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
4. Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).
5. Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).
6. L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/902/2015 du 1er septembre 2015 consid. 3b). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1145/2015 du 27 octobre 2015 consid. 4b et les arrêts cités).
7. En l’occurrence, il convient d’emblée de rappeler que la décision querellée a pour seul objet le refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération formulée par le recourant le 8 août 2024. L’examen du tribunal ne portera donc que sur cette question.
8. Selon l'art. 48 al. 1 LPA, les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsque (let. a) un motif de révision au sens de l’article 80, lettres a et b, existe ou (let. b) les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision.
Selon l'art. 80 LPA, il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît (let. a) qu’un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d’une autre manière, a influencé la décision ou (let. b) que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente.
9. En vertu de l’art. 48 al. 1 let. b LPA, dont l’application est seule envisageable en l’espèce, il faut que la situation du destinataire de la décision se soit notablement modifiée depuis la première décision. Il faut entendre par là des « faits nouveaux nouveaux » (vrais nova), c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3b ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a).
L'existence d'une modification notable des circonstances au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA doit être suffisamment motivée, en ce sens que l'intéressé ne peut pas se contenter d'alléguer l'existence d'un changement notable de circonstances, mais doit expliquer en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force ; à défaut, l'autorité de première instance n'entre pas en matière et déclare la demande irrecevable (ATA/573/2013 du 28 août 2013 consid. 4). De plus, la charge de la preuve relative à l'existence d'une situation de réexamen obligatoire d'une décision en force incombe à celui qui en fait la demande, ce qui implique qu'il produise d'emblée devant l'autorité qu'il saisit les moyens de preuve destinés à établir les faits qu'il allègue (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 4).
10. Saisie d'une demande de réexamen, l'autorité doit procéder en deux étapes : elle examine d'abord la pertinence du fait nouveau invoqué, sans ouvrir d'instruction sur le fond du litige, et décide ou non d'entrer en matière. Un recours contre cette décision est ouvert, le contentieux étant limité uniquement à la question de savoir si le fait nouveau allégué doit contraindre l'autorité à réexaminer la situation (ATF 117 V 8 consid. 2a ; 109 Ib 246 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3d). Ainsi, dans la mesure où la décision attaquée ne porte que sur la question de la recevabilité de la demande de réexamen, le recourant ne peut que contester le refus d'entrer en matière que l'autorité intimée lui a opposé, mais non invoquer le fond, à savoir l'existence des conditions justifiant l'octroi d'une autorisation de séjour, des conclusions prises à cet égard n'étant pas recevables (cf. ATF 126 II 377 consid. 8d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 5 ; 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3).
Si la juridiction de recours retient la survenance d'une modification des circonstances, elle doit renvoyer le dossier à l'autorité intimée, afin que celle-ci le reconsidère (cf. Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2148), ce qui n'impliquera pas nécessairement que la décision d'origine sera modifiée (cf. Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 1429 p. 493).
Ainsi, ce n'est pas parce qu'il existe un droit à un nouvel examen de la cause que l'étranger peut d'emblée prétendre à l'octroi d'une nouvelle autorisation. Les raisons qui ont conduit l'autorité à révoquer, à ne pas prolonger ou à ne pas octroyer d'autorisation lors d'une procédure précédente ne perdent pas leur pertinence. L'autorité doit toutefois procéder à une nouvelle pesée complète des intérêts en présence, dans laquelle elle prendra notamment en compte l'écoulement du temps. Il ne s'agit cependant pas d'examiner librement les conditions posées à l'octroi d'une autorisation, comme cela serait le cas lors d'une première demande d'autorisation, mais de déterminer si les circonstances se sont modifiées dans une mesure juridiquement pertinente depuis la révocation de l'autorisation, respectivement depuis le refus de son octroi ou de sa prolongation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.3 ; 2C_176/2019 du 31 juillet 2019 consid. 7.2 ; 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.4 ; 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 ; 2C_198/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.3).
11. De jurisprudence constante, le simple écoulement du temps entre les décisions des autorités ne constitue pas en tant que tel un motif justifiant une reconsidération (arrêts du Tribunal fédéral 2C_38/2008 du 2 mai 2008 consid. 3.4 ; 2A.180/2000 du 14 août 2000 consid. 4c ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2A.271/2004 du 7 octobre 2004 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-1545/2008 du 8 juillet 2008 consid. 5 ; C-7483/2006 du 19 juin 2007 consid. 6 ; C-1798/2006 du 15 juin 2007 consid. 6 ; C-273/2006 du 25 avril 2007 consid. 5.3). Autrement dit, on ne saurait voir dans le simple écoulement du temps et dans une évolution normale de l'intégration en Suisse une modification des circonstances susceptibles d'entraîner une reconsidération de la décision incriminée (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4045/2007 du 5 décembre 2007).
12. L'art. 8 CEDH trouve application notamment lorsqu'un étranger fait valoir une relation intacte avec ses enfants bénéficiant du droit de résider en Suisse, même si ces derniers ne sont pas placés sous son autorité parentale ou sa garde du point de vue du droit de la famille (cf. ATF 120 Ib 1 consid. 1d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_881/2014 du 24 octobre 2014 consid. 3.1 ; 2C_461/2013 du 29 mai 2013 consid. 6.4).
Selon la jurisprudence, sous l'angle du droit à une vie familiale (cf. art. 8 CEDH et art. 13 Cst.), un étranger disposant d'un droit de visite sur son enfant habilité à résider en Suisse peut en principe exercer ce droit même s'il vit à l'étranger, au besoin en aménageant ses modalités quant à la fréquence et à la durée (cf. ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.2). En effet, le droit de visite d'un parent sur son enfant ne doit pas nécessairement s'exercer à un rythme bimensuel et peut également être organisé de manière à être compatible avec des séjours dans des pays différents (cf. ATF 140 I 145 consid. 3.2 et la référence citée).
Un droit plus étendu ne peut le cas échéant exister qu'en présence de liens familiaux particulièrement forts d'un point de vue affectif et économique et lorsque, en raison de la distance qui sépare le pays de résidence de l'enfant du pays d'origine de son parent, cette relation ne pourrait pratiquement pas être maintenue (ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.2).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'existence du lien affectif particulièrement fort doit être considérée comme remplie lorsque les contacts personnels sont effectivement exercés dans le cadre d'un droit de visite usuel selon les standards d'aujourd'hui (en Suisse romande, il s'agit d'un droit de visite d'un week-end toutes les deux semaines et durant la moitié des vacances ; ATF 139 I 315 consid. 2.5 ; cf. aussi ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_420/2015 du 1er octobre 2015 consid. 2.3 ; 2C_318/2013 du 5 septembre 2013 consid. 3.3.2), lorsque l'étranger détient déjà un droit de séjour en Suisse (cf. ATF 140 I 145 consid. 3.2 ; 139 I 315 consid. 2.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_881/2014 du 24 octobre 2014 consid. 3.1 ; 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 4.2 ; 2C_318/2013 du 5 septembre 2013 consid. 3.3.2). En outre, les autres conditions d'une prolongation de l'autorisation doivent être remplies. Le parent étranger doit ainsi entretenir une relation économique particulièrement forte avec son enfant et avoir fait preuve en Suisse d'un comportement irréprochable (cf. ATF 139 I 315 consid. 2.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_420/2015 du 1er octobre 2015 consid. 2.3 ; 2C_881/2014 du 24 octobre 2014 consid. 3.1 ; 2C_1153/2013 du 10 juillet 2014 consid. 2.2 ; 2C_117/2014 du 27 juin 2014 consid. 4.1.2 ; 2C_318/2013 du 5 septembre 2013 consid. 3.3.2). Le Tribunal fédéral a admis qu'il convenait de distinguer la situation dans laquelle l'étranger ne contribuait pas à l'entretien de l'enfant faute d'avoir été autorisé à travailler, de celle dans laquelle il ne faisait aucun effort pour trouver un emploi (cf. arrêts 2C_420/2015 du 1er octobre 2015 consid. 2.4 ; 2A.516/1999 du 16 février 2000 consid. 4 bb), cette exigence devant rester dans l'ordre du possible et du raisonnable (cf. arrêts 2C_420/2015 du 1er octobre 2015 consid. 2.4 ; 2C_1125/2014 du 9 septembre 2015 consid. 4.6.2).
Selon la jurisprudence, c'est seulement à ces conditions que l'intérêt privé du parent étranger à demeurer en Suisse peut l'emporter sur l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_881/2014 du 24 octobre 2014 consid. 3.1 ; 2C_461/2013 du 29 mai 2013 consid. 6.4 ; 2C_1031/2011 du 22 mars 2012 consid. 4.1.4)).
Dans la pesée des intérêts, il faut par ailleurs tenir compte de l'intérêt fondamental de l'enfant à pouvoir grandir en jouissant d'un contact étroit avec ses deux parents (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_523/2016 du 14 novembre 2016 consid. 5.2 ; 2C_516/2015 du 28 décembre 2015 consid. 4.2 et les références citées), ainsi que l'exige l'art. 3 de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107). Les dispositions de la convention ne font toutefois pas de l'intérêt de l'enfant un critère exclusif, mais un élément d'appréciation dont l'autorité doit tenir compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (cf. ATF 139 I 315 consid. 2.4 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_523/2016 du 14 novembre 2016 consid. 5.2).
13. En l’espèce, le recourant se prévaut, à titre de faits nouveaux, de l’instauration d’un droit de visite régulier pour sa fille E______ et de l’épanouissement scolaire et social de sa fille B______.
Concernant l’établissement d’un droit de visite pour sa fille E______, il y a lieu de constater que, conformément à la jurisprudence mentionnée ci-dessous, le recourant ne peut se prévaloir de sa relation avec sa fille E______ pour en déduire un droit à séjourner en Suisse sur la base de l’art. 8 CEDH. En effet, dès lors que l’instauration du droit de visite n’a commencé que le 21 septembre 2024, l’existence de liens affectifs entre père et fille ne sont pas suffisamment prouvés. S’agissant des liens économiques du recourant avec sa fille E______, le précité n’a fait qu’alléguer, dans la présente procédure, sa proposition de verser un montant mensuel de CHF 200.- pour sa fille, mais n’a nullement démontré qu’il avait concrétisé cette proposition. En tout état, quand bien même ce serait le cas, une telle contribution, extrêmement limitée, ne saurait conduire à admettre une évolution significative de sa relation économique avec sa fille E______.
Le tribunal observe à cet égard que la chambre administrative, dans son ATA/98/2024 (consid. 3.4), avait déjà examiné cette question, considérant que le recourant ne pouvait rien tirer de l’établissement de sa paternité sur l’enfant E______, intervenu à la suite de la reconnaissance effectuée le 20 juin 2023, du point de vue de l’art. 8 CEDH et de l’ALCP, étant donné qu’il ne disposait d’aucun droit de garde sur sa fille, comme il l’avait indiqué, et qu’il n’alléguait pas l’existence d’un lien économique et affectif particulièrement fort avec celle-ci.
De ce fait, quand bien même la mise en place d’un droit de visite sur sa fille E______, au demeurant relativement restreint, peut être considéré comme un fait nouveau, celui-ci ne saurait être considéré comme suffisamment important pour justifier une entrée en matière sur une demande de reconsidération.
Concernant l’épanouissement scolaire et social de sa fille B______, celui-ci résulte avant tout de l'écoulement du temps et du non-respect de la décision de renvoi du 6 octobre 2020. Le recourant ne s’est pas non plus conformé à la décision de l’OCPM du 5 septembre 2022, refusant d’entrer en matière sur sa demande de reconsidération, également exécutoire. Dès lors, considérer l’épanouissement scolaire et social de sa fille comme un fait nouveau et important reviendrait à récompenser le recourant pour son obstination à violer la loi et les décisions administratives et judiciaires, ce qui ne peut être toléré.
En conséquence, c’est à bon droit que l'autorité intimée a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération du 8 août 2024, de sorte que l'examen du litige s'arrête à ce constat, conformément aux principes rappelés ci-dessus.
14. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté et la décision confirmée.
15. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, pris conjointement et solidairement, qui succombe est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500 ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
16. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 28 septembre 2024 par Monsieur A______, agissant en son nom et celui de son enfant mineure, B______, contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 2 septembre 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge de Monsieur A______, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Sophie CORNIOLEY BERGER
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |