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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3480/2023

JTAPI/259/2024 du 22.03.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Normes : LEI.42; LEI.64.al1.letc; CEPH.8; LEI.30.al1.letb; OASA.31; LEI.83
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3480/2023

JTAPI/259/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 mars 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1999, est ressortissant du Burkina Faso.

Il est arrivé à Genève le 8 août 2022, au bénéfice d'un visa pour visite familiale délivré par la Belgique, valable du 1er août au 14 novembre 2022.

2.             En date du 2 novembre 2022, il a déposé auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) une demande d'autorisation de séjour au titre de regroupement familial pour vivre auprès de son père Monsieur B______, ressortissant suisse.

Avant de venir en Suisse, il avait toujours vécu au Burkina Faso où il avait été élevé par sa grand-mère paternelle, laquelle était décédée. Il souhaitait rejoindre son père avec qui il était resté en contact ainsi qu'avec ses demi-sœurs qui vivaient à Genève. Depuis le décès de sa grand-mère, il vivait seul et n'avait plus vraiment de famille proche dans son pays. Sa famille se trouvait désormais uniquement en Suisse, à savoir son père, ses sœurs et son petit frère.

Par ailleurs, la situation se dégradait au Burkina Faso en raison de la présence djihadiste sur le territoire, de l'insécurité qui en découlait et des difficultés depuis le premier coup d'État en janvier 2022.

Il souhaitait ainsi vivre dans un environnement sûr, auprès des siens, sur qui il pourrait compter jusqu'à ce qu'il trouve un travail et devienne autonome.

3.             Par courrier du 26 juillet 2023, l'OCPM lui a fait part de son intention de refuser de lui octroyer une autorisation de séjour, lui impartissant un délai de trente jours pour faire valoir ses observations.

4.             L'intéressé n'a pas répondu dans le délai imparti.

5.             Par décision du 22 septembre 2023, l'OCPM a refusé d'octroyer à M. A______ l'autorisation de séjour sollicitée et a prononcé son renvoi de Suisse.

Âgé de plus de 18 ans au moment de la demande, il ne remplissait pas les conditions de l'art. 42 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). De plus, il ne disposait pas d'un titre d'un séjour délivré par un pays avec lequel la Suisse avait conclu un accord sur la libre circulation des personnes, de sorte que l'alinéa 2 de la disposition précitée ne lui était pas applicable non plus.

Il ne réunissait pas non plus les conditions restrictives du cas de rigueur. Son séjour en Suisse depuis le 8 août 2022 était très court et il n'avait ainsi pas créé des attaches avec la Suisse telles qu'un retour dans son pays ne pourrait pas être exigé.

Concernant la situation actuelle au Burkina Faso, la situation du recourant ne se distinguait pas de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités dans ce pays. En outre, le simple fait de vouloir vivre auprès de son père et de ses demi-sœurs ne constituait pas un motif permettant l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur dont les conditions d'octroi, non remplies en l'espèce, étaient très restrictives.

Enfin, le dossier ne faisait pas apparaître que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

6.             Par acte du 17 octobre 2023, adressé à l'OCPM, M. A______ a contesté la décision précitée, concluant à son annulation. L'OCPM a transmis cet acte au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) comme objet de sa compétence.

Le recourant souhaitait pouvoir vivre en Suisse où il avait toute sa famille et où il pourrait améliorer sa qualité de vie grâce à son travail.

La décision litigieuse contrevenait à l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

Enfin, un renvoi dans son pays qui était en guerre et où il n'avait plus personne aurait de graves répercussions pour lui.

7.             Le 19 décembre 2023, l'OCPM a transmis ses observations au tribunal, accompagné de son dossier. Il concluait au rejet du recours.

Les conditions de l'octroi d'une autorisation de séjour, dans le cadre du regroupement familial auprès de son père n'était pas réalisées dès lors que le recourant était majeur lors du dépôt de sa demande.

Il était né au Burkina Faso où il avait toujours vécu avec sa grand-mère (décédée aujourd'hui). Le fait que son père se trouvait en Suisse n'était pas relevant dans la mesure où ce dernier avait accepté de quitter le Burkina Faso pour s'installer en Suisse et y fonder une famille. Au vu de l'âge du recourant, celui-ci était apte à se prendre en charge de manière autonome dans son pays et pourrait si nécessaire, compter sur le soutien financier de son père.

S'agissant de l'argument selon lequel le contexte politique au Burkina Faso, en raison de la présence de groupes djihadistes sur le territoire et de l'insécurité qui en découlait, et sans minimiser la situation du recourant, ne permettait pas à lui seul, de conclure à un cas de rigueur. En tout état de cause, le recourant n'avait pas démontré qu'il serait personnellement et concrètement en danger dans son pays, lequel ne connaissait pas une situation de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée qui permettrait d'emblée – et indépendamment des circonstances du cas d'espèce – de présumer à propos de tous les ressortissants du pays, l'existence d'une mise en danger concrète au sens de l'art. 83 al. 4 LEI.

8.             En date du 9 janvier 2024, le recourant a répliqué.

Après le décès de sa grand-mère, sa vie était devenue un véritable calvaire, de sorte qu'il lui avait été impossible de poursuivre ses études même si son père lui payait ses frais d'écolage.

Après un passage au Burkina Faso, son père avait compris que ses conditions de vie étaient inacceptables. Il était très malade. De retour en Suisse, son père avait entamé les démarches pour le faire venir en Suisse en sollicitant un visa de courte durée.

Pour le surplus, il a insisté sur son souhait d'avoir lui aussi la possibilité d'entreprendre une formation afin d'assurer son avenir, et à l'instar de ses deux sœurs, suivre l'exemple de son père qui avait toujours travaillé et parallèlement, obtenu sa maturité en suivant les cours du soir.

S'agissant de la situation au Burkina Faso, il soulignait que des milliers d'écoles étaient fermées et qu'il avait dû quitter la région où il habitait. La seule possibilité pour les jeunes de son âge était d'aller au front après une brève formation de six mois.

Enfin, il avait de très bonnes relations avec ses frère et sœurs à Genève et n'avait aucun membre de sa famille directe au Burkina Faso. Il n'y avait aucune ressource financière et retourner dans son pays reviendrait à faire de lui un assisté perpétuel à la charge de son père.

9.             Le 2 février 2024, l'OCPM a indiqué au tribunal qu'il n'avait pas d'observation complémentaire à formuler.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

6.             L'objet du litige concerne le refus de l'autorité intimée de délivrer une autorisation de séjour pour regroupement familial en faveur du recourant.

7.             Selon l'art. 42 LEI, le conjoint d’un ressortissant suisse ainsi que ses enfants célibataires de moins de 18 ans ont droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui.

8.             En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant avait atteint l'âge de 22 ans révolu lors du dépôt de la demande d'autorisation de regroupement familial en sa faveur. Ainsi que cela ressort du texte clair de l'art. 42 al. 1 LEI (ainsi d'ailleurs que des art. 43 al. 1, 44 al. 1 et 45 al. 1 en ce qui concerne les demandes déposées par des personnes étrangères résidant en Suisse), le regroupement familial concerne, outre le conjoint, les enfants célibataires de moins de 18 ans. Autrement dit, il n'existe pas de possibilité de regroupement familial, sous l'angle de la LEI, pour des enfants de plus de 18 ans.

9.             Le recourant se prévaut également de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101)

10.         Sous l’angle du droit au respect de la vie familiale, d'après une jurisprudence constante, les relations visées par l'art. 8 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1 p. 12).

11.         Le Tribunal fédéral admet aussi qu’un étranger puisse, exceptionnellement et à des conditions restrictives, déduire un droit à une autorisation de séjour de l’art. 8 par. 1 CEDH s’il existe un rapport de dépendance particulier entre lui et un proche parent (hors famille nucléaire) au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse (nationalité suisse ou autorisation d’établissement), par exemple en raison d’une maladie ou d’un handicap (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_71/2022 du 26 janvier 2022 consid. 4.2). Le handicap ou la maladie grave doivent nécessiter une présence, une surveillance, des soins et une attention que seuls les proches parents sont généralement susceptibles d'assumer et de prodiguer (arrêt du Tribunal fédéral 2C_614/2013 du 28 mars 2014 consid. 3.1).

La simple dépendance financière n'entre pas dans les hypothèses citées par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 2022 consid. 3.2.1 et les références citées). Il en va de même des difficultés économiques ou d'autres problèmes d'organisation qui ne rendent en principe pas irremplaçable l'assistance de proches parents et ne fondent donc pas un droit à se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour obtenir le droit de séjourner en Suisse (cf. arrêts 2C_155/2019 du 14 mars 2020 consid. 7.5 ; 2D_10/2018 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; 2C_817/2010 du 24 mars 2011 et les références citées).

12.         En l’espèce, le recourant est aujourd'hui âgé d'un peu plus de 24 ans. Or, on peut généralement présumer qu'à partir de 18 ans, un jeune adulte est en mesure de vivre de manière indépendante, sauf circonstances particulières, non réalisées en l'espèce (cf. ATF 137 I 154 consid. 3.4.2 ; arrêt 2C_546/2013 du 5 décembre 2013 consid. 4.1). En effet, il n’a pas été démontré ni même allégué qu'il souffrirait d'un handicap physique ou mental, ou d'une maladie grave qui - en sus - nécessiterait une attention et des soins que seuls son père et les autres membres de sa famille résidant en Suisse seraient en mesure de lui prodiguer.

S’il est certes compréhensible que le recourant soit affecté par la situation, il n’en demeure pas moins que celui-ci ne satisfait manifestement pas aux critères restrictifs de dépendance requis par la jurisprudence pour pouvoir déduire un droit à séjourner en Suisse de l'art. 8 CEDH.

Le recourant ne saurait dès lors se fonder sur l'art. 8 CEDH pour prétendre à l'octroi d'une autorisation de séjour à titre de regroupement familial. Le grief sera ainsi écarté.

13.         Reste encore à examiner si la situation du recourant remplit les critères relatifs à un cas de rigueur.

14.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

15.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1).

16.         Ainsi, l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

17.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid. 4.6 et les références citées).

18.         Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur lorsque l’intéressé démontre souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. (ATF 128 II 200 consid. 5.3).

19.         Une grave maladie (à supposer qu’elle ne puisse pas être soignée dans le pays d’origine) ne saurait cependant justifier à elle seule la reconnaissance d’un cas de rigueur, l’aspect médical ne constituant que l’un des éléments, parmi d’autres à prendre en considération (ATF 128 II 200 consid. 5.1 à 5.4). Ainsi, en l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, le facteur médical ne saurait constituer un élément suffisant pour justifier la reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité.

20.         Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 83 al. 4 LEI et un individu ne pouvant se prévaloir que d’arguments d’ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d’origine et souffrant de la même maladie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4125/206 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1).

21.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). Sauf prescription particulière de la loi ou d'un traité international, l'étranger n'a donc en principe aucun droit à la délivrance et au renouvellement d'un permis de séjour pour cas de rigueur. L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties. Le contrôle de l'usage du pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée par le tribunal de céans doit donc s'exercer avec retenue et se limiter au cas de l'excès ou de l'abus du pouvoir d'appréciation. Le tribunal ne saurait ainsi substituer sa propre appréciation des preuves à celle de l'autorité intimé en l'absence d'une appréciation manifestement contraire au droit, voire choquante.

22.         En l'espèce, le recourant qui est arrivé en Suisse en août 2022 et qui n'y a jamais vécu par le passé ne peut se prévaloir d'un long séjour en Suisse et partant d'une intégration particulièrement réussie. S'il a évoqué des problèmes de santé survenus alors qu'il vivait dans son pays, il n'a apporté aucun élément déterminant à ce sujet.

Ainsi, au vu de ces circonstances, l'appréciation que l'autorité intimée a faite de la situation du recourant sous l'angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA apparaît parfaitement admissible. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit respecter la latitude de jugement conférée à l'OCPM, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA). Le grief est écarté.

23.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, l’autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée.

Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5268/2008 du 1er juin 2011 consid. 10 ; C-406/2006 du 2 septembre 2008 consid. 8 et la référence citée ; ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 6b).

En l’occurrence, dès lors qu’il a refusé de délivrer une autorisation de séjour à la recourante, l’OCPM devait en soi ordonner son renvoi de Suisse en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI.

24.         Reste toutefois à déterminer si l'exécution de cette mesure est possible, licite et peut être raisonnablement exigée au sens de l'art. 83 al. 4 LEI.

25.         L’exécution du renvoi n’est pas possible lorsque l’intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l’un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n’est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

Cette disposition s’applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu’ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient les situations de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, et ensuite aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu’elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin (cf. ATAF 2014/26 consid. 7.3 à 7.10, ATAF 2011/50 consid. 8.1 et 8.3 et la jurisprudence citée).

26.         S'agissant d'un ressortissant burkinabé, le Tribunal administratif fédéral (ci-après TAF) a eu l'occasion de juger le 18 février 2020 (arrêt E-5596/2027) que malgré la recrudescence d’attaques terroristes à caractère djihadiste et de violences intercommunautaires, principalement dans le Nord et l’Est du pays (cf. arrêt de céans E-7114/2017 du 9 mai 2019, consid. 9.3.2 et les références citées ; cf. également site internet du Département fédéral des affaires étrangères www.eda.admin.ch > Conseils aux voyageurs & représentations > Burkina Faso > Conseils aux voyageurs – Burkina Faso [site internet consulté le 18 février 2020]), le Burkina Faso ne connaît pas une situation de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, qui permettrait d’emblée – et indépendamment des circonstances du cas d’espèce – de présumer, à propos de tous les ressortissants du pays, l’existence d’une mise en danger concrète au sens de l’art. 83 al. 4 LEI.

Il ressort par ailleurs de la consultation du site internet du Département fédéral des affaires étrangères www.eda.admin.ch > Conseils aux voyageurs & représentations > Burkina Faso > Conseils aux voyageurs – Burkina Faso [site internet consulté le 20 mars 2024] que suite au coup d’État militaire du 30 septembre 2022, un gouvernement de transition a été installé. « En septembre 2023, une nouvelle tentative de coup d'État a eu lieu. La situation politique reste volatile; des marches de soutien ou de protestation ainsi que des manifestations, parfois dirigées contre les intérêts étrangers, ont lieu régulièrement. Des débordements ainsi que des heurts entre manifestants et forces de l’ordre se produisent, entraînant parfois la mort. Des blocages de connexions routières importantes sont fréquents, y compris dans les grandes villes et la capitale Ouagadougou. Des groupes islamistes et d'autres groupes armés contrôlent une grande partie du territoire national. Des affrontements armés entre ces groupes et les forces de sécurité, de même que des attaques contre des installations militaires et policières, se produisent dans tout le pays. Le nombre d’engins explosifs improvisés le long des grands axes routiers a augmenté. Les actes de violence commis par des groupes terroristes et criminels font un grand nombre de victimes et de blessés parmi les civils. Parmi les cibles potentielles d’attaques terroristes figurent également les infrastructures étatiques, touristiques et étrangères ainsi que les grands rassemblements comme, par exemple, les marchés animés, les centres commerciaux, les transports publics, les écoles, les évènements culturels, les grands hôtels internationaux et les restaurants populaires. Des villages entiers sont également attaqués ».

27.         Ainsi, concernant la situation générale au Burkina Faso et même si elle semble avoir empiré en 2023, il n'y a pas lieu de se départir de la position du TAF présentée ci-dessus.

Quant à la situation particulière du recourant, celui-ci se contente de décrire la situation générale dans le pays comme potentiellement dangereuse. Il n'allègue aucunement constituer une cible particulière. Pour le surplus et comme relevé plus haut, s'il évoque des problèmes de santé survenus par le passé alors qu'il vivait dans son pays, il ne fournit aucune allégation précise et déterminante à ce sujet.

Il résulte de ce qui précède que l'on ne peut pas retenir que l'exécution du renvoi du recourant serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible.

28.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

29.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

30.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 17 octobre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 22 septembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière